The Writings of Maria Valtorta

518. A Jérusalem, rencontre de l’aveugle guéri.

518. In Jerusalem. The meeting with the healed blind man.

518.1

Jésus entre en ville par la Porte d’Hérode, et prend la direction du Tyropéon et du faubourg d’Ophel.

« Nous allons au Temple ? demande Judas.

– Oui.

– Attention à ce que tu fais ! disent plusieurs pour l’avertir.

– Je ne m’y arrêterai que le temps de la prière.

– Ils vont te retenir.

– Non. Nous allons entrer par les portes du Septentrion et nous sortirons par les portes du Midi : ainsi ils n’auront pas le temps de s’organiser pour me nuire. A moins qu’il n’y ait toujours derrière moi quelqu’un qui me surveille et me dénonce… »

Personne ne réplique, et Jésus se dirige vers le Temple. En haut de sa colline, celui-ci ressemble à une sorte de spectre dans la lumière vert jaunâtre d’un sombre matin d’hiver, où le soleil qui se lève, en cherchant à se frayer un passage dans le lourd amas de nuages, n’est guère qu’un souvenir qui s’obstine à rester présent. Vain effort ! La splendeur joyeuse de l’aurore se réduit à un pâle reflet d’un jaune irréel qui ne se diffuse pas, mais est taché de teintes de plomb veiné de vert. Sous cette lumière, les marbres et les ors du Temple paraissent pâles, tristes, presque lugubres, comme des ruines qui émergent d’une zone de mort.

Jésus le regarde intensément tout en montant vers l’enceinte. Il observe également les visages des voyageurs matinaux. La plupart sont d’humbles gens : jardiniers, bergers avec des animaux de boucherie, serviteurs ou ménagères qui se rendent au marché. Tous ces gens marchent silencieusement, enveloppés dans leurs manteaux, un peu penchés pour se défendre de l’air piquant du matin. Même les visages semblent plus pâles que ne le sont d’ordinaire ceux des gens de cette race. C’est la lumière étrange qui les rend ainsi verdâtres ou presque couleur de perle dans l’encadrement des étoffes colorées des manteaux, dont le vert, le violet vif, le jaune intense n’arrivent guère à apporter quelques reflets rosés sur les joues. Certains saluent le Maître, mais sans s’arrêter ; ce n’est pas la bonne heure. Des mendiants, il n’y en a pas encore pour lancer leurs cris lamentables aux carrefours ou sous les auvents qui couvrent les rues à chaque pas. L’heure et la saison offrent à Jésus la liberté de se déplacer sans obstacle.

Les voilà parvenus à l’enceinte : ils entrent et se dirigent vers la Cour des Juifs. Pendant qu’ils sont en prière, un son de trompettes — d’après leur timbre, je les crois en argent — annonce certainement quelque chose d’important en se diffusant dans les collines. Il se répand en même temps un suave parfum d’encens qui empêche de sentir les autres odeurs, moins agréables, exhalées sur le sommet du mont Moriah : je veux parler de la perpétuelle, je dirais même la naturelle odeur des chairs égorgées et consumées par le feu, une odeur mêlée de farine brûlée, d’huile enflammée qui stagne toujours là-haut, plus ou moins forte, mais toujours présente à cause des holocaustes continuels.

Ils s’éloignent dans une autre direction et commencent à être remarqués par les premiers qui accourent au Temple, par ceux qui lui appartiennent, par les changeurs et les marchands qui sont en train de monter leurs comptoirs ou leurs enclos. Mais ils sont trop peu nombreux, et leur surprise est telle qu’ils ne savent comment réagir. Ils échangent entre eux des paroles d’étonnement :

« Il est revenu !

– Il n’est pas allé en Galilée comme on le disait.

– Mais où était-il caché ? On ne le trouvait nulle part !

– Il veut vraiment les braver…

– Quel sot !

– Quel saint ! »

Et ainsi de suite selon l’état d’esprit de chacun.

518.2

Mais Jésus est déjà sorti du Temple, et il prend la rue qui descend vers l’Ophel, quand, au croisement des chemins qui mènent au mont Sion, il tombe sur l’aveugle-né, guéri depuis peu, qui, chargé de paniers pleins de pommes parfumées, marche allègrement en plaisantant avec d’autres jeunes également chargés, qui vont dans un sens opposé au sien.

Peut-être la rencontre passerait-elle inaperçue pour le jeune homme, puisqu’il ignore les visages de Jésus et des apôtres. Mais Jésus, lui, n’ignore pas le visage du miraculé, et il l’appelle. Sidonia, dit Bartolmaï, se retourne et observe d’un air interrogateur cet homme de grande taille, majestueux malgré la simplicité de son vêtement, qui le hèle par son nom en se dirigeant vers une ruelle.

« Viens ici » ordonne Jésus.

Le jeune homme s’approche, sans poser son fardeau. Il regarde du coin de l’œil Jésus et, croyant avoir à faire à un acheteur de pommes, il lui dit :

« Mon patron les a déjà vendues, mais il en a encore, si tu en veux. Elles sont belles et bonnes, arrivées hier des vergers de Saron. Et si tu en achètes une grande quantité, tu auras une forte remise, car… »

Jésus lève la main droite en souriant pour arrêter la faconde du jeune homme :

« Je ne t’ai pas appelé pour acheter des pommes, mais pour me réjouir avec toi et bénir avec toi le Très-Haut qui t’a fait une grâce.

– Oh ! Oui ! je ne cesse de le faire, à la fois pour la lumière que je vois et pour le travail que je puis faire, pour aider mes parents. J’ai fini par trouver un bon patron. Il n’est pas hébreu, mais il est bon. Les Hébreux ne voulaient pas de moi car… car ils savent que j’ai été chassé de la synagogue, explique le jeune homme en déposant ses paniers à terre.

– Ils t’ont chassé ? Pourquoi ? Qu’as-tu fait ?

– Moi, rien, je t’assure ! C’est le Seigneur qui a agi. Un jour de sabbat, il m’a fait rencontrer cet homme dont on dit qu’il est le Messie et lui m’a guéri, comme tu vois. Et c’est pour cela qu’ils m’ont chassé.

– Alors celui qui t’a guéri ne t’a pas vraiment rendu un bon service ! remarque Jésus pour le tester.

