The Writings of Maria Valtorta

259. Leçon à Jacques, fils d’Alphée, sur l’Eglise et les sacrements.

259. Lesson on the Church and Sacraments

259.1

Jésus quitte le plateau du Carmel et descend par des sentiers humides de rosée, à travers les forêts qu’animent de plus en plus trilles et cris, sous le premier soleil qui dore la pente orientale de la montagne. Quand la légère nuée produite par la chaleur se dissipe sous le soleil, la plaine d’Esdrelon apparaît dans toute la beauté de ses vergers et de ses vignes qui entourent les maisons. On dirait un tapis à plusieurs tons de vert, avec quelques oasis jaunâtres parsemées de plaques rouges qui sont les champs moissonnés où flamboient maintenant les coquelicots, un tapis enserré par le chaton triangulaire des monts Carmel, Thabor, Hermon (le petit Hermon) et par des monts plus lointains, dont j’ignore le nom, qui cachent le Jourdain et rejoignent au sud-est les montagnes de Samarie.

Pensif, Jésus s’arrête pour contempler toute cette partie de la Palestine.

Jacques le regarde et lui dit :

« Tu admires la beauté de cette région ?

– Oui, cela aussi. Mais je pense surtout à nos futurs déplacements, et à la nécessité de vous envoyer, et d’envoyer sans retard les disciples, non au travail limité de maintenant, mais à un vrai travail missionnaire. De nombreuses régions ne me connaissent pas encore et je ne veux pas laisser d’endroits sans moi. C’est ma continuelle préoccupation : aller, agir, tant que je le puis, et tout faire…

– De temps en temps, des imprévus viennent te ralentir.

– Plutôt que de me ralentir, ils m’imposent des changements dans l’itinéraire que je dois suivre, car les voyages que nous faisons ne sont jamais inutiles. Mais il y a encore tant à faire… Et aussi parce qu’après une absence, je retrouve beaucoup de cœurs revenus au point de départ et il me faut tout recommencer.

– Oui, cette apathie des âmes, cette inconstance et cette préférence pour le mal sont accablantes, et elles dégoûtent.

– Accablantes. Il ne faut pas dire qu’elles dégoûtent. Le travail de Dieu ne dégoûte jamais. Les pauvres âmes doivent nous inspirer de la pitié, pas du dégoût. Nous devons toujours avoir un cœur de père, de bon père. Un bon père n’éprouve jamais de dégoût pour les maladies de ses enfants. Nous ne devons pas en éprouver, nous, pour personne.

259.2

– Jésus, me permets-tu de te poser des questions ? Cette nuit encore, je n’ai pas dormi. Mais j’ai beaucoup réfléchi en te regardant dormir. Dans ton sommeil, tu sembles si jeune, mon Frère ! Tu souriais, la tête appuyée sur ton bras replié sous la tête, tout à fait comme un enfant. Je te voyais bien sous la lune si lumineuse de cette nuit. Je réfléchissais et beaucoup de questions me sont venues au cœur…

– Dis-les.

– Je pensais : il faut que je demande à Jésus comment nous pourrons arriver à cet organisme, que tu as appelé Eglise, et dans lequel, si j’ai bien compris, il y aura une hiérarchie, étant donné notre insuffisance. Nous diras-tu tout ce que nous devrons faire, ou devrons-nous le faire par nous-mêmes ?

– Quand le moment sera venu, je vous en indiquerai le chef. Pas davantage. Pendant le temps de ma présence parmi vous, je vous ai déjà indiqué les diverses catégories avec les différences entre apôtres et disciples, hommes et femmes. Elles sont en effet inévitables. Cependant, de même que je demande aux disciples respect et obéissance aux apôtres, je veux que les apôtres fassent preuve d’amour et de patience à l’égard des disciples.

– Et que devrons-nous faire ? Toujours te prêcher et seulement cela ?

– C’est l’essentiel.

259.3

Puis vous devrez en mon nom absoudre et bénir, ramener à la grâce, administrer les sacrements que j’instituerai…

– Qu’est-ce que c’est ?

– Ce sont des moyens surnaturels et spirituels, appliqués aussi avec des moyens matériels, employés pour persuader les hommes que le prêtre fait réellement quelque chose. Tu te rends compte que l’homme ne croit pas s’il ne voit pas. Il a toujours besoin d’un signe chose qui lui dise qu’il y a quelque chose. C’est pourquoi, quand je fais des miracles, j’impose les mains, ou je mouille avec de la salive, ou encore je donne une bouchée de pain trempé. Je pourrais faire un miracle par ma seule pensée. Mais crois-tu qu’alors les gens diraient : “ C’est Dieu qui a fait le miracle ” ? Ils diraient : “ Il est guéri parce que c’était pour lui le moment de guérir. ” Et ils en attribueraient le mérite au médecin, aux re­mèdes, à la résistance physique du malade. Il en ira de même pour les sacrements : des formes du culte pour administrer la grâce, ou la rendre, ou la fortifier chez les fidèles. Jean, par exemple, se servait de l’immersion dans l’eau pour représenter la purification des péchés. Ce qui était utile, en réalité, plus que l’eau qui lavait les membres, c’était la mortification de se reconnaître impur pour les péchés commis. Moi aussi, j’aurai le baptême, mon baptême, qui ne sera pas seulement symbole, mais une réelle purification de la faute originelle de l’âme et la restitution à l’âme de l’état spirituel que possédaient Adam et Eve avant leur faute, augmenté encore parce qu’il sera donné grâce aux mérites de l’Homme-Dieu.

– Mais… l’eau ne descend pas sur l’âme ! L’âme est spirituelle. Qui la saisit chez le nouveau-né, l’adulte ou le vieillard ? Personne.

