The Writings of Maria Valtorta

379. Une prémonition de l’apôtre Jean.

379. A premonition of the apostle John.

379.1

« Où allons-nous, alors que le soir descend ? » se demandent les apôtres.

Ils discutent de ce qui est arrivé, mais sans parler à voix haute pour ne pas accabler le Maître qui, visiblement, est très songeur.

La nuit tombe pendant qu’ils marchent toujours derrière le Maître, pensif. Mais un village apparaît au pied d’une chaîne de monts très découpés.

« Arrêtons-nous ici pour passer la nuit » ordonne Jésus. « Ou plutôt, arrêtez-vous ici. Moi, je vais prier sur ces monts…

– Seul ? Ah non ! tu ne va pas seul sur l’Adomin ! Avec tous ces voleurs à l’affût, non, tu n’y vas pas ! dit Pierre d’un ton résolu.

– Et que veux-tu qu’ils me fassent ? Je n’ai rien !

– Tu as… Toi-même. Je parle des vrais voleurs, ceux qui te haïssent. Et, pour eux, ta vie suffit. Tu ne dois pas être tué comme… comme… comme ça, voilà, dans une vile embuscade, pour donner à tes ennemis la possibilité d’inventer je ne sais quoi pour éloigner les foules, même de ta doctrine, réplique Pierre.

– Simon-Pierre a raison, Maître » renchérit Jude. « Ils seraient bien capables de faire disparaître ton corps et de dire que tu t’es enfui, te sachant démasqué. Ou, mieux encore, de… l’emmener dans un endroit malfamé, chez une courtisane, pour pouvoir dire : “ Vous voyez où et comment il est mort ? Dans une rixe pour une prostituée. ” Tu as bien dit : “ Persécuter une doctrine signifie en accroître la puissance ” et j’ai remarqué, parce que je ne l’ai jamais perdu de vue, que le fils de Gamaliel, à ces mots, t’approuvait de la tête. Mais on dit avec raison que couvrir de ridicule un saint et sa doctrine est l’arme la plus sûre pour la faire tomber et retirer toute estime des foules envers le saint.

– Oui, et cela ne doit pas arriver pour toi, achève Barthélemy.

– Ne te prête pas au jeu de tes ennemis » ajoute Simon le Zélote. « Pense que ce ne serait pas seulement toi, mais la Volonté qui t’a envoyé, qui serait anéantie par cette imprudence, et on verrait ainsi que les fils des Ténèbres ont été, au moins momentanément, victorieux de la Lumière.

– Mais oui ! Tu ne cesses de dire que tu dois être tué, ce qui nous transperce le cœur. Je me rappelle ton reproche à Simon-Pierre, et je ne te dis pas : “ Que cela n’arrive jamais. ” Mais je ne crois pas être Satan si je dis : “ Au moins, que cela arrive de telle manière que tu en sois glorifié, que ce soit un sceau sans équivoque pour ton Etre saint et une condamnation certaine pour tes ennemis. Que les foules le sachent, qu’elles puissent avoir des indices qui leur permettent de se rendre compte et de croire. ” Au moins cela, Maître ! La mission[1] des Maccabées n’est jamais apparue aussi sainte que lorsque Judas, fils de Mattathias, mourut en héros et en sauveur sur le champs de bataille. Tu veux aller sur l’Adomin ? Nous venons avec toi. Nous sommes tes apôtres ! Là où tu vas, toi le Chef, nous devons aller, nous tes ministres, dit Thomas, que peu de fois j’ai entendu parler avec une éloquence aussi solennelle.

– C’est vrai ! C’est vrai ! Et s’ils t’agressent, ils doivent s’en prendre à nous en premier ! approuvent plusieurs.

– Ah ! ils ne vont pas s’en prendre à nous si facilement ! Ils sont en train de soigner la brûlure des paroles de Claudia et… ils sont tellement rusés, trop rusés ! Ils ne manqueront pas de considérer que Pilate saurait qui frapper pour ta mort. Ils se sont trop trahis, et cela aux yeux de Claudia. Ils vont donc réfléchir pour étudier des pièges plus sûrs qu’une vulgaire agression. Peut-être notre peur est-elle stupide. Nous ne sommes plus de pauvres inconnus comme auparavant. Maintenant, il y a Claudia ! dit Judas.

