Los Escritos de Maria Valtorta

647. Gamaliel devient chrétien.

647. Gamaliel se hace cristiano.

647.1

Des années ont dû passer, car Jean paraît être maintenant dans toute la force de l’âge, avec des membres plus robustes, un visage plus mûr, et ses cheveux, sa barbe et ses moustaches sont moins clairs.

Marie est en train de filer. Jean range la cuisine de la maison de Gethsémani dont les murs ont été récemment blanchis, et les objets de bois vernis : tabourets, portes, une étagère qui sert aussi de console pour la lampe. Marie n’a pas changé. Son aspect est frais et serein. Toute trace laissée sur son visage par la douleur de la mort de son Fils, de son retour au Ciel, des premières persécutions contre les chrétiens, a disparu. Le temps n’a pas laissé de trace sur ce doux visage, et l’âge n’a pas eu le pouvoir d’en altérer la fraîche et pure beauté.

La lampe, allumée sur la console, projette une lumière vacillante sur les mains petites et agiles de Marie, sur la filasse blanche enroulée sur la quenouille, sur le fil fin, sur le fuseau qui tournoie, sur les blonds cheveux rassemblés en un nœud pesant sur la nuque.

Par la porte ouverte, un clair rayon de lune pénètre dans la cuisine, s’étendant comme une raie d’argent de la porte jusqu’aux pieds du tabouret sur lequel Marie est assise. Elle a ainsi les pieds éclairés par le rayon de lune, les mains et la tête baignés de la lumière rougeâtre de la lampe. Dehors, dans les oliviers qui entourent la maison de Gethsémani, des rossignols chantent leur amour.

Soudain, ils se taisent comme s’ils étaient effrayés et, après quelques instants, un bruit de pas se fait entendre, se rapproche, et s’arrête sur le seuil de la cuisine, faisant disparaître le blanc rayon de lune qui couvrait d’une lueur argentée le pavage grossièr et sombre du sol.

647.2

Levant la tête, Marie tourne les yeux vers l’entrée. Jean, de son côté, regarde vers la porte et un “ oh ! ” d’étonnement jaillit de leur bouche, tandis que, d’un même mouvement, ils accourent tous les deux vers le seuil où est apparu et s’est arrêté Gamaliel. Il est maintenant très âgé, un vrai spectre, tant il est maigre dans ses vêtements blancs que la lune, qui enveloppe ses épaules, rend pour ainsi dire phosphorescents. C’est un Gamaliel brisé, écrasé par les événements, par ses remords, par bien des choses plus encore que par l’âge.

« Toi ici, rabbi ? Entre ! Viens ! Et que la paix soit avec toi, lui dit Jean, qui se tient en face de lui, très près, alors que Marie est à quelques pas en arrière.

– Peux-tu me conduire ? Je suis aveugle… » chevrote le vieux rabbi sous l’effet de quelque plainte secrète.

Abasourdi, Jean demande d’une voix qui trahit son émotion et sa pitié :

« Aveugle ? Depuis quand ?

– Oh !… Depuis longtemps ! Ma vue a commencé à s’affaiblir tout de suite après… après… Oui, après que je n’ai pas su reconnaître la vraie Lumière venue illuminer les hommes jusqu’au moment où le tremblement de terre a déhiré le voile du Temple et secoué ses puissantes murailles, comme Jésus l’avait annoncé. C’était vraiment un double voile qui recouvrait le Saint des Saints du Temple, et le Saint des Saints encore plus vrai, la Parole du Père, son Fils unique et éternel, caché par le voile d’une chair humaine toute pure, que seules sa Passion et sa glorieuse Résurrection révélèrent même aux plus obtus, et à moi le premier, pour ce qu’il était réellement : le Christ, le Messie, l’Emmanuel. A partir de ce moment, les ténèbres ont commencé à descendre sur mes pupilles et à devenir toujours plus épaisses. Juste châtiment pour moi. Depuis quelque temps, je suis totalement aveugle.

647.3

Et je suis venu… »

Jean l’interrompt :

« Peut-être pour demander un miracle ? ”

– Oui, un grand miracle. Je le demande à la Mère du Dieu vrai.

