The Writings of Maria Valtorta

191. Le sabbat à Esdrelon.

191. The Sabbath in Esdrelon. The little Jabez

191.1

« Remets à Michée assez d’argent pour que demain il puisse rembourser ce qu’il a emprunté aujourd’hui aux paysans de cette région » dit Jésus à Judas Iscariote qui habituellement s’occupe… des ressources de la communauté.

Puis Jésus appelle André et Jean et les envoie en deux points d’où l’on peut voir la route ou les routes qui viennent de Jezraél. Il appelle ensuite Pierre et Simon et les envoie à la rencontre des paysans de Doras, avec l’ordre de les arrêter à la limite des deux propriétés. Enfin, il dit à Jacques et à Jude :

« Prenez les vivres et venez. »

Les paysans de Yokhanan, hommes, femmes et enfants les suivent ; les hommes portent deux petites amphores – petites, c’est une façon de parler – qui doivent être pleines de vin. Plutôt que des amphores, ce sont des jarres qui contiennent environ dix litres chacune. (Je vous prie toujours de ne pas prendre mes mesures pour des articles de foi). Ils vont là où un vignoble aux ceps serrés, déjà tout couvert de feuilles nouvelles, marque la fin des possessions de Yokhanan. Au-delà, il y a un large fossé gardé en eau, qui sait au prix de quelles fatigues !

« Tu vois ? Yokhanan s’est querellé avec Doras pour ce fossé. Yokhanan prétendait : “ C’est la faute de ton père si tout est en ruines. S’il ne voulait pas l’adorer, il devait au moins le craindre et ne pas le provoquer. ” Et Doras, tel un démon, criait : “ Tu as sauvé tes terres grâce à ce fossé. Les bêtes ne l’ont pas franchi…. Yokhanan rétorquait : “ Dans ce cas, pourquoi une telle ruine, alors qu’auparavant tes champs étaient les plus beaux d’Esdrelon ? C’est le châtiment de Dieu, tu peux me croire. Vous avez dépassé la mesure. Cette eau ? Il y en a toujours eu là, et ce n’est pas elle qui m’a sauvé. ” Doras répliquait : “ Cela prouve bien que Jésus est un démon. ” “ C’est un juste ”, criait Yokhanan. Et ils se sont disputés tant qu’ils ont eu du souffle. Depuis, à grands frais, Yokhanan a fait dériver dans le fossé les eaux d’un torrent et creuser pour trouver des sources. Il a disposé tout un ensemble de fossés entre lui et son parent, les a creusés, et il nous a dit ce que nous t’avons raconté hier… Au fond, lui, il est heureux de ce qui est arrivé : il jalousait tellement Doras… Maintenant, il espère pouvoir acheter le tout, car Doras finira par tout vendre à un prix dérisoire. »

191.2

Jésus écoute avec bienveillance toutes ces confidences en attendant les pauvres paysans de Doras qui ne tardent pas à arriver et qui se prosternent jusqu’à terre dès qu’ils voient Jésus à l’abri d’un arbre.

« Paix à vous, mes amis. Venez. Aujourd’hui, la synagogue est ici et je suis votre chef de synagogue. Mais, auparavant, je veux être votre père de famille. Asseyez-vous en cercle pour que je vous donne la nourriture. Aujourd’hui, vous avez l’Epoux parmi vous et nous faisons le banquet des noces. »

Jésus découvre une corbeille et en tire des pains aux yeux stupéfaits des paysans de Doras et, d’une autre corbeille, il sort les vivres qu’il a pu trouver : fromages, légumes qu’il a fait cuire et un petit chevreau ou agneau rôti, coupé en parts. Il fait la distribution aux pauvres malheureux, puis il verse le vin et fait circuler la coupe grossière pour que tous y boivent.

« Mais pourquoi ? Pourquoi ? Et eux ? disent les paysans de Doras en montrant ceux de Yokhanan.

– Ils sont déjà servis.

– Mais quelle dépense ! Comment as-tu pu ?

– Il y a encore de braves gens en Israël, dit Jésus en souriant. Mais aujourd’hui c’est le sabbat…

– Remerciez cet homme, dit Jésus en leur indiquant l’homme d’En-Dor. C’est lui qui vous a procuré l’agneau. Le reste a été facile à trouver. »

Ces pauvres gens dévorent – c’est le mot – cette nourriture depuis si longtemps inconnue.

