The Writings of Maria Valtorta

189. A Naïm. Résurrection du fils d’une veuve.

189. At Nain. The raising from

189.1

Naïm devait avoir une certaine importance au temps de Jésus. Sans être très grande, la ville est bien construite. Enfermée dans l’enceinte de ses murs, elle s’étend sur une colline basse et riante, un contrefort du petit mont Hermon, et elle domine une plaine très fertile qui oblique vers le nord-ouest[1].

On y arrive, en venant d’En-Dor, après avoir franchi un cours d’eau qui est certainement un affluent du Jourdain. Pourtant, de cet endroit, on ne voit plus le Jourdain, et pas davantage sa vallée, parce que des collines le cachent en formant vers l’est un arc en forme de point d’interrogation.

Jésus s’y rend par une grand-route qui unit la région du lac à l’Hermon et à ses villages. Derrière lui marchent de nombreux habitants d’En-Dor qui n’arrêtent pas de bavarder.

La distance qui sépare le groupe des apôtres des murs est maintenant très courte : deux cents mètres, tout au plus. La grand-route entre directement dans la ville par une porte qui est grande ouverte, car il fait plein jour. On peut donc apercevoir ce qui se trouve immédiatement au-delà des murs. C’est ainsi que Jésus, qui conversait avec ses apôtres et le nouveau converti, voit venir, dans un grand bruit de pleureuses et un semblable apparat oriental, un cortège funèbre.

« On va voir, Maître ? » disent certains apôtres. Plusieurs habitants d’En-Dor se sont déjà précipités pour regarder.

« Allons-y, condescend Jésus.

– Oh ! Ce doit être un enfant car tu vois combien de fleurs et de rubans il y a sur la litière ? dit Judas à Jean.

– Ou bien c’est une vierge, répond Jean.

– Non, c’est sûrement un jeune garçon à cause des couleurs qu’ils ont mises et puis, il n’y a pas de myrtes… » dit Barthélemy.

Le cortège funèbre sort des murs. Impossible d’entrevoir ce qu’il y a sur la litière que les porteurs tiennent bien haut sur leurs épaules. C’est seulement à la forme qu’il dessine que l’on devine le corps étendu dans ses bandelettes et couvert d’un drap, et on se rend compte que c’est un corps qui a déjà atteint son développement complet car il est aussi long que la litière.

A côté, une femme voilée, soutenue par des parents ou des amies, marche en pleurant. Ce sont les seules vraies larmes de cette comédie larmoyante. Quand un porteur rencontre une pierre, un trou, une bosse de la route, cela donne une secousse à la litière et la mère gémit : « Oh, non ! Faites doucement ! Il a tellement souffert, mon petit ! » et elle lève une main tremblante pour caresser le bord de la litière. Elle ne saurait faire plus et, dans cette impuissance, elle baise les voiles qui flottent et les rubans que le vent soulève parfois et qui viennent effleurer la forme immobile.

« C’est la mère » dit Pierre, tout ému ; une larme brille dans ses bons yeux vifs.

Mais il n’est pas le seul à avoir les larmes aux yeux devant ce déchirement : Simon le Zélote, André, Jean et jusqu’au toujours jovial Thomas ont dans les yeux la lueur d’une larme. Tous, tous sont profondément émus. Judas Iscariote murmure : « Si c’était moi ! Oh ! Ma pauvre mère… »

189.2

Jésus a un regard d’une douceur intolérable, tant elle est profonde. Il se dirige vers la litière.

La mère sanglote plus fort car le cortège tourne en direction du tombeau déjà ouvert. Voyant que Jésus va toucher la litière, elle l’écarte violemment. Qui sait ce qu’elle peut craindre dans son délire ? Elle hurle : « Il est à moi ! » et elle regarde Jésus avec des yeux hagards.

« Je le sais, mère. Il est à toi.

