The Writings of Maria Valtorta

422. La mauvaise humeur de Judas

422. Discontent of the Iscariot who calls forth

422.1

La grève blanchit dans la nuit sans lune, mais éclairée par des milliers d’étoiles, ces étoiles invraisemblablement larges d’un ciel d’Orient. Ce n’est pas une lumière intense comme celle de la lune, mais déjà une douce lueur qui permet à celui dont l’œil est fait à l’obscurité de voir où il marche et ce qui l’entoure. Ici, à droite des voyageurs qui remontent vers le nord en longeant le fleuve, la faible clarté stellaire éclaire la bordure végétale formée par les roseaux, les saules et les arbres de haute futaie. Comme la lumière est très pâle, cela ressemble à une muraille compacte, continue, sans interruption, sans possibilité de pénétration, à peine rompue là où le lit d’un ruisseau ou d’un torrent, complètement à sec, trace une ligne blanche qui part vers l’orient et disparaît au premier coude du minuscule affluent asséché. A leur gauche, en revanche, les voyageurs distinguent le reflet des eaux tranquilles et sereines, qui descendent vers la Mer Morte en murmurant, soupirant, bruissant. Et entre la ligne brillante des eaux couleur d’indigo, dans la nuit, et la masse noire opaque des herbes, des arbustes et des arbres, la bande claire de la grève, tantôt plus large, tantôt plus étroite, est parfois interrompue par une minuscule mare, reste d’une ancienne crue, avec encore un peu d’eau stagnante que le sol peu à peu absorbe ; et il y reste des touffes d’herbes encore vertes alors qu’ailleurs elles se sont desséchées sur la grève, certainement brûlante aux heures de soleil.

Ces nappes d’eau ou les touffes de joncs secs qui peuvent blesser les pieds nus dans les sandales, obligent les apôtres à se séparer de temps à autre pour ensuite se réunir en groupe autour du Maître. Lui avance de son pas allongé, toujours majestueux, le plus souvent en silence, le regard levé vers les étoiles plutôt que penché vers le sol.

Les apôtres, eux, sont loin de se taire. Ils discutent, récapitulent les événements de la journée, en tirent des conclusions ou bien en prévoient les développements futurs. Quelque rare parole de Jésus, souvent dite pour répondre à une question directe ou pour corriger quelque raisonnement défectueux ou peu charitable, ponctue le bavardage des douze.

Et la marche se poursuit dans la nuit, en rythmant le silence nocturne d’un élément nouveau sur ces rives désertes : les voix humaines et le bruit des pas. Les rossignols se taisent dans les feuillages, étonnés d’entendre des sons discordants et désagréables se mêler, en le troublant, à l’accompagnement habituel de leurs solos de virtuoses : le chuchotis des eaux et de la brise.

422.2

Mais une question directe, qui ne concerne pas le passé mais l’avenir, vient rompre, avec la violence d’une révolte — sans parler du ton plus aigu des voix agitées par le dédain ou la colère —, la paix non seulement de la nuit, mais celle, plus intime, des cœurs. Philippe demande s’ils arriveront chez eux, et dans combien de jours. Un secret besoin de repos, un désir inexprimé mais sous-entendu d’affections familiales se cache dans cette simple question de l’apôtre déjà âgé, qui est époux et père en plus d’être apôtre, et qui a des intérêts dont il doit s’occuper…

Jésus se rend compte de tout cela et il se retourne pour regarder Philippe. Il s’arrête pour l’attendre, car Philippe est un peu en arrière avec Matthieu et Nathanaël. Arrivé près de lui, il lui passe un bras autour des épaules en lui disant :

« Bientôt, mon ami. Mais je demande à ta bonté un autre petit sacrifice, si toutefois tu ne désires pas te séparer auparavant de moi…

– Moi, me séparer ? Jamais !