– Tu vois que tu admets que l’eau est un moyen matériel sans effet sur une réalité spirituelle ? Ce ne sera donc pas l’eau, mais la parole du prêtre, membre de l’Eglise du Christ, consacré à son service, ou d’un autre vrai croyant qui le remplace dans certains cas exceptionnels, qui opérera le miracle de la rédemption du péché originel du baptisé.

259.4

– D’accord, mais l’homme est pécheur aussi personnellement… Et les autres péchés, qui les enlèvera ?

– Toujours le prêtre, Jacques. Si c’est un adulte, ces fautes disparaîtront en même temps que le péché originel. Si l’homme est déjà baptisé et revient au péché, le prêtre l’absoudra au nom du Dieu un et trine, et grâce aux mérites du Verbe incarné, comme je le fais pour les pécheurs.

– Mais toi, tu es saint ! Nous…

– Vous devez être saints parce que vous touchez des choses saintes et administrez ce qui est à Dieu.

– Alors nous baptiserons plusieurs fois le même homme, comme le fait Jean qui accorde l’immersion dans l’eau autant de fois que l’on vient à lui ?

– Jean, par son baptême, ne purifie que par l’humilité de celui qui s’immerge. Je te l’ai déjà dit. Vous, vous ne rebaptiserez pas quelqu’un qui est déjà baptisé, sauf dans le cas où il l’a été avec une formule non apostolique, mais schismatique, auquel cas on peut administrer un second baptême après une demande précise de celui qui doit être baptisé, s’il est adulte, de vouloir l’être et une nette déclaration qu’il veut faire partie de la véritable Eglise. Les autres fois, pour rendre l’amitié de Dieu et pour être en paix avec lui, vous vous servirez de la parole du pardon unie aux mérites du Christ ; et l’âme, venue à vous avec un vrai repentir et en s’accusant humblement, sera absoute.

259.5

– Et si quelqu’un est malade au point de ne pouvoir se déplacer ? Est-ce qu’il mourra en état de péché ? Est-ce qu’il ajoutera à la souffrance de l’agonie celle de la peur du jugement de Dieu ?

– Non. Le prêtre ira trouver le mourant et l’absoudra. Il lui donnera même une forme plus large d’absolution, non pas glo­bale, mais pour chaque organe des sens par lequel l’homme arrive généralement à pécher. Nous avons en Israël l’huile sainte, composée suivant la règle donnée[1] par le Très-Haut, et avec laquelle on consacre l’autel, le pontife, les prêtres et les rois. L’homme est vraiment un autel, et il devient roi par son élection au siège du ciel. Il peut donc être consacré avec l’huile de l’onction. L’huile sainte sera prise avec d’autres parties du culte israélite et utilisée dans mon Eglise, bien qu’avec d’autres emplois. Car tout n’est pas mauvais en Israël et tout ne doit pas être rejeté ; au contraire, il y aura beaucoup de souvenirs des usages anciens dans mon Eglise. Et l’un d’eux sera l’huile de l’onction, employée aussi dans l’Eglise pour consacrer l’autel, les pontifes et toutes les hiérarchies ecclésiastiques, toutes, et pour consacrer les rois et les fidèles quand ils deviendront les princes-héritiers du Royaume, ou bien quand ils auront besoin d’une aide très grande pour comparaître devant Dieu avec les membres et les sens purifiés de toute faute. La grâce du Seigneur secourra l’âme et même le corps, s’il plaît à Dieu pour le bien du malade.

Bien souvent, le corps ne réagit pas à la maladie, parfois à cause des remords qui troublent sa paix et de l’action de Satan qui, par cette mort, espère gagner une âme pour son royaume et même porter les survivants au désespoir. Le malade passe de l’étreinte de satan et du trouble intérieur à la paix, grâce à la certitude du pardon de Dieu qui lui obtient aussi l’éloignement de Satan. Et comme le don de la grâce s’accompagnait, chez les premiers parents, de celui de l’immunité des maladies et de toute forme de douleur, le malade, rendu à la grâce aussi totalement qu’un nouveau-né baptisé par mon baptême, peut obtenir aussi la victoire sur la maladie, avec l’aide de la prière de ses frères dans la foi, qui sont dans l’obligation d’avoir de la pitié envers le malade, pitié non seulement corporelle mais surtout spirituelle, visant à obtenir la santé physique et le salut éternel du frère. La prière est déjà une forme de miracle, Jacques. La prière d’un juste – tu l’as vu chez Elie – a énormément de puissance.

259.6

– Je ne te comprends pas très bien, mais ce que je devine me remplit de respect pour le caractère sacerdotal de tes prêtres. Si j’ai un peu compris, nous aurons beaucoup de points communs avec toi : la prédication, l’absolution, le miracle. Trois sacrements, donc.

– Non, Jacques. La prédication et le miracle ne sont pas des sacrements. Mais il y aura davantage de sacrements. Sept comme le candélabre sacré du Temple et les dons de l’Esprit d’Amour. Et, en vérité, les sacrements sont des dons et des flammes, accordés pour que l’homme brûle devant le Seigneur dans les siècles des siècles. Il y aura aussi un sacrement pour les noces de l’homme. Celui qui est représenté[2] dans le symbole des noces saintes de Sara de Raguël délivrée du démon. Il donnera aux époux tous les secours pour une sainte vie commune selon les lois et les désirs de Dieu. L’époux et l’épouse deviennent les ministres d’un rite : celui de la procréation. Le mari et la femme deviennent aussi les prêtres d’une petite église : la famille. Ils doivent par conséquent être consacrés pour procréer avec la bénédiction de Dieu et élever une descendance dans laquelle le nom très saint de Dieu sera béni.

