The Writings of Maria Valtorta

324. Les discours des huit apôtres avant de repartir d’Antioche.

324. The preaching of the eight apostles before departing from Antioch. Goodbye to John of Endor and Syntyche.

324.1

Les apôtres sont de retour dans la maison d’Antioche et avec eux les deux disciples et tous les hommes d’Antigonée, qui ne sont plus vêtus de leurs courts vêtements de travail, mais de longs habits de fête. J’en conclus que c’est le sabbat.

Philippe prie les apôtres de parler au moins une fois à tout le monde avant leur départ, désormais imminent.

« Sur quoi ?

– Sur ce que vous voudrez. Vous avez entendu ces jours-ci nos conversations, inspirez-vous-en. »

Les apôtres se regardent les uns les autres. A qui cela revient-il ? A Pierre, c’est naturel. C’est le chef ! Mais Pierre voudrait ne pas parler, et il donne à Jacques, fils d’Alphée, ou à Jean l’honneur de le commencer. Et c’est seulement quand il les voit inexorables qu’il se décide à parler.

« Aujourd’hui, nous avons entendu expliquer dans la synagogue le chapitre 52 d’Isaïe. Le commentaire en a été fait, doctement selon le monde, défectueusement selon la Sagesse.

Mais il n’y a pas lieu de le reprocher au commentateur, qui a donné ce qu’il pouvait avec sa sagesse mutilée de ce qu’il y a de meilleur : la connaissance du Messie et du temps nouveau amené par lui. Nous ne faisons pourtant pas de critiques, mais des prières pour qu’il arrive à connaître ces deux grâces et puisse les accepter sans y mettre d’obstacle.

Vous m’avez dit que, pendant la Pâque, vous avez entendu parler du Maître avec foi, mais aussi avec mépris. Et que c’est seulement grâce à la grande foi qui remplit les cœurs de la maison de Lazare, tous les cœurs, que vous avez pu résister au malaise que les insinuations des autres créaient dans votre cœur, d’autant plus que ces autres étaient justement les rabbis d’Israël.

Mais être savant ne signifie pas être saint ni posséder la vérité. La vérité, la voici : Jésus de Nazareth est le Messie promis, le Sauveur de qui parlent les prophètes, dont le dernier repose depuis peu dans le sein d’Abraham après le glorieux martyre qu’il a subi pour la justice. Jean-Baptiste a dit – et ceux qui ont entendu ses paroles sont présents ici – : “ Voici l’Agneau de Dieu qui enlève les péchés du monde. ”

Ces paroles ont été crues par les plus humbles de ceux qui sont ici, car l’humilité aide à parvenir à la foi, alors que pour les orgueilleux – empêtrés d’inutilités comme ils le sont –, le chemin est difficile pour atteindre le sommet de la montagne où, chaste et lumineuse, vit la foi. Ces humbles, parce qu’ils l’étaient et parce qu’ils ont cru, ont mérité d’être les premiers dans l’armée du Seigneur Jésus.

Voyez donc combien l’humilité est nécessaire pour avoir une foi prompte et combien on est récompensé de savoir croire, même contre les apparences contraires. Je vous exhorte et je vous pousse à faire grandir en vous ces deux vertus, car alors vous appartiendrez à l’armée du Seigneur et vous conquerrez le Royaume des Cieux…

324.2

A ton tour, Simon le Zélote. Moi, j’ai fini. Prends la suite. »

Simon, pris ainsi à l’improviste, et si clairement désigné comme second orateur, doit s’avancer sans retard ni récrimination, ce qu’il fait en disant :

« Je vais continuer le discours de Simon-Pierre, notre chef à tous par la volonté du Seigneur. Et ce sera en m’appuyant sur le chapitre 52 d’Isaïe, vu par quelqu’un qui connaît la Vérité incarnée dont il est le serviteur, pour toujours. Il est dit : “ Lève-toi, revêts-toi de ta force, ô Sion, prends des vêtements de fête, cité du Saint. ”

Vraiment, il devrait en être ainsi. Car, quand une promesse s’accomplit, une paix se fait, une condamnation cesse et le temps de la joie arrive, les cœurs et les cités devraient prendre des vêtements de fête pour relever les fronts courbés, lorsqu’ils prennent conscience de n’être plus haïs, vaincus, frappés, mais aimés et délivrés.

Nous ne sommes pas ici pour faire un procès à Jérusalem. La charité, la première entre toutes les vertus, le défend. Cessons donc d’observer le cœur des autres et regardons le nôtre. Revêtons de force notre cœur par cette foi dont a parlé Simon, et prenons des vêtements de fête car notre foi séculaire au Messie est maintenant couronnée par la réalisation de sa venue. Le Messie, le Saint, le Verbe de Dieu, est réellement parmi nous. Ceux qui en ont la preuve, ce ne sont pas seulement les âmes qui entendent les paroles de la Sagesse qui les fortifient et répandent en elles la sainteté et la paix, ce sont aussi les corps qui, par l’œuvre du Saint auquel le Père a tout accordé, se voient délivrés des maladies les plus atroces et jusque de la mort, afin que les terres et les vallées d’Israël, notre patrie, résonnent de louanges au Fils de David et au Très-Haut, qui a envoyé son Verbe comme il l’avait promis aux patriarches et aux prophètes.

Moi qui vous parle, j’étais lépreux, destiné à mourir après des années d’angoisse cruelle, dans la solitude des bêtes fauves réservée aux lépreux. Un homme m’a dit : “ Va trouver le Rabbi de Nazareth, et tu seras guéri. ” J’ai eu foi. J’y suis allé. J’ai été guéri. Dans mon corps comme dans mon cœur : sur l’un, la maladie qui sépare des hommes est disparue, dans l’autre, la rancœur qui sépare de Dieu est aussi disparue. Et avec une âme nouvelle, après avoir été proscrit, malade, inquiet, je suis devenu son serviteur, appelé à l’heureuse mission d’aller parmi les hommes pour les aimer en son nom, et pour les instruire de la seule connaissance nécessaire : celle que Jésus de Nazareth est le Sauveur et que bienheureux sont ceux qui croient en lui.

324.3

A toi de parler, maintenant, Jacques, fils d’Alphée.

– Je suis le frère du Nazaréen. Mon père et son père étaient frères nés d’un même sein, et pourtant je ne peux pas me dire son frère, mais son serviteur. Car la paternité de Joseph, le frère de mon père, ne fut qu’une paternité spirituelle et, en vérité, je vous dis que le vrai Père de Jésus, notre Maître, c’est le Très-Haut que nous adorons. Il a permis que sa Divinité, une et trine, s’incarne dans la deuxième Personne et qu’elle vienne sur la terre tout en restant unie à Celles qui habitent le Ciel. Car Dieu peut le faire, lui l’infiniment Puissant, et il le fait par l’Amour qui est sa nature.

Jésus de Nazareth est notre Frère, ô hommes, parce qu’il est né d’une femme, et semblable à nous dans son humanité. Il est notre Maître car il est le Sage, il est la Parole même de Dieu, venue pour nous parler de Dieu, pour nous faire appartenir à Dieu. Et il est notre Dieu, étant un avec le Père et l’Esprit Saint, avec lesquels il est toujours en union d’amour, de puissance et de nature.

