Gli Scritti di Maria Valtorta

77. A Hébron chez Zacharie.

77. A Ebron nella casa di Zaccaria.

77.1

« Vers quelle heure arriverons-nous ? demande Jésus, qui marche au centre du groupe précédé par les brebis qui broutent l’herbe des talus.

– Vers la troisième heure. Il y a environ dix milles, répond Elie.

– Ensuite nous irons à Kérioth ? demande Judas.

– Oui. Nous nous y rendrons.

– Et n’était-il pas plus court d’aller de Yutta à Kérioth ? Ce ne doit pas être loin, n’est-ce pas, berger ?

– Deux milles de plus, environ.

– Alors nous en faisons plus de vingt pour rien.

– Judas, pourquoi cette inquiétude ? dit Jésus.

– Je ne suis pas inquiet, Maître, mais tu m’avais promis de venir chez moi…

– Et j’y irai. Je tiens toujours mes promesses.

– J’ai envoyé prévenir ma mère… d’ailleurs, tu l’as dit : on est encore présent avec les morts par l’esprit.

– Je l’ai dit. Mais, Judas, réfléchis : tu n’as pas encore souffert pour moi. Eux, cela fait trente années qu’ils souffrent et ils n’ont jamais trahi, pas même le souvenir de moi. Pas même le souvenir. Ils ne savaient pas si j’étais vivant ou mort… et pourtant ils sont restés fidèles. Ils se souvenaient de moi comme nouveau-né, un enfant qui ne leur manifestait que pleurs et appétit du lait maternel… et pourtant, ils m’ont vénéré comme Dieu. Ils ont beau avoir été frappés, maudits, persécutés comme la honte de la Judée à cause de moi, leur foi ne vacillait pas sous les coups, ne se desséchait pas. Au contraire, des racines plus profondes poussaient et elle n’en devenait que plus vigoureuse.

77.2

– A propos : cela fait quelques jours que la question me brûle les lèvres. Ce sont tes amis et ceux de Dieu, n’est-ce pas ? Les anges les ont bénis avec la paix du Ciel, non ? Ils sont restés justes malgré toutes les tentations, n’est-ce pas ? Alors explique-moi pourquoi ils ont été malheureux. Et Anne ? Elle a été tuée pour t’avoir aimé…

– Tu en conclus, par conséquent, que mon amour et celui qu’on me donne portent malheur.

– Non… mais…

– Mais c’est bien cela. Cela me déplaît de te voir tellement fermé à la lumière, tellement possédé par le sens humain. Non, laisse-le tranquille, Jean, et toi aussi, Simon. Je préfère qu’il parle. Je ne lui en ferai jamais reproche. Je désire seulement que les âmes s’ouvrent pour y faire entrer la lumière. Viens ici, Judas, écoute. Tu pars d’un jugement partagé par beaucoup d’hommes qui vivent ou vivront. J’ai parlé de jugement. Je devrais dire : erreur. Mais étant donné que vous le faites sans malice, par ignorance de la vérité, ce n’est pas une erreur, mais seulement un jugement imparfait comme peut l’être celui d’un enfant. Or enfants, vous l’êtes, pauvres hommes. Et je suis ici votre Maître, pour faire de vous des adultes capables de discerner le vrai du faux, le bon du mauvais, le meilleur du bon. Ecoutez donc.

Qu’est-ce que la vie ? C’est un temps d’attente, je dirais les limbes des Limbes que vous donne le Dieu Père, pour prouver votre nature de bons fils ou de bâtards et pour vous réserver, en fonction de vos actes, un avenir qui ne connaîtra plus ni attentes ni épreuves. Maintenant, dites-moi : serait-il juste que quelqu’un jouisse aussi d’un privilège spécial sa vie durant, sous prétexte qu’il a eu le rare avantage d’avoir la possibilité de servir Dieu d’une manière particulière ? Ne vous semble-t-il pas qu’il a déjà beaucoup reçu et donc qu’il peut s’estimer heureux même s’il ne l’est pas humainement ? Ne serait-il pas injuste que celui qui possède déjà en son cœur la lumière d’une manifestation divine et le sourire approbateur de sa conscience possède encore des honneurs et des biens terrestres ? Qui plus est, ne serait-ce pas imprudent ?

77.3

– Maître, je dis que ce serait encore de la profanation. Pourquoi mettre des joies humaines, là où tu es, toi ? Quand quelqu’un te possède – et ils t’ont possédé, eux, les seuls riches en Israël pour t’avoir eu depuis trente ans – il ne lui faut rien avoir d’autre. On ne pose pas d’objet humain sur le propitiatoire… et un vase consacré ne sert que pour des usages saints. Eux, ce sont des consacrés, à partir du jour où ils ont vu ton sourire… et rien, non, rien qui ne soit pas toi ne doit entrer dans le cœur qui te possède. Si je pouvais être comme eux ! Dit Simon.