– Gamaliel, moi, je n’ai pas le pouvoir qu’avait mon Fils. Lui pouvait rendre la vie et la vue aux pupilles éteintes, la parole aux muets, le mouvement aux paralysés, mais moi, non » lui répond Marie, avant de poursuivre : « Mais viens t’asseoir ici, près de la table. Tu es las et âgé, rabbi. Ne te fatigue pas davantage. »

Aidée par Jean, elle le conduit avec pitié près de la table et le fait asseoir sur un tabouret.

Avant de lâcher la main de Marie, Gamaliel la baise avec vénération, puis il lui dit :

« Marie, je ne te demande pas le miracle d’y voir de nouveau. Non. Je ne demande pas cette grâce matérielle. Ce que je te demande, ô Bénie entre toutes les femmes, c’est une vue d’aigle pour mon esprit, pour que je voie toute la vérité. Je ne te demande pas la lumière pour mes pupilles éteintes, mais la lumière surnaturelle, divine, la vraie lumière qui est sagesse, vérité, vie pour mon âme et mon cœur déchirés et épuisés par les remords qui ne me laissent pas de trêve. Je n’ai aucun désir de voir de mes yeux ce monde hébraïque, si… oui, si obstinément rebelle à Dieu, qui a eu et qui a encore pour lui une immense pitié qu’en vérité nous ne méritons pas d’avoir. Je suis même heureux de ne plus le voir, et je me réjouis de ce que ma cécité m’ait libéré de tout emploi au Temple et auprès du Sanhédrin, tellement injustes envers ton Fils et envers ses fidèles. Ce que je désire voir par l’intelligence, le cœur, l’esprit, c’est lui, Jésus. Le voir, en moi, dans mon esprit, le voir spirituellement, comme certainement vous le voyez, toi, sainte Mère de Dieu, et Jean si pur, et aussi Jacques tant qu’il a vécu, et les autres, pour les aider dans leur ministère difficile et tellement entravé. Le voir pour l’aimer de tout mon être et, par cet amour, pouvoir réparer mes fautes et obtenir son pardon, pour avoir la vie éternelle que je ne mérite plus… »

Il baisse la tête sur ses bras posés sur la table, et pleure.

647.4

Marie pose une main sur sa tête secouée par les sanglots :

« Non, tu n’as pas perdu la vie éternelle ! Le Sauveur pardonne tout à celui qui se repent de ses erreurs passées. Il aurait même pardonné à celui qui l’a livré s’il s’était repenti de son horrible péché. Or la faute de Judas est immense, comparée à la tienne. Réfléchis : Judas était l’apôtre accueilli par le Christ, instruit par le Christ, aimé par le Christ plus que tout autre, si l’on pense que le Christ, qui n’ignorait rien de lui, ne l’a pas chassé du groupe de ses apôtres. Au contraire, et jusqu’au dernier moment, il a recouru à toutes sortes d’expédients pour qu’ils ne comprennent pas qui il était et ce qu’il tramait. Mon Fils était la Vérité même, et n’a jamais menti, pour aucun motif. Mais quand il voyait les onze autres soupçonner Judas et quand ils l’interrogeaient sur lui, il réussissait, sans mentir, à détourner leurs soupçons et à ne pas répondre en leur imposant de ne pas poser de questions, à la fois par prudence et par charité envers leur frère. Ta faute est bien moindre. On ne peut même la qualifier de faute. Ce n’était pas de l’incrédulité, mais au contraire un excès de foi.

Tu as tellement cru à l’Enfant de douze ans qui t’avait parlé au Temple qu’avec obstination, mais avec une intention droite venue de ta foi absolue en cet Enfant, sur les lèvres duquel tu avais entendu des paroles d’une infinie sagesse, tu as attendu un signe pour croire en lui et reconnaître en lui le Messie. Dieu pardonne à celui qui a une foi si forte et si fidèle. Il pardonne encore davantage à celui qui, étant dans le doute sur la vraie nature d’un homme, accusé injustement, ne veut pas prendre part à sa condamnation parce qu’il la sent injuste. Ta vision spirituelle de la vérité s’est toujours approfondie à partir du moment où tu as quitté le Sanhédrin pour ne pas consentir à cet acte sacrilège. Et elle a grandi davantage lorsque, au Temple, tu as vu s’accomplir le signe tant attendu qui a marqué le commencement de l’ère chrétienne. Elle s’est encore accrue quand, avec ces mots puissants, angoissés, tu as prié au pied de la croix de mon Fils, désormais glacé et éteint. Elle est devenue presque parfaite chaque fois que, par la parole ou en te retirant à part, tu as défendu les serviteurs de mon Fils et que tu n’as pas voulu prendre part à la condamnation des premiers martyrs. Sois-en sûr, Gamaliel, chacun de tes actes de douleur, de justice, d’amour, a fait grandir en toi ta vision spirituelle.