Que cette vérité soit en votre possession, elle qui, par des preuves manifestes, fut par grâce connue de ce Juste qu’était mon parent. Et à l’encontre du monde qui cherchera à vous arracher au Christ en disant : “ C’est un homme quelconque ”, répondez[1] : “ Non. C’est le Fils de Dieu, c’est l’Etoile née de Jacob, c’est la Verge qui se lève ici, en Israël, c’est le Dominateur. ” Ne vous laissez détourner par rien. Cela, c’est la foi.

324.4

A toi, André.

– Cela, c’est la foi. Moi, je suis un pauvre pêcheur du lac de Galilée et, dans les silencieuses nuits de pêche, sous la lumière des astres, j’avais de muettes conversations avec moi-même. Je me disais : “ Quand viendra-t-il ? Serai-je encore vivant ? Il manque encore plusieurs années, d’après la prophétie[2]. ” Pour l’homme dont la vie est limitée, même quelques dizaines d’années paraissent des siècles… Je me demandais : “ Comment viendra-t-il ? D’où ? De qui ? ” Et mon humanité obtuse me faisait rêver à des splendeurs royales, à des demeures souveraine, à des cortèges, à des sonneries retentissantes, à une puissance, à une majesté insoutenable… Et je me disais : “ Qui pourra regarder ce grand Roi ? ” Je pensais que ses manifestations inspireraient plus de terreur que Yahvé lui-même sur le Sinaï. Je me disais : “ Les Hébreux ont vu la montagne étinceler, mais ils n’ont pas été réduits en cendres car l’Eternel était au-delà des nuées. Mais ici, il nous regardera avec des yeux mortels et nous mourrons… ”

J’étais disciple de Jean-Baptiste et, dans les pauses de la pêche, j’allais le trouver avec d’autres compagnons. C’était un jour de cette lune… Les rives du Jourdain étaient pleines d’une foule qui tremblait sous les paroles de Jean-Baptiste. J’avais remarqué un jeune homme beau et calme qui, en suivant un sentier, venait vers nous. Son vêtement était modeste, son aspect plein de douceur. Il paraissait demander et donner de l’amour. Ses yeux bleus se sont posés un moment sur moi et j’ai éprouvé une sensation que je n’ai plus jamais retrouvée. J’ai eu l’impression qu’on caressait mon âme, que des ailes d’anges m’effleuraient. Pendant un moment, je me suis senti si loin de la terre, si différent, que j’ai pensé : “ Maintenant je vais mourir ! C’est l’appel de Dieu à mon âme. ”

Mais je ne suis pas mort. Je suis resté fasciné dans la contemplation du jeune inconnu qui, à son tour, avait fixé son regard bleu sur Jean-Baptiste. Celui-ci s’est retourné, a couru vers lui et s’est incliné. Ils se sont parlé. Et comme la voix de Jean était un continuel tonnerre, ses mystérieuses paroles arrivèrent jusqu’à moi qui écoutais, tendu par le désir de savoir qui était le fascinant personnage. Mon âme le sentait différent de tout le monde. Jean disait : “ C’est moi qui devrais être baptisé par toi… ” – “ Laisse faire maintenant, il convient d’accomplir toute justice… ”

Jean avait déjà dit : “ Celui dont je ne suis pas digne de dénouer les sandales va venir. ” Il avait déjà dit : “ Parmi vous en Israël, vient quelqu’un que vous ne connaissez pas. Il tient déjà le van en main et il nettoiera son aire en brûlant les pailles par son feu inextinguible. ”

J’avais devant moi un jeune homme du peuple, bienveillant et simble, et pourtant j’ai senti que c’était Celui auquel le Saint d’Israël, le dernier prophète, le Précurseur, n’était pas même digne de dénouer les sandales. J’ai senti qu’il était Celui que nous ne connaissions pas. Mais je n’en ai pas eu peur. Au contraire, quand Jean, après le ravissement suprême du tonnerre de Dieu, après l’inconcevable éclat de la Lumière en forme de colombe de paix, eut dit : “ Voici l’Agneau de Dieu ”, moi, par la voix de mon âme, dans la jubilation d’avoir pressenti le Roi Messie en ce jeune homme doux et humble, j’ai crié avec la voix de mon âme : “ Je crois ! ” C’est par cette foi que je suis son serviteur[3]. Soyez-le vous aussi et vous aurez la paix.

324.5

Matthieu, à toi de raconter les autres gloires du Seigneur.

– Moi, je ne peux me servir des paroles sereines d’André. Lui était un juste, moi un pécheur. Alors, si ma parole n’a pas l’accent joyeux d’un air de fête, elle a pourtant la paix confiante d’un psaume.

J’étais un pécheur, un grand pécheur. Je vivais dans l’erreur complète. J’étais endurci et je ne m’en sentais pas incommodé. Si quelquefois les pharisiens ou le chef de la synagogue me cinglaient de leurs insultes ou de leurs reproches, en me rappelant un Dieu qui était un Juge inexorable, j’avais un moment de terreur… et puis je me complaisais dans cette sotte idée : “ De toutes façons, désormais je suis damné. Jouissons donc, ô mes sens, tant que c’est possible. ” Et je sombrais plus que jamais dans le péché.

Il y a deux printemps, un inconnu est venu à Capharnaüm. Pour moi aussi, c’était un inconnu. Il l’était pour tout le monde, parce que c’était le commencement de sa mission. Seuls quelques hommes le connaissaient pour ce qu’il était réellement. Ceux que vous voyez, et quelques autres encore. Je fus étonné par sa merveilleuse virilité, chaste plus qu’une vierge. Ce fut la première chose qui m’a frappé. Je le voyais austère et pourtant tout disposé à écouter les enfants qui venaient à lui, comme les abeilles vont aux fleurs. Son unique distraction, c’était leurs jeux innocents et leurs propos sans malice. Puis c’est sa puissance qui m’a étonné. Il faisait des miracles. Je me suis dit : “ C’est un exorciste, un saint. ” Mais je me sentais tellement indigne devant lui que je le fuyais.

Lui me cherchait, ou j’en avais l’impression. Il ne passait pas une fois devant mon comptoir sans poser sur moi un regard doux et un peu triste. Et c’était chaque fois comme un sursaut de ma conscience engourdie, qui ne revenait plus au même niveau de torpeur.

Un jour – les gens exaltaient toujours sa parole –, j’ai eu le désir de l’écouter. Et, me cachant derrière une maison, je l’entendis parler à un petit groupe d’hommes. Il parlait familièrement sur la charité qui est comme une indulgence pour nos péchés… A partir de ce soir-là, moi qui étais avide et qui avais le cœur dur, j’ai voulu me faire pardonner par Dieu mes nombreux péchés. Je le faisais en secret… Mais lui savait que c’était moi, parce qu’il sait tout. Une autre fois, je l’ai entendu expliquer justement le chapitre 52 d’Isaïe : il disait que, dans son Royaume, la Jérusalem céleste, il n’y aurait pas d’impurs ni de gens qui n’ont pas le cœur circoncis. Il promettait cette Cité céleste, dont il célébrait les beautés, à tous ceux qui viendraient à lui, et sa parole était si persuasive que j’en ai éprouvé de la nostalgie.

