The Writings of Maria Valtorta

199. Chez les lépreux de Soloan et de Ben Hinnom.

199. To the lepers of Siloam and Ben Hinnom.

199.1

La splendide matinée invite vraiment à se promener et à sortir des lits et des maisons ; comme autant d’abeilles au premier soleil, les habitants de la maison de Simon le Zélote se lèvent en vitesse et sortent respirer l’air pur dans le verger de Lazare qui entoure le petit logis hospitalier. Ils sont vite rejoints par ceux qui sont logés chez Lazare, à savoir : Philippe, Barthélemy, Matthieu, Thomas, André et Jacques, fils de Zébédée. Un joyeux soleil pénètre par toutes les fenêtres et les portes grandes ouvertes, et les pièces, simples et propres, se revêtent d’une teinte dorée qui avive les couleurs des vêtements et fait briller cheveux et pupilles.

Marie, femme d’Alphée, et Salomé sont occupées à servir ces hommes au vigoureux appétit. Marie, de son côté, surveille un serviteur de Lazare qui peigne les cheveux de Marziam avec plus de savoir-faire que son premier barbier :

« Pour le moment, ce sera comme ça, dit le serviteur. Plus tard, quand tu auras offert à Dieu tes cheveux d’enfant, je te les raccourcirai davantage. La chaleur arrive et tu seras plus à l’aise sans cheveux dans le cou. Et ils reprendront de la force. Ils sont secs et cassants, négligés. Tu le vois, Marie ? Ils ont besoin de soins. Maintenant, j’y mets de l’huile pour les tenir en place. Tu sens, mon enfant, cette bonne odeur ? C’est l’huile qui sert à Marthe. Amande, palme et moelle avec les essences les plus fines et les plus rares. Cela fait très bien. Ma maîtresse m’a dit de conserver ce petit vase pour l’enfant. Ah, voilà ! Maintenant tu ressembles à un fils de roi. »

Le serviteur, qui est peut-être le barbier de la maison de Lazare, donne une petite tape sur la joue de Marziam, salue Marie et repart satisfait.

« Viens, que je t’habille » dit Marie à l’enfant qui n’a pour l’instant qu’une petite tunique à manches courtes.

Je crois que c’est la chemise ou ce qui en ce temps-là en tenait lieu. Vu la finesse du lin, je comprends qu’elle a fait partie du trousseau de Lazare enfant. Marie enlève le linge de bain dans lequel Marziam était enveloppé et lui passe le sous-vêtement froncé au cou et aux poignets, ainsi que le vêtement de dessus rouge, en laine, au large décolleté et aux larges manches. La blancheur du lin brillant ressort au cou et aux manches de l’étoffe rouge et mate. La main de Marie a dû pourvoir, pendant la nuit, à mettre aux mesures la longueur du vêtement et des manches, si bien que, maintenant, il lui va bien, et d’autant plus quand Marie lui ceint la taille de la soyeuse bande de la ceinture, qui se termine par un pompon de laine blanche et rouge. L’enfant ne ressemble plus au pauvre petit qu’il était, il y a encore quelques jours.

« Maintenant, va jouer sans te salir pendant que je me prépare » dit Marie en le caressant.

Et il sort, en sautant de joie, pour chercher ses grands amis.

199.2

Le premier qui le voit, c’est Thomas :

« Mais que tu es beau ! Comme pour des noces ! Tu m’é­clipses ! » dit le toujours jovial Thomas, grassouillet, tranquille.

Et il ajoute en le prenant par la main :

« Viens, nous allons chez les femmes. Elles te cherchent pour te donner la becquée. »

Ils entrent dans la cuisine et Thomas fait sursauter les deux Marie penchées sur les fourneaux en criant de sa grosse voix :

« Voici un jeune homme qui vous demande ! » et, en riant, il présente l’enfant qui s’était caché derrière sa robuste personne.

« Oh, mon chéri ! Mais viens que je t’embrasse ! Regarde, Salomé, comme il est beau ! S’exclame Marie, femme d’Alphée.

– C’est vrai ! Maintenant, il n’a plus qu’à devenir plus robuste. Mais c’est moi qui vais y veiller. Viens que je t’embrasse à mon tour, répond Salomé.

– Mais Jésus le confie aux bergers… objecte Thomas.

– Jamais de la vie ! En cela, mon Jésus se trompe. Que voulez-vous faire et que savez-vous faire, vous, les hommes ? Vous dispu­ter — car, soit dit en passant, vous êtes plutôt querelleurs… comme des chevreaux qui s’aiment, mais qui se donnent des coups de cornes — manger, parler, avoir mille besoins et réclamer que le Maître ne pense qu’à vous… sinon, vous boudez… Les enfants ont besoin de mères. N’est-ce pas…, comment t’appelles-tu ?

– Marziam.

– Ah bon ! Mais ma Marie bénie pouvait te donner un nom plus facile !

– C’est presque le sien ! S’exclame Salomé.

– Oui, mais le sien est plus simple. Il n’y a pas ces trois con­sonnes au milieu… Trois, cela fait trop… »

Judas est entré et dit :

« Elle a pris le nom exact pour ce qu’il veut dire, conformément à l’ancienne langue.

– C’est bien, mais c’est difficile à prononcer ; moi, j’en enlève une lettre et je dis Marziam. C’est plus facile et cela n’entraînera pas la fin du monde. N’est-ce pas, Simon ? »

Pierre, qui passe devant la fenêtre en discutant avec Jean d’En-Dor, s’avance et dit :

« Que veux-tu ?

– Je disais que l’enfant, moi je l’appelle Marziam, c’est plus facile à prononcer.

– Tu as raison, femme. Si la Mère me le permet je l’appellerai comme ça, moi aussi. Mais comme tu es beau ! Mais moi aussi, hein ? Regardez ! »

Effectivement, il s’est bien brossé, il a les joues rasées, les cheveux et la barbe bien peignés, pommadés, le vêtement sans faux plis, et ses sandales paraissent neuves tant elles sont propres et astiquées avec je ne sais quoi. Les femmes l’admirent et il rit, tout content.

L’enfant a fini son repas et sort pour aller trouver son grand ami, qu’il appelle toujours “ Père ”.

199.3

Voici Jésus qui arrive de la maison de Lazare avec ce dernier, et il dit à l’enfant qui court à sa rencontre :

« Que la paix soit entre nous, Marziam ! Donnons-nous le baiser de paix. »

Lazare, salué par l’enfant, lui fait une caresse et lui donne une friandise.

