The Writings of Maria Valtorta

528. A Nobé, le réconfort maternel d’Elise

528. In Nob, the material comfort of Eliza.

528.1

« Oui, Maître ! Judas est ici depuis plusieurs jours. Il est arrivé un soir de sabbat. Il paraissait fatigué et hors d’haleine. Il disait qu’il t’avait perdu dans les rues de Jérusalem et qu’il avait couru te chercher dans toutes les maisons où tu vas d’ordinaire. Il venait ici chaque soir. Il sera bientôt là. Le matin, il repart, et il dit qu’il va dans les environs pour te prêcher.

– C’est bien, Elise… Et tu l’as cru ?

– Maître, tu sais que je n’aime pas cet homme. Si mes fils devaient être comme lui, j’aurais prié le Seigneur de me les reprendre. Non, je n’ai pas cru à ses paroles, mais par amour pour toi, j’ai gardé mon jugement pour moi… Et je me suis montrée maternelle avec lui. De cette façon, au moins, j’ai obtenu qu’il revienne ici chaque soir.

– Tu as bien fait. »

Jésus la regarde très fixement et lui demande à l’improviste :

« Où est Anastasica ? »

Le visage d’Elise prend une couleur violacée, un teint de personne âgée, mais elle répond franchement :

« A Bet-Çur.

– Tu as bien fait, là aussi. Et, je t’en prie, aie pitié de cet homme.

– C’est justement parce que j’ai pitié de lui que j’ai voulu étouffer l’incendie avant qu’il n’éclate scandaleusement ou, du moins, qu’il n’effraie la fille.

– Que Dieu te bénisse, femme juste…

528.2

– Tu souffres beaucoup, Maître ?

– Je souffre, c’est vrai. A une mère, je peux le dire.

– A une mère, tu peux le dire… Si tu n’étais pas Jésus, le Seigneur, je voudrais recevoir ta tête lasse sur mon épaule et serrer sur mon cœur ton cœur accablé. Mais tu es tellement saint, qu’aucune autre femme que ta Mère ne peut te toucher…

– Elise, bonne amie de ma Mère, et bonne mère, ton Seigneur bientôt sera touché par des mains beaucoup moins saintes que les tiennes, et embrassé… oh !… Et ensuite, d’autres mains… Elise, s’il t’était permis de toucher le Saint des Saints, dans quel état d’esprit le ferais-tu ? T’en abstiendrais-tu si la voix de Dieu, à travers la fumée de l’encens, te demandait de l’amour pour obtenir enfin une caresse d’amour alors que tant s’approchent de lui sans amour ?

– Mon Seigneur ! Mais si Dieu me le demandait, j’irais à genoux couvrir de baisers le lieu saint, et je voudrais que Dieu puisse être satisfait, consolé par mon amour !

– Dans ce cas, Elise, toi qui es une bonne amie de ma Mère et la fidèle et bonne disciple de ton Sauveur affligé, permets-moi de poser ma tête sur ton cœur, car mon cœur est attristé au point d’éprouver des peines mortelles. »

Et Jésus, restant assis là où il est, près d’Elise qui est tout près, debout, pose réellement son front contre la poitrine de la vieille disciple. Des larmes silencieuses coulent le long du vêtement sombre de la femme, qui ne peut se retenir de poser la main sur la tête inclinée sur son cœur, et quand elle sent tomber des larmes sur ses pieds, nus dans ses sandales, elle se penche pour effleurer d’un baiser les cheveux de Jésus. Elle pleure silencieusement à son tour, en levant les yeux vers le ciel, en une prière muette. On dirait une ancienne Mater Dolorosa. Elle ne tente rien d’autre, ni paroles ni gestes, mais elle est tellement “ mère ” dans son attitude, qu’elle ne pourrait l’être davantage.

Jésus lève la tête et la dévisage. Il a un pâle sourire et dit :

« Que Dieu te bénisse pour ta pitié. Ah ! une mère est bien nécessaire quand la douleur accable les forces de l’homme ! »

Il se met debout, regarde encore la femme disciple et reprend :

« Que tous les détails de cet instant restent entre nous. C’est pour cela que je suis venu seul en avant.

– Oui, Maître. Mais tu ne peux plus rester seul. Fais venir ta Mère.

– D’ici deux lunes, elle sera avec moi… »

528.3

Et il s’apprête à poursuivre quand, en bas, dans la cuisine, résonne la forte voix, toujours un peu effrontée et ironique de Judas :

« Encore à ta gravure, vieil homme ? Il fait froid ! Et ici, il n’y a pas de feu. J’ai faim, et rien n’est prêt. Elise dort-elle donc ? Elle a voulu agir toute seule. Mais les vieux sont lents, et leur mémoire est faible. Hé ! Tu ne dis rien ? Tu es complètement sourd, ce soir ?