– Ne dis pas cela, homme ! C’est un blasphème de ta part ! Avant toute autre chose, il m’a montré que Dieu m’aime, puis il m’a donné la vue… Tu ne sais pas ce que c’est que “ voir ”, car tu as toujours vu. Mais pour quelqu’un qui n’avait jamais vu… Oh !… C’est… Ce sont toutes les merveilles que l’on peut voir. Je peux t’affirmer que, lorsque j’ai vu, là-bas près de Siloé, j’ai ri et fondu en larmes, mais de joie, hein ? J’ai pleuré comme je n’avais jamais pleuré dans mon malheur. Car j’ai alors compris combien le Très-Haut était grand et bon. Et puis, je peux gagner ma vie, avec un travail convenable. Mais… il y a une chose que j’espère plus que tout : que ce miracle me permette de rencontrer l’homme qui se dit Messie et son disciple qui m’a…

– Et que ferais-tu, alors ?

– Je voudrais les bénir, lui et son disciple. Et je voudrais demander au Maître, qui doit vraiment venir de Dieu, de me prendre pour son serviteur.

– Comment ? A cause de lui, tu es anathème, tu as du mal à trouver du travail, tu peux même être puni davantage, et tu veux le servir ? Ignores-tu donc que les disciples de celui qui t’a guéri sont tous persécutés ?

– Hé ! je le sais bien ! Mais c’est le Fils de Dieu, comme on le dit entre nous. Bien que ceux de là-haut (et il désigne le Temple) ne veulent pas qu’on l’appelle ainsi. Mais ne vaut-il pas la peine de tout quitter pour le servir, lui ?

518.3

– Tu crois donc au Fils de Dieu et à sa présence en Palestine ?

– J’y crois. Mais je voudrais le connaître, non seulement par l’intelligence, mais de tout mon être. Si tu sais qui il est et où il se trouve, dis-le-moi, pour que j’aille le trouver, que je le voie, que je croie complètement en lui et que je le serve.

– Tu l’as déjà vu, et il n’est pas nécessaire que tu le cherches. Celui que tu vois en ce moment et qui te parle, c’est le Fils de Dieu. »

Je ne pourrais l’affirmer avec certitude, mais il m’a semblé qu’en prononçant ces mots, Jésus a eu une sorte de très brève transfiguration : il est devenu très beau, et même resplendissant. Je dirais que, pour récompenser l’humble homme qui croit en lui et le confirmer dans sa foi, il a, pendant la durée d’un éclair, dévoilé sa future splendeur — je veux parler de celle qu’il assumera après la Résurrection et qu’il conservera au Ciel, sa beauté de créature humaine glorifiée, de corps glorifié et uni à l’inexprimable majesté de la Perfection qui lui appartient. Un instant, dis-je, un éclair. Mais le recoin à demi obscur où ils se sont retirés pour parler, sous l’arcade de la ruelle, s’illumine étrangement d’une clarté qui se dégage de Jésus qui, je le répète, devient très beau.

Puis tout redevient comme avant, mais le jeune homme est maintenant par terre, la figure dans la poussière, et il adore en disant :

« Je crois, Seigneur, mon Dieu !

– Lève-toi. Je suis venu dans le monde pour apporter la lumière et la connaissance de Dieu et pour éprouver les hommes et les juger. Mon temps est un temps de choix, d’élection, et de sélection. Je suis venu pour que ceux qui sont purs de cœur et d’intention, les humbles, les doux, ceux qui aiment la justice, la miséricorde, la paix, pour que ceux qui pleurent et ceux qui savent donner aux diverses richesses leur valeur réelle et préférer les spirituelles aux matérielles, trouvent ce à quoi leur âme aspire. Je suis aussi venu pour que ceux qui étaient aveugles — parce que les hommes ont élevé des murailles épaisses pour faire obstacle à la lumière, c’est-à-dire la connaissance de Dieu — voient clair, et pour que ceux qui se croient voyants deviennent aveugles…

518.4

– Dans ce cas, tu détestes une grande partie des hommes et tu n’es pas bon, comme tu prétends l’être. Si tu l’étais, tu chercherais à ce que tous voient clair et que ceux qui y voient déjà ne deviennent pas aveugles » interviennent des pharisiens, arrivés de la rue principale, qui se sont prudemment approchés avec d’autres, derrière le groupe apostolique.

Jésus se retourne et les regarde. Il n’a sûrement plus la transfiguration d’une douce beauté, maintenant. C’est un Jésus bien sévère qui fixe sur ses persécuteurs ses yeux de saphir et, lorsqu’il répond, sa voix n’a plus la note dorée de la joie, mais celle du bronze, et, comme le son du bronze, elle est incisive et sévère.

« Ce n’est pas moi qui désire que ceux qui aujourd’hui combattent la vérité ne la voient pas. Mais ce sont eux-mêmes qui se bouchent les yeux pour ne pas voir, et ils se rendent aveugles par leur libre volonté. Et le Père m’a envoyé pour que le tri se fasse et que l’on connaisse vraiment les fils de la Lumière et ceux des Ténèbres, ceux qui veulent voir et ceux qui veulent se rendre aveugles.

– Nous sommes peut-être nous aussi de ces aveugles ?

– Si vous l’étiez et cherchiez à voir, vous ne seriez pas fautifs. Mais c’est parce que vous dites : “ Nous y voyons ”, mais ne voulez pas voir, que vous péchez. Votre péché demeure parce que vous ne cherchez pas à voir tout en étant aveugles.

– Et que devons-nous voir ?

– La Voie, la Vérité, la Vie. Un aveugle-né, comme l’était cet homme, peut toujours avec son bâton trouver la porte de sa maison et y entrer parce qu’il la connaît. Mais si on l’emmenait ailleurs, il ne pourrait passer la porte de la nouvelle maison parce qu’il ne saurait pas où elle se trouve, et il se heurterait contre les murs.

518.5

Le temps de la Loi nouvelle est venu. Tout se renouvelle et un monde nouveau, un nouveau peuple, un nouveau royaume se lèvent. Maintenant, ceux du temps passé ne connaissent pas tout cela. Eux connaissent leur temps. Ils sont comme des aveugles conduits dans un nouveau pays où se trouve la maison royale du Père, mais ils n’en connaissent pas l’emplacement.