Tous se réunissent autour de Jésus. Marie, habillée d’un vêtement de laine de couleur turquoise sur lequel est drapé un manteau plus foncé, s’avance elle aussi en souriant vers son Fils.

« Nous pouvons y aller, dit Jésus. Toi, Simon, avec ma Mère et l’enfant, si tu tiens à faire ton achat, même maintenant que Lazare y a pourvu.

– Mais certainement ! Et puis… je pourrai dire que, pour une fois, j’aurai pu accompagner ta Mère. C’est un grand honneur.

– Alors, vas-y. Toi, Simon, tu vas m’accompagner chez tes amis lépreux…

– Vraiment, Maître ? Alors, si tu le permets, je cours devant, pour les rassembler… Tu me rejoindras… Tu sais bien où ils se trouvent…

– C’est bien, vas-y. Que les autres fassent ce qui leur plaît. Vous êtes tous libres jusqu’à mercredi matin. A l’heure de tierce, tout le monde à la Porte Dorée.

– Moi, je viens avec toi, Maître, intervient Jean.

– Moi aussi, dit son frère Jacques.

– Et nous aussi, déclarent les deux cousins.

– Moi aussi, je viens, dit Matthieu, et avec lui André.

– Et moi ? Je voudrais bien venir moi aussi… mais si je vais faire l’achat… c’est impossible, dit Pierre, pris entre deux désirs.

– Cela peut s’arranger. D’abord, nous allons chez les lépreux. Pendant ce temps, ma Mère et l’enfant vont dans une maison amie d’Ophel. Après cela, nous la rejoindrons et tu partiras avec elle pendant que les autres et moi, nous nous rendrons chez Jeanne. Nous nous retrouverons à Gethsémani pour le repas, et vers le crépuscule nous reviendrons ici.

– Moi, si tu le permets, je vais trouver quelques amis… intervient Judas.

– Mais je l’ai dit : faites ce que vous voulez.

– Alors, moi, j’irai chez des parents. Peut-être mon père est-il déjà arrivé. Si c’est le cas, je te l’amènerai, dit Thomas.

– Nous deux, qu’en dis-tu, Philippe, nous pourrions aller chez Samuel.

– D’accord, répond Philippe à Barthélemy.

– Et toi, Jean ? demande Jésus à l’homme d’En-Dor. Préfères-tu rester ici pour ranger tes livres ou m’accompagner ?

– Vraiment, je préférerais t’accompagner… Les livres… me plaisent déjà moins. Je préfère te lire, toi, le Livre vivant.

– Alors, viens. Adieu, Lazare, à…

– Mais je viens moi aussi. Mes jambes vont un peu mieux, et après les lépreux, je te quitterai pour aller t’attendre à Gethsémani.

– Allons-y. Paix à vous, femmes. »

Jusqu’aux environs de Jérusalem, ils marchent tous ensemble. Puis ils se séparent. Judas part tout seul de son côté et entre dans la ville, probablement par la porte qui se trouve vers la Tour Antonia. Thomas, Philippe et Nathanaël font encore quelques dizaines de mètres avec Jésus et leurs compagnons, puis entrent en ville, par le faubourg d’Ophel, en compagnie de Marie et de l’enfant.

199.4

« Et maintenant, allons voir ces malheureux ! » dit Jésus.

Tournant le dos à Jérusalem, il se dirige vers un lieu désolé situé sur les pentes d’une colline rocheuse qui se trouve entre les deux routes qui mènent de Jéricho à Jérusalem. C’est un lieu étrange où l’on accède par des sortes de gradins. Après le premier niveau, on grimpe un sentier et le premier palier est surélevé d’au moins trois mètres au-dessus du sentier, et de même pour le second. Lieu aride, mort… très triste.

« Maître, crie Simon le Zélote, je suis ici. Arrête-toi pour que je te montre le chemin… »

Et Simon, qui s’était adossé à la roche pour avoir un peu d’ombre, s’avance et conduit Jésus par un sentier à gradins qui va vers Gethsémani, mais en est séparé par la route qui mène du mont des Oliviers à Béthanie[1].

« Nous y voilà. J’ai vécu au milieu des tombeaux de Siloan et c’est ici que se trouvent mes amis. Une partie d’entre eux, du moins. Les autres sont à Ben Hinnom, mais ne peuvent venir… Ils devraient traverser la route, et on les verrait.

– Nous irons aussi les trouver.

– Merci ! Pour eux et pour moi.

– Ils sont nombreux ?

– L’hiver en a tué le plus grand nombre, mais ici, il y en a encore cinq de ceux auxquels j’avais parlé. Ils t’attendent. Les voilà sur le bord de leur bagne… »

Ils doivent être une dizaine de monstres. Je dis “ doivent être ” car, s’il y en a cinq debout qu’on distingue bien, on voit si mal les autres à cause de la grisaille de leur peau, de la difformité de leur visage qui émerge à peine de la pierraille, qu’ils pourraient être plus ou moins de cinq. Parmi ceux qui se tiennent debout, il y a une seule femme. On ne peut l’identifier que grâce à ses cheveux devenus blancs, en broussaille, durs et sales, et qui retombent sur ses épaules jusqu’à la ceinture. Pour le reste, rien n’indique le sexe car la maladie, très avancée, en a fait presque un squelette et supprimé toute courbe féminine. Ainsi en est-il des hommes dont un seul présente un reste de moustache et de barbe. Les autres ont été rasés par cette maladie destructrice.

Ils crient : « Jésus, notre Sauveur, aie pitié de nous ! » et montrent leurs mains difformes et couvertes de plaies.

« Jésus, Fils de David, aie pitié !

– Que voulez-vous que je fasse pour vous ? demande Jésus en levant son visage vers ces misères.

– Que tu nous sauves du péché et de la maladie.

– Ce sont la volonté et le repentir qui sauvent du péché…

– Mais si tu le veux, tu peux effacer nos péchés. Au moins cela, si tu ne veux pas guérir nos corps.

– Si je vous dis : “ Choisissez entre les deux choses ”, laquelle voulez-vous ?

