Los Escritos de Maria Valtorta

573. Départ pour Hennon, après une altercation

573. Partida para Enón después de un tira y afloja

573.1

Jésus est seul. Il médite, assis sous un chêne vert gigantesque qui a poussé sur une pente du mont Garizim qui domine Sichem. La ville, d’un blanc rosé sous le premier soleil, est située tout en bas, et s’étend sur les premières pentes du mont. Vue d’en haut, elle ressemble à une poignée de gros cubes blancs renversés par quelque grand enfant sur un pré vert incliné. Les deux cours d’eau près desquels elle s’élève forment un demi-cercle bleu argenté autour de la ville; puis l’un d’eux y pénètre, chantant et scintillant entre les maisons blanches, pour en ressortir et couler dans la verdure, apparaissant et disparaissant dessous les oliviers et dans les vergers luxuriants en direction du Jourdain. L’autre, plus modeste, court hors des murs, les lèche pour ainsi dire, irriguant les cultures maraîchères fertiles, puis il part abreuver des troupeaux de brebis blanches, qui paissent dans des prés que les fleurs des trèfles rougissent de leurs capitules.

Un vaste horizon s’ouvre en face de Jésus. Après une ondulation de collines de plus en plus basses, on aperçoit par une échappée la verte vallée du Jourdain et, au-delà, de l’autre côté du fleuve, les montagnes qui aboutissent au nord-est aux sommets caractéristiques de l’Auranitide. Le soleil, qui s’est levé derrière ces montagnes, a frappé trois nuages bizarres qui ressemblent à autant de rubans de gaze légère, disposés horizontalement sur le voile bleu turquoise du firmament, et la gaze légère des trois nuages longs et étroits a pris la couleur rose orangée de certains coraux précieux. Le ciel semble barré par cette grille aérienne, très belle. Jésus regarde fixement dans cette direction, l’air pensif. Qui sait même s’il la voit… Le coude appuyé sur le genou, la main soutenant le menton appuyé dans le creux de la paume, il contemple, réfléchit, médite. Au-dessus de lui, les oiseaux se livrent à un joyeux et bruyant manège de vols.

Jésus baisse les yeux sur Sichem, qui s’éveille peu à peu dans le soleil du matin. A présent, aux bergers et aux troupeaux qui étaient seuls d’abord à mettre un peu de vie dans ce panorama, se joignent les groupes de pèlerins, et au tintement des cloches des troupeaux se mêle celui des grelots des ânes, et puis des voix, ainsi que le bruit des pas et des paroles. Le vent apporte par vagues à Jésus la rumeur de la ville qui se réveille, des gens qui sortent du repos de la nuit.

573.2

Jésus se lève. Il quitte en soupirant sa place tranquille et descend rapidement, par un raccourci, vers la ville. Il y entre au milieu des caravanes de maraîchers et de pèlerins qui se hâtent, les premiers de décharger leurs denrées, les seconds de faire des courses avant de se mettre en route.

Dans un coin de la place du marché attend déjà le groupe formé par les apôtres et les femmes disciples, et autour d’eux les habitants d’Ephraïm, de Silo, de Lébona et un grand nombre de Sichem.

Jésus va vers eux, les salue, puis il dit à ceux de Samarie :

« Nous nous quittons maintenant. Rentrez chez vous. Rappelez-vous mes paroles et croissez dans la justice. »

Puis il se tourne vers Judas :

« As-tu remis, comme je te l’ai demandé, des aumônes aux pauvres de partout ?

– Oui, sauf à ceux d’Ephraïm, puisqu’ils en avaient déjà reçu.

– Alors partez. Faites en sorte que chaque pauvre soit soulagé.

– Nous te bénissons pour eux.

– Bénissez les femmes disciples. Ce sont elles qui m’ont donné l’argent. Allez. Que la paix soit avec vous. »

Ils s’en vont à regret, désolés. Mais ils obéissent.

573.3

Jésus reste avec les apôtres et les femmes disciples. Il leur dit :

« Je vais à Hennon. Je veux saluer la retraite où vivait Jean-Baptiste, puis je descendrai à la route de la vallée. Elle est plus commode pour les femmes.

– Ne vaudrait-il pas mieux, au contraire, prendre la route de Samarie ? demande Judas.

– Nous n’avons pas à craindre les voleurs, même si nous sommes sur un chemin voisin de leurs cavernes. Que celui qui veut venir avec moi, vienne. Ceux qui ne désirent pas m’accompagner à Hennon, resteront ici jusqu’au lendemain du sabbat. Ce jour-là, j’irai à Tersa, et ceux qui restent ici m’y rejoindront.

– Moi, vraiment… je préférerais rester. Je ne suis pas en bonne forme… je suis fatigué… déclare Judas.

