The Writings of Maria Valtorta

536. La guérison de sept lépreux.

536. The healing of seven lepers. The arrival in Bethany

536.1

Jésus, Pierre et Jude marchent rapidement. L’endroit, proche de Jérusalem, est triste et pierreux. Comme je ne vois pas les arbres du mont des Oliviers, mais un monticule, ou plutôt des monticules peu ou pas du tout verdoyants à l’ouest de la ville, au nombre desquels se trouve le triste Golgotha, je pense être vraiment en dehors de la cité, du côté occidental.

« Avec ce que nous avons pu acquérir, nous aurons de quoi donner. Ce doit être terrible de vivre dans des tombeaux l’hiver, dit Jude, chargé de paquets, tout comme l’est Pierre.

– Je suis content de m’être rendu chez les affranchis pour obtenir ces deniers pour les lépreux. Pauvres malheureux ! En ces jours de fête, personne ne pense à eux. Tout le monde se réjouit… mais eux pensent à leurs maisons perdues… Hélas ! Si du moins ils croyaient en toi ! Est-ce que cela arrivera, Maître ? demande Pierre, toujours si simple, si attaché à son Jésus.

– Espérons-le, Simon, espérons-le. Prions en attendant… »

Et ils continuent leur route en priant.

536.2

La sinistre vallée du Hinnom apparaît, avec ses tombeaux de vivants.

« Allez en avant et donnez » ordonne Jésus.

Les deux apôtres s’éloignent en parlant à haute voix. Des visages de lépreux se font voir aux entrées des grottes et des abris.

« Nous sommes les disciples du Rabbi Jésus, dit Pierre. Il va venir, et il nous envoie pour vous apporter de l’aide. Combien êtes-vous ?

– Sept ici, et trois de l’autre côté, au-delà de En-Rogel » répond l’un d’eux au nom de tous.

Pierre ouvre son paquet, Jude le sien. Ils font dix parts du pain, du fromage, du beurre, des olives. Mais où mettre l’huile, qui est dans une petite jarre ?

« Que l’un de vous apporte un récipient et le mette sur le rocher. Vous partagerez l’huile en frères que vous êtes, et au nom du Maître qui prêche l’amour envers son prochain » dit Pierre.

Les apôtres s’approchent d’un gros rocher, pendant qu’un lépreux descend en boitant et y dépose une cruche ébréchée. Il les regarde verser l’huile, et s’étonne :

« Vous n’avez pas peur d’être si près de moi ? »

Il n’y a en effet que le rocher pour les séparer.

« Nous n’avons peur, nous, que d’offenser l’amour. Jésus nous a envoyés vous secourir, car celui qui appartient au Christ doit aimer comme le Christ aime. Puisse cette huile ouvrir votre cœur, lui apporter la lumière comme si déjà elle était allumée dans la lampe de votre cœur. Le temps de la grâce est venu pour ceux qui espèrent dans le Seigneur. Ayez foi en lui, il est le Messie et guérit les corps et les âmes. Il peut tout, car il est l’Emmanuel[1] » déclare Jude, qui en impose toujours par sa dignité.

Le lépreux reste avec sa cruche dans les mains et le regarde, comme fasciné. Puis il dit :

« Je sais qu’Israël a son Messie : les pèlerins qui viennent en ville à sa recherche en parlent, et nous écoutons leurs conversations. Mais moi, je ne l’ai jamais vu, car je suis arrivé depuis peu. Et vous assurez qu’il me guérirait ? Parmi nous, certains blasphèment contre lui, d’autres le bénissent, et moi, je ne sais qui croire.

– Ceux qui le maudissent sont-ils bons ?

– Non. Ils sont cruels et ils nous maltraitent. Ils veulent les meilleures places et les plus grosses parts. Pour cette raison, nous ne savons pas si nous pourrons rester ici.

– Tu vois donc que seul celui qui laisse l’enfer l’habiter hait le Messie. C’est que l’enfer se sent déjà vaincu par lui. Mais moi, je te dis qu’il faut l’aimer, et avec foi, si on veut avoir du Très-Haut la grâce, ici et au-delà de la terre, affirme encore Jude.

– Si je veux avoir la grâce ! Je suis marié depuis deux ans et j’ai un petit garçon qui ne me connaît pas. Je suis lépreux depuis quelques mois à peine. Vous le voyez. »

Effectivement, il a peu de marques.

« Dans ce cas, adresse-toi au Maître avec foi.

536.3

Regarde ! Il arrive. Avertis tes compagnons et reviens ici. Il passera et te guérira. »

L’homme monte la côte en boitant, et il appelle :

« Urie ! Joab ! Adina ! Et vous aussi qui ne croyez pas. Le Seigneur vient nous sauver. »

Une, deux, trois. Trois détresses de plus en plus grandes s’avancent. Mais la femme se montre à peine. C’est une horreur vivante… Peut-être pleure-t-elle, peut-être parle-t-elle, il est impossible de comprendre : sa voix est un son inarticulé qui sort de ce qui était la bouche, mais qui maintenant n’est plus que deux mâchoires dépourvues de dents, découvertes, horribles…

« Oui, je t’assure qu’ils m’ont dit de venir vous appeler, parce que Jésus vient nous guérir.

– Moi, non ! Je n’ai pas cru les autres fois… et il ne m’écoutera plus… d’ailleurs, je ne peux plus marcher » émet plus distinctement la femme, qui sait avec quelle difficulté !

Elle s’aide jusque de ses doigts pour tenir les lambeaux de ses lèvres afin de se faire comprendre.

« Nous te porterons, Adina… » proposent les deux hommes et celui de la cruche.

« Non… Non… j’ai trop péché… »

Et elle s’affaisse là où elle est…

Trois autres accourent comme ils peuvent, et interviennent avec autorité :

« En attendant, donne-nous l’huile, puis allez trouver Belzébuth si vous voulez.

– L’huile est pour tous ! » rétorque celui qui tient la cruche, en cherchant à défendre son trésor.

Mais les trois lépreux, violents, cruels, le maîtrisent et la lui arrachent.