– Dans ce cas… je vais t’éloigner encore quelque temps de Bethsaïde. Je veux me rendre à Césarée Maritime, en passant par la Samarie. Au retour, nous irons à Nazareth, et ceux qui n’ont pas de famille en Galilée resteront avec moi. Après un certain temps, je vous rejoindrai à Capharnaüm… Et là, je vous évangéliserai pour vous rendre encore plus capables. Mais, si tu crois que ta présence à Bethsaïde est nécessaire… vas-y, Philippe. Nous nous retrouverons là…

– Non, Maître. Il est plus nécessaire de rester avec toi ! Mais, tu sais… Il est doux d’être chez moi… avec mes filles… Je pense qu’à l’avenir je ne les aurai pas beaucoup avec moi… et je voudrais profiter un peu de leur chaste douceur. Mais si je dois choisir entre elles et toi, c’est toi que je choisis… et pour plusieurs raisons…, conclut Philippe en soupirant.

– Et tu fais bien, mon ami, car je te serai enlevé avant tes filles…

– Oh ! Maître ! dit l’apôtre, attristé.

– C’est comme ça, Philippe » termine Jésus en déposant un baiser sur les tempes de l’apôtre.

422.3

Judas, qui a marmonné entre ses dents depuis que Jésus a parlé de Césarée, élève la voix comme si d’avoir vu le baiser donné à Philippe lui avait fait perdre le contrôle de ses actes :

« Que de marches inutiles ! Moi, je ne sais vraiment pas quel besoin il y a d’aller à Césarée ! »

Ses paroles ont une impétuosité débordante de fiel. Il semble vouloir sous-entendre : “ Tu es bien stupide d’y aller. ”

« Ce n’est pas toi, mais le Maître qui doit juger de la nécessité de ce que nous faisons, lui répond Barthélemy.

– Oui, hein ? Comme si lui se rendait bien compte des nécessités naturelles !

– Eh ! Tu es fou, ou quoi ? Tu sais de qui tu parles ? lui demande Pierre en le secouant par le bras.

– Je ne suis pas fou. Je suis le seul qui soit sain d’esprit, et je sais parfaitement ce que je dis.

– Et tu en dis de belles !

– Prie Dieu de ne pas les retenir contre toi !

– La modestie n’est pas ton fort !

– Tu donnes l’impression de redouter qu’on puisse te reconnaître pour ce que tu es, en allant à Césarée » disent ensemble et respectivement Jacques, fils de Zébédée, Simon le Zélote, Thomas, et Jude, fils d’Alphée.

Judas répond à ce dernier :

« Je n’ai rien à craindre, et vous n’avez rien à savoir. Mais je suis las de voir qu’on va d’erreur en erreur et qu’on se ruine : heurts avec les membres du Sanhédrin, disputes avec les pharisiens, il ne manque plus que les romains…

– Comment ? Mais, il n’y a pas deux lunes de cela, tu étais fou de joie, tu étais plein d’assurance, tu étais… tu étais tout, car tu avais pour amie Claudia ! » observe ironiquement Barthélemy qui, tout en étant le plus… intransigeant, est le seul à ne pas se refuser à des contacts avec les romains, mais uniquement pour obéir au Maître.

Judas reste muet un instant, car la logique de la réflexion est évidente et, à moins de paraître incohérent, il ne peut démentir ses propres paroles. Mais il se reprend :

« Ce n’est pas pour les Romains que je dis cela. Je veux dire pour les Romains comme ennemis. Elles — car au fond elles ne sont que quatre dames romaines, cinq ou six au maximum —, elles ont promis de l’aide et seront fidèles à leurs promesses.

422.4

Mais c’est parce que cela augmentera la hargne de ses ennemis ; or le Maître ne le comprend pas, et…

– Leur hargne a déjà atteint son point culminant, Judas. Tu le sais aussi bien que moi, sinon même mieux, dit calmement Jésus en appuyant sur le “ mieux ”.

– Moi ? Moi ? Que veux-tu dire ? Qui sait les choses mieux que toi ?

– Tu viens de dire que toi seul connais les nécessités et la façon de se comporter à leur égard…, rétorque Jésus.

– Pour les choses naturelles, oui. Mais j’affirme que tu connais les choses surnaturelles mieux que tous.