– Le pardon de Dieu, Seigneur, pour être moins désolés. »

Jésus fait un signe d’approbation, avec un sourire lumineux, puis il lève les bras et s’écrie :

« Soyez exaucés, je le veux. »

Exaucés ! Cela peut concerner le péché comme la maladie, ou les deux, et les cinq malheureux restent dans l’incertitude. Mais les apôtres, eux, ne sont pas incertains, et ils ne peuvent s’empêcher de crier leur hosanna en voyant la lèpre disparaître comme un flocon de neige qui tombe sur du feu. A ce moment, les cinq lépreux comprennent qu’ils sont exaucés complètement. Leurs cris résonnent comme une sonnerie de victoire. Ils s’embrassent les uns les autres et envoient des baisers à Jésus, puisqu’ils ne peuvent se précipiter à ses pieds, puis ils se tournent vers leurs compagnons pour leur dire :

« Et vous, vous ne voulez pas encore croire ? Mais quels malheureux êtes-vous ? »

– Soyez bons ! Vos pauvres frères ont besoin de réfléchir. Ne leur dites rien. La foi ne s’impose pas. On la prêche par la paix, la douceur, la patience, la constance. C’est ce que vous ferez après votre purification, comme Simon l’a fait pour vous. Du reste, le miracle est déjà lui-même une prédication. Vous, qui êtes guéris, allez au plus tôt trouver le prêtre. Vous, les malades, attendez-nous ce soir. Nous vous apporterons des vivres. Que la paix soit avec vous. »

Jésus redescend sur la route, accompagné par les bénédictions de tous.

199.5

« Et maintenant, allons à Ben Hinnom, dit Jésus.

– Maître… je voudrais venir, mais je me rends compte que je ne le puis. Je vais à Gethsémani, dit Lazare.

– Vas-y. Va, Lazare. Que la paix soit avec toi. »

Pendant que Lazare s’éloigne lentement, l’apôtre Jean dit :

« Maître, je l’accompagne. Il est fatigué et le chemin n’est pas très bon. Je te rejoindrai ensuite à Ben Hinnom.

– Bien, vas-y. Allons. »

Ils passent le Cédron, longent le côté sud du mont Tophet et pénètrent dans la petite vallée, toute remplie de tombeaux et d’ordures, sans un arbre, sans rien, sur ce côté méridional, qui fasse écran au soleil. Il darde ses rayons et rend brûlantes les pierres de ces nouvelles terrasses d’enfer, à la base desquelles fument des feux pestilentiels qui augmentent encore la chaleur. A l’intérieur de ces tombeaux, pareils à des fours crématoires, il y a de pauvres corps qui se consument… Siloan doit être sinistre en hiver, humide comme il est et tourné presque vers le nord, mais ce doit être terrible en été…

Simon le Zélote pousse un cri d’appel et d’abord trois, puis deux, puis un, et un autre encore viennent comme ils le peuvent jusqu’à la limite prescrite. Ici, il y a deux femmes dont l’une tient par la main une horreur d’enfant dont la lèpre a atteint particulièrement le visage. Il est déjà aveugle…

Il y a aussi un homme de noble allure malgré sa misérable condition. Il prend la parole au nom de tous :

« Que soit béni le Messie du Seigneur qui est descendu dans notre Géhenne pour en tirer ceux qui espèrent en lui. Sauve-nous, Seigneur, que nous ne périssions pas ! Sauve-nous, Sauveur ! Roi de la souche de David, Roi d’Israël, aie pitié de tes sujets ! O toi, le bourgeon de la tige de Jessé, dont il est dit que quand tu viendras il n’y aura plus de mal, étends ta main pour recueillir ces restes de ton peuple. Fais disparaître de nous cette mort, essuie nos larmes, puisque c’est ce qui a été dit de toi. Appelle-nous, Seigneur, à tes bons pâturages, à tes douces eaux car nous sommes assoiffés. Emmène-nous sur les collines éternelles où il n’y a plus ni faute ni souffrance. Aie pitié, Seigneur…

– Qui es-tu ?

– Jean, du Temple. J’ai été contaminé, peut-être par un lépreux. Comme tu le vois, c’est depuis peu que la maladie est en moi. Mais eux !… Certains attendent la mort depuis des années et cette petite est ici depuis le temps où elle ne savait pas encore marcher. Elle ne connaît pas la création de Dieu. Tout ce qu’elle connaît ou dont elle se souvient des merveilles de Dieu, ce sont ces tombeaux, ce soleil impitoyable et les étoiles de la nuit. Pitié pour les coupables comme pour les innocents, Seigneur, notre Sauveur ! »

Ils se sont tous agenouillés, mains tendues.

Jésus pleure sur tant de misère, puis il ouvre les bras en s’écriant :

« Père, je le veux : le salut, la vie, la vue et la sainteté pour eux. »

Il reste ainsi, bras ouverts, dans une prière intense de toute son âme. Il semble s’affiner et s’élever en priant, flamme d’amour, blanche et puissante dans la puissante lumière dorée du soleil.

« Maman, je vois ! »

C’est le premier cri, auquel répond celui de sa mère qui presse contre son cœur l’enfant guérie, puis le cri des autres et celui des apôtres… Le miracle est accompli.

« Toi, Jean, qui es prêtre, tu conduiras tes compagnons pour le rite. Que la paix soit avec vous. A vous aussi, nous apporterons des vivres dans la soirée. »

Il les bénit et se dispose à s’éloigner.

Mais Jean le lépreux s’exclame :

« Je veux marcher sur tes pas. Dis-moi ce que je dois faire, où je dois me rendre pour parler de toi !

– Sur cette terre désolée et nue qui a besoin de se convertir au Seigneur. Que la ville de Jérusalem soit ton champ d’action. Adieu.

199.6

Et maintenant allons trouver ma Mère, dit-il ensuite aux apôtres.

– Mais où est-elle ? demandent plusieurs.

– Dans une maison que Jean connaît. Chez la jeune fille guérie[2] l’an dernier. »

Ils pénètrent dans la ville, parcourent une bonne partie du faubourg populeux d’Ophel jusqu’à une petite maison blanche.

Tout en prononçant sa douce salutation, Jésus entre dans la maison dont la porte est entrouverte. Il en sort la douce voix de Marie, celle, argentine, d’Annalia et celle, plus rude, de sa mère. La jeune fille se prosterne en adorant, sa mère s’agenouille, Marie se lève.

Elles voudraient retenir le Maître et sa Mère. Mais, sur la promesse de revenir un autre jour, Jésus les bénit et prend congé.

Tout content, Pierre part avec Marie. Ils tiennent tous deux l’enfant par la main et ressemblent à une famille heureuse. Beaucoup de gens se retournent pour les observer. Jésus les regarde partir avec un sourire.

« Simon est ravi ! S’exclame Simon le Zélote.

– Pourquoi souris-tu, Maître ? demande Jacques, fils de Zébédée.

