Gli Scritti di Maria Valtorta

520. Discours sur Judas, absent, et arrivée

520. Discorsi sull’Iscariota assente

520.1

Ils sont encore à onze quand ils reprennent la route. Onze visages pensifs et dégoûtés autour du visage peiné de Jésus, qui a pris congé des sœurs de Lazare et qui, après un instant de réflexion, avant de franchir la grille, ordonne à Simon le Zélote et à Barthélemy :

« Vous, restez ici. Vous me rejoindrez à Tecua chez Simon, ou bien chez Nikê, près de Jéricho, ou encore à Bethabara ; cela, s’il vient. Et… servez la charité. Vous m’avez compris ?

– Tu peux partir en toute tranquillité, Maître. Nous n’offenserons en aucune manière l’amour du prochain, assure Barthélemy.

– Quelle que soit l’heure à laquelle il vous rejoindra, prenez aussitôt la route.

– Bien, Maître. Et… merci de la confiance que tu as en nous, dit Simon le Zélote.

Ils échangent un baiser et, pendant qu’un serviteur ferme le portail et que Jésus s’éloigne, les deux apôtres qui sont restés reviennent avec les sœurs vers la maison.

Jésus marche en avant, seul ; il est suivi par Pierre entre Matthieu et Jacques, fils d’Alphée ; puis viennent Philippe avec André, Jacques et Jean. En dernier lieu, silencieux autant que les autres, se trouvent Thomas et Jude. Mais je me suis mal exprimée. Pierre aussi est silencieux. Ses deux compagnons échangent quelques mots, mais lui, qui est entre les deux, ne dit rien. Il marche, l’air taciturne, tête baissée, et il semble échanger un muet colloque avec les pierres et l’herbe sur lesquelles il se déplace.

520.2

Les deux derniers aussi ont à peu près la même attitude. Thomas semble plongé dans la contemplation d’une petite branche de saule qu’il effeuille peu à peu, et il regarde chaque feuille après l’avoir détachée comme pour en étudier la couleur vert pâle d’un côté, argentée de l’autre, ou les veines de la trame. Jude regarde fixement droit devant lui. Je ne sais pas s’il contemple l’horizon qui, après le franchissement d’une crête, s’ouvre sur la clarté vaporeuse d’une plaine à l’aurore, ou s’il observe uniquement la tête blonde de Jésus, qui a rejeté en arrière le bord de son manteau pour mieux jouir du doux soleil de décembre.

L’occupation de Thomas et la contemplation de l’horizon ou du Maître par Jude finissent en même temps. Ce dernier baisse les yeux et tourne la tête pour regarder son compagnon tandis que Thomas, après avoir réduit sa branchette à l’état de fine cravache, lève les yeux pour regarder Jude. C’est un regard perçant — et en même temps bon et triste — qui en rencontre un semblable.

« C’est comme ça, mon ami ! C’est vraiment comme ça ! dit Thomas, comme s’il terminait une conversation.

– Oui, c’est ainsi. Et ma douleur est bien grande… Pour moi, il y a en plus l’amour d’un parent…

– Je comprends. Mais… Tu as un tourment d’affection au cœur, mais, et moi ? J’ai un remords qui me tourmente, et c’est pire encore.

– Un remords, toi ? Tu n’as aucune raison d’en avoir. Tu es bon et fidèle. Jésus est content de toi et nous, nous n’avons jamais eu aucun motif de scandale de ta part. D’où te vient donc cette impression de remords ?

– D’un souvenir. Le souvenir du jour où j’ai décidé de suivre le nouveau Rabbi qui était apparu au Temple…

520.3

Judas et moi, nous étions côte à côte et nous avons admiré l’attitude et les paroles du Maître. Et j’ai décidé de le rechercher… J’étais encore plus décidé que Judas, et je l’ai pour ainsi dire entraîné. Lui dit le contraire, mais cela s’est passé ainsi. Voilà la cause de mon remords : d’avoir insisté pour qu’il vienne… J’ai apporté une douleur continuelle à Jésus. Mais Judas, je le savais, était bien vu de… beaucoup de gens, et je pensais qu’il pouvait être utile. J’étais bête comme tous ceux qui ne savent penser qu’à un roi d’Israël plus grand que David et que Salomon, mais toujours un roi… un roi comme le Maître dit qu’il ne le sera jamais. J’avais vivement désiré que Judas ait sa place parmi les disciples, puisqu’il pouvait être utile !… Je l’espérais, et c’est seulement maintenant que je comprends, que je comprends de mieux en mieux la justice de Jésus qui ne l’a pas accueilli tout de suite, qui lui a même défendu de le rechercher… Un remords, te dis-je ! Un remords ! Cet homme n’est pas bon.

– Il n’est pas bon, mais ne te crée pas des remords. Ce n’est pas par malice que tu as agi, et par conséquent il n’y a pas de faute. Je te l’affirme.

– En es-tu bien sûr ? Ou dis-tu cela pour me consoler ?

– Je le dis parce que c’est vrai. Ne pense plus au passé, Thomas. Cela ne changera rien…

– Tu parles bien ! Mais réfléchis ! Si, à cause de moi, mon Maître subissait des malheurs… J’ai le cœur plein d’anxiété et de soupçons. Je suis un pécheur, car je juge mon compagnon, et mon jugement est sans pitié. Et je suis pécheur, car je devrais croire aux paroles du Maître… Lui excuse Judas… Toi… tu y crois, à ton Frère ?

– En tout, sauf en cela. Mais ne te désole pas. Nous sommes tous du même avis. Même Pierre, qui a l’air si défait, s’efforce de penser toute sorte de bien de cet homme, même André qui est plus doux qu’un agneau, même Matthieu, le seul d’entre nous qui n’éprouve de dégoût pour aucun pécheur ou pécheresse. Et Jean, si affectueux et si pur, qui a l’heureux sort de ne pas craindre le mal ni le vice, car il est tellement rempli de charité et de pureté qu’il n’y a pas place en lui pour accueillir autre chose. Mon frère aussi — je parle de Jésus — partage cet avis, et certainement il a aussi d’autres pensées avec cela, des pensées pour lesquelles il voit la nécessité de garder Judas… jusqu’à ce qu’il ait épuisé toute tentative de le rendre bon.