– Cela se voit. Tu parais malade. Regards sombres, humeur sombre, et jusqu’à la peau. Je t’observe depuis quelque temps… dit Pierre.

– Pourtant, personne ne me demande si je souffre…

– Cela t’aurait-il fait plaisir ? Je ne sais jamais ce qui t’est agréable. Mais si cela te fait plaisir, je te le demande maintenant et je suis prêt à rester avec toi pour te soigner… lui répond Pierre patiemment.

– Non, non ! C’est seulement de la fatigue. Va, va ! Moi, je reste là où je suis.

573.4

– Je reste, moi aussi. Je suis âgée. Je me reposerai en te servant de mère, intervient Elise.

– Tu restes ? Tu avais dit… interrompt Salomé.

– Si tous y allaient, je venais moi aussi, pour ne pas rester seule ici. Mais étant donné que Judas reste…

– Mais alors je viens ! Je ne veux pas que tu te sacrifies, femme. Tu iras sûrement voir avec plaisir le refuge de Jean-Baptiste…

– Je suis de Bet-Çur et je n’ai jamais éprouvé le besoin d’aller à Bethléem pour voir la grotte où le Maître est né. Je le ferai quand je n’aurai plus le Maître. Je ne brûle donc pas du désir de connaître l’endroit où Jean vivait… Je préfère exercer la charité, sûre qu’elle a plus de valeur qu’un pèlerinage.

– Tu fais un reproche au Maître. Tu ne t’en aperçois pas ?

– Je parle pour moi. Lui y va, et il fait bien. Il est le Maître. Moi, je suis une vieille femme à qui les douleurs ont enlevé toute curiosité et à qui l’amour pour le Christ a enlevé le goût de tout ce qui n’est pas le servir.

– Alors, pour toi, c’est un service de m’espionner.

– Commets-tu des actes dignes de reproches ? On surveille ceux qui agissent mal, mais je n’ai jamais espionné personne, homme. Je n’appartiens pas à la famille des serpents. Et je ne trahis pas.

– Moi non plus.

– Dieu le veuille pour ton bien. Mais je n’arrive pas à comprendre pourquoi il t’est si odieux que je reste me reposer ici… »

573.5

Jésus, muet jusqu’alors, écoute au milieu des autres, étonnés de cette prise de becs. Il redresse la tête — qu’il tenait un peu inclinée — et dit :

« Suffit ! Le désir que tu as, une femme peut l’avoir à plus forte raison, qui plus est une femme âgée. Vous resterez ici jusqu’à l’aurore du lendemain du sabbat, puis vous me rejoindrez à Tersa. En attendant, va acheter ce qui peut être nécessaire pour ces jours-ci. Va, dépêche-toi ! »

Judas part, à contrecœur, acheter de la nourriture.

André s’apprête à le suivre, mais Jésus le prend par le bras :

« Reste. Il peut le faire tout seul. »

Jésus est très sévère.

Elise le regarde, puis va près de lui pour lui confier :

« Pardon, Maître, si je t’ai déplu.

– Je n’ai pas à te pardonner, femme. C’est plutôt à toi de pardonner à cet homme, comme s’il était ton fils.

– C’est avec ce sentiment que je reste près de lui… même s’il croit le contraire… Tu me comprends…

– Oui, et je te bénis. Et je t’assure que tu as eu bien raison de dire que les pèlerinages aux endroits où j’ai été deviendront une nécessité lorsque je ne serai plus parmi vous… une nécessité de réconfort pour votre âme. Pour le moment, il s’agit seulement de servir les désirs de votre Jésus. Or tu as compris l’un de mes désirs, puisque tu te sacrifies pour protéger un esprit imprudent… »

Les apôtres se regardent les uns les autres… Les femmes disciples aussi. Seule Marie reste toute voilée et ne lève pas la tête pour échanger quelque regard avec un autre. Marie de Magdala, debout comme une reine qui juge, n’a jamais perdu de vue Judas, qui tourne parmi les vendeurs ; elle a le regard courroucé et, sur sa bouche serrée, un pli méprisant. Son expression en dit plus que si elle parlait…

573.6

Judas revient. Il donne à ses compagnons ce qu’il a acheté, rajuste son manteau — dont il s’était servi pour porter les courses — et fait le geste de donner la bourse à Jésus.