« Voilà ! C’est toujours comme ça… Nous avions enfin un peu d’huile, après si longtemps !… Mais le Maître arrive… Allons le trouver. Tu ne viens vraiment pas, Adina ?

– Je n’ose pas… »

536.4

Les trois hommes descendent vers le rocher, et s’arrêtent pour attendre Jésus ainsi que les apôtres, partis à sa rencontre. Et une fois qu’il est arrivé, ils crient :

« Aie pitié de nous, Jésus d’Israël ! Nous espérons en toi, Seigneur ! »

Jésus lève la tête. Il les dévisage de son regard inimitable et demande :

« Pourquoi désirez-vous la santé ?

– Pour nos familles, pour nous… C’est horrible de vivre ici…

– Vous n’êtes pas seulement chair, mes enfants. Vous avez une âme aussi, et elle a plus de valeur que la chair. C’est d’elle que vous devez vous préoccuper. Ne demandez donc pas seulement la guérison pour vous, pour vos familles, mais surtout pour avoir le temps de connaître la Parole de Dieu et de vivre pour mériter son Royaume. Etes-vous des justes ? Devenez-le davantage. Etes-vous des pécheurs ? Demandez de vivre pour avoir le temps de réparer le mal que vous avez commis… Où est la femme ? Pourquoi ne vient-elle pas ? Elle n’ose pas affronter le visage du Fils de l’homme, alors qu’elle n’a pas craint d’avoir à rencontrer le visage de Dieu quand elle péchait ? Allez lui dire qu’il lui a été beaucoup pardonné à cause de son repentir et de sa résignation, et que l’Eternel m’a envoyé pour absoudre tous les péchés de ceux qui se sont repentis de leur passé.

– Maître, Adina ne peut plus marcher…

– Allez l’aider à descendre ici et apportez un autre récipient. Nous vous donnerons encore de l’huile…

– Seigneur, il y en a à peine pour les autres, lui glisse Pierre à voix basse, pendant que les lépreux vont chercher la femme.

– Il y en aura pour tous. Aie foi, car il est plus facile pour toi d’avoir foi sur ce point qu’il ne l’est pour ces malheureux de croire que leur corps redeviendra ce qu’il était. »

Pendant ce temps, là-haut, dans les grottes, une rixe a éclaté entre les trois mauvais lépreux à propos de la répartition de la nourriture…

536.5

La femme descend, portée dans les bras… et elle gémit comme elle le peut :

« Pardon ! Pour le passé ! Pour n’avoir pas demandé pardon les autres fois !… Jésus, Fils de David, aie pitié de moi ! »

Ils la déposent au pied du rocher, et placent sur celui-ci une sorte de marmite toute bosselée.

Jésus demande :

« Qu’en dites-vous ? Est-il plus facile d’augmenter la quantité d’huile contenue dans un vase ou de faire repousser la chair là où la lèpre l’a détruite ? »

Un silence… puis la femme déclare :

« La quantité d’huile. Mais aussi la chair parce que tu peux tout. Et tu peux même me rendre l’âme de mes premières années. Je crois, Seigneur ! »

Ce sourire divin ! C’est comme une lumière qui se répand, pleine de douceur, de joie, de tendresse ! Elle est dans ses yeux, sur ses lèvres, et dans sa voix quand il dit :

« En raison de ta foi, sois guérie et pardonnée. Et vous de même. Prenez aussi de l’huile et de la nourriture pour vous restaurer. Et allez vous montrer au prêtre, comme cela est prescrit. Demain, à l’aube, je reviendrai avec des vêtements, et vous pourrez partir en respectant la décence. Allons ! Louez le Seigneur : vous n’êtes plus malades ! »

Jusqu’à ce moment, ils avaient les yeux fixés sur le Seigneur, mais tout à coup, ils se regardent et crient leur stupéfaction. La femme voudrait se redresser, mais elle est trop nue pour le faire. Son vêtement tombe en lambeaux et ne cache plus sa nudité. Elle reste à moitié dissimulée par le rocher, par pudeur… pudeur qui n’est pas due seulement à la présence de Jésus, mais aussi à celle de ses compagnons. Les traits de son visage sont recomposés, plus amaigris seulement à cause des privations. Elle pleure en répétant : « Béni ! Béni ! Béni ! », et ses bénédictions se mêlent aux blasphèmes horribles des trois mauvais lépreux, rendus furieux de voir les autres guéris. Ordures et pierres volent.

536.6

« Vous ne pouvez rester ici. Venez avec moi. Il ne vous arrivera aucun mal. Regardez : la route est vide. L’heure de sexte fait rentrer les habitants chez eux. Vous irez jusqu’à demain auprès des autres lépreux. Ne craignez rien. Suivez-moi. Tiens, femme… » ajoute-t-il en lui donnant son manteau pour qu’elle puisse se couvrir.

Un peu craintifs, un peu abasourdis, les quatre anciens lépreux le suivent comme quatre agneaux. Ils parcourent ce qui reste de la vallée du Hinnom, traversent la route et se dirigent vers Siloan, cet autre triste emplacement de lépreux. Jésus s’arrête au pied des talus et commande :

« Montez les avertir que, demain, je serai ici à la première heure. Allez et faites la fête avec eux en annonçant le Maître de la Bonne Nouvelle. »

Il leur fait remettre tout ce qui reste de nourriture et les bénit avant d’en prendre congé…

« Allons, maintenant. L’heure de sexte est déjà passée » dit Jésus en faisant demi-tour pour revenir sur la voie basse qui mène à Béthanie.

Mais aussitôt, un cri le rappelle :

« Jésus, Fils de David, aie aussi pitié de nous !

– Ils n’ont pas attendu l’aube, eux, constate Pierre.

– Allons les trouver. Il est rare que je puisse faire du bien sans que ceux qui me haïssent troublent la paix des bénéficiaires ! » répond Jésus.

Et il revient sur ses pas en tenant sa tête droite vers les trois lépreux de Siloan qui se sont présentés sur le terre-plein de la petite colline et qui répètent leur cri, aidés par ceux qui sont déjà guéris et se tiennent derrière eux.