Et puis… et puis… Ah ! Ce jour-là, ce ne fut pas un regard triste, mais un regard impérieux. Il m’a déchiré le cœur, mis à nu mon âme, il l’a cautérisée, prise en main, cette pauvre âme malade, et torturée par son amour exigeant… et j’eus une âme nouvelle. Je suis allé vers lui avec repentir et désir. Il n’a pas attendu que je lui dise : “ Seigneur, pitié ! ” C’est lui qui m’a dit : “ Suis-moi ! ”

Le Doux avait vaincu Satan dans le cœur du pécheur. Que cela vous apprenne, si l’un de vous est troublé par ses fautes, qu’il est le bon Sauveur et qu’il ne faut pas le fuir, mais plus on est pécheur plus il faut aller à lui avec humilité et repentir pour être pardonné.

324.6

Jacques fils de Zébédée, à toi de parler.

– Vraiment, je ne sais que dire. Vous avez parlé et dit ce que j’aurais dit, car c’est cela, la vérité, et on ne peut rien y changer.

Moi aussi, j’étais avec André au Jourdain, mais je n’ai pas remarqué le Seigneur avant l’indication de Jean-Baptiste. Moi aussi, j’ai tout de suite cru. Quand Jésus est parti après son éclatante manifestation, je suis resté comme un homme qui passe d’un sommet ensoleillé à une sombre prison. Je brûlais de retrouver le Soleil. Le monde était privé de toute lumière depuis que la Lumière de Dieu m’était apparue et avait disparu. J’étais seul au milieu des hommes. Pendant que je me rassasiais, j’avais faim. Pendant mon sommeil, la meilleure partie de moi-même veillait, et argent, métier, affections, tout s’était estompé très loin derrière ce désir ardent que j’avais de lui, et n’exerçait plus sur moi aucune attirance. Comme un enfant qui a perdu sa mère, je gémissais : “ Reviens, Agneau du Seigneur ! Très-Haut, comme tu as envoyé Raphaël[4] pour guider Tobie, envoie ton ange pour me conduire sur les chemins du Seigneur afin que je le trouve, que je le trouve, que je le trouve ! ”

Pourtant, quand il apparut, venant du désert, après des dizaines de jours[5] d’inutile attente, de recherches anxieuses qui, par leur inutilité, rendaient plus douloureuse la perte de notre Jean arrêté une première fois, moi, je ne l’ai pas immédiatement reconnu.

Et ici, mes frères dans le Seigneur, je veux vous enseigner une autre voie pour aller à lui et le reconnaître.

Pierre a dit qu’il faut foi et humilité pour le reconnaître. Simon le Zélote a réaffirmé l’absolue nécessité de la foi pour reconnaître en Jésus de Nazareth celui qui est au Ciel et sur la terre, comme cela a été dit[6]. Et le Zélote avait besoin d’une foi bien grande pour espérer aussi la guérison de son corps incurable. C’est la raison pour laquelle il dit que la foi et l’espérance sont les moyens de rencontrer le Fils de Dieu. Jacques, le frère du Seigneur, parle de la puissance de la force pour conserver ce que l’on a trouvé. La force empêche les pièges du monde et de Satan d’ébranler notre foi. André fait voir toute la nécessité d’unir à la foi une sainte soif de la justice, en cherchant à connaître et à garder la vérité, quelle que soit la bouche sainte qui l’annonce, non par orgueil humain d’être savant mais par désir de connaître Dieu. Celui qui s’instruit dans la vérité trouve Dieu.

Matthieu, autrefois pécheur, vous indique une autre voie pour atteindre Dieu : se dépouiller des sens par esprit d’imitation, je dirais en reflétant Dieu qui est Pureté infinie. Lui, le pécheur, fut d’abord frappé par la “ chaste virilité ” de l’Inconnu venu à Capharnaüm et, comme si celle-ci avait le pouvoir de faire revivre sa continence morte, il commença par s’interdire la sensualité charnelle, désencombrant ainsi la route pour la venue de Dieu et la résurrection des autres vertus mortes. De la continence, il passe à la miséricorde, de celle-ci à la contrition, après la contrition, il se domine tout entier et arrive à l’union à Dieu. “ Suis-moi”, “Je viens”. Mais son âme avait déjà dit : “ Je viens ”, et le Sauveur avait déjà dit : “ Suis-moi ! ”, à partir du moment où, pour la première fois, la vertu du Maître avait attiré l’attention du pécheur.

Imitez. Car toute expérience d’autrui, même pénible, nous guide pour éviter le mal et trouver le bien chez les hommes de bonne volonté.

En ce qui me concerne, je dis que plus l’homme s’efforce de vivre par l’esprit, plus il est capable de découvrir le Seigneur ; et la vie angélique favorise cela au suprême degré. Parmi nous, disciples de Jean, celui qui l’a reconnu après son absence, ce fut l’âme vierge. Mieux encore qu’André, il s’est fondu en Lui, bien que la pénitence ait changé le visage de l’Agneau de Dieu. Je vous dis donc : “ Soyez chastes pour pouvoir le rejoindre. ”

324.7

Jude, veux-tu parler maintenant ?

– Oui. Soyez chastes pour pouvoir le rejoindre. Mais soyez-le aussi pour pouvoir le garder en vous, avec sa sagesse, avec son amour, avec tout lui-même. C’est encore Isaïe qui dit au chapitre 52 : “ Ne touchez pas ce qui est impur… Purifiez-vous, vous qui portez les vases du Seigneur. ” C’est bien vrai que toute âme qui devient disciple est semblable à un vase plein de Dieu, et que le corps qui la contient est comme celui qui porte à Dieu le vase sacré. Dieu ne peut rester là où se trouve l’impureté.

Matthieu a dit comment le Seigneur expliquait qu’il n’y aura rien d’immonde ni de séparé de Dieu dans la Jérusalem céleste. Oui. Mais il ne faut pas être impur ici-bas, ni séparé de Dieu, pour pouvoir y entrer. Malheureux ceux qui attendent la dernière heure pour se repentir. Ils n’auront pas toujours le temps de le faire. De même que ceux qui maintenant le calomnient n’auront pas le temps de se refaire un cœur au moment de son triomphe et ne jouiront donc pas de ses fruits.

Ceux qui espèrent voir dans le Roi saint et humble un monarque terrestre, et plus encore ceux qui craignent de voir en lui un monarque terrestre, ne seront pas préparés pour cette heure ; induits en erreur, et déçus dans leur pensée, qui n’est pas la pensée de Dieu mais une pauvre pensée humaine, ils pécheront bien plus.

Il porte l’humiliation d’être l’Homme, nous devons nous le rappeler. Isaïe dit que tous nos péchés tiennent la Personne divine mortifiée sous une apparence commune. Quand je pense que le Verbe de Dieu a autour de lui, comme une croûte souillée, toute la misère de l’humanité depuis qu’elle existe, j’imagine avec une profonde compassion et une grande compréhension la souffrance que son âme sans tache doit en éprouver, la répulsion d’un homme sain qui se voit recouvert des haillons et des souillures d’un lépreux. Il a été vraiment transpercé par nos péchés, couvert de plaies par toutes les concupiscences de l’homme. Son âme, qui vit parmi nous, doit trembler à ce contact comme si elle éprouvait le dégoût de la fièvre.