191.3

L’un d’eux, d’un certain âge déjà, serre contre lui un enfant d’une dizaine d’années environ ; il mange et pleure.

« Pourquoi, père, fais-tu cela ? lui demande Jésus.

– Parce que ta bonté est trop grande… »

L’homme d’En-Dor dit, de sa voix gutturale :

« C’est vrai… cela fait pleurer, mais ce sont des pleurs sans amertume…

– sans amertume, c’est vrai. Et puis… je voudrais quelque chose. Ces larmes expriment aussi un souhait.

– Que veux-tu, père ?

– Tu vois cet enfant : c’est mon petit-fils. Il est avec moi depuis l’éboulement de cet hiver. Doras ne sait même pas qu’il m’a rejoint car je le fais vivre comme une bête sauvage dans la forêt et je ne le vois qu’au sabbat. S’il le découvre, soit il le chasse, soit il le met au travail… et mon tendre petit-fils aura une condition pire qu’une bête de somme… A Pâque, je l’enverrai avec Michée à Jérusalem pour qu’il devienne fils de la Loi… et ensuite… ? C’est le fils de ma fille…

– Me le confierais-tu à moi, au contraire ? Ne pleure pas. J’ai tant d’amis qui sont honnêtes, saints et qui n’ont pas d’enfants ! Ils l’élèveront saintement, selon ma Voie…

– Ah, Seigneur ! Depuis que j’ai entendu parler de toi, je l’ai désiré et je priais le saint Jonas, lui qui sait ce que c’est que d’appartenir à ce maître, de sauver mon petit-fils de cette mort…

– Mon enfant, viendrais-tu avec moi ?

– Oui, mon Seigneur, et je ne te causerai pas de peine.

– Alors c’est dit.

191.4

– Mais… à qui veux-tu le donner ? demande Pierre en tirant Jésus par la manche. A Lazare, lui aussi ?

– Non, Simon. Mais il y en a tant qui n’ont pas d’enfants…

– Il y a moi aussi… »

Le visage de Pierre paraît maigrir sous l’effet du désir.

– Simon, je te l’ai dit [1]: tu dois être le “ père ” de tous les enfants que je te laisserai en héritage, mais tu ne dois pas avoir la chaîne d’un fils à toi. N’en sois pas blessé. Tu es trop nécessaire au Maître pour que le Maître puisse te séparer de lui à cause d’une affection. Je suis exigeant, Simon. Je suis exigeant plus que l’époux le plus jaloux. Je t’aime d’un amour de prédilection et je te veux tout entier pour moi et à moi.

– C’est bon, Seigneur… C’est bon… Qu’il soit fait comme tu le veux. »

Cette adhésion à la volonté de Jésus est héroïque pour le pauvre Pierre.

« Ce sera l’enfant de mon Eglise naissante. D’accord ? Il sera à tous et à personne. Ce sera “ notre ” petit enfant. Il nous suivra quand les distances le permettront, sinon il nous rejoindra. Ses tuteurs seront les bergers, eux qui aiment dans tous les enfants “ leur ” enfant Jésus. Viens ici, petit. Comment t’appelles-tu ?

– Yabeç, fils de Jean, et je suis de Juda, répond, sans hésiter, le garçon.

– Oui, nous sommes judéens, nous, confirme le vieil homme. Je travaillais sur les terres de Doras en Judée et ma fille a épousé un homme de cette région. Je travaillais dans les bois près d’Arimathie et cet hiver…

– J’ai vu la catastrophe[2]

– L’enfant a été sauvé parce que, cette nuit-là, il était au loin chez un parent… Vraiment, il a bien porté son nom, Seigneur ! Je l’ai dit tout de suite à ma fille : “ Pourquoi ce nom ? Ne te rappelles-tu pas l’ancien[3] ? ” Mais son mari voulut lui donner ce nom, et il s’appela Yabeç.

– “ L’enfant invoquera le Seigneur et le Seigneur le bénira et élargira ses frontières ; la main du Seigneur est dans sa main et il ne sera plus accablé par le malheur. ” Le Seigneur lui accordera cela pour te consoler, toi, père, et les esprits des morts, ainsi que pour réconforter l’orphelin.

191.5

Et maintenant que vous avez dissocié les besoins du corps de ceux de l’âme par un acte d’amour envers l’enfant, écoutez la parabole que j’ai imaginée pour vous.

