The Writings of Maria Valtorta

439. Marie relate sa mission à Tibériade.

439. Holy Mary speaks about her mission in Tiberias.

439.1

A son retour chez elle, la Vierge est épuisée, mais très heureuse. Elle se met aussitôt à la recherche de son Jésus qui, à l’ultime lueur du jour qui meurt, travaille encore à la porte du four qu’il est en train de remettre en place. C’est Simon qui lui a ouvert et, après l’avoir saluée, il se retire prudemment dans l’atelier. Je ne vois pas Thomas. Peut-être est-il sorti.

Jésus pose ses outils dès qu’il voit sa Mère et s’approche d’elle tout en essuyant ses mains graisseuses (il était en train de huiler des gonds et des verrous) à son tablier de travail. Leur sourire réciproque semble éclairer le jardin où descend la lune.

« Paix à-toi, Maman.

– Paix à toi, mon Fils.

– Comme tu es fatiguée ! Tu ne t’es pas reposée…

– Je suis restée de l’aube au crépuscule chez Joseph… Mais sans ces grandes chaleurs, je serais repartie aussitôt pour t’annoncer qu’Auréa est à toi.

– Oui ! »

Jésus semble même rajeunir sous l’effet de la surprise et du bonheur. On dirait un visage d’à peine plus de vingt ans et, dans sa joie, perdant la gravité dont son expression et ses actes sont généralement empreints, il en vient à ressembler encore plus à sa Mère, qui est toujours si sereinement juvénile par ses gestes et son allure.

« Oui, Jésus. Et je l’ai obtenue sans aucune difficulté. La dame a immédiatement accepté. Elle s’est émue, en reconnaissant qu’elle-même et ses amies sont trop corrompues pour éduquer une enfant pour Dieu : c’était un aveu si humble, si sincère, si vrai ! On ne trouve pas facilement des gens qui reconnaissent leurs défauts sans y être forcés.

– Oui, ce n’est pas facile. Beaucoup en Israël ne savent pas le faire. Ce sont de belles âmes ensevelies sous une croûte d’ordure. Mais quand l’ordure tombera…

– Cela arrivera-t-il, mon Fils ?

– J’en suis sûr. Elles tendent instinctivement au Bien. Elles finiront par y adhérer. Que t’a-t-elle dit ?

– Juste quelques mots… Nous nous sommes très vite entendues,

439.2

mais il serait bon d’avoir tout de suite Auréa parmi nous. Je veux le lui dire personnellement, si tu acceptes, mon Fils.

– Oui, Maman, nous allons envoyer Simon. »

Et il appelle d’une voix forte Simon le Zélote, qui arrive aussitôt.

« Simon, va chez Simon, fils d’Alphée, et dis que ma Mère est de retour, puis reviens avec la fillette et Thomas, qui est certainement là pour finir le petit travail que Salomé lui a demandé. »

Simon s’incline et part sur-le-champ.

« Raconte-moi, Maman… Ton voyage… ton entretien… Pauvre Maman, comme tu es fatiguée à cause de moi !

– Oh ! non, Jésus ! Il n’y a pas de fatigue quand tu es heureux… »

Marie raconte son voyage et les frayeurs de Marie, femme d’Alphée, le séjour dans la maison du batelier, l’entrevue avec Valéria, puis elle achève :

« J’ai préféré la voir à cette heure puisque le Ciel le permettait. Elle était plus libre, moi aussi, et Marie, femme de Cléophas, était plus vite rassurée : imaginer deux femmes traversant Tibériade la terrorisait, et seul son amour pour toi, la pensée de te servir, pouvait l’aider… »

Marie sourit en rappelant les angoisses de sa belle-sœur…

Jésus sourit à son tour :

« La malheureuse ! C’est la vraie femme d’Israël, l’antique femme, réservée, toute à son foyer, la femme[1] forte selon les Proverbes. Mais, dans la nouvelle religion, la femme ne sera pas forte à la maison seulement… Beaucoup surpasseront Judith et Jahel, car elles seront héroïques en elles-mêmes, avec l’héroïsme de la mère des Maccabées… Et notre Marie sera du nombre. Mais pour le moment… elle est encore ainsi…

439.3

As-tu vu Jeanne ? »

Marie ne sourit plus. Peut-être redoute-elle une question à propos de Judas. Elle s’empresse de répondre :

« Je n’ai pas voulu imposer de nouvelles angoisses à Marie. Nous nous sommes enfermées dans la maison jusqu’au milieu de l’après-midi pour nous reposer, après quoi nous sommes parties… J’ai pensé que nous la verrons bientôt, sur le lac…

– Tu as bien fait. Tu m’as donné la preuve des sentiments des Romaines envers moi. Si Jeanne était intervenue, on aurait pu penser qu’elle cédait à son amie. Maintenant, nous allons attendre jusqu’au sabbat, et si Myrta ne vient pas, nous irons nous-mêmes chez elle avec Auréa.

