Gli Scritti di Maria Valtorta

456. Adieux à Gamla et arrivée à Aphéqa.

456. Commiato da Gamala e arrivo ad Afeca.

456.1

Ils doivent avoir passé la nuit à Gamla, car le matin est venu, un matin où il y a de l’air. La ville jouit de cette brise, si agréable en terre d’orient, peut-être due à sa construction et à sa disposition en terrasses, qui descendent du haut de la ville jusqu’à la limite des remparts, massifs et pourvus de portes elles aussi, ferrées, de vraies portes de forteresse. Si elle m’a semblé belle hier, à l’heure où elle était ensoleillée, elle me paraît maintenant splendide. Disposées comme elles le sont, les maisons ne gênent pas la vue du vaste panorama. En effet, la terrasse de l’une est au niveau du terrain de celle de la rue supérieure, de sorte que chaque rue est une longue terrasse d’où l’on peut voir l’horizon. C’est un point de vue qui, du haut de la montagne, offre une perspective complète, et qui, plus bas, se réduit à un demi-cercle, mais toujours vaste et très beau.

Au pied de la montagne, la couleur verte des forêts de chênes ou des campagnes forme un chaton d’émeraude au-delà du vallon aride qui entoure la montagne de Gamla. Puis, à l’orient, à perte de vue, s’étendent les cultures du haut plateau. (Je crois qu’on appelle ainsi ces vastes et planes élévations de la croûte terrestre, mais si je me trompe, je vous prie de corriger en mon nom. Je n’ai pas de dictionnaire à portée de main et je suis seule dans ma chambre ; impossible par conséquent d’avoir le dictionnaire qui se trouve sur le bureau à moins de trois mètres de moi. Je dis cela pour rappeler que celle qui écrit est crucifiée au lit.)

Au-delà du haut plateau, s’élèvent les monts de l’Auranitide et, plus loin encore, les plus hauts sommets du Basan ; au sud s’étend la bande fertile entre le Jourdain bleu et les hauteurs compactes et continues qui se trouvent à l’est du fleuve et qui sont comme le contrefort du haut plateau ; au nord, on distingue les monts lointains de la chaîne libanaise sur laquelle trône l’imposant mont Hermon, embelli de mille couleurs en cette heure matinale, et en bas, tout de suite à l’occident, se trouve cette perle qu’est la mer de Galilée.

C’est vraiment une perle, attachée à un sautoir bleu, d’un bleu différent du sien, du Jourdain à son entrée dans le lac et à sa sortie, plus clair à son arrivée, plus foncé quand il reprend sa course vers le midi, brillant au soleil, paisible entre ses rives vertes, vraiment biblique. En revanche, on ne voit pas le petit lac de Mérom, caché derrière les collines au nord de Bethsaïde, mais on le devine au vert foncé de la campagne qui l’entoure, qui ensuite se déploie au nord-ouest entre la mer de Galilée et le lac de Mérom, dans la plaine où s’élève Chorazeïn. Il me semble avoir entendu dire autrefois par les apôtres que c’est la plaine de Génésareth.

456.2

Jésus prend congé des habitants qui, avec leur orgueil de citadins, s’empressent de lui montrer les beautés de l’horizon et celles de leur ville, pourvue d’aqueducs, de thermes, de beaux édifices :

« Tout cela est le fruit de notre peine et de notre argent. Nous avons en effet été à l’école des Romains et nous avons voulu leur emprunter des choses pratiques. Mais nous ne sommes pas comme les autres de la Décapole, nous ! Nous payons, et eux, les Romains, nous servent. Mais rien d’autre. Nous sommes fidèles, nous. Même cet isolement, c’est de la fidélité…

– Faites que votre fidélité ne soit pas de pure forme, mais réelle, intime, juste, sans quoi vos travaux de défense seraient inutiles. Je vous le répète. Vous voyez ? Vous avez construit cet aqueduc, solide, utile. Mais s’il n’était pas alimenté par une source lointaine, vous donnerait-il de l’eau pour les fontaines et les thermes ?

– Non. Il ne donnerait rien. Ce serait une construction inutile.

– Vous l’avez dit : inutile. Pareillement, les défenses naturelles ou matérielles sont vaines si celui qui les fait construire ne les rend pas puissantes par l’aide de Dieu, or Dieu n’aide pas quand on n’est pas ses amis.

– Maître, tu parles comme si tu savais que nous avons bien besoin de Dieu…

– Tous les hommes ont besoin de Dieu, et dans tous les domaines.

– Oui, Maître. Mais… il semble que nous, nous en ayons plus besoin que toutes les autres villes de Palestine et…

– Oh !… »

C’est un oh ! si douloureux…

Les habitants de Gamla le regardent, interdits. Le plus hardi demande :

« Que penses-tu ? Que nous connaîtrons encore les horreurs d’autrefois ?

