Los Escritos de Maria Valtorta

172. Quatrième sermon sur la Montagne :

172. Cuarto discurso de la Montaña:

172.1

Le sermon sur la montagne continue.

Au même endroit et à la même heure. La foule est la même – à l’exception du Romain –, peut-être même encore plus nombreuse car il y en a jusqu’au début des sentiers qui descendent vers la vallée.

Jésus parle :

« Une des erreurs fréquentes chez l’homme, c’est le manque d’honnêteté, même envers lui-même. Comme l’homme a du mal à être sincère et honnête, il s’est façonné un mors pour s’obliger à suivre la voie qu’il a décidée. C’est d’ailleurs un mors que, tel un cheval indompté, il change facilement de place pour modifier à son gré sa marche, ou qu’il enlève complètement, agissant à sa fantaisie sans plus se soucier des reproches qu’il peut recevoir de Dieu, des hommes et de sa propre conscience. Ce mors, c’est le serment. Mais le serment n’est pas nécessaire entre gens honnêtes, et Dieu, en ce qui le concerne, ne vous l’a pas enseigné. Bien au contraire, il vous a fait dire : “ Ne portez pas de faux témoignages ” sans rien ajouter d’autre. Car l’homme devrait être franc sans qu’il soit besoin d’autre chose que de la fidélité à sa parole.

Quand le Deutéronome parle des vœux, même des vœux venant d’un cœur qui se croit lié à Dieu ou par sentiment de besoin ou par sentiment de reconnaissance, il dit[1] : “ Ce qui sort de ta bouche, tiens-le, et exécute le vœu que tu as fait volontairement à Yahvé ton Dieu, de ta propre bouche. ” On parle toujours de parole donnée, sans autre chose que la parole.

Se sentir le besoin de faire un serment prouve que l’on n’est pas sûr de soi ni de l’opinion des autres sur soi. Et celui qui exige un serment se défie de la sincérité et de l’honnêteté de celui qui le prononce. Comme vous le voyez, cette habitude du serment est une conséquence de la malhonnêteté de l’homme. Et c’est une honte pour l’homme. Une double honte, même, car l’homme n’est même pas fidèle à cette chose honteuse qu’est le serment : se moquant de Dieu avec la même facilité qu’il se moque du prochain, il arrive à se parjurer avec la plus grande assurance et dans la plus grande tranquillité d’esprit.

172.2

Peut-il y avoir un être plus abject que le parjure ? Il utilise souvent une formule sacrée – donc demande la complicité et la garantie de Dieu – ou bien il invoque ce qui lui est le plus cher : son père, sa mère, son épouse, ses enfants, ses défunts, sa vie même et ses organes les plus précieux, qu’il appelle à l’appui de ses mensonges. Il amène ainsi son prochain à se fier à lui. Il le trompe donc. C’est un sacrilège, un voleur, un traître, un homicide. De qui ? Mais de Dieu, puisqu’il mêle la Vérité à l’infamie de ses mensonges et le bafoue en le bravant : “ Frappe-moi, démens-moi si tu peux. Tu es là-bas, moi je suis ici et je m’en ris. ”

Oh oui ! Riez, riez bien, vous les menteurs et les railleurs ! Mais viendra le moment où vous ne rirez plus, quand Celui à qui est remis tout pouvoir vous apparaîtra, majestueux et terrible ; par son seul aspect il vous terrifiera et vous foudroiera de son seul regard, avant même que sa voix ne vous précipite vers votre destin éternel en vous marquant de sa malédiction.

C’est un voleur, parce qu’il s’approprie une estime qu’il ne mérite pas. Ebranlé par son serment, son prochain la lui accorde et ce serpent s’en fait un ornement en se montrant pour ce qu’il n’est pas. C’est un traître, car par son serment il promet quelque chose qu’il ne veut pas tenir. C’est un homicide parce que, soit il détruit l’honneur de son semblable en lui ôtant par son faux serment l’estime du prochain, soit il tue sa propre âme, car le parjure est un pécheur abject aux yeux de Dieu qui voit la vérité même si personne d’autre ne la voit. On ne trompe pas Dieu par des paroles menteuses ni par une conduite hypocrite. Lui, il voit. Pas un seul instant, il ne perd chacun de vue. Il n’est pas de forteresse assez bien gardée ni de souterrain assez profond où ne puisse pénétrer son regard. Même en votre intérieur, la forteresse que chaque homme a autour de son cœur, Dieu pénètre. Et il ne vous juge pas sur vos serments mais sur vos actes.

172.3

Voilà pourquoi je substitue un autre ordre[2] à celui qui vous a été donné, quand le serment fut mis en usage pour mettre un frein au mensonge et à la facilité de manquer à la parole donnée. Je ne dis pas comme les anciens : “ Ne vous parjurez pas, mais soyez fidèles à vos serments ”, mais : “ Ne faites jamais de serments. ” Ni au nom du Ciel qui est le trône de Dieu, ni par la terre qui est l’escabeau de ses pieds, ni par Jérusalem et son Temple qui sont la cité du grand Roi et la maison du Seigneur notre Dieu.

Ne jurez pas sur les tombes des trépassés ni sur leurs âmes. Les tombes sont pleines des restes de ce qui est inférieur dans l’homme et de ce qui lui est commun avec les animaux. Laissez les âmes dans leurs demeures. Faites qu’elles ne souffrent pas et ne soient pas horrifiées s’il s’agit des âmes de justes qui sont déjà dans une préconnaissance de Dieu. Et parce qu’il s’agit d’une préconnaissance – c’est-à-dire une connaissance partielle car jusqu’au moment de la Rédemption ils ne posséderont pas Dieu dans la plénitude de sa splendeur –, ils ne peuvent pas ne pas souffrir de vous voir pécheurs. Et, s’ils ne sont pas justes, n’augmentez pas leur tourment en leur rappelant leur péché par le vôtre. Laissez les morts saints dans la paix et ceux qui ne le sont pas dans leur peine. N’enlevez rien aux premiers, n’ajoutez rien aux seconds. Pourquoi faire appel aux morts ? Ils ne peuvent parler. Les saints parce que la charité le leur défend : ils devraient trop souvent vous démentir. Les damnés parce que l’enfer n’ouvre pas ses portes et que les damnés n’ouvrent la bouche que pour maudire, et parce que toute voix est étouffée par la haine de Satan et des satans – car les damnés sont des satans –.