– Mon Fils, je voudrais rester…

– Tu es très fatiguée, je le vois.

– Non, ce n’est pas pour cette raison… Je pense que Judas pourrait venir ici… De même qu’il est bon qu’à Capharnaüm il y ait toujours quelqu’un pour l’attendre et l’accueillir en ami, il est bon qu’il y ait ici aussi quelqu’un pour l’accueillir avec amour.

– Merci, Maman. Toi seule comprends ce qui peut encore le sauver… »

Ils soupirent tous deux sur ce disciple qui les afflige…

439.4

Simon et Thomas reviennent avec Auréa, qui court vers Marie. Jésus la laisse avec sa Mère pour aller à la maison avec les apôtres.

« Tu as beaucoup prié, ma fille, et le bon Dieu t’a entendue… » commence Marie.

Mais la fillette l’interrompt par un cri de joie :

« Je reste avec toi ! »

Et elle lui jette les bras autour du cou en lui donnant un baiser.

Marie lui rend son baiser et, la tenant toujours entre ses bras, elle lui dit :

« Quand quelqu’un nous fait une grande faveur, il faut le lui rendre, n’est-ce pas ?

– Oh oui ! Et je te le rendrai avec plein d’amour.

– Oui, ma fille. Mais, au-dessus de moi, il y a Dieu. C’est lui qui t’a fait cette grande faveur, cette grâce sans mesure de t’accueillir parmi les membres de son peuple, de te rendre disciple du Maître Sauveur. Moi, je n’ai été que l’instrument de la grâce, mais la grâce, c’est lui, le Très-Haut, qui te l’a accordée. Que donneras-tu donc au Très-Haut pour lui montrer que tu le remercies ?

– Mais… je ne sais pas… Dis-le-moi, toi, Mère…

– De l’amour, c’est certain. Mais l’amour, pour être vraiment tel, doit être uni au sacrifice, car si une chose coûte, elle a plus de valeur, n’est-ce pas ?

– Oui, Mère.

– Voilà, alors je dirais que, avec la même joie qui t’a fait crier : “ Je reste avec toi ! ”, tu devrais crier : “ Oui, Seigneur ” quand moi, sa pauvre servante, je te communiquerai la volonté du Seigneur sur toi.

– Explique-la-moi, Mère, dit Auréa, tandis que son visage prend un air sérieux.

– La volonté de Dieu te confie à deux bonnes mères : Noémie et Myrta… »

Deux grosses larmes brillent dans les yeux clairs de la fillette, puis coulent sur son petit visage rose.

« Elles sont bonnes, elles sont chères à Jésus et à moi. Jésus a sauvé[2] le fils de l’une, et j’ai allaité celui de l’autre. Et tu as vu qu’elles sont bonnes…

– Oui… mais moi, j’espérais rester avec toi…

– Ma fille, on ne peut pas tout avoir !

439.5

Tu vois que moi aussi, je ne reste pas avec mon Jésus. Je vous le donne et je reste loin, si loin de lui, pendant qu’il parcourt la Palestine pour prêcher, guérir et sauver les fillettes…

– C’est vrai…

– Si je l’avais voulu pour moi seule, tu n’aurais pas été sauvée… Si je l’avais voulu pour moi seule, votre âme ne serait pas sauvée. Vois combien mon sacrifice est grand. Je vous donne un Fils pour qu’il soit immolé pour votre âme. Du reste, toi et moi, nous serons toujours unies, car les disciples restent et resteront toujours unis autour du Christ, en formant une grande famille soudée par l’amour pour lui.

– C’est vrai. Et puis… je reviendrai ici, n’est-ce pas ? Et nous nous verrons encore?

– Certainement, tant que Dieu le voudra.