Il y avait une fois un homme très riche. Il portait les plus beaux vêtements et se pavanait dans ses habits de pourpre et de byssus sur les places publiques et chez lui. Ses concitoyens le respectaient comme le plus puissant du village et des amis flattaient son orgueil pour en tirer profit. Son logis était ouvert tous les jours pour de magnifiques festins où la foule des invités, tous riches, pas dans le besoin, se pressaient et flattaient ce riche festoyeur. Ses banquets étaient renommés pour l’abondance des mets et des vins exquis.

Mais il y avait, dans la même ville, un mendiant, un grand mendiant. Il était aussi grand dans sa misère que l’autre l’était dans sa richesse. Mais sous la croûte de la misère humaine du mendiant Lazare était caché un trésor encore plus grand que la misère de Lazare et que la richesse du festoyeur : c’était la vraie sainteté de Lazare. Il n’avait jamais transgressé la Loi, même lorsque le besoin aurait pu l’y pousser, et surtout il avait obéi au commandement de l’amour de Dieu et du prochain.

Comme le font toujours les pauvres, il se tenait à la porte des riches pour demander l’aumône et ne pas mourir de faim. Et il allait chaque soir à la porte du mauvais riche dans l’espoir d’y obtenir au moins quelques miettes des plantureux banquets servis dans les salles richissimes. Il s’allongeait sur le chemin près de la porte et attendait patiemment. Mais si le riche s’apercevait de sa présence, il le faisait chasser, parce que ce corps couvert de plaies, mal nourri, en guenilles, était un spectacle trop affligeant pour ses invités. C’est du moins ce qu’il prétendait. En réalité, c’était parce que la vue de la misère et de la bonté de Lazare était pour lui un reproche continuel.

Ses chiens, bien nourris, aux colliers précieux, étaient plus compatissants que lui : ils s’approchaient du pauvre Lazare et léchaient ses plaies, glapissant de joie sous ses caresses, et ils venaient lui apporter des restes des riches tables. C’est donc grâce à ces animaux que Lazare survivait malgré l’absence de nourriture car, pour ce qui était de l’homme, il serait mort puisqu’on ne lui permettait même pas de pénétrer dans la salle du banquet après le repas pour ramasser les débris tombés au sol.

191.6

Un jour Lazare mourut. Personne, sur la terre, ne s’en aperçut, personne ne le pleura. Au contraire, ce jour-là et par la suite, le riche se réjouit de ne plus voir sur son seuil cette misère qu’il appelait “ opprobre ”. Mais, au Ciel, les anges s’en aperçurent : à son dernier soupir, les cohortes célestes étaient présentes dans sa tanière froide et nue et c’est dans un éblouissement de lumières qu’elles recueillirent son âme et la portèrent, en chantant hosanna, dans le sein d’Abraham.

Quelque temps après, le riche mourut. Ah ! Quelles funérailles fastueuses ! Toute la ville, déjà informée de son agonie, se pressait sur la place où s’élevait sa demeure pour se faire remarquer comme amie du personnage, par curiosité ou par intérêt de la part des héritiers ; tous s’unirent au deuil, leurs lamentations s’éle­vèrent jusqu’au Ciel et avec celles des louanges mensongères pour le “ grand ”, le “ bienfaiteur ”, le “ juste ” qui était mort.

La parole de l’homme peut-elle changer le jugement de Dieu ? L’apologie humaine peut-elle changer ce qui est écrit dans le livre de la Vie ? Non, c’est impossible. Ce qui est jugé est jugé, et ce qui est écrit est écrit. Et malgré ces funérailles solennelles, l’âme du mauvais riche fut ensevelie en enfer.

Alors, dans cette horrible prison, buvant et mangeant feu et ténèbres, trouvant haine et torture de tous côtés et à tout instant de cette éternité, il tourna les yeux vers le Ciel, vers le Ciel qu’il avait entrevu[4] dans une lueur fulgurante, pendant une seconde et dont la beauté indicible qu’il gardait en mémoire était un tourment parmi ses atroces tourments. Et il vit là-haut Abraham. Lointain, mais lumineux, bienheureux… et dans son sein, lumineux et bienheureux lui aussi, se trouvait Lazare, le pauvre Lazare, autrefois méprisé, repoussant, miséreux ; et maintenant ?… Maintenant, il était beau de la lumière de Dieu et de sa sainteté, riche de l’amour de Dieu, admiré non par les hommes, mais par les anges de Dieu.