– Non. Mais je te laisse parler, car c’est toi qui es un apôtre, et il ne me convient pas de te faire des reproches, répond le vieillard.

– Des reproches ? Pourquoi ?

– Cherche en toi-même, et tu trouveras.

– Ma conscience ne me dit rien…

– C’est signe qu’elle est déformée ou que tu l’as estropiée.

– Ha ! Ha ! Ha ! »

Judas doit sortir de la cuisine, car on entend claquer une porte puis des bruits de pas dans l’escalier.

« Je descends faire la cuisine, Maître.

– Va, Elise. »

Elise descend de la chambre du haut et tombe sur Judas, qui s’apprête à entrer sur la terrasse.

« J’ai faim et froid, moi.

– C’est tout ? Alors tu as bien peu encore, homme.

– Et que devrais-je avoir de plus ?

– Oh ! Tant de choses !… »

La voix d’Elise s’éloigne.

« Ce sont tous de vieux dingues. Ouf !… »

528.4

Il pousse la porte et se trouve en face de Jésus. La stupeur le fait reculer d’un pas, mais il se reprend vite :

« Maître ! Paix à toi !

– Paix à toi, Judas. »

Jésus reçoit le baiser de l’apôtre, mais ne le lui rend pas.

« Maître… Tu as… Tu ne me donnes pas un baiser ? »

Jésus le regarde et se tait.

« C’est vrai. J’ai fait erreur, et ne pas m’embrasser, c’est le moins que tu puisses me faire. Pourtant ne me juge pas trop sévèrement. Aujourd’hui, certains m’ont entrepris qui… ne t’aimaient pas et j’ai discuté avec eux au point d’en perdre la voix. Puis… J’ai dit : “ Qui sait où il sera allé ? ” et je suis revenu t’attendre ici. N’est-ce pas ta maison, désormais ?

– Tant qu’on me le permet.

– Tu ne voudras pas me garder rancune pour cela ?

– Non. Je te fais seulement prendre en considération l’exemple que tu as donné aux autres.

– Je les entends déjà ! Mais j’ai de quoi me justifier auprès d’eux. Avec toi, je ne le fais même pas, car je sais que tu m’as déjà pardonné.

– Je t’ai déjà pardonné, c’est vrai. »

On s’attendrait à ce que, devant tant de bonté, Judas fasse preuve d’humilité, d’amour. Mais à l’opposé, il s’écrie avec dépit :

« Mais il n’y a donc pas moyen de te voir en colère ? Quel homme es-tu ? »

Jésus se tait et Judas le regarde, lui debout, Jésus assis, la tête penchée. Un sourire mauvais sur les lèvres, il hoche la tête. Pour lui, l’incident est clos. Il se met à parler de choses et d’autres comme s’il était le plus en règle de tous.

Il fait nuit. Les bruits de la rue cessent.

« Descendons » ordonne Jésus.

Ils descendent donc dans la cuisine où luit le feu et où brûle une lampe à trois becs.

Jésus, fatigué, s’assied près du foyer et paraît sommeiller dans la tiédeur de la pièce…

528.5

On frappe. Le vieillard ouvre. Ce sont les apôtres. Pierre, entré le premier, voit Judas et s’en prend à lui :

« On peut savoir où tu es allé ?

– Ici, tout simplement ici. J’aurais été stupide de courir çà et là après des êtres disparus. Je suis venu ici, où j’étais certain que vous alliez revenir.

– Voilà une belle façon d’agir !

– Le Maître ne m’a fait aucun reproche. D’ailleurs, sache que je n’ai pas perdu mon temps. J’ai évangélisé tous les jours, j’ai même accompli des miracles, et tout cela est bon.

– Et qui t’y avait autorisé ? demande sévèrement Barthélemy.

– Personne. Ni toi, ni personne. Mais il suffit d’être des… de la… Bref : les gens s’étonnent, murmurent et rient de nous, apôtres qui ne faisons rien. Alors moi, qui le sais, j’ai agi pour tous. Et j’ai fait davantage encore. Je suis allé voir Elchias et je lui ai prouvé que l’on n’agit pas mal quand on est saint. Ils étaient nombreux. Je les ai convaincus. Vous verrez qu’ils ne nous dérangeront plus. Et maintenant, je suis content. »

Les apôtres se regardent. Ils observent Jésus. Son visage est impénétrable. Il semble voilé par une grande lassitude physique. Cela seulement se voit.