Jésus se contente de tendre les mains et de dire :

« Qu’il vous soit fait comme vous demandez. Allez et vivez dans les voies du Seigneur. »

Il les bénit tandis que la lèpre s’efface de leurs corps comme fond au soleil une légère couche de neige. Puis Jésus se hâte de partir, suivi par les bénédictions des miraculés qui, de leur terre-plein, tendent les bras en une étreinte qui paraît plus vraie que si elle était réelle.

536.7

Ils reprennent le chemin de Béthanie. Il suit le cours du Cédron qui tourne à angle aigu, à une centaine de pas après Siloan. Mais une fois ce virage passé, on peut voir l’autre partie de la route qui continue vers Béthanie. Or voici qu’arrive Judas, tout seul et marchant rapidement.

« Mais c’est Judas ! s’écrie Jude, le premier à l’apercevoir.

– Que fait-il ici ? Seul ? Ohé ! Judas ! » crie Pierre.

Judas se retourne tout d’un coup. Il est pâle, presque verdâtre. Pierre lui en fait la remarque :

« Aurais-tu vu le démon, pour être ainsi de la couleur des laitues ?

– Que fais-tu ici, Judas ? Pourquoi as-tu quitté tes compagnons ? » demande en même temps Jésus.

Mais Judas s’est déjà repris, et il explique :

« J’étais avec eux, quand j’ai rencontré un homme qui avait des nouvelles de ma mère. Regarde… » Il fouille dans sa ceinture, puis de la main il se frappe le front : « Je l’ai laissée chez cet homme ! Je voulais te faire lire cette lettre… Ou bien je l’ai perdue en route… Elle ne va pas très bien, elle a même été malade… Mais voilà nos compagnons… Ils se sont arrêtés. Ils t’ont vu… Maître, je suis bouleversé…

– Je le vois.

– Maître… voici les bourses. J’en ai fait deux pour… pour ne pas attirer l’attention… J’étais seul… »

Les apôtres Barthélemy, Philippe, Matthieu, Simon et Jacques, fils de Zébédée, un peu gênés, s’approchent de Jésus affectueusement, mais avec la conscience d’avoir failli.

Jésus les regarde et dit :

« Ne faites plus jamais cela. Il n’est pas bon pour vous de vous séparer. Si je vous le demande, c’est parce que je sais que vous avez besoin de vous soutenir mutuellement. Vous n’êtes pas assez forts pour pouvoir agir seuls. Unis, l’un freine ou soutient l’autre. Divisés…

– C’est moi, Maître, qui ai donné ce mauvais conseil, parce que nous nous sommes souvenus ensuite que tu avais dit de ne pas nous séparer, d’aller tous ensemble à Béthanie ; Judas était parti avec une raison valable, et nous n’avons pas pensé à l’accompagner. Pardonne-moi, Seigneur, reconnaît Barthélemy avec humilité et franchise.

– Bien sûr que je vous pardonne. Mais je vous le répète : ne le faites plus. Souvenez-vous qu’obéir préserve toujours au moins d’un péché : celui de se croire capable d’agir par soi-même. Vous ne savez pas à quel point le démon rôde autour de vous afin de saisir tous les moyens de vous faire pécher, et faire nuire à votre Maître, qui est déjà tellement persécuté ! Ces temps sont de plus en plus difficiles pour moi et pour l’Institution que je suis venu former. C’est pourquoi il faut prendre beaucoup de précautions pour éviter qu’elle soit, je ne dis pas blessée et tuée, car elle ne le sera jamais jusqu’à la fin des siècles, mais traînée dans la boue. Ses adversaires vous regardent attentivement, ils ne vous perdent jamais de vue, de même qu’ils soupèsent tous mes actes et toutes mes paroles pour avoir de quoi me dénigrer. Si vous vous montrez querelleurs, divisés, imparfaits de quelque manière que ce soit — et même si ça n’a guère d’importance — eux rassemblent et déforment ce que vous avez fait, pour le lancer comme du fiel, en guise d’accusation contre moi et mon Eglise qui est en train de se former. Vous le voyez ! Je ne vous fais pas de reproches, mais je vous donne des conseils pour votre bien. Ah ! ne savez-vous pas, mes amis, qu’ils caricatureront même ce qu’il y a de meilleur et le présenteront pour pouvoir m’accuser avec un semblant de justice ? Allons, donc : à l’avenir, soyez plus obéissants et plus prudents. »

Les apôtres sont tout émus par la douceur de Jésus. Judas ne cesse de changer de couleur. Il reste humblement un peu en arrière de tous, jusqu’à ce que Pierre lui dise :

« Que fais-tu là ? Tu n’as pas plus de torts que les autres. Viens donc devant avec nous. »

Et il est bien forcé d’obéir.

536.8

Ils marchent rapidement car, bien que le soleil brille, il y a une légère bise qui les invite à hâter le pas pour se réchauffer. Et ils ont déjà fait un bout de chemin quand Nathanaël, qui a froid et le dit en s’emmitouflant plus que jamais dans son manteau, remarque que Jésus n’a que son seul vêtement :

« Maître, qu’as-tu fait de ton manteau ?

– Je l’ai donné à une lépreuse. Nous avons guéri et consolé sept lépreux.

– Mais tu dois avoir froid ! Prends le mien » dit Simon le Zélote, en ajoutant : « Dans les tombeaux glacials, je me suis habitué au vent d’hiver.

– Non, Simon. Regarde ! Voilà déjà Béthanie. Nous serons bientôt dans la maison, et je n’ai pas du tout froid. J’ai eu aujourd’hui beaucoup de joie spirituelle, et elle est plus agréable qu’un chaud manteau.

– Mon frère, tu nous attribues des mérites que nous n’avons pas. C’est toi, pas nous, qui as guéri et consolé… dit Jude.