– Oui. Mais… comment cela finira-t-il ? Il a de nombreuses… Il n’a pas… Enfin, tu comprends sans que je le dise. Où en arrivera-t-il ?

– Je ne sais pas… Peut-être se séparera-t-il de nous… Peut-être restera-t-il pour attendre de voir qui est le plus fort dans cette lutte entre Jésus et le monde hébraïque…

– Et autre chose ? Ne penses-tu pas que, d’ores et déjà, Judas sert deux maîtres ?

– C’est certain.

– Et tu ne crains pas qu’il puisse servir les plus nombreux, de façon à nuire totalement au Maître ?

– Non. Je ne l’aime pas, mais je ne puis penser qu’il… Du moins pour le moment, non. Mais je le redouterai certainement s’il vient un jour où la faveur de la foule abandonne le Maître. Alors que, si une acclamation populaire le consacrait notre roi et notre chef, je suis certain que Judas abandonnerait tout le monde pour lui. C’est un profiteur… Que Dieu le retienne, et protège Jésus et nous tous !… »

520.4

Les deux hommes s’aperçoivent qu’ils ont beaucoup ralenti leur marche et qu’ils se sont fait distancer par leurs compagnons ; sans plus parler, ils hâtent le pas pour les rejoindre.

« Mais que faisiez-vous ? » demande Matthieu. « Le Maître vous attend… »

Thomas et Jude se hâtent d’aller trouver Jésus.

« De quoi parliez-vous ? » questionne Jésus en scrutant leurs visages.

Les deux hommes, se regardent. Parler ? Ne pas parler ? La franchise l’emporte.

« De Judas, répondent-ils ensemble.

– Je le savais. Mais j’ai voulu éprouver votre sincérité. Vous m’auriez peiné si vous m’aviez menti… Mais n’en parlez plus et surtout de cette manière-là. Il y a tant de bons sujets dont on peut parler. Pourquoi s’abaisser toujours à considérer ce qui est très, trop matériel ? Isaïe dit[1] : “ Tenez-vous à l’écart de l’homme qui n’a qu’un souffle dans les narines. ” Moi je vous dis : cessez d’analyser cet homme et occupez-vous de son âme. L’animal qui est en lui, son monstre, ne doit pas attirer vos regards ni vos jugements ; mais faites preuve d’amour, un amour douloureux et actif pour son âme. Délivrez-le du démon qui le tient. Vous ne savez pas… »

Il se retourne pour appeler les sept autres :

« Venez tous ici : mes paroles vous sont utiles à tous, parce que vous avez les mêmes pensées dans le cœur… Vous ne savez pas que vous apprenez davantage à travers Judas qu’à travers toute autre personne ? Vous trouverez beaucoup de Judas et très peu de Jésus au cours de votre ministère apostolique. Les Jésus seront bons, doux, purs, fidèles, obéissants, prudents, sans avidité. Il y en aura bien peu… Mais combien, combien de Judas vous trouverez, vous, vos disciples et vos successeurs, sur les chemins du monde ! Et pour être maître et savoir, vous devez suivre cette école… Lui, avec ses défauts, vous montre l’homme tel qu’il est ; moi, je vous montre l’homme tel qu’il devrait être. Ce sont deux exemples également nécessaires. En connaissant bien l’un et l’autre, vous devez chercher à faire du premier un second… Et que ma patience soit votre règle.

520.5

– Seigneur, j’ai été un grand pécheur, et je serai certainement un exemple, moi aussi. Mais je voudrais que Judas, qui n’est pas un pécheur comme je l’ai été, devienne le converti que je suis. Est-ce de l’orgueil de dire cela ?

– Non, Matthieu, ce n’est pas de l’orgueil. Tu fais honneur à deux vérités : la première, c’est qu’elle est justifié, cette sentence : “ La bonne volonté de l’homme opère des miracles divins. ” La seconde, c’est que Dieu t’a aimé infiniment, dès le temps où tu n’y pensais pas, et cela parce que ta capacité d’héroïsme ne lui était pas inconnue. Tu es le fruit de deux forces : ta volonté et l’amour de Dieu. Et je mets en premier ta volonté, car sans elle, vain aurait été l’amour de Dieu. Vain, inerte…

– Mais Dieu ne pourrait-il pas nous convertir sans notre volonté ? demande Jacques, fils d’Alphée.

– Certainement. Mais ensuite, la volonté de l’homme serait toujours requise pour persister dans la conversion obtenue miraculeusement.

– Alors, en Judas, cette volonté n’a pas existé et n’existe pas, ni avant de te connaître, ni maintenant… » lance avec impétuosité Philippe.

Certains rient, d’autres soupirent. Jésus est le seul à défendre l’apôtre absent :

« Ne dites pas cela ! Il l’a eue et il l’a, mais la mauvaise loi de la chair le domine par intervalles. C’est un malade… Un pauvre frère malade. Dans toute famille, il y a le faible, le malade, celui qui est la peine, l’angoisse, la charge de la famille. Et pourtant l’enfant frêle n’est-il pas le plus aimé de sa mère ? Le petit frère malheureux n’est-il pas le plus choyé de tous ? N’est-il pas celui à qui son père donne la meilleure bouchée en la prélevant pour lui du plat, pour lui offrir une joie, pour ne pas lui faire comprendre qu’il est un poids, et ne pas lui rendre pesante de cette façon son infirmité ?

– C’est vrai, tout à fait vrai. Ma sœur jumelle était frêle dans ses toutes premières années ; toute la force, c’était moi qui l’avais prise. Mais l’amour de toute la famille l’a tellement soutenue, que c’est maintenant une épouse et une mère épanouie, dit Thomas.

– Voilà. Envers votre frère faible spirituellement, agissez comme vous le feriez à l’égard d’un frère en mauvaise santé. Je ne dirai pas un mot de reproche. Vous n’êtes pas plus grands que moi. Votre amour patient est le reproche le plus fort, et contre lui on ne peut réagir. A Tecua, je laisserai Matthieu et Philippe pour attendre Judas… Que le premier se souvienne qu’il a été pécheur, et le second qu’il est père…

– Oui, Maître, nous nous en souviendrons.

– A Jéricho, s’il n’est pas encore avec nous, je laisserai André et Jean, et qu’eux se rappellent que tous n’ont pas reçu dans la même mesure les dons gratuits de Dieu…

520.6

Mais allez trouver ce vieux mendiant qui vacille sur la route. La ville est en vue. Avec l’obole, il pourra se procurer du pain.