– Cependant, tu t’es empressé, après avoir vu le Maître et après ta guérison, de reprendre possession de tes biens, répond ironiquement Judas.

– C’est vrai. Je l’ai dit et je l’ai fait. Mais sais-tu pourquoi ? Comment peux-tu juger si tu ne sais pas tout ? Mon homme d’affaires a reçu des ordres précis. Maintenant, Simon le Zélote est guéri ; ses ennemis ne peuvent plus lui nuire en l’isolant, ni le faire poursuivre car il n’appartient plus à aucune secte, mais seulement à Jésus ; il peut donc disposer de ses biens qu’un homme honnête et fidèle lui a gardés. Et moi, qui suis encore propriétaire pour un moment, j’ai fixé leur destination et le prix pour tirer plus d’argent de leur vente et pouvoir dire… non, cela, je ne le dis pas.

– Ce sont les anges qui le disent pour toi, Simon, et l’inscrivent dans le livre éternel » dit Jésus.

Simon regarde Jésus. Leurs deux regards se rencontrent, l’un étonné, l’autre bénissant.

« Comme toujours, j’ai tort.

– Non, Judas, tu as le sens pratique. Tu le reconnais toi-même.

– Ah ! Mais, avec Jésus !… Simon-Pierre était lui aussi attaché au sens pratique et maintenant c’est le contraire !… Toi aussi, Judas, tu deviendras comme lui. Il y a peu de temps que tu es avec le Maître, nous, il y a plus longtemps et nous sommes déjà meilleurs, dit Jean, toujours doux et conciliant.

– Il n’a pas voulu de moi. Autrement, j’aurais été à lui depuis la Pâque. »

Judas est vraiment nerveux, aujourd’hui.

Jésus coupe court en demandant à Lévi :

« Es-tu déjà allé en Galilée ?

– Oui, Seigneur.

– Tu viendras avec moi, pour me conduire auprès de Jonas. Tu le connais ?

– Oui, à la Pâque, on se voyait toujours, j’allais vers lui. »

Joseph baisse la tête, peiné. Jésus le voit.

« Vous ne pouvez pas venir ensemble. Elie resterait seul avec le troupeau, mais tu viendras avec moi jusqu’au passage de Jéricho, où nous nous séparerons pendant quelque temps. Je te dirai ensuite ce que tu dois faire.

– Et nous, plus rien ?

– Vous aussi, Judas, vous aussi.

77.4

– On aperçoit des maisons, dit Jean qui précède les autres de quelques pas.

– C’est Hébron, à cheval sur deux rivières, avec sa crête. Tu vois, Maître, cette grande construction là-bas, un peu plus haute que les autres, dans cette verdure ? C’est la maison de Zacharie.

– Pressons le pas. »

Ils parcourent rapidement les derniers mètres de route et entrent dans le village. Les clarines des troupeaux font un bruit de castagnettes quand ils avancent sur les pierres irrégulières du chemin dont le pavage est ici très grossier. Ils arrivent à la maison. Les gens regardent ce groupe d’hommes différents par l’apparence, l’âge, les vêtements, au milieu de la blancheur du troupeau.

« Oh ! Comme cela a changé ! Il y avait ici une grille, dit Elie. Maintenant, à sa place, il y a un portail de fer qui bouche la vue et aussi un mur de clôture plus haut qu’un homme et ainsi, on ne voit rien.

– Peut-être y aura-t-il une ouverture par derrière. Allons voir. »

Ils font le tour d’un vaste quadrilatère, d’un rectangle plutôt, mais le mur s’élève partout à la même hauteur.

« Le mur est récent, dit Jean en l’observant. Il n’y a pas d’interruption et par terre il reste encore de la chaux en pierres.

– Je ne vois pas non plus le tombeau… Il était du côté du bosquet. Maintenant le bosquet est en dehors du mur et… et on dirait un terrain communal. On y fait du bois… »

Elie est perplexe.

77.5

Un homme, un vieux bûcheron, de petite taille, mais robuste qui observe le groupe cesse de scier un tronc abattu et s’ap­proche :

« Qui cherchez-vous ?

– Nous voulions entrer dans la maison pour prier sur le tombeau de Zacharie.

– Il n’y a plus de tombeau. Vous n’êtes pas au courant ? Qui êtes-vous ?

– Je suis un ami de Samuel, le berger. Lui…

– Il ne faut pas, Elie » dit Jésus.

Elie se tait.