– Et nous, les prêtres, qui nous consacrera ?

– Moi, avant de vous quitter. Vous, ensuite, vous consacrerez vos successeurs et ceux que vous vous agrégerez pour propager la foi chrétienne.

– C’est toi qui nous enseigneras, n’est-ce pas ?

– Moi et Celui que je vous enverrai. Cette venue aussi sera un sacrement. Donné volontairement par Dieu à sa première épiphanie, donné ensuite par ceux qui auront reçu la plénitude du sacerdoce. Il sera force et intelligence, il sera confirmation dans la foi, il sera sainte piété et sainte crainte, il sera aide de conseil et sagesse surnaturelle, ainsi que la possession d’une justice qui, de par sa nature et sa puissance, rendra adulte celui qui la reçoit. Mais tu ne peux pour le moment le comprendre. Lui-même te le fera comprendre : lui, le divin Paraclet, l’Amour éternel, quand vous serez parvenus au moment de le recevoir en vous. Ainsi, il y a un autre sacrement que vous ne pouvez comprendre pour le moment. Il est presque incompréhensible pour les anges tant il est sublime. Et pourtant vous, simples hommes, le comprendrez par la force de la foi et de l’amour. En vérité, je te dis que celui qui l’aimera et s’en nourrira spirituellement pourra piétiner le démon sans en subir de dommage, parce qu’alors je serai avec lui. Tâche de te souvenir de ces choses, mon frère. Il t’appartiendra de les répéter à tes compagnons et aux fidèles, de très nombreuses fois. A ce moment-là, vous les saurez déjà par ministère divin, mais tu pourras dire : “ Il me l’a dit un jour en descendant du mont Carmel. Il m’a tout dit parce que j’étais dès ce moment destiné à être le chef de l’Eglise d’Israël. ”

259.7

– J’ai une autre question à te poser. J’y pensais cette nuit. Faut-il donc que ce soit moi qui dise à mes compagnons : “ Je serai le chef, ici ” ? ça ne me plaît pas. Je le ferai si tu me l’ordonnes, mais ça ne me plaît pas.

– N’aie pas peur. L’Esprit Paraclet descendra sur tous et vous donnera de saintes pensées. Vous aurez tous les mêmes pensées pour la gloire de Dieu dans son Eglise.

– Et il n’y aura plus ces discussions si… si désagréables qu’il y a maintenant ? Même Judas ne sera plus une cause de désaccord ?

– Il ne le sera plus, sois tranquille. Mais des divergences, il y en aura encore. C’est pour cela que je t’ai dit : veille et surveille sans jamais te lasser en faisant jusqu’au bout ton devoir.

– Encore une question, mon Seigneur. En temps de persécution, comment dois-je me comporter ? Il semble, d’après ce que tu dis, que je doive rester le seul des douze. Donc les autres fuiront la persécution. Et moi ?

– Tu resteras à ton poste. En effet, s’il est nécessaire que vous ne soyez pas exterminés jusqu’à ce que l’Eglise soit bien affermie – et cela justifie la dispersion de beaucoup de disciples et de presque tous les apôtres –, rien ne justifierait ta propre désertion et l’abandon de ta part de l’Eglise de Jérusalem. Au contraire, plus elle sera en danger et plus tu devras veiller sur elle comme si elle était ton plus cher enfant en danger de mort. Ton exemple fortifiera l’esprit des fidèles. Ils en auront besoin pour surmonter l’épreuve. Plus tu les verras faibles et plus tu devras les soutenir, avec compassion et sagesse. Si, toi, tu es fort, ne sois pas sans pitié pour les faibles, mais soutiens-les en pensant : “ Moi, j’ai tout reçu de Dieu pour arriver à cette force qui est mienne. Je dois le dire humblement et je dois agir charitablement envers ceux qui ont été moins bénis en dons de Dieu que moi.” Il te faudra transmettre ta force par la parole, par les secours, par le calme, par l’exemple.

– Et si, parmi les fidèles, il y en avait de mauvais, cause de scandale et de danger pour les autres, que faire ?

– Etre prudent pour les accepter, car il vaut mieux être peu nombreux et bons que nombreux et pas bons. Tu connais le vieil apologue des pommes saines et des pommes gâtées. Fais en sorte qu’il ne s’applique pas dans ton Eglise. Mais si tu trouves toi aussi tes traîtres, essaie de les ramener par tous les moyens, en gardant la sévérité comme dernière ressource. Mais s’il s’agit de petites fautes individuelles, ne sois pas d’une sévérité qui effraie. Pardonne, pardonne… Le pardon joint aux larmes et aux paroles d’amour agit plus que l’anathème pour racheter un cœur. Si la faute est grave, mais le fruit d’un assaut imprévu de Satan, si grave que le coupable éprouve le besoin de fuir ta présence, va à la recherche du coupable : c’est un agneau dévoyé, et tu es le berger. Ne crains pas de te rabaisser toi-même en descendant par des chemins boueux pour aller à la recherche des âmes à travers marécages et précipices. Ton front se couronnera alors de la couronne du martyr de l’amour, et ce sera la première des trois couronnes… Et si toi-même tu es trahi, comme l’ont été Jean-Baptiste et tant d’autres – car tout saint a son traître –, pardonne. Plus à lui qu’à aucun autre. Pardonne comme Dieu a pardonné aux hommes et comme il leur pardonnera. Appelle encore “ mon fils ” celui qui te fera souffrir car c’est ainsi que le Père vous appelle par ma bouche et, en vérité, il n’y a pas d’homme qui n’ait causé de la douleur au Père des Cieux… »

259.8

Un long silence suit pendant la traversée des pâturages où des brebis broutent ici et là.

