The Writings of Maria Valtorta

271. Départ pour Tarichée avec les apôtres revenus de Capharnaüm.

271. Departure by boat to Tarichea

271.1

La nuit est tombée quand Jésus rentre à la maison. Il entre sans bruit dans le jardin, s’arrête un instant devant la cuisine obscure, voit qu’elle est vide. Il se rend dans les deux pièces où sont les nattes et les lits : vides, elles aussi. Seuls les vêtements qu’on a changés, en tas par terre, indiquent que les apôtres sont revenus. La maison semble inhabitée, tant elle est silencieuse.

Jésus monte l’escalier en faisant moins de bruit qu’une ombre, blancheur dans la blancheur de la pleine lune, et arrive sur la terrasse. Il la traverse. On dirait un fantôme qui se déplace sans bruit, un fantôme lumineux. Dans l’éclat de la lumière de la lune, il semble s’affiner, grandir encore. De la main, il soulève le rideau de la porte de la chambre du haut. Il était resté abaissé depuis le moment où les disciples de Jean y étaient entrés avec Jésus. A l’intérieur, assis çà et là, en groupes ou seuls, se trouvent les apôtres avec les disciples de Jean et Manahen, et aussi Marziam, endormi, la tête sur les genoux de Pierre. La lune, pénétrant par flots luminescents par les fenêtres ouvertes, se charge d’éclairer la pièce. Personne ne parle. Et personne ne dort, sauf l’enfant assis par terre sur une natte.

271.2

Jésus entre doucement. Thomas est le premier à le voir :

« Oh ! Maître ! » dit-il en sursautant.

Tous les autres se secouent. Pierre, dans son impétuosité, va se lever brusquement, mais il se souvient de l’enfant et le fait doucement, en appuyant la tête brune de Marziam sur son siège, de sorte qu’il arrive le dernier auprès de Jésus tandis que le Maître, de la voix fatiguée de quelqu’un qui a beaucoup souffert, répond à Jean, Jacques et André qui lui font part de leur douleur :

« Je comprends. Mais seul celui qui ne croit pas doit se sentir désolé par une mort. Pas nous qui savons et croyons. Jean n’est plus séparé de nous. Il l’était auparavant. Auparavant, il nous séparait, même. On était soit avec moi, soit avec lui. Maintenant, c’est fini. Là où il est, moi, je suis. Il est auprès de moi. »

Pierre passe sa tête grisonnante au milieu des têtes jeunes et Jésus le voit :

« Toi aussi, tu as pleuré, Simon ! »

Et Pierre, d’une voix plus rauque qu’à l’ordinaire :

« Oui, Seigneur, car moi aussi j’avais été disciple de Jean… Et puis… et puis… Dire que, vendredi dernier, je m’attristais de ce que la présence des pharisiens nous remplisse d’amer­tume le sabbat ! Celui-ci, oui, c’est un sabbat d’amertume ! J’avais amené l’enfant… pour avoir un sabbat encore plus beau… Au con­traire…

– Ne te laisse pas abattre, Simon. Jean n’est pas perdu. Je te le dis aussi à toi. Et, en échange, nous avons trois disciples bien formés. Où est l’enfant ?

– Là, Maître. Il dort…

– Laisse-le dormir » dit Jésus en se penchant sur la petite tête brune qui dort tranquillement.

Puis il demande encore :

« Avez-vous dîné ?

– Non, Maître. Nous t’attendions et nous commencions à nous faire du souci à cause de ton retard : nous ne savions où te chercher… Il nous semblait t’avoir perdu, toi aussi.

– Nous avons encore du temps à passer ensemble. Allons, préparez le dîner car, ensuite, nous partirons ailleurs. J’ai besoin de m’isoler au milieu d’amis et demain, si nous restons ici, il y aura toujours des personnes pour nous entourer.

– Et moi, je te jure que je ne les supporterais pas, spécialement ces manœuvres de serpents des âmes de pharisiens. Et ce serait dangereux s’il leur échappait même un sourire s’adressant à nous, dans la synagogue !

– Du calme, Simon !… Mais j’y avais pensé aussi. C’est pour cela que je suis revenu vous prendre avec moi. »

A la lueur des petites lampes allumées des deux côtés de la table, on voit mieux l’altération des visages. Seul Jésus garde sa majesté solennelle et Marziam sourit dans son sommeil.

« L’enfant a déjà mangé, explique Simon.

– Dans ce cas, il vaut mieux le laisser dormir » répond Jésus.