« Ah ! Samuel !… Oui, mais depuis que Jean, le fils de Zacharie, est en prison, la maison ne lui appartient plus. C’est un malheur, parce qu’il faisait distribuer tous les revenus de sa propriété aux pauvres d’Hébron. Un matin, il est venu un individu de la cour d’Hérode, il a jeté Joël dehors, a mis les scellés, puis est revenu avec des maçons pour faire construire le mur… Le tombeau était là, au coin. Il n’en a pas voulu… et un matin, nous avons trouvé endommagé, déjà à moitié démoli… les pauvres ossements tout mélangés… Nous les avons ramassés comme nous avons pu… Ils sont maintenant dans un seul cercueil… Et ce sale type loge maintenant ses maîtresses dans la maison du prêtre Zacharie. Actuellement, c’est une femme mime de Rome. C’est pour cela qu’il a élevé le mur. Il ne veut pas qu’on puisse voir… La maison du prêtre, une maison close ! La maison du miracle et du Précurseur ! Car c’est certainement lui, même si ce n’est pas lui le Messie. Et que d’ennuis nous avons eus à cause de Jean-Baptiste ! Mais c’est notre grand homme ! Notre vraiment grand homme ! Déjà, sa naissance était un miracle. Elisabeth, vieille comme un chardon sec, devint féconde comme un pommier en Adar, premier miracle. Puis arriva une de ses cousines, une sainte, pour l’aider et délier la langue du prêtre. Elle s’appelait Marie. Je me souviens d’elle bien qu’on ne l’ait vue que très rarement. Comment cela arriva-t-il, je ne sais. On dit que, pour faire plaisir à Elisabeth, elle lui fit poser la bouche muette de Zacharie sur son sein qui avait conçu, ou qu’on lui fit mettre ses doigts dans la bouche. Je ne sais pas bien. Ce qui est sûr, c’est qu’après neuf mois de silence, Zacharie a parlé en louant le Seigneur et en disant que le Messie est là. Je n’ai pas d’autres renseignements. Mais ma femme assure, elle qui était présente ce jour-là, que Zacharie a dit, en louant le Seigneur, que son fils passerait avant lui. Maintenant, moi, je dis : ce n’est pas ce que les gens croient. Jean est le Messie et il vient avant le Seigneur, comme Abraham marchait devant Dieu. Voilà. N’ai-je pas raison ?

– Tu as raison pour ce qui concerne l’esprit de Jean-Baptiste qui précède toujours Dieu, mais tu n’as pas raison en ce qui concerne le Messie.

– Alors celle dont on disait qu’elle était la Mère du Fils de Dieu – au dire de Samuel –, elle ne l’était pas réellement ? Elle ne l’est pas encore ?

– Elle l’était. Le Messie est né, précédé par celui qui au désert éleva la voix, comme l’a dit le prophète[1].

– Tu es le premier qui l’affirme. Jean, la dernière fois que Joël lui a apporté une peau de mouton, comme il le faisait tous les ans à l’entrée de l’hiver, n’a pas dit, quand on l’a interrogé sur le Messie : “ Il existe. ” Quand lui, il le dira…

– Homme, j’ai été disciple de Jean et je lui ai entendu déclarer : “ Voici l’Agneau de Dieu ” en le montrant du doigt…, dit Jean.

– Non, non, l’Agneau c’est lui. Véritable Agneau qui s’est développé tout seul, sans l’aide de sa mère et de son père, pour ainsi dire. A peine fils de la Loi, il s’est retiré dans les cavernes des montagnes en face du désert, et c’est là qu’il a grandi, s’entretenant avec Dieu. Elisabeth et Zacharie sont morts et il n’est pas venu. Dieu était pour lui père et mère. Il n’y a pas de saint plus grand que lui. Demandez à tout Hébron. Samuel le disait, mais ce sont les habitants de Bethléem qui doivent avoir eu raison. Le saint de Dieu, c’est Jean.

– Si quelqu’un te disait : “ Je suis le Messie ”, que lui dirais-tu ? demande Jésus.

– Je le traiterais de blasphémateur et je le chasserais à coups de pierres.

– Et s’il faisait un miracle pour prouver qu’il l’est ?

– Je l’appellerais “ possédé du démon ”. Le Messie viendra quand Jean se fera connaître sous sa véritable identité. La haine même d’Hérode en est la preuve. Lui, le rusé, il sait que Jean est le Messie.

– Il n’est pas né à Bethléem.

– Mais quand il sera libéré, après avoir annoncé lui-même son prochain avènement, il se manifestera à Bethléem. Bethléem aussi l’attend. Tandis que… ah ! Vas-y, si tu as du cran, parle aux habitants de Bethléem d’un autre Messie… et tu verras.

– Vous avez une synagogue ?

– Oui, tout droit, à deux cents pas, par ce chemin. Tu ne peux te tromper. La sépulture des restes profanés est tout près.