Je suis venu pour les conduire, les y introduire et pour qu’ils voient. Je suis moi-même la Porte par laquelle on accède à la maison du Père, au Royaume de Dieu, à la Lumière, au Chemin, à la Vérité, à la Vie. Et je suis aussi celui qui est venu pour rassembler le troupeau resté sans guide et le mener dans un unique bercail : celui du Père. Je connais la porte du bercail, car je suis en même temps la Porte et le Berger ; j’y entre et en sors comme et quand je veux. J’y entre librement, en passant par la porte, car je suis le vrai Berger.

Quand quelqu’un vient donner aux brebis de Dieu d’autres indications, ou cherche à les dévoyer en les amenant à d’autres demeures et par d’autres chemins, ce n’est pas le bon Berger, mais un faux. De même, celui qui n’entre pas par la porte du bercail, mais essaie d’y pénétrer par un autre endroit en sautant par dessus la clôture, n’est pas le berger, mais un voleur et un assassin : car il a l’intention de voler et de tuer, pour que les agneaux qu’il prend n’aient pas de voix pour se plaindre et n’attirent pas l’attention des gardiens et du berger. Même parmi les brebis du troupeau d’Israël, de faux bergers cherchent à s’insinuer pour les faire sortir des pâturages, loin du vrai Berger. Ils sont prêts à les arracher au troupeau par la violence, et à l’occasion, ils sont même disposés à les tuer et à les frapper de bien des manières, pour les empêcher de parler, de raconter au Berger les ruses des faux bergers, et de crier vers Dieu de les protéger contre leurs adversaires et les adversaires du Berger.

Je suis le bon Berger et mes brebis me connaissent, tout comme ceux qui sont pour l’éternité les portiers du vrai bercail. Eux m’ont connu, moi et mon nom, et ils l’ont annoncé pour qu’il soit connu d’Israël. Ils m’ont décrit, et ils ont préparé mes chemins. Et quand ma voix s’est fait entendre, le dernier d’entre eux m’a ouvert la porte en annonçant au troupeau qui attendait le vrai Berger, au troupeau groupé autour de son bâton : “ Voici celui dont j’ai dit qu’il vient derrière moi. Il me précède parce qu’il existait avant moi et que moi, je ne le connaissais pas. C’est précisément pour que vous soyez prêts à le recevoir, que je suis venu baptiser avec de l’eau afin qu’il soit manifesté en Israël. ” Et les bonnes brebis ont entendu ma voix : quand je les ai appelées par leur nom, elles sont accourues et je les ai emmenées avec moi, comme le fait un bon berger, que les brebis reconnaissent à la voix et qu’elle suivent partout où il va. Et quand il les a toutes fait sortir, il marche devant elles, et elles le suivent, car elles aiment la voix du berger, alors qu’elles ne suivent pas un étranger, mais au contraire fuient loin de lui, parce qu’elles ne le connaissent pas et le craignent. Moi aussi, je marche devant mes brebis pour leur indiquer le chemin et pour affronter le premier les dangers et les signaler au troupeau que je veux conduire en lieu sûr dans mon Royaume.

518.6

– Israël ne serait-il plus le royaume de Dieu ?

– Israël est le lieu d’où le peuple de Dieu doit s’élever à la vraie Jérusalem et au Royaume de Dieu.

– Et le Messie promis, alors ? Ce Messie que tu affirmes être, ne doit-il donc pas rendre Israël triomphant, glorieux, maître du monde, en assujettissant sous son sceptre tous les peuples et en se vengeant férocement de tous ceux qui l’ont assujetti depuis qu’il est peuple ? Rien de cela n’est vrai, alors ? Tu nies les prophètes ? Tu traites de sots nos rabbis ? Tu…

– Le Royaume du Messie n’est pas de ce monde. C’est le Royaume de Dieu, fondé sur l’amour. Il n’est rien d’autre. Le Messie n’est pas le roi des peuples et des armées, mais le roi des âmes. C’est du peuple élu que viendra le Messie, de la race royale, et surtout de Dieu qui l’a engendré et envoyé. C’est par le peuple d’Israël qu’a commencé la fondation du Royaume de Dieu, la promulgation de la Loi d’amour, l’annonce de la Bonne Nouvelle dont parle le prophète[1]. Mais le Messie sera Roi du monde, Roi des rois, et son Royaume n’aura pas de limites ni de frontières, ni dans le temps, ni dans l’espace. Ouvrez les yeux et acceptez la vérité.

– Nous n’avons rien compris à ton radotage. Ce que tu dis n’a aucun sens. Parle et réponds sans paraboles. Es-tu, oui ou non, le Messie ?

– N’avez-vous toujours pas compris ? C’est pour cela que je me suis présenté comme la Porte et le Berger. Jusqu’à présent, personne n’a pu entrer dans le Royaume de Dieu parce qu’il était muré et sans issue, mais maintenant que je suis venu, la porte d’entrée est créée.

– Oh ! bien d’autres ont prétendu être le Messie, mais on a reconnu par la suite qu’il s’agissait de voleurs et de rebelles, et la justice humaine a puni leur rébellion. Qui nous assure que tu n’es pas comme eux ? Nous sommes las de souffrir et de faire souffrir au peuple la rigueur de Rome, à cause de menteurs qui se disent rois et qui poussent le peuple à la révolte !

– Non, votre jugement n’est pas exact. Vous ne voulez pas souffrir, cela est vrai. Mais que le peuple souffre vous indiffère. C’est si vrai, qu’à la rudesse de nos dominateurs, vous ajoutez votre propre dureté, en opprimant le menu peuple par des dîmes exagérées et par bien d’autres outrances. Qu’est-ce qui vous assure que je ne suis pas un brigand ? Mes actes. Ce n’est pas moi qui rends lourde la main de Rome, bien au contraire, puisqu’il m’arrive de la rendre plus légère en conseillant l’humanité à nos dominateurs, et la patience à ceux qui sont dominés. Au moins cela. »

C’est l’avis de beaucoup. En effet, l’auditoire a maintenant beaucoup augmenté et ne cesse de croître au point que le trafic en est gêné sur la grande rue, et que les gens refluent tous dans la ruelle, sous les voûtes de laquelle les voix se répercutent. Ils approuvent Jésus :

« Bien dit pour les dîmes, c’est vrai ! Lui nous conseille la soumission, et aux Romains la pitié. »

518.7

Les pharisiens, comme toujours, s’aigrissent d’entendre les approbations de la foule et c’est sur un ton encore plus mordant qu’ils s’adressent au Christ :

« Réponds sans te perdre dans tant de paroles, et prouve que tu es le Messie.

