The Writings of Maria Valtorta

311. Le renoncement de Marziam provoque une leçon sur les sacrifices faits par amour.

311. Marjiam’s sacrifice inspires

311.1

Je ne sais s’il s’agit du même jour, mais je le suppose à cause de la présence de Pierre à la table de famille de Nazareth. Le repas est presque fini et Syntica se lève pour mettre sur la table des pommes, des noix, du raisin et des amandes qui terminent le dîner, car c’est le soir et les lampes sont déjà allumées.

C’est sur les lampes justement que roule la conversation pendant que Syntica apporte les fruits. Pierre dit :

« Cette année, nous allons en allumer une de plus, et ensuite toujours une de plus, pour toi, mon fils. Car nous voulons, nous, l’allumer pour toi, même si tu es ici. C’est la première fois que nous l’allumons pour un enfant… »

Simon s’émeut un peu en terminant :

« C’est sûr que… si tu étais là, toi, ce serait plus beau…

– L’an dernier, c’était moi, Simon, qui soupirais ainsi pour mon Fils si loin, et avec moi Marie, femme d’Alphée, et Salomé, et aussi Marie, femme de Simon, dans la maison de Kérioth, et la mère de Thomas…

– Ah ! La mère de Judas ! Cette année, elle aura son fils… mais je ne crois pas qu’elle sera plus heureuse… N’y pensons pas… Nous étions chez Lazare. Que de lumières ! Cela ressemblait à un ciel d’or et de feu. Cette année, Lazare a sa sœur… Mais je peux bien dire qu’ils soupireront en pensant que tu n’es pas avec eux.

311.2

Et l’année prochaine ? Où serons-nous ?

– Moi, je serai très loin… » murmure Jean d’En-Dor.

Pierre se tourne pour le regarder – car il est à côté de lui –, et il va l’interroger mais, heureusement, un coup d’œil de Jésus le fait s’arrêter à temps.

Marziam demande :

« Où seras-tu ?

– Par la miséricorde du Seigneur, j’espère être dans le sein d’Abraham…

– Oh ! Tu veux mourir ? Tu ne veux pas évangéliser ? Tu ne regrettes pas de mourir sans l’avoir fait ?

– La parole du Seigneur doit sortir de lèvres saintes. C’est déjà beaucoup qu’il m’ait permis de l’entendre et de me racheter grâce à elle. Cela m’aurait plu… Mais c’est tard…

– Et pourtant, tu évangéliseras. Tu l’as déjà fait, au point d’attirer l’attention sur toi. Pour cette raison, tu seras également appelé disciple évangélisateur, même si tu ne voyages pas en répandant la bonne Nouvelle, et tu obtiendras dans l’autre vie la récompense réservée à mes évangélisateurs.

– Ta promesse me fait désirer la mort… Chaque minute de vie peut cacher un piège, et, faible comme je le suis, je ne pourrais peut-être pas l’éviter. Si Dieu m’accueille, satisfait de ce que j’ai accompli, n’est-ce pas une grande bonté qu’il faut bénir ?

– En vérité, je te dis que la mort sera bonté suprême pour beaucoup de personnes qui connaîtront de cette façon jusqu’où l’homme devient démoniaque pour en arriver à un point où la paix les consolera de cette connaissance et la changera en louange parce qu’elle sera unie à l’inexprimable joie de la libération des limbes.

– Et où serons-nous les années suivantes, Seigneur ? demande Simon le Zélote, attentif.

– Là où il plaira à l’Eternel. Veux-tu connaître d’avance les temps éloignés alors que nous ne sommes pas sûrs du moment que nous vivons et s’il nous sera accordé de le finir ? Du reste, quel que soit le lieu où se passeront les futures Encénies, il sera toujours saint si vous y êtes pour accomplir la volonté de Dieu.

– Vous y serez ? Et toi ? demande Pierre.

– Moi, je serai toujours là où se trouveront ceux que j’aime. »

Marie n’a pas dit un mot, mais ses yeux n’ont pas cessé un moment de scruter le visage de son Fils…

311.3

Elle en est détournée par l’observation de Marziam, qui dit :

« Pourquoi, Mère, n’as-tu pas mis sur la table les fouaces au miel ? Jésus les aime et elles feraient du bien à Jean pour sa gorge. D’ailleurs, mon père aussi les aime…

– Et toi aussi, achève Pierre.