– Et tu prieras toujours pour moi…

– Je prierai toujours pour toi.

– Et quand nous serons ensemble, tu m’instruiras encore ?

– Oui, ma fille…

– Ah ! je voulais devenir comme toi ! Est-ce que je le pourrai jamais ? Savoir, pour être bonne…

– Noémie est la mère d’un chef de synagogue qui est disciple du Seigneur, Myrta celle d’un bon fils qui a mérité la grâce du miracle et qui est un bon disciple. Et les deux femmes ne sont pas seulement pleines d’amour, mais aussi bonnes et sages.

– Tu me l’assures ?

– Oui, ma fille.

– Alors… bénis-moi, et que la volonté du Seigneur soit faite… comme dit la prière de Jésus. Je l’ai récitée tant de fois… Il est juste que, maintenant, je fasse ce que j’ai dit pour obtenir de ne plus aller chez les Romains…

– Tu es une bonne enfant et Dieu t’aidera de plus en plus. Viens, allons dire à Jésus que sa plus jeune disciple sait faire la volonté de Dieu… »

Et, la tenant par la main, Marie rentre avec Auréa dans la maison.

439.1

The Virgin is very tired when She sets foot again in Her little house. But She is very happy. And She looks at once for Her Jesus, Who is still working, in the last light of the dying day, at the stone oven door, which He is repairing. Simon opens the door to Her, and after greeting Her, he wisely withdraws into the workshop. I do not see Thomas. Perhaps he is out.

Jesus lays down His tools as soon as He sees His Mother, and goes towards Her cleaning His greasy hands (He is oiling hinges and latches to make them run smoothly) on His apron. Their reciprocal smiles seem to brighten up the kitchen garden where it is growing dark.

«Peace to You, Mother.»

«Peace to You, Son.»

«How tired You are! You have not rested…»

«I did, from dawn to sunset in Joseph’s house… But if it had not been so warm, I would have left at once to come and tell You that Aurea is Yours.»

«Yes?!» The joyful surprise makes Jesus’ face look even younger. It seems the face of a man about twenty years old, and as joy rids Him of the gravity which is generally on his face and in his gestures, He resembles even more his Mother, Who is always such a serene girl in her deportment and looks.

«Yes, Jesus. And I achieved that without any effort. The lady agreed at once. She was moved admitting that she and her friends are too corrupt to educate a creature for God. Such a humble, sincere, true avowal! It is not easy to find people who admit they are faulty without being forced to do so.»

«No, it is not. Many in Israel are not capable. They are beautiful souls buried under a crust of filth. But when the filth falls off…»

«Will that happen, Son?»

«I am sure it will. They tend instinctively to Good. They will end up by adhering to it. What did she say?»

«Oh! Only a few words… We understood each other at once.

439.2

But we had better have Aurea here at once. I want to tell her this, but only if You wish so, Son.»

«Yes, Mother. We will send Simon» and in a loud voice He calls Simon who comes immediately.

«Simon, go to Simon of Alphaeus’ house and tell him that My Mother is back, then come here with the girl and Thomas, who must be there finishing the little job which Salome asked him to do.»

Simon bows and goes away at once.

«Tell Me, Mother… Your journey… your conversation… Poor Mother, how tired You are because of Me!»

«Oh! no, Jesus! It is no trouble when You are happy…» and Mary tells Him about Her journey and Mary of Alphaeus’ fears, their rest in the house of the boatman, the meeting with Valeria, and She concludes: «I preferred to see her at that time, since Heaven allowed it. She was freer, I was freer, and Mary of Clopas was comforted sooner, because she was terrified at the idea of two women being all alone in Tiberias and only her love for You and the thought of serving You overcame her terror…» and Mary smiles remembering Her sister-in-law’s anxiety…

And Jesus smiles saying: «Poor woman! She is the true woman of Israel, the ancient woman, reserved, wholly devoted to her family, the strong woman[1] according to Proverbs. But in the new Religion women will not be strong only at home… Many will exceed Judith and Jael, being gifted with the same heroism as the mother of the Maccabees… And our Mary will be such. But for the time being… she is what she is…

439.3

Did You see Johanna?»