Ne jurez pas sur la tête de votre père ou de votre mère, ni sur celle de votre femme ou de vos enfants innocents. Vous n’en avez pas le droit. Seraient-ils donc de l’argent ou une marchandise ? Seraient-ils une signature sur un papier ? Ils sont à la fois plus et moins que cela. Ils sont le sang et la chair de ton sang, homme, mais ce sont aussi des créatures libres et tu ne peux t’en servir comme des esclaves pour garantir un faux que tu as fait. Et ils sont moins que ta propre signature car tu es intelligent, libre et adulte et non pas un interdit ou un enfant qui n’est pas au courant de ce qui se fait et doit donc être représenté par ses parents. Tu es ce que tu es : un homme doué de raison, par conséquent tu es responsable de tes actes et tu dois agir par toi-même, en garantissant tes actes et tes paroles par ton honnêteté et ta sincérité personnelles, l’estime que tu as su toi-même éveiller chez autrui, et non pas l’honnêteté, la sincérité de tes parents et l’estime qu’ils ont su inspirer. Les pères sont-ils responsables de leurs enfants ? Oui, tant qu’ils sont mineurs. Ensuite, chacun est responsable de lui-même. Les enfants des justes ne sont pas toujours des justes, et une femme sainte n’est pas toujours mariée à un homme saint. Alors pourquoi fonder votre garantie sur la justice de votre conjoint ? Pareillement, des enfants saints peuvent naître d’un pécheur ; tant qu’ils sont innocents, ils sont tous saints. Alors pourquoi invoquer un être pur comme garantie de cet acte impur qu’est le serment qu’on n’a pas l’intention de tenir ?

Ne jurez pas non plus sur votre tête, sur vos yeux, votre langue et vos mains. Vous n’en avez pas le droit. Tout ce que vous avez appartient à Dieu. Vous n’êtes que les gardiens temporaires, les banquiers des trésors moraux ou matériels que Dieu vous a accordés. Dans ce cas, pourquoi disposer de ce qui n’est pas à vous ? Pouvez-vous ajouter un seul cheveu à votre tête ou en changer la couleur ? Et, si cela vous est impossible, pourquoi garantir votre serment par votre vue, votre parole, la liberté de vos membres ? Ne bravez pas Dieu. Il pourrait vous prendre au mot et assécher vos yeux, de même qu’il peut rendre secs les arbres de vos vergers, vous enlever vos enfants ou vous arracher vos maisons, pour vous rappeler que le Seigneur, c’est lui, et vous ses sujets, et que maudit est celui qui s’idolâtre au point de se considérer comme supérieur à Dieu en le bravant par le mensonge.

172.4

Que votre oui soit oui, que votre non soit non, rien de plus. Tout ce que vous y ajoutez vous est suggéré par le Malin, qui se gausse ensuite de vous car, comme vous ne pouvez tout retenir, vous tombez dans le mensonge, si bien qu’on vous bafoue et vous vous faites une réputation de menteurs.

De la sincérité, mes enfants, en parole comme dans la prière. Ne faites pas comme les hypocrites quand ils prient : ils aiment à rester debout dans les synagogues ou aux coins des places, bien en vue des hommes, pour être loués comme hommes pieux et justes ; mais quand ils sont en famille, ils offensent Dieu et leur prochain. Ne voyez-vous pas, à la réflexion, que c’est là une sorte de parjure ? pourquoi vouloir soutenir ce qui n’est pas vrai dans le seul but de conquérir une estime que vous ne méritez pas ? La prière hypocrite vise à prétendre : “ En vérité, moi, je suis un saint. Je le jure aux yeux de ceux qui me voient prier et ne peuvent nier qu’ils me le voient faire. ” La prière faite dans cette intention n’est qu’un voile dont on recouvre une duplicité réelle, et elle devient blasphème.

Laissez à Dieu le soin de vous proclamer saints, et agissez de telle sorte que toute votre vie crie pour vous : “ Voici un serviteur de Dieu. ” Mais vous, par charité pour vous-mêmes, gardez le silence. Poussés par l’orgueil, ne faites pas de votre langue un objet de scandale aux yeux des anges. Il vaudrait mieux devenir muets à l’instant, si vous n’avez pas la force de commander à votre orgueil et à votre langue qui vous poussent à vous proclamer vous-mêmes justes et agréables à Dieu. Laissez aux hommes orgueilleux et faux cette pauvre gloire ! Laissez-leur cette récompense éphémère. Pauvre récompense ! Mais c’est celle qu’ils veulent et ils n’en auront pas d’autre, car ils ne peuvent en avoir qu’une : soit la vraie récompense qui vient du Ciel et qui est éternelle et juste, soit cette fausse récompense qui vient de la terre et dure autant que la vie de l’homme – sinon moins – ; mais comme elle est injuste, il faut ensuite la payer, après la vie, par une très mortifiante punition.

172.5

Ecoutez comment vous devez prier : par vos lèvres, par votre travail, par tout votre être, sous l’impulsion d’un cœur qui aime Dieu, oui, en voyant en lui un Père, mais se souvient également qu’il est le Créateur et vous-même une créature, et qui se garde toujours avec un respectueux amour en présence de Dieu, qu’il prie ou s’occupe d’affaires, qu’il marche ou se repose, qu’il reçoive un salaire ou en fasse bénéficier un autre.

Sous l’impulsion du cœur, ai-je dit. C’est la qualité première et essentielle, car tout vient du cœur. La pensée, la parole, le regard, les actes sont le reflet du cœur. C’est de son cœur que le juste tire le bien, et plus il en tire, plus il en trouve, car le bien que l’on fait donne naissance à un bien nouveau. C’est comme le sang qui se renouvelle dans le circuit des veines et revient au cœur toujours enrichi d’éléments nouveaux venant de l’oxygène qu’il a absorbé ou des sucs des aliments qu’il a assimilés. L’homme pervers, au contraire, ne peut tirer de son cœur ténébreux, rempli de mensonge et de poison, que mensonge et poison qui se développent toujours plus, fortifiés qu’ils sont par les fautes qu’ils accumulent comme s’accumulent sur l’homme bon les bénédictions de Dieu. Croyez bien, en effet, que c’est le trop-plein du cœur qui déborde des lèvres et se révèle dans les actes.

Faites-vous un cœur humble et pur, confiant, sincère. Aimez Dieu de l’amour pudique d’une vierge pour son époux. En vérité, je vous dis que toute âme est une vierge, mariée à l’éternel Aimant, à notre Seigneur Dieu. Cette terre est le temps des fiançailles dont l’ange donné à tout homme comme gardien est le paranymphe spirituel ; toutes les heures, toutes les contingences de la vie, sont autant de servantes qui préparent le trousseau nuptial. L’heure de la mort, c’est l’heure de l’accomplissement des noces : c’est à ce moment-là que viennent la connaissance, l’étreinte, la fusion, et, parée de son vêtement d’épouse accomplie, l’âme peut enlever son voile et se jeter dans les bras de son Dieu sans que cet amour de l’Epoux puisse scandaliser les autres.

Mais, pour le moment, vous êtes encore des âmes sacrifiées dans les liens des fiançailles avec Dieu. Quand vous voulez parler à l’Epoux, entrez dans la paix de votre demeure et surtout dans la paix de votre demeure intérieure ; tel un ange de chair assisté par votre ange gardien, adressez-vous alors au Roi des anges. Laissez dehors tout ce qui appartient au monde : la manie de vous faire remarquer et celle d’édifier, les scrupules des longues prières pleines de paroles, monotones, tièdes et sans amour.