Enfin Jésus demande :

« Tu n’as pas d’autres questions à me poser ?

– Non, Jésus. Ce matin, j’ai mieux compris ma redoutable mission…

– Parce que tu es moins bouleversé qu’hier. Quand ton heure viendra, tu seras encore plus en paix et tu comprendras mieux encore.

– Je me rappellerai toutes ces choses… toutes… sauf…

– Quoi, Jacques ?

– Sauf ce qui ne me permettait pas de te regarder sans pleurer, cette nuit. Je ne sais pas exactement si c’est toi qui me l’as dit – il me faudrait alors y croire –, ou bien si cela venait du démon qui voulait m’effrayer. Mais comment peux-tu être si calme si… si cela devait vraiment se produire ?

– Serais-tu calme si je te disais : “ Il y a un berger qui se traîne avec peine car il est estropié. Tâche de le guérir au nom de Dieu ” ?

– Non, mon Seigneur. Je serais comme hors de moi en pensant être tenté d’usurper ta place.

– Et si je te l’ordonnais ?

– Je le ferais par obéissance et je n’aurais plus de trouble, car je saurais que tu le veux et je ne redouterais pas de ne pas être à la hauteur. Car, si tu m’envoyais, tu me donnerais sûrement la force de faire ta volonté.

– Tu as raison, c’est exact. Tu vois donc que moi-même, en obéissant au Père, je suis toujours en paix. »

Jacques baisse la tête et pleure.

« Veux-tu vraiment oublier ?

– Ce que tu veux, Seigneur…

– Tu as le choix entre deux possibilités : oublier ou te souvenir. L’oubli te délivrera de la douleur et du silence absolu auprès de tes compagnons, mais te laissera non préparé. En revanche, le souvenir te préparera à ta mission, car il n’y a qu’à se rappeler ce que le Fils de l’homme souffre pendant sa vie sur terre pour ne jamais se plaindre et pour devenir spirituellement viril en voyant tout ce qui concerne le Christ dans la lumière la plus lumineuse. Choisis.

– Croire, me souvenir, aimer. Voilà ce que je voudrais. Et mourir au plus tôt, Seigneur… »

Jacques pleure toujours sans bruit. Sans les larmes qui brillent sur sa barbe châtaine, on ne s’en rendrait pas compte. Jésus le laisse se ressaisir… Enfin Jacques dit :

« Et si à l’avenir tu faisais de nouvelles allusions à… à ton martyre, dois-je dire que je sais ?

– Non. Tais-toi. Joseph a su garder le silence sur sa douleur d’époux qui se croyait trahi, et sur le mystère de ma conception virginale et de ma Nature. Imite-le. Cela aussi était un redou­table secret. Et pourtant il devait être gardé car, si ce n’avait pas été le cas, par orgueil ou par légèreté, cela aurait mis en danger toute la Rédemption. Satan ne cesse de veiller et d’agir. Rappelle-toi cela. Si tu parlais maintenant, ce serait un dommage pour trop de gens, et pour trop de raisons. Tais-toi.

– Je me tairai… et cela me pèsera doublement… »

Jésus ne répond pas. Il laisse Jacques, à l’abri de son couvre-chef de lin, pleurer à son aise.

259.9

Ils rencontrent un homme avec un malheureux enfant qu’il tient sur ses épaules.

« C’est ton fils ? demande Jésus.

– Oui. Il est né comme ça, en faisant mourir sa mère. Maintenant que ma mère est morte elle aussi, je l’emmène avec moi quand je vais au travail, pour le surveiller. Je suis bûcheron. Je l’étends sur l’herbe, sur mon manteau, et pendant que je scie les arbres, lui s’amuse avec les fleurs… mon malheureux enfant !

– C’est pour toi un grand malheur.

– Eh oui… Mais ce que Dieu veut, il faut l’accepter en paix.

– Adieu, homme. Que la paix soit avec toi.

– Adieu. Paix à vous aussi. »

L’homme gravit la montagne, Jésus et Jacques continuent à descendre.

« Que de malheurs ! J’espérais que tu le guérirais » dit Jacques en soupirant.

Jésus ne semble pas avoir entendu.

« Maître, si cet homme avait su que tu es le Messie, il t’aurait peut-être demandé un miracle… »

Jésus ne répond pas.

« Jésus, me laisses-tu revenir en arrière pour le dire à cet homme ? J’ai pitié de cet enfant. J’ai le cœur déjà si rempli de douleur ! Donne-moi, au moins, la joie de voir cet enfant guéri.

– Vas-y donc. Je t’attends ici. »

259.10

Jacques part en courant. Il rejoint l’homme et l’appelle :

« Homme, arrête-toi, écoute ! Celui qui était avec moi, c’est le Messie. Donne-moi ton enfant pour que je le lui porte. Viens, toi aussi, si tu veux, pour voir si le Maître va te le guérir.

– Vas-y toi, homme. Je dois couper tout ce bois. Je suis déjà en retard à cause de l’enfant. Si je ne travaille pas, nous ne mangeons pas. Je suis pauvre, et il me coûte bien cher. Je crois au Messie, mais il vaut mieux que tu lui parles pour moi. »

Jacques se penche pour prendre l’enfant couché sur l’herbe.

« Doucement, l’avertit le bûcheron, il souffre de partout. »

En effet, dès que Jacques essaie de le soulever, l’enfant pleure plaintivement.

« Oh, quelle peine ! Soupire Jacques.

– Une grande peine » dit le bûcheron tout en sciant un tronc très dur. Et il ajoute :

« Ne pourrais-tu pas le guérir, toi ?

