526.1
« Paix à toi, Maître ! » saluent les disciples bergers partis de l’avant les jours précédents et qui attendent de l’autre côté du gué, avec les malades qu’ils ont rassemblés et d’autres personnes désireuses d’entendre le Maître.
« Paix à vous. Il y a longtemps que vous m’attendez ?
– Trois jours.
– J’ai été retenu en route. Allons voir les malades.
– Nous avons fait dresser des tentes pour les abriter sans faire la navette des villages voisins. Nos amis bergers ont donné du lait pour eux ; ils sont ici avec leurs troupeaux et t’attendent ”, disent les disciples tout en conduisant Jésus sous un bosquet touffu qui pourrait servir de toit à qui s’y réfugierait.
Il y a là une vingtaine de petites tentes dressées sur des pieux, ou d’un tronc à un autre, et dessous se trouve le triste petit peuple des malades qui attendent. Dès qu’ils comprennent quel est celui qui vient, ils poussent le cri habituel :
« Jésus, Fils de David, aie pitié de nous. »
Jésus ne veut pas les faire attendre plus longtemps et en se montrant, ou plutôt en se penchant d’une tente à l’autre — sa grande taille ne lui permet pas de se tenir debout à l’intérieur —, il passe la tête dans chacune, et son sourire est déjà une grâce. Le soleil qu’il a derrière lui projette son ombre sur les grabats et sur les visages émaciés ou les membres inertes. Il ne dit qu’une courte phrase : “ Paix à vous qui croyez ” et passe à la tente suivante.
Un cri le suit. Un cri qui se répète comme se répète sa phrase, un cri qui se répète dans la tente qu’il vient de quitter, comme si c’était l’écho de celui qui provient de la tente précédente :
« Je suis guéri ! Hosanna au Fils de David ! »
Et le petit peuple des malades, d’abord étendu sous les tentes sombres, sort et se groupe derrière les pas du Maître, un petit peuple tout en fête, qui jette au loin bâtons et béquilles, s’enveloppe dans les couvertures du brancard abandonné, enlève les pansements désormais inutiles, et qui surtout exulte dans la joie de la guérison.
Ils sont tous guéris maintenant, et Jésus se retourne avec son sourire le plus doux pour dire :
« Le Seigneur a récompensé votre foi. Bénissons ensemble sa bonté. »
Et il entonne le psaume[1] :
« Acclamez joyeusement Dieu par toute la terre, servez le Seigneur dans l’allégresse. Venez à lui avec des chants de joie. Reconnaissez que le Seigneur est Dieu, qu’il nous a faits… »
Les gens le suivent comme ils le peuvent. Certains, qui ne sont peut-être pas d’Israël, se contentent de fredonner le psaume, mais leur cœur chante et la lumière de leurs visages le montre. Dieu accueillera certainement ce pauvre bredouillage, mieux que le chant parfait et aride de quelques pharisiens.