Jésus la repousse de la main :

« Ce n’est pas nécessaire. Pour les aumônes, il y a encore Marie. A toi d’être bienfaisant ici. Il y a de nombreux mendiants qui descendent de tous côtés pour aller vers Jérusalem ces jours-ci. Donne, sans préventions et avec charité, en te rappelant que nous sommes tous pour Dieu des mendiants de sa miséricorde et de son pain… Adieu. Adieu, Elise. Que la paix soit avec vous. »

Il se retourne rapidement pour se mettre à marcher d’un pas décidé sur la route qui s’ouvre devant, sans donner à Judas le temps de le saluer…

Tous le suivent en silence. Ils sortent de la ville pour se diriger vers le nord-est, à travers une superbe campagne…

573.1

Jesús, solo, medita sentado debajo de una encina gigantesca nacida en las faldas del monte que domina a Siquem. La ciudad, rosicler con el primer sol, está abajo, extendida sobre las pendientes más bajas del monte. Parece, vista desde arriba, un puñado de grandes cubos blancos desbaratados por un niño gigante en un verde prado en declive. Los dos cursos de agua junto a los que está edificada dibujan un semicírculo azulplata oscuro entorno a la ciudad; luego, uno de los dos entra en ella e introduce su canto y su cabrilleo entre las casas blancas, para salir luego y correr entre el verde, apareciendo y desapareciendo por entre matas exuberantes de olivos y árboles frutales, hacia el Jordán. El otro, más modesto, permanece fuera de los muros de la ciudad; los lame casi; y riega los fértiles huertos, para correr luego a calmar la sed de rebaños de ovejas blancas que pastan en prados salpicados de la sangre de las cabecitas rojas de las flores del trébol.

El horizonte se abre anchuroso frente a Jesús. Detrás de ondulaciones de colinas cada vez más bajas, se ve, a través de una franja de horizonte, el valle verde del Jordán, y allende éste los montes de Transjordania, que terminan al nordeste en las originales cimas de la Auranítida. El Sol, que ha salido de tras ellos, incide ahora en tres caprichosas nubes semejantes a tres cintas de sutil gasa puestas horizontalmente sobre el velo turquesa del firmamento; y la leve gasa de las tres nubes largas y estrechas se ha puesto toda de un rosa anaranjado semejante al de ciertos corales de gran valor. El cielo parece vallado por este enrejado aéreo, bellísimo, que Jesús mira fijamente. Bueno, mira en esa dirección, absorto. ¿Quién sabe… a lo mejor, ni siquiera le ve! Apoyado el codo en la rodilla, sujetando con la mano el mentón hincado en el cuenco de la palma, mira, piensa, medita. Por encima de Él, los pájaros, chilladores, alborotan describiendo un alegre carrusel de vuelos.

Jesús baja los ojos hacia Siquem, que va despertándose con el sol matutino. Ahora, a los pastores y rebaños —los únicos que antes animaban el panorama— se unen los grupos de peregrinos, y al tintineo de las esquilas de las greyes se une el de los cascabeles de los borricos, y voces, y rumores de pasos y palabras. El viento, con sus ondas, trae hasta Jesús el ruido de la ciudad que se despierta, de la gente que deja el descanso nocturno.

573.2

Jesús se pone en pie. Con un suspiro deja este lugar sereno y baja a buen paso, por un atajo, hacia la ciudad, donde entra entre caravanas de hortelanos y peregrinos que se apresuran, los primeros, a descargar su género, los segundos, a comprar los productos de los primeros antes de ponerse en camino.

En un ángulo de la plaza del mercado están ya, en grupo, esperando, los apóstoles y las discípulas; en torno a ellos, los de Efraím, Silo y Lebona y muchos de Siquem.

Jesús va donde ellos. Los saluda. Luego dice a los de Samaria: «Y ahora vamos a dejarnos. Volved a vuestras casas. Recordad mis palabras. Creced en la justicia». Se vuelve hacia Judas de Keriot: «¿Has dado, como dije, para los pobres de todos los lugares?».

«Sí, lo he dado. Excepto a los de Efraím porque ya han recibido».

«Entonces marchaos. Ocupaos de que todos los pobres reciban un alivio».

«Nosotros te bendecimos por ellos».

«Bendecid a las discípulas. Son ellas las que me han dado el dinero. Marchaos. La paz sea con vosotros».

Y éstos se marchan; remolones, con pena… pero obedecen.

573.3

Jesús se queda con los apóstoles y las discípulas. Les dice: «Voy a Enón. Quiero saludar el lugar del Bautista. Luego bajaré al camino del valle. Es más cómodo para las mujeres».

«¿Y… no sería mejor ir por el camino de Samaria?» pregunta Judas Iscariote.

«Nosotros no tenemos por qué temer a los bandidos, aun yendo por un camino cercano a sus grutas. El que quiera venir conmigo que venga, el que no se sienta muy dispuesto a ir hasta Enón que se quede aquí hasta el día siguiente del sábado. Ese día iré a Tersa. El que se quede que se reúna después conmigo allí».

«Yo, la verdad… preferiría quedarme. No me encuentro muy bien… estoy cansado…» dice Judas Iscariote.