– C’est mon fils unique ! Pourquoi la mort pour lui, pour lui qui était bon et qui m’était si cher, qui faisait ma joie de veuve ? Pourquoi ? »

La foule des pleureuses fait retentir plus fort ses cris funèbres et rétribués pour faire écho à la mère qui continue :

« Pourquoi lui et pas moi ? Ce n’est pas juste que celle qui a engendré voie périr son fruit. Le fruit doit vivre, car sinon, sinon à quoi servent ces entrailles qui se déchirent pour mettre au monde un homme ? »

Elle se frappe le ventre, féroce et désespérée.

« Ne fais pas cela ! Ne pleure pas, mère. »

Jésus lui prend les mains dans une étreinte puissante et les retient de sa main gauche pendant qu’avec la droite il touche la litière en disant aux porteurs :

« Arrêtez-vous et posez-la à terre. »

Les porteurs obéissent et descendent le brancard qui reste soutenu par ses quatre pieds.

Jésus saisit le drap qui recouvre le mort et le rejette en arrière, découvrant la dépouille. La mère crie sa douleur en appelant le nom de son fils, je crois : « Daniel ! »

Jésus, qui tient toujours les mains de la mère dans la sienne, se redresse, imposant par l’éclat de son regard, avec son visage des miracles les plus puissants et, abaissant sa main droite, il ordonne de toute la puissance de sa voix :

« Jeune homme ! Je te le dis : lève- toi ! »

189.3

Le mort se lève, comme il est, avec ses bandelettes, pour s’asseoir sur la litière et, appelle : « Maman ! » il l’appelle avec la voix balbutiante et effrayée d’un enfant terrorisé.

« Il est à toi, femme. Je te le rends au nom de Dieu. Aide-le à se débarrasser du suaire. Et soyez heureux. »

Jésus est sur le point de se retirer.

Mais oui ! La foule le bloque à côté de la litière sur laquelle la mère s’est penchée et où elle s’embrouille au milieu des bandelettes pour faire le plus vite possible, pendant que les lamentations de l’enfant ne cessent d’implorer : « Maman ! Maman ! »

Le suaire est enlevé, les bandelettes déliées, la mère et le fils peuvent s’embrasser et ils le font sans tenir compte des baumes poisseux que la mère essuie ensuite du cher visage, des chères mains, avec les bandelettes elles-mêmes. Puis, n’ayant rien pour l’habiller, la mère retire son manteau et l’en revêt, et tout sert pour le caresser…

189.4

Jésus la regarde… il regarde ce groupe affectueux serré contre les bords de la litière qui maintenant n’est plus funèbre et il pleure.

Judas voit ces larmes et demande :

« Pourquoi pleures-tu, Seigneur ? »

Jésus tourne vers lui son visage et lui répond :

« Je pense à ma Mère… »

Cette brève conversation ramène l’attention de la femme vers son Bienfaiteur. Elle prend son fils par la main et le soutient, – on dirait en effet que son corps garde un reste de léthargie –, et elle s’agenouille en disant :

« Toi aussi, mon fils, bénis ce Saint qui t’a rendu à la vie et à ta mère. »

Puis elle se penche pour baiser le vêtement de Jésus pendant que la foule chante des hosannas à Dieu et à son Messie, désormais connu pour ce qu’il est, car les apôtres et les habitants d’En-Dor se sont chargés de dire quel est Celui qui a accompli le miracle.

Toute la foule s’écrie maintenant :

« Que soit béni le Dieu d’Israël ! Que soit béni le Messie, son Envoyé ! Que soit béni Jésus, fils de David ! Un grand prophète s’est levé parmi nous ! Dieu a vraiment visité son peuple ! Alléluia ! Alléluia ! »

189.5

Finalement, Jésus peut se dégager de leur étreinte et entrer en ville. La foule le suit et le poursuit, avec toute l’exigence de son amour. Un homme accourt et le salue profondément.

« Je te prie de demeurer sous mon toit.

– Je ne le peux pas. La Pâque m’interdit toute halte sauf celles qui sont fixées d’avance.

– Dans quelques heures, ce sera le crépuscule et on est ven­dredi…

– Justement, je dois avoir achevé mon étape avant le crépuscule. Je te remercie tout de même, mais ne me retiens pas.