647.5

– Tout cela n’est pas encore assez ! J’ai eu la grâce rare de connaître ton Fils dès sa première manifestation publique, au moment de sa majorité. J’aurais dû voir clair dès ce moment ! Comprendre ! J’ai été aveugle et sot… Je n’ai pas vu et pas compris. Ni à ce moment là, ni à d’autres occasions où j’ai eu la grâce de l’approcher, désormais Homme et Maître, et d’entendre ses paroles toujours plus justes et plus fortes. Entêté, j’attendais le signe humain, les pierres secouées… Je ne me rendais pas compte que tout en lui était un signe certain ! Je ne voyais pas qu’il était la pierre angulaire prédite[1] par les prophètes, la pierre qui déjà secouait le monde entier, juif et païen, la pierre qui secouait les pierres des cœurs par sa Parole et ses prodiges ! Je ne reconnaissais pas sur lui le signe manifeste de son Père en tout ce qu’il faisait ou disait ! Comment peut-il pardonner tant d’obstination ?

647.6

– Gamaliel, arriveras-tu croire que je peux te donner un bon conseil, moi qui suis le Siège de la Sagesse, la Femme comblée de grâce, remplie de la connaissance des choses surnaturelles en raison de la Sagesse qui en moi a pris chair, et à la grâce que le Christ m’a donnée ?

– Oh ! oui, je le crois ! C’est justement parce que je crois que tu es cela que je viens à toi pour avoir la lumière. Toi qui es Fille, Mère, Epouse de Dieu, qui t’a certainement comblée dès ta conception de ses lumières de sagesse, tu ne peux que m’indiquer le chemin que je dois prendre pour avoir la paix, pour trouver la vérité, pour conquérir la vraie vie. Je suis tellement conscient de mes erreurs, tellement écrasé par ma misère spirituelle, que j’ai besoin d’aide pour oser aller à Dieu.

– Ce que tu considères comme un obstacle est au contraire une aile pour t’élever vers Dieu. Tu t’es démoli toi-même, tu t’es humilié. Tu étais une puissante montagne, tu t’es rendu vallée profonde. Sache que l’humilité est semblable à l’engrais du terrain le plus aride pour le préparer à donner des plantes et des moissons magnifiques. C’est un escalier pour monter, ou plutôt c’est une échelle pour s’élever vers Dieu qui, voyant un homme humble, l’appelle à lui pour l’exalter, l’enflammer de sa charité et l’éclairer de ses lumières, afin qu’il voie. C’est pourquoi je t’affirme que tu es déjà dans la lumière, sur le bon chemin, tourné vers la vie véritable des enfants de Dieu.

647.7

– Mais pour avoir la grâce, il me faut entrer dans l’Eglise, recevoir le baptême qui purifie de la faute et nous rend de nouveau fils adoptifs de Dieu. Je n’y suis pas opposé, loin de là. J’ai détruit en moi le fils de la Loi, je ne peux plus avoir d’estime et d’amour pour le Temple. Mais je ne veux pas être rien. Je dois donc reconstruire sur les ruines de mon passé l’homme nouveau, et la foi nouvelle. Je pense toutefois que les apôtres et les disciples sont méfiants et prévenus à l’égard du grand rabbi à la nuque raide que je suis… »

Jean l’interrompt :

« Tu te trompes, Gamaliel. Je suis le premier à t’aimer et je marquerai comme un jour de très grande grâce celui où tu pourras te dire agneau du troupeau du Christ. Je ne serais pas son disciple si je ne mettais pas en pratique ses enseignements. Or il nous a commandé l’amour et la compréhension pour tous, et spécialement pour les plus faibles, les malades, les égarés. Il nous a ordonné d’imiter ses exemples. Or nous l’avons toujours vu être plein d’amour pour les coupables repentis, les fils prodigues qui revenaient au Père, ou les brebis perdues. De Marie-Madeleine à la Samaritaine, d’Aglaé au larron, combien il en a rachetés par miséricorde ! Il aurait pardonné même à Judas pour son crime suprême, s’il s’était repenti. Il lui avait pardonné tant de fois ! Je suis seul à savoir à quel point il l’a aimé, alors qu’il connaissait tout de sa conduite.