– Oui, et de plus graves encore, et plus longues… longues… oh ! ma Patrie ! Si longues… Et cela si elle n’accueille pas le Seigneur !

– Nous t’avons accueilli. Nous sommes sauvés, alors ! La dernière fois, nous avons été lamentables, mais tu as pardonné…

– Faites en sorte de rester dans la justice d’aujourd’hui à mon égard, et de grandir dans la justice selon la Loi.

– Nous le ferons, Seigneur. »

456.3

Ils voudraient bien le suivre encore et le retenir, mais Jésus veut rejoindre les femmes qui sont parties en avant sur des ânes, et il s’arrache à leur insistance en descendant rapidement par le chemin qu’il a pris la veille pour venir. Il ralentit seulement quand il passe près du chantier des travailleurs afin de lever la main pour bénir les malheureux, qui le regardent comme s’ils voyaient Dieu.

Au pied de la montagne, la route bifurque dans deux directions : l’une vers le lac, l’autre vers l’intérieur. C’est sur cette dernière que trottent les quatre ânes, en soulevant la poussière de la route brûlée par l’été et en secouant leurs longues oreilles. De temps à autre, une femme se retourne pour voir si Jésus les rejoint, et elles voudraient s’arrêter pour être avec lui, mais Jésus, de la main, leur fait signe de continuer pour échapper à la fournaise de la route découverte déjà envahie de soleil, et arriver à la forêt qui s’élève vers Aphéqa. Ces bois frais forment une voûte verte au-dessus de la route caravanière. Ils s’y enfoncent joyeusement en poussant un cri de soulagement. Aphéqa est beaucoup plus à l’intérieur que Gamla, dans les montagnes, aussi ne peut-on plus voir le lac de Galilée. D’ailleurs, on ne voit plus rien du tout, car la route monte entre deux hauteurs qui lui cachent la vue.

456.4

La veuve marche en avant pour indiquer le chemin le plus court, et elle quitte la route caravanière pour prendre un sentier qui grimpe à travers la montagne, encore plus frais et plus ombragé. Mais je comprends le motif de la déviation quand, se retournant sur sa selle, Sarah dit :

« Voilà : ces bois sont à moi. Ce sont des arbres de valeur. On vient en acheter de Jérusalem pour fabriquer des coffres pour les riches. Ce sont ici les vieux arbres, mais j’ai aussi des plants toujours renouvelés. Venez, et voyez… »

Et elle pousse son âne en bas à travers les fossés, puis en haut sur les monticules, et de nouveau en bas en suivant le sentier à travers ses bois où, en effet, il y a des zones d’arbres adultes déjà bons à abattre et d’autres peuplées de jeunes tiges tendres s’élevant parfois de quelques centimètres au-dessus de la terre, au milieu des herbes vertes, qui exhalent tous les parfums de la montagne.

« Ces lieux sont beaux et bien tenus. Tu es sage, dit Jésus en guise d’éloge.

– Mais pour moi seule… J’en prendrais plus volontiers soin pour un fils… »

Jésus ne répond pas.

Ils poursuivent leur route. Enfin apparaît Aphéqa, entourée de pommiers et d’autres arbres à fruits.

« Ce verger aussi m’appartient. J’en ai trop pour moi toute seule ! C’était déjà trop quand j’avais mon époux, et le soir, nous nous regardions dans la maison trop vide, trop grande, devant trop d’argent que nous procuraient trop de produits, et nous nous disions : “ A qui servira tout cela ? ” Et maintenant, je le répète avec d’autant plus de force… »

Toute la tristesse d’un mariage stérile ressort des paroles de la femme.

« Il y a toujours des pauvres… dit Jésus.

– Oh oui ! Ma maison s’ouvre à eux chaque jour. Mais après ?…

– Tu veux dire quand tu seras morte ?

– Oui, Seigneur. Je souffrirai de laisser — à qui ?… — le domaine dont j’ai pris tant de soin… »

456.5

Jésus esquisse un sourire plein de compassion, mais il répond avec bonté :

