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Le repas a été préparé dans la salle blanche où Jésus a parlé aux femmes disciples. C’est tout un éclat de blanc et d’argent, adouci par une nuance moins glacée et moins froide qu’apportent quantité de branches de pommiers ou de poiriers, ou d’autres arbres fruitiers, pures comme la neige, mais avec un léger souvenir de rose qui fait penser à de la neige qu’aurait effleurée le baiser d’une lointaine aurore. Elles se dressent dans des vases ventrus ou de grêles amphores d’argent arrangés sur des tables, des coffrets ou des crédences disposés le long des murs de la salle. Les bouquets répandent dans la pièce l’odeur caractéristique des fleurs des arbres fruitiers, fraîche, un peu amère, du pur printemps…
Lazare entre, au côté de Jésus. Derrière, deux par deux, ou en groupes plus nombreux, viennent les apôtres et, en dernier lieu, les deux sœurs de Lazare avec Maximin.
Je ne vois pas les femmes disciples. Je ne vois même pas Marie. Peut-être ont-elles préféré rester dans la maison autour de la Vierge, puisqu’elle est si triste…
Le crépuscule approche. Mais il reste encore des rayons de soleil pour frapper la frondaison bruissante de plusieurs palmiers, groupés à quelques mètres de la salle, et la cime d’un laurier gigantesque où des passereaux se disputent avant de prendre leur repos. Au-delà du palmier et du laurier, au-delà des haies de roses et de jasmins, des parterres de muguets et d’autres fleurs, et des plantes odoriférantes, la tache blanche saupoudrée du vert tendre des premières feuilles d’un groupe de pommiers ou de poiriers tardifs. On dirait un nuage resté accroché dans les branches.