647.8

Viens avec moi, je ferai de toi un fils de Dieu et un frère pour le Christ Sauveur.

– Tu n’es pas le Pontife. Le Pontife, c’est Pierre. Et Pierre sera-t-il bon comme toi ? Lui, je le sais, est fort différent de toi.

– Il l’était. Mais depuis qu’il a vu combien il a été faible, jusqu’à être lâche et à renier son Maître, il n’est plus le même, et il est devenu miséricordieux pour tous et avec tous.

– Dans ce cas, mène-moi immédiatement à lui. Je suis âgé, et je n’ai que trop tardé. Je me sentais trop indigne, et je craignais que tous les serviteurs du Christ ne portent sur moi ce jugement. Maintenant que les paroles de Marie et les tiennes m’ont réconforté, je veux entrer tout de suite dans Bercail du Maître, avant que mon vieux cœur, brisé par tant de choses, ne s’arrête. Guide-moi, car j’ai congédié le serviteur qui m’a conduit ici, afin qu’il n’entende rien. Il va revenir à l’heure de prime. Mais je serai déjà loin, et de deux manières : de cette maison et du Temple. Pour toujours. J’irai d’abord, moi le fils rebelle, à la maison du Père, moi la brebis perdue, au vrai Bercail du Pasteur éternel. Puis je retournerai dans ma maison lointaine, pour y mourir dans la paix et dans la grâce de Dieu. »

647.9

Dans un geste spontané, Marie l’étreint et lui dit :

« Que Dieu te donne la paix. La paix et la gloire éternelle parce que tu l’as mérité, en montrant ta vraie pensée aux puissants chefs d’Israël sans craindre leurs réactions. Que Dieu soit avec toi, toujours. Que Dieu te donne sa bénédiction. »

Gamaliel cherche de nouveau les mains de Marie. Il les prend dans les siennes, les baise, et s’agenouille en la priant de poser ces mains bénies sur sa vieille tête fatiguée.

Marie le satisfait. Elle fait même davantage : elle trace un signe de croix sur sa tête inclinée puis, avec Jean, elle l’aide à se relever, l’accompagne à la porte et reste à le regarder s’éloigner, guidé par Jean vers la vraie vie, lui, le patriarche humainement fini, mais surnaturellement recréé.

647.1

Deben haber pasado algunos años, porque se ve que Juan está ya en la plena edad adulta (miembros más robustos, rostro más maduro, cabellos, barba y bigote de un rubio mucho más obscuro).

María —que está hilando mientras Juan pone de nuevo en orden la cocina de la casita del Getsemaní, cuyas paredes han sido recientemente blanqueadas y cuyos enseres de madera (banquetas, puerta, un vasar que hace también de repisa para la lámpara) han sido barnizados— no aparece cambiada. En absoluto aparece cambiada. Su aspecto es fresco y sereno. Han desaparecido todas las huellas que el dolor por la muerte y regreso de su Hijo al Cielo había dejado en su cara (por las primeras persecuciones contra los cristianos). El tiempo no ha dejado grabadas sus huellas en ese rostro dulce; la edad no ha tenido el poder de alterar su fresca y pura belleza.

La lámpara, encendida, encima de la mesa, proyecta su luz palpitante sobre las pequeñas y diligentes manos de María, sobre el estambre cándido envuelto en la rueca, sobre el hilo delgado, sobre el huso que da vueltas, sobre los rubios cabellos recogidos en denso moño tras la nuca.

Por la puerta abierta, un rayo tersísimo de luna penetra en la cocina, extendiendo una franja de plata desde la puerta hasta el pie de la banqueta en que María está sentada. María, por ello, tiene los pies iluminados por el rayo lunar, mientras que sus manos y su cabeza lo están por la luz rojiza de la lámpara. Fuera, en los olivos que rodean la casa del Getsemaní, unos ruiseñores cantan su canto de amor.

De repente los pajarillos enmudecen, como asustados. Al cabo de unos momentos, se oyen pisadas que se acercan cada vez más, hasta llegar al umbral de la puerta de la cocina; y, contemporáneamente, desaparece la blanca franja lunar que antes vestía de plata las toscas y obscuras baldosas del suelo.