– Pour moi… c’est comme si elles n’existaient pas. J’ai promis…

– C’est précisément pour cette raison, mon chéri, que je ne les ai pas mises… » dit Marie en lui faisant une caresse – car Marziam se trouve entre Syntica et elle d’un côté de la table, alors que les quatre hommes sont du côté opposé.

« Non, non. Tu peux les apporter à tout le monde. Et même, tu dois le faire et moi, je les donnerai à tout le monde. »

Syntica prend une lampe, sort et revient avec les fouaces. Marziam saisit le plateau et en commence la distribution. Il tend la plus belle, bien dorée, levée comme celle d’un maître pâtissier, à Jésus. Une autre, presque aussi parfaite, à Marie. Puis c’est le tour de Pierre, de Simon, de Syntica. Mais pour la donner à Jean, l’enfant se lève et va auprès du vieux pédagogue malade :

« Je te donne la tienne et la mienne, et en plus un baiser pour tout ce que tu m’enseignes. »

Puis il revient à sa place, en posant résolument le plateau au milieu de la table et en croisant les bras.

« Tu me fais avaler de travers ce délice » dit Pierre en voyant que Marziam n’en prend vraiment pas.

Et il ajoute :

« Un petit morceau, au moins. Tiens, de la mienne, seulement pour ne pas mourir d’envie. Tu souffres trop… Jésus te le permet.

– Mais si je ne souffrais pas, je n’aurais pas de mérite, mon père. C’est bien parce que je savais que ça allait me faire souffrir que j’ai offert ce sacrifice… Et d’ailleurs… Je suis si content de l’avoir fait que j’ai l’impression d’être plein de miel. J’en sens le goût partout, il me semble le respirer avec l’air…

– C’est parce que tu en meurs d’envie.

– Non, c’est parce que je sais que Dieu me dit : “ Tu fais bien, mon fils. ”

– Le Maître t’aurait fait plaisir, même sans ce sacrifice. Il t’aime tant !

– Oui. Mais il n’est pas juste que, parce que je suis aimé, j’en profite. Il dit lui-même[1], du reste, que la récompense est grande au Ciel pour une simple coupe d’eau offerte en son nom. Je pense que, si elle est grande pour une coupe d’eau donnée à un autre en son nom, elle le sera aussi pour une fouace ou un peu de miel que l’on se refuse pour l’amour d’un frère.

311.4

Est-ce que j’ai tort, Maître ?

– Tu parles avec sagesse. Je pouvais, en effet, t’accorder ce que tu me demandais pour la petite Rachel même sans ton sacrifice, car c’était une œuvre utile que mon cœur désirait. Mais c’est avec plus de joie que je l’ai fait, parce que j’étais aidé par toi. L’amour pour nos frères ne se borne pas à des solutions humaines limitées, mais il s’élève bien plus haut. Quand il est parfait, il touche le trône de Dieu et s’unit à son infinie charité et bonté. La communion des saints est précisément cette continuelle action, de même que Dieu agit continuellement et de toutes les façons pour venir en aide aux frères, que ce soit pour leurs besoins matériels ou spirituels, ou les deux à la fois comme c’est le cas pour Marziam qui, en obtenant la guérison de Rachel, la soulage de la maladie et en même temps apaise l’âme abattue de la vieille Jeanne, et allume, dans le cœur de tous les membres de cette famille, une confiance toujours plus grande dans le Seigneur. Une simple cuillerée de miel que l’on sacrifie, peut servir à ramener paix et espoir à un affligé, comme la fouace ou une autre nourriture, dont on s’est privé dans un but d’amour, peut obtenir un pain, miraculeusement offert, à un affamé éloigné et qui restera toujours un inconnu pour nous. De même, une parole de colère, même de juste colère, retenue par esprit de sacrifice, peut empêcher un crime lointain, comme de résister au désir de cueillir un fruit, par amour, peut servir à donner une pensée de regret à un voleur et ainsi empêcher un vol. Rien ne se perd dans l’économie sainte de l’amour universel : pas plus l’héroïque sacrifice d’un enfant devant un plat de fouaces que l’holocauste d’un martyr. Je vous dis même que l’holocauste d’un martyr a souvent pour origine l’éducation héroïque qui lui a été donnée dès l’enfance pour l’amour de Dieu et du prochain.