– Adieu et que le Seigneur t’éclaire. »

Ils s’en vont et tournent sur le devant de la maison

77.6

Une femme se tient devant le portail, jeune, à la tenue provocante. Elle est très belle.

« Seigneur, tu veux entrer dans la maison ? Entre. »

Jésus la fixe des yeux, sévère comme un juge, sans mot dire. C’est Judas qui s’en charge, approuvé par tous.

« Rentre, effrontée, ne nous profane pas par ta respiration, chienne famélique. »

La femme rougit vivement et baisse la tête. Elle s’empresse de disparaître, confuse, insultée par les gamins et les passants.

« Qui est assez pur pour prétendre : “ Je n’ai jamais désiré la pomme offerte par Eve ? ” dit Jésus d’un ton sévère, avant d’ajouter : montrez-le moi, et j’irai le saluer comme saint. Personne ? Alors si vous vous sentez incapables de l’approcher, non par mépris mais par faiblesse, retirez-vous. Je n’oblige pas les faibles à une lutte inégale. Femme, je voudrais entrer. Cette maison appartenait à un de mes parents. Elle m’est chère.

– Entre, Seigneur, si tu n’éprouves pas de dégoût pour moi.

– Laisse la porte ouverte, pour que les gens voient et ne jasent pas… »

Jésus passe, sérieux, solennel. La femme le salue, subjuguée, et n’ose bouger. Mais les insultes de la foule la piquent jusqu’au sang. Elle s’enfuit en courant au fond du jardin tandis que Jésus avance jusqu’au pied de l’escalier, jette un coup œil par la porte entrouverte, mais sans entrer. Puis il va à l’emplacement du tombeau, là où maintenant se trouve une espèce de petit temple païen.

« Les ossements des justes, même desséchés et dispersés répandent un baume purifiant et des semences de vie éternelle. Paix aux morts dont la vie a été bonne ! Paix aux purs qui dorment dans le Seigneur ! Paix à ceux qui ont souffert mais n’ont pas voulu connaître le vice ! Paix aux vrais grands du monde et du ciel ! Paix ! »

77.7

La femme l’a rejoint en suivant une haie qui la dissimule.

« Seigneur !

– Femme.

– Ton nom, Seigneur ?

– Jésus.

– Je ne l’ai jamais entendu. Je suis romaine : mime et ballerine. Je ne suis experte qu’en lascivité. Que signifie ce nom ? Le mien, c’est Aglaé et… et il veut dire : vice.

– Le mien veut dire : Sauveur.

– Comment sauves-tu ? Qui ?

– Celui qui recherche le salut en faisant preuve de bonne volonté. Je sauve en enseignant à être pur, à vouloir la douleur ainsi que l’honneur, le bien à tout prix. »

Jésus parle sans aigreur, mais aussi sans se tourner vers la femme.

« Je suis perdue…

– Je suis celui qui va à la recherche de ceux qui sont perdus.

– Je suis morte.

– Je suis celui qui donne la vie.

– Je suis saleté et mensonge.

– Je suis pureté et vérité.

– Tu es aussi bonté, toi qui ne me regarde pas, ne me touche pas, et ne me foule pas au pied. Pitié pour moi…

– C’est à toi d’abord d’avoir pitié de toi. De ton âme.

– Qu’est-ce que c’est, l’âme ?

– C’est ce qui fait de l’homme un dieu et non un animal. Le vice, le péché la tue et, une fois morte, l’homme devient un animal repoussant.

– Je pourrai te voir encore ?

– Celui qui me cherche me trouve.

– Où habites-tu ?

– Là où les cœurs ont besoin du médecin et des remèdes pour devenir honnêtes.

– Alors… je ne te verrai plus… Là où je suis, on ne veut ni médecin, ni remède, ni honnêteté.

– Rien ne t’empêche de venir là où je suis. Mon nom, on le criera dans les rues et il arrivera jusqu’à toi. Adieu.

– Adieu, Seigneur. Laisse-moi t’appeler “ Jésus ”. Ah, pas par familiarité !… Pour que rentre un peu de salut en moi. Je suis Aglaé. Souviens-toi de moi.

– Oui, adieu. »

La femme reste au fond du jardin. Jésus sort, l’air sévère. Il regarde tout le monde. Il remarque la perplexité des disciples, le mépris des habitants d’Hébron. Un esclave ferme le portail.

77.8

Jésus va droit par le chemin. Il frappe à la synagogue.

Un petit vieux s’avance, haineux. Il ne donne même pas à Jésus le temps de parler.