647.2

María alza la cabeza y la vuelve hacia la puerta. Juan también mira. Un «¡Oh!» lleno de maravilla sale de los labios de los dos, mientras, con un único movimiento, ambos, presurosos, se dirigen hacia la puerta sobre cuyo umbral ha aparecido, y se ha detenido, Gamaliel. Es un Gamaliel ya muy anciano; está muy delgado; trae vestiduras blancas que la luna, incidiendo en él por detrás, hace casi fosforescentes: parece espectral. Es un Gamaliel abatido, triturado, por los sucesos, por sus remordimientos, por muchas cosas, más aún que por la edad.

«¿Tú aquí, rabí? ¡Entra! ¡Ven! La paz sea contigo» le dice Juan, que está frente a él y muy cerca, mientras que María está algunos pasos más atrás.

«Si me guías… Estoy ciego…» responde el anciano rabí, con voz trémula más por un secreto llanto que por la edad.

Juan, asombrado, pregunta con emoción y piedad en la voz: «¡¿Ciego?! ¿Desde cuándo?».

«¡Oh!… ¡Desde hace mucho! La vista empezó a debilitárseme en seguida… después de que… sí… después de que no supe reconocer la Luz verdadera que había venido a iluminar a los hombres; hasta que el terremoto desgarró el velo del Templo y zarandeó las robustas murallas, como Él había dicho. Verdaderamente un dúplice velo, que cubría el Santo de los Santos del Templo y al aún más verdadero Santo de los Santos, a la Palabra del Padre, su eterno Unigénito, celado por el velo de una humana, purísima carne, que sólo su Pasión y su gloriosa Resurrección revelaron, incluso a los más obtusos —yo el primero—, en lo que realmente era: el Cristo, el Mesías, el Emmanuel. Desde ese momento las tinieblas empezaron a descender sobre mis pupilas y a hacerse cada vez más densas. Justo castigo para mí. Desde hace un tiempo, estoy totalmente ciego.

647.3

Y he venido…».

Juan le interrumpe preguntándole: «¿Quizás para pedir un milagro?».

«Sí. Un gran milagro. Se lo pido a la Madre del Dios verdadero».

«Gamaliel, yo no tengo el poder que tenía mi Hijo. Él podía devolver vida y vista a las pupilas apagadas, palabra a los mudos, movimiento a los paralizados. Pero yo no» le responde María. Y prosigue: «Pero ven aquí, junto a la mesa, y siéntate. Estás cansado y eres anciano, rabí. No te fatigues más» y, piadosamente, junto con Juan, le conduce a la mesa y le ayuda a sentarse en una banqueta.

Gamaliel, antes de soltarle la mano, se la besa con veneración; luego le dice: «No te pido, María, el milagro de que vea de nuevo. No. No pido esta cosa material. Lo que te pido, Bendita entre todas las mujeres, es una vista de águila para mi espíritu, para ver toda la Verdad. No te pido la luz para mis pupilas apagadas, sino la luz sobrenatural, divina, la verdadera luz, que es sabiduría, verdad, vida, para mi alma y corazón lacerados y exhaustos por los remordimientos, que no me dan tregua. No tengo ningún deseo de ver con los ojos este mundo hebreo tan… sí, tan obstinadamente rebelde a Dios, a Dios que con él fue y es tan compasivo como, en verdad, no merecimos que lo fuera. Es más, estoy contento de no tener que verle ya, y de que mi ceguera me haya librado de todo compromiso con el Templo y el Sanedrín, tan injustos para con tu Hijo y para con sus seguidores. A quien deseo ver, con la mente, el corazón y el espíritu, es a Él, a Jesús. Verle en mí, en mi espíritu, verle espiritualmente, como, ciertamente, tú, oh santa Madre de Dios, y Juan, tan puro, y Santiago, mientras tuvo vida, y los otros, para ayuda en su grave y obstaculado ministerio, le veis. Verle para amarle con todo mi ser y con este amor poder expiar mis culpas y recibir perdón de Él, para tener esa vida eterna de la que me he hecho indigno…». Apoya la cabeza en los brazos, apoyados a su vez en la mesa, y llora.