– Parce que je vois dans ce groupe une grande promesse.

– Quelle promesse, mon frère ? Que vois-tu ? demande Jude.

– Voici ce que je vois : je pourrai m’en aller tranquille quand viendra l’heure. Je ne dois pas craindre pour mon Eglise. A ce moment-là, elle sera petite et chétive comme Marziam. Mais ma Mère sera là pour la tenir comme cela par la main et lui servir de mère ; et il y aura Pierre pour lui servir de père. Dans sa main honnête et calleuse, je peux, sans aucun souci, mettre la main de mon Eglise naissante. Pierre lui donnera la force de sa protection, ma Mère la force de son amour. Et l’Eglise grandira… comme Marziam… C’est vraiment l’enfant-symbole ! Que Dieu bénisse ma Mère, mon Pierre et leur enfant, notre enfant ! Maintenant, allons chez Jeanne… »

199.7

…Et nous voilà de nouveau, le soir venu, dans la petite maison de Béthanie. Plusieurs, fatigués, se sont déjà retirés. Mais Pierre fait les cent pas sur le sentier ; il lève très souvent la tête vers la terrasse où sont assis, parlant ensemble, Jésus et Marie. Jean d’En-Dor, de son côté, discute avec Simon le Zélote assis avec lui sous un grenadier tout en fleurs.

Marie a déjà beaucoup parlé, car j’entends Jésus lui dire :

« Tout ce que tu m’as dit est très juste et j’en garderai la justesse à l’esprit. Au sujet d’Annalia aussi, j’estime que ton conseil est juste. Que l’homme l’ait accueilli avec tant de promptitude, c’est bon signe. Vraiment, la haute société de Jérusalem est fermée et rancunière, je pourrais même dire remplie d’ordure. Mais dans son petit peuple, il y a des perles d’une valeur inestimable. Je suis content qu’Annalia soit heureuse… C’est une femme qui appartient davantage au Ciel qu’à la terre, et peut-être l’homme, maintenant qu’il juge selon l’esprit, s’en rend-il compte et en éprouve-t-il un respect révérenciel. Son idée de partir ailleurs pour ne pas troubler par quelque sentiment humain le vœu pur de sa fiancée le prouve.

– Oui, mon Fils. L’homme perçoit le parfum virginal… Je me souviens de Joseph. Je ne savais pas par quels mots m’exprimer. Lui ne connaissait pas mon secret… Et pourtant il m’a aidée à le dire, parce que sa sainteté le lui avait fait percevoir. Il avait senti le parfum de mon âme… Vois aussi Jean ?…Quelle paix !… Et tout le monde recherche sa présence… Même Judas, bien que… Non, mon Fils, Judas n’a pas changé. Je le sais et tu le sais. Nous n’en parlons pas pour ne pas commencer la guerre. Mais même sans en parler, nous savons… et même si nous n’en parlons pas, les autres en ont l’intuition… Oh, mon Jésus ! Les jeunes m’ont raconté aujourd’hui, à Gethsémani, l’épisode de Magdala et celui de la matinée du sabbat… L’innocence parle… parce qu’elle voit par les yeux de son ange gardien. Mais les plus âgés aussi se rendent compte… Ils n’ont pas tort. C’est un être fuyant… Tout en lui est fuyant… et j’ai peur de lui. J’ai sur les lèvres les mêmes paroles que Benjamin à Magdala et que Marziam à Gethsémani, car j’éprouve pour Judas la même répulsion que les enfants.

– Ils ne peuvent tous être comme Jean !…

– je ne le prétends pas ! Ce serait le paradis sur terre ! Mais vois, tu m’as parlé de l’autre Jean… Un homme qui a tué… mais il me fait seulement pitié. Judas, lui, me fait peur.

– Aime-le, Mère ! Aime-le par amour pour moi !

– Oui, mon Fils. Mais mon amour ne servira pas non plus. Ce sera seulement une souffrance pour moi, et pour lui une faute. Ah ! Pourquoi est-il entré ? Il trouble tout le monde, offense Pierre qui est digne de respect.

199.8

– Oui, Pierre est très bon. Pour lui, je ferais n’importe quoi parce qu’il le mérite.

– S’il t’entendait, il dirait avec son bon sourire franc : “ Ah ! Seigneur, ce n’est pas vrai ! ” Et il aurait raison.

– Pourquoi, Mère ? »

Mais Jésus sourit déjà car il a compris.

« Parce que tu ne lui fais pas le plaisir de lui donner un fils. Il m’a confié tous ses espoirs, tous ses désirs… et tous tes refus.

– Et il ne t’a pas dit la raison qui les justifie ?

– Si. Il me l’a confiée, et il a ajouté : “ C’est vrai… mais je suis un homme, un pauvre homme. Jésus s’obstine à voir en moi un grand homme. Mais je sais que je suis très mesquin et, à cause de cela… il pourrait me donner un fils. Je me suis marié pour cela… je vais mourir sans en avoir. ” Pierre me montrait l’enfant qui, heureux du beau vêtement que Pierre lui avait acheté, l’avait embrassé en l’appelant : “ mon père que j’aime ” et il m’a confié : “ Tu vois, quand ce petit être, qu’il y a dix jours je ne connaissais pas encore, me parle comme cela, je me sens devenir plus tendre que le beurre et plus doux que le miel, et je pleure, car… chaque jour qui passe éloigne de moi cet enfant… ” »

Marie se tait, et elle observe Jésus, étudiant sa physionomie, attendant une parole…Mais Jésus a mis son coude sur son genou, sa tête appuyée sur sa main et il regarde l’étendue verte du verger.