– Seigneur, cela ne nous est pas possible. Judas est parti avec la bourse…, dit Pierre, et les sœurs ne nous ont rien donné.

– Tu as raison, Simon. Elles sont comme étourdies par la douleur, et nous avec elles. Qu’importe, nous avons un peu de pain. Nous sommes jeunes et forts. Donnons-le au vieil homme pour qu’il ne tombe pas en route. »

Ils fouillent dans leurs sacs, rassemblent des morceaux de pain, les donnent au petit vieux qui les regarde d’un air étonné.

« Mange, mange ! » dit Jésus pour l’encourager.

Et il le fait boire à sa gourde tout en lui demandant où il va.

« A Tecua. Il y a un grand marché demain. Mais depuis hier, je n’ai rien mangé.

– Tu es seul ?

– Plus que seul… Mon fils m’a chassé… »

Sa voix sénile déchire le cœur.

« Dieu t’ouvrira les portes de son Royaume si tu sais croire en sa miséricorde.

– Et en celle de son Messie. Mais mon fils n’aura pas le Messie, c’est impossible, car il le hait, au point de détester son père parce que lui, il l’aime.

– C’est pour cela qu’il t’a chassé ?

– Oui, et aussi pour ne pas perdre l’amitié de certains qui persécutent le Messie. Il a voulu leur montrer que sa haine dépasse la leur, au point qu’elle domine même la voix du sang.

– Quelle horreur ! s’écrient tous les apôtres.

– Ce serait plus horrible si moi, j’avais les mêmes pensées que mon fils, dit avec véhémence le petit vieux.

– Mais, qui est-ce ? Si j’ai bien compris ce doit être quelqu’un de puissant et d’écouté… intervient Thomas.

– Homme, ce n’est pas un père qui révèlera le nom de son fils coupable pour le faire mépriser. Je dois dire que j’ai faim et froid, moi qui à force de travail avais augmenté le bien-être de la maison pour rendre mon garçon heureux. Mais rien de plus que cela. Pense que je suis de Judée, et lui aussi, et qu’ainsi nous sommes de la même race, mais ne pensons pas la même chose. Le reste est inutile.

520.7

– Et tu ne demandes rien à Dieu, toi qui es un juste ? questionne doucement Jésus.

– Qu’il touche le cœur de mon enfant et l’amène à croire ce que je crois.

– Mais pour toi, pour toi seul, tu ne demandes rien ?

– De rencontrer celui qui pour moi est le Fils de Dieu, pour le vénérer et mourir ensuite.

– Mais si tu meurs, tu ne le verras plus. Tu seras dans les limbes…

– Pour peu de temps. Tu es un rabbi, n’est-ce pas ? J’y vois très peu… L’âge… mes nombreuses larmes, et la faim aussi… Mais je vois les nœuds de ta ceinture… Si tu es un bon rabbi, comme j’en ai l’impression, tu dois te rendre compte, toi aussi, que le temps est arrivé, le temps dont parle Isaïe[2], je veux dire. Et elle va arriver, l’heure où l’Agneau prendra sur lui tous les péchés du monde et portera tous nos maux et toutes nos douleurs, et pour cela sera transpercé et immolé afin que nous soyons guéris et en paix avec l’Eternel. Et alors, pour les âmes aussi viendra la paix… Je l’espère en me confiant à la miséricorde de Dieu.

– Tu n’as jamais vu le Maître ?

– Non. Je l’ai entendu parler dans le Temple, aux fêtes. Mais je suis petit, et l’âge me rapetisse encore ; de plus, je n’y vois guère, comme je te l’ai dit. C’est pourquoi, si je me mêle à la foule, je ne vois rien à cause de ceux qui sont devant moi, et si je reste loin, je ne vois pas à cause de la distance. Ah ! je voudrais le voir ! Ne serait-ce qu’une fois !

– Tu le verras, père, Dieu te satisfera. Et à Tecua, sais-tu où aller ?

– Non. Je resterai sous un portique ou sous une entrée. J’y suis habitué, désormais.

– Viens avec moi. Je connais un bon Israélite. Il t’accueillera au nom de Jésus, le Maître de Galilée.

– Mais toi aussi, tu es galiléen. Cela s’entend à ton accent.

– Oui… Tu es fatigué ? Mais nous sommes déjà aux premières maisons. Tu vas bientôt te reposer et tu pourras te restaurer. »

520.8

Jésus se penche pour confier quelque chose à Pierre, et Pierre se déplace pour rapporter aux autres ce que lui a dit Jésus, et que je ne saisis pas. Puis, avec les fils d’Alphée et Jean, il marche plus vite pour entrer dans la ville. Jésus le suit avec les autres en réglant son pas sur celui du vieil homme, qui ne parle plus, tant il est exténué, de sorte qu’il finit par rester en arrière avec André et Matthieu. La ville paraît vide. Il est midi, et beaucoup de gens sont chez eux en train de déjeuner. Après quelques mètres, voici Pierre :

« C’est fait, Seigneur. Simon l’accueille parce que c’est toi qui l’amènes et il te remercie d’avoir pensé à lui.

– Bénissons le Seigneur ! Il y a encore des justes en Israël. Ce vieillard en est un, et Simon un autre. Oui, il y a encore des gens qui sont bons, miséricordieux, fidèles au Seigneur. Et cela compense bien des amertumes, et fait espérer que la justice divine s’adoucira grâce à ces justes.

– Pourtant !… Un fils qui chasse son père certainement pour ne pas perdre l’amitié de quelque puissant pharisien !

– A quel point peut arriver la haine pour toi ! J’en suis indigné ! dit Philippe.

– Oh ! vous en verrez bien davantage ! répond Jésus.

– Davantage ? Et qu’y a-t-il de plus qu’un père que l’on chasse parce qu’il ne te déteste pas ? Il est énorme, le péché de cet homme !…

– Plus grand sera le péché d’un peuple contre son Dieu… Mais attendons le vieillard…

– Qui peut bien être son fils ?

– Un pharisien !

– Un membre de sanhédrin !

– Un rabbi. »

Les avis sont divers.