« La synagogue est interdite, pas question que ceux qui parlent aux courtisanes puissent mettre le pied dans ce lieu saint. Va-t’en ! »

Jésus fait demi-tour sans mot dire et continue sa route jusqu’à la sortie d’Hébron, ses disciples derrière lui. Alors, ils parlent.

« Pourtant, tu l’as bien cherché. Maître, lance Judas. Une courtisane !

– Judas, en vérité je t’affirme qu’elle s’élèvera au-dessus de toi. Et maintenant, toi qui me blâmes, que me dis-tu des Judéens ? Dans les lieux les plus saints de la Judée, nous avons été bafoués et chassés… Mais c’est ainsi. Le temps vient où Samarie et les païens adoreront le vrai Dieu, et le peuple du Seigneur sera souillé de sang et d’un crime… d’un crime au regard duquel les fautes des courtisanes qui vendent leur chair et leur âme seront peu de chose. Je n’ai pu prier sur les ossements de mes cousins et du juste Samuel. Mais peu importe. Reposez, dépouilles saintes, réjouissez-vous, âmes qui les habitiez. La première résurrection est proche. Ensuite viendra le jour où on vous montrera aux anges comme celles des serviteurs du Seigneur. »

Jésus se tait et tout prend fin.

77.1

«Verso che ora giungeremo?», chiede Gesù che cammina al centro del gruppo, preceduto dalle pecore che brucano l’erba delle prode.

«Verso l’ora terza. Sono circa dieci miglia», risponde Elia.

«E poi andiamo a Keriot?», chiede Giuda.

«Sì. Andiamo là».

«E non era più breve andare da Jutta a Keriot? Non ci deve esser molto. Vero, tu, pastore?».

«Due miglia di più, poco meno, o poco più».

«Così ne facciamo più di venti per niente».

«Giuda, perché così inquieto?», dice Gesù.

«Non inquieto, Maestro. Ma mi avevi promesso di venire a casa mia…».

«E vi verrò. Mantengo sempre le mie promesse».

«Ho mandato ad avvertire mia madre… e Tu, del resto, lo hai detto: coi morti si è anche con lo spirito».

«L’ho detto. Ma, Giuda, rifletti: tu per Me non hai ancora sofferto. Questi è trent’anni che soffrono, e non hanno mai tradito, neppure il ricordo di Me. Neppure il ricordo. Non sapevano se ero vivo o morto… eppure sono rimasti fedeli. Mi ricordavano neonato, infante senza altro che pianto e bisogno di latte… eppure mi hanno sempre venerato come Dio. Per causa mia[1] sono stati colpiti, maledetti, perseguitati come un obbrobrio della Giudea, eppure la loro fede ad ogni colpo non vacillava, non inaridiva, ma metteva radici più fonde e si faceva più vigorosa».

77.2

«A proposito. È da qualche giorno che la domanda mi brucia le labbra. Sono amici tuoi e di Dio costoro, non è vero? Gli angeli li hanno benedetti con la pace del Cielo, non è vero? Loro sono rimasti giusti contro tutte le tentazioni, non è vero? Mi spieghi allora perché furono infelici? E Anna? È stata uccisa per averti voluto bene…».

«Tu arguisci perciò che il mio amore e l’amarmi porti sfortuna».

«No… ma…».

«Ma è così. Mi spiace vederti tanto chiuso alla Luce e tanto posseduto dall’umano. No, lascia stare, Giovanni, e anche tu, Simone. Preferisco che egli parli. Io non rimprovero mai. Solo voglio apertura di animi per potervi mettere luce. Vieni qui, Giuda, ascolta. Tu parti da un giudizio comune a tanti viventi e a tanti che vivranno. Ho detto: giudizio. Dovrei dire: errore. Ma, posto che lo fate senza malizia, per ignoranza di ciò che è verità, non è errore, è solo giudizio imperfetto, come lo può essere quello di un bambino. E bambini siete, poveri uomini. Ed Io sono qui, Maestro, per fare di voi degli adulti capaci di discernere il vero dal falso, il buono dal cattivo, il migliore dal buono. Ascoltate, dunque. Cosa è la vita? È un tempo di sosta, direi il limbo del Limbo, che il Padre Dio vi dà per provare la vostra natura di figli buoni o di bastardi, e per destinarvi, in base alle vostre opere, un futuro che sarà senza più soste né prove. Ora ditemi voi: sarebbe giusto che uno, perché ha avuto il raro bene di avere il modo di servire Dio in maniera speciale, abbia anche un bene continuo, per tutta la vita? Non vi pare che già molto ebbe, e che perciò può dirsi beato, anche se, nell’umano, beato non è? Non sarebbe ingiusto che chi ha già luce di divina manifestazione nel cuore, e sorriso di coscienza che approva, abbia anche onori e beni terreni? E non sarebbe anche imprudente?».