– En vérité, en vérité je vous dis que je le suis. C’est moi, moi seul, qui suis la Porte du Bercail des Cieux. Qui ne passe pas par moi ne peut entrer. Certes, il y a eu bien des faux Messies et il y en aura encore. Mais l’unique et véritable Messie, c’est moi. Combien sont venus jusqu’ici se prétendre tels, qui en fait n’étaient rien d’autre que des voleurs et des brigands ! Et pas seulement ceux qui se faisaient appeler Messie par un petit nombre de personnes à la même mentalité, mais d’autres encore qui, sans se donner ce nom, n’en exigent pas moins une adoration qui n’est pas même accordée au véritable Messie. Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende. Cependant remarquez : les brebis n’ont écouté ni les faux Messies, ni les faux bergers et maîtres, car leur esprit sentait l’hypocrisie de leur voix, qui voulait se montrer douce et était cruelle. Seuls les boucs les ont suivis pour devenir leurs compagnons de scélératesse : les boucs sauvages, indomptés, qui ne veulent pas entrer dans le Bercail de Dieu, sous le sceptre du vrai Roi et Berger. Parce que c’est aujourd’hui présent en Israël. Celui qui est le Roi des rois devient le Berger du Troupeau, tandis qu’autrefois celui qui était berger de troupeaux devint roi ; et l’Un comme l’autre proviennent d’une souche unique, celle d’Isaïe, comme c’est écrit[2] dans les promesses et les prophéties.

Les faux bergers n’ont pas parlé sincèrement ni réconforté. Ils ont dispersé et torturé le troupeau, ils l’ont abandonné aux loups, ou encore ils l’ont tué pour en tirer profit en le vendant pour s’assurer la vie, ou lui ont enlevé les pâturages pour en faire des maisons de plaisirs et des bosquets pour les idoles.

Savez-vous qui sont les loups ? Ce sont les passions mauvaises, les vices que les faux bergers eux-mêmes ont enseigné au troupeau, en étant les premiers à les pratiquer. Et savez-vous ce que sont les bosquets des idoles ? Ce sont les propres égoïsmes devant lesquels trop de gens brûlent de l’encens. Les deux autres mots n’ont pas besoin d’être expliqués, car leur sens n’en est que trop clair. Mais que les faux bergers agissent ainsi, c’est logique. Ce ne sont que des voleurs qui viennent dérober, tuer et détruire les brebis, pour les faire sortir du bercail et les amener sur de faux pâturages, ou les conduire dans de faux bercails qui ne sont que des abattoirs. Mais celles qui viennent vers moi sont en sécurité, et elles pourront sortir pour aller à mes pâturages ou rentrer pour venir à mes repos et devenir robustes et grasses avec des sucs de sainteté et de santé. Car je suis venu pour cela : pour que mon peuple, mes brebis, jusqu’ici maigres et affligées, reçoivent la vie, et une vie abondante, une vie de paix et de joie. Et c’est tellement ma volonté, que je suis venu pour donner ma vie, afin que mes brebis aient la vie pleine et abondante des enfants de Dieu.

518.8

Je suis le bon Pasteur. Et un pasteur, quand il est bon, donne sa vie pour défendre son troupeau contre les loups et les voleurs, tandis que le mercenaire, qui n’aime pas les brebis, mais l’argent qu’il gagne pour les mener au pâturage, ne se préoccupe que de se sauver lui-même avec son pécule sur lui. Et quand il voit apparaître un loup ou un voleur, il s’enfuit, quitte à revenir chercher plus tard quelque brebis laissée à moitié morte par le loup ou égarée par le voleur. Il tuera la première pour la manger, ou vendra la seconde comme lui appartenant pour grossir son magot, et il affirmera ensuite à son maître, avec des larmes mensongères, qu’il ne s’est pas sauvé une seule brebis. Peu importe au mercenaire que le loup saisisse et disperse les brebis, et que le voleur en fasse une razzia pour les mener chez le boucher. A-t-il peut-être veillé sur elles pendant qu’elles grandissaient et s’est-il donné du mal pour les rendre robustes ? Mais le maître, qui sait combien coûte une brebis, combien d’heures de fatigue, combien de veilles, combien de sacrifices il a fallu, lui, il aime ces brebis qui sont à lui, et il en prend soin. Mais moi, je suis bien plus qu’un maître. Je suis le Sauveur de mon troupeau et je sais combien me coûte le salut d’une seule âme, et ainsi je suis prêt à tout pour en sauver une. Elle m’a été confiée par mon Père. Toutes les âmes m’ont été confiées avec l’ordre d’en sauver un nombre immense. Plus je réussirai à en arracher à la mort spirituelle, plus mon Père sera glorifié. Et c’est pour cela que je lutte pour les délivrer de tous leurs ennemis, c’est-à-dire de leur moi, du monde, de la chair, du démon et de mes adversaires qui me les disputent pour m’affliger. Moi, je fais cela parce que je connais la Pensée de mon Père. Et mon Père m’a envoyé pour faire cela parce qu’il connaît mon amour pour lui et pour les âmes. Les brebis de mon troupeau, elles aussi, me connaissent, moi et mon amour, et elles sentent que je suis prêt à donner ma vie pour leur plus grand bien.

J’ai quantitè d’autres brebis, qui ne sont pas de ce bercail. Aussi ne me connaissent-elles pas, et presque toutes ignorent que j’existe et qui je suis. A beaucoup d’entre vous, ces brebis semblent pires que des boucs sauvages ; vous les jugez indignes de connaître la vérité et d’obtenir la vie et le Royaume. Et pourtant, il n’en est pas ainsi. Le Père les veut, elles aussi, et je dois donc les approcher, me faire connaître d’elles, faire connaître la Bonne Nouvelle, les conduire à mes pâturages, les rassembler. Elles aussi écouteront ma voix, et elles finiront par l’aimer. Et il y aura un seul Bercail sous un seul Pasteur, et le Royaume de Dieu sera formé sur la terre, prêt à être transporté et accueilli dans les Cieux, sous mon sceptre, mon signe et mon vrai Nom.