172.6

Pour l’amour de Dieu ! Débarrassez-vous de l’habitude de mesurer votre temps de prière. En vérité, certaines personnes passent de nombreuses heures en un monologue que seules les lèvres prononcent. C’est un vrai soliloque car l’ange gardien lui-même n’écoute pas, tant c’est une rumeur vaine à laquelle il essaie de remédier en se plongeant dans une ardente oraison pour le sot dont il a la garde. En vérité, certains n’emploieraient pas ces heures d’une autre manière, même si Dieu apparaissait pour leur dire : “ Le salut du monde exige que vous abandonniez ce bavardage sans âme pour aller en toute simplicité puiser de l’eau à un puits et arroser le sol par amour pour moi et pour vos semblables. ” En vérité, il y a des personnes qui croient leur monologue plus important que l’accueil courtois d’un visiteur ou le secours charitable apporté à un nécessiteux. Ces âmes sont tombées dans l’idolâtrie de la prière.

La prière est un acte d’amour. On peut aimer aussi bien en faisant le pain qu’en priant, en assistant un malade qu’en méditant, en vaquant à ses tâches ménagères qu’en faisant un pèlerinage au Temple, en sacrifiant jusqu’à nos justes désirs de nous recueillir dans le Seigneur qu’en sacrifiant un agneau. Il suffit d’imprégner d’amour tout son être et toute son activité. N’ayez pas peur ! Le Père voit. Le Père comprend. Le Père écoute. Le Père accorde ce qu’il faut. Que de grâces n’accorde-t-il pas pour un seul soupir d’amour vrai, parfait ! Quelle abondance de grâces pour un sacrifice intime fait avec amour ! Ne ressemblez pas aux païens. Dieu n’a pas besoin que vous lui disiez ce qu’il doit faire devant vos besoins. Cela, les païens peuvent le dire à leurs idoles qui ne peuvent entendre. Mais n’agissez pas ainsi avec Dieu, avec le Dieu vrai, spirituel, qui n’est pas seulement Dieu et Roi, mais qui est aussi votre Père et qui sait, avant même que vous ne le lui demandiez, ce dont vous avez besoin.

172.7

Demandez et l’on vous donnera. Cherchez et vous trouverez. Frappez et l’on vous ouvrira. Car quiconque demande reçoit, qui cherche trouve et qui frappe à la porte la voit s’ouvrir. Quand un enfant vous tend sa petite main en disant : “ Père, j’ai faim ”, lui donnez-vous une pierre ? Lui donnez-vous un serpent s’il demande un poisson ? Non, au contraire : au pain et au poisson vous ajoutez une caresse et une bénédiction, car il est doux à un père de nourrir son enfant et de le voir sourire de bonheur. Si donc vous, dont le cœur est imparfait, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants par le seul amour naturel que l’animal aussi a pour ses petits, combien plus votre Père qui est dans les Cieux accordera-t-il à ceux qui le lui demandent ce qui est bon et nécessaire pour leur bien. N’ayez pas peur de demander et n’ayez pas peur de ne pas obtenir !

Je vous mets néanmoins en garde contre une erreur dans laquelle on tombe facilement : n’imitez pas ceux dont la foi et l’amour sont faibles, les païens de la vraie religion. En effet, parmi les croyants, il y a des païens dont la pauvre religion est un enchevêtrement de superstitions et de foi, un édifice chancelant, envahi par des plantes parasites de toute espèce, au point de s’effriter et de tomber en ruine. Ces gens faibles et païens sentent mourir leur foi s’ils ne se voient pas exaucés.

Vous, vous n’avez pas peur de demander. Et cela vous paraît juste. En effet, obtenir cette grâce ne serait pas inutile à tel moment précis. Mais la vie ne se termine pas à ce moment-là. Et ce qui est bien aujourd’hui pourrait ne pas l’être demain. Cela, vous l’ignorez, puisque vous ne connaissez que le moment présent et c’est encore une grâce de Dieu. Mais Dieu connaît aussi l’avenir. Il arrive donc souvent que, pour vous épargner une peine plus grande, il laisse une prière non exaucée.

Pendant mon année de vie publique, plus d’une fois j’ai entendu des cœurs qui gémissaient : “ Combien j’ai souffert alors, quand Dieu ne m’a pas écouté. Mais maintenant je dis : ‘ Cela valait mieux, car cette grâce m’aurait empêché d’arriver à cette heure de Dieu. ’ ” J’en ai entendu d’autres dire – et me dire – : “ Pourquoi, Seigneur, ne m’exauces-tu pas ? Tu l’accordes aux autres mais pas à moi ! ” Bien que j’aie souffert de voir souffrir, j’ai pourtant dû répondre : “ Je ne le peux pas ”, car les exaucer aurait signifié entraver leur vol vers la vie parfaite. Il arrive aussi que le Père dise : “ Je ne le peux pas. ” Ce n’est pas qu’il ne puisse accomplir l’acte immédiat. Mais il s’y refuse parce qu’il en connaît les conséquences futures.

Ecoutez : un jeune enfant souffre des intestins. Sa mère appelle le médecin et le médecin dit : “ Pour qu’il guérisse, il lui faut une diète absolue. ” L’enfant pleure, crie, supplie, paraît s’affaiblir. La mère, toujours pleine de pitié, unit ses lamentations à celles de son fils. Cette interdiction absolue lui semble être de la dureté de la part du médecin. Elle pense que ce jeûne et ces larmes peuvent nuire à son enfant. Mais le médecin reste inexorable. A la fin, il lui dit : “ Femme, moi je sais, toi tu ne sais pas. Veux-tu perdre ton enfant ou veux-tu que je le sauve ? ” La mère crie : “ Je veux qu’il vive ! ” “ Dans ce cas, poursuit le médecin, je ne peux autoriser de nourriture. Ce serait sa mort. ” C’est ainsi que, parfois, le Père parle. Vous, en mères pleines de pitié pour votre moi, vous ne voulez pas l’entendre pleurer parce qu’on vous refuse une grâce. Mais Dieu dit : “ Je ne le peux pas. Ce serait mauvais pour toi. ” Un jour viendra – si ce n’est l’éternité – où on en viendra à dire : “ Merci, mon Dieu, de ne pas avoir écouté ma sotte demande ! ”

172.8

Ce que j’ai dit pour la prière, je le dis pour le jeûne. Quand vous jeûnez, ne prenez pas un air triste comme le font les hypocrites qui intentionnellement affectent d’être épuisés pour que le monde sache et croie qu’ils jeûnent, même si ce n’est pas vrai. Eux aussi ont déjà obtenu leur récompense avec les éloges du monde, et ils n’en auront pas d’autre. Mais vous, quand vous jeûnez, ayez l’air gai, lavez-vous le visage à plusieurs eaux pour qu’il paraisse frais et lisse, oignez-vous la barbe et parfumez vos cheveux, ayez sur les lèvres le sourire de quelqu’un qui a bien déjeuné. En vérité, que ce ne soit pas tant la nourriture que l’amour qui vous soutienne ! L’homme qui jeûne par amour se nourrit d’amour. En vérité, je vous dis que le monde aura beau vous traiter de “ vaniteux ” et de “ publicains ”, votre Père verra votre héroïsme secret et vous en donnera double récompense, pour le jeûne et pour le sacrifice des éloges que vous auriez pu recevoir.

Et maintenant que votre âme a été nourrie, allez nourrir votre corps.