« Tu pouvais pourtant faire cela avec la permission du Maître, riposte Jacques, fils d’Alphée. Nous n’avons pas cessé de nous faire du souci à cause de toi.

– Très bien ! Maintenant, vous voilà délivrés de toute inquiétude. Lui, il ne m’aurait jamais donné la permission. Il nous… protège trop. C’est au point que les gens murmurent qu’il est jaloux de nous, qu’il craint que nous en fassions plus que lui, et même qu’il nous punit. Les gens ont une langue mordante. La vérité, au contraire, c’est que nous lui sommes plus chers que la pupille de ses yeux. N’est-ce pas, Maître ? Et il craint que nous courions des dangers ou que nous fassions… piètre figure. Et nous aussi, intérieurement, nous pensions être en quelque sorte punis et qu’il était jaloux…

– Mais pas du tout ! Moi, je n’aurais jamais imaginé une chose pareille ! » interrompt Thomas.

Les autres font chorus, sauf Jude qui plante ses yeux francs et très beaux dans les yeux — très beaux aussi, mais fuyants — de Judas :

« D’ailleurs, comment as-tu pu faire des miracles, toi ? Au nom de qui ?

– Comment ? Au nom de qui ? Mais tu ne te rappelles pas que c’est lui qui nous a donné ce pouvoir ? Nous l’a-t-il peut-être enlevé ? Pas que je sache. Et pour cette raison…

– Pour cette raison, moi je ne me permettrais jamais de faire quoi que ce soit sans son consentement et son ordre.

– Eh bien, moi, j’ai voulu le faire. Je craignais de ne plus savoir m’y prendre. Je l’ai fait. Je suis heureux ! »

Et il coupe court en sortant dans le jardin obscur.

Les apôtres se retournent pour regarder. Ils sont abasourdis devant tant d’audace. Mais personne n’a le cœur de dire quelque chose qui puisse affliger davantage leur Maître dont le visage trahit la souffrance.

Ils se débarrassent des sacs, que Jean, André et Thomas portent en haut. Et Barthélemy, en se penchant pour ramasser une branche sèche tombée d’un fagot, murmure à Pierre :

« Dieu veuille que ce ne soit pas le démon qui l’ait aidé ! »

Pierre fait un geste des mains comme pour dire : “ Miséricorde ! ”, mais ne souffle mot. Il va trouver Jésus, lui pose une main sur l’épaule en lui demandant :

« Tu es tellement fatigué ?

– Oui, Simon.

528.6

– C’est prêt, Maître. Passe à table. Ou plutôt… Non, reste ici, près du feu. Je vais t’apporter du lait et du pain » dit Elise.

En effet, après avoir mis sur un plateau une grande écuelle de lait fumant et des tartines couvertes de miel, elle les apporte à Jésus et attend qu’il prie debout pour offrir la nourriture. Puis la bonne vieille femme s’accroupit par terre, toute maternelle, prise tout entière par le désir de le consoler, et elle lui sourit en l’encourageant à manger. A Jésus, qui lui reproche doucement d’avoir étendu du miel sur le pain, elle répond :

« Je te donnerais mon sang pour te fortifier, mon Maître ! C’est le pauvre miel de mon jardin de Bet-Çur et il ne peut fortifier que ton corps. Mais mon cœur… »

Les autres mangent autour de la table, avec le robuste appétit des grands marcheurs. Et Judas, tranquille, presque effronté, mange avec eux. Il n’y a que lui pour parler…

Il discourt encore lorsque Jésus enjoint :

« Allez, que chacun aille dans la maison qui l’héberge. Que la paix soit avec vous. »

Restent avec lui Judas, Barthélemy, Pierre et André. Et Jésus décrète un repos immédiat. Il éprouve une lassitude mortelle, au point de ne plus pouvoir supporter la fatigue de parler et d’entendre parler et je pense, personnellement, de faire l’effort de se dominer en ce qui concerne Judas.

528.1

«Yes, Master! Judas of Kerioth has been here for many days. He came one Sabbath evening. He looked tired and exhausted. He said that he had lost You in the streets in Jerusalem and that he had run to the various houses where You usually go, looking for You. He comes here every evening. He will be here shortly. He goes away in the morning, and he says that he goes to the nearby villages to preach You.»

«All right, Eliza… And did you believe him?»