Pourtant, il garde le silence. Il ne parle pas pour dire : “ Vous me faites horreur. ” Mais il ne parle que pour dire : “ Venez à moi, pour que j’enlève vos fautes. ” C’est le Sauveur. Dans son infinie bonté, il a voulu voiler son insoutenable beauté, elle qui, si elle nous était apparue telle qu’elle est au Ciel, nous aurait réduits en cendres, comme dit André. Maintenant elle s’est faite attrayante, comme celle d’un doux Agneau, pour pouvoir nous approcher et nous sauver. Son accablement, sa condamnation durera jusqu’à ce que, consumé par l’effort d’être l’Homme parfait parmi les hommes imparfaits, il se dresse au-dessus de la multitude des rachetés, dans le triomphe de sa royauté sainte. Dieu qui connaît la mort pour nous donner la Vie ! Que ces pensées vous le fassent aimer plus que tout. Il est le Saint. Je peux le dire, moi qui, avec Jacques, ai grandi avec lui. Je le dis et je le dirai, prêt à donner ma vie pour le reconnaître, pour que les hommes croient en lui et aient la vie éternelle.

324.8

Jean, à toi de parler.

– Qu’ils sont beaux[7], sur les montagnes, les pieds du messager ! Du Messager de paix, de celui qui annonce la félicité et prêche le salut, de celui qui dit à Sion : “ Ton Dieu règnera ! ” Et ces pieds marchent inlassablement depuis deux ans à travers les montagnes d’Israël, appelant les brebis du troupeau de Dieu pour les réunir, réconfortant, guérissant, pardonnant, apportant la paix. Sa paix.

Je suis vraiment étonné de voir que les collines ne tressaillent pas de joie et que les cours d’eau de notre patrie n’exultent pas d’allégresse sous la caresse de ses pieds. Mais ce qui m’étonne davantage, c’est de voir que les cœurs ne tressaillent pas et qu’ils n’exultent pas en disant : “ Louange au Seigneur ! L’Attendu est venu ! Béni soit Celui qui vient au nom du Seigneur ! ”, Celui qui répand grâces et bénédictions, paix et salut, et qui appelle au Royaume en nous en ouvrant le chemin, Celui, surtout, qui répand l’amour par tous ses actes ou paroles, par tous ses regards, à chacune de ses respirations.

Qu’est donc ce monde pour être aveugle devant la Lumière qui est parmi nous ? Quel rempart, plus épais que la pierre qui ferme les tombeaux, a donc emmuré la vue de l’âme pour qu’elle ne voie pas cette Lumière ? Quelle montagne de péchés ce monde porte-t-il sur lui pour être ainsi accablé, séparé, aveuglé, rendu sourd, enchaîné, paralysé, pour rester inerte devant le Sauveur ?

Qu’est-ce que le Sauveur ? C’est la Lumière unie à l’Amour. La bouche de mes frères a magnifié les louanges du Seigneur, évoqué ses œuvres, indiqué les vertus à pratiquer pour arriver à son chemin. Moi, je vous dis : aimez. Il n’y a pas de vertu plus grande et plus semblable à sa nature. Si vous aimez, vous pratiquerez toutes les vertus sans effort, en commençant par la chasteté. Et ce ne vous sera pas un poids d’être chaste car, en aimant Jésus, vous n’aimerez personne d’autre immodérément. Vous serez humbles car vous verrez en lui ses infinies perfections avec les yeux d’un amant, ainsi vous ne tirerez pas orgueil des vôtres, si petites. Vous serez croyants, et qui ne croit pas en celui qu’il aime ? Vous serez brisés par la douleur qui sauve, car votre douleur sera droite, c’est-à-dire une douleur pour la peine qui lui a été faite, non pour celle que vous méritez. Vous serez forts. Oh, oui ! Uni à Jésus, on est fort ! Fort contre tout. Vous serez pleins d’espérance car vous ne douterez pas du Cœur des cœurs qui vous aime de tout son être. Vous serez sages. Vous serez tout. Aimez Celui qui annonce la vraie félicité, qui prêche le salut, qui marche inlassablement à travers monts et vallées en appelant son troupeau pour le rassembler. C’est sur son chemin que se trouve la Paix, et la paix se trouve dans son Royaume qui n’est pas de ce monde, mais qui est vrai comme Dieu est vrai.

Abandonnez toute route qui n’est pas la sienne. Dégagez-vous de toute brume. Allez à la Lumière. Ne soyez pas comme le monde qui ne veut pas voir la Lumière, qui ne veut pas la connaître. Mais allez à notre Père qui est le Père des lumières, qui est Lumière sans mesure, par le Fils qui est la Lumière du monde, pour jouir de Dieu dans l’étreinte du Paraclet qui est la fulgurance des Lumières dans une seule béatitude d’amour, qui unit les trois Personnes en Un. Océan infini de l’Amour, sans tempêtes, sans ténèbres, accueille-nous ! Tous ! Les innocents comme les convertis. Tous ! Dans ta Paix ! Tous ! Pour l’éternité. Tous, sur la terre, pour que nous t’aimions toi, Dieu, et notre prochain comme tu le veux. Tous, dans le Ciel, pour qu’encore et toujours nous aimions, non seulement toi et les habitants célestes, mais aussi et encore nos frères qui combattent sur la terre dans l’attente de la paix, et pour que, comme les anges de l’amour, nous les défendions et les soutenions dans les luttes et les tentations, pour qu’ensuite, ils puissent être avec toi dans ta Paix, pour la gloire éternelle de notre Seigneur, Jésus, le Sauveur, l’Amant de l’homme jusqu’à l’anéantissement sans fin et sublime. »

324.9

Comme toujours, Jean, en s’élevant dans ses vols d’amour, entraîne avec lui les âmes là où l’amour se perd et dans le silence mystique.

Ce n’est qu’après un moment que la parole revient sur les lèvres des auditeurs. Et le premier à parler, c’est Philippe, s’adressant à Pierre :

« Et Jean, le pédagogue, il ne parle pas ?

– Il vous parlera continuellement à notre place. Pour l’instant, laissez-le dans sa paix et laissez-nous un peu avec lui. Toi, Saba, fais ce que je t’ai dit auparavant. Et, toi aussi, bonne Bérénice… »

324.10

Tout le monde sort, laissant dans la grande pièce les huit apôtres avec les deux disciples. Un silence grave s’installe. Ils sont tous un peu pâles, les apôtres parce qu’ils savent ce qui va arriver, les deux disciples parce qu’ils le pressentent.

Pierre prend la parole, mais ne trouve rien d’autre à dire que : « Prions », et il entonne le Notre Père. Puis – et il est vraiment pâle, comme il ne le sera peut-être pas le jour de sa mort –, il s’approche des deux disciples et dit en leur posant la main sur l’épaule :

« C’est l’heure des adieux, mes enfants. Que dois-je dire au Seigneur en votre nom, à lui qui attendra sûrement avec angoisse d’avoir des nouvelles de votre sainteté ? »

Syntica glisse à genoux en se couvrant le visage de ses mains et Jean l’imite. Pierre les a à ses pieds, et il les caresse machinalement tout en se mordant les lèvres pour ne pas céder à l’émotion.