172.9

Que ces deux pauvres restent avec nous. Ils seront les hôtes bénis qui donneront de la saveur à notre pain. La paix soit avec vous. »

Et les deux pauvres restent. C’est une femme décharnée et un très vieil homme. Mais ils ne sont pas ensemble. Le hasard les a réunis et ils étaient restés dans un coin, abattus, tendant inutilement la main à ceux qui passaient devant eux.

Comme ils n’osent pas s’avancer, Jésus va directement à eux et les prend par la main pour les amener au centre du groupe des disciples, sous une espèce de tente que Pierre a dressée dans un coin et sous laquelle ils s’abritent peut-être la nuit et se réunissent aux heures les plus chaudes de la journée. C’est une tente faite de branchages et… de manteaux. Mais elle est utile, bien qu’elle soit si basse que Jésus et Judas, les deux plus grands, doivent se courber pour entrer.

« Voici un père et voici une sœur. Apportez ce que nous avons et, tout en prenant notre repas, nous écouterons leur histoire. »

Et Jésus sert personnellement les deux pauvres, tout honteux, et écoute leur lamentable histoire. Le vieillard est seul depuis que sa fille est partie au loin avec son mari et a oublié son père. La femme, elle aussi, est seule depuis que la fièvre a tué son mari, et de surcroît elle est malade.

« Le monde nous méprise parce que nous sommes pauvres, dit le vieillard. Je marche en demandant l’aumône pour recueillir de quoi accomplir la Pâque. J’ai quatre-vingts ans. J’ai toujours fait la Pâque et celle-ci est peut-être la dernière. Mais je veux partir sans aucun remords dans le sein d’Abraham. De la même façon que je pardonne à ma fille, j’espère être pardonné. Et je veux faire ma Pâque.

– Mais le chemin est long, père.

– Plus long est le chemin du Ciel si on n’accomplit pas le rite.

– Tu fais route tout seul ? Et si tu te sens mal en chemin ?

– L’ange de Dieu me fermera les yeux. »

Jésus caresse sa tête tremblante et blanche et il demande à la femme :

« Et toi ?

– Je recherche du travail. Si j’étais mieux nourrie, je guérirais des fièvres et si j’étais guérie, je pourrais travailler aux grains.

– Tu crois que la nourriture suffirait à te guérir ?

– Non. Il y a aussi toi…, mais je suis une pauvre chose, une trop pauvre chose pour pouvoir demander la pitié.

– Et si je te guérissais, que désirerais-tu encore ?

– Rien de plus. J’aurais obtenu déjà bien plus que je ne puis espérer. »

Jésus sourit et lui donne un morceau de pain humecté d’un peu d’eau vinaigrée qui sert de boisson. La femme le mange sans mot dire et Jésus continue à sourire.

172.10

Le repas est vite fini. Il était tellement frugal ! Apôtres et disciples vont chercher de l’ombre sur les pentes, parmi les buissons. Jésus reste sous la tente. Le vieillard s’est placé contre la paroi herbeuse et s’endort de fatigue.

Peu après, la femme, qui pourtant s’était éloignée pour se reposer à l’ombre, vient vers Jésus qui lui sourit en signe d’encouragement. Elle s’avance timidement, et pourtant joyeusement, jusqu’à ce qu’elle arrive près de la tente puis, vaincue par la joie, elle fait rapidement les derniers pas et tombe à plat ventre avec un cri étouffé :

« Tu m’as guérie ! Sois béni ! C’est l’heure du grand frisson, et je ne l’ai plus… Oh ! »

Et elle baise les pieds de Jésus.

« Es-tu sûre d’être guérie ? Je ne te l’ai pas dit. Ce pourrait être un hasard…

– Oh, non ! Maintenant j’ai compris ton sourire quand tu m’as donné ce morceau de pain. Ta puissance est entrée en moi avec cette bouchée. Je n’ai rien à te donner en échange, rien d’autre que mon cœur. Commande à ta servante, Seigneur, et elle t’obéira jusqu’à la mort.

– Oui. Tu vois ce vieil homme ? Il est seul et c’est un juste. Tu avais un mari et la mort te l’a enlevé. Lui, il avait une fille et l’é­goïsme la lui a enlevée. C’est pire. Et pourtant, il ne maugrée pas. Mais il n’est pas juste qu’il marche vers sa dernière heure tout seul. Sois une fille pour lui.

– Oui, mon Seigneur.

– Mais cela veut dire travailler pour deux.

– Je suis forte, maintenant, et je le ferai.

172.11

– Alors, va là-bas, sur cet escarpement, et dis à l’homme qui s’y repose, celui qui est vêtu de toile bise, de venir me trouver. »

La femme s’en va promptement et revient avec Simon le Zélote.

« Viens, Simon. J’ai à te parler. Attends, femme. »

Jésus s’éloigne de quelques mètres.

« Penses-tu que Lazare aurait quelque difficulté à accueillir une travailleuse de plus ?

– Lazare ? Mais je crois qu’il ne sait même pas combien il a de serviteurs. Un de plus, un de moins… Mais de qui s’agit-il ?

– Cette femme. Je l’ai guérie et…

– C’est assez, Maître : si tu l’as guérie, c’est signe que tu l’aimes. Ce que tu aimes est sacré pour Lazare. Je m’engage pour lui.

– C’est vrai, ce que j’aime est sacré pour Lazare. Tu l’as bien dit. C’est pour cette raison que Lazare deviendra saint car, aimant ce que j’aime, il aimera la perfection. Je veux unir ce vieil homme à cette femme et faire faire joyeusement à ce patriarche sa dernière Pâque. J’aime beaucoup les vieillards qui sont saints et si je peux leur accorder un crépuscule serein, j’en suis heureux.

– Tu aimes aussi les enfants…

– Oui, et les malades…

– Et ceux qui pleurent…

– Et ceux qui sont seuls…

– Ah ! Mon Maître, mais tu ne te rends pas compte que tu aimes tout le monde ? Même tes ennemis ?

– Je ne m’en aperçois pas, Simon. C’est ma nature d’aimer. Voilà que le patriarche s’éveille. Allons lui dire qu’il fera la Pâque avec une fille auprès de lui et qu’il ne manquera plus de pain. »

Ils reviennent à la tente où la femme les attend et ils vont tous trois auprès du vieillard qui s’est assis et relace ses sandales.

« Que fais-tu, père ?

– Je redescends vers la vallée et j’espère trouver un abri pour la nuit, et demain je mendierai sur la route et puis… peu à peu… d’ici un mois, si je ne meurs pas, j’arriverai au Temple.

– Non.

– Je ne dois pas ? Pourquoi ?

– Parce que le bon Dieu ne le veut pas. Tu n’iras pas seul. Cette femme viendra avec toi. Elle te conduira où je le lui dirai et vous serez accueillis par amour pour moi. Tu feras la Pâque, mais sans t’épuiser. Ta croix, tu l’as déjà portée, père. Dépose-la maintenant et recueille-toi en prière d’action de grâces pour le bon Dieu.