– Mais je suis le chef de la synagogue.

– Tu veux dire par là que tu en as le droit. Homme, il suffisait que je m’attarde une heure et cette mère n’aurait pas recouvré son fils. Je vais là où d’autres malheureux m’attendent. Ne retarde pas leur joie par égoïsme. Je viendrai certainement une autre fois et je resterai avec toi à Naïm plusieurs jours. Pour l’instant, laisse-moi partir. »

L’homme n’insiste plus. Il dit seulement :

« C’est dit. Je t’attends.

– Oui. Que la paix soit avec toi et avec les habitants de Naïm. A vous aussi, habitants d’En-Dor, paix et bénédiction. Rentrez chez vous. Dieu vous a parlé par le miracle. Faites qu’il arrive en vous, à force d’amour, autant de résurrections au bien qu’il y a de cœurs. »

Un dernier concert d’hosannas, puis la foule laisse partir Jésus qui traverse en diagonale la ville et sort dans la campagne, vers Esdrelon.

189.1

Nain must have been a town of some importance in the days of Jesus. It is not a large town, but is well built, surrounded by its walls, lying on a low pleasant hill, an off shoot of the Little Hermon, commanding a very fertile plain which stretches towards the north-east.

One arrives here coming from Endor, after crossing a little river, which flows into the Jordan. But neither the Jordan nor its valley can be seen any longer, because they are concealed by hills which form an arch shaped like a question mark in the east.

Jesus follows a main road which links the lake region to the Hermon and its villages. Many inhabitants of Endor walk behind Him talking to one another animatedly.

Only a short distance separates the group of the apostles from the walls: about two hundred yards, at the most. And as the main road runs straight to one of the town gates, which is wide open because it is broad daylight, it is possible to see what is happening in the inner side of the walls. Thus Jesus, Who is speaking to the apostles and the new convert, sees a funeral coming towards them, with a great noise of weepers and similar eastern displays.

«Shall we go and see, Master?» ask many. And many of the inhabitants of Endor are already rushing to see.

«Yes, let us go» says Jesus condescendingly.

«Oh! It must be a boy. See how many flowers and ribbons there are on the stretcher» says Judas of Kerioth to John.

«Or it is probably a virgin» replies John.

«No, it is certainly a young man, because of the shades they have used. And there is no myrtle either…» says Bartholomew.

The funeral comes out from the other side of the walls. It is not possible to see what there is on the stretcher, which is carried shoulder high by the bearers. One understands that there is a corpse, wrapped in bandages and covered by a sheet, only because of its outline and that it is the body of a fully grown person, because it is as long as the stretcher.

A veiled woman is walking beside it, weeping, supported by relatives or friends. The only sincere tears in all that farce of mourners. And when a bearer trips on a stone or heap in the ground or stumbles and causes the stretcher to shake, the mother moans: «Oh! No! Be careful! My boy has suffered so much!» and she raises her trembling hand to caress the edge of the stretcher. And as she is unable to do anything else, she kisses the veils and the ribbons, which blown by a gentle breeze lightly touch the immobile corpse.

Peter, sympathetic, his good keen eyes welling up with tears whispers: «She is the mother.» But he is not the only one whose eyes are shining with tears at the sight. Also the Zealot, Andrew, John, and even the ever merry Thomas have tears in their eyes. They are all deeply moved. Judas Iscariot whispers: «If it were I! Oh! Poor mother of mine…»

189.2

Jesus, the kindness of Whose eyes is so deep as to be unbearable, makes His way towards the stretcher.

The mother, who is now sobbing louder because the funeral is about to turn towards the open sepulchre, pushes Him aside resolutely, when she sees that Jesus wants to touch the stretcher. I wonder what she is afraid of in her grief. She shouts: «He is mine!» and looks at Jesus with staring eyes.

«I know, mother. He is yours.»