« Un malheureux. Ne cherchez pas à savoir. Aujourd’hui il a frappé son père, demain c’est moi qu’il frappera. Vous voyez donc que le péché de Judas, de s’être ainsi éloigné comme un gamin, n’est rien en comparaison. Et pourtant, je prierai pour ce fils ingrat, pour cet Hébreux qui offense Dieu, afin qu’il se repente. Faites-en de même…

520.9

Viens, père. Comment t’appelles-tu ?

– Eli-Hanna. Je n’ai jamais été heureux ! Mon père est mort avant ma naissance et ma mère en m’enfantant. Ma grand-mère, qui m’a élevé, m’a donné les deux noms de mon père et de ma mère réunis.

– Vraiment tu es un Eli, homme, et ton fils ressemble à Finnès[3], dit Philippe qui ne peut se résigner à un pareil péché.

– Que Dieu ne le veuille pas, homme. Finnès est mort pécheur et il est mort quand l’arche fut prise. Cela serait un malheur pour son âme et pour tout Israël, répond le vieillard.

– Tu vois, cette maison m’est amie et j’obtiens ce que je lui demande. Elle appartient à une certain Simon, homme juste devant Dieu et devant les hommes. Il t’accueille par amour pour moi si tu acceptes cet endroit, dit Jésus avant de frapper à la porte.

– Et puis-je faire un choix ? J’invoquerai les bénédictions du Ciel sur celui qui me donnera le pain et l’abri de la charité. Mais je veux travailler. Ce n’est pas une honte d’être serviteur. C’est une honte de commettre le péché…

– Nous allons le dire à Simon » dit Jésus avec un sourire de compassion, en regardant le vieil homme réduit à rien par les privations et la douleur morale.

520.10

On ouvre la porte :

« Entre, Maître, que la paix soit avec toi et avec ceux qui t’accompagnent. Où est ce frère que tu m’amènes ? Que je puisse lui donner le baiser de paix et de bienvenue, dit un homme d’environ cinquante ans.

– Le voilà, et que le Seigneur te donne une récompense.

– Il l’a fait. Tu es mon hôte, et qui te possède, possède Dieu. Je ne t’attendais pas, et je ne puis t’honorer comme je voudrais. Mais j’entends dire que tu comptes repasser d’ici quelques jours, et je serai prêt à t’accueillir comme il convient. »

Ils se trouvent maintenant dans une pièce où sont préparés des bassins fumants pour les ablutions. Intimidé, le vieillard reste contre la porte, mais le maître de maison le prend par la main et l’amène à un siège, veut le déchausser de sa main, le servir comme un roi, puis lui mettre des sandales neuves, alors que le vieillard dit :

« Pourquoi ? Mais pourquoi ? Je suis venu pour servir, or c’est toi qui me sers ! Ce n’est pas juste.

– C’est juste, homme. Je ne puis suivre le Rabbi parce que ma maison requiert ma présence, mais comme le dernier disciple du Maître saint, je m’arrange pour mettre en pratique ses paroles.

– Tu le connais bien. Tu le connais vraiment, car tu es bon. Nombreux sont ceux qui le connaissent en Israël, mais comment ? Avec leurs yeux et leur haine, et donc ils ne le connaissent pas. On connaît une femme quand on n’ignore plus rien d’elle et qu’on la possède tout entière. Il en est ainsi de Jésus de Nazareth, que je ne connais pas de vue, mais que je connais mieux que bien des gens, car je crois qu’en lui se trouve la sagesse. Mais toi, tu le connais vraiment, et lui et sa doctrine. »

L’homme regarde Jésus, mais ne dit mot.

Le vieillard reprend :

« J’ai dit à ce Rabbi que je veux travailler…

– Oui, oui, nous trouverons un travail pour toi, mais pour le moment viens à table. Maître, tes disciples vont bientôt arriver. Pouvons-nous passer à table quand même, ou préfères-tu les attendre ?

– Je voudrais les attendre, mais si tu as du travail à faire…

– Oh ! Maître, tu sais que c’est une joie pour moi d’obéir à ton moindre désir. »

Le petit vieux a en ce moment un premier soupçon sur l’identité de l’Homme qui l’a secouru en route, puis il le regarde, le regarde, observe ses compagnons… les examine attentivement… et tourne autour d’eux…

520.11

Les fils d’Alphée entrent avec Jean. Jésus les appelle par leurs noms.

« Oh ! Dieu très-haut ! Mais alors… C’est toi ! » s’écrie le vieillard.

Et il se jette par terre pour le vénérer. Son étonnement n’est pas inférieur à celui des autres. Elle est si étrange, cette façon de reconnaître le Maître ! Si bien que Pierre lui demande :

« Qu’y a-t-il de spécial dans ces noms si communs en Israël, qui puisse t’avoir fait comprendre que tu te trouves en face du Messie ?

– C’est que je connais Judas. Il vient toujours chez mon fils et… »

Il s’arrête, gêné d’avoir parlé de son fils…

« Mais moi, je ne t’ai jamais vu, homme, dit Jude[4] en se mettant bien en face de lui et en se baissant pour être bien vis-à-vis.

– Moi non plus, je ne te connais pas. Mais un Judas, disciple du Christ, vient souvent chez mon fils, et j’ai entendu parler d’un Jean, d’un Jacques, d’un Simon, ami de Lazare de Béthanie et de bien d’autres personnes… Entendre trois des noms connus pour être ceux des disciples les plus intimes du Maître ! Et lui, qui est si bon !… J’ai compris, voilà ! Mais où est l’autre Judas ?