Jean d’En-Dor lève un visage boulversé et dit :

« Tu diras au Maître que nous faisons sa volonté… »

Et Syntica :

« Qu’il nous aide à l’accomplir jusqu’à la fin… »

Mais les larmes leur interdisent de plus longues phrases.

« C’est bien. Donnons-nous le baiser d’adieu. Cette heure devait arriver… »

Pierre lui aussi s’arrête, la gorge serrée par un sanglot.

« Bénis-nous d’abord, lui demande Syntica.

– Non. Pas moi, il vaut mieux que ce soit un frère de Jésus…

– Non, c’est toi le chef. Nous, nous les bénirons par un baiser. Bénis-nous tous, tant les partants que ceux qui restent » dit Jude en s’agenouillant le premier.

Et Pierre, le pauvre Pierre, tout rougissant sous l’effort qu’il fait pour se donner de l’assurance et masquer son émotion, bénit, les mains tendues, le petit groupe qui est à ses pieds, et prononce la bénédiction mosaïque[8] d’une voix que la peine rend plus âpre, presque une voix de vieillard…

Puis il se penche, embrasse la femme sur le front comme si c’était une sœur, se relève et étreint intensément Jean, en lui donnant un baiser et… il s’échappe courageusement de la pièce pendant que les autres imitent son attitude envers les deux disciples qui restent…

Dehors, le char est déjà prêt. Il n’y a de présents que Philippe et Bérénice, ainsi que le serviteur qui tient le cheval. Pierre est déjà sur le char…

« Tu diras à mon maître d’être tranquille au sujet des disciples qu’il m’a recommandés, dit Philippe à Pierre.

– Tu diras à Marie que, depuis qu’elle est disciple, je ressens la paix d’Euchérie, dit doucement Bérénice à Simon le Zélote.

– Vous direz au Maître, à Marie, à tous, que nous les aimons et que… Adieu ! Adieu ! Ah ! Nous ne les reverrons plus ! Adieu, mes frères ! Adieu… »

Les deux disciples courent dehors sur le chemin… Mais le char, qui est parti au trot, a maintenant dépassé le tournant… Disparu…

« Syntica !

– Jean !

– Nous sommes seuls !

– Dieu est avec nous… Viens, mon pauvre Jean. Le soleil se couche, cela va te faire mal de rester ici…

– Le soleil est tombé pour toujours pour moi… Il ne se lèvera plus qu’au Ciel. »

Ils entrent dans la pièce où ils se tenaient auparavant avec les autres et, s’abandonnant sur une table, ils pleurent sans plus se retenir…

324.11

Jésus dit :

« Et le tourment causé par un homme, ce forfait que nul autre que l’homme n’avait tramé, fut accompli, en s’arrêtant comme le cours d’eau qui arrive dans un lac après avoir achevé son parcours…

Je te fais remarquer comment Jude, bien que nourri de sagesse plus que les autres, donne au passage d’Isaïe sur mes souffrances de Rédempteur une explication humaine. Et tel était Israël tout entier, qui se refusait à accepter la réalité prophétique et contemplait les prophéties relatives à mes souffrances comme des allégories et des symboles. C’est la grande erreur à cause de laquelle, à l’heure de la Rédemption, bien peu de personnes en Israël surent reconnaître le Messie dans le Condamné.

La foi n’est pas seulement une couronne de fleurs, elle a aussi des épines. Et il est saint, celui qui sait croire aux heures de gloire, mais aussi aux heures tragiques, et sait aimer quand Dieu le couvre de fleurs, mais également quand il l’étend sur les épines. »

324.1

The apostles are once again in the house at Antioch with the two disciples and all the men from Antigonea, who are not wearing their work clothes, but have on their long best garments. I thus understand that it is the Sabbath.

Philip begs the apostles to speak to everybody at least once before their departure, which is now imminent.

«About what?»

«About anything you like. You have heard our conversation during the past days. You may speak accordingly.»

The apostles look at one another. Whose duty is it? Peter’s, of course. He is the head! But Peter would rather not speak but surrender the honour to James of Alphaeus or to John of Zebedee. And only when he sees that they are inflexible, he makes up his mind to speak.

«Today in the synagogue we heard the explanation of chapter 52 of Isaiah. A learned comment according to the world, a defective one according to Wisdom. But the commentator is not to be blamed, because he gave what he could within the limits of his own wisdom: without the knowledge of the Messiah and of the new Time brought by Him. But let us not find fault with him, let us instead pray that he may achieve the knowledge of these two graces and accept them without difficulty. You told me that at Passover you heard some people speak of the Master with faith, some with sneering words. And that only because of the great faith that fills the hearts of the house of Lazarus, all their hearts, you were able to bear the unease that the innuendoes of other people caused to your hearts, particularly because these other people were rabbis of Israel. But to be learned does not mean to be holy or to possess the Truth. And this is the Truth: Jesus of Nazareth is the promised Messiah, the Saviour of Whom the Prophets speak, and the last of them want to rest in Abraham’s bosom only recently, after his glorious martyrdom, which he suffered for the sake of justice. John the Baptist said, and those who heard his words are here now: “This is the Lamb of God that takes away the sins of the world”. His words were believed by the most humble of those present, because humility helps to reach Faith, whereas it is difficult for proud people – laden as they are with unnecessary things – to reach the mountain top where chaste bright Faith dwells. Those humble people, both because they were such and because they believed, deserved to be the first in the army of the Lord Jesus. You can thus see how necessary humility is in order to attain instant faith, and how faith is rewarded, particularly when one believes against adverse appearances. I exhort and stimulate you to possess these two qualities and you will then be in the army of the Lord and will conquer the Kingdom of Heaven…

324.2

It is your turn, Simon Zealot. I have spoken. Please continue.»

The Zealot, caught out so suddenly and so clearly pointed out as the second speaker, can but move forward without delay or complaint. And he says:

«I will continue the sermon of Simon Peter, the head of us all by the will of the Lord. And I will continue taking up the subject of chapter 52 of Isaiah, as seen by one who knows the Incarnate Truth, Whose servant he is for good. It says: “Awake, clothe yourself in strength, Zion, put on your richest clothes, city of the Holy One”. And that is how it should really be. Because when a promise is fulfilled, peace is made, punishment comes to an end, and the time of joy comes; hearts and towns should put on their best clothes and raise their mortified foreheads, realizing that they are no longer hated, defeated, beaten, but are instead loved and freed. We are not here to institute proceedings against Jerusalem. Charity, the first of all virtues, forbids it. Let us not watch the hearts of other people, let us, instead, look at our own. Let us clothe our hearts in strength by means of that faith of which Simon has spoken and let us put on our richest clothes because our age-old faith in the Messiah is now crowned by the real fact. The Holy Messiah, the Word of God is really among us. And both souls and bodies have evidence of this: the former hear the words of Wisdom, which fortify them and infuse holiness and peace, the latter, thanks to the Holy One, to Whom everything is granted by the Father, are released from the most dreadful diseases, even from death, so that the hills and valleys of Israel, our Fatherland, may resound with hosannas to the Son of David and to the Most High Who has sent His Word, as He had promised the Patriarchs and Prophets. I, who am speaking to you, was a leper, destined to die, after years of unrelenting distress, in the brutal solitude familiar to lepers. A man said to me: “Go to Him, to the Rabbi of Nazareth, and you will be cured”. I had faith. I went. I was cured. In my body. In my heart. The former was freed from the disease that separates lepers from other men. The latter was freed from the hatred that separates from God. And with a new spirit, from a troubled, sick exile I became His servant, called to the happy mission of going among men, loving them in His Name, teaching them the one and only necessary knowledge: that Jesus of Nazareth is the Saviour and that blessed are those who believe in Him.