647.4

María le pone una mano en su cabeza estremecida por los sollozos, y le responde: «¡No! ¡Que no te has hecho indigno de la vida eterna! Todo lo perdona el Salvador a quien se arrepiente de sus errores pasados. Incluso a su traidor le habría perdonado, si se hubiera arrepentido de su horrendo pecado. Y la culpa de Judas de Keriot es inmensa respecto a la tuya. Considera esto: Judas era el apóstol recibido por Cristo, instruido por Cristo, amado por Cristo más que los demás (si se piensa que, no ignorando nada sobre él, Cristo no le expulsó del grupo de sus apóstoles, sino que, al contrario, hasta el último momento, recurrió a todos los medios para que ellos no comprendieran lo que Judas era y lo que tramaba). Mi Hijo era la Verdad misma, y no mintió nunca, por ningún motivo. Pero, cuando veía que los otros once, sospechando, le preguntaban sobre Judas, Él, sin mentir, conseguía desviar sus sospechas y lograba no responder a sus preguntas, y les imponía que no preguntaran, por prudencia y caridad respecto al hermano. Tu culpa es mucho menor. Es más, ni siquiera puede llamarse culpa. Esto tuyo no es incredulidad; es exceso de fe. Tanto creíste en aquel Niño de doce años que te habló en el Templo, que, obstinadamente pero con una recta intención que venía de tu absoluta fe en aquel Niño por cuyos labios habías oído palabras de infinita sabiduría, has esperado el signo para creer en Él y ver en Él al Mesías. Dios perdona a quien tiene una fe tan fuerte y fiel. Y más aún perdona a quien, aun estando todavía en duda respecto a la verdadera Naturaleza de un hombre acusado injustamente, no quiere tomar parte en su condena porque la siente injusta. Tu espiritual visión de la Verdad ha crecido sin cesar desde que dejaste el Sanedrín por no consentir en aquella sacrílega acción. Y aún creció más cuando, estando en el Templo, viste que se verificó el tan esperado signo, que signó el comienzo de la era cristiana. Y aún más aumentó cuando, con aquellas potentes, angustiadas palabras, rogaste al pie de la cruz de mi Hijo, ya gélido y exánime. Y se ha hecho casi perfecta cada una de las veces que, o con las palabras o poniéndote al margen, has defendido a los fieles de mi Hijo y no has querido tomar parte en la condena de los primeros mártires. Créeme, Gamaliel, cada uno de tus actos de dolor, de justicia, de amor, ha aumentado en ti tu espiritual visión».

647.5

«¡No basta todo esto! Es que… yo recibí la insólita gracia de conocer a tu Hijo desde su primera pública manifestación, en el momento de su mayoría de edad. ¡Habría debido ver desde entonces!, ¡comprender! Fui un ciego y un necio… ni vi ni comprendí; ni entonces ni otras veces en que tuve la gracia de verle, hecho ya Hombre y Maestro, y de oír sus cada vez más precisas y poderosas palabras. Tercamente esperaba la señal humana, el estremecimiento de las piedras… ¡Y no veía que todo en Él era una señal segura! ¡Y no veía que Él era la Piedra angular anunciada[1] por los profetas; la Piedra que ya estremecía al mundo, a todo el mundo, al hebreo y al gentil; la Piedra que estremecía las piedras de los corazones con su palabra, con sus prodigios! ¡No veía en Él la señal evidente del Padre suyo en todo lo que hacía o decía! ¿Cómo puede Él perdonar tanta obstinación?».

647.6

«Gamaliel, ¿puedes creer que yo —que soy la Sede de la Sabiduría, la Llena de Gracia, y que, de la Sabiduría que en mí ha tomado Carne y de la Gracia de que estoy llena, he recibido la plenitud del conocimiento de las cosas sobrenaturales— puedo aconsejarte bien?».

«¡Claro que lo creo! Precisamente porque creo que eres esto, vengo a ti en busca de luz. Tú, Hija, Madre, Esposa de Dios, el cual, sin duda, desde tu concepción te colmó de sus luces sapienciales, no puedes sino indicarme el camino que debo tomar para tener paz, para encontrar la verdad, para conquistar la verdadera Vida. Tengo tanta conciencia de mis errores, estoy tan aplastado por mi miseria espiritual, que necesito ayuda para atreverme a ir a Dios».