Mon vrai nom ! Il est connu de moi seulement ! Mais quand le nombre des élus sera complet et qu’au milieu des hymnes d’allégresse ils prendront place au grand repas de noces de l’Epoux avec l’Epouse, alors mon nom sera connu de mes élus qui, par fidélité à lui, se seront sanctifiés, même sans connaître toute l’étendue et toute la profondeur de ce que c’est d’être marqués de mon nom et récompensés de leur amour pour lui, ni quelle est la récompense… C’est cela que je veux donner à mes brebis fidèles, ce qui fait ma joie même… »

518.9

Jésus tourne ses yeux extatiques brillants de larmes sur les visages tournés vers lui et un sourire tremble sur ses lèvres, un sourire tellement spiritualisé dans un visage spiritualisé, qu’un frisson secoue la foule, qui se rend compte du ravissement du Christ en une vision béatifique et de son désir d’amour de la voir accomplie. Il se ressaisit, et ferme un instant les yeux pour cacher le mystère que voit son esprit et que l’œil pourrait trop trahir. Puis il reprend :

« C’est pour cela que le Père m’aime, ô mon peuple, ô mon troupeau ! Parce que pour toi, pour ton bien éternel, je donne la vie.

Plus tard, je la reprendrai. Mais d’abord, je la donnerai pour que tu aies la vie et ton Sauveur pour ta propre vie. Et je la donnerai de sorte que tu t’en repaisses, me changeant de Pasteur en un pâturage et en une source qui procureront nourriture et boisson, non pas pour quarante années[3] comme pour les Hébreux dans le désert, mais pour tout le temps de l’exil à travers les déserts de la terre. Personne, en réalité, ne m’ôte la vie. Ni ceux qui, en m’aimant de tout leur être, méritent que je m’immole pour eux, ni ceux qui me l’enlèvent à cause d’une haine sans mesure et d’une sotte peur. Personne ne pourrait me la retirer si je ne consentais pas moi-même à la donner et si le Père ne le permettait pas, pris tous les deux d’un délire d’amour pour l’humanité coupable. C’est de mon propre gré que je la donne, et j’ai le pouvoir de la reprendre quand je veux, car il n’est pas convenable que la mort puisse l’emporter sur la vie. C’est pour cela que le Père m’a confié ce pouvoir. Mieux, il m’a ordonné de m’en servir. Et par ma vie, offerte et consumée, les peuples deviendront un Peuple unique : le mien, le Peuple céleste des enfants de Dieu, pour séparer dans les peuples les brebis des boucs, et pour que les brebis suivent leur Pasteur dans le Royaume de la vie éternelle. »

518.10

Jésus, qui jusqu’alors a parlé à haute voix, s’adresse maintenant à voix basse à Sidonia, dit Bartolmaï, resté tout le temps devant lui, avec à ses pieds son panier de pommes parfumées :

« Tu as tout oublié pour moi. Maintenant, tu vas certainement être puni et perdre ta place. Tu vois ? Je t’apporte toujours de la souffrance. Pour moi, tu as perdu la synagogue, et maintenant tu vas perdre ton maître…

– Et à quoi ça pourrait me servir, si je te possède, toi ? Toi seul as de la valeur à mes yeux. Et je quitte tout pour te suivre, pourvu que tu me le permettes. Laisse-moi seulement porter ces fruits à leur acheteur, et puis je suis à toi.

– Allons-y ensemble. Ensuite, nous irons chez ton père, car tu as un père et tu dois l’honorer en lui demandant sa bénédiction.

– Oui, Seigneur, tout ce que tu veux. Pourtant, instruis-moi beaucoup, car je ne sais rien, pas même lire et écrire puisque j’étais aveugle.

– Ne t’en préoccupe pas. Ta bonne volonté te servira d’école. »

Et il s’éloigne pour revenir sur la rue principale, pendant que la foule commente, discute, se querelle même, hésitant entre les avis opposés qui sont toujours les mêmes : Jésus de Nazareth est-il un possédé ou un saint ? Les gens, en désaccord, débattent pendant que Jésus s’éloigne.

518.1

Jesus, Who has entered the town by Herod’s Gate, is now crossing it, going towards the Tyropoeon and the Ophel district.

«Are we going to the Temple?» asks the Iscariot.

«Yes, we are.»

«Watch what You do!» many say warning Him. «I will only stop for the time of the prayer.»

«They will detain You.»

«No. We will go in through the northern gates and will come out through the southern ones and they will have no time to organise themselves and harm Me. Unless there is always one behind Me who watches and reports.»

No one replies and Jesus goes on His way towards the Temple which appears on the top of its hill, looking almost ghastly in the green yellowish light of a dull winter morning, as the sun is only a reminiscence, which insists on being present striving to make its way through the thick clouds. A useless effort! The joyful brightness of dawn has turned into a pale reflection of an unreal yellow hue, which is not diffused, but shows spots mixed with leaden hues veined with green. In such light the marbles and gold decorations of the Temple look pale, gloomy, I would say dismal, like ruins emerging from a dead area.

Jesus looks at it intensely while ascending towards the enclosure. And He looks at the faces of the morning wayfarers. Mostly humble people: market-gardeners, shepherds with small animals for slaughter, servants or housewives going to the markets. They all pass by silently, wrapped in their mantles, bending a little to protect themselves from the chilly morning air. Also their faces look paler than is usual with this race. It is the strange light that makes them look so greenish, almost pearly in the contour of the coloured cloths of their mantles, which are green, bright violet, deep yellow and thus not suitable to cast rosy reflections on their faces. Some greet the Master, but do not stop. It is not the right time. There are no beggars as yet, uttering their plaintive cries at crossroads or under the arches built across streets at short intervals. The hour and the season assist Jesus in going freely without any obstacle.