« Tu es plus sage pour les réalités de la terre que pour celles du Ciel, femme. Tu te préoccupes de ce que tes arbres poussent bien, sans que des clairières se forment dans tes bois. Tu t’affliges à l’idée que, plus tard, on n’en prendra pas soin aussi bien qu’aujourd’hui. Mais ces pensées sont peu sages, et même tout à fait dérisoires. Crois-tu que, dans l’autre vie, ces pauvres hochets que l’on nomme arbres, fruits, argent, maisons aient de la valeur et qu’il sera affligeant de les voir négligées ? Corrige ta façon de voir, femme. Là-bas, on ne pense pas comme ici, dans aucun des trois royaumes. En enfer, la haine et la punition provoquent un aveuglement féroce. Au purgatoire, la soif d’expiation anéantit toute autre pensée. Dans les limbes, la bienheureuse attente des justes n’est profanée par aucun matérialisme. La terre est loin, avec ses misères ; elle n’est proche que pour ses besoins surnaturels, les besoins des âmes, pas ceux d’objets. C’est seulement par amour surnaturel que les trépassés, qui ne sont pas damnés, tournent vers la terre leur esprit et vers Dieu leurs prières, pour ceux qui sont sur la terre, et pas pour autre chose. Et quand ensuite les justes entreront dans le Royaume de Dieu, que veux-tu que soit désormais, pour quelqu’un qui contemple Dieu, cette prison misérable, cet exil qui a pour nom : terre ? Que peuvent signifier pour lui les babioles qu’il y a laissées ? Le jour pourrait-il regretter une lampe fumeuse quand le soleil l’éclaire ?

– Oh non !

– Dans ce cas, pourquoi soupirer après ce que tu laisseras ?

– Mais je voudrais qu’un héritier continue à…

– A profiter des biens terrestres, et trouver ainsi un obstacle à la perfection, alors que le détachement des richesses est une échelle pour posséder les richesses éternelles ? Tu vois, femme ? Le plus grand obstacle pour obtenir cet enfant, ce n’est pas sa mère avec ses droits sur son fils, mais ton cœur. Lui, c’est un innocent, un innocent triste, mais toujours un innocent qui, à cause de sa souffrance même, est cher à Dieu. Mais si tu en faisais un avare, un cupide, peut-être un vicieux, à cause des moyens que tu as, ne le priverais-tu pas de la prédilection de Dieu ? Et pourrais-je, moi qui ai soin de ces petits, être un maître inconséquent qui, faute de réflexion, laisse se dévoyer un innocent disciple ? Guéris-toi d’abord toi-même, dépouille-toi de cette humanité qui t’oppresse, libère ta justice de cette croûte matérialiste qui la déprime, et alors tu mériteras d’être mère. En effet, n’est pas mère seulement celle qui engendre ou qui aime un fils adoptif, le soigne et le suit dans ses besoins de créature animale. Sa mère aussi l’a engendré, mais elle n’est pas mère, car elle ne se soucie ni de sa chair, ni de son âme. On est mère surtout quand on se préoccupe de ce qui ne meurt plus, c’est-à-dire de l’âme, et non seulement de ce qui passe, autrement dit la matière. Et crois bien, femme, que celui qui aimera l’âme aimera aussi le corps, parce qu’il aura un amour juste : aussi sera-t-il juste.

– J’ai perdu ce fils, je le comprends…

– Ce n’est pas dit. Que ton désir te pousse à la sainteté, et Dieu t’exaucera. Il y aura toujours des orphelins dans le monde. »

456.6

Les voilà parvenus aux premières maisons. Aphéqa n’est pas une ville qui puisse rivaliser avec Gamla ou Hippos. Elle est plus rurale qu’urbaine mais, peut-être parce qu’elle se trouve à un nœud de routes important, elle n’est pas pauvre. Lieu de passage des caravanes qui vont de l’intérieur du pays vers le lac, ou du nord au sud, elle est obligée de s’équiper pour fournir aux pèlerins logements et vêtements, sandales et vivres, de sorte qu’il y a de nombreuses échoppes et auberges.

La maison de la veuve est près de l’une d’elles sur une place ; le rez-de-chaussée est occupé par un vaste magasin où on trouve un peu de tout, géré par un vieillard barbu, au gros nez, qui discute comme un possédé avec des acheteurs radins.

« Samuel ! appelle la femme.

– Maîtresse ! répond le vieillard en s’inclinant autant que le lui permettent les balles de marchandises entassées devant lui.

– Appelle Elie ou Philippe et rejoins-moi à la maison » lui enjoint la veuve.

Puis, s’adressant au Maître :

« Viens, entre dans ma maison et sois le bienvenu. »

Tout le monde entre en passant par le magasin pendant qu’un jeune garçon qui est accouru emmène les ânes je ne sais où. A la suite du magasin, qui donne à la maison un aspect peu décoratif, se trouve une belle cour avec des portiques sur deux côtés. Au milieu, trône la fontaine, ou du moins une vasque, car il n’y a pas de jet d’eau. Sur les côtés, des platanes robustes donnent de l’ombre aux murs blanchis à la chaux. Un escalier monte à la terrasse. Des pièces s’ouvrent sur les côtés sans portiques, les plus éloignés du magasin.