Le mauvais riche cria en pleurant : “ Père Abraham, aie pitié de moi ! Envoie Lazare, car je ne puis espérer que tu le fasses toi-même, envoie Lazare tremper dans l’eau l’extrémité de son doigt et me la poser sur la langue pour la rafraîchir car je souffre affreusement dans cette flamme qui me pénètre sans arrêt et me brûle ! ”

Abraham répondit : “ Souviens-toi, mon fils, que tu as possédé tous les biens pendant ta vie, alors que Lazare a connu tous les malheurs. Lui, il a su de son mal faire un bien, alors que de tes biens, tu n’as su faire que le mal. Il est donc juste qu’il soit consolé et que, toi, tu souffres. De plus, il n’est plus possible de le faire. Les saints sont répandus sur la surface de la terre pour que les hommes en tirent avantage. Mais quand, malgré ce voisinage, l’homme reste tel qu’il est – dans ton cas : un démon –, il est inutile ensuite de recourir aux saints. Nous sommes désormais séparés. Les herbes dans le champ sont mélangées, mais après les avoir fauchées, on sépare les mauvaises des bonnes. Il en est ainsi de vous et de nous. Nous avons été ensemble sur la terre, et vous nous avez chassés, tourmentés de mille manières, vous nous avez oubliés, n’observant pas la loi d’amour. Maintenant, nous voilà séparés. Il y a entre vous et nous un tel abîme que ceux qui voudraient passer d’ici vers vous ne le peuvent pas, pas plus que vous, qui êtes là-bas, ne pouvez franchir cet abîme effroyable pour venir vers nous. ”

191.7

Redoublant de larmes, le riche s’écria : “ Au moins, Père saint, envoie, je t’en prie, Lazare à la maison de mon père. J’ai cinq frères. Je n’ai jamais compris l’amour, même entre parents, mais je comprends maintenant quelle chose terrible c’est de ne pas être aimé. Et puisque, là où je suis, c’est la haine, maintenant j’ai compris, pendant cette seconde où mon âme a entrevu Dieu[5], ce qu’est l’Amour. Je ne veux pas que mes frères subissent les mêmes peines que moi. Je suis épouvanté pour eux à la pensée qu’ils mènent la même vie que moi. Oh ! Envoie Lazare leur faire connaître le lieu où je suis et pour quel motif j’y suis, leur dire que l’enfer existe, que c’est quelque chose d’atroce et que celui qui n’aime pas Dieu et son prochain va en enfer. Envoie-le ! Qu’ils pourvoient à temps et ne soient pas contraints de venir ici, dans ce lieu d’éternels tourments. ”

Mais Abraham répondit : “ Tes frères ont Moïse et les prophètes. Qu’ils les écoutent. ”

Gémissant en son âme torturée, le mauvais riche répondit : “ Oh, père Abraham ! Un mort leur fera davantage impression… Ecoute-moi ! Aie pitié ! ”

Mais Abraham dit : “ S’ils n’ont pas écouté Moïse et les prophètes, ils ne croiront pas davantage quelqu’un qui ressuscitera pour une heure d’entre les morts pour leur dire des paroles de vérité. Et d’ailleurs, il n’est pas juste qu’un bienheureux quitte mon sein pour aller se faire offenser par des fils de l’Ennemi. Pour lui, le temps des injures est passé. Il vit désormais dans la paix et y reste sur l’ordre de Dieu qui voit l’inutilité d’une tentative de conversion auprès de ceux qui ne croient même pas à la parole de Dieu et ne la mettent pas en pratique. ”

Cette parabole a un sens si clair qu’elle n’a pas besoin d’explication.

191.8

C’est ici que vécut réellement le nouveau Lazare, mon Jonas, et qu’il y a conquis la sainteté, lui dont la gloire près de Dieu se manifeste avec évidence par la protection qu’il accorde à ceux qui espèrent en lui. Oui, Jonas peut venir à vous comme protecteur et ami, et il y viendra si vous êtes toujours bons.

