Los Escritos de Maria Valtorta

243. A Cana chez Suzanne.

243. En Caná en la casa de Susana.

243.1

Dans la maison de Cana, la fête pour la venue de Jésus est à peine moins grande que celle donnée pour les noces du miracle. Certes, il manque les musiciens, il n’y a pas d’invités, pas de guirlandes de fleurs et de rameaux verts sur la maison, pas de table pour des hôtes nombreux, ni de maître d’hôtel près des crédences et des jarres remplies de vin. Mais tout cela est dépassé par l’amour que l’on exprime maintenant dans sa juste forme et sa bonne mesure, c’est-à-dire non pas à un hôte, peut-être un peu parent mais qui n’est qu’un homme, mais à l’Hôte, au Maître dont on connaît et reconnaît la vraie nature, et dont la parole est vénérée pour ce qu’elle est : divine. C’est pourquoi les cœurs de Cana aiment de tout leur être leur grand Ami qui s’est présenté en habit de lin à l’entrée du jardin, au milieu de la verdure du sol et de la rougeur du crépuscule. Sa seule présence suffit à tout embellir, et il communique sa paix non seulement aux âmes qu’il salue, mais jusqu’aux choses.

Où que se tournent ses yeux bleus, il semble s’étendre un voile de paix solennelle et pourtant joyeuse. La justice et la paix jaillissent de ses yeux, la sagesse de ses lèvres et l’amour de son cœur. Pour qui lira ces pages, ce que je dis paraîtra peut-être impossible. Et pourtant ce même lieu qui, avant l’arrivée de Jésus, était un endroit comme un autre d’où les va-et-vient affairés excluaient toute paix – qu’on suppose étrangère à l’agitation du travail –, s’ennoblit dès qu’il se présente ; le travail lui-même prend un je ne sais quoi d’ordonné qui n’exclut pas la présence d’une pensée surnaturelle unie au travail manuel. Je ne sais si je m’exprime bien.

243.2

Jésus n’est jamais renfrogné, pas même aux moments de plus grande contrariété lors de tel ou tel événement qui survient, mais il reste toujours majestueusement digne et communique cette dignité surnaturelle à l’endroit où il arrive. Il n’est jamais ni d’une folle gaieté ni geignard, il n’a jamais le visage déformé par le rire, pas plus qu’il n’est excité ou abattu, pas même aux heures de plus grande joie ou de plus grand découragement.

Son sourire est inimitable. Aucun peintre ne saurait le reproduire. On dirait une lumière qui émane de son cœur, une lumière radieuse aux moments de bonheur, comme lorsqu’une âme se rachète ou qu’une autre s’approche de la perfection ; il a un sourire “ couleur de rose ”, si je puis dire, lorsqu’il approuve les actions spontanées de ses amis ou disciples, ou quand il se réjouit de leur présence ; un sourire – pour rester dans les couleurs –, azur, angélique, quand il se penche sur les enfants pour les écouter, les instruire ou les bénir ; un sourire tempéré par la pitié quand il regarde quelque misère physique ou spirituelle ; enfin un sourire divin lorsqu’il parle de son Père ou de sa Mère, ou encore quand il regarde ou écoute cette Mère très pure.

Je ne puis dire l’avoir vu hypocondriaque même aux moments des plus grands déchirements. Dans les tortures de la trahison, dans les angoisses de la sueur de sang, pendant les affres de la Passion, si la tristesse submerge le doux éclat de son sourire, cela ne suffit pas pour effacer cette paix qui lui fait comme un diadème de joyaux paradisiaques qui resplendit sur son front lisse et éclaire de sa lumière toute sa divine personne. De même, je ne puis dire l’avoir vu s’abandonner à une gaieté excessive. Pas étranger à un grand éclat de rire si l’occasion se présente, il reprend aussitôt sa sérénité pleine de dignité. Mais lorsqu’il rit, il rajeunit incroyablement, au point de prendre le visage d’un jeune de vingt ans, et on dirait que son bel éclat de rire, franc, sonore, retentissant, fait rajeunir le monde.

Je ne peux pas dire non plus l’avoir vu faire les choses avec hâte. Qu’il parle ou qu’il bouge, c’est toujours paisiblement, mais sans jamais être lent ou nonchalant. C’est peut-être que, grand comme il est, il peut faire de grandes enjambées sans pour autant se mettre à courir pour avancer ; de même, il peut aisément atteindre des objets éloignés sans avoir besoin de se lever pour ce faire. Ce qui est sûr, c’est que, jusque dans ses gestes, il reste noble et majestueux.

Et sa voix ? Cela fait presque deux ans que je l’entends parler, mais il m’arrive encore de perdre le fil de ses propres tant je m’absorbe dans l’étude de sa voix. Et le bon Jésus, avec patience, me répète ce qu’il vient de me dire et me regarde avec son sourire de bon Maître, pour éviter qu’il ne s’ensuive, dans les dictées, des mutilations dues à mon bonheur d’écouter sa voix, de la savourer, d’étudier son timbre et son charme. Mais, après deux ans, je n’arrive toujours pas à dire avec précision quel en est le ton.

J’exclus absolument la voix de basse comme celle de ténor léger. Mais s’agit-il d’une puissante voix de ténor ou plutôt d’un parfait baryton au registre vocal très ample ? Je suis dans l’incertitude, mais je dirais que c’est cela, car sa voix prend parfois des intonations de bronze, presque ouatées tant elles sont profondes, surtout quand il s’adresse en tête à tête à un pécheur pour le ramener à la grâce, ou quand il indique aux foules les déviations des hommes ; mais ensuite, lorsqu’il s’agit d’analyser ou de mettre à l’index les choses interdites et de dénoncer les hypocrisies, le bronze se fait plus clair ; il devient tranchant comme un coup de foudre quand il impose la vérité et sa volonté, jusqu’à en arriver à résonner comme une plaque d’or frappée par un marteau de cristal quand elle s’élève pour chanter un hymne à la miséricorde ou pour magnifier les œuvres de Dieu ; ou encore elle prend un timbre affectueux pour parler à sa Mère et de sa Mère. Alors sa voix s’imprègne vraiment d’amour, d’un amour respectueux de fils et de l’amour de Dieu qui loue la plus parfaite de ses œuvres. Il se sert de cette intonation, bien qu’en moins marqué, pour s’adresser à ceux qui lui sont le plus cher, aux convertis ou aux enfants. Et il ne se fatigue jamais, pas même dans les plus longs discours, car c’est une voix qui revêt et complète sa pensée et sa parole en leur donnant puissance ou douceur selon le besoin.