324.3

It’s your turn to speak now, O James of Alphaeus.»

«I am the brother of the Nazarene. My father and His were brothers, born of the same mother. And yet I cannot say that I am His brother, but His servant. Because the paternity of Joseph, my father’s brother, was a spiritual paternity and I solemnly tell you that the Most High, Whom we worship, is the true Father of our Master Jesus. God allowed the Second Person of God One and Triune to become incarnate and to come upon the earth, remaining however God and always united to the Persons Who dwell in Heaven. Because God, Who is infinitely Almighty can do that. And He does it out of Love, which is His nature. Jesus of Nazareth is our brother, men, because he was born of a woman, and is like us in His humanity. He is our Master because He is the Wise One, He is the very Word of God and has come to speak to us to take us to God. And He is our God, being One with the Father and the Holy Spirit, with Whom He is always united in love, power and nature. May this Truth, which the Just One, my relative, was granted to know through clear evidence, become also your possession. And when the world will endeavour to tear you away from the Christ, saying: “He is just an ordinary man”, reply[1]: “No. He is the Son of God, He is the Star born of Jacob, He is the Sceptre that arises in Israel, He is the Ruler”. Let nothing deter you. That is Faith.

324.4

It’s your turn, Andrew.»

«That is Faith. I am a poor fisherman of the lake of Galilee, and when fishing in the silent nights, in the light of the stars, I had silent conversations with myself. I used to say: “When will He come? Will I still be alive? Many years are still to pass, according to the prophecy[2]”. For man, whose life is short, even a few dozen years are as long as centuries… I used to ask myself: “How will He come? Where? From whom?”. And my dull human mind made me dream of royal splendour, of royal abodes, processions, clangour, power and unbearable majesty… And I would say: “Who will be able to look at this great King?”. I thought that He would be more terrifying, in His manifestation, than Jehovah Himself on Mount Sinai. And I used to say: “The Hebrews saw the mountain lighten, but they were not burned to ashes, because the Eternal Father was beyond the clouds. But here He will look at us with mortal eyes and we shall die…”. I was a disciple of the Baptist. And when we were not fishing I used to go to him with other companions. It was a day of this month… The banks of the Jordan were crowded with people who shivered when hearing the words of the Baptist. I had noticed a young handsome man come calmly towards us along a path. His garments were plain, His countenance kind. He seemed to be asking for love and to be giving love. His blue eyes rested for a moment on me, and I felt something that I have never felt again. I felt as if my soul were being caressed, as if I were being lightly touched by the wings of angels. For a moment I felt that I was so far away from the earth, so different, that I said: “I shall die now! This is God calling my soul”. But I did not die. I was fascinated contemplating the young unknown man, whose blue eyes were now staring at the Baptist. And the Baptist turned round, ran to Him and bowed. They spoke to each other. And as John’s voice was as loud as thunder, their mysterious words reached me, who was listening, tense as I was in the keen desire to know who the unknown young man was. My soul felt that He was different from everybody. They were saying: “I should be baptised by You…”. “Never mind just now. It is necessary to fulfil all justice”… John had already said: “Someone will come and I am not fit to undo the straps of His sandals”. He had already said: “There is among you, in Israel, One Whom you, do not know. His winnowing-fan is already in His hand and He will clear His threshing-floor and He will burn the chaff in a fire that will never go out”. I had in front of me a young man of the common people, whose countenance was mild and humble, and yet I felt that He was the One, Whose sandal-straps not even the Holy One in Israel, the last Prophet, the Precursor was fit to undo. I felt that He was the One, Whom we did not know. But I was not afraid. On the contrary, when John, after the enrapturing thunder of God and after the unimaginable brightness of the Light in the shape of a dove of peace, said: “Here is the Lamb of God”, I cried: “I believe!” with the voice of my soul, rejoicing because I had foreseen the King Messiah in the young man who looked so mild and humble. Because of this faith I am His servant[3]. Be so yourselves, and you will have peace.

324.5

Matthew, it is your turn now to narrate the other glories of the Lord.»

«I cannot use the same serene words of Andrew. He was a just man, I was a sinner. Therefore my word has not the joyful note of happiness, but it has the confident peace of a psalm. I was a sinner. A great sinner. I was living in complete error. I had hardened in it and I felt no discomfort. If at times the Pharisees or the head of the synagogue lashed me with their insults and reproaches, reminding me of God, the inexorable Judge, I was terrified for a moment… then I would relax thinking foolishly: “In any case I am as good as damned. Let me have a good time, therefore, as long as I can”. And I sank deeper and deeper into sin. Two years ago an Unknown man came to Capernaum in springtime. He was unknown also to me. He was in fact unknown to everybody, because He was at the beginning of His mission. Only a few men knew who He really was: those whom you see here, and few more. I was greatly surprised at His demeanour, which was more chaste than a virgin’s. That was the first thing that amazed me. I saw that He was austere and yet He was always willing to listen to the children who went to Him as bees fly to flowers. Their innocent games and ingenious words were His only relaxation. Then His power amazed me. He worked miracles. I said: “He is an exorciser, a holy man”. I felt that I was so disgraceful as compared to Him, that I shunned Him. He was looking for me. Or that was what I thought. Every time He passed near my bench He would look at me with His kind but rather sad eyes. And every time I felt my torpid conscience start and it never fell back to the same level of torpor. One day, as people exalted His words, I felt like listening to Him. And hiding behind the corner of a house I heard Him speak to a little group of men. He spoke informally, on charity, which is like an indulgence with regards to our sins… As from that evening, I, the greedy hard-hearted man, wanted my many sins to be forgiven by God. I did things secretly… But He knew that it was I, because He knows everything. Once I heard Him explain just chapter 52 of Isaiah: He said that the lewd and those whose hearts are not circumcised will not enter His Kingdom, the heavenly Jerusalem, and He promised that that Celestial City, the beauty of which He described so convincingly that I felt nostalgia for it, would belong to those who went to Him. And then… Oh! On that day His look was not a sad one, but a commanding one. He broke my heart, He stripped my soul, He cauterised this poor soul of mine, He took it in His hands and tortured it with His exacting love… and I had a new soul. Repentance and desire led me towards Him. He did not wait for me to say: “Have mercy, my Lord!”. He said to me: “Follow Me!”. The Mild One had defeated Satan in the sinner’s heart. May this tell you, if anyone among you is worried because of his sins, that He is the good Saviour and that you must not shun Him, on the contrary, the more one is a sinner, the more one must go to Him with humility and repentance, in order to be forgiven.