77.3

«Maestro, io dico che sarebbe anche profanatore. Perché mettere gioie umane dove sei Tu? Quando uno ti ha — e costoro ti hanno avuto, loro, unici ricchi in Israele per aver avuto Te da trent’anni — non altro deve avere. Non si mette l’oggetto umano sul Propiziatorio… e il vaso consacrato non serve che per sacri usi. Costoro consacrati sono, dal giorno che han visto il tuo sorriso… e nulla, no, nulla che Tu non sia deve entrare nel loro cuore, che ha Te. Fossi io come loro!», dice Simone.

«Però ti sei affrettato, dopo aver visto il Maestro ed esser guarito, a riprendere possesso dei tuoi beni», risponde ironicamente Giuda.

«È vero. L’ho detto e l’ho fatto. Ma sai perché? Come puoi giudicare se tutto non sai? Il mio agente ha avuto ordini netti. Ora che Simone lo Zelote è guarito — e non possono più i nemici nuocergli col segregarlo, né perseguitarlo perché non è più che di Cristo e non ha sètta: ha Gesù e basta — Simone può disporre dei suoi averi che un onesto, un fedele gli ha conservato. E io, padrone ancor per un’ora, ne ho ordinato il riordino per averne più denaro nella vendita e poter dire… no, questo non lo dico».

«Lo dicono gli angeli per te, Simone, e lo scrivono nel libro eterno», dice Gesù.

Simone guarda Gesù. I due sguardi si allacciano, uno stupito, l’altro benedicente.

«Come sempre, io ho torto».

«No, Giuda. Hai il senso pratico. Tu stesso lo dici».

«Oh! ma con Gesù!… Anche Simon Pietro era attaccato al senso pratico, e ora invece!… Anche tu, Giuda, diventerai come lui. È poco che sei col Maestro, noi è di più, e siamo già migliorati», dice Giovanni sempre dolce e conciliante.

«Non mi ha voluto. Altrimenti sarei stato suo da Pasqua». Giuda ha proprio i nervi, oggi.

Gesù tronca la questione dicendo a Levi: «Sei mai stato in Galilea?».

«Sì, Signore».

«Verrai tu con Me, per condurmi da Giona. Lo conosci?».

«Sì. A Pasqua ci si vedeva sempre. Andavo da lui, allora».

Giuseppe china la fronte mortificato. Gesù vede. «Insieme non potete venire. Elia rimarrebbe solo alle pecore. Ma tu verrai con Me sino al passo di Gerico, dove ci separeremo per qualche tempo. Ti dirò poi quello che devi fare».

«Noi più niente?».

«Anche voi, Giuda, anche voi».

77.4

«Si vedono delle case», dice Giovanni che precede di qualche passo gli altri.

«È Ebron. A cavaliere fra due fiumi col suo dorso. Vedi, Maestro? Quel casamento là, fra tutto quel verde, un poco più alto degli altri? È la casa di Zaccaria».

«Affrettiamo il passo».

Fanno svelti gli ultimi metri di strada, entrano in paese. Gli zoccoletti delle pecore paiono nacchere sulle pietre irregolari della via, qui selciata rudimentalmente così. Raggiungono la casa. La gente guarda quel gruppo di uomini di diverso aspetto, età e vestito, fra il bianco delle pecore.

«Oh! È diversa! Qui vi era il cancello!», dice Elia. Ora, invece del cancello, è un portone ferrato che preclude la vista, e anche il muretto di cinta è più alto di un uomo, e perciò nulla si vede.

«Forse sarà aperto sul dietro, andiamo». Girano un vasto quadrilatero, meglio un vasto rettangolo, ma il muro è uguale da per tutto.

«Muro fatto da poco», dice Giovanni osservandolo. «È senza sfregi, e in terra sono ancora pietre calcinose».

«Non vedo neppure il sepolcro… Era verso il bosco. Ora il bosco è fuori del muro e… e pare di tutti. Vi fanno legna…». Elia è perplesso.

77.5

Un uomo, un taglialegna vecchietto, bassetto ma robusto, che osserva il gruppo, lascia di segare un tronco abbattuto e viene verso il gruppo. «Chi cercate?».

«Volevamo entrare nella casa, per pregare al sepolcro di Zaccaria».

«Non c’è più sepolcro. Non sapete? Chi siete?».

«Io amico di Samuele il pastore, Lui…».

«Non occorre, Elia», dice Gesù. Elia tace.