They are now at the enclosure. They go in. They go to the Court of Israel. They pray while the blares of trumpets, I would say silver ones by their timbre, announce something important spreading over the hill, and while the smell of incence spreads pleasantly overwhelming every other less pleasant odour which one can smell at the top of the Moriah, that is, I would say, the perpetual smells of meat slaughtered and consumed by fire, of burnt flour, of burning oil, which are always perceptible up there, more or less strongly, because of the continuous holocausts.

They come away following a different direction and they begin to be noticed by the first people going to the Temple, by those belonging to it, by money-changers and vendors who are assembl­ing their benches and enclosures. But they are too few and their surprise is such that they do not react. They exchange words of astonishment:

«He has come back!»

«He did not go to Galilee, as they said.»

«But where is He hiding if He could not be found anywhere?»

«He really wants to defy them.»

«What a fool!»

«What a holy man!» and so forth according to individual feelings.

518.2

Jesus is already outside the Temple and He is going down towards the street that leads to Ophel, when, at the crossing with the streets leading up to Zion, He meets with the man born blind, cured recently, who laden with baskets full of sweet­-smelling apples is going along cheerfully, joking with other young men, equally laden, going in the opposite direction.

Perhaps the young man would not notice the encounter, as he does not know the face of Jesus or those of the apostles. But Jesus recognises the face of the man He cured miraculously. And He calls him. Sidonia, named Bartholmai, turns around and looks in­quisitively at the tall stately man, although modestly dressed who is calling him by the name, going towards a narrow street.

«Come here» Jesus orders him.

The young man approaches Him, without putting down his load, looks stealthily at Jesus, and thinking that He wants to buy some apples, he says: «My master has already sold them. But he has more if You want them. They are beautiful and good. They arrived yesterday from the Sharon orchards. And if You buy many of them he will give you a good discount, because…»

Jesus smiles raising His right hand to check the talkative young man. And He says: «I did not call you because I want to buy apples, but to congratulate you and bless the Most High Who has been kind to you.»

«Oh! yes! I do that continuously, because of the light that I can see and because of the work that I can do, helping my father and mother, at last. I found a good master. He is not a Hebrew but he is good. The Hebrews did not want me be… because I have been ejected from the synagogue» says the young man laying his baskets on the ground.

«They have ejected you? Why? What have you done?»

«I, nothing. I can assure You. The Lord did it. On a Sabbath He made me find that man who is said to be the Messiah, and He cured me, as You can see. And that is why they drove me out.»

«Then, He Who cured you, did not do you a completely good turn» says Jesus tempting him.

«Don’t say that, man! You are blaspheming! First of all He showed me that God loves me, and then He made me see… You do not know what it is “to see” because You have always had Your eyesight. But one who had never seen! Oh!… It is… It is all the things together that one has with his sight. I tell You that when I saw, over there near the Siloam pool, I laughed and wept, for joy, eh? I wept as I had never wept in my misfortune. Because I then understood how great it was and how good was the Most High. And now I can earn my living and by means of a decent work. And then… – this is above all what I hope the miracle I received will grant me – I hope to meet the man who is said to be the Messiah and His disciple who had…»

«What would you do then?»

«I would like to bless Him. Him and His disciple. And I would like to ask the Master, Who must really come from God, to take me as His servant.»

«What? Because of Him you are anathema, you have difficulty in finding a job, you may be punished more severely, and you want to serve Him? Do you not know that all those who follow Him Who cured you are persecuted?»

«Yes, I know! But he is the Son of God, that is what is said among us. Although those up there (and he points at the Temple) do not want us to say that. And is it not worth leaving everything to serve Him?»

518.3

«So do you believe in the Son of God and in His presence in Palestine?»

«I do believe it. But I would like to meet Him to believe in Him not only with my intellect, but with my whole self. If You know who He is and where He is, tell me, that I may go to Him and see Him, and I may believe in Him completely, and serve Him.»

«You have already seen Him, and there is no need for you to go to Him. He, Whom you see just now and Who is speaking to you, is the Son of God.»

I could not assert this with full certainty, but I got the impres­sion that in saying these words Jesus almost underwent a very short transfiguration, becoming most handsome and I would say bright. I think that to reward his humble believer and con­firm him in his faith, for the duration of a flash, He revealed His future beauty, I mean the beauty that He will assume after Resur­rection and will retain in Heaven, His beauty of a glorified human creature, of a body glorified and blended with the inexpressible beauty of Perfection, which is exclusively His. I say, an instant. A flash. But the semi-dark corner, where they have withdrawn to speak, under the archivolt of the lane, lightens with a strange brightness emanating from Jesus Who, I would repeat, becomes very handsome.

Then everything returns to normal, with the exception of the young man, who is now prostrated on the ground, his face in the dust, and who adores saying: «I believe, Lord, my God!»

«Stand up. I came into the world to bring light and the knowledge of God and to test men and judge them. This time of Mine is the time of choice, election and selection. I have come for the pure in heart and intention, for the humble, the meek, the lovers of justice, of mercy, of peace, for those who weep and for those who know how to give the real value to the various riches and prefer spiritual riches to material ones, that they may find what their spirits long for and those who were blind may see ­because men have built thick walls to obstruct light, that is the knowledge of God – and those who consider themselves seers, may become blind…»

518.4

«Then You hate a large part of men and You are not as good as You say. If You were, You would like everybody to be able to see, and those who can see not to become blind» interrupt some Pharisees who have arrived from the main road and have cautious­ly approached the group at the back of the apostles.

Jesus turns around and looks at them. He is certainly no longer transfigured into divine beauty, now! It is a very severe Jesus Who stares at His persecutors with His sapphire eyes, and His voice no longer has the golden note of joy, but it is a bronze voice and it is sharp and severe like the sound of bronze while He replies: «I am not the one who wants those, who at present are fighting the truth, not to be able to see it. They themselves are raising plates in front of their eyes in order not to see. And they become blind of their own free will. And the Father sent Me that the division may take place, and the children of Light and those of Darkness may be real­ly known, those who want to see and those who want to be blind.»

«Are we among these blind people as well?»

«If you were and you tried to see, you would not be guilty. But it is because you say: “We see”, and then you do not want to see, that you commit sin. Your sin persists because you do not try to see, although you are blind.»

«And what have we to see?»

«The Way, the Truth, the Life. A man born blind, as this young man was, with the help of his stick can always find the door of his house and move about it, because he knows his house. But if he were taken to a different place he would not be able to go in by the door of the new house, because he would not know where it is and he would bump against the walls.