– Mais pourquoi… mais pourquoi… moi…, je ne mérite pas tant… Toi… une fille… C’est plus que si tu me donnais vingt ans… Et où, où m’envoies-tu ? »

Le vieil homme pleure dans le buisson de sa longue barbe.

« Chez Lazare, fils de Théophile. Je ne sais pas si tu le connais.

– Oh !… Je suis des confins de la Syrie et je me souviens de Théophile. Mais… mais… ô fils béni de Dieu, laisse-moi te bénir ! »

Alors Jésus, assis également sur l’herbe, penche sa haute taille pour permettre au vieux père de lui imposer solennellement les mains sur la tête. D’une voix de tonnerre, de sa voix caverneuse de vieillard, il prononce l’antique bénédiction[3] :

« Que le Seigneur te bénisse et te garde. Que le Seigneur te montre sa face et ait pitié de toi. Que le Seigneur tourne vers toi son regard et te donne sa paix. »

Jésus, Simon et la femme répondent ensemble :

« Et qu’il en soit ainsi. »

172.1

Sigue el discurso de la Montaña.

El mismo lugar, la misma hora, la misma muchedumbre (aunque quizás más gente: hay muchos incluso donde empiezan los senderos que conducen al valle). El romano no está.

Jesús habla, y dice:

«Uno de los errores que comete fácilmente el hombre es la falta de honestidad, incluso consigo mismo. Dado que el hombre difícilmente es sincero y honesto, por propia iniciativa se ha puesto un bocado para sentirse obligado a ir por el camino elegido. Pero he aquí que él mismo, cual indómito caballo, pronto descoloca el bocado, para hacer lo que más cómodo le resultare, sin pensar en la reprensión que pudiera recibir de Dios, de los hombres o de su propia conciencia. Este bocado es el juramento. Pero entre los hombres honestos no es necesario el juramento, y Dios, de por sí, no os lo ha enseñado; antes al contrario, ha encargado deciros, sin más: “No pronuncies falso testimonio”. El hombre debería ser franco. No debería tener necesidad de ninguna otra cosa aparte de la fidelidad a su palabra.

El Deuteronomio, a propósito de los votos — incluso de los votos que provienen de un corazón que se supone fundido con Dios por sentimiento de necesidad o gratitud —, dice: “Debes mantener la palabra salida una vez de tus labios, cumpliendo lo que has prometido al Señor tu Dios, todo lo que de propia voluntad y con tu propia boca has dicho”. Siempre se habla de palabra dada, sólo de palabra dada, sólo la palabra.

Pues bien, quien siente necesidad de jurar denota que se siente inseguro de sí mismo y del concepto que el prójimo pueda tener de él; de la misma forma que quien hace jurar testifica su desconfianza acerca de la sinceridad y honestidad de quien jura. Así, como podéis ver, esta costumbre del juramento es una consecuencia de la deshonestidad moral del hombre; es, además, una vergüenza para el hombre, doble vergüenza porque el hombre no es ni siquiera fiel al juramento — que ya de por sí es cosa vergonzosa —, y, burlándose de Dios con la misma ligereza con que se burla del prójimo, acaba perjurando con pasmosa ligereza y tranquilidad.

172.2

¿Podrá haber criatura más abyecta que el perjuro? ¿Éste, usando a menudo una fórmula sagrada, llamando por tanto a ser cómplice y garante a Dios, o invocando a los seres más amados (el padre, la madre, la esposa, los hijos, los propios difuntos, la propia vida con sus más preciosos órganos...) como apoyo de su falso testimonio, induce a su prójimo a creerle, con lo cual le engaña. Un hombre así es sacrílego, ladrón, traidor, homicida. ¿De quién? Pues de Dios, porque mezcla la Verdad con la infamia de su mentira, y, malignamente, se burla de Dios y le desafía diciendo: “Caiga tu mano sobre mí, desmiénteme, si puedes; Tú estás allí, yo aquí, y me río”.

¡Ah!, ¡bien! ¡Reíos, reíos, embusteros, vosotros que os burláis!... que día llegará en que no reiréis, cuando Aquel en cuyas manos todo poder ha sido depositado aparezca ante vosotros con terrible majestad y sólo con su aspecto os haga temblar; bastarán sus miradas para fulminaros, antes de que su voz os precipite en vuestro destino eterno marcándoos con su maldición.

Un hombre así es un ladrón, porque se apropia de una estima inmerecida. El prójimo, impresionado por su juramento, le otorga esta estima; y la serpiente se engalana con ella fingiéndose lo que no es. Es además un traidor, porque con el juramento está prometiendo algo que no tiene intención de mantener. Es un homicida, porque mata, o el honor de un semejante, arrebatándole con el juramento falso la estima del prójimo, o la propia alma, pues el perjuro es un abyecto pecador ante los ojos de Dios, que ven la verdad aunque ningún otro la viera. A Dios no se le engaña ni con falsas palabras ni con hipócritas acciones. Él ve, no pierde de vista, ni por un instante, a cada uno de los seres humanos, y no existe fortaleza amurallada o profunda bodega donde no pueda penetrar su mirada. Incluso en vuestro interior — esa propia fortaleza dentro de la que todo hombre tiene su corazón — entra Dios, y os juzga no por lo que juráis sino por lo que hacéis.

172.3

Por ello substituyo la orden dada a los antiguos: “No perjures; antes al contrario, mantén tus juramentos” (cuando el juramento recibió plena vigencia para poner freno a la mentira y a la facilidad de faltar a la palabra dada). La substituyo por otra y os digo: “No juréis nunca”. No juréis por el Cielo, que es trono de Dios, ni por la Tierra, que es escabel para sus pies, ni por Jerusalén y su Templo, que son la Ciudad del gran Rey y la Casa del Señor nuestro Dios.

No juréis ni por las tumbas de los difuntos ni por sus espíritus: las tumbas están llenas de restos de lo que en el hombre es inferior y común con los animales; en cuanto a los espíritus, dejadlos en su morada. Si son espíritus de justos, que ya viven en estado de precognición de Dios, no hagáis que sufran y se horroricen. Aunque sea precognición, o sea, conocimiento parcial (porque hasta el momento de la Redención no poseerán a Dios en su plenitud de esplendor), no pueden no sufrir al veros pecadores. Si no son justos, no aumentéis su tormento al recordar su pecado por el vuestro. Dejadlos, dejad a los muertos: a los santos, en la paz; a los no santos, en sus penas. No arrebatéis nada a los primeros, no añadáis nada a los segundos. ¿Por qué apelar a los difuntos? No pueden hablar: los santos, porque su caridad lo impide — deberían desmentiros demasiadas veces—; los réprobos, porque el Infierno no abre sus puertas, y ellos no abren sus bocas sino para maldecir, y toda voz suya queda sofocada por el odio de Satanás y de los demonios, pues los réprobos son demonios.