Et moi, je reste parfois à écouter, plume en main, puis je m’aperçois que le développement de la pensée est trop avancé et qu’il m’est impossible de m’y raccrocher… et je reste là, jusqu’à ce que le bon Jésus me la répète, comme il le fait lorsqu’on m’interrompt, pour m’apprendre à supporter les choses ou les personnes ennuyeuses dont je vous laisse à penser combien elles sont ennuyeuses quand elles m’arrachent au bonheur d’écouter Jésus…

243.3

Maintenant, à Cana, Jésus remercie Suzanne de l’hospitalité qu’elle a accordée à Aglaé. Ils sont à part, sous une épaisse tonnelle chargée de grappes qui commencent à mûrir, alors que tous les autres se restaurent dans la grande cuisine.

« Cette femme était très bonne, Maître. Elle n’a vraiment pas été une charge pour moi. Elle voulait m’aider à faire toutes les lessives, à nettoyer la maison pour la Pâque, comme une servante, et elle a travaillé comme une esclave, je te l’assure, pour m’aider à terminer les vêtements de la Pâque. Elle se retirait prudemment dès que quelqu’un apparaissait, et elle cherchait à ne pas rester même avec mon mari. Elle parlait peu en présence de la famille, elle mangeait peu. Elle se levait avant le jour pour faire sa toilette avant que les hommes ne s’éveillent, et je trouvais toujours le feu déjà allumé et la maison balayée. Mais quand nous étions seules, elle m’interrogeait sur toi et me demandait de lui apprendre les psaumes de notre religion. Elle disait : “ Pour savoir prier comme le Maître. ” A-t-elle maintenant fini de souffrir ? Car, pour ce qui est de souffrir, elle souffrait beaucoup. Elle avait peur de tout, elle soupirait et pleurait beaucoup. Est-elle heureuse désormais ?

– Oui, surnaturellement heureuse, délivrée de ses peurs, en paix. Je te remercie encore du bien que tu lui as fait.

– Oh, mon Seigneur ! Quel bien ? Je ne lui ai donné que de l’amour en ton nom, car je ne sais rien faire d’autre. C’était une pauvre sœur. Je le comprenais. Et moi, par reconnaissance pour le Très-Haut qui m’a gardée dans sa grâce, je l’ai aimée.

– Et tu as fait mieux que si tu avais prêché au Beth Midrasch. Maintenant, tu en as ici une autre. L’as-tu reconnue ?

– Qui ne la connaît pas, dans ces régions ?

– Personne, c’est vrai. Mais vous ignorez encore, vous et le village, la seconde Marie, celle qui sera toujours fidèle à sa vocation. Toujours. Je te prie de le croire.

– Tu le dis : toi, tu sais, et moi, je crois.

– Dis aussi : “ J’aime. ” Je sais qu’il est plus difficile de compatir et de pardonner à l’un des nôtres qu’à quelqu’un qui a l’excuse d’être païen. Mais si la douleur de voir des apostasies dans la famille fut forte, que la compassion, et aussi le pardon soient encore plus forte. Moi, j’ai pardonné pour tout Israël, termine Jésus, en détachant les mots.

– Et moi, je pardonnerai, de mon côté, car je pense qu’un disciple doit faire ce que fait son Maître.

– Tu es dans la vérité, et Dieu s’en réjouit.

243.4

Allons trouver les autres. La nuit tombe. Le repos sera doux, dans le silence du soir.

– Tu ne nous diras rien, Maître ?

– Je ne sais pas encore. »

Ils entrent dans la cuisine où sont préparés des plats et des boissons pour le dîner tout proche.

Suzanne s’avance et dit, avec son visage juvénile qui rougit légèrement :

« Mes sœurs veulent-elles venir avec moi dans la chambre du haut ? Nous devons préparer rapidement les tables pour le repas, car ensuite il nous faut étendre les couches pour les hommes. Je pourrais y arriver seule, mais cela prendrait davantage de temps.

– Je viens moi aussi, Suzanne, dit la Vierge.

– Non. Nous y suffirons, et cela nous servira à faire connaissance, car le travail unit comme des frères. »

Elles sortent ensemble, pendant que Jésus, après avoir bu de l’eau mélangée à je ne sais quel sirop, va s’asseoir avec sa Mère, les apôtres et les hommes de la maison au frais sous la tonnelle pour laisser les servantes et la maîtresse de maison âgée libres de terminer les préparatifs du repas.

243.5

On entend venir de la chambre du haut les voix des trois femmes disciples qui préparent les tables. Suzanne raconte le miracle survenu lors ses noces et Marie de Magdala répond :

« Changer l’eau en vin, c’est fort. Mais changer une pécheresse en disciple, c’est encore plus fort. Dieu veuille que je fasse comme ce vin, que je devienne meilleure.

– N’en doute pas. Il change tout d’une manière parfaite. Il y a eu une femme ici, qui plus est une païenne, convertie par lui dans ses sentiments et dans sa foi. Peux-tu douter que cela n’arrive pas pour toi, qui appartiens déjà à Israël ?

– Une femme ? Jeune ?

– Jeune, très belle.

– Et où est-elle, maintenant ? demande Marthe.

– Seul le Maître le sait.