518.5

The time of the new Law has come. Everything is renewed and a new world, a new people, a new kingdom are rising. Now the peo­ple of the past do not know all this. They know their times. They are like blind people taken to a new town where the regal house of the Father is, but they do not know its location. I have come to lead them there and take them into it and that they may see. But I am the Door through which one enters the paternal house, in the Kingdom of God, in the Light, in the Way, in the Truth, in the Life. And. I am also the One Who has come to gather the flock left without a guide and lead it to one only sheep-fold: the Father’s. I know the door of the Fold because I am Door and Shepherd. And I go in and come out as and when I like. And I go in freely, and by the door, because I am the true Shepherd.

When a man comes to give the sheep of God other instructions or tries to mislead them taking them to other abodes and other ways, he is not the good Shepherd, but an idol shepherd. Likewise, he who does not go in by the door of the fold, but tries to enter in a different way, jumping over the enclosure, is not the shepherd, but a thief and a murderer, who goes in to kill and steal, so that the stolen lambs with their wailing voices may not draw the attention of the watchmen and of the shepherd. False shepherds are trying to insinuate themselves also among the sheep of the flock of Israel to lead them astray from the pastures, far from the true Shepherd. And they go in ready to tear them from the flock even by means of violence, and if necessary, they are also willing to kill them and strike them in many ways, so that they may not speak informing the Shepherd of the tricks of the false shepherds or they may cry to God to protect them from their enemies and the enemies of the Shepherd.

I am the good Shepherd and my sheep know Me, and those who have been forever the watchmen of the true Fold know Me. They have known Me and my Name and they mentioned it to make it known to Israel, and they described Me and prepared my ways, and when my voice was heard, the last of them opened the door to Me saying to the flock awaiting the true Shepherd, the flock gathered round his crook: “Now! Here is the One Who I said would follow me. One Who precedes me because He was before me and I did not know Him. But for Him, that you may be ready to receive Him, I have come to baptise with water, that He may be revealed to Israel”. And the good sheep heard my voice and when I called them by their names they came to Me and I took them with Me, as a good shepherd does when he is known to the sheep that recognise his voice and follow him wherever he goes. And when he has let them all out, he walks in front of them and they follow him because they love the voice of the shepherd. But they do not follow a stranger, on the contrary they run away from him, because they do not know him and they are afraid of him. I also walk ahead of my sheep to point out the road to them and be the first to face dangers and show them to the flock, that I want to lead to safety in my Kingdom.»

518.6

«Is Israel no longer the kingdom of God?»

«Israel is the place from which the people of God must rise to the true Jerusalem and to the Kingdom of God.»

«And what about the promised Messiah? That Messiah that You say You are, is He not to make Israel triumphant, glorious, the master of the world, subjecting to his sceptre all the peoples and revenging Himself, oh! revenging Himself cruelly on all those who subjugated it since it was a population? So, nothing of all that is true? Are you denying the prophets? Are You saying that our rabbis are stupid? You…»

«The Kingdom of the Messiah is not of this world. It is the Kingdom of God, based on Love. It is nothing else. And the Messiah is not the king of peoples and armies, but the king of spirits. The Messiah will come from the chosen people, from the royal stock, and above all from God, Who generated Him and sent Him. The foundation of the Kingdom of God, the promulgation of the Law of love, the announcement of the Good News mentioned[1] by the prophet began from the people of Israel. But the Messiah will be the King of the world, the King of kings, and his Kingdom will have no limit or boundary, neither in time nor in space. Open your eyes and accept the truth.»

«We have understood nothing of your nonsense. You speak words without any logical connection. Speak and reply to us without parables. Are You or are You not the Messiah?»

«And have you not yet understood? I told you that I am Door and Shepherd for that. So far no one has been able to enter the Kingdom of God, because it was walled up and without exits. But now I have come and the door to enter has been made.»

«Oh! Others have said that they were the Messiah and later they were found out to be highwaymen and rebels and human justice punished their wickedness. Who can assure us that You are not like them? We are tired of suffering and of making the people suf­fer the severity of Rome, thanks to liars who say that they are kings and they induce the people to rebel!»

«No. What you say is not correct. You do not want to suffer, that is true. But you are not sorry if the people suffer. So much so that you add your rigour to the severity of our rulers, by oppressing the common people with heavy tithes and in other ways. Who can assure you that I am not a rascal? My deeds. I am not one who will make the hand of Rome heavy. On the contrary, if anything, I make it lighter by advising the rulers to be human and the people ruled to be patient. At least that.»

Many people have assembled and they are growing more and more in numbers so much so that the traffic is obstructed on the main road and so they all move into the little lane, under the arches of which voices resound, as they express their approval saying: «He is quite right with regard to tithes! It’s true. He advises us to submit and the Romans to be compassionate.»

518.7

The Pharisees, as usual, become embittered because of the ap­proval of the crowd and the tone in which they speak to the Christ becomes more biting. «Reply to us without so many words, and prove that You are the Messiah.»

«I solemnly tell you that I am. I alone am the Door of the Fold of Heaven. He who does not pass by Me cannot enter. It is true. There have been other false Messiahs, and there will be still more. But I am the only and true Messiah. Those who have come so far pro­claiming themselves such, were not the Messiah, they were only thieves and bandits. And not only those who made the few people of their kind call them Messiah, but also others who without taking that name demand a worship which is not even given to the true Messiah. Listen, anyone who has ears to hear. But take notice of this. The sheep did not listen to the false Messiahs or to the false shepherds and masters, because their spirits understood the falseness of their voices which wanted to sound kind and were in­stead cruel. Only some billy-goats followed them to be their com­panions in wickedness. Wild unyielding billy-goats that do not want to enter the Fold of God, under the sceptre of the true King and Shepherd. Because this is now what happens in Israel. That He Who is the King of kings becomes the Shepherd of the Flock, whereas, once, he who was the shepherd of flocks became king and both the Former and the latter come from the same root, that of Jesse, as it is stated[2] in the promises and prophecies.