No juréis ni por la cabeza del propio padre, ni de vuestra madre o esposa, ni por la cabeza de vuestros inocentes hijos; no tenéis derecho a hacerlo. ¿Son, acaso, moneda o mercancía; firma sobre papel? Pues son más y menos que esto. Son sangre y carne de tu sangre, ¡oh, hombre!; pero también son criaturas libres, y no puedes usarlas como esclavas para que avalen un testimonio falso tuyo. Al mismo tiempo, son menos que una firma tuya, porque tú eres inteligente, libre y adulto, no una persona bajo interdicto o un niño que no sabe lo que hace y que debe ser representado por sus padres. Tú eres tú: un hombre dotado de razón, por tanto responsable de tus acciones, y debes actuar autónomamente, poniendo como aval de tus acciones y palabras tu honradez y sinceridad, la estima que tú has sabido suscitar en el prójimo; no la honestidad y sinceridad de los padres o la estima que ellos han sabido suscitar. ¿Los padres son responsables de los hijos? Sí, pero sólo mientras son menores de edad; después, cada uno es responsable de sí mismo. No siempre nacen justos de justos, no siempre un hombre santo está casado con una mujer santa. ¿Y entonces, por qué usar como base de garantía la justicia del cónyuge? Del mismo modo, de un pecador pueden nacer hijos santos. Mientras son inocentes, son todos santos. ¿Y entonces, por qué invocar a una persona pura para un acto vuestro impuro, cual es el juramento que ya con antelación se piensa violar?

Ni siquiera por vuestra cabeza juréis, ni por vuestros ojos, o la lengua o las manos. No tenéis derecho a hacerlo. Todo cuanto tenéis es de Dios; vosotros no sois sino los custodios temporales de ello, administradores de los tesoros morales o materiales que Dios os ha concedido. ¿Por qué hacer uso, entonces, de lo que no os pertenece? ¿Podéis, acaso, añadir un cabello a vuestra cabeza, o cambiar su color? ¿Por qué, si no podéis hacerlo, usáis la vista, la palabra, la libertad de los miembros, para respaldar un juramento? No desafiéis a Dios; podría cogeros la palabra y secar vuestros ojos como puede secar también vuestros pomares, o arrancaros los hijos como puede arrebataros la casa, para recordaros que Él es el Señor y vosotros los súbditos, y que incurre en maldición aquel que se idolatra hasta el punto de considerarse a sí mismo más que Dios al desafiarle mintiendo.

172.4

Decid: “sí”, “sí”; “no”, “no”. Nada más. Si hay más, es que os lo ha sugerido el Maligno; y además para reírse de vosotros, pues no podréis retener todo y caeréis, por tanto, en renuncio, y seréis objeto de las burlas de los demás y conocidos por embusteros.

Sinceridad, hijos, en la palabra y en la oración. No hagáis como los hipócritas, que, cuando oran, quieren hacerlo en las sinagogas, o en las esquinas de las plazas, para ser vistos por los hombres píos y justos, mientras que luego, hacia dentro de la familia, son culpables con Dios y el prójimo. ¿No os dais cuenta de que esto es como jurar en falso? ¿Por qué queréis sostener lo no verdadero para ganar una inmerecida estima? La finalidad de la oración hipócrita es decir: “Verdaderamente soy un santo. Lo juro ante los ojos de quienes me ven, que deberán reconocer que me ven orar”. Pues bien, semejante oración — verdadero velo extendido sobre una maldad real — hecha con una finalidad de este tipo se convierte en blasfemia.

Dejad que Dios os proclame santos. Haced que vuestra vida toda grite por vosotros: “He aquí a un siervo de Dios”. Y vosotros, vosotros, por caridad hacia vosotros mismos, guardad silencio. No hagáis de vuestra lengua, movida por la soberbia, objeto de escándalo ante los ojos de los ángeles. Mejor sería que en ese mismo instante quedarais mudos, si no tenéis la fuerza de dominar el orgullo y la lengua con la que os autoproclamáis justos y gratos a Dios. Dejad a los soberbios y a los falsos esta pobre alegría, dejadles a ellos esta efímera recompensa — ¡mísera recompensa! —, que en realidad es la que quieren. Pues bien, no recibirán ninguna otra, porque más de una no se puede recibir: o la verdadera, del Cielo, que es eterna y justa; o la no verdadera, de la tierra, que dura lo que la vida del hombre e incluso menos, y que después, siendo injusta como es, se paga, pasada esta vida, con un castigo verdaderamente mortificador.

172.5

Oíd cómo debéis orar (con los labios, con el trabajo, con la totalidad de vosotros mismos): debéis orar por impulso de un corazón amante de Dios, a quien siente Padre; de un corazón que siempre tiene presente quién es el Creador y quién la criatura, y que se comporta con amor reverente en presencia de Dios, siempre, ya ore, ya comercie, ya camine, ya descanse, ya logre un beneficio o se lo proporcione a otros.

He dicho “por impulso del corazón”: ésta es la primera y esencial cualidad; porque todo viene del corazón, y, como es el corazón, tal es la mente, la palabra, la mirada, la acción. El hombre justo extrae el bien de su corazón de justo. Cuanto más bien extrae más bien encuentra, porque el bien realizado genera un nuevo bien, de la misma forma que la sangre se renueva en el círculo de las venas para volver al corazón enriquecida de elementos siempre nuevos, extraídos del oxígeno que ha absorbido y de la substancia de los alimentos que ha asimilado. Por el contrario, el perverso, de su tenebroso corazón henchido de fraude y venenos, no puede extraer sino fraude y veneno, que aumentan cada vez más, corroborados por las culpas que van acumulándose (en el bueno son las bendiciones de Dios las que confirman, y también se acumulan). Creed, igualmente, que la exuberancia del corazón rebosa a través de los labios y se revela en las acciones.

Haceos un corazón humilde y puro, amoroso, confiado, sincero. Amad a Dios con el púdico amor que siente una virgen hacia su prometido. En verdad os digo que toda alma es virgen prometida al eterno Amante, a Dios nuestro Señor; esta tierra es el tiempo del noviazgo, tiempo en que el ángel custodio otorgado a cada hombre es espiritual paraninfo, y todas las horas y las contingencias de la vida son otras tantas doncellas que preparan el ajuar nupcial; la hora de la muerte es la hora de la boda, es entonces cuando viene el conocimiento, el abrazo, la fusión, es entonces cuando, vestida ya de esposa cumplida, el alma puede alzar su velo y echarse en brazos de su Dios, sin que por amar así a su Esposo pueda inducir a otros al escándalo.

Pero por ahora, ¡oh, almas sacrificadas aún en el vínculo del noviazgo con Dios!, cuando queráis hablar con vuestro Prometido, entrad en la paz de vuestra casa (sobre todo en la paz de vuestra morada interior) y hablad, cual ángeles de carne acompañados por sus ángeles custodios, al Rey de los ángeles; hablad a vuestro Padre en el secreto de vuestro corazón y de vuestra estancia interior; dejad afuera todo lo que sea mundo: el frenesí de ser notados, de edificar; los escrúpulos de las largas oraciones sobresaturadas de palabras, pero monótonas, tibias, mortecinas en cuanto al amor.