– Ah ! Alors c’est celle dont je t’ai parlé. Lazare était chez Jésus ce soir-là[1], et il a entendu les paroles dites pour elle. Quel parfum il y avait dans cette pièce ! Lazare l’a conservé sur ses vêtements pendant plusieurs jours. Et pourtant Jésus a dit que le cœur de la convertie le dépassait par le parfum de son repentir. Qui sait où elle est allée ? Dans la solitude, je crois…

– Elle, elle vit dans la solitude, et c’était une étrangère. Moi ici, et je suis connue. Son expiation se fait dans la solitude, la mienne en vivant au milieu du monde qui me connaît. Je n’envie pas son sort parce que, moi, je suis avec le Maître. Mais j’espère pouvoir l’imiter un jour pour ne plus rien avoir qui me distraie de lui.

– Tu le quitterais ?

– Non. Mais il dit, lui, qu’il s’en va. Et alors mon esprit le suivra. Avec lui, je peux défier le monde. Sans lui, j’aurais peur du monde. Je mettrai le désert entre le monde et moi.

– Et Lazare et moi ? Comment ferons-nous ?

– Comme vous l’avez fait dans la douleur. Vous vous aimerez et vous m’aimerez. Et sans rougir. Parce que, alors, vous serez seuls, mais vous saurez que je suis avec le Seigneur et que, dans le Seigneur, je vous aimerai.

– Elle est forte et nette, Marie, dans ses résolutions », dit Pierre qui a entendu.

Simon le Zélote répond :

« C’est une lame droite, comme son père. Elle a les traits de sa mère, mais l’esprit indomptable de son père. »

Mais la femme à l’esprit indomptable se hâte de descendre pour dire à ses compagnons que les tables sont prêtes…

243.6

… La campagne s’estompe dans la nuit paisible, mais pour l’instant sans lune. Seule une légère clarté qui vient des étoiles fait apparaître les masses sombres des plantes et blanches des maisons. Rien d’autre. Des oiseaux de nuit volent silencieusement autour de la maison de Suzanne, en quête de mouches, rasant les personnes assises sur la terrasse autour d’une lampe qui jette une légère lueur jaunâtre sur les visages de ceux qui sont assis autour de Jésus. Marthe, qui doit avoir une grande peur des chauves-souris, pousse un cri chaque fois que l’une d’elles la frôle. De son côté, Jésus s’occupe des papillons attirés par la lampe et, de sa longue main, il essaie de les éloigner de la flamme.

« Ce sont des bêtes bien stupides les unes autant que les autres, dit Thomas. Les premières nous prennent pour des mouches, les secondes prennent la flamme pour un soleil et s’y brûlent. Elles n’ont même pas l’ombre d’un cerveau.

– Ce sont des animaux. Tu voudrais qu’ils raisonnent ? demande Judas.

– Non : je voudrais qu’elles aient au moins de l’instinct.

– Ils n’ont pas le temps de l’acquérir. Je parle des papillons, car dès le premier essai, ils sont bel et bien morts. L’instinct s’éveille et se développe à la suite des premières mauvaises surprises, observe Jacques, fils d’Alphée.

– Et les chauves-souris ? Elles devraient en avoir, puisqu’elles vivent des années. Elles sont stupides, voilà tout, réplique Thomas.

– Non, Thomas, pas plus que les hommes. Les hommes aussi ressemblent bien souvent à des chauves-souris. Ils volent, ou plutôt ils volettent comme s’ils étaient ivres autour de choses qui ne servent qu’à faire souffrir.

243.7

Voilà : mon frère vient d’en abattre une en secouant fortement son manteau. Donnez-la-moi » dit Jésus.

Jacques, fils de Zébédée, aux pieds de qui est tombée la chauve-souris qui, maintenant étourdie, s’agite sur le sol en faisant des mouvements gauches, la saisit avec deux doigts par une de ses ailes membraneuses et, la tenant en l’air comme si c’était un chiffon sale, la dépose sur les genoux de Jésus.

« Voilà l’imprudente. Laissons-la faire, et vous verrez qu’elle se ressaisit, mais ne se corrige pas.

– Singulier sauvetage, Maître ! Moi, je l’aurais tuée aussitôt, dit Judas.

– Non, pourquoi ? Elle aussi a une vie et elle y tient, lui répond Jésus.

– Je n’en ai pas l’impression. Soit elle ignore qu’elle en a une, soit elle n’y tient pas. Elle la met en danger !

– Ah, Judas ! Judas ! Comme tu serais sévère avec les pécheurs, avec les hommes ! Les hommes savent eux aussi qu’ils ont une vie plus une autre, et ils n’hésitent pas à les mettre en danger l’une et l’autre.

- Nous avons deux vies ?

– Celle du corps et celle de l’âme, tu le sais.

– Ah ! Je croyais que tu faisais allusion à la réincarnation. Il y en a qui y croient.

– Il n’existe pas de réincarnation. Mais il y a deux vies. Et pourtant, l’homme met en danger ses deux vies. Si tu étais Dieu, comment jugerais-tu les hommes qui sont doués, non seulement d’instinct, mais en plus de raison ?

– Sévèrement. A moins qu’il ne s’agisse d’un homme diminué intellectuellement.

– tu ne prendrais pas en considération les circonstances qui rendent fous moralement ?

– Je n’en tiendrais pas compte.

– De sorte que tu n’aurais aucune pitié pour quelqu’un qui connaît Dieu et la Loi, et néanmoins pèche.

– Je n’aurais pas pitié de lui. Car l’homme doit savoir se con­duire.

– Il le devrait.

– Il le doit, Maître. C’est une honte impardonnable qu’un a­dulte tombe dans certains péchés en particulier, et d’autant plus qu’aucune force ne l’y pousse.

– Quels péchés selon toi ?