311.5

– Alors il est vraiment utile que je fasse toujours des sacrifices pour le temps où nous serons persécutés, déclare Marziam avec conviction.

– Persécutés ? demande Pierre.

– Oui. Tu ne te rappelles pas que c’est lui qui l’a dit[2] ? “ Vous serez persécutés à cause de moi. ” Toi, tu me l’as dit quand tu es venu pour la première fois seul, évangéliser à Bethsaïde, pendant l’été.

– Il se souvient de tout, cet enfant » dit Pierre, plein d’admiration.

Le dîner est terminé. Jésus se lève, prie pour tous et bénit. Ensuite, pendant que les femmes vont faire la vaisselle, Jésus se met avec les hommes dans un coin de la pièce et il taille un morceau de bois qui, sous le regard émerveillé de Marziam, devient une brebis…

311.1

I do not know whether it is the same day, but I suppose it is, because Peter is sitting at the family table in Nazareth. The meal is almost over and Syntyche gets up to put on the table some apples, nuts, grapes and almonds which end the supper, because it is evening and lamps have already been lit.

They are talking about lamps when Syntyche brings the fruit. Peter says: «This year we will light an extra lamp, and then more and more, for you, son. Because we want to light it for you, even if you are here. It is the first time we light one for a boy…» and Simon is moved when he ends: «It would certainly be lovelier, if you were there…»

«Last year, Simon, it was I who sighed for My Son far away, and with Me, Mary of Alphaeus, Salome and also Mary of Simon in her house at Kerioth, and Thomas’ mother…»

«Oh! Judas’ mother! Her son will be with her this year… but I do not think she will be happier… Never mind… We were at Lazarus’. How many lights!… It looked like a sky of gold and fire. Lazarus has his sister this year… But I am sure of speaking the truth when I say that they will be sighing because You are not there.

311.2

And where will we be next year?»

«I will be very far away…» whispers John.

Peter turns around to look at him, as he is sitting beside John, and he is on the point of asking something, but fortunately he controls himself, because of a meaningful look of Jesus.

Marjiam asks: «Where will you be?»

«By the mercy of the Lord I hope to be in Abraham’s bosom…»

«Oh! do you want to die? Do you not want to evangelize? Are you not sorry to die before evangelizing?»

«The word of the Lord is to be announced by holy lips. It is a great favour if He allowed me to hear it and redeem myself through it. I would have liked… But it is late…»

«And yet you will evangelize. You have already done so. So much so that you have attracted people’s attention. You will therefore be called just the same an evangelizing disciple, even if you do not travel about preaching the Gospel; and in the next life you will receive the prize reserved for My evangelizers.»

«Your promise makes me desire death… Every minute in life may conceal a snare, and weak as I am, I may not be able to overcome it. If God receives me, being satisfied with what I have done, is that not great bounty, which I must bless?»

«I solemnly tell you that death will be supreme bounty for many, who will thus know to what extent man raves, from a place where peace will comfort them for such knowledge, and will change it into hosanna because it will be linked to the unutterable joy of liberation from Limbo.»

«And where shall we be in future years, Lord?» asks Simon Zealot who has been listening diligently.

«Where it will please the Eternal Father. Do you want to engage the remote future, when we are not certain of the moment in which we live and whether we will be granted to end it? In any case, whatever the place where the future Dedications will be celebrated, it will always be a holy one provided you are there to fulfil the will of God.»

«Provided we are? And what about You?» asks Peter. «I will always be where My beloved ones are.»

Mary has never spoken, but Her eyes have not ceased for one moment to scan the face of Her Son…

311.3

She is aroused by Marjiam’s remark who says: «Mother, why have You not put the honey cakes on the table? Jesus likes them and they are good for John’s throat. And my father likes them, too…»

«And you, too» concludes Peter.