– Vous avez préparé les cœurs à avoir foi dans le miracle. Vous avez donc avec moi et comme moi aidé à guérir et consoler. Si vous saviez comme je me réjouis de vous associer à moi en toutes mes œuvres ! Ne vous rappelez-vous pas les paroles de mon cousin Jean, fils de Zacharie : “ Il faut qu’il croisse et que je diminue ” ? Il disait cela à juste titre, car tout homme, si grand soit-il, fût-ce même Moïse et Elie, s’assombrit comme une étoile enveloppée par les rayons du soleil à l’apparition de Celui qui vient des Cieux et qui est plus grand que tout homme, puisqu’il est Celui qui vient du Père très saint. Quant à moi, je suis le fondateur d’un Organisme qui durera autant que les siècles et qui sera saint comme son Fondateur et Chef, d’un Organisme qui durera pour me représenter, et ne fera qu’un avec moi, de même que les membres et le corps de l’homme ne font qu’un avec la tête qui les domine ; eh bien ! moi aussi je dois dire : “ Il faut que ce corps s’illumine et que, moi, je perde de mon éclat. ” Vous devrez me continuer. Moi, bientôt, je ne serai plus parmi vous, ici sur terre, matériellement, pour diriger mes apôtres, les disciples et ceux qui me suivent… Je serai, cependant, spirituellement avec vous, toujours, et vos âmes sentiront mon Esprit, elles recevront ma lumière. Mais vous devrez paraître en première ligne, lorsque je serai retourné là d’où je suis venu. C’est pour cela que je m’applique graduellement à vous préparer à avoir le premier rôle. Vous me faites observer parfois : “ Tu nous envoyais davantage en mission, dans les premiers temps. ” Vous deviez être connus. Maintenant que vous l’êtes, maintenant que, pour ce petit coin de la terre, vous êtes déjà “ les Apôtres ”, je vous garde toujours unis à moi, participant à toute mon action, de façon que le monde dise : “ Il les a associés aux œuvres qu’il accomplit, parce qu’ils resteront après lui pour le continuer. ” Oui, mes amis. Vous devez être toujours plus en avant, devenir plus éclairés, me continuer, être moi, pendant que moi, comme une mère qui lentement cesse de soutenir son petit enfant qui a appris à marcher, je me retire… Ce passage ne doit pas être brusque. Les petits du troupeau, les humbles fidèles en seraient effrayés. Je les passe doucement de moi à vous, pour qu’ils n’aient pas l’impression d’être seuls, même un seul instant. Et vous, aimez-les beaucoup, comme moi je les aime. Aimez-les en souvenir de moi, comme je les ai aimés… »

536.9

Perdu dans ses pensées intimes, Jésus se tait. Il en sort seulement quand, un peu en dehors de Béthanie, il rencontre les apôtres, qui arrivent par l’autre chemin. Une fois réunis, ils continuent vers la maison de Lazare. Jean annonce qu’ils sont déjà attendus, car les serviteurs les ont vus, et il ajoute que Lazare est très malade.

« Je le sais. C’est pour cela que je vous ai annoncé que nous resterons dans la maison de Simon. Mais je n’ai pas voulu m’éloigner sans le saluer encore une fois.

– Mais pourquoi ne le guéris-tu pas ? Ce serait juste ! Tu laisses tous tes meilleurs serviteurs mourir. Pour ma part, je ne comprends pas… lance Judas, toujours audacieux, même dans ses meilleurs moments.

– Il n’est pas nécessaire que tu comprennes à l’avance.

– Bien sûr, ce n’est pas nécessaire. Mais sais-tu ce que disent tes ennemis ? Que tu guéris quand tu peux, pas quand tu veux, que tu protèges quand tu peux… Ne sais-tu pas que ce vieillard de Terça est déjà mort ? Et mort assassiné ?

– Mort ? Qui ? Eli-Hanna ? Comment ? » demandent-ils tous avec curiosité.

Pierre est le seul à vouloir en savoir plus :

« D’ailleurs, comment le sais-tu ?

– Je l’ai appris par hasard tout à l’heure, dans la maison où je suis allé, et Dieu sait que je ne mens pas. Il paraît que c’est un voleur, arrivé en qualité de marchand, qui l’a tué au lieu de payer sa place…

– Pauvre vieux ! Quelle vie malheureuse ! Quelle triste mort ! Tu ne réagis pas, Maître ? s’étonnent plusieurs.

– Il n’y a rien à dire, sinon que ce vieil homme a servi le Christ jusqu’à sa mort. S’il pouvait en être ainsi de tous !

– Dis un peu, fils d’Alphée, n’est-ce pas ce que tu prévoyais ? demande Pierre à Jude.

– C’est possible. Un fils qui chasse son père par haine, et une haine de cette nature, peut être capable de tout. Mon Frère, elles sont bien vraies tes paroles[2] : “ Le frère s’opposera à son frère et le père à ses enfants. ”

– Oui. Et qui agira ainsi croira servir Dieu. Ils ont des yeux aveugles, des cœurs endurcis, une âme sans lumière. Et pourtant vous devrez les aimer, dit Jésus.

– Mais comment ferons-nous pour aimer ceux qui nous traiteront ainsi ? Ce sera déjà beaucoup si nous ne réagissons pas et si nous supportons leurs actions avec résignation… s’exclame Philippe.

– En temps voulu, je vous donnerai un exemple qui vous instruira. Et si vous m’aimez, vous m’imiterez.

536.10

– Voici Maximin et Sarah. Lazare doit aller bien mal, si les sœurs ne viennent pas à ta rencontre ! » remarque Simon le Zélote.

Les deux serviteurs accourent et se prosternent. Leurs visages, et même leurs vêtements, laissent transparaître cet aspect abattu qu’impriment la douleur et la lassitude aux membres des familles où on lutte contre la mort. Ils se bornent à dire : “ Maître, viens… ” mais avec un air affligé plus expressif qu’un long discours. Puis ils s’empressent de conduire Jésus à la porte du petit appartement de Lazare, tandis que les autres serviteurs s’occupent des apôtres.