– Ceux de la sensualité pour commencer. C’est une dégradation irrémédiable…»

Marie-Madeleine baisse la tête… Judas poursuit :

« C’est même corrompre les autres car il s’exhale du corps des impurs comme un ferment qui corrompt les plus purs et les pousse à les imiter…»

243.8

Tandis que Marie-Madeleine baisse toujours plus la tête, Pierre dit :

« Oh là, là ! Ne sois pas aussi sévère ! La première à commettre cet acte honteux et impardonnable, c’est Eve. Et tu ne voudrais pas me dire qu’elle a été corrompue par le ferment impur exhalé par un homme luxurieux… Sache d’ailleurs que, en ce qui me concerne, je n’éprouve aucun trouble même si je m’assieds à côté d’un luxurieux. C’est son affaire…

– La proximité souille toujours. Si ce n’est pas la chair, ce sera l’âme, et c’est encore pire.

– Tu ressembles à un pharisien ! Mais excuse-moi, il faudrait alors s’enfermer dans une tour de cristal et y rester sous scellés !

– Ne crois pas, Simon, que cela te serait bien utile. C’est dans la solitude que se trouvent les plus redoutables tentations, dit Simon le Zélote.

– Bien ! Il resterait les rêves : rien de mal à cela, dit Pierre.

– Rien de mal ? Mais ne sais-tu pas que la tentation influence la réflexion et l’incite à rechercher un moyen terme pour satisfaire de quelque façon l’instinct qui s’exprime ? or ce moyen terme ouvre la voie à un raffinement dans le péché où la sensualité s’unit à la pensée, observe Judas.

– Je ne sais rien de tout ça, mon cher Judas. Peut-être parce que je n’ai jamais été porté à réfléchir, comme tu dis, sur certaines choses. Je vois, il me semble, que nous sommes partis bien loin des chauves-souris, et qu’il est heureux que tu ne sois pas Dieu. Sinon, avec ta sévérité, tu serais seul au paradis.

243.9

Qu’en dis-tu, Maître ?

– Je dis qu’il est bon de ne pas être trop absolu, car les anges du Seigneur écoutent les paroles des hommes et les inscrivent sur les livres éternels, et il pourrait être peu agréable de s’en­tendre dire un jour : “ Qu’il te soit fait comme tu as jugé. ” Je dis que, si Dieu m’a envoyé, c’est parce qu’il veut pardonner toutes les fautes dont on se repent, car il sait combien l’homme est faible à cause de Satan. Judas, réponds-moi : admets-tu que Satan puisse prendre possession d’une âme au point d’exercer sur elle une coercition qui diminue son péché aux yeux de Dieu ?

– Non, je n’admets pas cela. Satan ne peut s’en prendre qu’à la partie inférieure.

– Mais tu blasphèmes, Judas ! S’écrient ensemble Simon le Zélote et Barthélemy.

– Pourquoi ? en quoi ?

– En démentant Dieu et le Livre. On y lit[2] que Lucifer s’en est pris aussi à la partie supérieure et Dieu, par la bouche de son Verbe, nous l’a dit un nombre infini de fois, répond Barthélemy.

– Il y est dit également que l’homme a son libre arbitre, ce qui signifie que Satan ne peut exercer de violence sur la liberté humaine de la pensée et du sentiment. Dieu ne le fait pas non plus.

– Dieu non, parce qu’il est ordre et loyauté. Mais Satan, oui, parce qu’il est désordre et haine, réplique Simon le Zélote.

– La haine n’est pas le sentiment opposé à la loyauté. Tu as tort.

– J’ai raison car, si Dieu est loyauté, donc ne manque pas à la parole qu’il a donnée de laisser l’homme libre de ses actes, le démon peut méconnaître cette parole puisqu’il n’a pas promis à l’homme le libre arbitre. Mais il reste vrai qu’il est la Haine et c’est pour cette raison qu’il s’en prend à Dieu et à l’homme ; pour ce faire, il assaille la liberté intellectuelle de l’homme en plus de sa chair, et il mène cette liberté de pensée à l’esclavage, à des possessions pour lesquelles l’homme fait certaines choses qu’il n’aurait pas faites s’il était délivré de Satan.

– Je n’admets pas cela.

– Et les possédés, alors ? Tu nies l’évidence, s’écrie Jude.

– Les possédés sont sourds, muets ou fous, pas luxurieux.

– Tu ne penses qu’à ce vice ? demande ironiquement thomas.

– Parce que c’est le plus répandu et le plus bas, rétorque Judas.

– Ah ! Je pensais que c’est parce que c’est celui que tu connais le mieux » lance Thomas en riant.

Judas bondit sur ses pieds comme s’il voulait réagir. Mais il se domine et descend l’escalier pour s’éloigner à travers champs.

243.10

Un silence… Puis André dit :

« Sa façon de voir n’est pas complètement fausse. On dirait en effet que Satan n’exerce sa possession que sur nos sens – la vue, l’ouie, la parole – et sur le cerveau. Mais alors, Maître, comment expliquer certaines perversions ? Ce ne sont peut-être pas des possessions ? Un Doras, par exemple ?

– Un Doras, comme tu dis pour ne manquer de charité envers personne – et que Dieu t’en récompense ! – ou une Marie-Madeleine à qui nous pensons tous, et elle en premier, après les allusions claires et peu charitables de Judas, sont ceux qui sont possédés plus complètement par Satan, qui étend son pouvoir sur les trois niveaux de l’homme. Les possessions les plus tyranniques et les plus subtiles, dont se libèrent seulement ceux dont l’âme est encore suffisamment peu dégradée pour pouvoir comprendre l’invitation de la Lumière. Doras n’était pas un luxurieux. Malgré cela, il n’a pas su venir au Libérateur. Là se trouve la différence. Alors que, pour les lunatiques, les muets, les sourds ou les aveugles par l’action du démon, les parents cherchent et pensent à me les amener, pour ceux qui sont possédés spirituellement, il n’y a que leur âme qui s’occupe de chercher leur liberté. Pour cette raison, ils ne sont pas seulement délivrés, mais aussi pardonnés. Car leur volonté a d’abord commencé la dépossession du démon.