– Je ne suis pas le Messie, moi. Je ne suis qu’un disciple…

– Et alors ? Les médecins s’instruisent auprès d’autres médecins, les disciples auprès de leur maître. Allons, sois gentil, ne le fais pas souffrir. Essaie toi-même. Si le Maître avait voulu venir ici, il l’aurait fait. Il t’a envoyé soit parce qu’il ne veut pas le guérir, soit parce qu’il veut que ce soit toi qui le fasses. »

Jacques est perplexe. Puis il se décide. Il se redresse et prie comme il le voit faire à son Jésus, puis il ordonne :

« Au nom de Jésus Christ, Messie d’Israël et Fils de Dieu, sois guéri » et aussitôt après il s’agenouille en disant : « Ô, mon Seigneur, pardon ! J’ai agis sans ta permission ! Mais j’ai eu pitié de cet enfant d’Israël. Pitié, mon Dieu ! Pour lui et pour moi, pécheur ! »

Il pleure abondamment, penché sur l’enfant étendu. Les larmes tombent sur les petites jambes tordues et inertes.

259.11

Jésus débouche du sentier. Mais personne ne le voit, car le bûcheron travaille, Jacques pleure, l’enfant le regarde avec curiosité puis, tendrement, demande :

« Pourquoi tu pleures ? »

Et il tend sa menotte pour le caresser et, sans même s’en apercevoir, il s’assied tout seul, se lève et vient embrasser Jacques pour le consoler.

C’est le cri de Jacques qui fait se retourner le bûcheron qui voit son enfant debout sur ses jambes, qui ne sont plus mortes ni tordues. En se retournant, il voit Jésus.

« Le voilà ! Le voilà ! » crie-t-il en le montrant derrière Jacques, qui se retourne et voit Jésus, le visage rayonnant de joie, qui le regarde.

« Maître ! Maître ! Je ne sais pas comment cela s’est fait… la pitié… cet homme… cet enfant… Pardon !

– Lève-toi. Les disciples ne sont pas plus grands que le Maître, mais ils peuvent faire ce que fait le Maître quand c’est pour une sainte raison. Lève-toi et viens avec moi. Soyez bénis, tous les deux, et souvenez-vous que les serviteurs de Dieu eux aussi font les œuvres du Fils de Dieu. »

Puis il s’en va en entraînant Jacques qui ne cesse de répéter :

« Mais comment ai-je pu ? Je ne comprends pas encore. Avec quoi ai-je fait ce miracle en ton nom ?

– Par ta pitié, Jacques, par ton désir de me faire aimer par cet innocent et par cet homme qui croyait et doutait en même temps. Jean, près de Jabnia, a fait un miracle par amour en guérissant un mourant par une onction et la prière. Toi, ici, tu as guéri par tes pleurs et ta pitié, et par ta confiance en mon nom. Tu vois comme c’est une chose paisible de servir le Seigneur quand l’intention du disciple est droite ? Maintenant, marchons vite, car cet homme nous suit. Il n’est pas bon que tes compagnons soient informés de cela, pas encore. Bientôt, je vous enverrai en mon nom… (Jésus pousse un grand soupir) comme Judas brûle de le faire (Jésus soupire de nouveau). Et vous le ferez… Mais ce ne sera pas pour tous un bien. Vite, Jacques ! Simon-Pierre, ton frère et aussi les autres, souffriraient de savoir cela comme si c’était une partialité. Mais il ne s’agit pas de cela. Il s’agit de préparer parmi vous douze quelqu’un qui sache guider les autres. Descendons dans le lit, couvert de feuilles, de ce torrent. Nous ferons disparaître nos traces… Cela te déplaît pour l’enfant ? Oh ! Nous le retrouverons… »

259.1

Jesus leaves the tableland on Mount Carmel and descends along dewy paths through woods that become livelier with trills and voices in the early sunshine gilding the eastern side of the mountain. When the sun dissolves the heat haze, the beauty of the whole plain of Esdraelon is displayed with its orchards and vineyards all gathered around houses. It looks like a carpet, mostly green, with a few yellowish oases strewn with red areas, which are the fields where the corn has been cut and poppies now sparkle, a carpet enclosed by the triangular bezel of Mount Carmel, Mount Tabor and Mount Hermon (Little Hermon) and by more remote mountains the names of which I do not know, which conceal the Jordan and are linked to the south-east to the mountains of Samaria. Jesus stops and looks pensively at all that area of Palestine.

James looks at Him and says: «Are You looking at the beauty of this region?»

«Yes also at that. But more than anything else I was thinking of future pilgrimages and of the need to send disciples without any delay to do real missionary work, and not just limited work as we have done now. There are many areas where I am not yet known and I do not want to leave any place without the knowledge of Me. It is a worry constantly present in My mind: to go and do everything, while I can…»

«Now and again something happens that delays You.»

«Rather than delay Me they cause changes to My itinerary; because the trips we make are never useless. But there is still so much to be done… Also because after being absent from one place I find that many hearts have gone back to where they started from, and I have to start all over again.»

«Yes, the apathy of souls, their inconstancy and affection for evil are depressing and disgusting.»

«Depressing, yes, but do not say disgusting. The work of God is never disgusting. We must feel pity not disgust for poor souls. We must always have the heart of a father, of a good father. A good father is never disgusted at the diseases of his children. We must never have a dislike for anyone.»

259.2

«Jesus, may I ask You a few questions? I did not sleep last night. But I pondered very much while watching You sleep. You look so young when You are asleep. My brother! You were smiling, with Your head resting on Your folded arm, just like the posture of a little boy. I could see You very well in the clear moonlight of last night. And I pondered. And many questions came up from my heart…»

«Tell Me.»