«He is my only son! Why should he die, he was so good and dear, he was my joy, and I am a widow. Why?» The crowd of the hired mourners mourn more loudly, forming a chorus with the mother who continues: «Why he, and not I? It is not just that she who has borne a child, should see her offspring perish. The offspring must live, otherwise why was my womb torn to give birth to a man?» and she strikes her abdomen wildly and desperately.

«Do not do that! Do not weep, mother.» Jesus takes her hands clenching them firmly in His left hand, while with His right one He touches the stretcher saying to the bearers: «Stop and put the stretcher down.»

The bearers obey and lower the little bed that rests on its four legs.

Jesus takes the sheet covering the dead boy and pulls it back uncovering the corpse.

The mother shouts her grief and the name of her son, I think: «Daniel!»

Jesus, still clenching the mother’s hands in His, stands up, His eyes imposingly bright, the power of miracle shining majestically on His face, lowering His right hand, orders in the full strength of His voice: «Young man! I tell you: get up!»

189.3

The dead boy, wrapped in bandages as he is, sits up on the little bed and calls: «Mother!» He calls her with the stammering frightened voice of a terrified child.

«He is yours, woman. I give him to you in the name of God. Help him to get rid of the sudarium. And be happy.»

And Jesus makes the gesture of withdrawing. Impossible! The crowds rivet Him to the stretcher, on which the mother has thrown herself groping for the bandages, endeavouring to be quick, while the imploring childish moaning repeats: «Mother! Mother!»

The sudarium and bandages are undone and mother and son can embrace each other, and they do so without bothering about the sticky balms, which the mother removes from his dear face and hands, making use of the same bandages. As she has not clothes to put on him, she takes off her mantle and wraps him in it, caressing him all the time…

189.4

Jesus looks at her… he looks at the loving group, close together on the edge of the little bed, no longer a stretcher, and He weeps.

Judas Iscariot sees His tears and asks: «Why are You weeping, my Lord?»

Jesus turns His face towards him and says: «I am thinking of My Mother…»

The brief conversation draws the woman’s attention to her Benefactor. She takes her son by the hand, she supports him because his limbs are still somewhat numb, and kneeling down she says: «You, too, my son. Bless this Holy man Who has restored you to life and to your mother» and she bends to kiss Jesus’ tunic while the crowd sing hosannas to God and to His Messiah, Who by now is well known for what He is, because the apostles and the people of Endor have taken it upon themselves to tell Who is He Who worked the miracle. And the crowds exclaim: «Blessed be the God of Israel. Blessed be the Messiah, His Messenger! Blessed be Jesus, Son of David! A great Prophet is risen among us! God has really visited His people! Hallelujah! Hallelujah!»

189.5

At last Jesus can steal away and enter the town. The crowd follow and pursue Him, exulting in their love.

A man rushes towards Jesus and bows deeply to Him. «Please come and stay under my roof.»

«I cannot. Passover prevents Me from making any stop except those programmed.»

«In a few hours it will be sunset and this is Friday…»

«Exactly, that is why I must reach My resting place before sunset. I thank you just the same. But do not keep Me back.»

«I am the head of the synagogue.»

«So you mean that you are entitled to have Me. Man, if I had arrived here only one hour later, that woman would not have had her son restored to her. I am going where other unhappy people are waiting for Me. Do not be so selfish as to delay their joy. I will certainly come again and I will be with you in Nain for several days. Now let Me go.»

The man does not insist any more. He only says: «As You said. I will wait for You.»

«Yes. Peace to you and to the citizens of Nain. Also to you, people of Endor, peace and blessings. Go back to your homes. God has spoken to you through the miracle. Endeavour, through the power of love, to have all your hearts restored to Goodness.»

A last chorus of hosannas. Then the crowds let Jesus go and He crosses the town diagonally and goes out into the country, towards Esdraelon.


Notes

  1. vers le nord-ouest : sur le dessin qui suit, Maria Valtorta a noté : plaine d’Esdrelon à l’ouest, Thabor au nord, plus bas : Naïm et En-Dor, et encore plus bas : petit Hermon.