Maintenant, allons prendre du repos. Marie, toi qui sais ce que c’est que d’être prise, prie pour ceux qui se prêtent par intermittence à l’action du démon, en commettant le péché et en faisant souffrir.

– Oui, mon Maître. Et sans rancœur.

– Paix à tous. Laissons ici la cause de tant de discussions. Les ténèbres avec les ténèbres, dehors, dans la nuit. Pour nous, rentrons dormir sous le regard des anges. »

Il dépose sur un banc la chauve-souris qui fait ses premières tentatives de vol, et il se retire avec les apôtres dans la chambre du haut, pendant que les femmes et les maîtres de maison descendent au rez-de-chaussée.

243.1

En la casa de Caná la fiesta por la venida de Jesús es poco menor que cuanto lo fue por las bodas del milagro. Faltan los músicos, no están los invitados, la casa no está enguirnaldada de flores y ramos verdes, no están las mesas para los muchos invitados, ni el maestresala junto a los aparadores y las hidrias colmas de vino. Pero todo queda ampliamente compensado por el amor, ofrecido ahora en su forma y medida justas, o sea, no a un simple invitado —quizás también un poco pariente, pero al fin y al cabo un hombre —, sino al Invitado Maestro, cuya verdadera Naturaleza se conoce y reconoce y cuya Palabra se venera como cosa divina. Por ello los corazones de Caná aman con la totalidad de sí mismos al Gran Amigo que se ha asomado vestido de lino a la entrada del huerto, entre el verde de la tierra y el rojo de la puesta de sol, embelleciendo todas las cosas con su presencia, y comunicando su paz: no sólo a los corazones a los que dirige su saludo, sino incluso a las cosas.

Verdaderamente parece —doquiera que se dirijan sus ojos azules —extenderse un velo de paz solemne y beato. Pureza y paz manan de sus pupilas, como la sabiduría fluye de su boca y el amor de su corazón. A los que lean estas páginas quizás les parecerá imposible cuanto digo. Pues bien, el propio lugar, que antes de la llegada de Jesús era un lugar corriente, o un lugar de ajetreo que excluye la paz (que se supone exenta de angustioso trajinar), nada más llegar Él, se ennoblece, y el propio trabajo adquiere un no sé qué de ordenado que no excluye la presencia de un pensamiento sobrenatural fundido con el trabajo manual. No sé si me explico bien.

243.2

Jesús no se muestra desabrido nunca, ni siquiera en los momentos más desagradables por algún hecho que le haya sucedido; se le ve, por el contrario, siempre majestuosamente digno, y comunica esta dignidad sobrenatural al lugar en que se mueve. Jesús no se muestra nunca jocoso, riéndose a mandíbula batiente, ni siquiera en los momentos de mayor alegría; tampoco quejumbroso, con expresión hipocondríaca, ni siquiera en los momentos de mayor desconsuelo.

Su sonrisa es inimitable. Ningún pintor podrá jamás representarla. Parece una luz que emanara de su corazón, luz radiante en las horas de mayor alegría por alguna alma que se redime o alguna otra que se acerca más a la perfección; es una sonrisa que yo diría rósea, cuando aprueba las acciones espontáneas de sus amigos o discípulos y goza de su presencia; una sonrisa —siguiendo en los colores— azul, angélica, cuando se inclina hacia los niños para escucharlos, adoctrinarlos o bendecirlos; modelada de piedad cuando observa alguna miseria de la carne o del espíritu; en fin, divina cuando habla del Padre o de su Madre, o mira y escucha a esta Madre purísima.

No puedo decir que le haya visto hipocondríaco ni siquiera en los momentos más angustiosos. En medio de las torturas de la traición sufrida, en medio de las angustias del sudor de sangre, en medio de los espasmos de la Pasión, aunque la tristeza sumerja el fulgor dulcísimo de su sonrisa, no es suficiente para borrar esa paz que parece diadema de paradisíacas gemas, fúlgida en su frente lisa, y que ilumina con su luz toda la divina persona. De la misma forma, no puedo decir que le haya visto alguna vez entregarse a alegrías desmedidas. No contrario a una franca carcajada si el caso lo requiere, vuelve enseguida a su honorable serenidad. Y cuando ríe rejuvenece prodigiosamente hasta asumir un rostro de joven de veinte años, y el mundo parece también rejuvenecer por su hermosa risa, franca, sonora, entonada.

Igualmente, no puedo decir que le haya visto hacer las cosas apresuradamente. Sea que hable, sea que se mueva, lo hace siempre con sosiego, si bien nunca es lento ni actúa con desgana. Quizás sea porque, siendo alto, puede dar pasos largos sin tener por ello que correr para recorrer mucho camino, de la misma forma que puede alcanzar con facilidad objetos distantes sin tener necesidad para ello de levantarse. Lo cierto es que hasta en su modo de moverse es señorial y majestuoso.

¿Y la voz?… Va a hacer dos años que le oigo hablar, y, no obstante, algunas veces casi pierdo el hilo de lo que dice, de tanto como me abismo en el estudio de su voz. Y el buen Jesús, paciente, repite lo que ha dicho y me mira con su sonrisa de Maestro bueno, para no hacer que en los dictados resulten mutilaciones debidas a mi dicha de escuchar su voz, deleitarme en ella y estudiar su tono y hechizo. Pero, después de dos años, todavía no sé decir con exactitud qué tono tiene.