– Il n’est pas là, mais c’est vrai, tu l’as bien compris, c’est moi. Le Seigneur est bon, père. Tu as désiré me voir, et tu m’as vu. Bénissons les miséricordes de Dieu… Ne t’écarte pas, Eli-Hanna. Tu restais près de moi quand j’étais pour toi un voyageur et rien de plus. Pourquoi veux-tu t’éloigner de moi maintenant que tu sais que je suis le But ? Tu ignores combien ton cœur m’a consolé ! Tu ne peux le savoir. C’est moi, et non pas toi, qui ai le plus reçu… Quand les trois quarts d’Israël — si ce n’est plus —, me haïssent au point de se rendre criminels, quand les faibles s’éloignent de mon chemin, quand les tribulations de l’ingratitude, de l’animosité, de la calomnie, me blessent de toutes parts, quand je ne puis être réconforté par la pensée que mon sacrifice sera le salut pour Israël, trouver quelqu’un comme toi, père, c’est avoir une compensation pour ma douleur… Tu ne sais pas… Personne ne sait les tristesses de plus en plus profondes du Fils de l’homme. J’ai soif d’amour… et trop de cœurs sont des sources taries, desquelles il est inutile de m’approcher… Mais allons… »

Et, en tenant près de lui le vieillard, il entre dans la pièce où les tables sont déjà prêtes…

520.1

Sono ancora in undici quando riprendono la via. Undici visi pensosi e disgustati intorno al viso mesto di Gesù, che si accomiata dalle sorelle e che, dopo un attimo di riflessione, prima di varcare il cancello, ordina a Simone Zelote e a Bartolomeo: «Voi rimanete qui. Mi raggiungerete a Tecua presso Simone, oppure nella casa di Niche presso Gerico, o a Betabara; ciò se egli viene. E… servite la carità. Mi avete inteso?».

«Va’ tranquillo, Maestro. Non offenderemo l’amor di prossimo in nessuna maniera», assicura Bartolomeo.

«Qualunque sia l’ora in cui egli vi raggiungesse, partite subito».

«Subito, Maestro. E… grazie della fiducia che hai in noi», dice lo Zelote.

Si baciano e, mentre un servo chiude il cancello e Gesù si allontana, i due rimasti tornano, insieme alle sorelle, verso la casa.

Gesù davanti, solo; dietro Pietro tra Matteo e Giacomo d’Alfeo; dietro Filippo con Andrea, Giacomo e Giovanni di Zebedeo. Ultimi, silenziosi quanto gli altri, vengono Tommaso e Giuda Taddeo. Ma ho detto male[1]. Anche Pietro non parla. I suoi due compagni si scambiano poche parole, ma egli, che è fra l’uno e l’altro, non parla. Va taciturno a capo chino. Sembra intrecciare un muto colloquio con le pietre e le erbe che calpesta.

520.2

Anche gli ultimi due hanno un quasi uguale atteggiamento. Soltanto che, mentre Tommaso sembra immerso nella contemplazione di un rametto di salice che sfronda foglia per foglia, e guarda ogni foglia dopo averla staccata quasi ne studiasse il colore verdolino da un lato, argenteo dall’altro, o le venature della trama, Giuda Taddeo guarda fisso diritto davanti a lui. Non so se guardi l’orizzonte che, valicata una cresta, si apre su una chiarità vaporosa di pianura all’aurora, o se guardi unicamente il capo biondo di Gesù, che ha gettato indietro il lembo del manto come per godere sul capo il mite sole decembrino.

È contemporanea la fine dell’occupazione di Tommaso e la fine della contemplazione dell’orizzonte, o del Maestro, da parte di Giuda Taddeo. Quest’ultimo abbassa gli occhi e volge il capo guardando il compagno, mentre Tommaso, ridotto il suo rametto ad un esile frustino, alza gli occhi a guardare il Taddeo. Uno sguardo acuto e nello stesso tempo buono e mesto, che incontra uno sguardo uguale.

«Così è, amico! È proprio così!», dice Tommaso come concludendo un discorso.

«Sì. È così. E il mio dolore è ben grande… Per me è anche amor di parente…».

«Capisco. Ma… Tu hai un tormento d’affetto in cuore. Ma, e io? Io ho un rimorso che mi tormenta. Ed è peggio ancora».

«Un rimorso tu? Tu non hai motivo di rimorsi. Tu sei buono e fedele. Gesù è contento di te, e noi da te non abbiamo mai motivo di scandalo. Come allora ti viene questo senso di rimor­so?».

«Da un ricordo. Il ricordo del giorno nel quale ho deciso di seguire il nuovo Rabbi apparso nel Tempio…

520.3

Io e Giuda eravamo vicini e abbiamo ammirato l’atto e le parole del Maestro. E deciso di ricercarlo… E io ero ancor più deciso di Giuda e quasi ho trascinato lui. Egli dice l’opposto, ma così è. Il mio rimorso è questo. Di aver insistito perché egli venisse… Ho portato un perenne dolore a Gesù. Ma Giuda, io lo sapevo, era beneamato da… molti, e pensavo potesse essere utile. Stolto come tutti, che non sanno che pensare ad un re d’Israele più grande di Davide e Salomone, ma sempre un re… un re come Lui dice che non sarà mai, avevo spasimato perché fra i discepoli ci fosse questo che poteva servire!… Io lo speravo. E solo adesso capisco, sempre più capisco la giustizia di Gesù che non lo accolse subito, anzi che fece divieto di cercarlo… Un rimorso, ti dico! Un rimorso! Quell’uomo non è buono».

«Non è buono. Ma tu non ti creare dei rimorsi. Non hai fatto con malizia quanto hai fatto e perciò non hai colpa. Io te lo dico».

«Ne sei proprio sicuro? O dici così per consolarmi?».

«Lo dico perché è verità. Non pensare più al passato, Toma. Non serve ad annullarlo…».

«Tu dici bene! Ma pensa! Se per causa mia il Maestro mio avesse sciagure… Io ho il cuore pieno di affanno e di sospetti. Sono un peccatore perché giudico il compagno, e con giudizio non pietoso. E sono peccatore perché dovrei credere alle parole del Maestro… Egli scusa Giuda… Tu… ci credi al tuo fratello?».

«In tutto meno che in questo. Ma non ti desolare. Tutti noi abbiamo lo stesso pensiero. Anche Pietro, che si consuma tanto si sforza a pensare ogni bene di quell’uomo, anche Andrea, che è più mite di un agnellino, anche Matteo, l’unico fra noi che non ha ribrezzo per nessun peccatore o peccatrice. E il tanto amoroso, il tanto puro Giovanni, che ha questa felice sorte di non temere il male né il vizio, perché è tanto colmo di carità e di purezza da non aver posto per accogliere altro. E lo ha il mio fratello. Dico Gesù. E certo Egli ha anche altri pensieri con questo, pensieri per i quali vede la necessità di tenere Giuda… fino a quando ogni tentativo di farlo buono sarà esauri­to».

«Sì. Ma… come finirà? Egli ha molte… Egli non ha… Insomma, tu capisci senza che io dica. Quale punto raggiunge­rà?».