– C’est bien, c’est bien… Mais ne prenons pas ce risque.

379.2

Que veux-tu faire ensuite sur l’Adomin ? demande Jacques, fils de Zébédée.

– Prier et chercher un endroit où nous pourrons prier tous, dans les jours à venir, pour nous préparer à de nouvelles luttes, de plus en plus acharnées.

– Des ennemis ?

– Et aussi de notre moi. Il a grand besoin d’être fortifié.

– Mais n’as-tu pas dit que tu voulais aller à la frontière de la Judée et au-delà du Jourdain ?

– Oui, et je m’y rendrai, mais après la prière. J’irai à Acor, puis à Jéricho, en passant par Doco.

– Non, non Seigneur ! Ce sont des endroits funestes pour les saints d’Israël. N’y va pas, n’y va pas ! C’est moi qui le dis, je le sens. Il y a quelque chose qui me le souffle : n’y vas pas. Au nom de Dieu, n’y vas pas ! » crie Jean, qui semble près de perdre connaissance, comme s’il était pris par un sentiment de peur extatique….

Tous l’observent d’un air stupéfait, car ils ne l’ont jamais vu ainsi. Mais personne ne se moque de lui. Ils ont l’impression d’être devant un fait surnaturel et ils gardent respectueusement le silence.

Jésus se tait lui aussi jusqu’à ce qu’il voie Jean reprendre son aspect habituel et dire :

« Ah ! mon Seigneur, comme j’ai souffert !

– Je sais. Nous irons à Carit. Que dit ton esprit ? »

Je suis profondément frappée par le respect avec lequel Jésus s’adresse à son apôtre inspiré.

« C’est à moi que tu poses cette question, Seigneur ? Au pauvre enfant simplot que je suis, toi qui es la Sagesse ?

– A toi, oui. Le plus petit est le plus grand quand, avec humilité, il entre en communication avec son Seigneur pour le bien de ses frères. Parle donc…

– Oui, Seigneur. Allons à Carit. Il s’y trouve des gorges sûres pour se recueillir en Dieu, proches des routes qui mènent à Jéricho et en Samarie. Nous descendrons pour rassembler ceux qui t’aiment et qui espèrent en toi, et nous te les amènerons, ou bien nous te conduirons à eux, puis nous nous nourrirons encore de prière… Et le Seigneur descendra parler à notre âme… pour ouvrir nos oreilles, qui entendent le Verbe, mais ne le comprennent pas pleinement… pour envahir surtout notre cœur par ses feux. Car c’est seulement si nous brûlons que nous saurons résister aux martyres de la terre. En effet, c’est seulement si nous avons d’abord éprouvé le doux martyre de l’amour plénier que nous pourrons être prêts à subir celui de la haine humaine… Seigneur… qu’ai-je dit ?

– Mes propres paroles, Jean. N’aie pas peur. Arrêtons-nous donc ici et, demain, à l’aube, nous partirons sur les monts[2]. »

379.1

«It is getting dark, where are we going?» the apostles ask one another. They are talking in low voices of what happened. They are not saying anything loud, as they do not want to depress the Master, Who is clearly very pensive.

Night falls while they proceed, following the Master Who is still very serious. A village appears at the foot of a chain of very rough mountains.

«Let us stop here for the night» orders Jesus. «Or rather, you stop here. I will go up those mountains to pray…»

«By Yourself? Ah! no! You are not going by Yourself up Mount Adomin! With all those thieves who are lying in wait for You, no, You are not going!…» says Peter quite firmly.

«What can they do to Me? I have nothing!»

«You have… Yourself. I am talking of the real thieves, of those who hate You. And Your life is quite enough for them. You are not going to be killed like… like… thus, I mean, in a cowardly ambush. You would give Your enemies the opportunity to invent goodness knows what story to divert the crowds also from Your doctrine» insists Peter.

«Simon of Jonah is right, Master. They would be quite capable of getting rid of Your body and then saying that You have fled because You had realized that You had been unmasked. Or… they could even take You to places of evil fame, to the house of a prostitute and then say: “See where and how He died? In a quarrel over a prostitute”. You quite rightly said: “To persecute a doctrine is to increase its power” and I noticed that Gamaliel’s son, whose sight I never lost, was nodding assent while You were saying so. But it is also right to say that to hold a saint and his doctrine up to ridicule is the safest weapon to confute his doctrine and make him lose the esteem of the crowds» says Judas Thaddeus.