Au léger coup contre la porte, Marthe accourt, l’entrouvre et passe dans l’entrebâillement son visage amaigri et pâle :

« Maître ! Viens. Béni sois-tu ! »

Jésus entre, traverse la pièce qui précède celle du malade, et entre dans la chambre. Lazare dort. Lazare ? C’est un squelette, une momie jaunâtre qui respire… Son visage a les traits d’une tête de mort, et le sommeil révèle encore davantage combien il est ravagé, déjà décharné cadavérique. Sa peau cireuse et tirée luit aux angles pointus des pommettes, des mâchoires, sur le front, sur les orbites tellement creusées qu’elles semblent sans yeux, sur le nez tranchant qui semble démesurément allongé, tant le contour des joues s’est effacé. Les lèvres sont pâles au point de disparaître, et il semble qu’elles ne puissent se fermer sur les deux rangées de dents à moitié découvertes, entrouvertes… C’est déjà un visage de mort.

536.11

Jésus s’incline pour regarder. Il se redresse, se tourne vers les deux sœurs qui le regardent, toute leur âme concentrée dans leurs yeux, âme douloureuse, âme pleine d’espoir. Il leur fait un signe, et sans bruit sort dans la petite cour qui précède les deux pièces. Marthe et Marie le suivent. Elles ferment la porte derrière elles.

Tous trois seuls entre ces quatre murs, sous le ciel bleu, ils se regardent en silence. Les sœurs n’arrivent même plus à parler, encore moins à exprimer leur demande.

Mais Jésus prend la parole :

« Vous savez qui je suis. Moi, je sais qui vous êtes. Vous savez que je vous aime. Moi, je sais que vous m’aimez. Vous connaissez ma puissance. Moi, je connais votre foi en moi. Vous savez aussi, et toi particulièrement Marie, que plus on aime et plus on obtient. C’est aimer que de savoir espérer et croire au-delà de toute mesure et de toute réalité qui puisse démentir la foi et l’espérance. Eh bien, pour ces raisons, je vous dis de savoir espérer et croire en dépit de toute réalité contraire. Vous me comprenez ? Je dis : sachez espérer et croire en dépit de toute réalité contraire. Je ne puis m’arrêter que quelques heures. Le Très-Haut sait combien, comme homme, je voudrais m’arrêter, ici avec vous, pour l’aider et le consoler, vous assister et vous réconforter. Mais comme Fils de Dieu, je sais qu’il est nécessaire que je m’en aille, que je m’éloigne… Que je ne sois pas ici quand… vous me désirerez plus que l’air que vous respirez. Un jour, bientôt, vous en comprendrez les raisons, qui actuellement peuvent vous paraître cruelles. Ce sont des raisons divines. Elles sont douloureuses pour moi en tant qu’homme, comme pour vous. Douloureuses maintenant. Maintenant, parce que vous ne pouvez en embrasser la beauté et la sagesse, et moi je ne puis vous le révéler. Quand tout sera accompli, alors vous comprendrez et vous vous réjouirez… Ecoutez : quand Lazare sera… mort — ne pleurez pas ainsi ! — faites-moi appeler immédiatement. En attendant, occupez-vous des funérailles et invitez beaucoup de monde, comme il convient pour Lazare et pour votre maison. C’est un grand juif. Peu l’estiment pour ce qu’il est. Mais il est plus grand que beaucoup aux yeux de Dieu… Je vous ferai savoir où je suis afin que vous puissiez toujours me trouver.

– Mais pourquoi n’être pas ici, au moins à ce moment-là ? Nous nous résignons, oui, à sa mort… Mais toi… Mais toi… Mais toi… »

Marthe sanglote, ne pouvant rien dire de plus, étouffant ses larmes dans ses vêtements…

Marie, au contraire, regarde Jésus, fixement, comme hypnotisée… mais elle ne pleure pas.

« Sachez obéir, sachez croire, espérer… sachez dire toujours oui à Dieu… Lazare vous appelle… Allez-y. Je vais venir bientôt… Et si je n’ai plus la possibilité de vous parler à part, rappelez-vous ce que je vous ai dit. »

Et tandis qu’elles rentrent en toute hâte, Jésus s’assied sur un banc de pierre et prie.

536.1

Jesus with Peter and Judas Thaddeus is walking fast in a gloomy stoney place, on one side of the town. As I cannot see the green olive-grove, but I only see the hill, or rather the hills with lit­tle or no greenery to the west of Jerusalem, among which is the gloomy Golgotha, I think that I am outside the eastern side of the town.

«We shall be able to give them something with what we pur­chased. It must be terrible to live in the sepulchres in winter» says Thaddeus who is laden with parcels just like Peter.

«I am glad we went to the freedmen as we received this money for the lepers. Poor wretches! During these feast days no one thinks of them. Everyone is enjoying himself… they will remember their lost homes… Alas! If they only believed in You! Will they believe, Master?» asks Peter, who is always so simple and so attached to his Jesus.

«Let us hope so, Simon, let us hope so. Let us pray in the meantime…» And they proceed praying.

536.2

The gloomy Hinnon valley appears with its sepulchres of living beings.

«Go ahead and supply them» says Jesus.

The two go on speaking in loud voices. The faces of lepers appear at the openings of caves or shelters.

«We are disciples of Rabbi Jesus» says Peter. «He is coming and has sent us to assist you. How many are you?

«Seven here. Three on the other side, beyond En Rogel» says one on behalf of everybody.

Peter opens his bundle and Thaddeus his. They make ten por­tions. Bread, cheese, butter, olives. The oil, where can they put the oil that is in a little jar?

«One of you should bring a vessel. Over there, at the rock. You will divide the oil among you, like brothers and in the name of Jesus, Who preaches love for our neighbour» says Peter.

Meanwhile a leper comes down limping towards them near a large rock, and he lays a chipped jug on it. He looks at them while they pour oil into it and as he is greatly surprised he asks: «Are you not afraid to be so close to me?» In fact only the rock is between the two apostles and the leper.

«We are only afraid of offending love. He sent us here telling us to assist you, because those who follow the Christ must love as the Christ loves. May this oil open your hearts, may it give them light as if it were already burning in the lamps of your hearts. The time of Grace has come for those who hope in the Lord Jesus. Have faith in Him. He is the Messiah and He heals bodies and souls. He can do everything because He is the Immanuel[1]» says Thaddeus with his usual imposing dignity.