«Non so… Forse si staccherà da noi… Forse resterà in attesa di vedere chi è il più forte in questa lotta fra Gesù e il mondo ebraico…».

«E altro? Non pensi che egli già da ora serva due padroni?».

«Questo è sicuro».

«E tu non temi che possa servire i più numerosi, in modo da nuocere totalmente al Maestro?».

«No. Non lo amo. Ma non posso pensare che egli… Almeno per ora, no. Certo però temerò questo se un giorno verrà in cui il favore della folla abbandonasse il Maestro. Mentre, se una acclamazione di popolo lo consacrasse re e duce nostro, sono certo che Giuda abbandonerebbe tutti per Lui. È un profittatore… Dio lo trattenga, e protegga Gesù e noi tutti!…».

520.4

I due si accorgono di avere rallentato molto il passo e di essere molto distanziati dai compagni e, senza più parlare, si danno a camminare svelti per raggiungerli.

«Ma che facevate?», interroga Matteo. «Il Maestro vi voleva…».

Tommaso e il Taddeo procedono svelti per andare da Gesù.

«Di che parlavate fra voi?», chiede Gesù fissandoli in volto.

I due si guardano. Dire? Non dire? Vince la sincerità. «Di Giuda», dicono insieme.

«Lo sapevo. Ma ho voluto mettere alla prova la vostra sincerità. Mi avreste dato un dolore se aveste mentito… Ma non parlatene più, e specie in quel modo. Vi sono tante cose buone delle quali parlare. Perché scendere sempre a considerare ciò che è molto, troppo materiale? Isaia dice[2]: “Lasciate l’uomo che ha lo spirito nelle narici”. Io vi dico: lasciate di analizzare quest’uomo e preoccupatevi del suo spirito. L’animale che è in lui, il suo mostro, non deve attirare i vostri sguardi e giudizi; ma abbiate amore, un amore doloroso e attivo, per il suo spirito. Liberatelo dal mostro che lo tiene. Non sapete…».

Si volta a chiamare gli altri sette: «Venite qui tutti, perché a tutti serve ciò che dico, perché tutti avete gli stessi pensieri in cuore… Non sapete che voi imparate più attraverso a Giuda di Keriot che attraverso ogni altra persona? Molti Giuda troverete e pochissimi Gesù nel vostro ministero apostolico. I Gesù saranno dolci, buoni, puri, fedeli, ubbidienti, prudenti, senza avidità. Saranno ben pochi… Ma quanti, quanti Giuda di Keriot troverete voi e i vostri seguaci e successori per le vie del mondo! E per essere maestri e sapere, dovete fare questa scuola… Egli, con i suoi difetti, vi mostra l’uomo quale è; Io vi mostro l’uomo quale dovrebbe essere. Due esempi necessari ugualmente. Voi, conoscendo bene l’uno e l’altro, dovete cercare di mutare il primo nel secondo… E la mia pazienza sia la vostra norma».

520.5

«Signore, io sono stato un grande peccatore e sarò certo un esempio io pure. Ma io vorrei che Giuda, che non è peccatore come io lo fui, divenisse il convertito che io sono. È superbia dirlo?».

«No, Matteo, non è superbia. Rendi onore a due verità col dirlo. La prima è che veritiera è la sentenza che dice: “La buona volontà dell’uomo opera miracoli divini”. La seconda è che Dio ti ha amato infinitamente, sin da quando tu non ci pensavi, e lo faceva perché non gli era ignota la tua capacità di eroismo. Tu sei il frutto di due forze: la tua volontà e l’amore di Dio. E metto per prima la tua volontà, perché senza di essa vano sarebbe stato l’amore di Dio. Vano, inerte…».

«Ma senza la volontà nostra non potrebbe Dio convertire?», interroga Giacomo d’Alfeo.

«Certamente. Ma poi si richiederebbe sempre la volontà dell’uomo per persistere nella conversione ottenuta miracolosamente».

«Allora in Giuda questa volontà non c’è stata e non c’è, né prima di conoscerti, né ora…», dice impetuosamente Filippo.

Alcuni ridono, altri sospirano.

Gesù, unico, difende l’apostolo assente: «Non lo dite! Ce l’ha avuta e ce l’ha. Ma la mala legge della carne la soverchia ad intervalli. È un malato… Un povero fratello malato. In ogni famiglia c’è il debole, il malato, colui che è la pena, l’affanno, l’onere della famiglia. Eppure non è il più amato dalla madre il figliolino gracile? Non è il più servito dai fratelli il fratellino infelice? Non è quello al quale il padre dà il boccone prelibato, levandoselo dal piatto, per dargli una gioia, per non fargli capire che è un peso e non rendergli perciò pesante l’infermità?».

«È vero. Proprio così. La mia gemella era gracile nella prima età. Tutta la robustezza l’avevo presa io. Ma l’amore di tutta la famiglia l’ha sovvenuta tanto che ora è florida sposa e madre», dice Tommaso.

«Ecco. Fate voi col vostro spirituale fratello debole ciò che fareste con un debole fratello carnale. Io non avrò una parola di rimprovero. Voi non siate da più di Me. Il vostro paziente amore è il rimprovero più forte e al quale non si può reagire. A Tecua lascerò Matteo e Filippo ad attendere Giuda… Il primo si ricordi che fu peccatore e il secondo che è padre…».

«Sì, Maestro. Lo ricorderemo».

«A Gerico, se ancora non sarà con noi, lascerò Andrea e Giovanni, ed essi ricordino che non tutti hanno ricevuto in uguale misura i doni gratuiti di Dio…

520.6

Ma andate da quel vecchio mendico che vacilla sulla via. La città è alle viste. Con l’obolo potrà procurarsi del pane».

«Signore, non ci è concesso. Giuda se ne è andato con la borsa…», dice Pietro. «E le sorelle non ci hanno dato nulla».

«Hai ragione, Simone. Sono come stordite dal dolore e noi con loro. Non importa. Abbiamo un poco di pane. Noi siamo giovani e forti. Diamolo al vecchio, che non cada per via».

Frugano nelle borse, raccolgono morselli di pane, li danno al vecchietto che li guarda stupito.

«Mangia, mangia!», rincuora Gesù. E lo fa bere alla sua borraccia, mentre gli chiede dove va.