Je voudrais – et je vous rapporte ce que je lui ai dit[6] au printemps dernier – je voudrais pouvoir vous venir en aide à tous, même matériellement, mais cela m’est impossible, et j’en souffre. Je ne peux que vous montrer le Ciel. Je ne peux que vous enseigner la grande sagesse de la résignation en vous promettant le Royaume à venir. N’ayez jamais de haine, pour aucune raison. La Haine est puissante dans le monde, mais la Haine a toujours une limite. L’Amour ne connaît aucune limite de puissance ni de temps. Aimez donc, pour que l’Amour vous défende et vous réconforte sur la Terre, et pour qu’il vous récompense au Ciel. Il vaut mieux être Lazare que le mauvais riche, soyez-en bien sûrs. Arrivez à le croire et vous serez bienheureux.

Ne voyez pas dans le châtiment qu’ont subi ces champs une parole de haine, même si les faits pouvaient justifier cette haine. N’interprétez pas mal le miracle. Je suis l’Amour et je n’aurais pas frappé. Mais, puisque l’Amour ne pouvait faire plier le riche cruel, je l’ai abandonné à la Justice et elle s’est vengée du martyre de Jonas et de ses frères. Quant à vous, tirez l’enseignement de ce miracle : la Justice est toujours en éveil, même si elle paraît absente et Dieu, étant le Maître de toute la création, peut se servir, pour l’exercer, des êtres les plus petits comme les chenilles et les fourmis pour mordre le cœur de celui qui se sera montré cruel et avide et le faire mourir en vomissant le poison qui l’étrangle.

191.9

Je vous bénis maintenant. Mais je prierai pour vous à chaque nouvelle aurore. Et toi, père, ne te fais plus aucun souci pour l’agneau que tu me confies. Je te le ramènerai de temps en temps pour que tu puisses te réjouir de le voir croître en sagesse et en bonté sur la voie de Dieu. Il sera ton agneau de cette pauvre Pâque, le plus agréable des agneaux présentés à l’autel de Yahvé. Yabeç, salue ton vieux père et puis viens vers ton Sauveur, vers ton bon Berger. Que la paix soit avec vous !

– Oh, Maître ! Bon Maître ! Te quitter !…

– Oui, c’est pénible. Mais il vaut mieux que le surveillant ne vous trouve pas ici. Je suis venu à cet endroit exprès pour vous éviter des punitions. Obéissez pour l’amour de l’Amour qui vous donne ce conseil. »

Les malheureux se lèvent, les larmes aux yeux, et retournent à leur calvaire. Jésus les bénit de nouveau, puis, la main de l’enfant dans la sienne, et l’homme d’En-Dor de l’autre côté, il retourne par le même chemin à la maison de Michée, rejoint par André et Jean qui, après leur service de garde, retrouvent leurs frères.

191.1

«Give Micah enough money so that tomorrow he may pay for what he borrowed today from the peasants of this area» says Jesus to the Iscariot, who usually handles the… common possessions. Then Jesus calls Andrew and John and sends them to two spots from which it is possible to see the road or the roads coming from Jezreel. He calls also Peter and Simon and sends them to meet the men of Doras with instructions to stop them at the boundary between the two estates. He then says to James and Judas: «Take the foodstuffs and come with Me.»

The peasants of Johanan, women, men and children follow them. The men are carrying two small amphoras, which, however, are not very small, and which must be full of wine. They are jars rather than amphoras and contain about ten litres each. (Please do not take my estimate literally). They go towards a thick vineyard, which is already all covered with new leaves, at the end of Johanan’s property. Beyond it there is a large ditch which is kept full of water with, I wonder, how much work.

«See? Johanan quarrelled with Doras over this ditch. Johanan said: “It is your father’s fault if everything is ruined. If he did not want to adore Him, he should have been afraid of Him instead of provoking Him”. And Doras shouted like a demon: “It was this ditch that saved you. The insects did not cross it…”. And Johanan replied: “Why is all your property ruined, then, when previously your fields were the nicest ones in Esdraelon? It’s God’s punishment, believe me. You went beyond the limit. This water?… It has been here all the time and that is not what saved me”. And Doras shouted again: “Which proves that Jesus is a demon”. “He is a just man” Johanan shouted back. And they continued for some time, while they had breath. Later Johanan spent a lot of money to divert the torrent, to find other underground water sources, and to dig more ditches on the boundary line between him and his relative, and he made them deeper and told us what we told You yesterday… After all, he is happy that it happened. He was so envious of Doras… He now hopes that he will be able to buy everything, because Doras will end up by selling everything at a very low price.»