« Autrefois, du temps de mon époux, c’était plein ici et on y logeait des marchands surpris par la nuit. Les portiques servaient aux marchandises, les étables aux animaux, et il y a là-bas le bassin pour les abreuver. Entre dans les pièces. »

Elle traverse la cour en diagonale pour aller vers la partie la plus belle de la maison. Elle appelle :

« Marie ! Jeanne ! »

Deux servantes accourent, l’une avec les mains enfarinées, l’autre, un balai à la main.

« Maîtresse, que la paix soit avec toi et avec nous, maintenant que tu es revenue.

– Et avec vous aussi. Pas d’ennuis ces jours-ci ?

– Joseph, cet étourdi, a brisé le rosier que tu aimais tant. Je lui ai donné une bonne correction. Punis-moi, car j’ai été assez sotte pour l’en laisser approcher.

– Cela n’a pas d’importance… »

Mais des larmes viennent aux yeux de Sarah, qui s’en explique :

« C’était mon époux qui me l’avait apporté, le dernier printemps où il était en bonne santé…

– Et Elie s’est cassé une jambe, ce qui rend Samuel furieux parce que son aide lui fait défaut à cette époque de grands marchés… Il est tombé de l’échelle de l’autre côté, en se penchant pour que tu trouves les murs blanchis » dit l’autre femme. Et elle achève : « Il souffre beaucoup et restera éclopé. Et toi, maîtresse, as-tu été heureuse pendant ton voyage ?

– Comme jamais je ne l’aurais espéré. Je reviens avec le Rabbi de Galilée. Vite ! Préparez tout ce qu’il faut pour les personnes qui m’accompagnent. Entre, Maître ! »

Ils passent dans la maison devant les servantes stupéfaites.

Une vaste pièce, fraîche, dans la pénombre, avec des sièges et des coffres les accueille. La veuve sort pour donner des ordres. Jésus appelle les apôtres afin de les envoyer en ville préparer les âmes à sa venue. Samuel entre, transformé de vendeur en maître de maison. Les servantes le suivent avec des amphores et des bassins pour les ablutions avant le repas. Sur de larges plateaux, elles apportent du pain, des fruits, du lait.

456.7

La maîtresse revient :

« J’ai dit à mon serviteur que tu es ici. Il te prie de faire preuve de miséricorde à son égard, et je t’en prie également. Pour la fête des Tentes, il passe beaucoup de monde ici. Cela commence aussitôt après la nouvelle lune de Tisri. Lui malade, je ne sais comment nous allons faire…

– Dis-lui de venir ici.

– Impossible. Il ne peut se tenir debout.

– Dis-lui que le Rabbi ne va pas le trouver, mais qu’il veut le voir.

– Je le ferai porter par Samuel et Joseph.

– Il ne manquerait plus que cela ! Je suis vieux et fatigué, bougonne Samuel.

– Dis à Elie de venir sur ses jambes. C’est moi qui le veux, ordonne Jésus.

– Ce pauvre rabbi ! Gamaliel lui-même n’en serait pas capable, grommelle encore le vieux serviteur.

– Tais-toi, Samuel !… Pardonne-lui, Maître ! C’est un serviteur fidèle. Il est né ici des serviteurs de la maison de mon époux, il est travailleur, honnête… mais entêté dans ses idées de vieil Israélite… confie la veuve à voix basse pour l’excuser.

– Je comprends son esprit, mais le miracle le changera. Toi, va dire à Elie de venir, et il viendra. »

La veuve obéit et revient :

« Je le lui ai dit. Mais je me suis enfuie pour ne pas le voir poser sur le sol cette jambe toute noire et enflée.

– Tu ne crois pas au miracle ?

– Moi, si. Mais cette jambe fait horreur… Je crains que la gangrène ne la pourrisse entièrement. Elle est luisante, luisante… horrible et… Oh ! »

L’interruption, l’exclamation, vient de ce qu’elle voit le serviteur Elie qui court mieux qu’un homme en bonne santé et va se jeter aux pieds de Jésus en disant :

« Louange au Roi d’Israël !

– Louange à Dieu seul. Comment es-tu venu ? Comment as-tu osé ?

– J’ai obéi. J’ai pensé : “ Le Saint ne peut mentir et il ne peut donner des ordres stupides. J’ai foi, je crois. ” J’ai donc bougé la jambe. Elle ne me faisait plus mal, elle remuait. Je l’ai posée par terre, elle me portait. J’ai fait un pas, je pouvais le faire. Je suis accouru. Dieu ne trompe pas ceux qui croient en lui.

– Lève-toi, homme. En vérité, je vous dis que peu de gens ont sa foi. De qui te vient-elle ?

– De tes disciples qui sont passés ici pour te prêcher.

– Toi seul les as entendus ?

– Non. Tous, car on les a reçus ici après la Pentecôte.