«Master, You know that I am not fond of that man. If my children had to be like him, I would have asked the Most High to take them from this world. No, I did not believe his words. But for Your sake I kept my opinion to myself… And I have been motherly to him. At least I succeeded in getting him to come back here every evening.»

“You did well.» Jesus looks at her intensely and then suddenly asks: «Where is Anastasica?»

Eliza blushes and her elderly face becomes purple red, but she replies frankly: «At Bethzur.»

«You did the right thing there again. And please pity the man.»

«It is because I feel sorry for him that I wanted to put out the fire before it spread causing scandal, or, at the least, frightening the woman.»

«May God bless you, o just woman…»

528.2

«Are You suffering acutely, Master?»

«Yes, I am. It is true. I can tell a mother.»

“You can tell a mother… If You were not Jesus, the Lord, I would like You to rest Your tired head on my shoulder and I would press Your distressed heart on mine. But You are so holy that no woman, but Your Mother, can touch You…»

«Eliza, good friend of My Mother and a good mother, your Lord will soon be touched by much less holy hands than yours, and kised… oh!… And afterwards, other hands… Eliza, if you were allowed to touch the Holy of Holies, with what spirit would you do so? Would you perhaps abstain, if the voice of God, in a cloud of in­cense, should ask you for love, to have a loving caress at long last, after being approached by so many people who do not love Him?»

«My Lord! If God should ask me, I would go on my knees to cover the holy place with kisses and would to God He would be satisfied and comforted by my love!»

«Then, Eliza, the good friend of My Mother, the good faithful disciple of your sorrowful Saviour, let Me rest My head on your heart because My heart is tormented to the extent of suffering mortal pains.»

And Jesus, sitting where He is, close to Eliza, who is standing, really rests His forehead on the breast of the old disciple, and silent tears stream down the dark dress of the woman, who cannot refrain from laying a hand on the head reclined on her heart, and then, feeling the tears fall on her bare sandal-shod feet, she bends to kiss Jesus’ head, lightly and weeps silently, raising her eyes towards the sky in silent prayer. She looks like an elderly Mother of Sorrows. She does not speak or move. But she is so «motherly» in her attitude that she could not possibly be more so.

Jesus raises His head and looks at her. He smiles lightly and says: «May God bless you for your pity. Oh! a mother is really necessary when grief overwhelms the strength of man!»

He stands up. He looks once again at his disciple and says: «Every moment of this hour is to be kept to ourselves. I came ahead by Myself just for that.»

«Yes, Master. But You cannot remain all alone. Let Your Mother come.»

«She will be with Me in two months’ time…»

528.3

and He is about to say something else, when the strong voice, always somewhat in­solent and ironical, of Judas of Kerioth, resounds downstairs in the kitchen: «Still busy carving, old man? It’s cold! And there is no fire in here. I am hungry. And there is no food ready. Is Eliza sleep­ing perhaps? She wanted to do everything by herself. But old peo­ple are slow and their memory is weak. I say! Are you not speaking? Are you completely deaf this evening?»

«No, but I am letting you speak, because you are an apostle and it ill-becomes me to reproach you» replies the old man.

«Reproach me? Why?»

«Examine yourself and you will find why.»

«My conscience has no voice…»

«Which means that it is deformed or that you have maimed it.»

«Ha! Ha! Ha!» and Judas must have gone out of the kitchen because first a door bangs and then footsteps are heard on the staircase.

«I am going downstairs to prepare, Master.»

«Go, Eliza.»

Eliza leaves the room upstairs and she immediately meets Judas who is about to set foot on the terrace.

«I am cold and hungry.»

«Nothing else? Well, man, you still have very little.»

«What else should I have?»

«Eh! so many things!…» Eliza’s voice fades away.

«They are all old fools. Ugh!»

528.4

He pushes the door and finds himself facing Jesus. He is so sur­prised that he takes a step backwards. He collects himself and says: «Master!! Peace to You!»

«Peace to you! Judas.» Jesus receives the kiss of the apostle, but He does not return it.

«Master. You have… Are You not kissing me?» Jesus looks at him and remains silent.

«It’s true. I made a mistake. And to refuse to kiss me is the least You can do. But do not judge me too severely. On that day I was caught in the middle of some people who… do not love You and I argued with them until I talked myself hoarse. Later… I said: “I wonder where He has gone?!” and I came back here waiting for You. Isn’t this house yours by now?»

«While they allow Me.»

«You will not bear me a grudge for that!»

«No. I only want you to consider the example you have set for the others.»

«Eh! I can already hear their words. But I have reasons that will justify me with them. I am not even doing it with You because I know that You have already forgiven me.»