191.2

Jesus benignly listens to all the confidential information, while waiting for Doras’ poor peasants, who arrive without any delay and prostrate themselves on the ground as soon as they see Jesus in the shade of a tree.

«Peace to you, My friends. Come here. The synagogue is here today and I am your head of it. But first I wish to be the father of your family. Sit around Me, that I may give you some food. The Groom is with you today, and we will have a wedding banquet.»

And Jesus uncovers a basket, from which He takes some loaves of bread handing them to the amazed peasants of Doras. From another basket He takes the foodstuffs He has been able to find: cheese, cooked vegetables, and a little kid or lamb, cooked whole, which He divides among the unhappy men. He then pours out some wine and hands around a coarse chalice so that everybody may drink.

«Why all this? And what about them?» ask Doras’ men pointing to Johanan’s men.

«They have already had their share.»

«All this expense! How could You do that?»

«There are still some good people in Israel» replies Jesus smiling.

«But this is Sabbath…»

«Thank this man» says Jesus pointing at the man from Endor. «He got the lamb. It was easy to get the rest.»

The poor men devoured – it is the right word – the food, the like of which they had not tasted for a long time.

191.3

One of them, a rather elderly man, is pressing to his side a boy about ten years old; he eats and weeps.

«What is the matter, father?…» asks Jesus.

«It’s because Your goodness is too great…»

The man from Endor says in his guttural voice: «That is true… and it makes you weep. But the tears are not bitter ones…»

«They are not bitter. That’s true. And then… There is something I would like. My tears express also a desire.»

«What do you want, father?»

«See this child. He is my grandson. He was left to me after the landslide of last winter. Doras does not even know that he has come to me, because I have to let him live like a wild animal in the wood and I see him only on the Sabbath. If he finds out he will either drive him away or compel him to work… and this tender offspring of mine will be treated worse than a pack animal. At Passover I am sending him to Jerusalem with Micah, to become a son of the Law… and after?… He is my daughter’s son…»

«Would you give him to Me, instead? Do not weep. I have many friends who are honest, holy and without any children. They will bring him up in a holy manner, in My Way…»

«Oh! Lord! That is what I have been wishing for since I heard of You. And I prayed that holy man Jonah to save my grandchild from this death, because he knows what it means to belong to this master…»

«Child, would you come with Me?»

«Yes, my Lord. And I will cause You no grief.»

«That is settled.»

191.4

«But… to whom do You wish to give him?» asks Peter pulling Jesus by the sleeve. «Also this one to Lazarus?»

«No, Simon. But there are so many without any children…»

«And I am one of them…» Peter’s desire seems to make his face grow thinner.

«Simon. I have already told you. You are to be the “father” of all the children I will bequeath to you. But you are not to be bound by any child of your own. Do not be upset. You are too important to your Master, Who cannot detach you from Himself because of an affection. I am exacting, Simon. I am more exacting than a very jealous husband. I love you most partially and I want you to be entirely Mine.»

«All right, my Lord… all right… Let it be done as You wish.» Poor Peter is really heroic in adhering to Jesus’ will.

«He will be the son of My dawning Church. All right? He will belong to everybody and to nobody. He will be “our” child. He will follow us when distances will allow him to, or he will come to us and the shepherds will be his guardians, as in every child they love “their” Child Jesus. Come here, My child, what is your name?»

«Jabez of John and I am from Judah» says the boy without hesitating.

«Yes. We are Judaeans» confirms the old man. «I used to work in Doras’ lands in Judaea, and my daughter got married to a man from that area. He worked in the woods near Arimathea and last winter…»

«I saw the disaster.»

«The boy was spared because that night he was far away with a relative… In actual fact the boy was appropriately named Jabez. I said to my daughter at once: “Why? Do you not remember the ancient tradition?”. But her husband insisted in giving him that name, so he is Jabez[1]

«“The child will call on the Lord and the Lord will bless him and will extend his lands, and the hand of the Lord will be with him and will keep harm away from him”. That is what the Lord will grant him to comfort you, father, and the souls of the dead, and to console the orphan.

191.5

And now that we have separated the needs of the body from those of the soul, by an act of love for the boy, listen to the parable that I have thought out for you.