The leper is standing with the little jug in his hands looking at him as if he were enchanted. He then says: «I know that Israel has her Messiah, because the pilgrims who come to town looking for Him, speak of Him and we hear their conversation… But I have never seen Him as I came here only recently. And do you think that He would cure me? Among us there are some who curse Him and some who bless Him, and I do not know which I should believe.»

«Are those who curse Him good people?»

«No, they are cruel and they maltreat us. They want the best places and the biggest portions. In fact we do not know whether we shall be able to stay here because of that.»

«So you can see that only those who are the guests of hell hate the Messiah. Because hell realises that it is already defeated by Him and consequently it hates Him. But I tell you that He is to be loved, and with faith, if we want to receive Grace from the Most High here and hereafter» says Thaddeus again.

«If I want to have Grace! I have been married two years and I have a little son who does not know me. I became leprous only a few months ago, as you can see.»

In fact he has only a few stains.

«Then apply to the Master with faith.

536.3

Look! He is coming. Tell your companions and come back here. He will pass by and will cure you.»

The man waddles up the slope and calls: «Uriah! Joab! Adina! And also you who do not believe. The Lord is coming to save us.»

One, two, three lepers appear: three wrecks come forward look­ing more and more dreadful. The woman just shows herself. She is a living horror… Perhaps she is weeping and speaking, but it is not possible to understand anything, because her voice sounds like a yelp coming from what was a mouth and now is nothing but two horrible uncovered jaws devoid of teeth…

«Yes. I tell you that they asked me to come and call you, because He is coming to cure us.»

«No! I am not coming because I did not believe Him the other times He came… and He will not listen to me any more… in any case I cannot walk» the woman says more distinctly, with I wonder how much difficulty. She even helps herself with her fingers to hold the edges of her lips to make herself understood.

«We will take you, Adina…» say the two men and the one with the little jug.

«No… No… I sinned too much…» and she collapses where she was…

Three more come running, as best they can, and say overbearing­ly: «Give us the oil at once and then you can also go to Beelzebub if you wish so.»

«The oil is for everybody!» says the man with the little jug striv­ing to defend his little treasure. But the three violent cruel men overwhelm him and snatch the jug from his hands.

«There you are! It is always the same… A little oil after such a long time!… But the Master is coming… Let us go to Him. Are you really not coming, Adina?»

«I dare not…»

536.4

The three come down towards the rock. They stop waiting for Jesus, as the apostles have gone to meet Him. And when He ar­rives there, they shout: «Have mercy on us, Jesus of Israel! We hope in You, Lord!»

Jesus raises His head, He looks at them in His incomparable way. He asks: «Why do you want your health again?»

«For the sake of our families, for ourselves… It is dreadful to live here…»

«You are not only bodies, My children. You have also a soul, and it is worth more than your bodies. You must be anxious about it. So do not ask to be cured only for yourselves and your families, but to have time to become acquainted with the Word of God, and to live deserving His Kingdom. Are you just? Become more so. Are you sinners? Ask to live so that you may have time to make amends for the wrong you have done… Where is the woman? Why is she not coming? Dare she not confront the face of the Son of man, when she was not afraid of having to meet the face of God when she was sinning? Go and tell her that she was forgiven much because of her repentance and resignation and that the Eternal Father has sent Me to absolve all the sins of those who have repented their past.»

«Master, Adina is no longer able to walk.»

«Go and help her to come down here. And bring another vessel. We will give you some more oil.»

«Lord, there is just enough for the others» Peter says in a low voice while the lepers are going to get the woman.

«There will be enough for everybody. Have faith. Because it is easier for you to have faith in that, than for those poor wretches to believe that their bodies will become as they were.»

In the meantime, up in the caves a fight has started among the three bad lepers for the sharing of the food…

536.5

The woman is carried down in the arms of her companions… and she is moaning, as much as it is possible for her, saying: «Forgive me! My past! For not asking to be forgiven in the past!… Jesus, Son of David, have mercy on me!»

They lay her at the foot of the rock. And on the rock they put a kind of pot that is all chipped.

Jesus asks: «What do you say? Is it easier to increase the oil in a vase or to make flesh grow where leprosy has destroyed it?»

There is silence… Then the woman says: «The oil. But also the flesh, because You can do everything. And You can also give me the soul of my early years. I believe, Lord.»

Oh! the divine smile! It is like a light that spreads gently; cheer­fully, softly! And it is in His eyes, and on His lips, and in His voice as He says: «Because of your faith be cured and forgiven. And you as well. And take this oil and food to nourish yourselves. And show yourselves to the priest, as it is prescribed. Tomorrow, at dawn I will come back with some clothes, and you will be able to go being decently dressed. Cheer up! Praise the Lord. You are no longer lepers!»

Only then the four, who so far have had their eyes fixed on the Lord, look at themselves and shout their amazement. The woman would like to stand up, but she is too naked to do so. Her dress hangs in bits and pieces and what is nude is more than what is covered. Half hidden by the rock, out of a sense of decency not only with regard to Jesus, but also to His companions, her face recom­posed in its features, which are only thinned by privations, she is weeping saying without interruption: «Blessed! Blessed! Blessed!» and her blessings mingle with the horrible blasphemies of the three wicked lepers, who are now furious seeing that the others have been cured. And they fling dirt and stones.

536.6

«You cannot remain here. Come with Me. No harm will befall you. Look. The road is empty. At the sixth hour all the people are at home. You will stay with the other lepers, until tomorrow. Be not afraid. Follow Me. Take this, woman» and He gives her His mantle to cover herself.

The four, a little frightened and amazed, follow Him like four lambs. They cover the remainder of the Hinnom valley. They cross the road and go towards the Siloam pool, another gloomy place for lepers.

Jesus stops at the foot of the cliff and says: «Go up and tell them that I shall be here at the first hour tomorrow. Go and rejoice with them and preach the Master of the Gospel.» He tells the apostles to give them all the food they have and He blesses them before dismissing them…

«Let us go now. It is already past the sixth hour» says Jesus turn­ing round to go back to the lower Bethany road.

