317.1
Jésus se trouve de nouveau au pied du massif sur lequel est construit Jiphtaël, mais pas sur la route principale (donnons-lui ce nom) ou muletière, suivie auparavant par le char. Il est sur un sentier de chèvres, très en pente, tout en brèches, en fissures profondes qui s’appuie à la montagne, je dirais taillé dans sa paroi verticale comme si elle était griffée par un énorme coup d’ongle, bordé par un gouffre qui descend à pic vers de nouvelles profondeurs, au fond desquelles bouillonne un torrent rageur.
Là, faire un faux pas signifie une chute sans espoir, en rebondissant de buisson en buisson de ronces ou autres plantes sauvages, qui ont poussé je ne sais comment dans les fissures du rocher et qui ne se dressent pas verticalement comme le font d’ordinaire les plantes mais obliquement ou même suivant une direction horizontale que leur impose leur situation. Un faux pas, cela veut dire se faire lacérer par tous les peignes épineux de ces plantes, ou avoir les reins brisés par le choc des troncs rigides qui se penchent sur l’abîme. Un faux pas, cela veut dire être déchiré par les pierres acérées qui dépassent des parois du précipice. Un faux pas, cela veut dire arriver tout en sang et rompu dans les eaux écumantes du torrent rageur et se noyer, submergé sur un lit de roches pointues et giflées par la violence du courant.
Et pourtant Jésus parcourt ce sentier, cette griffure dans le roc rendue encore plus dangereuse par l’humidité qui monte en fumant du torrent, qui suinte de la paroi supérieure, qui goutte des arbres qui ont poussé sur cette paroi à pic, je dirais légèrement concave.
Je m’efforce d’illustrer ce lieu[1] infernal.
Il marche lentement, avec précaution, calculant ses pas sur les pierre pointues, certaines branlantes ; il est parfois obligé de s’écraser contre la paroi, tant le sentier se rétrécit et, pour franchir des passages extrêmement dangereux, il doit s’agripper aux branches qui pendent de la paroi. Il contourne ainsi le côté ouest et arrive au côté sud sur lequel la montagne, après être descendue à pic du sommet, devient concave plus qu’ailleurs, en donnant plus de largeur au sentier, mais en revanche en lui enlevant de la hauteur, à tel point qu’en certains endroits Jésus doit marcher en se baissant pour ne pas se frapper la tête contre les roches.