– C’est vrai. Mais, justement, je te faisais remarquer que tu es plus au courant que moi des choses, laides si tu veux, avilissantes si tu veux, naturelles, comme la rancœur de mes ennemis, leurs projets…

– Moi, je ne sais rien ! Je ne sais rien. Je le jure sur mon âme, sur ma mère, sur Yahvé…

– Assez ! Il est dit de ne pas jurer[1], lui intime Jésus, avec une sévérité qui semble durcir jusqu’aux traits de son visage, les raidissant comme ceux d’une statue.

– Eh bien, je ne vais pas jurer ! Mais comme je ne suis pas un esclave, qu’il me soit permis de dire qu’il n’est pas nécessaire, qu’il n’est pas utile, qu’il est même dangereux d’aller à Césarée, de parler avec les romaines…

– Et qui te dit que cela arrivera ? demande Jésus.

– Qui ? Mais tout ! Tu as besoin de t’assurer d’une chose. Tu es sur les traces d’une… » Il s’interrompt, comprenant que la colère le fait trop parler.

422.5

Puis il reprend : « Et moi, je te dis que tu devrais penser aussi à nos intérêts. Tu nous as tout enlevé : maison, gains, affections, tranquillité. Nous sommes des persécutés pour ta cause, et nous le serons aussi par la suite. Car, tu l’annonces sur tous les tons, un beau jour tu t’en iras. Mais nous, nous resterons, nous serons ruinés, nous…

– Toi, tu ne seras pas persécuté lorsque je ne serai plus parmi vous. Moi qui suis la Vérité, je te l’affirme. Et je te rappelle que j’ai pris ce que vous m’avez donné spontanément, d’une manière insistante. Tu ne peux donc pas m’accuser de vous avoir enlevé d’autorité un seul de vos cheveux qui tombent quand vous les peignez. Pourquoi m’accuses-tu ? »

Jésus est déjà moins sévère ; il est maintenant d’une tristesse qui veut ramener à la raison avec douceur. Je crois aussi que la miséricorde qu’il montre, si pleine, si divine, sert à refréner les autres qui n’en feraient sûrement pas preuve envers le coupable.

Judas lui-même s’en rend compte et, dans un de ces brusques revirements de son âme, sollicitée par deux forces contraires, il se jette à terre et se frappe la tête et la poitrine en criant :

« Parce que je suis un démon ! Je suis un démon ! Sauve-moi, Maître, comme tu sauves tant de possédés. Sauve-moi ! Sauve-moi !

– Que ta volonté d’être sauvé ne reste pas lettre morte !

– Elle existe, tu le vois. Je veux être sauvé.

– Par moi. Tu exiges que je fasse tout. Mais je suis Dieu, et je respecte ton libre arbitre. Je te donnerai la force pour arriver à “ vouloir ”. Mais vouloir n’être pas esclave, cela doit venir de toi.

– Je le veux ! Je le veux ! Mais ne va pas à Césarée ! N’y va pas !

422.6

Ecoute-moi, comme tu as écouté[2] Jean quand tu voulais aller à Acor. Nous avons tous les mêmes droits. Nous te servons tous de la même manière. Tu es obligé de nous satisfaire à cause de ce que nous faisons… Traite-moi comme Jean ! Je le veux ! Quelle différence y a-t-il entre lui et moi ? »

Jacques intervient :

« Il y a l’esprit ! Mon frère n’aurait jamais parlé comme tu le fais. Mon frère ne…

– Silence, Jacques. C’est moi qui parle et à tous. Quant à toi, relève-toi et comporte-toi en homme, comme moi je te traite, non comme un esclave qui gémit aux pieds de son maître. Sois un homme, puisque tu tiens tant à être traité comme Jean — or, en vérité, il est plus qu’un homme, parce qu’il est chaste et plein d’amour.

Allons, il est tard et je veux passer le fleuve à l’aube. C’est à cette heure que les pêcheurs rentrent après avoir retiré les nasses, et il est plus facile de trouver une embarcation. La lune en ses derniers jours lève toujours plus haut son fin croissant. Grâce à sa plus grande lumière, nous pouvons avancer plus rapidement.