Et, au milieu des ses disciples, il offre et distribue un peu de nourriture que l’on mange sans appétit. Le dîner est vite ter­miné.

271.3

« Maintenant, racontez-moi ce que vous avez fait, dit Jésus pour les encourager.

– Moi, je suis allé avec Philippe dans les campagnes de Bethsaïde. Nous avons évangélisé et guéri un enfant malade, raconte Pierre.

– En réalité, c’est Simon qui l’a guéri, intervient Philippe qui ne veut pas s’attribuer une gloire qui ne lui appartient pas.

– Oh, Seigneur ! Je ne sais pas comment j’ai fait. J’ai prié beaucoup, de tout mon cœur, parce que le petit malade me faisait pitié. Après, je l’ai oint avec de l’huile et je l’ai frotté avec mes grosses mains… et il a guéri. Quand j’ai vu son visage se colorer et ses yeux s’ouvrir, revivre en somme, j’ai presque eu peur. »

Jésus pose la main sur sa tête, sans parler.

« Jean a beaucoup étonné parce qu’il a chassé un démon, mais c’est à moi qu’il est revenu de parler, dit Thomas.

– Ton frère Jude l’a fait aussi, ajoute Matthieu.

– Et André de même, renchérit Jacques, fils d’Alphée.

– De son côté, Simon le Zélote a guéri un lépreux. Ah ! Il n’a pas eu peur de le toucher ! Mais il m’a dit ensuite : “ Ne crains pas. Par la volonté de Dieu, aucun mal physique ne s’en prend à nous ”, dit Barthélemy.

– Tu as bien parlé, Simon. Et vous deux ? » demande Jésus à Jacques, fils de Zébédée, et à Judas, qui se trouvent un peu loin, le premier parlant avec les trois disciples de Jean, le second seul et renfrogné.

« Oh ! Moi, je n’ai rien fait » dit Jacques. « Mais Judas a fait trois miracles formidables : un aveugle, un paralytique et un possédé : à moi, il me semblait lunatique, mais les gens l’appelaient comme ça…

– Et toi, tu nous fais cette tête, alors que Dieu t’a tant aidé ? demande Pierre.

– Je sais être humble, moi aussi, répond Judas.

– Ensuite, nous avons été reçus par un pharisien. Moi, j’étais mal à l’aise. Mais Judas sait mieux s’y prendre et il l’a vraiment apprivoisé. Le premier jour, il était sur ses gardes, mais ensuite… N’est-ce pas, Judas ? »

Judas acquiesce sans mot dire.

« Très bien. Et vous ferez toujours mieux. La semaine prochaine, nous restons ensemble. En attendant… Simon, va préparer les barques. Toi aussi, Jacques.

– Pour tous, Maître ? Nous n’y tiendrons pas tous !

– Ne peux-tu en obtenir une autre ?

– Si je la demande à mon beau-frère, oui. J’y vais.

– Va, et reviens immédiatement dès que ce sera fait. Et ne donne pas trop d’explications. »

Les quatre pêcheurs partent. Les autres descendent prendre sacs et manteaux.

271.4

Il reste Manahen avec Jésus. L’enfant continue de dormir.

« Maître, tu vas loin ?

– Je ne sais pas encore… Ils sont fatigués et affligés. Moi aussi. Je compte aller à Tarichée, dans la campagne, pour nous isoler et être en paix.

– J’ai mon cheval, Maître. Mais, si tu le permets, je vais venir en longeant le lac. Tu y resteras longtemps ?

– Peut-être toute la semaine. Pas davantage.

– Dans ce cas, je vais venir. Maître, bénis-moi en ce premier adieu. Et enlève-moi un poids du cœur.

– Lequel, Manahen ?

– J’ai du remords d’avoir abandonné Jean. Peut-être que si j’avais été là…

– Non. C’était son heure. D’ailleurs, il a certainement été heureux de te voir venir à moi. N’aie pas ce poids. Cherche, au contraire, à te libérer vite et bien de l’unique poids que tu as : le goût d’être homme. Deviens esprit, Manahen. Tu le peux. Tu as en toi la capacité de l’être. Adieu, Manahen. Que ma paix soit avec toi. Nous nous reverrons bientôt en Judée. »

Manahen s’agenouille et Jésus le bénit. Puis il le relève et l’embrasse.

Les autres rentrent et se saluent mutuellement, aussi bien les apôtres que les disciples de Jean. En dernier lieu viennent les pêcheurs :

« C’est fait, Maître. Nous pouvons partir.