«Of course. And that must not happen to You» concludes Bartholomew.

«Don’t lend Yourself to the tricks of Your enemies. Consider that not only You would be damaged, but also the Will of Him Who sent You would be made void by such imprudence, and one would see that the children of Darkness have defeated, at least temporarily, the children of Light» adds the Zealot.

«That’s right! You always say, and You pierce our hearts, that You will be killed. I remember when You reproached Simon Peter and I will not say to You: “Let that never happen”. But I do not think that I am Satan if I say: “At least let that be to Your glorification, as unequivocal seal of Your Holiness, and definite conviction of Your enemies. So that the crowds may know and have valid reasons to distinguish and believe”. At least that, Master. The holy mission[1] of the Maccabees never appeared so holy as when Judas, the son of Mattathias, died as a hero and saviour in the battlefield. Do You want to go up Mount Adomin? We will come with You. We are Your disciples! Where You go as our Head, we will come as Your ministers» says Thomas, and I have seldom heard him speak with such solemn eloquence.

«That is very true! And if they attack You, they will have to attack us first» several of them say.

«Oh! They will not attack us so easily! They are curing the smart of Claudia’s words and… they are very… too cunning! They must certainly consider that Pontius would know whom to punish for Your death. They have betrayed themselves in the eyes of Claudia and they will ponder over that and think of traps more reliable than vulgar aggression. Perhaps it is foolish of us to be afraid. We are no longer the poor unknown people of the past. There is Claudia now!» says the Iscariot.

«Very well… But don’t let us run any risk.

379.2

What do You want to do on Mount Adomin?» asks James of Zebedee.

«I want to pray and find a place where you can all pray in the next days, to be ready for fresh fiercer and fiercer struggles.»

«Against our enemies?»

«Also against our egos. I am in great need of being fortified.»

«But did You not say that You wanted to go to the borders of Judaea and beyond the Jordan?»

«Yes, and I will. But after praying. I will go to Achor and then to Jericho via Doco.»

«No, Lord! They are inauspicious places for the saints of Israel. Don’t go there. I tell You, I can feel it! There is something within me that tells me. Don’t go! In the name of God, don’t go!» shouts John, who seems to be on the point of losing consciousness, as if he were seized by ecstatic fear…

They all look at him in amazement, as they have never seen him thus before. But no one sneers at him. They all feel that they are in the presence of a supernatural fact and they respectfully remain silent.

Jesus also is silent until He sees John regain his normal composure and hears him say: «O my Lord! How much I suffered!»

«I know. We shall go to Mount Cherith. What does your spirit say?» I am deeply impressed by the respect with which Jesus addresses His inspired apostle…

«You are asking me, Lord? You, the Most Holy Wisdom, are asking a poor foolish boy!»

«Yes, I am asking you. The least is the greatest when he humbly communicates with his Lord for the welfare of his brothers. Tell Me.»

«Yes, Lord. Let us go to Mount Cherith. There are gorges there where we can safely collect our thoughts in meditation, and the roads to Jericho and Samaria are not far. We will descend the mountain to gather those who love You and hope in You and we will bring them to You, or take You to them, and we will also nourish our souls with prayer… And the Lord will descend and speak to our spirits… and will open our ears, which hear the Word but do not fully understand Him… and above all will inflame our hearts with His fire. Because only if we are aflame, shall we be able to bear the torments of the Earth. Because only if we first suffer the sweet martyrdom of total love, shall we be ready to suffer the torture of human hatred… Lord… what have I said?»

«My words, John. Be not afraid. Let us stop here then, and tomorrow at dawn we will go up the mountains.»


Notes

  1. mission relatée en 1 M 9, 1-22.
  2. sur les monts. Nous reproduisons ici le dessin que Maria Valtorta a tracé entre la date et les premiers mots du chapitre qui suit. Sur la droite, la Mer Morte.

Notes

  1. mission, narrated in: 1 Maccabees 9,1-22.