«Ah! Samuele!… Già! Ma da quando Giovanni, figlio di Zaccaria, è in prigione, la casa non è più sua. Ed è sventura, perché egli faceva dare ogni guadagno del suo avere ai poveri di Ebron. Una mattina è venuto un della corte di Erode, ha buttato fuori Gioele, ha messo i sigilli, poi è tornato con degli artieri e ha cominciato a fare alzare il muro… Sull’angolo, là, era il sepolcro. Non lo ha voluto… e una mattina lo trovammo tutto sciupato, mezzo giù… le povere ossa mescolate… Le abbiamo raccolte come si è potuto… Ora sono in un’unica arca… E nella casa del sacerdote Zaccaria quel sozzo ci tiene le sue amanti. Ora c’è una mima di Roma. Per questo ha alzato il muro. Non vuole che si veda… La casa del sacerdote, un lupanare! La casa del miracolo e del Precursore! Perché certo è lui, se pure non è lui il Messia. E quante noie abbiamo avuto per il Battista! Ma è il nostro grande! Veramente grande! Già quando nacque ci fu miracolo. Elisabetta, vecchia come un cardo secco, fu fertile come pomo in adar, primo miracolo. Poi venne una cugina, che era santa, a servirla e a sciogliere la lingua al sacerdote. Si chiamava Maria. Me la ricordo. Per quanto non la si vedesse che molto di rado. Come fu, non so. Si dice che, per far felice Elisa, Ella facesse posare la bocca muta di Zaccaria sul suo seno gravido, o che gli mettesse le sue dita in bocca. Non so bene. Certo è che, dopo nove mesi di silenzio, Zaccaria parlò lodando il Signore e dicendo che c’era il Messia. Non spiegò di più. Ma mia moglie assicura, lei c’era quel giorno, che Zaccaria disse, lodando il Signore, che suo figlio gli sarebbe andato avanti. Ora io dico: non è come la gente crede. Giovanni è il Messia e va avanti al Signore, come Abramo a Dio, ecco. Non ho ragione?».

«Hai ragione per quanto riguarda lo spirito del Battista, che sempre procede davanti a Dio. Ma non hai ragione riguardo al Messia».

«Allora quella, che si diceva Madre del Figlio di Dio — lo disse Samuele — non era vero che lo era? Non c’è ancora?».

«Lo era. Il Messia è nato, preceduto da colui che nel deserto alzò la sua voce, come disse il profeta[2]».

«Sei Tu il primo che lo assicuri. Giovanni, l’ultima volta che Gioele gli portò una pelle di pecora, come tutti gli anni faceva al venir dell’inverno, per quanto interrogato sul Messia non disse: “C’è”. Quando lui lo dirà…».

«Uomo, io sono stato discepolo di Giovanni e l’ho udito dire: “Ecco l’Agnello di Dio” indicando…», dice Giovanni.

«No, no. L’Agnello è lui. Vero Agnello che da sé si è cresciuto, senza bisogno di madre e padre quasi. Appena figlio della Legge, si è isolato nelle spelonche dei monti che guardano il deserto e lì si è cresciuto, parlando con Dio. Elisa e Zaccaria sono morti, ed egli non è venuto. Padre e madre per lui era Dio. Non vi è santo più grande di lui. Domandate a tutta Ebron. Samuele lo diceva, ma devono aver avuto ragione i betlemmiti. Il santo di Dio è Giovanni».

«Se un ti dicesse: “Il Messia sono Io”, che diresti tu?», chiede Gesù.

«Lo chiamerei “bestemmiatore” e lo caccerei a colpi di pietra».

«E se facesse un miracolo per provare il suo essere?».

«Lo direi “indemoniato”. Il Messia verrà quando Giovanni si rivelerà nel suo vero essere. Lo stesso odio di Erode è la prova. Egli, l’astuto, sa che Giovanni è il Messia».

«Non è nato a Betlemme».

«Ma quando sarà liberato, dopo essersi annunciato da se stesso il suo prossimo avvento, si manifesterà a Betlemme. Anche Betlemme attende questo. Mentre… oh! vai, se hai fegato, a parlare ai betlemmiti di un altro Messia… e vedrai».

«Avete una sinagoga?».

«Sì. Dritto per duecento passi per questa via. Non puoi sbagliare. Vicino è l’arca dei resti violati».

«Addio. E il Signore ti illumini».

Se ne vanno. Girano sul davanti.

77.6

Sul portone è una donna giovane e sfacciatamente vestita. Bellissima. «Signore, vuoi entrare nella casa? Entra».

Gesù la fissa, severo come un giudice, e non parla.

Parla Giuda, in questo spalleggiato da tutti. «Rientra, spudorata! Non profanarci col tuo alito, cagna famelica».

La donna ha un vivo rossore e china il capo. Fa per scomparire confusa, beffata da monelli e passanti.