Excluyo en términos absolutos el tono de bajo, como también el de tenor ligero. Pero me queda siempre la duda de si se trata de una potente voz de tenor o de la voz de un perfecto barítono de gama vocal amplísima. Yo diría que es esto último, porque su voz adquiere a veces notas broncíneas, casi apagadas de tan profundas como son, especialmente cuando habla de tú a tú con un pecador para restablecerle en la Gracia, o señala las desviaciones humanas a las turbas; mientras que, cuando se trata de analizar y poner en el índice las cosas prohibidas y descubrir las hipocresías, el bronce se hace más claro; y, cuando impone la Verdad y su voluntad, se hace cortante como el impacto de un rayo; adquiere canto de lámina de oro golpeada con martillo de cristal, cuando se eleva para celebrar la Misericordia o para exaltar las obras de Dios; o envuelve de amor este timbre cuando habla con su Madre o de su Madre (verdaderamente esta voz suya entonces queda envuelta en amor, en amor reverencial de hijo, y de Dios cantando las alabanzas de su obra mejor). Este tono, si bien menos marcado, es el que usa para hablar a sus predilectos, a los convertidos o a los niños. Y no cansa nunca, ni siquiera en su más largo discurso, porque es una voz que reviste y completa el pensamiento y la palabra, poniendo de relieve su potencia o su dulzura, según las necesidades.

Y algunas veces me quedo con la pluma en la mano, escuchando, y luego vuelvo al pensamiento cuando va ya demasiado adelantado, imposible de ser aferrado… y ahí me quedo, hasta que el buen Jesús lo repite, como hace cuando me interrumpen, para enseñarme a soportar pacientemente las cosas o personas molestas (y se puede hacer usted una idea de cuán molestas me resultan cuando me apartan de la dicha de escuchar a Jesús…).

243.3

Ahora, en Caná, está agradeciéndole a Susana la hospitalidad prestada a Áglae. Están aparte, bajo una tupida parra cargada de racimos de uva que ya está enverando. Mientras, los demás comen algo en la amplia cocina.

«Esa mujer era muy buena, Maestro. No nos fue, de ninguna manera, gravosa. Quería ayudarme siempre en la colada, en la limpieza de la casa para la Pascua, como si fuera una doméstica; y te puedo decir con conocimiento de causa que trabajó como una esclava para ayudarme a terminar los vestidos pascuales. Era prudente y se retiraba siempre cuando venía alguna persona. Incluso con mi marido trataba de no estar. Hablaba poco en presencia de la familia. Comía poco. Se levantaba antes del alba para estar ya aseada cuando se despertaran los hombres. Yo encontraba siempre el fuego encendido y barrida la casa. Pero, cuando estábamos solas me preguntaba acerca de ti, y me pedía que le enseñase los salmos de nuestra religión. Decía: “Para saber orar como lo hace el Maestro”. ¿Ahora ha terminado de penar? Porque sufrir sufría mucho. De todo tenía miedo y mucho suspiraba y lloraba. ¿Es feliz ahora?».

«Sí. Sobrenaturalmente feliz. Libre de sus miedos. En paz. Te agradezco una vez más el bien que le has hecho».

«¡Oh, mi Señor! ¿Qué bien? No le di sino amor en tu nombre, porque no sé hacer otra cosa. Era una pobre hermana. Yo esto lo comprendía. La amé por gratitud hacia el Altísimo, que me ha tenido en su gracia».

«Has hecho más que si hubieras predicado en el Bel Nidrás. Ahora tienes aquí a otra. ¿La has reconocido?».

«¿Quién no la conoce por esta región!».

«Nadie, es verdad. Pero todavía no conocéis, ni vosotros ni la región, a la segunda María, la que será siempre de su vocación. Siempre. Te ruego que lo creas».

«Tú lo dices. Tú sabes. Yo creo».

«Di también: “Yo amo”. Sé que es más difícil sentir compasión de uno que ha faltado y perdonarle cuando es de los nuestros, que no si es uno que tiene la disculpa de ser pagano. De todas formas, si el dolor de ver apostasías familiares fue fuerte, sean más fuertes la compasión y el perdón. Yo he perdonado por todo Israel» termina Jesús, remarcando las palabras.

«Yo también perdonaré por mi parte, pues creo que un discípulo debe hacer lo que hace su Maestro».

243.4

«Estás en la verdad y Dios exulta por ello. Vamos con los otros. Muere la tarde. Dulce será el descanso en el silencio de la noche».

«¿No nos vas a decir nada, Maestro?».

«No lo sé todavía».

Entran en la cocina, donde ya están preparadas comida y bebida para la cena que pronto tendrá lugar.

Susana entra más y, no sin un ligero rubor en su rostro juvenil, dice: «¿Quieren mis hermanas venir conmigo a la habitación de arriba? Tenemos que preparar pronto las mesas porque luego tenemos que colocar los lechos para los hombres. Podría hacerlo sola, pero emplearía más tiempo».

«Voy también yo, Susana» dice la Virgen.

«No. Somos suficientes nosotras; además servirá para conocernos, porque el trabajo hermana».

Salen juntas mientras Jesús, después de beber agua aderezada con no sé qué jarabe, va a sentarse con su Madre, con los apóstoles y los hombres de la casa, al fresco de la pérgola, dejando así libres a las domésticas y la señora para ultimar las viandas.

243.5

Proveniente de la habitación de arriba, se oye la voz de las tres discípulas que están preparando las mesas. Susana está contando el milagro que tuvo lugar en su boda. María de Magdala responde: «Transformar el agua en vino es grande, pero transformar a una pecadora en discípula es más grande aún; quiera Dios que yo haga como aquel vino: ser del mejor».

«No lo dudes. Él transforma todo de forma perfecta. Aquí estuvo una, que además era pagana, que había sido convertida por Él en el sentimiento y en la fe. ¿Podrás dudar que suceda esto contigo, que ya eres de Israel?».

«¿Una? ¿Joven?».

«Joven. Guapísima».

«¿Y dónde está ahora?» pregunta Marta.

«Lo sabe sólo el Maestro».