– Et toi seul tu as cru… Ton esprit est très avancé dans les voies du Seigneur. Continue… »

Le vieux Samuel se débat vivement entre des sentiments opposés… Mais, comme beaucoup en Israël, il ne sait pas se détacher de l’ancien pour le nouveau, et il se raidit en marmonnant :

« Magie ! Magie ! Il est écrit[1] : “ Que mon peuple ne se contamine pas avec les mages et les devins. Je détournerai mon visage de celui qui fait cela, et je l’exterminerai. ” Tremble, maîtresse, d’être infidèle aux lois ! »

Puis il s’éloigne, l’air sévère, scandalisé comme s’il avait vu le démon installé dans la maison.

« Ne le punis pas, Maître ! Il est vieux ! Il a toujours cru ainsi…

– N’aie pas peur. Si je devais punir tous ceux qui me traitent de démon, beaucoup de tombeaux s’ouvriraient pour engloutir leur proie. Je sais attendre… Je parlerai vers le coucher du soleil… Puis je quitterai Aphéqa. J’accepte maintenant de m’arrêter sous ton toit. »

456.1

Devono avere pernottato in Gamala perché ora è mattina, una ventilata mattina. Forse anche per la sua posizione e costruzione a scaglioni, che scendono dal sommo della città sino al limite delle mura, molto massicce e fornite di porte pure massicce, ferrate, proprio porte di fortezza, questa città gode di questo vento, così benigno in terre d’oriente. Se bella mi parve ieri nell’ora ormai assolata, bellissima mi appare ora. Le case, disposte come sono, non ostacolano la vista del vasto panorama, perché il terrazzo di una è al livello del terreno di quella della via superiore, di modo che ogni strada sembra una lunga terrazza dalla quale si può vedere l’orizzonte. E un orizzonte che sul culmine del monte è visibile a circolo, più in basso a semicerchio, ma sempre vasto e bellissimo.

Ai piedi del monte, il verde dei querceti o delle campagne fa un castone di smeraldo oltre l’arido vallone che circonda la montagnola di Gamala. Poi, ad oriente, a perdita d’occhio, le colture dell’altipiano, dell’acrocòro. (Mi pare si dicano così queste vaste e basse sopraelevazioni della crosta terrestre, ma se sbaglio prego correggere in mio nome, non avendo io un vocabolario a portata di mano ed essendo sola nella mia stanza, impossibilitata perciò ad avere il vocabolario che è sulla scrivania a meno di tre metri da me. Tanto dico per ricordare che chi scrive è una crocifissa in letto).

Oltre il vasto acrocòro, i monti dell’Auranite e, oltre ancora, le più alte vette del Basan e, a sud, la striscia ubertosa fra l’azzurro Giordano e l’elevazione compatta e continua che è a oriente del fiume e che è come il contrafforte del vasto acrocòro, e a nord i monti lontani della catena libanese, sui quali troneggia l’imponente Ermon sfumato di mille colori in quest’ora mattutina.

E giù, nell’immediato occidente, la gemma del mar di Galilea. Proprio una gemma legata ad un monile azzurro, di un azzurro diverso del suo, del Giordano immissario ed emissario del lago, più sottile là dove si immette, più nutrito là dove riprende la sua corsa verso mezzogiorno, brillante al sole, placido fra le sue rive verdi, veramente biblico. Il piccolo lago di Meron, invece, non si vede, nascosto dietro i colli che sono a nord di Betsaida, ma si indovina per il nutrito verde della campagna circostante, che poi si dilunga a nord ovest fra il mar di Galilea e quello di Meron, nella pianura dove sorge Corozim; mi pare aver sentito dire altre volte dagli apostoli che è la pianura di Genezaret.

456.2

Gesù si accomiata dai cittadini che, con orgoglio cittadino, si danno da fare a mostrargli le bellezze dell’orizzonte e quelle della città dotata di acquedotti, di terme, di belli edifici: «Tutta fatica e denaro nostro. Perché noi abbiamo imparato dai romani e abbiamo voluto prendere da essi ciò che è comodo, ma non siamo come gli altri della Decapoli, noi! Noi paghiamo, ed essi, i romani, ci servono. Ma poi! Basta. Siamo fedeli noi. Anche questo isolarci è fedeltà…».

«Fate che la fedeltà non sia formale, ma reale, intima, giusta. Altrimenti non gioveranno le opere di difesa. Ve lo ripeto. Vedete? Voi avete costruito questo acquedotto. Robusto, utile. Ma se non fosse alimentato da una sorgente lontana, vi darebbe forse acqua per le fontane e le terme?».

«No. Non darebbe nulla. Sarebbe una costruzione inutile».