172.6

¡Por favor, liberaos de prevenciones cuando oréis! En verdad, hay algunos que derrochan horas y horas repitiendo sólo con los labios un monólogo (un verdadero soliloquio porque ni siquiera el ángel custodio lo escucha, pues en efecto es un gran rumor vano que el ángel trata de remediar abismándose en ardiente oración en favor de este hombre necio que le ha sido encomendado). En verdad, hay algunos que no utilizarían de forma distinta esas horas ni aunque Dios se les apareciera y les dijese: “La salud del mundo depende de que dejes esta parola sin alma para ir simplemente a sacar agua de un pozo y verterla en la tierra por amor a mí y a tus semejantes”. En verdad, hay algunos que consideran más valioso su monólogo que el acto cortés de recibir en modo acogedor una visita, o que el acto caritativo de socorrer a un necesitado: son almas que han caído en la idolatría de la oración.

La oración es acción de amor. Ahora bien, se puede amar tanto rezando como haciendo pan, tanto meditando como asistiendo a un enfermo, tanto realizando un peregrinaje al Templo como atendiendo a la familia, tanto sacrificando un cordero como sacrificando nuestros deseos — justos — de recogernos en el Señor. Basta con que uno empape todo sí mismo y toda acción suya en el amor. ¡No tengáis miedo! El Padre ve las cosas. El Padre comprende. El Padre escucha. El Padre concede. ¡Cuántas gracias se reciben por un solo, verdadero, perfecto suspiro de amor; cuánta abundancia, por un sacrificio íntimo hecho con amor! No seáis como los gentiles. Dios no necesita que le digáis lo que debe hacer “porque lo necesitáis”. Eso pueden decírselo los paganos a sus ídolos, que no pueden comprender, pero no vosotros a Dios, al verdadero, espiritual Dios que no es sólo Dios y Rey sino que además es vuestro Padre y sabe, antes de que se lo pidáis, de qué tenéis necesidad.

172.7

Pedid y se os dará, buscad y hallaréis, llamad y se os abrirá. Porque todo el que pide recibe, quien busca encuentra, a quien llame se le abrirá. Cuando vuestro hijo os tiende su manita diciéndoos: “Padre, tengo hambre”, ¿acaso le dais una piedra?, ¿le dais una serpiente, si os pide un pez? No; es más, no sólo le dais el pan y el pescado, sino que además le hacéis una caricia y le bendecís, pues a un padre le resulta dulce alimentar a su hijo y verle sonreír feliz. Pues si vosotros, que tenéis un corazón imperfecto, sabéis dar buenos dones a vuestros hijos sólo por el amor natural, que también lo posee el animal hacia su prole, ¡cuánto más vuestro Padre que está en los Cielos concederá a quienes se lo pidan las cosas buenas y necesarias para su bien! ¡No tengáis miedo de pedir, ni tampoco de no obtener!

Pero quiero poneros en guardia contra un fácil error: entre los creyentes hay paganos cuya religión es un amasijo de supersticiones y fe, un edificio profanado en el que han echado raíces hierbas parásitas de todo tipo, hasta el punto de que éste se va desmoronando y al final se derrumba; son paganos de la religión verdadera, débiles en la fe y el amor, que sienten que su fe muere cuando no se ven escuchados. Pues bien, no hagáis como ellos.

Sucede que pedís en un momento dado, y os parece justo hacerlo — la verdad es que para ese momento no sería injusta tampoco la gracia pedida —, pero la vida no termina en ese momento y lo que hoy es bueno puede no serlo mañana (pero vosotros, conociendo sólo el presente — lo cual es también una gracia de Dios — esto lo desconocéis). Sin embargo, Dios conoce también el futuro, y muchas veces no satisface una oración vuestra para ahorraros una pena mayor.

En este año de vida pública, más de una vez he oído corazones que referían haberse quejado de cuánto habían sufrido cuando no se habían sentido escuchados por Dios, pero que luego habían reconocido que ello significó un bien porque la gracia en cuestión les habría impedido alcanzar posteriormente a Dios. A otros les he oído decir — y decirme a mí —: “Señor, ¿por qué no respondes a mi súplica?; con todos lo haces, ¿por qué conmigo no?”. Y, no obstante, a pesar del dolor que me producía el sufrimiento que veía, he tenido que decir: “No puedo”, porque haber condescendido a su petición habría significado poner un estorbo a su vuelo hacia la vida perfecta. Incluso el Padre también a veces dice: “No puedo”; no porque no pueda cumplir inmediatamente ese acto, sino porque no quiere hacerlo, dado que conoce las consecuencias que se seguirían.

Escuchad: un niño tiene sus entrañas enfermas. La madre llama al médico y éste dice: “Necesita ayuno absoluto”. El niño se echa a llorar, grita, suplica, parece languidecer. La madre, compasiva siempre, une sus lamentos a los de su hijo; le parece una crueldad del médico esa prohibición absoluta, le parece que el ayuno y el llanto puedan perjudicar a su hijo... Y, a pesar de todo, el médico se muestra inexorable. Al final dice: “Mujer: yo sé; tú, no; ¿quieres perder a tu hijo o que te lo salve?”. La madre grita: “¡Quiero que viva!”. “Pues entonces — dice el médico — no puedo conceder alimento... significaría la muerte”. Pues bien, lo mismo dice el Padre algunas veces. Vosotros, madres compasivas respecto a vuestro yo, no queréis oírle llorar por no haber recibido una gracia; sin embargo, Dios dice: “No puedo. Te perjudicaría”. Llegará el día, o la eternidad, en que se dirá: “¡Gracias, Dios mío, por no haber escuchado mi estupidez!”.

172.8

Lo que he dicho respecto a la oración, lo digo respecto al ayuno. Cuando ayunéis, no pongáis aspecto melancólico, como hacen los hipócritas, que con arte deslucen su rostro para que el mundo sepa y crea — aunque no sea verdad — que ayunan. Éstos también han recibido ya, en la alabanza del mundo, su compensación; no recibirán ninguna otra. Vosotros, por el contrario, cuando ayunéis, poned expresión alegre, lavaos con esmero la cara para que se vea fresca y sedosa, ungíos la barba, perfumaos el pelo, presentad esa sonrisa en los labios propia de quien ha comido bien: ¡Verdaderamente no hay alimento que sacie tanto como el amor, y quien ayuna con espíritu de amor de amor se nutre! En verdad os digo que, aunque el mundo os llame “vanidosos” o “publicanos”, vuestro Padre verá vuestro secreto heroico y os recompensará doblemente, por el ayuno y por el sacrificio de no haber recibido alabanza.

Y ahora, nutrida el alma, id a dar alimento al cuerpo.

172.9

Aquellos dos pobres que se queden con nosotros: serán los benditos huéspedes que darán sabor a nuestro pan. La paz sea con vosotros».

Los dos pobres se quedan. Son una mujer muy delgada y un anciano muy viejo. No están juntos, se han encontrado allí por azar. Se habían quedado en un ángulo, acoquinados, poniendo inútilmente la mano a quienes pasaban por delante.

Ahora no se atreven a acercarse, pero Jesús va directamente hacia ellos y los coge de la mano para ponerlos en el centro del grupo de los discípulos, bajo una especie de tienda que Pedro ha montado en un ángulo (quizás les sirve de refugio durante la noche y como lugar de reunión durante las horas más calurosas del día: es un cobertizo de ramajes y de... mantos, pero sirve para su finalidad, a pesar de que sea tan bajo, que Jesús y Judas Iscariote, los dos más altos, tienen que agacharse para poder entrar).