There was once a very rich man. He wore the most beautiful garments, and in his purple and byssus clothes he used to strut about in squares and at home, respected by his citizens as the most powerful man in the country, and by his friends, who gratified his pride to gain benefits thereby. They feasted every day in his halls, where the multitude of his guests, all rich and none therefore needy crowded flattering Dives. His banquets were famous for the copiousness of food and of choice wines.

In the same town there lived a beggar, a great beggar. He was great in his misery as the other was great in his wealth. But under the crust of the human misery of Lazarus, the beggar, there was a treasure, which was even greater than Lazarus’ misery and Dives’ wealth. And it was Lazarus’ true holiness. He had never infringed the Law, not even when urged by need, and above all he had complied with the precept of love for God and for his neighbour. He, as is wont with poor people, used to go near the doors of rich people to ask for alms, so that he would not starve to death. And every evening he would go to Dives’ house, hoping to receive at least the crumbs of the pompous banquets which took place in the magnificent halls. He would lie in the street, near the door, and wait patiently.

But if Dives noticed him, he would have him driven away because that underfed body, covered with sores and ragged clothes, was too sad a sight for his guests. That is what Dives used to say. In actual fact, it was because the sight of so much misery and goodness was a continuous reproach to him. His well fed dogs, adorned with precious collars, were more pitiful than he was and they used to go near poor Lazarus and lick his sores, showing their great joy at being caressed by him. They even took the remains of the bountiful tables to him, so that Lazarus survived malnutrition thanks to animals. If he had relied on man he would have died, because man did not even allow him to enter the halls, after the banquet, to pick up the crumbs which had fallen from the tables.

191.6

One day Lazarus died. No one on earth noticed it, no one mourned him. On the contrary, Dives rejoiced not seeing on that day or afterwards that misery which he called a “disgrace” near his door. But the angels noticed it in Heaven. And when he was about to breathe his last breath in his cold barren cave, the celestial cohorts were present and in a bright dazzling light they picked up his soul and singing hosannas they took it to the bosom of Abraham.

Some time went by and Dives died. Oh! What a grand funeral! The whole town, already aware of his agony, crowded in the square where his abode was, some to be noticed as friends of the great man, some out of curiosity, some to gain favour with the heirs, and they all joined in the mourning, and their cries rose to the sky and with their cries also the false praises of the “great, just benefactor” who had died.

Can the word of man change God’s judgement? Can human apology cancel what is written in the book of Life? No, it cannot. What has been judged is judged and what has been written is written. And notwithstanding the grand funeral, the soul of Dives was buried in hell.

Then, in that horrible jail, eating and drinking fire and darkness, finding hatred and torture everywhere and in every moment of eternity, he raised his eyes to heaven. He raised his eyes to heaven which he saw in the brightness of lightning, in the fraction of a second, and the indescribable beauty of heaven remained present in his mind and tormented him in the midst of atrocious tortures. And he saw Abraham up there. Far, but bright, happy… and in his lap, bright and happy there was also Lazarus, poor Lazarus, once miserable, despised, revolting… and now? He was handsome in the light of God and of his holiness, full of God’s love, admired not by men but by the angels of God.

Dives weeping cried: “Father Abraham, have mercy on me! Send Lazarus, as I cannot possibly hope that you will do it yourself, send Lazarus to dip the tip of his finger in water and touch my tongue with it, to cool it, for I am in agony in these flames which pierce me continuously and burn me!”.

Abraham replied: “Remember, son, that you had all good things during your life, whereas Lazarus had all bad things. But he turned evil into good, whereas you did nothing but evil of all the good things. It is therefore just that now he should be comforted here and that you should suffer. In any case it is not possible to do it. Holy people are spread over the earth so that men may take advantage of them. But, if notwithstanding all the opportunities, he remains what he was – in your case, a demon – it is useless to make recourse to saints. We are now separated. Herbs are mixed when they are in the field. But when they are cut, the good ones are separated from the evil ones. That is what happens to you and to us. We were together on the earth and you rejected and tortured us in every possible way, you forgot us, acting against the law of charity. We are now divided. There is an abyss between you and us, and those who wish to cross it and come to you, cannot do it. Neither can you, where you are, cross the dreadful abyss and come to us”.