«Lo avete detto. Inutile. Ugualmente le difese naturali o materiali sono inutili se chi le fa costruire non le rende potenti con l’aiuto di Dio, e Dio non aiuta se non si è suoi amici».

«Maestro, Tu parli come se sapessi che abbiamo molto bisogno di Dio…».

«Tutti gli uomini hanno bisogno di Dio, e per tutte le cose».

«Sì, Maestro. Ma… sembra che noi se ne debba avere più bisogno di tutte le altre città di Palestina e…».

«Oh!…», un “oh!” così doloroso…

Quei di Gamala lo guardano interdetti. Il più ardito chiede: «Che pensi? Che conosceremo ancora gli orrori antichi?».

«Sì, e più gravi ancora, e più lunghi… lunghi… oh! Patria mia! Lunghi tanto… E questo se non accogli il Signore!».

«Noi ti abbiamo accolto. Siamo salvi allora! L’altra volta fummo stolti, ma Tu hai perdonato…».

«Fate di conservarvi nella giustizia di oggi verso di Me e di crescere in giustizia secondo la Legge».

«Lo faremo, Signore».

456.3

Vorrebbero seguirlo ancora e trattenerlo ancora, ma Gesù vuole raggiungere le donne, andate avanti su degli asinelli, e si strappa alle loro insistenze scendendo svelto per la strada fatta ieri per venire. E rallenta soltanto quando è nel luogo dei lavori per alzare la mano a benedire gli infelici, che lo guardano come si guarda Dio.

La strada, giunta ai piedi del monte, si biforca in due rami, uno verso il lago, l’altro verso l’interno. Su quest’ultima sono i quattro somarelli che trotterellano, sollevando polvere dalla strada bruciata dall’estate e scuotendo le lunghe orecchie. Ogni tanto una delle donne si volge a guardare se Gesù le raggiunge, e vorrebbero fermarsi per essere con Lui, ma Gesù fa cenno con la mano di proseguire, per sfuggire al pezzo di strada scoperta già invasa dal sole e giungere presto ai boschi che salgono verso Afeca. Refrigeranti boschi che intrecciano una volta verde sulla carovaniera. Ci si ficcano sotto allegri, con una esclamazione di sollievo. Afeca è molto più nell’interno di Gamala. Fra i monti. Perciò non si vede più il lago di Galilea. Anzi, non si vede più nulla, perché la strada sale fra due dossi di colli che fanno da paravento.

456.4

La vedova va avanti indicando la via più breve, ossia lascia la carovaniera per una stradetta che si inerpica per il monte, ancor più fresca e ombrosa. Ma comprendo il motivo della deviazione quando, volgendosi sulla sella, Sara dice: «Ecco, questi boschi sono miei. Di piante pregiate. Vengono a comprarne sin da Gerusalemme per i cofani dei ricchi. E queste sono le piante antiche; ma poi ho vivai sempre rinnovati. Venite. Vedete…», e spinge il ciuchino giù per le balze, su per le creste, e poi giù di nuovo, seguendo la stradetta fra i suoi boschi, dove infatti sono zone ad alberi adulti, già pronti al taglio, e zone dove le piante sono ancor tenerelle, talora alte pochi centimetri da terra, fra erbe verdi, odorose di tutti gli aromi montani.

«Belli questi luoghi. E ben tenuti. Sei saggia», encomia Gesù.

«Oh!… Ma per me sola… Più volentieri li curerei per un figlio…».

Gesù non risponde. Proseguono la via. Già si vede Afeca fra un cerchio di pometi e altri alberi da frutto.

«Anche quel frutteto è mio. Troppo ho per me sola!… Era già troppo quando avevo ancora lo sposo e a sera ci guardavamo nella casa troppo vuota, troppo grande, davanti alle troppe monete, ai conti delle troppe derrate, e ci dicevamo: “E per chi?”. E ora più ancora lo dico…». Tutta la tristezza di un matrimonio sterile balza dalle parole della donna.

«I poveri ci sono sempre…», dice Gesù.

«Oh! sì! E la mia casa si apre ad essi ogni giorno. Ma dopo…».

«Vuoi dire quando sarai morta?».

«Sì, Signore. Sarà un dolore lasciare, a chi?… le cose tanto curate…».