But He is soon called back by a cry: «Jesus, Son of David, have mercy also on us.»

«These ones have not waited for dawn…» remarks Peter.

«Let us go to them. So few are the hours in which I can do some good, without the peace of the people I help being disturbed by those who hate Me!» replies Jesus and He retraces His steps look­ing at the three lepers of Siloam, who are looking out from the ter­race of the little hill and are repeating their cry, helped by those who have already been cured and who are behind them.

Jesus does nothing but stretch out His hands and say: «Let it be done to you as you ask. Go and live in the ways of the Lord.» He blesses them while leprosy vanishes from their bodies as a thin layer of snow melts in the sun. And Jesus runs away followed by the blessings of those who have been cured and who from their ter­race are stretching out their arms in an embrace more real than if they had physically done so.

536.7

They go back to the Bethany road, that follows the course of the Kidron and forms a hairpin bend after a few hundred steps from Siloam. But when they have passed the bend and they can see the other part of the road to Bethany, there is, all alone, Judas of Kerioth, walking fast.

«It’s Judas!» exclaims Thaddeus who is the first to see him.

«Why are you here? Alone? Hey! Judas!» shouts Peter.

Judas turns around suddenly. He is wan, even greenish. Peter says to him: «Have you seen the devil, that you are the same colour as lettuce?»

«What are you doing here, Judas? Why did you leave your compa­nions?» Jesus asks at the same time.

Judas has recovered his self-control. He says: «I was with them. I met a man who had news of my mother. Look…» He searches his belt. He strikes his forehead with his hand saying: «I left it at that man’s house! I wanted You to read the letter… Or I lost it on the way… She is not very well. Or rather she is ill… But there are our companions over there… They have stopped. They have seen You… Master, I am upset…»

«I can see that.»

«Master… here are the purses. I made two… to avoid attracting attention… I was alone…»

The apostles Bartholomew, Philip, Matthew, Simon and James of Zebedee are somewhat embarrassed. They approach Jesus affec­tionately, but they are aware of having made a mistake.

Jesus looks at them and says: «Do not do it again. It is not right for you to part from one another. If I tell you not to do it, it is because I know that you need to support one another. You are not strong enough to be able to do things by yourselves. When united, one checks or supports the other. If you are divided…»

«It was I, Master, who gave the wrong advice, because later we remembered that You had told us not to divide, but to go all together to Bethany, and Judas had gone away with a just reason, and we did not think of going with him. Forgive me, Lord» says Bartholomew humbly and frankly.

«Yes, I forgive you. But I repeat: do not do it again. Consider that obedience always saves one from at least one sin: that of presuming of being able to do by oneself. You do not know how much the demon moves around you seeking all pretexts to make you sin and make you harm your Master, Who is already so fiercely persecuted. These days are becoming more and more difficult for Me and for the organism that I have come to form. So, much care is required, so that I shall not say it may not be wounded and killed – because that will never happen until the end of time – but it may not be stained with dirt. Its enemies are watching you careful­ly, they never lose sight of you, and likewise they weigh every ac­tion and word of Mine. And they do that to have valid reasons for disparagement. If they see that you are quarrelsome, divided somehow imperfect, even in trifling matters, they pick up and adulterate what you have done and they will make use of it like dirt and a charge against Me and My Church that is now forming. See! I am not reproaching you, but I am advising you. For your own good. Oh! My friends, do you not know that they will adulterate even the best things and will exhibit them in order to be able to accuse Me with an appearance of justice. So, in future be more obedient and prudent.»

The apostles are all moved by Jesus’ kindness.

Judas changes colour continuously. He is dejected, a little behind them all, until Peter says to him: «What are you doing there? You are not to be blamed more than the others. So come for­ward and stay with the others» and he is obliged to obey.

536.8

They are walking fast because, although there is sunshine, a cold breeze is blowing making them walk fast to warm them­selves. And they have already walked a good distance when Nathanael, who is cold and it is obvious as he wraps himself up in his mantle more than ever, notices that Jesus has on only His tunic: «Master, but what have You done with Your mantle?»

«I gave it to a leprous woman. We cured and consoled seven lepers.»

«But You must be cold. Take mine» says the Zealot and he adds: «I became accustomed to the winter winds in the ice-cold sepulchres.»

«No, Simon. Look. There is Bethany. We shall soon be in the house… And I am not cold at all. I have had much spiritual joy today and it is more comfortable than a warm mantle.»

«Brother, You reward us for what we have not done. You cured and consoled, not us…» says Thaddeus.

«You prepared their hearts to have faith in the miracle. So with Me and like Me you helped to cure and comfort. If you knew how I rejoice in associating you with Me in every deed! Do you not remember the words of My cousin John of Zacharias: “He must grow greater, I must grow smaller”? He rightly said so, because every man, no matter how great he may be, even if he were Moses or Elijah, becomes obscured like a star assailed by sunbeams, at the appearance of Him Who comes from Heaven and is greater than any man, because He comes from the Most Holy Father. But I also, the Founder of an Organism that will last throughout the cen­turies and will be as holy as its Founder and Head, of an Organism that will last to represent Me, and will be one thing with Me, just as the limbs and body of man are one thing with the head dominating them, I must say: “That body must brighten and I must grow dim”. You will have to continue My work. Soon I shall no longer be here among you, here on the Earth, here materially, to guide My apostles, disciples and followers. However, I shall always be with you spiritually, and your spirits will perceive My Spirit and receive My Light. But you will have to appear, in the first line, while I have gone back whence I came. That is why I am preparing you in stages to appear as the first. At times you ob­ject saying: “In the early days You sent us out more”. You had to be known. Now that you are known, now that for this little spot of the Earth you already are “the Apostles”, I always keep you near Me, taking part in every action of Mine, so that the world may say: “He makes them His partners in the work He accomplishes, because they will remain after Him to continue His work”. Yes, My friends. You will have to proceed more and more, and become enlightened, continuing Me, being Me, whereas I, like a mother who little by little stops supporting her little son who has learned to walk, will withdraw… The handing over from Me to you must not take place violently. The little ones of the flock and the humble believers would be frightened. I will hand them over to you gently so that they may not feel to be alone even for one moment. And love them so much, as I love them. Love them in memory of Me as I have loved them…»

536.9

Jesus becomes silent engrossed in thought. And He comes back to reality only when, a little outside Bethany, He meets the other apostles who have come along the other road. They proceed all together towards Lazarus’ house. John says that they are already expected, because the servants have seen them. He also says that Lazarus is dangerously ill.