191.7

Dives, crying more loudly shouted: “Holy father, at least please send Lazarus to my father’s house. I have five brothers. I have never understood what love is, not even among relatives. But now I understand what a terrible thing it is not to be loved. And since where I am there is hatred, in the fraction of a second, when my soul saw God, I understood what Love is. I do not want my brothers to suffer the pains that I am suffering. I am terrified because they are leading the same life as I did. Oh! send Lazarus to tell them where I am, and why I am here, and let them know that hell does exist, and it is dreadful, and that those who do not love God and their neighbour come to hell. Send him! So that they may provide in good time, and may not come here, to this place of eternal torture” .

But Abraham replied: “Your brothers have Moses and the Prophets. They should listen to them”.

And with a deep groan of a tormented soul Dives replied: “Oh! Father Abraham! They will be more impressed by a dead person… Listen to me! Have mercy!”.

But Abraham said: “If they have not listened to Moses and the Prophets, they will not believe either one who has risen from the dead for one hour to speak words of Truth to them. In any case it is not fair that a blessed soul should leave my bosom to go and be insulted by the sons of the Enemy. The time of insults is over for such souls. They are now in peace by the order of God Who sees that it is useless to endeavour to convert those who do not even believe in the word of God and do not practice it”.

That is the parable and its meaning is so clear that no clarification is required.

191.8

My Jonah lived here and really achieved the holiness of Lazarus, whose glorious position near God is made clear by the protection He grants to those who hope in Him. Jonah can come to you, as a friend and protector, and he will come if you are always good.

I would like, and I tell you now what I told him last spring[2], I would like to be able to help you all, also materially, but I cannot, and I am sorry for that. I can but point Heaven to you. I can only teach you the great wisdom of resignation and promise the future Kingdom to you. Do not hate, never, for any reason whatsoever. Hatred is strong in the world. But it always has a limit. Love has no limit of power or time. Love therefore, to possess love, as a defense and comfort on the earth, and as a reward in Heaven. It is better to be Lazarus than Dives, believe Me. Believe it and you will be blessed.

In the desolation of these fields you cannot hear one word of hatred, even if facts could have justified it. Do not misunderstand the miracle. I am Love and I would not have struck. But seeing that Love could not bend cruel Doras, I abandoned him to Justice which avenged the martyr Jonah and his brothers. This is what the miracle teaches you. That Justice is always vigilant, even when it seems to be absent and that since God is the Master of creation, in pursuance of Justice, He can also make use of the lesser beings, such as caterpillars and ants, to punish the hearts of cruel and greedy people letting them die choked by a regurgitation of their own poison.

191.9

I bless you, now. And I will pray for you at every dawn. And you, father, do not worry about the little lamb you are entrusting to Me. I will bring him back now and again, that you may rejoice seeing him grow in wisdom and goodness in the way of the Lord. He will be your lamb of this poor Passover of yours, the most pleasing of all the lambs offered at the altar of Jehovah. Jabez, say goodbye to the old father and then come to your Saviour, to your Good Shepherd. Peace be with you!»

«Oh! Master! Good Master! How painful it is to leave you!»

«Yes, it is painful. But it is better if the steward does not find you here. I came here deliberately to avoid punishment for you. Please obey for the sake of the Love Who advises you.»

The unhappy men rise with tears in their eyes and go back to their cross. Jesus blesses them once again and then, holding the boy by the hand and with the man from Endor on the other side, He goes back to Micah’s house along the same way He came.

Andrew and John join Him and the disciples after their watch.


Notes

  1. je te l’ai dit, en 104.5. La dernière mention de Lazare est en lien avec l’évènement rapporté en 172.11.
  2. J’ai vu la catastrophe, en 139.2.
  3. l’ancien : la citation qui suit est tirée de 1 Ch 4, 9-10.
  4. il tourna les yeux vers le Ciel, vers le Ciel qu’il avait entrevu… dont la beauté indicible… : Cela doit être compris comme Maria Valtorta l’a corrigé sur une copie dactylographiée : “ Il tourna les yeux vers les limbes des saints qu’il avait entrevues… et dont la beauté paisible déjà indicible… ”.
  5. pendant cette seconde où mon âme a entrevu Dieu doit être compris dans le sens de “ au moment du jugement particulier ”, comme le note Maria Valtorta sur une copie dactylographiée.
  6. ce que je lui ai dit : en 89.1.

Notes

  1. Jabez was not considered a lucky name. See 1Chronicles 4:9-10.
  2. last spring, in 89.1.