456.5

Gesù ha un’ombra di sorriso pieno di compatimento. Ma risponde con bontà: «Sei più saggia per le cose della Terra che per quelle del Cielo, donna. Ti preoccupi perché le tue piante crescano bene e non si formino radure nei tuoi boschi. Ti affliggi pensando che dopo non saranno più curate come ora. Ma questi pensieri sono poco saggi, anzi sono stolti affatto. Credi tu che nell’altra vita abbiano valore le povere cose che hanno nome piante, frutta, denaro, case? E che sarà afflizione vederle trascurate? Raddrizza il tuo pensiero, donna. Là non sono i pensieri di qui, in nessuno dei tre regni. Nell’Inferno l’odio e la punizione acciecano ferocemente. Nel Purgatorio la sete di espiare annulla ogni altro pensiero. Nel Limbo la beata attesa dei giusti non è profanata da sensualità alcuna. La Terra è lontana, con le sue miserie; è invece vicina solo con i suoi bisogni soprannaturali, bisogni di anime, non bisogni di oggetti. I trapassati, che dannati non siano, solo per amore soprannaturale volgono alla Terra il loro spirito, e a Dio le loro preghiere, per coloro che sono sulla Terra. Non per altro. E quando poi i giusti entreranno nel Regno di Dio, che vuoi che sia più, per uno che contempla Iddio, questa misera carcere, questo esilio che ha nome Terra? Che, le cose lasciate in essa? Potrebbe il giorno rimpiangere una lampada fumigante, quando lo illumina il sole?».

«Oh! no!».

«E allora? Perché sospiri su ciò che lascerai?».

«Ma vorrei che un erede continuasse a…».

«A godere delle ricchezze terrene per averne ostacolo a divenire perfetto, mentre il distacco dalle ricchezze è scala per possedere le ricchezze eterne? Vedi, o donna? Il maggior ostacolo ad ottenere questo innocente non è la madre di lui, coi suoi diritti sul figlio, ma il tuo cuore. Egli è un innocente, un triste innocente, ma sempre un innocente che, per il suo stesso soffrire, è caro a Dio. Ma se tu lo facessi un avaro, cupido, forse vizioso, per i mezzi che hai, non lo priveresti tu della predilezione di Dio? E potrei, Io che ho cura di questi innocenti, essere uno sbadato maestro che, senza riflettere, permette che un suo innocente discepolo si travii? Cura prima te stessa, spogliati dell’umanità ancor troppo viva, libera la tua giustizia da questa crosta di umanità che la deprime, e allora meriterai di esser madre. Perché non è madre solo chi genera o chi ama un figlio adottivo e lo cura e segue nei suoi bisogni di creatura animale. Anche la madre di questo lo ha generato. Ma non è madre perché non ha cura né della sua carne, né del suo spirito. Madre si è quando ci si cura soprattutto di ciò che non muore più, ossia dello spirito, non soltanto di quello che muore, ossia della materia. E credi, o donna, che chi amerà lo spirito, amerà anche il corpo, perché possederà un amore giusto e perciò sarà giusto».

«Ho perduto il figlio, lo comprendo…».

«Non è detto. Il tuo desiderio ti spinga a santità e Dio ti esaudirà. Sempre ci saranno orfani nel mondo».

456.6

Sono alle prime case. Afeca non è una città che possa competere con Gamala o Ippo. È più rurale che altro ma, forse perché su un nodo stradale importante, non è povera. Luogo di passaggio di carovane dirette dall’interno al lago, o dal nord verso il sud, è costretta ad essere attrezzata per fornire ai pellegrini alloggi e vesti, sandali e derrate, e perciò vi sono empori numerosi e numerosi alberghi.

La casa della vedova è presso uno di questi, su una piazza, ed è occupata, al terreno, da un vasto emporio dove c’è un po’ di tutto, gestito da un vecchio nasuto e barbuto, che sta sbraitando come un dannato con dei compratori tirchi.

«Samuele!», chiama la donna.

«Padrona!», risponde il vecchio inchinandosi tanto quanto le balle di mercanzia accatastate davanti a lui lo concedono.

«Manda qui Elia o Filippo e raggiungimi in casa», comanda la vedova e poi, rivolta al Maestro: «Vieni. Entra nella mia casa e siine l’ospite benvenuto».

Entrano tutti, passando dal fondaco, mentre i ciuchini non so dove vengano portati da un ragazzotto accorso. Dopo il fondaco, che dà alla casa un aspetto non troppo artistico, è una bella corte con due lati a portici. In mezzo, la fonte, o per lo meno una vasca, perché non c’è getto d’acqua. Ai lati, platani robusti a dare ombra alle muraglie bianche di calcina. Una scala sale al terrazzo. Delle stanze si aprono dai lati senza portici, i più lontani dal fondaco.

«Prima, ai tempi dello sposo, c’era pieno qui e si alloggiavano anche dei mercanti sorpresi qui dalla notte. Portici per le merci, stalle per gli animali, e là la vasca per abbeverare. Vieni nelle stanze», e traversa in diagonale la corte andando verso la parte più bella della casa. Chiama: «Maria! Giovanna!».

Accorrono due serve, l’una con le mani intrise di pasta da pane, l’altra con una scopa in mano.

«Padrona! La pace sia con te e con noi, ora che sei tornata».