«A Tecua. C’è gran mercato domani. Ma da ieri non mangiavo».

«Sei solo?».

«Più che solo… Mio figlio mi ha scacciato…». La voce senile strazia il cuore a sentirla.

«Dio ti aprirà le porte del suo Regno se sai credere nella sua misericordia».

«E in quella del suo Messia. Ma mio figlio non avrà Messia, perché non può avere il Messia, lui che lo odia tanto da odiare il padre suo perché lo ama».

«Per questo ti ha cacciato?».

«Per questo. E per non perdere le amicizie di alcuni che perseguitano il Messia. Ha voluto mostrare loro che il suo odio supera il loro, tanto che supera anche la voce del sangue».

«Che orrore!», dicono tutti.

«Sarebbe più orrore se io avessi gli stessi pensieri di mio figlio», dice con veemenza il vecchierello.

«Ma chi è costui? Se ho capito bene, deve essere uno che ha potere e voce…», dice Tommaso.

«Uomo, non sarà un padre che dice il nome del figlio colpevole perché sia sprezzato. Devo dire che ho fame e freddo, io che con molto lavoro avevo aumentato il benessere della casa per far felice il mio maschio. Ma non più di così. Pensa che io sono uno di Giudea ed egli uno di Giudea, e che perciò siamo uguali per razza e diversi per pensiero. Il resto non serve».

520.7

«E non chiedi nulla a Dio, tu che sei un giusto?», domanda dolcemente Gesù.

«Che tocchi il cuore della mia creatura e lo porti a credere ciò che io credo».

«Ma per te, proprio tutto per te, non chiedi nulla?».

«Di incontrare Colui che per me è il Figlio di Dio. E per venerarlo e poi morire».

«Ma se muori non lo vedrai più. Sarai nel Limbo…».

«Per poco tempo. Tu sei un rabbi, non è vero? Io ci vedo molto poco… L’età… e il molto pianto, e la fame anche… Ma vedo i fiocchi della tua cintura… Se sei un buon rabbi, e così mi pare, devi sentire tu pure che il tempo è giunto, il tempo detto[3] da Isaia, voglio dire. E sta per venire l’ora in cui l’Agnello prenderà su di Sé tutti i peccati del mondo e porterà tutti i nostri mali e dolori, e sarà perciò trafitto e immolato, perché noi si sia risanati e in pace con l’Eterno. E allora anche per gli spiriti sarà pace… Lo spero confidando nella misericordia di Dio».

«Non hai mai visto il Maestro?».

«No. L’ho sentito parlare nel Tempio nelle feste. Ma io sono piccolo e ancor più mi fa tale l’età, e ci vedo poco, l’ho detto. Per questo, se vado nella folla non vedo per chi m’è davanti, se sto lontano non vedo perché sto lontano. Oh! lo vorrei vedere! Almeno una volta!».

«Lo vedrai, padre. Dio ti accontenterà. E a Tecua hai dove andare?».

«No. Starò sotto un portico o sotto un portone. Ci sono avvezzo ormai».

«Vieni con Me. Conosco un buon israelita. Ti accoglierà in nome di Gesù, il Maestro galileo».

«Anche tu sei galileo, però. Lo si sente nel parlare».

«Sì… Sei stanco? Ma siamo già alle prime case. Presto riposerai e avrai ristoro».

520.8

Gesù si curva a dire a Pietro qualcosa, e Pietro si sposta dicendo agli altri ciò che ha detto Gesù e che non afferro. Poi con i figli di Alfeo e Giovanni accelera il passo entrando in città. Gesù lo segue con gli altri, adeguando il passo a quello del povero vecchietto che non parla più, molto estenuato, così che finisce a rimanere indietro con Andrea e Matteo. La città pare vuota. È il mezzogiorno e molti sono nelle case per i pasti.

Fatti pochi metri, ecco Pietro: «Fatto, Signore. Simone lo accoglie perché Tu lo conduci, e ti ringrazia di avere pensato a lui».

«Benediciamo il Signore! Ci sono ancora dei giusti in Israele. Questo vecchio ne è uno, e Simone un altro. Sì, ve ne sono ancora di buoni, di misericordiosi, di fedeli al Signore. E ciò compensa di tante amarezze. E fa sperare che la giustizia divina si mitigherà per questi giusti».

«Però!… Un figlio cacciare il padre per non perdere l’amicizia certo di qualche potente fariseo!».

«A tanto può giungere l’odio per Te! Io sono sdegnato!», dice Filippo.

«Oh! vedrete molto di più di questo!», risponde Gesù.

«Di più? E che più di un padre cacciato perché non ti odia? È enorme il peccato di quell’uomo!…».

«Più enorme sarà il peccato di un popolo contro il suo Dio… Ma attendiamo il vecchio…».

«Chi sarà suo figlio?».

«Un fariseo!», «Un sinedrista!», «Un rabbi». I pareri sono di­versi.

«Un disgraziato. Non indagate. Oggi ha percosso suo padre. Domani percuoterà Me. Vedete dunque che il peccato di Giuda, il suo essersi allontanato così, come un figliuolo discolo, è nulla al paragone. Eppure Io pregherò per questo figlio ingrato, per questo ebreo offensore di Dio. Perché si ravveda. Fate voi la stessa cosa…

520.9

Vieni, padre. Come ti chiami?».

«Elianna. Non sono mai stato un felice! Mi è morto il padre prima che io nascessi e la madre nel partorirmi. La madre di mia madre, che mi ha allevato, mi ha dato per nome i due nomi del padre e della madre uniti».

«Veramente sei un Eli[4], uomo, e tuo figlio è pari a Finnes», dice Filippo che non può darsi pace di un simile peccato.

«Dio non lo voglia, uomo. Finnes è morto peccatore, e morto quando l’arca venne presa. Sventura sarebbero alla sua anima e a tutto Israele queste cose», risponde il vecchierello.

«Senti, questa casa mi è amica, e ciò che Io chiedo ad essa ottengo. È di un certo Simone, uomo giusto al cospetto di Dio e degli uomini. Egli ti accoglie per amor mio, se tu accetti il luogo», dice Gesù prima di bussare alla porta.

«E posso avere delle scelte da fare? Invocherò le benedizioni del Cielo su chi mi darà il pane e il ricovero della carità. Ma voglio lavorare. Non è vergogna esser servo. È vergogna fare peccato…».