– C’est bien. Saluez Manahen qui reste ici jusqu’à demain au crépuscule. Rassemblez les vivres, prenez de l’eau et partons. Faites peu de bruit. »

Pierre se penche pour réveiller Marziam.

« Non, laisse-le. Il pourrait pleurer. Je le prends dans mes bras » dit Jésus.

Il soulève délicatement l’enfant qui gémit un peu, mais instinctivement se blottit à son aise dans les bras de Jésus.

271.5

Ils éteignent les lampes, sortent, ferment la porte et descendent. Au seuil du jardin, ils saluent de nouveau Manahen puis, en file, ils prennent le chemin éclairé par la lune pour se rendre au lac : ce n’est qu’un immense miroir d’argent sous la lune à son zénith. Les trois fanaux des proues déjà immergées forment trois taches rouges sur ce paisible miroir. Ils montent en se répartissant dans les barques ; les pêcheurs montent les derniers. Pierre et un mousse là où se trouve Jésus, Jean et André dans la deuxième barque, Jacques et un mousse dans la troisième.

« Où allons-nous, Maître ? demande Pierre.

– A Tarichée. Là où nous avons débarqué[1] après le miracle des Géraséniens. Cette fois, il n’y aura pas de marécage et nous y serons tranquilles. »

Pierre prend le large, puis les autres avec les embarcations par derrière, dans le sillage de celui qui précède. Personne ne parle. Lorsqu’ils sont au large et que Capharnaüm s’évanouit dans la clarté de la lune qui uniformise tout par sa poussière d’argent, alors Pierre, comme s’il parlait à la barre du gouvernail, dit :

« ça me plaît : demain, ils vont nous chercher, ma vieille, et grâce à toi ils ne nous trouveront pas.

– A qui parles-tu, Simon ? demande Barthélemy.

– A la barque. Tu ne sais pas que pour les pêcheurs elle est comme une épouse ? Combien j’ai parlé avec elle ! Plus qu’avec Porphyrée… Maître !… L’enfant est bien couvert ? Il y a de la rosée, sur le lac, la nuit…

– Oui. Ecoute, Simon. Viens ici. J’ai à te parler… »

Pierre passe la barre au mousse et va auprès de Jésus.

« J’ai dit Tarichée. Mais il suffira d’y être après le sabbat pour saluer de nouveau Manahen. Ne pourrais-tu pas trouver un endroit près de là où nous pourrions être en paix ?

– Maître, qui doit être en paix ? Nous, ou les barques aussi ? Pour elles, il faut Tarichée ou bien les ports de l’autre rive. Mais si c’est pour nous, il suffit que tu t’enfonces au-delà du Jourdain : seuls les animaux te découvriront… et peut-être quelque pêcheur qui surveille ses nasses. Nous pourrons laisser les barques à Tarichée. Nous y arriverons à l’aube et nous filerons rapidement au-delà du gué. Il est facile de le traverser à cette époque.

– C’est bien. C’est ce que nous allons faire…

– Le monde te dégoûte, toi aussi, hein ? Tu préfères les poissons et les moustiques, hein ? Tu as raison.

– Je n’éprouve pas de dégoût. Il ne faut pas en avoir. Mais je veux éviter que vous fassiez des scandales et je veux me consoler en votre compagnie pendant ces heures de sabbat.

– Mon Maître !… »

Pierre l’embrasse sur le front et s’éloigne en essuyant une grosse larme qui veut vraiment couler de l’œil et descendre vers sa barbe.

Il revient à la barre et met résolument le cap au sud pendant que la lumière de la lune décroît au coucher de la planète qui, descendant derrière une colline, dérobe sa grosse face à la vue des hommes, mais en laissant encore le ciel tout blanc de sa lumière et une lueur d’argent sur la plage orientale du lac. Le reste est couleur d’indigo foncé qu’on distingue à peine à la lumière des fanaux de proue.

271.1

Jesus goes back to the house in the dead of night. He enters the kitchen garden silently. He looks for a moment into the dark kitchen. He looks into the two rooms where the mats and beds are. They are empty also. Only the changed clothes, piled on the floor, tell that the apostles have come back. The house is so silent that it seems uninhabited.