«E con voi. Nessuna cosa penosa in questi giorni?».

«Giuseppe, quello sventato, ha spezzato il rosaio che amavi tanto. L’ho picchiato forte. Tu picchia me che sono stata stolta a lasciarlo andare presso la pianta».

«Non ha valore…», ma lacrime vengono agli occhi di Sara, che le spiega dicendo: «Me lo aveva portato lo sposo l’ultima primavera che fu sano…».

«E Elia si è troncato una gamba, cosa che rende furioso Samuele perché gli manca l’aiuto in questi tempi di gran mercati… È caduto dalla scala dell’altra parte, mentre si spenzolava per farti trovare imbiancate le mura», dice l’altra donna e termina: «Soffre molto e resterà sciancato. E tu, padrona, fosti felice nel tuo viaggio?».

«Come mai avrei sperato. Torno col Rabbi di Galilea. Presto! Preparate per chi è con me. Entra, Maestro!».

Entrano nella casa passando davanti alle due serve stupefatte.

Una vasta, fresca stanza, in penombra, con sedili e cassapanche, li accoglie. La vedova esce per dare ordini, Gesù chiama gli apostoli per mandarli per la città per preparare gli animi alla sua venuta. Entra Samuele, tramutato da venditore in maestro di casa, seguito dalle serve con anfore e bacili per le abluzioni avanti il cibo, portato su larghi vassoi: pane, frutta, latte.

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Ritorna la padrona: «Ho detto al mio servo che Tu sei qui. Egli ti prega di usargli misericordia. Io ti dico di usarla a me pure. Per i Tabernacoli molta gente passa di qui. E il passaggio principia appena passata la neomenia di tisri. Come faremo, se egli è malato, non so…».

«Digli che venga qui».

«Non può. Non si regge».

«Digli che il Rabbi non va da lui, ma vuole vederlo».

«Lo farò portare da Samuele e Giuseppe».

«Ci manca altro! Io sono vecchio e stanco», brontola Samuele.

«Di’ a Elia di venire con le sue gambe. Lo voglio Io».

«Un povero rabbi! Neppur Gamaliele potrebbe tanto», brontola ancora il vecchio servo.

«Taci, Samuele!… Perdonalo, Maestro! È un servo fedele. Nato qui da servi della casa dello sposo, solerte, onesto… ma cocciuto nelle sue idee di vecchio israelita…», lo scusa sottovoce la vedova.

«Capisco il suo spirito. Ma il miracolo lo muterà. Va’ tu a dire a Elia di venire e verrà».

La vedova va e torna: «L’ho detto. E son corsa via per non vederlo mettere al suolo quella gamba tutta nera e gonfia».

«Non credi al miracolo?».

«Io sì. Ma quella gamba fa orrore… Temo che marcisca tutta per cancrena. È lucida, lucida… orrenda e… Oh!».

L’interruzione, l’esclamazione viene dal vedere il servo Elia correre meglio di un sano verso loro e gettarsi ai piedi di Gesù dicendo: «Sia lode al Re d’Israele».

«Sia lode a Dio solo. Come venisti? Come osasti?».

«Ubbidii. Pensai: “Il Santo non può mentire. E non può comandare cose stolte. Ho fede. Credo”, e ho mosso la gamba. Non doleva più, si muoveva. L’ho messa a terra, mi reggeva. Ho mosso il passo. Potevo farlo. Sono corso. Dio non delude chi crede in Lui».

«Alzati, uomo. In verità vi dico che pochi hanno la fede di costui. Da che ti venne?».

«Da tuoi discepoli passati qui a predicarti».

«Li sentisti tu solo?».

«No. Tutti, perché furono ospitati qui dopo Pentecoste».

«E tu solo hai creduto… Il tuo spirito è molto avanti nelle vie del Signore. Procedi».

Il vecchio Samuele è molto combattuto da opposti sentimenti… Ma, come molti in Israele, non sa staccarsi dal vecchio per il nuovo e si irrigidisce dicendo: «Magia! Magia! È detto[1]: “Il mio popolo non si contamini coi maghi e gli indovini. Se uno lo farà, rivolgerò da lui il mio volto e lo sterminerò”. Trema, o padrona, di essere infedele alle leggi!», e se ne va severo, scandalizzato come avesse visto il demonio insediato nella casa.

«Non lo punire, Maestro! È vecchio! Ha sempre creduto così…».

«Non temere. Se dovessi punire tutti coloro che mi dicono demonio, molti sepolcri si aprirebbero ad ingoiare la preda. Io so attendere… Parlerò verso il tramonto. Poi lascerò Afeca. Ora accetto la sosta sotto il tuo tetto».


Notes

  1. Il est écrit, en Lv 20, 6.

Note

  1. È detto, in: Levitico 20, 6.