Marie lui prend la main, la caresse et dit :

« Simon a ce grand désir… Pendant que je marchais avec lui, il n’a pas cessé de m’en parler, et avec des raisons si justes que… je n’ai rien pu dire pour le faire taire. C’étaient les mêmes raisons que nous invoquons toutes, nous les femmes et les mères. L’enfant n’est pas robuste. S’il avait été comme toi… ah ! Alors il aurait pu s’avancer sans crainte vers la vie de disciple. Mais qu’il est chétif !… Très intelligent, très bon… mais rien de plus. Quand un tourtereau est délicat, il ne peut prendre son envol tout de suite, comme le font les forts. Les bergers sont bons… mais ce sont toujours des hommes. Les enfants ont besoin des femmes. Pourquoi ne le laisses-tu pas à Simon ? Tant que tu lui refuses un enfant vraiment né de lui, j’en comprends la raison. Un petit, pour nous, c’est comme une ancre. Et Simon, destiné à un si grand rôle, ne peut avoir d’ancres qui le retiennent. Néanmoins, tu dois convenir qu’il lui faut être le “ père ” de tous les enfants que tu lui laisseras. Comment peut-il être père s’il n’a pas été à l’école d’un enfant ? Un père doit être doux. Simon est bon, mais pas doux. C’est un impulsif et un intransigeant. Il n’y a qu’un enfant qui puisse lui enseigner l’art subtil de la compassion pour les faibles… Considère le sort de Simon… C’est bien ton successeur ! Oh ! Je dois pourtant le dire, ce mot atroce ! Mais, pour toute la souffrance qu’il m’en coûte pour le dire, écoute-moi. Jamais je ne te conseillerais quelque chose qui ne serait pas bon. Marziam… Tu veux en faire un parfait disciple… or c’est encore un enfant. Toi… tu t’en iras avant qu’il ne devienne un homme. Alors, à qui le confier plutôt qu’à Simon pour compléter sa formation ? Enfin, tu sais quelles tribulations ce pauvre Simon a subies, même à cause de toi, de la part de sa belle-mère ; et pourtant il n’a pas repris la plus petite parcelle de son passé, de sa liberté depuis un an, pour que sa belle-mère – que même toi n’as pu changer – le laisse en paix. Et sa pauvre épouse ? Ah ! Elle a un tel désir d’aimer et d’être aimée ! Sa mère ? Ah !… son mari ? Un cher autoritaire… Jamais la moindre affection qui lui soit donnée sans trop exiger… Pauvre femme !… Laisse-lui l’enfant. Ecoute, mon Fils : pour le moment, nous l’emmenons avec nous. Je viendrai, moi aussi, en Judée. Tu m’y conduiras avec toi chez une de mes compagnes du Temple – presque une parente puisqu’elle descend de David –. Elle réside à Bet-çur. Je la reverrai volontiers si elle vit encore. Après cela, à notre retour en Galilée, nous le confierons à Porphyrée. Quand nous serons dans les environs de Bethsaïde, Pierre le prendra. Quand nous viendrons ici, au loin, l’enfant restera avec elle. Ah ! Mais tu souris maintenant ! Alors tu vas faire plaisir à ta Maman. Merci, mon Jésus.

– Oui, qu’il soit fait comme tu le désires. »

199.9

Jésus se lève et appelle d’une voix forte :

« Simon, fils de Jonas, viens ici ! »

Pierre sursaute et monte en vitesse l’escalier :

« Que veux-tu, Maître ?

– Viens ici, usurpateur et corrupteur !

– Moi ? Pourquoi ? Qu’ai-je fait Seigneur ?

– Tu as corrompu ma Mère. C’est pour cela que tu voulais être seul. Qu’est-ce que je dois te faire ? »

Mais Jésus sourit et Pierre se rassure.

« Oh ! Dit-il, tu m’as réellement fait peur ! Mais maintenant tu ris… Que veux-tu de moi, Maître ? Ma vie ? Je n’ai plus qu’elle puisque tu m’as tout pris… mais, si tu la veux, je te la donne.

– Je ne veux pas t’enlever, mais te donner. Toutefois, n’abuse pas de ta victoire et n’en donne pas le secret à d’autres, homme rempli de fourberie qui triomphes du Maître par l’arme de la parole maternelle. Tu auras l’enfant, mais… »

Jésus ne peut continuer car Pierre, qui était à genoux, saute sur ses pieds et embrasse Jésus avec une impétuosité telle qu’il lui coupe la parole.

« C’est elle qu’il te faut remercier, pas moi. Mais rappelle-toi que cela doit être pour toi une aide, pas un obstacle…

– Seigneur, tu n’auras pas à regretter ton don… Oh, Marie ! Sois toujours bénie, sainte et bonne… »

Et Pierre, qui est retombé à genoux, pleure réellement en baisant la main de Marie…

199.1

The beautiful morning invites people to leave their homes and beds and go for a walk, and the people living in the Zealot’s house get up very early, and like bees at sunrise they go out to breathe the pure air in Lazarus’ orchard around the hospitable house. They are soon joined by Lazarus’ guests, that is, Philip, Bartholomew, Matthew, Thomas, Andrew and James of Zebedee. The sun shines in joyfully through all the windows and wide open doors and illuminates the simple tidy rooms with a golden hue, which brightens the shades of clothes and enlivens the hues of hair and eyes.

Mary of Alphaeus and Salome are busy serving the men who enjoy a hearty appetite. Mary instead is watching one of Lazarus’ servants who is sorting Marjiam’s hair, cutting it with greater skill than his first barber ever did. «That will do for the time being» says the servant. «Later, when you have offered God the curls of your childhood, I will cut it shorter. The warm season is coming and you will feel better without any hair on your neck. And your hair will grow stronger. It is dry, weak and has been neglected. See, Mary? It needs some attention. I will now put some oil on it to keep it in place. Can you smell the lovely scent, my boy? It is oil that Martha uses. It is very good. Almond, palm and medulla of the finest quality with a rare essence. My mistress told me to keep this little jar for the boy. Oh! Here you are! You now look like the son of a king» and the servant, who is probably the barber of Lazarus’ house, pats Marjiam on the cheek, greets Mary and goes away looking quite satisfied.

«Come and let Me dress you» says Mary to the boy who has only a short tunic with short sleeves; I think it is a shirt or what was used in those days as a shirt. By its fine linen I gather that it must have belonged to Lazarus when a boy. Mary takes off the towel in which Marjiam was wrapped and puts on him a linen vest puckered round the neck and cuffs, and a red woollen robe with wide neck and sleeves. The shining snow-white linen protrudes from the neck-opening and the sleeves of the dull red cloth. Mary’s skilful hands must have adjusted the length of the robe and of the sleeves during the night, and it now fits the boy, particularly when Mary girds his waist with a soft sash adorned with a woollen white and red tassel. The child no longer looks like the poor little creature of a few days earlier.

«Now go and play, but do not get dirty, while I get ready» says Mary, caressing him. And the boy bounds out happily, looking for his big friends.

199.2

Thomas is the first one to see him: «How lovely you are! Fit for a wedding! You make me cut a poor figure» says plump Thomas who is always merry and genial. And he takes him by the hand saying: «Let us go and see the women. They were looking for you to feed you.»