«I have already forgiven you. That is true.»

One would expect Judas to make a gesture of humbleness, of love for so much kindness. He instead makes one which is the very op­posite: a gesture of anger, while he exclaims: «But is there no way to see You lose your temper?! What kind of man are You?»

Jesus is silent. And Judas, standing, looks at Jesus, Who is sit­ting with his head lowered, and he shakes his head with an evil smile on his lips. And the incident is over, as far as he is concerned. He begins to speak about this and that matter, as if he were the best-behaved apostle.

Night is falling. The noise of the road dies out. «Let us go downstairs» says Jesus.

They go into the kitchen where a bright fire is burning and a three-flame lamp is lit. Jesus, tired, sits near the fireside and seems to be dozing in the warmth…

528.5

There is a knock at the door. The old man opens it. It is the apostles. Peter, the first to enter, sees Judas and assails him vigorously asking: «Can you tell us where you have been?»

«Here. Just here. It would have been foolish to run here and there after people who had disappeared. I came here as I was sure that you would be coming back here.»

«A fine way to behave!»

«The Master has not reproached me for it. In any case you had better know that I have not wasted my time. I evangelized every day and I also worked miracles, and that is a good thing.»

«And who authorised you to do that?» asks Bartholomew severely.

«Nobody. Neither you nor anybody else. It is enough to be of the… In brief: people are surprised, and grumble and laugh at us, the apostles who do nothing. And since I know, I acted on behalf of everybody. And I did more than that. I went to see Helkai and I proved to him that one does not misbehave when one is holy. There were many there and I convinced them. You will see that they will no longer disturb us. And now I am happy.»

The apostles look at one another. They look at Jesus. His face is impenetrable. It seems to be veiled with so much fatigue, which is the only visible thing.

«But you might have done that with the Master’s permission» remarks James of Alphaeus.

«We have been worried about you all the time.»

«Oh! well! Now you need not be anxious any longer. He would never have given me permission. He… protects us too much. So much so that people murmur that He is jealous of us, that He is afraid we might do more than He does, and also that we are punished by Him. People have caustic tongues. The truth, instead, is that He loves us more than the apple of His eye. Isn’t that right, Master? He is afraid we may be exposed to danger or we may cut… a bad figure. And we, too, in our minds, thought that we were punished and that He was jealous…»

«Definitely not! I never thought that!» says Thomas interrupting him. And the others echo him, with the exception of Thaddeus, who fixes his sincere beautiful eyes on the beautiful but elusive eyes of Judas and says: «And how were you able to work miracles? In whose name?»

«What? In whose name? But do you not remember that He gave us that power? Has He deprived us of it? Not that I know. So…»

«So I would never take the liberty of doing anything without His consent and order.»

«Well, I wanted to do it. I was afraid I might no longer be able. But I was and I am happy!» and he breaks off the discussion going out into the dark kitchen garden.

Once again the apostles look at one another in dismay. They are shocked by so much audacity. But no one has the heart to say anything that may grieve their Master even more, as He seems to be suffering so much.

They get rid of their bags which John, Andrew and Thomas take upstairs. And Bartholomew, bending to pick up a dry branch fallen out of a faggot, whispers to Peter: «God forbid he was helped by a demon!»

Peter makes a gesture with his hands as if wished to say: «Goodness gracious!» but he does not say one word. He goes to Jesus and laying a hand on His shoulders, he asks Him: «Are You so tired?»

«Yes, Simon, I am.»

528.6

«It’s ready, Master. Come to the table. Or… No. Remain there, near the fireside. I will bring You some milk and bread» says Eliza. In fact she puts a big bowl of steaming milk and some bread spread with honey on a tray and takes it to Jesus, and she waits while He, standing, offers the food. Then she crouches on the floor, like a good old mother, anxiously wishing to console Him, and she smiles at Him urging Him to eat. And when Jesus lovingly reproaches her for spreading the bread with honey, she replies: «I would give You my blood to invigorate You, my Master! This is the poor honey of my kitchen garden at Bethzur and it can but strengthen Your body. But my heart…»

The others are eating around the table, with the good appetite of people who have walked a long way. And Judas, peaceful, almost arrogant, eats with them and is the only one to speak…

He is still speaking when Jesus orders: «Let each of you go to the house giving you hospitality. Go. Peace be with you.»

Judas, Bartholomew, Peter and Andrew remain with Him. And Jesus orders them to go and rest at once. He is deadly tired, so tired that He can no longer endure to speak or hear people speak, and I think He is unable to bear the effort of controlling Himself with regards to Judas of Kerioth.