324.6

James of Zebedee, will you speak now?»

«I do not really know what to say. You have spoken and said what I would have said. Because that is the truth and it cannot be changed. I was with Andrew at the Jordan as well, but I only noticed Him when He was pointed out by the Baptist. But I believed at once, and when He left, after His bright manifestation, I was like one who after being on a sunny mountain top, is imprisoned in a dark jail. I was longing to find the Sun again. The world was dark, after the Light of God had appeared to me, and then had disappeared. I was alone among men. I had satisfied my appetite, but I was hungry. While sleeping I was awake with my better part, and money, business, affections, everything had been left far behind my great desire for Him and nothing allured me. Like a child who has lost his mother I moaned: “Come back, Lamb of the Lord! Most High Lord, as You sent Raphael[4] to guide Tobias, send Your angel to lead me to the way of the Lord, that I may find Him…!”. And yet, when He appeared on the path coming from the desert, after we had been waiting for Him in vain for weeks, and we had been looking for Him anxiously, which vain efforts made us feel more sorely the loss of our John who had been arrested for the first time, I did not recognise Him at once. And now, my brothers in the Lord, I want to teach you another way to go to Him and recognise Him. Simon of Jonah said that faith and humility are required to know Him. Simon Zealot has confirmed the absolute necessity of Faith to acknowledge in Jesus of Nazareth what He is in Heaven and on the earth, according to what has been said[5]. And Simon Zealot needed a truly great faith, also on behalf of his incurable body. That is why Simon Zealot says that Faith and Hope are the means to attain the Son of God. James, the brother of the Lord, has mentioned the power of Strength to keep what has been found. The Strength that prevents the snares of the world and of Satan from undermining our Faith. Andrew has shown the necessity of joining a holy thirst for Justice to Faith, endeavouring to know and maintain the Truth, whatever be the holy mouth announcing it, not out of human pride to be learned, but out of desire to know God. The man who improves his mind in the Truth will find God. Matthew, once a sinner, has pointed out to you another way to attain God: to divest oneself of sensuality out of spirit of imitation, I would say by reflection of God, Who is infinite Purity. The first thing that impressed him, a sinner, was the “chaste demeanour” of the Unknown man who had come to Capernaum, and as if it had the power to revive his dead continence, he refrains first of all from sensual carnality, clearing the way for the coming of God and for the resurrection of the other dead virtues. From continence he passes on to mercy, from mercy to contrition, he then surpasses himself and arrives at union with God. “Follow Me”. “I am coming”. But his soul had already said: “I am coming”, and the Saviour had already said: “Follow Me”, when for the first time the Virtue of the Master had drawn the attention of the sinner. Imitate him. Because the experience of other people, even if painful, is a guide to avoid evil and find good for those who are of goodwill. As far as I am concerned, I say that the more man strives to live for the spirit, the more fit he is to recognise the Lord, and an angelic life favours that in the highest degree. Of us disciples of John, he who recognised him, after His absence, was the virgin soul. Better than Andrew, he recognised Him, notwithstanding penance had altered the visage of the Lamb of God. So I say: “Be chaste to be able to recognise Him”.

324.7

Judas, will you speak now?»

«Yes, be chaste to be able to recognise Him. But be chaste also to be able to keep Him within you with His Wisdom and His Love, with His whole Self. It is still Isaiah who in chapter 52 says: “Touch nothing unclean,… purify yourselves, you who carry the vessels of the Lord”. Really, every soul that becomes His disciple is like a jar full of the Lord, and the body containing the soul is like one who carries the sacred jar to the Lord. God cannot be where there is impurity. Matthew told you how the Lord explained that nothing unclean or separated from God will be in the celestial Jerusalem. Yes. But it is necessary not to be unclean or separated from God, to be able to enter it. Wretched are those people who wait until the last hour to repent. They will not always have time to do so. Likewise those who now slander Him will have no time to make amends at the moment of His triumph, and therefore will not enjoy its fruit. Those who in the holy humble King hope to see an earthly monarch, and even more those who are afraid to see in Him an earthly monarch, will not be prepared for that hour; deceived and disappointed in their thoughts, which are not the thoughts of God, but poor human thoughts, they will sin even more. The humiliation of being the Man is upon Him. We must remember that. Isaiah says that all our sins mortify the Divine Person under common appearance. When I consider that the Word of God has around Himself, like a filthy crust, all the misery of mankind since it began to exist, I think with deep compassion and understanding of the suffering that His faultless soul must endure. The horror of a healthy man who was covered with the rags and filth of a leper. He is really pierced by our sins, and covered with sores by man’s lust. His soul, living among us, must shudder with horror at such contact, as a body trembles with a high temperature. And yet He does not speak. He does not open His mouth to say: “You horrify Me”. But He opens it only to say: “Come to Me, that I may take away your sins”. He is the Saviour. In His infinite bounty He veiled His unbearable beauty. If He had appeared in all His beauty, as He is in Heaven, He would have reduced us to ashes, as Andrew said. But His beauty has become engaging, like a mild Lamb, in order to approach us and save us. His oppression, His condemnation will last until, consumed by the effort of being the perfect Man among imperfect men, He is raised above the multitude of those He has redeemed, in the triumph of His holy regality. God Who submits to death, to take us to Life! May these thoughts make you love Him above all things. He is the Holy One. I can say so, as I was brought up with Him, together with James. And I say and will say so, ready to give my life to confirm this profession, so that men may believe in Him and have eternal Life.

324.8

John of Zebedee, it is your turn to speak.»