«Se ve. Tienes aspecto de enfermo. Turbio de humor, de mirada y de piel. Hace un tiempo que te observo…» dice Pedro.

«Pero ninguno me pregunta si sufro…».

«¿Te hubiera gustado? Yo no sé nunca lo que te gusta. Pero, si te satisface, te lo pregunto ahora. Y estoy dispuesto a quedarme contigo para cuidarte…» le responde pacientemente Pedro.

«¡No, no! Es sólo cansancio. Ve, ve. Yo me quedo aquí donde estoy».

573.4

«También me quedo yo. Soy anciana. Descansaré haciéndote de madre» dice al improviso Elisa.

«¿Tú te quedas? Habías dicho…» interrumpe Salomé.

«Si todos fuéramos, yo también iría, para no quedarme aquí sola. Pero dado que Judas se queda…».

«Pues entonces voy. No quiero sacrificarte, mujer. Estoy seguro de que irías con agrado a ver el refugio del Bautista…».

«Soy de Betsur y no he sentido nunca la necesidad de ir a Belén a ver la gruta donde nació el Maestro —estas cosas las haré cuando ya no tenga al Maestro—, así que fíjate tú si voy a estar ansiosa de ver el lugar donde estuvo Juan… Prefiero ejercer la caridad, porque estoy segura de que la caridad tiene más valor que un peregrinaje».

«¿No te das cuenta de que estás reprobando la actitud del Maestro?».

«Hablo por mí. Él va allí y hace bien. Él es el Maestro. Yo soy una vieja a la que los dolores le han quitado toda curiosidad, y el amor por Cristo le ha quitado todo deseo de cualquier otra cosa que no sea servirle».

«Para ti es servicio espiarme, entonces».

«¿Haces cosas reprochables? Se vigila a quien hace cosas dañinas. Pero, hombre, nunca he espiado a nadie. No pertenezco a la familia de las serpientes. Y no traiciono».

«Yo tampoco».

«Dios lo quiera, por tu bien. Pero no logro entender por qué te resulte tan odioso el que me quede aquí descansando…».

573.5

Jesús, hasta este momento mudo, escuchando, en medio de los otros, que están asombrados de este tira y afloja, alza la cabeza —la tenía un poco inclinada— y dice: «Basta. El mismo deseo que tienes tú lo puede tener, con mayor razón, una mujer, que además es anciana. Os quedaréis aquí hasta el alba del día siguiente del sábado. Luego os reuniréis conmigo. De momento compra todo lo que podamos necesitar para estos días. Ve, y no te demores».

Judas, a regañadientes, va a comprar las provisiones.

Andrés querría acompañarle, pero Jesús le agarra por el brazo y dice: «Quédate aquí. Puede él solo». Jesús tiene aspecto muy severo.

Elisa le mira y luego se acerca a Él. Dice: «Perdona, Maestro, si te he causado un dolor».

«Nada tengo que perdonarte, mujer. Más bien, perdona tú a ese hombre, como si fuera un hijo tuyo».

«Con este sentimiento me quedo con él… aunque él crea una cosa muy distinta… Tú me comprendes…».

«Sí, y te bendigo. Y te digo que es correcto lo que has dicho de que los peregrinajes a mis lugares serán una necesidad que vendrá cuando ya no esté con vosotros… una necesidad de confortar vuestro espíritu. Ahora se trata de servir a los deseos de vuestro Jesús. Y tú has comprendido un deseo mío, porque te sacrificas por tutelar un espíritu imprudente…».

Los apóstoles se intercambian miradas… Las discípulas también. Sólo María, enteramente velada, no alza la cabeza para intercambiar miradas con nadie. Y María de Magdala, erguida como una reina juzgadora, no ha quitado la mirada un momento de Judas, que se mueve entre los vendedores, y en sus ojos hay amargura, no sin un cierto desprecio en su boca cerrada: habla con su expresión más que si dijera palabras…

573.6

Judas vuelve. Da a los compañeros lo que ha comprado. Se pone en orden el manto —lo había usado para transportar lo que había comprado— y hace ademán de dar la bolsa a Jesús.

Jesús la rechaza con la mano: «No hace falta. Para las limosnas está todavía María. Tú preocúpate de ejercitar la beneficencia aquí. Muchos son los mendigos que, de todas partes, bajan para ir hacia Jerusalén en estos días. Da sin prejuicios y con caridad, recordando que todos somos mendigos ante Dios, de su misericordia y de su pan… Adiós. Adiós, Elisa. La paz sea con vosotros». Y se vuelve rápidamente. Se echa a andar a buen paso por el camino que tenía cerca, sin dar tiempo a Judas para despedirse de Él…

Todos le siguen en silencio. Salen de la ciudad en dirección hacia el nordeste por estos bellísimos campos…