Jesus, making less noise than a shadow, goes up the little steps, immaculate white in the whiteness of the full moon, and arrives on the terrace. He walks along it. He seems a ghost moving about silently, a bright ghost. In the white incandescence of the moon, He looks thinner and taller. He lifts with one hand the curtain at the door of the upper room. It had been left down since John’s disciples had entered with Jesus. Inside there are the apostles, sitting here and there, in groups or alone, with John’s disciples and Manaen; there is also Marjiam sleeping with his head on Peter’s knees. The moon illuminates the room entering with its fluorescent rays through the wide open windows. No one is speaking. And no one is sleeping, with the exception of the boy, who is sitting on a mat on the floor.

271.2

Jesus enters quietly and Thomas is the first to see Him. «Oh! Master!» he exclaims starting.

All the others arouse themselves. Peter in his excitement, is on the point of jumping to his feet, but he remembers the child and he stands up gently, laying Marjiam’s dark-haired head on his seat, and thus is the last to arrive at Jesus, while the Master, with the tired voice of one who has suffered very much, is replying to John, James and Andrew, who are expressing their sorrow to Him: «I understand. But only he who does not believe can feel desolate because of death. Not we, who know and believe. John is no longer separated from us. He was before. Or rather, he separated us. Either with Me, or with him. No longer so. Where he is, I am. He is near Me.»

Peter pushes his grey-haired head among the younger ones and Jesus sees him: «You have been weeping, too, Simon of Jonah?» And Peter with a voice hoarser than usual: «Yes, Lord. Because I was a disciple of John, as well. And then… Last Sabbath eve I was complaining that the presence of Pharisees was going to embitter our Sabbath! This is really a bitter Sabbath! I brought the boy, to have a more enjoyable Sabbath… Instead…»

«Do not lose heart, Simon of Jonah. John is not lost. I am repeating that to you, too. And in exchange we have three perfected disciples. Where is the boy?»

«Over there, Master. He is sleeping…»

«Let him sleep» says Jesus stopping over the dark little head which is sleeping peacefully. And He asks again: «Have you had your supper?»

«No, Master. We were waiting for You and we were worried because of Your delay, as we did not know where to look for You… and we seemed to have lost You as well.»

«We still have plenty of time to be together. Well, prepare the supper, because afterwards we shall go to another place. I need to be alone among friends, and if we are here tomorrow, we shall always be surrounded by people.»

«And I swear to You that I would not put up with them, particularly with those snakes of Pharisaic souls. And it would be most unfortunate if a smile escaped them concerning us in the synagogue!»

«Be good, Simon!… I have thought of that as well. That is why I came back to take you with Me.»

The excitement on their faces can be better seen in the light of the little lamps that have been lit at the two ends of the table. Only Jesus is majestically solemn and Marjiam smiles in his sleep.

«The boy has already had his meal» explains Peter.

«It is better to let him sleep, then» says Jesus.

And in the middle of His disciples He offers and hands out the frugal food, which is taken without appetite. And the supper is soon over.

271.3

«Tell Me now what you have done…» says Jesus encouragingly.

«I went with Philip into the country at Bethsaida and we evangelized and cured a sick boy» says Peter.

«In actual fact it was Simon who cured him» says Philip, who does not wish to ascribe to himself a glory not belonging to him.

«Oh! Lord! I do not know how I did it. I prayed hard, with all my heart, because I felt sorry for the little sick boy. I then anointed him with oil, I rubbed him with my coarse hands… and he was cured. When I saw him colour up and open his eyes, that is, when I saw him revive, I was almost afraid.»

Jesus lays a hand on his head without speaking.

«John amazed people by expelling a demon. But I had to speak» says Thomas.

«Your brother Judas also did it» states Matthew.

«Andrew, too» says James of Alphaeus.

«Simon the Zealot, instead, cured a leper. Oh! he was not afraid of touching him! And he said to me: “Be not afraid. By the will of God, no physical disease will affect us”» says Bartholomew.

«You are right, Simon. And what about you two?» Jesus asks James of Zebedee and the Iscariot, who are a little farther away, the former talking to the three disciples of John, the latter being all alone and sulky.

«Oh! I did nothing» says James. But Judas worked three wonderful miracles: a blind man, a paralytic, a possessed man. He looked like a lunatic to me. But that is what people said…»

«And you are pulling a long face, when God has assisted you so much?» exclaims Peter.

«I can be humble as well» replies the Iscariot.

«And we were the guests of a Pharisee. I was rather embarrassed. But Judas knows how to deal with them and he really appeased the Pharisee. On the first day he was standoffish, but later… Is that right, Judas?»

Judas nods without speaking.