«How beautiful[6] on the mountains are the feet of the messenger! Of the Messenger of peace, Who announces happiness and preaches salvation, Who says to Zion: “Your God is King!”. And those feet have been walking untiringly for two years across the mountains in Israel, gathering the sheep of the herd of God, consoling, curing, forgiving, giving peace. His peace. I am really surprised at seeing that the hills and rivers of our Fatherland do not exult and rejoice at the caress of His feet. But what amazes me most is to see that the hearts of men do not exult or rejoice saying: “Praised be the Lord! The Expected One has come! Blessed be He Who comes in the name of the Lord!”. He Who bestows graces and blessings, peace and health, and calls us to His Kingdom opening the way for us, above all He Who pours forth love with every action of His, with every word, glance, breath… What is therefore this world as to be blind to the Light that is living among us? Which slabs, thicker than the stone closing the entrance of a sepulchre, has it placed on the sight of its soul not to see this Light? What mountain of sins has it on itself to be so oppressed, separated, blinded, deafened, chained, paralyzed as to stand inert before the Saviour? What is the Saviour? He is Light blended with Love. The mouths of my brothers have praised the Lord, they have recalled His works, and have pointed out the virtues to be put into practice in order to reach His way. I say to you: love. There is no other virtue that is greater or more like His Nature. If you love, you will practise every virtue without difficulty, beginning from chastity. It will be no burden to you to be chaste, because by loving Jesus you will love no one immoderately. You will be humble, because with the eyes of lovers you will see infinite perfections in Him, and thus you will not pride yourselves on your scanty ones. And you will believe. Who does not believe in him whom one loves? You will be contrite with sorrow that saves, because your sorrow will be honest, that is, you will be sorry for the pain you have caused Him, not for the pain deserved by you. And you will be strong. Oh! yes! When one is united to Jesus, one is strong! Strong against everything. You will be full of hope, because you will not doubt the Heart that loves you with His whole Self. And you will be wise. You will be everything. Love Him Who announces true happiness, Who preaches salvation, Who goes across mountains and valleys tirelessly, gathering the herd, on Whose way there is Peace, as there is peace in His Kingdom, which is not of this world, but it is true as God is true. Flee from any direction that is not His. Get rid of all fog. Go to the Light. Do not be like the world, which does not want to see the Light, which does not want to know it. But go to our Father, Who is the Father of lights, Who is infinite Light, go to Him through His Son, Who is the Light of the world, to enjoy God in the embrace of the Paraclete, Who is the brightness of the Lights in one only beatitude of love that concentrates the Three into One. Infinite ocean of Love, without storms, without darkness, do receive us! All of us! Both those who are innocent and those who have repented. All of us! In Your Peace, forever! All of us! Everybody on the earth, that we may love You, God, and our neighbour, as You want. Everybody, in Heaven, that we may still and always love but You and the celestial inhabitants, that we may love also our brothers militant on the earth in expectation of peace, and like angels of love, we may defend them and support them in their struggles and temptations, so that they may be with You in Your Peace, for the eternal glory of our Lord Jesus, the Saviour, the Lover of man, until the limitless limit of sublime annihilation.»

324.9

As usual, John soaring in his flights of love, draws with him souls where there is refined love and mystic silence.

Only after some time the listeners begin to speak. And Philip is the first, addressing Peter: «Is John, the teacher, not speaking?»

«He will always be speaking to you. Leave him now in his peace and let us be alone with him for a little while. Saba, do what I told you, and you as well, O good Berenice…»

324.10

They all go out and only the eight apostles and two disciples are left in the large room. There is grave silence. They all look rather pale, the apostles because they know what is about to happen, and the two disciples because they foresee it.

Peter opens his mouth to speak, but finds only these words: «Let us pray», and he begins the «Our Father». Then, and he is really so pale that he will probably not look like this when he dies, he says, going between the two and laying his hands on their shoulders: «We now have to part, my children. What shall I say to the Lord on your behalf? He will certainly be anxious to hear about your spiritual state.»

Syntyche falls on her knees covering her face with her hands and John imitates her. Peter has them at his feet and he instinctively caresses them biting his lips not to yield to emotion.

John looks up, his face is heart-rending, and says: «You will tell the Master that we are doing His Will…» And Syntyche: «And ask Him to help us to fulfil it until the end…» Tears prevent longer sentences.

«All right. Let us kiss one another goodbye. This hour was to come…» also Peter stops speaking, choked by a lump in his throat.

«Bless us first» begs Syntyche.

«No. Not I. Better one of Jesus’ brothers…»

«No. You are the head. We shall bless with our kisses. Bless us all, both us who are leaving, and them, who are staying» says Thaddeus, and he is the first to kneel down.

And Peter, poor Peter, who is flushed both because of the effort to steady his voice, and by the excitement of stretching out his hands to bless the little group prostrated at his feet, repeats the Mosaic blessing[7], in a voice made harsher by weeping, almost the voice of an old man…

He then bends forward, kisses the forehead of the woman, as if she were his sister, lifts up and embraces John, kissing his cheek… and runs bravely out of the room, while the others imitate his gesture with the two who are staying…

The cart is ready outside. Only Philip and Berenice are present, and the servant who is holding the horse. Peter is already on the cart…

«You will tell the master not to worry about those he recommended» says Philip to Peter.

«Tell Mary that I feel the peace of Eucheria since she has become a disciple» says Berenice to the Zealot in a low voice.

«Tell the Master, Mary, everybody, that we love them, and that… Goodbye! Goodbye! Oh! We will never see them again! Goodbye, brothers! Goodbye…»

The two disciples run out into the street… But the cart which left at a trot, has already gone round the corner… Disappeared…

«Syntyche!»

«John!»

«We are alone!»

«God is with us!… Come, poor John. The sun is setting, it will do you no good to stay here…»

«The sun has set forever, as far as I am concerned… Only in Heaven it will rise again.»

And they go back to the room where they were before with the others. They lean on a table, weeping without restraint…

324.11

Jesus says:

«And the torture brought about by a man, wanted only by a wicked man, was accomplished, stopping as a river stops in a lake after completing its course. I wish to point out to you how also Judas of Alphaeus, although more nourished with wisdom than the others, explains the passage of Isaiah, dealing with My sufferings as Redeemer, in a human way. And everybody in Israel did the same, as they refused to accept the prophetic reality and they contemplated the prophecies on My sorrows as allegories and symbols. The grave error whereby in the hour of Redemption only very few people were able to still see the Messiah in the Convict. Faith is not only a wreath of flowers. It contains also thorns. And he is holy who believes both in the hours of glory and in those of tragedy, and loves God whether He covers him with flowers or lays him on thorns.»


Notes

  1. répondez : en le tirant de Nb 24, 17-19.
  2. prophétie qui se trouve en Dn 9, 22-27.
  3. je suis son serviteur : l’évocation de l’apôtre André est complétée par l’explication qu’en donne Jésus en 49.9.
  4. Raphaël est l’ange qui se révèle à Tobie (Tb 5, 4 ; 12, 15) dans le contexte du récit de Tb 5-13, auquel l’œuvre se réfère à diverses reprises, de 5.2 à 632.33. Une citation textuelle se trouve en 229.3.
  5. après des dizaines de jours (circonstance rappelée vers la fin du discours par les mots après l’absence) est une précision qui confirme l’explication donnée en 47.10 sur le temps passé entre la manifestation au Jourdain et la rencontre des premiers disciples.
  6. a été dit : en Ex 3, 14.
  7. Qu’ils sont beaux… est une citation d’Is 52, 7. Les discours des huit apôtres s’appuient presque tous sur le chapitre 52 du prophète Isaïe.
  8. la bénédiction mosaïque, prononcée en 108.6, prolongée en 363.3 et mentionnée d’autres fois ou rapportée dans l’œuvre (Jésus en utilise la formule aussi en 397.4) se trouve en Nb 6, 22-27.

Notes

  1. reply, taken from: Numbers 24:17-19.
  2. prophecy, in: Daniel 9:22-27.
  3. I am His servant. The recalling of the apostle Andrew is completed with the explanation given by Jesus in 49.9.
  4. Raphael, is the angel who revealed himself to Tobias in Tobit 5:4; 12:15.
  5. what has been said, in: Exodus 3:14.
  6. How beautiful… a quotation from Isaiah 52:7. The speeches of the eight apostoles are, almost all of them, based on chapter 52 of the book of the prophet Isaiah.
  7. the Mosaic blessing, as in Numbers 6:22-27. The formula is also used in chapters 108.6; 363.3; 397.4.