422.7

Ecoutez : en vérité, je vous dis que personne ne doit se vanter de faire son devoir et exiger des faveurs spéciales pour ce qui est une obligation.

Judas a rappelé que vous m’avez tout donné ; et il m’a dit qu’en retour, j’ai le devoir de vous satisfaire pour ce que vous faites.

Mais rendez-vous un peu compte : il y a parmi vous des pêcheurs, des propriétaires terriens, plus d’un qui possède un atelier, et Simon le Zélote qui avait un serviteur. Eh bien, quand les employés de la barque, ou les journaliers qui vous aidaient à l’oliveraie, à la vigne ou dans les champs, ou encore les apprentis de l’atelier, ou simplement le fidèle domestique qui s’occupait de la maison ou de la table, avaient fini leur travail, vous mettiez-vous par hasard à les servir ?

Et n’en est-il pas ainsi dans toutes les maisons et toutes les affaires ? Quel homme, ayant un serviteur qui laboure ou qui fait paître, ou un ouvrier à l’atelier, lui dit quand il a fini le travail : “ Passe tout de suite à table ” ? Personne. Au contraire, soit qu’il revienne des champs, soit qu’il ait déposé ses outils, tout maître dit : “ Fais-moi à dîner, mets-toi en tenue et, avec des vêtements propres, sers-moi pendant que je mange et que je bois. Ton tour viendra ensuite. ” Et on ne peut pas dire que cela soit de la dureté de cœur. Car l’employé doit servir son maître, et ce dernier n’a aucune obligation envers lui sous prétexte qu’il a obéi aux ordres reçus le matin. En effet, si le maître a le devoir de se montrer humain à l’égard de son serviteur, celui-ci a aussi le devoir de ne pas être paresseux et dilapidateur, mais de coopérer au bien-être de celui qui l’habille et le nourrit. Supporteriez-vous que vos matelots, vos ouvriers agricoles ou autres sous-ordres, vous disent : “ A ton tour de me servir, puisque, moi, j’ai travaillé ” ? Je ne crois pas.

Il en va de même pour vous : quand vous regardez ce que vous avez accompli et ce que vous accomplirez pour moi — et, à l’avenir, ce que vous ferez pour poursuivre mon œuvre et continuer à servir votre Maître —, vous verrez que vous êtes toujours restés en-deçà de ce qu’il était juste de faire pour être au niveau de tout ce que vous avez reçu de Dieu. Vous devrez donc toujours dire : “ Nous sommes des serviteurs inutiles, puisque nous n’avons fait que notre devoir. ” Si vous raisonnez ainsi, vous ne sentirez plus de prétentions ni de mécontentements s’élever en vous, et vous agirez avec justice. »

Jésus se tait. Tous réfléchissent.

422.8

Pierre donne un coup de coude à Jean, qui médite, ses yeux bleu clair fixés sur l’eau, qui passe de la couleur indigo à l’argent azuré sous les rayons de la lune, et il lui dit :

« Demande-lui quand on fait plus que son devoir. Moi, je voudrais y arriver…

– Moi aussi, Simon. Je pensais justement à cela » lui répond Jean avec son beau sourire sur les lèvres. Et il demande à haute voix : « Maître, dis-moi : l’homme, ton serviteur, ne pourra-t-il jamais faire plus que son devoir, pour te montrer, par ce “ plus ”, qu’il t’aime totalement ?

– Mon petit enfant, Dieu t’a tant accordé, que, en toute justice, ton héroïsme serait toujours bien peu de chose. Mais le Seigneur est si bon qu’il ne mesure pas ce que vous lui donnez, selon sa mesure infinie, mais selon la mesure limitée des capacités humaines. Et quand il voit que vous avez donné sans parcimonie, dans une mesure bien pleine, débordante, généreuse, alors il dit : “ Ce serviteur m’a donné plus que son devoir ne le lui imposait. Aussi vais-je lui accorder la surabondance de mes récompenses. ”

– Comme je suis content ! Moi, alors, je te donnerai une mesure débordante pour obtenir cette surabondance ! s’écrie Pierre.