«Aquí tenéis a un padre y a una hermana nuestra. Traed todo lo que tenemos. Mientras comemos escucharemos su historia». Y Jesús se pone personalmente a servir a los dos vergonzosos y escucha su dolorosa narración. Ambos viven solos: el viejo, desde cuando su hija se fue con su marido a un lugar lejano y se olvidó de su padre; la mujer, que además está enferma, desde que su marido murió a causa de una fiebre.

«El mundo — dice el anciano — nos desprecia porque somos pobres. Voy pidiendo limosna para juntar unos ahorrillos y poder cumplir la Pascua. Tengo ochenta años. Siempre la he cumplido. Esta puede ser la última. No quiero ir con Abraham, a su seno, con algún remordimiento. De la misma forma que perdono a mi hija, espero ser perdonado. Quiero cumplir mi Pascua».

«Largo camino, padre».

«Más largo es el del Cielo, si se incumple el rito».

«¿Vas sólo?... ¿Y si te sientes mal por el camino?».

«Me cerrará los párpados el ángel de Dios».

Jesús acaricia la cabeza temblorosa y blanca del anciano, y pregunta a la mujer: «¿Y tú?».

«Voy en busca de trabajo. Si estuviera mejor alimentada, me curaría de mis fiebres; una vez sana, podría trabajar incluso en los campos de cereales».

«¿Crees que sólo el alimento te curaría?».

«No. Estás también Tú... Pero, yo soy una pobre cosa, demasiado pobre cosa como para poder pedir conmiseración».

«Y, si te curara, ¿qué pedirías después?».

«Nada más. Habría recibido ya con creces cuanto puedo esperar».

Jesús sonríe y le da un trozo de pan mojado en un poco de agua y vinagre, que hace de bebida. La mujer se lo come sin hablar. Jesús continúa sonriendo.

172.10

La comida termina pronto (¡era tan parca!...). Apóstoles y discípulos van en busca de sombra por las laderas, entre los matorrales. Jesús se queda bajo el cobertizo. El anciano se ha apoyado contra la pared herbosa; ahora, cansado, duerme.

Pasado un poco de tiempo, la mujer, que también se había alejado en busca de sombra y descanso, vuelve hacia Jesús, que le sonríe para infundirle ánimo. Ella se acerca, tímida, pero al mismo tiempo contenta, casi hasta la tienda; luego la vence la alegría y da los últimos pasos velozmente para caer finalmente rostro en tierra emitiendo un grito reprimido: «¡Me has curado! ¡Bendito! ¡Es la hora del temblor fuerte y no se me repite!...» y besa los pies a Jesús.

«¿Estás segura de estar curada? Yo no te lo he dicho. Podría ser una casualidad...».

«¡No! Ahora he comprendido tu sonrisa cuando me dabas el trozo de pan. Tu virtud ha entrado en mí con ese bocado. No tengo nada que darte a cambio, sino mi corazón. Manda a tu sierva, Señor, que te obedecerá hasta la muerte».

«Sí. ¿Ves aquel anciano? Está solo y es un hombre justo. Tú tenías marido, pero te fue arrebatado por la muerte; él tenía una hija, pero se la quitó el egoísmo. Esto es peor. Y, no obstante, no impreca; pero no es justo que vaya sólo en sus últimas horas. Sé hija para él».

«Sí, mi Señor».

«Fíjate que ello significa trabajar para dos».

«Ahora me siento fuerte. Lo haré».

172.11

«Ve, entonces, allí, encima de ese risco, y dile al hombre que está descansando, aquél vestido de gris, que venga aquí».

La mujer va sin demora y vuelve con Simón Zelote.

«Ven, Simón. Debo hablarte. Espera, mujer».

Jesús se aleja unos metros.

«¿Crees que a Lázaro le supondrá alguna dificultad el recibir a una trabajadora más?».

«¿Lázaro! ¡Si creo que ni siquiera sabe cuántos le prestan servicio! ¡Uno más o menos...! ... Pero, ¿de quién se trata?».

«Es aquella mujer. La he curado y...».

«No sigas, Maestro; si la has curado, es señal de que la amas, y lo que Tú amas es sagrado para Lázaro. Empeño mi palabra por él».

«Es verdad, lo que Yo amo es sagrado para Lázaro; bien dices. Por este motivo, Lázaro será santo, porque, amando lo que Yo amo, ama la perfección. Deseo vincular a aquel anciano con esa mujer, y que aquel patriarca pueda cumplir con júbilo su última Pascua. Quiero mucho a los ancianos santos, y, si puedo hacerles sereno el crepúsculo de la vida, me siento dichoso».

«También amas a los niños...».

«Sí, y a los enfermos...».

«Y a los que lloran...».

«Y a los que están solos...».

«¡Maestro mío!, ¿no te das cuenta de que amas a todos, incluso a tus enemigos?».

«No me doy cuenta, Simón; amar es mi naturaleza. Mira, el patriarca se está despertando. Vamos a decirle que celebrará la Pascua con una hija a su lado, y sin necesidad de buscarse el pan».

Vuelven a la tienda, donde la mujer los está esperando. Acto seguido van los tres donde el anciano, que está sentado, atándose las sandalias.

«¿Qué piensas hacer, padre?».

«Voy a descender hacia el valle. Espero encontrar un refugio para la noche. Mañana pediré limosna por el camino, y luego, abajo, abajo, abajo,... dentro de un mes, si no me he muerto, estaré en el Templo».

«No».

«¿No debo hacerlo? ¿Por qué?».

«Porque el buen Dios no quiere. No vas a ir solo. Esta mujer irá contigo. Te conducirá al lugar que voy a indicaros; os acogerán por amor a mí. Celebrarás tu Pascua, pero sin penalidades. Ya has llevado tu cruz, padre; pósala ahora, y recógete en acción de gracias al buen Dios».

«¿Por qué esto?... ¿Por qué esto?... No... no merezco tanto... Tú... una hija... Es más que si me dieras veinte años... ¿A dónde me quieres enviar?...». El anciano llora entre la espesura de su poblada barba.

«Con Lázaro de Teófilo. No sé si le conoces».

«Soy de la zona confinante con Siria. ¡Claro que me acuerdo de Teófilo! ¡Oh, Hijo bendito de Dios, deja que te bendiga!».

Y Jesús, que está sentado en la hierba frente al anciano, se inclina realmente para dejar que éste le imponga, solemne, las manos sobre su cabeza y pronuncie, poderoso y con voz cavernosa de anciano venerable, la antigua bendición: «El Señor te bendiga y te guarde. El Señor te muestre su rostro y tenga misericordia de ti. El Señor vuelva a ti su rostro y te dé su paz».

Y Jesús, Simón y la mujer responden juntos: «Y así sea».


Notes

  1. il dit, en : Dt 23,24.
  2. ordre que l’on peut lire en Lv 19, 12.
  3. bénédiction qui se trouve en Nb 6, 24-26.