«Lo diremo a Simone», dice con un sorriso di compassione Ge­sù guardando il vecchierello ridotto a nulla dagli stenti e dal dolore morale.

520.10

Si apre la porta: «Entra, Maestro, la pace sia con Te e con chi è con Te. Dove è questo mio fratello che Tu mi porti? Che io possa dargli il bacio di pace e di benvenuto», dice un uomo sui cinquant’anni.

«Eccolo. E il Signore ti compensi».

«Lo sono. Ho Te mio ospite. Chi ha Te ha Dio. Non ti attendevo e non posso onorarti come vorrei. Ma sento che conti ripassare fra giorni e starò pronto ad accoglierti come si conviene».

Sono ormai in una stanza dove sono pronti bacili fumanti per le abluzioni. Il vecchietto sta intimidito contro la porta, ma il padrone di casa lo piglia per mano, lo conduce a sedere, lo vuole scalzare di sua mano, servire come fosse un re, e poi mettergli sandali nuovi, mentre il vecchietto dice: «Perché? Ma perché? Io sono venuto per servire, e tu mi servi! Non è giusto».

«Giusto è, uomo. Non posso seguire il Rabbi, perché la mia casa richiede la mia assistenza. Ma, come ultimo discepolo del Maestro santo, mi industrio di mettere in pratica le sue parole».

«Tu lo conosci bene. Veramente lo conosci perché sei buono. Molti sono che lo conoscono in Israele, ma con che? Con gli occhi e con l’odio. Perciò non lo conoscono. Una donna si conosce soltanto quando non si ignora più nulla di lei e la si possiede tutta. Così è di Gesù di Nazaret, che io con gli occhi non conosco, ma che conosco più di tanti, perché io credo che in Lui è la Sapienza. Ma tu lo conosci proprio, e di vista e di dottrina».

L’uomo guarda Gesù, ma non dice niente.

Il vecchietto riprende: «Io l’ho detto a questo rabbi che voglio lavorare…».

«Sì, sì. Troveremo un lavoro per te. Per ora vieni alla mensa. Maestro, i tuoi discepoli verranno fra poco. Possiamo sederci alle mense lo stesso o preferisci attenderli?».

«Attenderli vorrei. Ma se hai del lavoro da fare…».

«Oh! Maestro, Tu lo sai che per me ubbidire al minimo tuo desiderio è gioia».

Il vecchierello ha in questo momento un primo sospetto sull’identità dell’Uomo che lo ha soccorso per via, e lo guarda, lo guarda, poi guarda i suoi compagni… un attento esame… e gira loro intorno…

520.11

Entrano i figli di Alfeo con Giovanni. Gesù li chiama per nome.

«Oh! Dio altissimo! Ma allora… Tu sei Tu!», esclama il vecchietto e si butta giù venerando.

Lo stupore suo non è inferiore a quello degli altri. È così strano quel modo di riconoscimento del Maestro! Tanto che Pietro lo interroga: «Che di speciale in questi nomi, così comuni in Israele, per farti capire che sei di fronte al Messia?».

«Perché conosco Giuda. Viene sempre da mio figlio e…», il vecchietto si arresta imbarazzato di aver nominato il figlio…

«Ma io non ti ho mai visto, uomo», dice il Taddeo mettendoglisi ben davanti, curvo per essere viso a viso.

«Neppur io ti conosco. Ma un Giuda discepolo del Cristo viene sovente da mio figlio e ho sentito parlare di un Giovanni, di un Giacomo e di un Simone amico di Lazzaro di Betania e di tante altre cose… Sentire tre dei nomi noti per quelli dei discepoli più intimi del Maestro! E Lui, così buono!… Ho capito, ecco! Ma dove è l’altro Giuda?».

«Non c’è. Ma è vero. Hai capito. Sono Io. Il Signore è buono, padre. Desideravi vedermi e mi hai visto. Benediciamo le misericordie di Dio… Non scansarti, Elianna. Mi stavi vicino quando per te ero un viandante e nulla più. Perché vuoi allontanarti da Me ora che sai che Io sono la Mèta? Tu non sai quanto il tuo cuore mi ha consolato! Non lo puoi sapere. Io, non tu, sono colui che più ha ricevuto… Quando tre quarti di Israele, e più ancora, mi odiano sino al delitto, quando i deboli si allontanano dalla mia via, quando i triboli dell’ingratitudine, del­l’astio, della calunnia mi feriscono da ogni parte, quando non posso trovare refrigerio nel pensiero che il mio Sacrificio sarà salute ad Israele, trovare uno come te, o padre, è avere compenso al dolore… Tu non sai… Nessuno sapete le sempre più profonde tristezze del Figlio dell’uomo. Ho sete di amore… e troppi cuori sono sorgenti disseccate alle quali inutilmente mi accosto… Ma andiamo…».

E tenendo vicino il vecchietto, entra nella stanza dove sono le tavole già pronte…


Notes

  1. Isaïe dit, en Is 2, 22.
  2. dont parle Isaïe, en Is 52, 7-15 ; 53, 1-12 (en particulier à partir du verset 6).
  3. Eli,… Finnès, sont mentionnés en 1 S 1, 3 ; 2, 12-17.22-34 ; 3, 1-18 ; 4, 4-18. Relevons que le nom de Finnès (mieux : Finnéès) est devenu Pincas, ou Pinhas, dans les versions modernes de la Bible).
  4. Jude : l’italien ne distingue pas Jude et Judas, come nous le faisons en français, si ce n’est en adjoignant “ Iscariote ” pour l’un, et Thaddée pour l’autre. Cela explique la confusion du vieillard.

Note

  1. Ma ho detto male. Invece no, perché MV non ha scritto (e forse ritiene di averlo scritto) che il primo gruppo dei tre sta parlando.
  2. dice, in: Isaia 2, 22.
  3. detto, in: Isaia 52, 7-15; 53, 1-12 (specialmente dal versetto 6).
  4. Eli, … Finnes, dei quali si parla in: 1 Samuele 1, 3; 2, 12-17.22-34; 3, 1-18; 4, 4-18. Da notare che il nome Finnes (meglio: Finees) è diventato Pincas, o Pinhas, nelle moderne versioni della Bibbia.