Mary smiles no longer. She is perhaps afraid of a question about Judas. And She replies quickly: «I did not want to cause more worries to Mary. We remained in the house until half the time between the ninth hour and evening, resting, and then we left… I thought that we shall soon be seeing her on the lake…»

«You did the right thing. You have given Me proof of the feeling of the Roman ladies with regards to Me. If Johanna had intervened, we could have thought that they were yielding to their friend. We will now wait until the Sabbath and if Myrtha does not come we will go to her with Aurea.»

«Son, I would like to stay here…»

«I can see that You are very tired.»

«No, not because of that… I think that Judas may come here… As it is right that someone should always be in Capernaum to wait for him and give him a friendly welcome, it is equally right that someone should be here to receive him with love.»

«Thank You, Mother. You are the only one who understands what can still save him…»

They both sigh thinking of the disciple who causes grief…

439.4

Simon and Thomas come back with Aurea who runs towards Mary. Jesus leaves her with His Mother and goes into the house with His apostles.

«You have prayed very much, My daughter, and the good God has listened to you…» begins Mary.

But the girl interrupts Her with a cry of joy: «I am staying with You!» and she throws her arms around the Virgin’s neck, kissing Her.

Mary returns the kiss and holding Aurea in Her arms all the time She says: «When one does a great favour, it is necessary to reciprocate it, is that right?»

«Oh! Yes! And I will repay You with so much love.»

«Yes, My dear. But above Me there is God. It is He Who did you this great favour, this immeasurable grace of receiving you among the members of His people and making you a disciple of the Master Saviour. I have been but the instrument of the grace, but He, the Most High, granted the grace. What will you, therefore, give the Most High to tell Him that you thank Him?»

«Well… I don’t know… Tell me, Mother…»

«Love, that is certain. But love, to be really such, is to be united to sacrifice, because a thing has more value if it costs, has it not?»

«Yes, Mother.»

«Then, I would say that, with the same joy with which you shouted: “I am staying with You!”, you should shout: “Yes, o Lord” when I, His poor servant, tell you the will of the Lord concerning you.»

«Tell me, Mother» says Aurea whose countenance becomes serious.

«The will of God entrusts you to two good mothers, Naomi and Myrtha…»

Two big tears shine in the clear eyes of the girl, and stream down her rosy cheeks.

«They are good women. They are dear to Jesus and to Me. Jesus saved[2] the son of one of them, I suckled[3] the baby of the other one. And you have seen that they are good…»

«Yes… but I was hoping to stay with You…»

«My daughter, it is not possible to have everything!

439.5

You see that I am not always with My Jesus. I have given Him to you all, and I am far, so far from Him, when He goes about Palestine preaching, curing and saving girls…»

«That is true…»

«If I had wanted Him all for Myself, you would not have been saved… If I had wanted Him all for Myself, your souls would not be saved. Consider how great is My sacrifice. I am giving you a Son to be sacrificed for your souls. In any case, you and I will always be united, because women disciples are and will always be united around Christ, forming a large family united by our love for Him.»

«That is true. And then… I will come here again, will I not? And we will meet again?»

«Certainly. As long as God wants…»

«And You will always pray for me…»

«And I will always pray for you.»

«And when we are together, will You still teach me?»

«Yes, My dear…»

«Ah! I wanted to become like You. Will I ever be able? To know, in order to be good…»

«Naomi is the mother of a head of a synagogue and a disciple of the Lord. Myrtha is the mother of a son who deserved the grace of a miracle and is a good disciple. And the two women are good and wise, besides being so full of love.»

«Can You assure me?»

«Yes, My daughter.»

«Then… bless me and may the will of the Lord be done… as Jesus’ prayer says. I have said it so many times… It is only right that now I should do what I said to obtain the grace of not going any more among the Romans…»

«You are a good girl. And God will always help you. Come, let us go and tell Jesus that the youngest woman disciple knows how to do the will of God…» and holding her by the hand Mary goes back into the house with the girl.


Notes

  1. la femme louée par Pr 31, 10-31 est “ forte ” dans la traduction littérale de la Vulgate, “ parfaite ” dans celle de la Néo-Vulgate.
  2. Jésus a sauvé, en 248.5/11 ; j’ai allaité, comme cela est rapporté en 365.8.

Notes

  1. the woman, praised in Proverbs 31,10-31, is “strong” in the literal translation of the vulgate, “perfect” in that of the neo-vulgate.
  2. saved, in 248.5/11.
  3. I suckled, as revealed in 365.8.