«¡Ah, entonces es aquella de que te hablé. Lázaro había ido en aquel atardecer a ver a Jesús y oyó las palabras que se dijeron por ella. ¡Qué perfume había en la habitación! Lázaro lo llevó en la ropa durante varios días. Pues bien, Jesús dijo que era superior el corazón de la convertida con su perfume de arrepentimiento. ¿Quién sabe a dónde habrá ido? Creo que a vivir en soledad…».

«Ella en soledad, y era extranjera; yo aquí, y me conocen bien. Su expiación en la soledad, la mía viviendo en medio del mundo que me conoce. No envidio su suerte, porque estoy con el Maestro, pero espero poderla imitar un día para no tener nada que me distraiga de Él».

«¿Serías capaz de dejarle?».

«No. Pero Él dice que se marcha. Mi espíritu entonces le seguirá. Con Él puedo desafiar al mundo. Sin Él tendría miedo del mundo. Abriré el desierto entre mí y el mundo».

«¿Y yo y Lázaro? ¿Qué hacemos?».

«Como antes en el tiempo del dolor. Os amaréis y me amaréis. Y sin tener que avergonzaros. Porque entonces estaréis solos, pero sabiendo que estoy con el Señor y que en el Señor os amo».

«Es fuerte y tajante, María, en sus decisiones» comenta Pedro, que lo ha oído.

Y Simón Zelote responde: «Una cuchilla recta como su padre. De su madre tiene las facciones; de su padre, el espíritu indómito».

He aquí que la que tiene el espíritu indómito está bajando rápidamente ahora y viene hacia sus compañeros para comunicar que las mesas están preparadas…

243.6

…El campo se borra en la noche serena aunque por ahora sin luna. Sólo un tenue claror de astros permite distinguir las masas oscuras de los árboles y las blancas de las casas. Nada más. Algunas aves nocturnas revolotean con su vuelo mudo alrededor de la casa de Susana, en busca de moscas, y pasan casi rozando a las personas que están sentadas en la terraza en torno a una luz amarillenta que ilumina levemente los rostros congregados en torno a Jesús. Marta, que debe tener mucho miedo a los murciélagos, lanza un grito cada vez que uno de ellos la roza. Jesús, sin embargo, se preocupa de las mariposas que vienen atraídas por la luz, y con su larga mano trata de alejarlas de la llama.

«Son animales muy tontos, tanto las mariposas como los murciélagos» dice Tomás. «Los primeros nos confunden con moscones, las segundas creen que la llama es un sol y se queman. No tienen ni sombra de cerebro».

«Son animales. ¿Pretendes que razonen?» pregunta Judas Iscariote.

«No. Pretendo que al menos tengan instinto».

«No les da tiempo a tenerlo —me refiero a las mariposas—, porque después de la primera prueba ya están bien muertas. El instinto se despierta y se hace fuerte después de las primeras, penosas sorpresas» comenta Santiago de Alfeo.

«¿Y los murciélagos? Deberían tenerlo, porque viven varios años. Lo que pasa es que son tontos» replica Tomás.

«No, Tomás. No lo son más que los hombres. Los hombres parecen también, muchas veces, murciélagos tontos. Vuelan, o mejor: revolotean, como borrachos, en torno a cosas que lo único que procuran es dolor.

243.7

Mirad: mi hermano, con una buena sacudida del manto, a echado a tierra uno. Dádmelo» dice Jesús.

El murciélago ha caído a los pies de Santiago de Zebedeo, y ahora, atontado, se agita en el suelo con movimientos torpes. Santiago lo coge con dos dedos por una de las alas membranosas y, teniéndole suspendido como si fuera un pingajo sucio, lo deposita en el regazo de Jesús.

«Aquí tenemos al imprudente. Vamos a ver lo que hace. Se recuperará, pero no se corregirá».

«Un rescate singular, Maestro. Yo le mataría del todo» dice Judas Iscariote.

«No. ¿Por qué? También él tiene una vida y la quiere conservar» le responde Jesús.

«No creo. O no sabe que la tiene o no le preocupa conservarla. ¡La pone en peligro!».

«¡Oh, Judas! ¡Judas! ¡Qué severo serías con los pecadores, con los hombres! Es el mismo caso de los hombres, que saben que tienen dos vidas y osan poner en peligro una y otra».

«¿Tenemos dos vidas?».

«La del cuerpo y la del espíritu, como sabes».

«¡Ah! Creía que te referías a reencarnaciones. Hay quien cree en ello».

«No hay reencarnación, pero sí que hay dos vidas. Y, no obstante, el hombre pone en peligro sus dos vidas. Si fueras Dios, ¿cómo juzgarías a los hombres, que están dotados de instinto y, además, de razón?».

«Severamente. A menos que no fuera un hombre tarado mental».

«¿No considerarías las circunstancias que enloquecen moralmente?».

«No las consideraría».

«De forma que, de uno que sabe de Dios y de la Ley y que no obstante peca, no tendrías piedad».

«No tendría piedad, porque el hombre debe saberse conducir».

«Debería».

«Debe, Maestro. Es una vergüenza imperdonable que un adulto caiga en ciertos pecados; sobre todo, mucho más, si no le impulsa a ello ninguna fuerza».

«¿Cuáles son esos pecados para ti?».

«En primer lugar los carnales. Es un degradarse sin remedio…». María de Magdala inclina la cabeza… Judas prosigue: «… es corromper también a los demás, porque del cuerpo de los impuros brota como un fermento que turba hasta a los más puros y los mueve a imitarlos…».

243.8

Mientras la Magdalena inclina cada vez más la cabeza, Pedro dice: «¡Hala! ¡No seas tan severo, hombre! La primera que cometió esta imperdonable vergüenza fue Eva, y no me vas a decir ahora que la corrompió el fermento impuro proveniente de un lujurioso. Y has de saber que, por lo que a mí respecta, aunque me siente al lado de un lujurioso, no siento ninguna turbación en absoluto. Asunto suyo…».