«I was saying: I must ask Jesus how we shall be able to set up that organized body, which You called Church, and in which there will be hierarchies, if I understood properly, considering how incapable we are. Will You tell us what we must do, or shall we have to do it by ourselves?»

«When the time comes, I will tell you who is its leader. Nothing else. While I am with you, I will inform you of its various classes with the differences between apostles, disciples and women disciples. Because they cannot be avoided. But as I want the disciples to respect and obey the apostles, so the apostles must love and be patient with the disciples.»

«And what shall we have to do? Preach You all the time and nothing else?»

«That is essential.

259.3

Then you will have to absolve in My name and bless, readmit to Grace, administer the Sacraments that I will institute…»

«What are they?»

«They are supernatural and spiritual means, applied through material means as well, which are used to convince men that the priest is really doing something. You know that man does not believe unless he sees. He always needs something to tell him that there is something. That is why, when I work miracles, I impose My hands, or I wet with saliva, or I give a morsel of soaked bread. I could work a miracle by means of a simple thought. But do you think that in that case people would say: “God has worked the miracle?” They would say: “The invalid is cured because it was time for him to be cured”. And they would ascribe the merit to the doctor, or to medicines or to the physical strength of the invalid. The same will apply to sacraments: religious formalities to administer Grace, or give it again, or fortify it in believers. John, for instance, used to immerse sinners into water to symbolize cleanliness from sin. In actual fact the mortification of confessing oneself unclean because of sins committed was more useful than the water that washed only the body. I will have a baptism as well, My baptism, which will not be only a symbol, but will really cleanse a soul of the original sin and give back to it the spiritual state that Adam and Eve possessed before they sinned, a state, which is now improved, because it will be granted through the merits of the Man-God.»

«But… water does not descend upon the soul! A soul is spiritual. Who can touch it in a new-born baby, in an adult or in an old person? Nobody.»

«See, you admit that water is a material means, with no effect on a spiritual thing? So it will not be the water, but the word of the priest, a member of the Church of Christ, consecrated in his service, or the word of another true believer, who may replace him in exceptional cases, that will work the miracle of redeeming the baptised person from original sin.»

259.4

«All right. But man commits sins of his own… Who will remove the other sins?»

«It will always be the priest, James. If an adult is baptised, also the other sins will be removed with the original one. If a man has been baptised and he commits sins, the priest will absolve him in the name of God One and Triune and through the merits of the Incarnate Word, as I do with sinners.»

«But You are holy! We…»

«You must be holy because you touch holy things and you administer what belongs to God.»

«So shall we baptise the same man several times, as John does, in fact he grants immersion into water as many times as one goes to him?»

«John’s baptism purifies only through the humility of the person who is immersed into water. I already told you. You shall not baptise again those who have already been baptised, unless a person has been baptised with a schismatic formula and not with the apostolic one, in which case a second baptism is to be administered, subject to a precise request of the person to be christened, if adult, and subject to a clear statement that the person in question wishes to become a member of the true Church. In all other cases, to give a soul its friendship and peace with God, you will use the words of forgiveness joined to the merits of Christ, and the soul that has come to you with true repentance and a humble confession, will be absolved.»

259.5

«And if a man cannot come because he is so ill that he cannot be moved? Will he die in sin? Will the fear for the judgement of God be added to the misery of his agony?»

«No. The priest will go to the dying person and give absolution. In actual fact he will give the person a wider form of absolution, not a comprehensive one, but an absolution for each and every sense-organ, by means of which man generally sins. We have in Israel the Sacred Oil, compounded according to the prescriptions given[1] by the Most High, with which the altar, the Pontiff, priests and kings are consecrated. Man is really an altar. And he becomes king through his election to a throne in Heaven; he can therefore be consecrated with the oil of Unction. The Holy Oil will be taken with other rites of the Israelite cult and included in My Church, but with different uses. Because not everything in Israel is evil and to be rejected. On the contrary, many recollections of the old stock will be in My Church. And one will be the Oil of Unction, which will also be used in the Church to consecrate altars, Pontiffs, all ecclesiastic hierarchies, kings and believers, when they become princes and heirs of the Kingdom, or when they need the greatest help to appear before God with their bodies and senses cleansed of all sins. The grace of God will assist both the soul and the body, if God so wishes for the benefit of the sick person. A body does not always react against diseases because its peace is also upset by remorse and because of the work of Satan, who through the death of the sick person hopes to gain a soul to his kingdom and cause despair to those who are left behind. The sick person passes from the satanic grip and internal emotion to a peaceful state, through the certainty of God’s forgiveness, which also brings about Satan’s departure. And since the gift of Grace was coupled in our first progenitors with the gift of immunity from diseases and from all forms of sorrow, the sick person, who has been restored to Grace as great as the Grace of a new-born baby, christened with My baptism, may get over the illness. The sick man is assisted also by the prayers of his brethren, who are obliged to have not only physical but above all spiritual pity on invalids, in order to obtain both physical and spiritual salvation for their brother. Prayer is in fact a form of miracle, James. The prayer of a just man, as you have seen in Elijah, can be very powerful.»

259.6

«I understand only a little of what You say, but what I do understand fills me with deep respect for the sacerdotal character of Your priests. If I have understood You correctly, we shall have many points in common with You: preaching, absolution, miracles. Three sacraments, therefore.»

«No, James. Preaching and miracles are not sacraments. The Sacraments will be more: seven, like the sacred candelabrum of the Temple and the gifts of the Spirit of Love. And in fact the Sacraments are gifts and flames and are granted to man so that he may burn forever before the Lord. There will be a Sacrament also for the marriage of man. And it is already symbolised[2] in the holy marriage of Sarah, the daughter of Raguel, after she was freed from the demon. The Sacrament will give the married couple all the assistance needed to live together according to the law and the wishes of God. Husband and wife also become the ministers of a rite: the rite of procreation. Husband and wife become also the priests of a small church: their family. They must therefore be consecrated in order to procreate with the blessing of God and to bring up a progeny that will bless the Most Holy Name of God.»

