Les voici parvenus aux dernières maisons. Sur le seuil d’une porte se tient une femme d’environ quarante ans. Elle paraît attendre quelqu’un. Quand elle voit Jésus, elle est sur le point d’avancer, puis elle s’arrête et baisse la tête en rougissant.
« C’est une parente, c’est l’épouse de Simon, fils d’Alphée » dit Jésus à l’apôtre.
La femme paraît être sur des charbons ardents, en proie à des sentiments opposés. Elle change de couleur, lève les yeux et les baisse. Tout son visage exprime un désir de parler que quelque motif retient.
« Paix à toi, Salomé » lui dit, pour la saluer, Jésus qui est à sa hauteur.
La femme le regarde, comme étonnée par le ton affectueux de son parent, et elle répond, en rougissant encore davantage :
« Paix à… »
L’envie de pleurer l’empêche de finir la phrase. Elle couvre son visage en repliant son bras et elle pleure, angoissée, contre l’huisserie de la porte de la maison.
« Pourquoi pleures-tu ainsi, Salomé ? Ne puis-je rien faire pour te consoler ? Viens ici, dans ce coin, et confie-moi ce que tu as… »
Il la prend par le coude et la conduit dans une petite ruelle entre sa maison et le jardin d’une autre maison. Simon et Marziam, tout étonné, restent à l’entrée de la ruelle.
« Qu’est-ce que tu as, Salomé ? Tu sais que je t’aime bien, que je vous ai toujours aimés. Tous. Et qu’il en est toujours ainsi. Tu dois le croire et par conséquent avoir confiance… »
Les pleurs s’arrêtent comme pour écouter ces paroles et en comprendre le vrai sens, puis ils reprennent encore plus fortement, alternant avec des paroles décousues :
« Toi, oui… Nous… Pas moi, pourtant… Et pas même Simon… Mais lui, il est plus buté que moi… Moi, je lui disais… “ Appelle Jésus ”… Mais toute la ville est contre nous… contre toi… contre moi… contre mon enfant… »
Le moment tragique arrivé, les pleurs deviennent à leur tour tragiques. La femme se tord et gémit en se frappant le visage comme si la détresse la faisait délirer. Jésus lui prend les mains en disant :
« Non, ne fais pas cela. Je suis ici pour te consoler. Parle et moi, je ferai tout… »
La femme le regarde en écarquillant les yeux d’étonnement et de douleur. Mais l’espoir lui donne la force de parler, et elle dit posément :
« Même si Simon est coupable, auras-tu pitié de moi ? Vraiment ?… Oh, Jésus qui sauves tout le monde ! Mon enfant ! Alphée, le dernier, est malade… Il meurt !… Tu l’aimais, Alphée. Tu lui découpais des jouets dans le bois… Tu le soulevais pour qu’il cueille le raisin et les figues de tes arbres… et avant de partir pour… pour aller dans le monde, tu lui enseignais déjà tant de bonnes choses… ! Maintenant, tu ne le pourrais plus… Il est comme mort… Il ne mangera plus de raisin ni de figues. Il n’apprendra plus rien… »
Elle pleure à chaudes larmes.
« Salomé, calme-toi. Dis-moi ce qu’il a.
– Son ventre est très malade. Il a crié, eu des spasmes, déliré pendant bien des jours. Maintenant, il ne parle plus. C’est comme si on l’avait frappé à la tête. Il gémit, mais ne répond pas. Il ne sait même pas qu’il gémit. Il est livide. Il se refroidit déjà.