The false shepherds did not speak sincere words or perform com­forting deeds. They dispersed and tortured the flock or they aban­doned it to wolves, or they killed it to make a profit selling it to secure their lives or they deprived it of its pastures to turn them into places of pleasure or thickets for idols. Do you know which are the wolves? They are the evil passions, the vices that the same false shepherds taught the flock, as they were the first to practise them. And do you know which are the thickets for idols? They are one’s selfishness before which too much incense is burnt. The other two things need not be explained because the sermon is even too clear. But it is logical that false shepherds should behave thus. They are nothing but thieves who have come to steal, kill and destroy, to take the sheep to treacherous pastures or to false folds which are nothing but slaughter-houses. But those which come to Me are safe and they will be able to go out to My pastures or come back to rest with Me and become strong and fat with holy healthy food. Because I have come for that. That My people, My sheep, so far thin and depressed, may have life and have it abundantly, in peace and joy. And I want that so much that I have come to give My life so that My sheep may have the full abundant Life of the children of God.

518.8

I am the good Shepherd. And when a shepherd is good he gives his life to defend his flock from wolves and thieves, whereas a mercenary, who does not love the sheep but the money he gets for leading them to pasture, is only worried about saving himself and the savings that he keeps in his bosom, and when he sees wolves or thieves come, he runs away, save going back later to take some sheep left half dead by the wolves or dispersed by the thieves, kill­ing the former to eat them or selling the latter to make more money and then with false tears he tells his master that not even one sheep was spared. What does the mercenary care if a wolf fangs and disperses the sheep, and a thief plunders them to take them to the butcher? Did he watch over them while they were growing and did he work to make them strong? But the owner who knows how much sheep cost, how many hours of work, of watch, how many sacrifices, loves them and takes care of them as they are dear to him. But I am more than the owner. I am the Saviour of My flock and I know how much the salvation of even one soul costs Me, and I am therefore willing to do anything to save a soul. It was entrusted to Me by My Father. All the souls have been entrusted to Me with instructions that I should save a very large number of them. The more I will be able to snatch from the death of the spirit, the more will My Father be glorified. I therefore struggle to free them from all their enemies, that is from their egos, from the world, from the flesh, from the demon, and from My enemies who contend for them with Me to grieve Me. I do that because I know the Thought of my Father. And my Father sent Me to do that because He is aware of my love for Him and for souls. And also the sheep of my flock know Me and my love and they feel that I am ready to give my life to give them happiness.

And I have other sheep. But they do not belong to this Fold. Therefore they do not know Me for what I am, and many do not know what I am and who I am. Sheep that to many of us appear to be worse than wild billy-goats and are considered unworthy of knowing the Truth and of having Life and the Kingdom. And yet it is not so. The Father wants them as well, so I must approach them, too, to make Myself known and to make the Good News known to lead them to my pastures and gather them. And they also will listen to my voice because they will end up by loving it. And there will be only one Fold under only one Shepherd and the Kingdom of God will be formed on the Earth ready to be transported to and received in Heaven, under my sceptre and my sign and my true Name.

My true Name! It is known to Me only! But when the number of the chosen ones is complete, and among hymns of jubilation they sit at the great wedding feast of the Bridegroom and the Bride, then my Name will be made known to my chosen ones who through their loyalty to it have become holy, without however knowing the full extent and the depth of what it means to be marked with my Name and rewarded because of their love for it, or what the reward will be… This is what I want to give to My faithful sheep. And that is my own joy…»

518.9

With his eyes bright with ecstatic tears Jesus looks at the faces turned towards Him, and a smile trembles on His lips, such a spiritualised smile in His spiritualised face, that it thrills the crowds who realise that the Christ has been in a beatific rapture and that out of love He wishes to see it accomplished. He collects Himself and for a moment He closes His eyes concealing the mystery that His mind sees and that the eyes might reveal, and He resumes:

«That is why the Father loves Me, O My people, O My flock! Because for your sake, for your eternal good, I give My life. Later I will retake it. But first I will give it that you may have life and your Saviour as your life. And I will give it in such a way that you may feed on it, as I will change from Shepherd into pasture and fountain, which give food and drink, not for forty years[3] as for the Hebrews in the desert, but for all the time of exile in the deserts of the Earth. No one, actually, takes My life. Neither those who lov­ing Me with their whole beings deserve that I should sacrifice it for them, nor those who take it through immense hatred and foolish fear. No one could take it if I did not agree to give it and if the Father did not allow it, as we are both enraptured by an ecstasy of love for guilty Mankind. I will give it Myself. And I have the power to retake it whenever I wish, as it is not befitting that Death should prevail over Life. That is why the Father gave Me that power, nay the Father ordered Me to do that. And through my life, offered and consumed, the peoples will become one only people: Mine, the heavenly People of the children of God, and in the peo­ple the sheep will be separated from the billy-goats and the sheep will follow their Shepherd to the Kingdom of eternal Life.»

518.10

And Jesus, Who so far has spoken in a loud voice, turns towards Sidonia named Bartholmai, who has been all the time in front of Him with his baskets of sweet-smelling apples at his feet, and He says to him in a whisper: «You have forgotten everything because of Me. Now you will certainly be punished and you will lose your job. See that? I am always the cause of sorrow to you. Because of Me you lost the synagogue, and now you will lose your master…»

“And what am I going to do with all that, if I have You? You only are of value to me. And I will leave everything to follow You, if You will allow me. Just let me take this fruit to he who purchased it and then I will come with You.»

“Let us go together. Then we will go to see your father. Because you have a father and you must honour him by asking him to bless you.»

“Yes, Lord. Everything You wish. But teach me many things, because I know nothing, just nothing, I cannot even read and write because I was blind.»

“Do not worry about that. Your goodwill will teach you.»

And He sets out to go to the main street, while the crowds com­ment, discuss, and even quarrel, divided between the two usual opinions: is Jesus of Nazareth a person possessed or is He a saint? The crowds, with discordant opinions, dispute, while Jesus goes away.


Notes

  1. dont parle le prophète, en Is 61, 1.
  2. c’est écrit, en Is 11, 1.10 ; Jr 23, 5-6.
  3. pour quarante années, comme cela est relaté en Ex 16, 35.

Notes

  1. mentioned, in: Isaiah 61,1.
  2. it is stated, as in: Isaiah 11,1.10; Jeremiah 23,5-6.
  3. for forty years, as said in: Exodus 16,35.