«La proximidad ensucia siempre; si no la carne, el alma, que es todavía peor».

«¡Me pareces un fariseo! Pero… perdona… entonces, si eso fuera así, tendríamos que encerrarnos en una torre de cristal y quedarnos dentro, precintados».

«Y no te pienses, Simón, que te beneficiaría; en soledad son más temibles las tentaciones» dice el Zelote.

«¡Bueno! Quedarían como sueños. Nada malo» responde Pedro.

«¿Nada malo? ¿No sabes que la tentación lleva a cogitar, lo cual, a su vez, conduce a buscar un arreglo para satisfacer de alguna manera el instinto que grita, y este arreglo allana el camino a un refinamiento pecaminoso en que se unen sentido y pensamiento?» pregunta Judas Iscariote.

«No sé nada de esto, amigo Judas. Quizás porque nunca he sido cogitabundo, como tú dices, respecto a ciertas cosas. Sé, eso sí, que me parece que nos hemos alejado mucho de los murciélagos, y que mejor que tú no seas Dios, porque, si no, en el Paraíso te quedarías solo, con toda tu severidad.

243.9

¿Tú que dices, Maestro?».

«Digo que es bueno no ser demasiado absolutos, porque los ángeles del Señor escuchan las palabras de los hombres y las anotan en los libros eternos, y un día podría resultar desagradable el oírse decir: “Hágase contigo según juzgaste”. Digo que si Dios me ha enviado es porque quiere perdonar todas las culpas de que un hombre se arrepiente, sabiendo lo débil que es el hombre por causa de Satanás. Judas, respóndeme: admites que Satanás pueda apoderarse de un alma de forma que ejercite sobre ella una coacción que de hecho le aminora el pecado a los ojos de Dios?».

«No lo admito. Satanás sólo puede incidir en la parte inferior».

«¡Blasfemas, Judas de Simón!» dicen casi al unísono Judas Zelote y Bartolomé.

«¿Por qué? ¿En qué?».

«Desmintiendo a Dios y al Libro. En él se lee que Lucifer incidió también en la parte superior, y Dios, por boca de su Verbo, nos lo ha dicho una infinidad de veces» responde Bartolomé.

«También está escrito que el hombre tiene libre albedrío, lo que significa que sobre la libertad humana del pensamiento y del sentimiento Satanás no puede ejercer violencia. No lo hace ni siquiera Dios».

«Dios no, porque es Orden y Lealtad. Satanás sí, porque es Desorden y Odio» rebate Judas Zelote.

«El odio no es el sentimiento opuesto a la lealtad. Dices mal».

«Digo bien, porque Dios es Lealtad y, por tanto, no falta a su palabra de dejar al hombre libre de actuar, mientras que el demonio, no habiendo prometido al hombre libertad de arbitrio, no puede traicionar esta palabra. Es verdad, por otra parte, que el demonio es Odio y que, por tanto, arremete contra Dios y el hombre; arremete asaltando su libertad intelectiva, además de su carne, y conduciendo esta libertad de pensamiento a esclavitud, a estados de posesión por los que el hombre hace cosas que no haría si estuviera libre de Satanás» sostiene Simón Zelote.

«No lo admito».

«¿Y entonces los endemoniados? Niegas la evidencia» grita Judas Tadeo.

«Los endemoniados son sordos o mudos o dementes, no lujuriosos».

«¿Tienes presente sólo este vicio?» pregunta con ironía Tomás.

«Porque es el más extendido y además bajo».

«¡Ah, creía que era el que conocías mejor» dice Tomás riendo.

Pero Judas se pone en pie súbitamente, como si quisiera reaccionar. Luego se domina, baja la pequeña escalera y se aleja por los campos.

243.10

Silencio… Luego Andrés dice: «Su idea no está equivocada en todo. Se diría que, en efecto, Satanás tiene dominio sólo sobre los sentidos: ojos, oído, habla, y sobre el cerebro. Pero entonces, Maestro, ¿cómo se explican ciertas maldades? ¿No son acaso posesiones? Un Doras, por ejemplo…».

«Un Doras, como tú dices para no faltar a la caridad a nadie —que Dios te premie por ello—, o una María, como todos, ella la primera, pensamos, después de las claras y anticaritativas alusiones de Judas, son los poseídos más completamente por Satanás, que extiende su poder a los tres grados del hombre. Son las posesiones más tiránicas y sutiles, y de ellas se liberan sólo aquellos que permanecen tan poco degradados en su espíritu, que saben todavía comprender la llamada de la Luz. Doras no fue un lujurioso, y, a pesar de todo, no supo ir al Libertador. En esto está la diferencia: que, mientras que en el caso de los lunáticos, mudos, sordos o ciegos por obra demoniaca son los familiares los que se preocupan de conducirlos a mí, en el caso de éstos, poseídos en su espíritu, sólo es su espíritu el que se ocupa de buscar la libertad. Por este motivo reciben el perdón además de la libertad. Porque su voluntad ha tomado la iniciativa de liberarse de la posesión del Demonio. Y ahora vamos a descansar. María, tú que sabes lo que significa estar uno poseído, ruega por los que se prestan intermitentemente al Enemigo, pecando y produciendo dolor».

«Sí, Maestro mío, y sin rencor».

«La paz a todos. Dejamos aquí la causa de tanta discusión. Tinieblas con tinieblas fuera en la noche. Y volvemos a la casa, a dormir bajo la mirada de los ángeles».

Y encima de un banco deposita el murciélago, el cual hace sus primeros intentos de volar. Luego se retira con los apóstoles a la habitación alta mientras las mujeres con los dueños de la casa van a la planta baja.


Notes

  1. ce soir-là : en 200.7.
  2. On y lit en interprétant le texte de Gn 3, 1-15 ; il y est dit également en Si 15, 14 et, implicitement, partout où l’on parle de libre choix entre le bien et le mal, à commencer par le précédent renvoi au livre de la Genèse.