«I know. That is why I told you that we shall be staying in Simon’s house. But I did not want to go away without greeting him again.»

«But why do You not cure him? It would also be fair. You let all Your best servants die. I do not understand…» says the Iscariot, who is always bold, even at his best moments.

«There is no need for you to understand in advance.»

«Yes. There is no need. But do You know what Your enemies are saying? That You cure when You can, not when You want, that You protect when You can… Do You not know that that old man from Tekoah is already dead? And that he was killed?»

«Dead? Who? Elianna? How?» they all ask excitedly. Peter only asks: «And how do you know?»

«I heard of it by chance a short while ago in the house where I was, and God knows whether I am lying. Apparently it was a highwayman, who came down in the guise of a merchant, and in­stead of paying the toll, killed him…»

«Poor old soul! What an unhappy life! What a sad death! Are You not saying anything, Master?» many say.

«I have nothing to say except that the old man served the Christ until his death. I wish they were all like him!»

«Tell me, son of Alphaeus, is it not as you said, by any chance, eh?» Peter asks Thaddeus.

«It may well be. A son who expels his father out of hatred, and of this kind of hatred, may be capable of anything. Brother, Your words[2] are quite true: “And a brother will be against his brother, and a father against his children”.»

«Yes, and those who do that will think that they are serving God. Their eyes are blind, their hearts hard, their spirits without light. And yet you will have to love them» says Jesus.

«But how shall we be able to love those who treat us thus? It will be a great effort if we do not react and we put up with their behaviour with resignation…» exclaims Philip.

«I will set an example for you and it will teach you. In due time. And if you love Me, you will do what I do.»

536.10

«Here are Maximinus and Sarah. Lazarus must be very ill if his sisters do not come to meet You!» remarks the Zealot.

The two rush towards them and prostrate themselves. Also in their faces and garments there is the modest appearance impressed by sorrow and fatigue on the members of families struggling with death. They only say: «Master, come…» but so sorrowfully that those two words are more expressive than a long speech. And they lead Jesus at once to the door of Lazarus’ little flat, while other servants take care of the apostles.

At their light knocking Martha comes to the door and half-opens it, showing her thinned wan face through the opening: «Master! Come. May You be blessed!»

Jesus goes in, and He enters Lazarus’ room after going through the one preceding it. Lazarus is sleeping. Lazarus? A skeleton, a yellowish mummy that is breathing… His face is already a skull, and in his sleep its destruction, that has already turned it into a head unfleshed by death, is even more visible. His waxen drawn skin shines on the sharp angles of his cheek-bones and jaws, on his forehead, on his eye-sockets that are so deeply sunken as to seem devoid of eyes, on his sharp nose that seems to have grown ex­cessively so much the contour of the cheeks has vanished. His lips are so pale that they are hardly visible, and seem unable to close on the two rows of his half-covered open teeth… already the face of a dead man.

536.11

Jesus bends to look at him. He draws Himself up. He looks at the two sisters who look at Him with their souls concentrated on their eyes, two sorrowful hopeful souls. He nods to them and goes out noiselessly, into the little yard outside the two rooms. Martha and Mary follow Him. They close the door after them.

All alone, the three of them, inside the four walls, with the blue sky above them, look at one another. The sisters are not even able to ask, or to speak. But Jesus speaks: «You know Who I am. I know who you are. You know that I love you. I know that you love Me. You are aware of My power. I am aware of your faith in Me. You also know, and you in particular, Mary, that the more one love the more one achieves. To be able to hope and to believe above all limits and above all realities that disprove faith and hope is to love. Well, for the sake of that, I tell you to hope and believe against all contrary realities. Do you understand Me? I say: hope and believe against every contrary reality. I can only stop for a few hours. As the Man, the Most High knows how much I would like to stop here with you, to assist and comfort him, to assist and comfort you. But as the Son of God I know that I must go, that I must depart… That I must not be here when… you will be wanting Me more than the air you breathe. One day, very soon, you will understand these reasons that now may seem cruel to you. They are divine reasons. Sorrowful to Me Man, as they are to you. Sor­rowful now. Because now you cannot embrace and contemplate their beauty and wisdom. Neither can I reveal them to you. When everything is accomplished, then you will understand and rejoice… Listen. When Lazarus is… dead. Do not see thus! Then send for Me at once. And in the meantime make the arrangements for the funeral inviting a large number of people, as becomes Lazarus and your household. He is a great Hebrew. Few people ap­preciate him for what he is. But he exceeds many in the eyes of God… I will let you know where I am, so that you can always find Me.»

«But why not be here at least at that moment? We are resigning ourselves to his death, yes… But You… But You… But You…» Martha sobs not being able to say anything else, stifling her tears in her dress…

Mary instead gazes at Jesus, as if she were hypnotised… and does not weep.

«Obey, believe, hope… always say yes to God… Lazarus is call­ing you… Go. I will come in a moment… And if I should not have the opportunity to speak to you aside, remember what I told you.»

And while they go in hastily, Jesus sits down on a stone bench and prays.


Notes

  1. il est l’Emmanuel, comme en : Esaïe 7,14 ; 8,8 ; qui signifie “ Dieu est avec nous ”, comme en : Psaume 46,8.12 ; Esaïe 8,10. Déjà dit en 76.7.9 et en 478.9.
  2. tes paroles, en 265.8.

Notes

  1. is the Immanuel, as in: Isaiah 7,14; 8,8; which means “God is with us”, as in: Psalm 46,8.12; Isaiah 8,10. Already in 76.7.9 and in 478.9.
  2. Your words, in 265.8.