– Oui, tu le feras, vous le ferez. Tout homme aimant la vérité, la lumière, en fera autant. Et il sera avec moi surnaturellement heureux. »

422.1

The river shore is white in the moonless but very clear night, as thousands of large, unusually large stars are shining in the Eastern sky. It is not an intense light like moonlight, but it is already a pleasant phosphorescence, which enables those whose eyes are accustomed to darkness, to see where they walk and what is around them. Here, on the right hand side of the wayfarers, who are going up northwards along the river, the mild starlight shows the vegetable border made by cane-brakes, willows and then by tall trees, and as the light is faint, they look like a compact continuous wall, without any interruption, impossible to penetrate, with a gap where a stream or torrent bed, completely dry, draws a white line that runs eastwards and disappears at the first curve of the tiny tributary now dried up. On the left hand side, instead, the travellers discern the glittering waters that flow down towards the Dead Sea grumbling, sighing, rustling, quiet and serene. And between the shining line of the blue indigo waters, in the night, and the dark opaque mass of grass, bushes and trees, the clear strip of the river shore, in places wider, in others narrower, is now and again interrupted by tiny ponds, remainders of previous floods, with still a little water, which is slowly absorbed by the soil and in which there are still some tufts of green grass, which elsewhere is dried up on the river shore parched in the hours of sunshine.

The apostles are compelled by those tiny ponds or by tangles of dry bulrushes, as dangerous as blades for their feet half-naked in sandals, to part now and again and then join again in a group around the Master, Who is proceeding with vigorous strides, always solemn, silent most of the time, with His eyes raised to the stars rather than bent to the ground. But the apostles are not silent. They are talking to one another, summarising the events of the day, drawing conclusions or foreseeing future developments. A few rare words of Jesus, often spoken in reply to a direct question or to correct a wrong or uncharitable opinion, punctuate the chattering of the Twelve. And the march proceeds in the night, marking the night silence with new elements for those desert banks: human voices and shuffling of feet. Nightingales are silent among the branches, surprised at the discordant harsh sounds mixing with and disturbing the usual murmur of water and whispering of breezes, the customary accompaniments of their virtuosi solos.

422.2

But a direct question, not concerning what has happened but what is to happen, breaks not only the peace of the night, but also the more intimate peace of hearts, with the violence of a rebellion in addition to the sharp tone of voices upset by scorn and anger. Philip asks whether and in how many days they will be home. A latent need of rest, an unexpressed but understood desire for family love is in the simple question of the elderly apostle, who is a husband and father besides being an apostle, and has interests to look after…

Jesus perceives all that and turns around to look at Philip, He stops waiting for him, as Philip is a little behind with Matthew and Nathanael, and when he is near, He embraces him with one arm saying: «Soon, My friend. But I ask you to be kind enough to make another small sacrifice, providing you do not wish to part from Me before…»

«Me? Part from You? Never!»

«Then… I will keep you away for some time from Bethsaida. I want to go to Caesarea on the Sea via Samaria. On our way back we will go to Nazareth and those who have no family in Galilee will remain with Me. Then, after some time, I will join you at Capernaum… And I will evangelize you there to make you even more capable. But if you think that your presence at Bethsaida is necessary… you may go, Philip. We shall meet there…»

«No, Master. It is more necessary for me to stay with You! But You know… Home is sweet… and my daughters… I do not think that I will have them very much with me in future… and I would like to enjoy a little of their modest kindness. But if I have to choose between them and You, I choose You… and for many reasons…» ends Philip with a sigh.

«And you are doing the right thing, My friend. Because I will be taken away from you before your daughters…»

«Oh! Master!…» says grievously the apostle.

«It is so, Philip» concludes Jesus kissing the temple of the apostle.