«Very well. And you will do better and better. We shall be all together next week. In the meantime… Simon, go and prepare the boats. You, too, James.»

«For everybody, Master? They will not hold us.»

«Can you not get another one?»

«Yes, if I ask my brother-in-law. I will go.»

«Go. And come back as soon as you are ready. And do not tell them too much.»

The four fishermen leave. The others go downstairs to get their sacks and mantles.

271.4

Manaen stays with Jesus. The boy continues to sleep.

«Master, are You going far?»

«I do not know yet… They are tired and depressed. I am, too. I am thinking of going to Tarichea, into the country, to be alone in peace…»

«I have my horse, Master. But, if You will allow me, I will come following the lake. Will You be there for long?»

«Perhaps the whole week, but not longer.»

«In that case, I will come. Master, bless me in this first departure. And relieve my heart of a burden.»

«Which, Manaen?»

«I feel remorse for leaving John. Perhaps if I had been there…»

«No. It was his hour. And he was certainly pleased to see you come to Me. Do not let that upset you. Instead, endeavour to get rid quickly and properly of the only burden you have: the gusto of being man. Become spiritual, Manaen. You can. You are capable of being so. Goodbye, Manaen. My peace be with you. We shall soon meet in Judaea.»

Manaen kneels down and Jesus blesses him. He then raises him and kisses him.

The others come back in and exchange greetings, both the apostles and John’s disciples. The fishermen are the last to come. «We are ready, Master. We can go.»

«Good. Say goodbye to Manaen Who is staying here until tomorrow evening. Assemble the foodstuffs, take some water and let us go. Make as little noise as possible.»

Peter stoops to awake Marjiam.

«No, leave him. He might cry. I will pick him up» says Jesus and He gently lifts the boy who whimpers a little, but instinctively makes himself comfortable in Jesus’ arms.

271.5

They put the lamps out. They go out closing the door. They go downstairs and on the threshold they say goodbye once again to Manaen, and then, in single file, along the moonlit street they go to the lake: a huge silvery mirror under the moon at its zenith. The three little lamps on the prows, which are already in the water, look like three red drops on the quiet mirror. They go on board, settling themselves in the boats, the fishermen being the last to embark. Peter and a servant are in the boat where Jesus is, John and Andrew in the second, James and a servant in the third one.

«Where are we going, Master?» asks Peter.

«To Tarichea. Where we landed[1] after the miracle of the Gadarenes. It will not be boggy now. And it will be quiet.»

Peter sets sail and the other two boats sail in his wake. Nobody speaks. Only when they are in the open lake and Capernaum disappears in the moonlight and things present a uniform appearance in its silvery dust, Peter says, as if he were speaking to the tiller: «And I am glad. They will be looking for us, my dear, and thanks to you they will not find us.»

«To whom are you speaking, Simon?» asks Bartholomew.

«To my boat. Don’t you know that she is like a bride for a fisherman? How much I have talked to her! More than to Porphirea. Master!… Is the boy well covered? It’s damp on the lake at night…»

«Yes, he is. Listen. Simon. Come here. I want to speak to you.»

Peter entrusts the tiller to the ship-boy and comes to Jesus.

«I said Tarichea. But it will be quite all right to be there after the Sabbath to say goodbye once again to Manaen. Could you not find a place nearby where we may stay in peace?»

«Oh! Master! In peace for us or also for the boats? For the boats we must go to Tarichea or to some harbour on the other shore. But if You are referring to us, it is enough to go into the woods beyond the Jordan, where only wild animals will find You… and perhaps an odd fisherman who is watching nets. We can leave the boats at Tarichea. We shall be there at dawn and we will go away quickly beyond the ford. It is easy to wade it at this time of the year.»

«Very well. We will do that…»

«The world is disgusting You as well, eh? You prefer fish and mosquitoes, eh? You are right.»

«It does not disgust Me. One must not be disgusted. But I do not want you to stir up a scandal and I wish to find comfort in you on the Sabbath.»

«My Master!…» Peter kisses Jesus’ forehead and goes away wiping a large tear that insisted in dropping out and streaming down to his beard. He goes back to his rudder heading south resolutely, while the moonlight fades as the planet sets behind a hill, concealing its huge face from the sight of men, but still making the sky white with its light and the lake silvery on the eastern coast. The rest is dark-indigo hardly distinguishable in the light of the prow lamp.


Notes

  1. Là où nous avons débarqué : en 187.1.

Notes

  1. we landed, in 187.1.