«And by whom will priests be consecrated?»

«By Me, before I leave you. You will, afterwards, consecrate your successors and those whom you will aggregate to yourselves to propagate the Christian faith.»

«You will teach us, will You not?»

«I and He Whom I will send to you. Also His coming will be a Sacrament. It will be granted voluntarily by the Most Holy God in His first Epiphany, and it will then be given by those who have received the fullness of Priesthood. It will be strength and intelligence, confirmation in Faith, it will be holy piety and fear, it will be assistance in advice and supernatural wisdom, and it will be possession of a justice that by its nature and power will turn the child who receives it into an adult. But you cannot for the time being understand that. But He will make you understand: the Divine Paraclete, the Eternal Love, when the moment comes for you to receive Him. And likewise you cannot for the time being understand another Sacrament. It is so sublime that it is almost incomprehensible to angels. And yet you, simple men, will understand it by virtue of faith and love. I solemnly tell you that those who will love it and nourish their souls by it, will be able to trample on the demon with impunity. Because I will then be with them. Try to remember these things, brother. You will have to repeat them many times to your companions and to believers. You will all already know through your divine ministry, but you will be able to say: “He told me one day, coming down from Mount Carmel. He told me everything because since then I was destined to be the head of the Church of Israel”.»

259.7

«Here is another question I wanted to ask You. I was thinking about it last night. Shall I have to say to my companions: “I will be the head here?” I don’t like it. I will do it if You tell me. But I do not like it.»

«Be not afraid. The Paraclete Spirit will descend upon you all and will instil holy thoughts into you. You will all have the same thoughts for the glory of God in His Church.»

«And will there be no more of those… so unpleasant discussions that we have now? Even Judas of Simon will no longer be the cause of disagreement?»

«He will no longer be, do not worry. But there will still be differences of opinion. That is why I said to you: be careful and watch, without ever tiring, doing your duty to the end.»

«Another question, my Lord. How am I to behave during persecutions? By what You say, it looks as if I am the only one of the Twelve to be left. So the others will go away to avoid persecutions. And what about me?»

«You will stay in your place. Because if it is necessary that you are not all exterminated until the Church is well consolidated, which justifies the dispersion of many disciples and of almost all the apostles, nothing would justify your desertion and your abandoning the Church of Jerusalem. Indeed, the greater its danger is, the more you will have to watch over it, as if it were your dearest child about to die. Your example will strengthen the souls of believers. And they will need it to pass the test. The weaker you see them, the more you will have to support them with pity and wisdom. If you are strong, do not be pitiless with weak people. Support them saying: “I have received everything from God to become so strong. I must admit it humbly and act charitably on behalf of those who have not been blessed with so many gifts of God”, and you must share your strength through your word, your assistance, your calm and example.»

«And if among the believers there should be some wicked ones who are the cause of danger and of scandal to the others, what shall I do?»

«Be wise when you accept them, because it is better to be few and good, than many and not good. You know the old apologue of the good apples and the bad ones. Make sure it does not happen also in your church. But should you find people who betray you as well, endeavour in every way to get them to repent, using severe measures as a last resource. But if it is a matter of small individual faults, do not be so severe as to dismay people. Forgive, always… A heart is more easily redeemed by forgiveness joined to tears and loving words than by anathema. If the fault is a serious one, but is the result of a sudden attack by Satan, and is so serious that the culprit feels the need to run away from your presence, go and look for the offender. Because he is a lamb led astray, and you are the shepherd. Do not be afraid of degrading yourself by going along muddy paths, searching pools and precipices. Your forehead will then be crowned with the crown of the martyr of love, and it will be the first of the three crowns… And if you are betrayed yourself, as the Baptist was, and like many others, because every holy man has his traitor, forgive. Forgive the traitor more than you would forgive anybody else. Forgive as God forgave men and as He will forgive. Call him “son” again, he who will grieve you, because that is how the Father calls you through My lips, and, truly, there is no man who has not caused deep sorrow to the Father in Heaven…»

259.8

There is a long period of silence while they cross pastures strewn with grazing sheep.

At last Jesus asks: «Have you no more questions to ask Me?»

«No, Jesus. And this morning I understood my tremendous mission more clearly…»

«Because you are less upset than you were yesterday. When your time comes, you will be even more calm and you will understand even better.»

«I will remember all these things… everything… except…»

«What, James?»

«Less what did not let me look at You last night without weeping. What I do not really know whether You told me, and whether I should believe it if really told by You; or whether it was a fright by the demon. How can You be so calm if… if that should really happen to You?»

«And would you be calm if I said to you: “That shepherd is dragging himself along with great difficulty because of his maimed leg. Try to cure him in the name of God”?»

«No, my Lord. I would be beside myself thinking that I was tempted to usurp Your place.»

«And if I ordered you?»

«I would do it out of obedience and I would no longer be upset because I would know that You want it, and I would not be afraid of not knowing how to do it. Because, if You sent me, You would certainly give me the strength to do what You want…»

«You say so, and you are right. You can thus see that I, by obeying the Father, am always in peace.»

James lowers his head weeping.

«Do you really want to forget?»

«As You wish, my Lord…»

«You have two options: to forget or to remember. By forgetting you will be relieved from sorrow and from the necessity of being absolutely silent with your companions, but you will be left unprepared. By remembering you will become prepared for your mission, because in order never to complain and to be strengthened spiritually seeing the whole of Christ in the brightest light, one thing only is necessary: to remember what the Son of man suffers in His earthly life. Make your choice.»