422.3

Judas Iscariot, who has been grumbling between his teeth since Jesus mentioned Caesarea, raises his voice as if the kiss given to Philip has made him lose control of his actions. And he says: «How many useless things! I don’t really understand why it is necessary to go to Caesarea!» and he says so with angry impetuosity; he seems to imply: «and You Who want to go there are a fool.»

«It is not for you to judge the necessity of what we do, but for the Master» Bartholomew replies to him.

«Really, why not? As if He saw natural necessities clearly!»

«I say! Are you mad or sane? Do you realise of Whom you are speaking?» asks Peter shaking him by the arm.

«I am not mad. I am the only one with sound brains. And I know what I am saying.»

«You are saying lovely things!» «Beg God not to take them into account!», «Modesty is not your strong point!», «One might think that you are afraid that by going to Caesarea you might be found out for what you are» say James of Zebedee, Simon Zealot, Thomas and Judas of Alphaeus respectively.

The Iscariot addresses the last one: «I have nothing to be afraid of and you have nothing to find out. But I am tired of seeing that we pass from one error to another, ruining ourselves. Conflicts with the members of the Sanhedrin, arguments with Pharisees. The Romans are the last straw…»

«What? Less than two months ago you were overjoyed, you were full of confidence, you were, you were… you were everything because Claudia was your friend!» remarks Bartholomew ironically who, being the most… uncompromising, is the one who does not rebel against contacts with the Romans only out of obedience to the Master.

Judas is speechless for a moment because the logic of the ironical remark is obvious, and unless he is prepared to appear illogical, he cannot contradict what he said previously. But he soon collects himself and says: «It is not because of the Romans that I am saying that. I mean because of the Romans as enemies. They… after all they are only four Roman ladies, four, five, six at the most, they promised to help us and they will.

422.4

But it is because that will increase the hatred of His enemies, and He does not realize that and…»

«Their hatred is intense, Judas. And you know that as well as I do, even better than I do » says Jesus calmly stressing the word «better».

«Me? Me? What do You mean? Who knows things better than You do?»

«Just now you said that you are aware of necessities and how to make use of them…» retorts Jesus.

«With regards to natural things, yes. I say that You know spiritual matters better than anybody.»

«That is true. But I was just saying to you that you know better than I do, unpleasant, disgraceful, natural things, if you wish to call them so, such as the hatred of My enemies, such as their purposes…»

«I know nothing! I do not know anything. I swear to it on my soul, on my mother, on Jehovah…»

«That is enough! It is written that you must not swear[1]» orders Jesus with such severity that even His countenance seems to become petrified in the perfection of a statue.

«Well, I shall not swear. But I must be allowed to say, since I am not a slave, that it is not necessary, that it serves no purpose, on the contrary it is dangerous to go to Caesarea, to speak to the Romans…»

«And who told you that that will happen?» asks Jesus.

«Who? Everything! You need to make sure of something. You are on the track of a…» he stops realizing that wrath is making him say too much.

422.5

He then resumes: «And I tell You that You ought to think also of our interests. You have deprived us of everything: home, earnings, affections, peace. We are persecuted because of You and we shall be persecuted even later. Because You, You say so in every possible way, will go away one fine day. But we are staying. We shall be ruined, but we…»

«You will not be persecuted when I am no longer among you. I, who am the Truth, tell you so. And I tell you that I have taken what you spontaneously and insistently gave Me. So you cannot say that I have taken away from you, with abuse of power, even one of the hairs that fall off when you tidy them. Why are you accusing Me?» Jesus is now less severe, His sad countenance expresses the desire to bring Judas back to reason kindly and I think that his compassion, so full and so divine, acts as a check on the others, who would not be so sympathetic towards the culprit.

Judas also perceives that and with one of the brusque changes of his soul urged by two opposed forces, he throws himself on the ground striking his head and chest and shouting: «Because I am a demon. I am a demon. Save me, Master, as You save so many demoniacs. Save me! Save me!»

«Do not let your desire to be saved be inactive.»

«It exists. You can see that. I want to be saved.»

«By Me. You expect Me to do everything. But I am God and I respect your free will. I will give you the strength so that you may get to say: “I do want”. But to want not to be a slave must come from you.»