They go into the kitchen and Thomas causes the two Maries, who are bent over the kitchen-stove, to start, when he shouts in his loud voice: «There is a young man here looking for you» and laughing he introduces the boy who was hiding behind his robust back.

«Oh! dear! Come here that I may give you a kiss! Look, Salome, how lovely he is!» exclaims Mary of Alphaeus.

«He is, indeed! All he needs now is to become more robust. But I’ll see to that. Come here, that I may kiss you, too» replies Salome.

«But Jesus is going to entrust him to the shepherds…» objects Thomas.

«Not on your life! My Jesus is mistaken here. What can you men do or pretend you can do? You are only good at quarrelling – because, incidentally, you are rather quarrelsome… like little goats which are fond of one another and gore one another with their horns – at eating, speaking and you have a thousand needs and you claim the Master to pay all His attention to you… otherwise you become sulky… Children need mothers. Is that right? What is your name?»

«Marjiam.»

«Of course! But blessed be my Mary! She could have given you an easier name!»

«It’s almost like Hers!» exclaims Salome.

«Yes, but Hers is more simple. There aren’t those letters in the middle of it… They are too many…»

The Iscariot, who has just come in, says: «She gave a name which is precise in its meaning, according to the genuine old language.»

«All right. But it is difficult, and I will take one letter away and say Marziam. It is easier and the world will not collapse because of that. Is that right, Simon?»

Peter, who is passing by the window speaking to John of Endor, looks in and asks: «What do you want?»

«I was saying that I shall call the boy Marziam. It is easier.»

«You are right, woman. If the Mother allows me, I will call him thus, too. But how wonderful you look! So do I, eh? Look!»

In fact he is perfectly tidy, his cheeks have been shaved, his hair cut, his beard trimmed and scented with oil, his clothes show no creases and his sandals are so clean that they look like new ones. I do not know what he has polished them with. The women admire him and he laughs happily.

The boy has finished eating and goes out to meet his great friend, whom he always calls: «Father».

199.3

And there is Jesus coming from Lazarus’ house together with the latter. The boy runs towards Him and Jesus says: «Peace be with us, Marjiam. Let us exchange the kiss of peace.»

Lazarus, greeted by the boy, caresses him and gives him a sweet.

They all gather around Jesus. Also Mary, wearing a turquoise woolen dress on top of which a darker mantle is draped, comes towards Her Son smiling.

«We can go, then» says Jesus. «You, Simon, with My Mother and the boy, if you still wish to buy his robe, now that Lazarus has seen to it.»

«Of course I do! And then… I will be able to say that once I walked beside Your Mother. A great honour.»

«Go, then. Simon, you will take Me to your leper friends…»

«Really, Master? Then, if You do not mind, I will run ahead, to gather them… You will reach me. You know where they are…»

«All right, go. The others can do what they like. You are all free until Wednesday morning. At the third hour everybody is to be at the Golden Gate.»

«I am coming with You, Master» says John.

«And I» says his brother James.

«And us, too» say the two cousins.

«I will come, too» says Matthew, and Andrew after him.

«And I? I would like to come, too… but if I go to do the shopping, I cannot come…» says Peter, pressed by two desires.

«It can be done. We shall go to the lepers first, while My Mother with the boy goes to the house of a friend in Ophel. We will reach Her later and you will go with Her, while the others and I go to Johanna’s. We will meet at Gethsemane for our meal and towards sunset we will come back here.»

«If You allow me, I will go to see some friends…» says Judas Iscariot.

«I have already told you. Do what you like.»

«In that case, I will go to my relatives. Perhaps my father has already come. If he is there, I will bring him to see You» says Thomas.

«What about us two? What do you say, Philip? We could go and see Samuel.»

«Very good» Philip replies to Bartholomew.

«And what about you, John?» Jesus asks the man of Endor. «Do you prefer to remain here and sort out your books, or do you wish to come with Me?»

«Really, I would prefer to come with You… My books… I am already less fond of them. I prefer to read You, the Living Book.»

«Come, then. Goodbye, Lazarus…»

«I will come, too. My legs are a little better, and after we have seen the lepers, I will leave You and go to Gethsemane and wait for You there.»

«Let us go, Peace to you, women.»

They remain all together until they are near Jerusalem. Then they part, the Iscariot goes on his own and enters the town probably through the Gate near the Antonia Tower; Thomas, Philip and Nathanael walk for about ten more yards with Jesus and their companions and then enter the town through the suburb of Ophel, together with Mary and the boy.

199.4

«And now, let us go and see those unhappy people!» says Jesus, and turning His back to the town He goes towards a desolate place on the slope of a rocky hill which lies between the two roads from Jericho to Jerusalem, A strange place, similar to a flight of steps after the first slope, up which climbs a path, so that there is a drop of at least three yards from the first terrace to the path, and the same from the second one. It is an arid, dead… extremely sad place.

«Master» shouts Simon the Zealot «I am here. Stop where You are, that I may show You the way…» and the Zealot, who was leaning against a rock to be in the shade, comes forward and leads Jesus up the steps of a path leading towards Gethsemane, but separated from it by the road that from the Mount of Olives goes to Bethany.

«Here we are. I lived among the tombs of Siloam and my friends are here. Some of them. The others are at Ben Hinnom, but cannot come… They would have to cross the road and would be seen.»

«We shall go to them also.»

«Thank You! On their part and mine.»

«Are they many?»

«Winter has killed most of them. But here there are still five of those to whom I had spoken. They are waiting for You. There they are, on the edge of their prison…»

There are probably ten monsters. I say «probably», because if five, who are standing up, are clearly visible, the others, because of the greyish hue of their skin, the deformity of their faces and the fact that they hardly protrude from the stone barrier, cannot be counted accurately and they may be more than five or less. Among those standing up there is only one woman. One can tell only by her white dishevelled hair hanging coarse and dirty over her shoulders down to her waist. There is no other sign by which one could tell her sex, because the disease, which is in an advanced stage, has reduced her to a skeleton, destroying all feminine forms. Likewise among the men, only one still has traces of moustache and beard. All the others have been made hairless by the destructive disease.

They shout: «Jesus, our Saviour, have mercy on us!» and they stretch out their deformed or ulcerated hands. «Jesus, Son of David, have mercy on us!»

«What do you want Me to do for you?» asks Jesus looking towards their misery.

«We want You to save us from sin and from this disease.»

«Your will and repentance will save you from sin…»

«But if You wish, You can cancel our sins. At least those, if You do not want to cure our bodies.»

«If I say to You: “Choose either one or the other”, which one would you prefer?»