«As far as I am concerned… they do not exist. I promised…»

«That is why I did not put them on the table, My dear…» says Mary caressing him, because Marjiam is between Her and Syntyche, on one side of the table, while the four men are on the opposite side.

«No, no. You can bring them. Or rather: You must bring them. And I will hand them out to everybody.»

Syntyche takes a lamp, goes out and comes back with the cakes. Marjiam takes the tray and begins to hand them out. He gives Jesus the most beautiful one, golden and raised like one made by a master confectioner. The next one in perfection is for Mary. Then it is the turn of Peter, Simon and Syntyche. But in order to serve John, the boy gets up and goes beside the old sick teacher and says to him: «I am giving you yours and mine, with a kiss, to thank you for what you teach me.» He then goes back to his place lays the tray in the middle of the table resolutely and folds his arms.

«You make this delicious cake go the wrong way» says Peter when he sees that Marjiam does not take any. And he adds: «At least a little bit. Here, take some of mine, so that you will not die to have some. You are suffering too much … Jesus will let you have it.»

«But if I did not suffer, I would have no merit, father. I offered this sacrifice exactly because I knew that it would make me suffer. After all… I have been so happy since I made it, that I seem to be full of honey. I taste it in everything, and I even seem to breathe it in the air…»

«That’s because you are dying to have some…»

«No. It’s because I know that God says to me: “You are doing the right thing, My son”.»

«The Master. would have satisfied you, even without this sacrifice. He loves you so much!»

«Yes. But it is not fair that I should take advantage of it, just because He loves me. In any case, He says[1] that great is the reward in Heaven even for a cup of water offered in His name. I think that if it is great for a cup of water given to other people in His name, it must also be great for a cake or a little honey which one gives up out of love for a brother.

311.4

Am I wrong, Master?»

«No, you have spoken wisely. In fact, I could have granted you what you asked for, in favour of little Rachel, also without your sacrifice, because it was a good thing to do and My Heart desired it. But I did it with greater joy because I was helped by you. The love for our brothers is not confined to human means and limits, but it rises to much higher levels. When it is perfect, it really touches the throne of God and blends with His infinite Charity and Bounty. The communion of saints is just this continuous activity, as God works continuously and in every way, to assist our brothers both in their material and spiritual needs or in both as it is in the case of Marjiam, who relieves Rachel of her illness by obtaining her cure, and at the same time he relieves the dejected spirit of old Johanna and kindles greater and greater trust in the Lord in all the hearts in the family. Even a spoonful of honey, offered as a sacrifice, can help to bring peace and hope to an afflicted soul as a cake or any other food given up out of love, may obtain some bread, offered miraculously, for some starving person who is remote from us and will never be known to us; and an angry word, not uttered out of spirit of sacrifice, although justified, may prevent a remote crime, as to resist the desire to pick a fruit, out of love, may bring about a thought of resipiscence in a thief and thwart a theft. Nothing is lost in the holy economy of universal love: neither the heroic sacrifice of a boy before a dish of honey cakes, nor the holocaust of a martyr. In fact, I tell you that the holocaust of a martyr often originates from the heroic upbreeding imparted to him since his childhood for the love of God and his neighbour.»

311.5

«So it is really a good thing that I should always make sacrifices. For the time when we will be persecuted» says Marjiam earnestly.

«Persecuted?» asks Peter.

«Yes. Don’t you remember that He said so? “You will be persecuted in My name”. You told me[2] the first time you came all alone to Bethsaida, in summer, to evangelize.»

«This boy remembers everything» comments Peter admiring him.

The supper is over. Jesus stands up. He prays for everybody and blesses them. And while the women go to tidy up the kitchen, Jesus and the men take seats in a corner of the room, where He begins to carve a piece of wood, which under the amazed eyes of Marjiam, takes the shape of a little sheep…


Notes

  1. Il dit lui-même en 265.13.
  2. c’est lui qui l’a dit : en 265.7.9

Notes

  1. He says, in 265.13.
  2. You told me, in 265.7.9.