«Chi è tanto puro da dire: “Non ho mai desiderato il pomo offerto da Eva?”», dice Gesù severo e aggiunge: «Indicatemi costui ed Io lo saluterò “santo”. Nessuno? E allora se, non per ribrezzo ma per debolezza, vi sentite incapaci di avvicinare costei, ritiratevi. Non obbligo i deboli a lotte impari. Donna, vorrei entrare. Questa casa era di un mio parente. Mi è cara».

«Entra, Signore, se non hai schifo di me».

«Lascia aperta la porta. Che il mondo veda e non mormori…».

Gesù passa serio, solenne. La donna lo inchina soggiogata e non osa muoversi. Ma i lazzi della folla la pungono a sangue. Fugge di corsa sino in fondo al giardino, mentre Gesù va sino ai piedi della scala, sogguarda per le porte socchiuse, ma non entra. Poi va dove era il sepolcro, e dove ora è una specie di tempietto pagano.

«Le ossa dei giusti, anche se inaridite e disperse, gemono balsamo di purificazione e spargono semi di vita eterna. Pace ai morti vissuti nel bene! Pace ai puri che dormono nel Signore! Pace a coloro che soffersero, ma non vollero conoscere vizio! Pace ai veri grandi del mondo e del Cielo! Pace!».

77.7

La donna, costeggiando una siepe che la ripara, lo ha raggiunto. «Signore!».

«Donna».

«Il tuo nome, Signore».

«Gesù».

«Non l’ho mai udito. Sono romana, mima e ballerina. Non sono esperta che in lascivie. Che vuol dire quel Nome? Il mio è Aglae e… e vuol dire: vizio».

«Il mio vuol dire: Salvatore».

«Come salvi? Chi?».

«Chi ha buona volontà di salvezza. Salvo insegnando ad esser puri, a volere il dolore ma l’onore, il bene ad ogni costo». Gesù parla senza acredine, ma senza neppure voltarsi verso la donna.

«Io sono perduta…».

«Io sono Colui che ricerca i perduti».

«Io sono morta».

«Io sono Colui che dà Vita».

«Io sono sudiciume e menzogna».

«Io sono Purezza e Verità».

«Anche Bontà sei, Tu che non mi guardi, non mi tocchi e non mi calpesti. Pietà di me…».

«Tu abbiti, per prima, pietà. Dell’anima tua».

«Cosa è l’anima?».

«È ciò che dell’uomo fa un dio e non un animale. Il vizio, il peccato l’uccide e, uccisa che sia, l’uomo torna animale repellente».

«Ti potrò vedere ancora?».

«Chi mi cerca mi trova».

«Dove stai?».

«Dove i cuori hanno bisogno di medico e medicina per tornare onesti».

«Allora… non ti vedrò più… Io sto dove non si vuole medico, medicina e onestà».

«Nulla ti impedisce di venire dove sono. Il mio Nome sarà gridato per le vie e verrà fino a te. Addio».

«Addio, Signore. Lascia che ti chiami “Gesù”. Oh! non per famigliarità!… Perché entri un poco di salvezza in me. Sono Aglae, ricordati di me».

«Sì. Addio».

La donna resta nel fondo, Gesù esce severo. Guarda tutti. Vede perplessità nei discepoli, scherno negli ebroniti. Un servo chiude il portone.

77.8

Gesù va dritto per la via. Bussa alla sinagoga.

Si affaccia un vecchietto astioso. Non dà neppure tempo a Gesù di parlare. «La sinagoga è interdetta, in questo luogo santo, per coloro che commerciano con le meretrici. Via!».

Gesù si volta senza parlare e continua a camminare per la via. I suoi dietro. Finché sono fuori di Ebron. Allora parlano.

«Però l’hai voluto, Maestro», dice Giuda. «Una meretrice!».

«Giuda, in verità ti dico che ella ti supererà. E ora, tu che mi rimproveri, che mi dici sui giudei? Nei luoghi più santi della Giudea siamo stati beffati e cacciati… Ma così è. Viene il tempo che Samaria e i Gentili adoreranno il vero Dio, e il popolo del Signore sarà sporco di sangue e di un delitto… di un delitto rispetto al quale quello delle meretrici che vendono la loro carne e la loro anima sarà poca cosa. Non ho potuto pregare sulle ossa dei miei cugini e del giusto Samuele. Ma non importa. Riposate, ossa sante, giubilate o spiriti che abitavate in esse. La prima risurrezione è vicina. Poi verrà il giorno in cui sarete mostrati agli angeli come quelli dei servi del Signo­re».

Gesù tace e tutto ha fine.


Notes

  1. comme l’a dit le prophète, c’est-à-dire : Is 40, 3.

Note

  1. Per causa mia, invece di Per mia colpa, è la differente trascrizione dattiloscritta, forse approvata da MV.
  2. come disse il profeta, cioè: Isaia 40, 3.