«God’s forgiveness, Lord. To be less desolate.»

Jesus has a gesture of approval. He smiles brightly, raises His arms and shouts: «Let it be granted. I want it.»

Granted! The grace might be granted for their sins, or for their disease, or for both, and the five unhappy people remain uncertain. But the apostles have no uncertainty and they can but shout their hosannas when they see the leprosy disappear as fast as a flake of snow that falls on a fire. The five then understand that the full grace has been granted to them. Their shouting resounds like a cry of victory. They embrace one another and throw kisses at Jesus, as they cannot prostrate themselves at His feet. They then turn to their companions saying: «And you still refuse to believe? What miserable wretches are you?»

«Good! Be good! Your poor brothers need time to think. Say nothing to them. Faith is not imposed, it is preached with peace, kindness, patience and perseverance. That is what you will do after your purification, exactly as Simon did with you. After all, the miracle preaches by itself. You who have been cured, will go to the priest as soon as possible. You, who are still ill, wait for us this evening. We will bring you some food. Peace be with you.»

Jesus descends again on to the road followed by the blessings of everybody.

199.5

«And now let us go to Ben Hinnom» says Jesus.

«Master… I would like to come. But I realise that I cannot. I will go to Gethsemane» says Lazarus.

«Go, Lazarus. Peace be with you.»

While Lazarus is slowly walking away, the apostle John says: «Master, I will go with him. He walks with difficulty and the road is not very good. I will join You later at Ben Hinnom.»

«Yes, you may go. Let us go.»

They cross the Kidron, walk along the southern side of Mount Tophet and enter the little valley completely strewn with tombs and filth. There is not one tree or any shade from the sun, which blazes down on this southern side heating the stones of these new hellish terraces where the stinking smell of burning rubbish increases the heat. And inside the sepulchres, similar to crematoria, there are poor bodies, which are wasting away… Siloam may be unpleasant in winter, damp as it is and facing north, but this place must be dreadful in summer…

Simon Zealot lets out a shout calling them, and first three lepers, then two, then one, and another one come, as best they can, to the prescribed limit. There are two women here, and one of them is holding by the hand a horrible looking boy whose face is particularly affected by leprosy. He is already blind… And there is a noble looking man, notwithstanding his miserable state. He speaks on behalf of everybody: «Blessed be the Messiah of the Lord, Who has come down to our Gehenna, to free from it those who hope in Him. Save us, o Lord, because we are perishing! Save us, Saviour! King of the House of David, King of Israel, have mercy on Your subjects. Oh! Shoot of the stock of Jesse, of Whom it is said that in Your time there will be no evil, stretch out Your hand and pick up the remains of Your people. Cast away this death from us, wipe our tears, because that is what is said of You. Call us, Lord, to Your delicious pastures, to Your fresh waters, for we are thirsty. Lead us to the eternal hills where there is no sin or sorrow. Have mercy, Lord…»

«Who are you?»

«John, one of the Temple. I was probably infected by a leper. As You can see, I caught the disease only recently. But these!… Some of them have been awaiting death for years, and this little girl came here even before she could walk. She does not know what is the creation of God. What she knows or what she remembers of the wonders of God are these tombs, this merciless sun and the stars at night. Have mercy on the guilty and the innocent ones, o Lord, our Saviour.» They have all knelt down stretching out their hands.

Jesus weeps at so much misery. He then opens His arms shouting: «Father, I want it: health, life, sight and salvation for them.» He remains with His arms stretched out praying intensely with all His spirit. He seems to become thinner and to rise in prayer, a flame of love, white and powerful in the powerful gold of the sun.

«Mummy, I can see!» is the first cry, which is answered by the shout of the mother who clasps her cured little girl to her heart; then the shouts of the others and of the apostles… The miracle has been worked.

«John, as you are a priest, you will lead your companions in the rite. Peace be with you. Towards evening we shall bring some food also to you.» He blesses and is about to go away.

But John, the leper, shouts: «I want to follow Your steps. Tell me what I must do, where I must go to preach You!»

«In this desolate barren land, which must turn to the Lord. Let the town of Jerusalem be your field. Goodbye.»

199.6

«And now let us go to My Mother» He says to the apostles.

«But where is She?» ask many of them.

«In a house known to John. In the house of the girl who was cured[1] last year.»

They enter the town, covering a good deal of the thickly populated suburb of Ophel until they reach a little white house.

With His usual kind greeting He enters the house, the door of which is half open and one can hear the sweet voice of Mary, the silvery voice of Annaleah and the thick voice of her mother. The girl prostrates herself adoring and her mother kneels down. Mary stands up.

They would like to keep the Master with His Mother. But Jesus promises to go back some other day, He blesses them and says goodbye. Peter goes away with Mary and is very happy. They are both holding the boy by his hands and they look like a happy family. Many people turn around to look at them. Jesus watches them go away smiling.

«Simon is happy!» exclaims the Zealot.

«Why are You smiling, Master?» asks James of Zebedee.

«Because I see a great promise in that group.»

«Which promise, Brother? What do You see?» asks Thaddeus.

«This is what I see: that I shall be able to go away with a peaceful mind, when the time comes. I need not be afraid for My Church. Then it will be small and slender like Marjiam. But My Mother will be there to hold it by the hand and to be its Mother; and there will be Peter as its father. In his honest rough hands I can place the hand of My dawning Church without any worry. He will give it the strength of his protection. My Mother the strength of Her love. And the Church will grow… like Marjiam… He is really the symbol-child! May God bless My Mother, My Peter and their child and ours! Now let us go to Johanna’s.»

199.7

… And once again, in the evening, we are in the little house in Bethany. Many have already withdrawn, because they were tired. Peter is walking up and down the path, often looking up to the terrace where Jesus and Mary are sitting talking. John of Endor, instead, is speaking to the Zealot sitting under a pomegranate-tree in full blossom.

Mary has already spoken a great deal because I can hear Jesus say: «Everything You told Me is just and I will bear in mind its justice. And I say that Your advice concerning Annaleah is also right. It is a good sign that the man has accepted it so readily. It is true that the people high up in Jerusalem are dull-minded and envious, I could also say that they are filthy. But in the humble people there are pearls of unknown value. I am glad that Annaleah is happy. She belongs more to Heaven than to the earth, and perhaps the man, who has now understood the concept of the spirit, realises that and he respects her almost religiously. His intention to go elsewhere, so that no human sentiment may upset the pure vow of his girl, proves it.»