«Eso que tú juzgas como un obstáculo es, por el contrario, ala para elevarte hacia Dios. Has demolido el edificio de ti mismo, te has humillado; eras un monte poderoso, te has hecho valle profundo. Debes saber que la humildad es semejante a un fertilizante que prepara el más árido terreno para que dé plantas y feraces cosechas. Es peldaño para subir; es más, es escalera para subir a Dios, el cual, viendo al humilde, le llama hacia sí para ensalzarle, para encenderle con su caridad e iluminarle con sus luces para que vea. Por esto te digo que tú estás ya en la Luz, en el Camino justo, hacia la Vida verdadera de los hijos de Dios».

647.7

«Pero para tener la Gracia debo entrar en la Iglesia, recibir el Bautismo que limpia de la culpa y nos hace nuevamente hijos adoptivos de Dios. Yo no me opongo a ello. ¡Al contrario! He destruido en mí al hijo de la Ley, no puedo ya sentir estima ni amor por el Templo. Pero ser nada no quiero. Por tanto, debo edificar de nuevo, sobre las ruinas de mi pasado, el hombre nuevo y la fe nueva. Pero los apóstoles y los discípulos, respecto a mí, el gran rabí de dura cerviz, sentirán desconfianza y prejuicios…».

Juan le interrumpe diciendo: «Te equivocas, Gamaliel. Yo soy el primero que te quiero y que anotaría como día de suma gracia el día en que pudiera llamarte cordero del rebaño de Cristo. No sería discípulo de Cristo si no pusiera en práctica sus enseñanzas. Y Él nos mandó amor y comprensión para todos, y especialmente para los más débiles, enfermos, descaminados. Nos ordenó que imitáramos sus ejemplos. Y nosotros siempre le vimos lleno de amor hacia los culpables arrepentidos, o hacia los hijos pródigos que volvían al Padre, o hacia las ovejas descarriadas. Desde la Magdalena a la Samaritana, desde Áglae al ladrón, ¡a cuántos redimió con misericordia! Habría perdonado también a Judas su supremo delito, si se hubiera arrepentido. ¡Muchas veces le había perdonado! Sólo yo sé cuánto le amaba, aun conociéndole en todas sus acciones.

647.8

Ven conmigo. Haré de ti un hijo de Dios y hermano del Cristo Salvador».

«Tú no eres el Pontífice. Pontífice es Pedro. ¿Y Pedro será tan bueno como tú? Yo sé que es muy distinto de ti».

«Era. Pero desde que vio cuán débil fue —hasta el punto de ser cobarde y renegar de su Maestro— ya no es lo que era, y tiene misericordia para todos y con todos».

«Entonces llévame inmediatamente donde él. Soy viejo, y ya demasiado me he demorado. Me sentía demasiado indigno, y temía que todos los fieles de Jesús me juzgaran de la misma manera. Ahora, que las palabras de María y tuyas me han confortado, quiero entrar en seguida en el Redil del Maestro, antes de que mi viejo corazón, por tantas cosas quebrantado, se pare. Guíame tú, porque he dicho al siervo que me ha traído hasta aquí que se marchara, para que no oyera nada. Volverá a la hora primera. Pero para entonces yo ya estaré lejos. En dos sentidos: lejos de esta casa y lejos del Templo. Para siempre. Primero iré, yo, hijo rebelde, a la casa del Padre, yo, oveja descarriada, al verdadero Redil del Pastor eterno. Luego volveré a mi lejana casa, para morir allí en paz y en gracia de Dios».

647.9

María, con un gesto espontáneo, le abraza y le dice: «Que Dios te dé paz. Paz y gloria eterna, porque te lo has merecido mostrando tu verdadero pensamiento a los poderosos jefes de Israel sin miedo a sus reacciones. Que Dios esté contigo siempre. Que Dios te dé su bendición».

Gamaliel busca de nuevo las manos de Ella. Las toma entre las suyas. Las besa. Se arrodilla y le ruega que ponga esas manos benditas sobre su anciana cabeza cansada.

María le complace. Hace incluso más. Traza una señal de la cruz sobre su cabeza inclinada. Luego, junto con Juan, le ayuda a ponerse en pie, le acompaña hasta la puerta y le mira mientras, guiado por Juan, se encamina hacia la verdadera Vida; mira a este hombre humanamente llegado a su fin pero sobrenaturalmente creado de nuevo.


Notes

  1. prédite, en Ps 118, 22-23 ; Is 28, 16.

Notas

  1. anunciada, en: Salmo 118, 22-23; Isaías 28, 16.