«I do want! I do want! But do not go to Caesarea. Don’t go!

422.6

Listen to me as You listened[2] to John, when You wanted to go to Achor. We have all the same rights. We all serve You in the same manner. You are obliged to satisfy us for what we do… Treat me as You treated John! I want it! What difference is there between him and me?»

«The soul is different! My brother would never have spoken as you did. My brother does not…»

«Be silent, James. I will speak. To everybody. And you stand up and behave as a man, as I treat you, not like a slave moaning at the feet of his master. Be a man, since you are so anxious to be treated as John, who, truly, is more than a man because he is chaste and full of Charity. Let us go. It is late. I want to cross the river at dawn. The fishermen will be coming back then after hauling the lobster-pots and it is easy to find a ferry-boat. The moon in her last days raises her thin crescent higher and higher. We will be able to walk faster in her increased light.

422.7

Listen. I solemnly tell you that no one must boast of doing his duty and exact for that, which is an obligation, special favours.

Judas has reminded Me that you have given Me everything. And he told Me that it is My duty to satisfy you for what you do. But just listen. Among you there are some fishermen, some landowners, some own a workshop, and the Zealot had a servant. Now then. When the boat servants, or the men who helped you like servants in the olive grove, in the vineyard, or in the fields, or apprentices in the workshop, or even the faithful servant who looked after the house and meals, finished their work, did you begin to serve them? Is it not so in every house and in every task? Which man, with a servant ploughing or minding sheep, or a workman in a workshop, would say to him when he finishes his work: “Go and have your meal immediately”? No one. But whether he comes back from the fields or he lays down his working tools, every master says: “Get my supper laid, get yourself tidy and with clean clothes wait on me while I eat and drink. You will eat and drink afterwards”. Neither can one say that that is insensibility. Because a servant must serve his master, and the master is not obliged to him, because the servant has done what the master had ordered him to do in the morning. Because, while it is true that the master must be kind to his servant, so it is the duty of the servant not to be lazy or a squanderer, but he must cooperate for the welfare of the master who feeds and clothes him. Would you bear your boat assistants, your peasants, workmen, your house servant to say to you: “Serve me because I have worked”? I do not think so.

So with you, when you consider what you have done and you do for Me – and, in future, considering what you will do to continue My work and to continue to serve your Master – you must always say, because you will see that you have always done much less than was fair to do to be on a par with what you received from God: “We are unprofitable servants because we have done but our duty”. If you reason thus, you will see that you will no longer feel pretensions and bad temper arise in you, and you will act according to justice.»

Jesus is silent. They are all pensive.

422.8

Peter nudges John, who is pondering staring with his blue eyes at the waters, which from indigo have become silver-blue in the moonlight, and says to him: «Ask Him when is it that one does more than one’s duty. I would like to be able to do more than my duty, I…»

«I, too, Simon. I was just thinking of that» replies John with his beautiful smile and in a loud voice he asks: «Master, tell me: will the man who serves You never be able to do more than his duty to tell You that he thus loves You entirely?»

«Child, God has given you so much, that in all fairness, all your heroism would always be too little. But the Lord is so good that He does not measure what you give Him with His infinite measure. He measures it with the limited measure of human capability. And when He sees that you have given without parsimony, with a full measure, overflowing generously, He then says: “This servant of Mine has given Me more than it was his duty. I will therefore give him the superabundance of My rewards”.»

«Oh! How happy I am! I will give You an overflowing measure to have that superabundance!» exclaims Peter.

«Yes, you will give Me it. You will all give Me it. All those who are lovers of the Truth, of the Light, will give Me it. And they will be supernaturally happy with Me.»


Notes

  1. ne pas jurer : c’est le précepte de Lv 19, 12, repris par Jésus (en 172.3).
  2. tu as écouté, en 379.2.

Notes

  1. not swear is the precept of “do not commit perjury” (Leviticus 19,12) reformed by Jesus (in 172.3).
  2. You listened, in 379.2.