«Yes, My Son, Man perceives the perfume of virgins… I remember Joseph, I did not know which words to use. He was not aware of My secret… And yet he helped Me to disclose it with the intuition of a saint. He had perceived the scent of My soul… Also John, see?… How peaceful he is! And everybody seeks him. Even Judas of Kerioth, although… No, Son. Judas has not changed. I know and You know. We do not speak because we do not want to start a war. But even if we do not speak, we know… and even if we do not speak, the others realise… Oh! My Jesus! The younger apostles told Me today, at Gethsemane, the episode at Magdala and the other one of Sabbath morning… Innocent children speak… because they see through the eyes of their angels. But also old people have an idea… They are not wrong. He is an elusive being… Everything is elusive in him… and I am afraid of him and I have on My lips the same words of Benjamin at Magdala and of Marjiam at Gethsemane, because I feel the same disgust for Judas as children do.»

«Not everybody can be John!…»

«I do not demand that! In that case, it would be paradise on the earth. But, see, You told Me about the other John… A man who killed… but I only feel sorry for him. Judas frightens Me.»

«Love him, Mother! Love him, for My sake!»

«Yes, Son, I will. But not even My love will serve. It will only make Me suffer and make him guilty, Oh! Why did he come to You? He upsets everybody, he offends Peter who deserves all respect.»

199.8

«Yes. Peter is very good. I would do anything for him, because he deserves it.»

«If he heard You, he would say with his good frank smile: “Ah! My Lord, that is not true!” And he would be right.»

«Why, Mother?» But Jesus smiles, because He has already understood.

«Because You are not satisfying him by giving him a son. He told Me all his hopes, his desires… and Your refusals.»

«And did he not tell You the reasons justifying them?»

«Yes, he did and he added: “It is true… but I am a man, a poor man. Jesus persists in seeing a great man in me. But I know that I am a poor fellow, and so… he could give me a child. I got married to have them… and I will die without any”. And he said — pointing at the boy who, delighted because of the lovely dress bought by Peter, had kissed him, saying: “Beloved father” — he said: “See, when this little creature, whom only ten days ago I did not know, says that to me, I feel that I become softer than butter and sweeter than honey and I weep, because… every day that goes by, takes this child away from me”.»

Mary becomes silent, watching Jesus, studying His face, waiting for a word… But Jesus has placed His elbow on His knee, resting His head in His hand and is silent, looking at the green expanse of the orchard.

Mary takes His hand and caressing it She says: «Simon has this great desire… When I went with him, he did nothing but speak to Me about it, and his reasons are so good that… I could say nothing to keep him quiet. They are the same reasons that all women and mothers think of. The boy is not strong. If he were as strong as You were… oh! he could have faced the life of a disciple without any fear. But he is so thin!… He is very intelligent, very good… but nothing more. When a little dove is so delicate, you cannot throw it in the air to let it fly very early, as you do with strong ones. The shepherds are good… but they are still men. Children need women. Why do You not leave him with Simon? While You refuse him a son of his own, born of him, I understand the reason. A son is like an anchor. And Simon, who is destined to such a great task, cannot be hindered by anchors. But You must agree that he is to be the “father” of all the sons You will be leaving him. How can he be a father if he has had no training with a child? A father must be sweet. Simon is good, but not sweet. He is impulsive and intolerant. Only a little creature can teach him the fine art of being indulgent to whoever is weak… Consider Simon’s destiny… He is Your successor after all! Oh! I must say that cruel word! But for all the sorrow it causes Me saying it, listen to Me. I would never advise You anything unless it were good. Marjiam… You want to make a perfect disciple of him… But he is only a boy. You… You will be going before he is a man. To whom then can You give him, to complete his formation, better than Simon? Finally, poor Simon, You know how much trouble he has had, with his mother-in-law, also because of You. And yet he has not picked up a tiny part of his past, of his freedom of a year ago, to be left in peace by his mother-in-law, whom not even You have been able to change. And his poor wife? She is longing so much to love and be loved. Her mother… oh! Her husband? A dear domineering man… No affection is ever given to her without exacting too much… Poor woman!… Leave her the boy. Listen, Son. For the time being we will take him with us. I will come to Judaea, too. You will take Me to one of My companions of the Temple, who is almost a relative, because she is of the House of David. She lives at Bethzur. I will be pleased to see her, if she is still alive. Then, when we go back to Galilee, we will give him to Porphirea. When we are near Bethsaida, Peter will take him. When we come here, so far, the boy will stay with her. Ah! You are smiling now! So You are going to please Your Mother. Thank You, My Jesus.»

«Yes, let it be done, as You wish.»

199.9

Jesus stands up and calls out loud: «Simon of Jonas: come here.»

Peter starts and rushes up the steps. «What do You want, Master?»

«Come here, you usurper and corrupter!»

«Me? Why? What have I done, Lord?»

«You have corrupted My Mother. That is why you wanted to be alone. What shall I do with you?»

But Jesus smiles and Peter recovers confidence. «Oh!» he says. «You really frightened me! But now You are laughing… What do You want from me, Master? My life? I have but that, because You have taken everything… But if You want, I will give it to You.»

«I do not want to take anything from you. I want to give you something. But do not take advantage of your victory and do not disclose the secret to the others, you most artful fellow who defeats the Master by means of the weapon of His Mother’s word. You will have the boy, but…»

Jesus can say no more, because Peter, who had knelt down, bounces to his feet and kisses the Master with such delight that he makes the words die on His lips.

«Thank Her, not Me. But remember that this must be of assistance to you, and not an impediment…»

«My Lord, You will not have to repent of the gift… Oh! Mary! May You be always blessed, You are holy and good…» And Peter, who has fallen on his knees again, weeps, kissing Mary’s hand…


Notes

  1. à Béthanie : suit le dessin de Maria Valtorta que nous reproduisons sur la page suivante. Elle y a mis au centre le “ petit mont ”, sur le sommet duquel elle a écrit à trois reprises “ lépreux ” ; au nord se trouve “ Gethsémani ”, dont elle fait partir “ La route la plus courte pour Béthanie et Jéricho ” ; de l’autre côté, elle a écrit au crayon : “ Le mont des Oliviers est ici ” ; à l’ouest elle fait couler le “ Cédron ” au-delà duquel elle a tracé “ La route la plus longue pour Béthanie et Jéricho ”.
  2. la jeune fille guérie en 86.4/5 ; elle est vierge consacrée en 156.3/5.

Notes

  1. who was cured: Annaleh, healed in 86.4/5; she made a vow of virginity in 156.3/5.