«To believe, to remember, to love. That is what I would like. And to die, as soon as possible, Lord…» And James continues to weep silently. If it was not for the tears shining on his brown beard, one would not realise that he is weeping.

Jesus lets him weep… Then James asks: «And if in the future You should allude again to… to Your martyrdom, shall I say that I know?»

«No. Be quiet. Joseph was able to be silent on his sorrow of a bridegroom when he thought his bride was unfaithful to him and on the mysteries of Her virginal conception and of My Nature. Imitate him. That was a tremendous secret as well. And it was to be kept, because if it had been disclosed, out of pride or carelessness, the whole Redemption would have been endangered. Satan is constant in watching and acting. Remember that. If you spoke now, you would damage too many people and too many things. Be silent.»

«I will… and it will be a double burden…»

Jesus does not reply. He lets James weep freely, sheltered by his linen hood.

259.9

They meet a man carrying an unhappy child tied to his back.

«Is he your son?» asks Jesus.

«Yes. He was born thus, and was the cause of his mother’s death. Now, my mother is also dead, and when I go to my work, I take him with me to watch him. I am a woodcutter. I lay him on the grass, on my mantle, and while I cut trees down, he plays with flowers, the poor wretch!»

«It is a great misfortune.»

«Yes, it is. But we must accept peacefully what God wants.»

«Goodbye, man. Peace be with you.»

«Goodbye. Peace to You.»

The man climbs the mountain, Jesus and James continue to descend.

«How many misfortunes! I was hoping that You would cure him» says James with a sigh.

Jesus does not appear to hear.

«Master, if that man had known that You are the Messiah, perhaps he would have asked You to work a miracle…»

Jesus does not reply.

«Jesus, will You let me go back and tell him? I feel sorry for that boy. My heart is already so grieved. Give me at least the joy of seeing the little fellow cured.»

«You may go. I will wait for you here.»

259.10

James runs back. He comes up with the man and calls him.

«Man, stop, listen! The man who was with me is the Messiah. Give me your boy that I may take him to Him. You may come as well, if you wish so, to see whether the Master will cure him.»

«Go, man. I have all this wood to cut. I am already late because of the child. And if I do not work, I get no food. I am poor, and he costs me so much. I do believe in the Messiah, but it is better if you speak to Him on my behalf.»

James bends to pick up the boy lying on the grass.

«Be careful» warns the woodcutter. «He is painful all over.»

In fact, as soon as James attempts to lift him, the boy weeps moanfully.

«Oh! How painful!» exclaims James with a sigh.

«A dreadful pain» says the woodcutter working with a saw on a hard trunk, and he adds: «Could you not cure him?»

«I am not the Messiah. I am only a disciple…»

«Well? Doctors learn from other doctors. Disciples learn from their Master. Come on, be good. Don’t make him suffer. Try. If the Master wanted to come, He would have come. He sent you either because He does not want to cure him or because He wants you to cure him.»

James is undecided. He then makes up his mind. He stands up and he prays as he has seen Jesus pray. Finally he enjoins: «In the name of Jesus Christ, the Messiah of Israel and Son of God be cured» and immediately afterwards he kneels down saying: «Oh! My Lord, forgive me! I acted without Your permission! But I did it out of pity for this child of Israel. Have mercy, my God! On him and on me, a sinner!» and he sheds bitter tears bent over the boy outstretched on the grass. His tears fall on to the twisted inert legs.

259.11

Jesus suddenly appears on the path. But no one sees Him, because the woodcutter is working, James is weeping and the boy is looking at him curiously, and then caressing him, he asks: «Why are you weeping?» and he stretches out his little hand to caress him again, and without realizing it, he sits up by himself, he stands up and embraces James to comfort him. It is James’ cry that makes the woodcutter turn around and he then sees his boy standing straight on his legs, which are no longer inert or twisted. And turning around he sees Jesus.

«There He is!» he shouts pointing to the back of James who turns around and sees Jesus looking at him beaming with joy.

«Master! I do not know how it happened… pity… that man… this child… Forgive me!»

«Stand up. Disciples are not above their Master but they can do what the Master does, when they do it for a holy reason. Stand up and come with Me. May you two be blessed and remember that also the servants of God accomplish the deeds of the Son of God» and He goes away, dragging James who continues to say: «How could I do that? I do not understand yet. How did I work a miracle in Your name?»

«By being pitiful, James. Through your desire to make Me loved by that innocent child and by that man who believed and doubted at the same time. John worked a miracle near Jabneel out of love, curing a dying man whom he anointed while praying. You cured here by means of your tears and your pity. And with your faith in My Name. See how peaceful it is to serve the Lord when a disciple has good intentions? Now let us walk fast, because that man is following us. It is not right that your companions should be aware of this for the time being. I will soon be sending you in My name… (a deep sigh of Jesus), as Judas of Simon is anxious to work (another heavy sigh). And you will work… But it will not do everybody good. Quick, James! Your brother, Simon Peter and the others would suffer if they knew about this, as if it were favouritism. But it is not. It is to prepare someone among you twelve who may be capable of guiding the others. Let us go onto the gravel bed of the torrent that is covered with leaves. All trace of us will be lost… Are you sorry for the boy? Oh! we shall meet him again…»


Notes

  1. donnée : en Ex 30, 22-33.
  2. représenté, en Tb 3, 16-17 ; 7, 12-13 ; 8, 4-8 et 15-17.

Notes

  1. given, in: Exodus 30:22-33.
  2. symbolised, in: Tobit 3:16-17.