The Writings of Maria Valtorta

538. Jésus prie dans la grotte de la Nativité, tandis que

538. Jesus praying in the grotto of the Nativity,

538.1

Jésus se tient derrière le Temple, près de la Porte des Troupeaux, hors de la ville. Autour de lui se trouvent les apôtres et les disciples bergers, à l’exception de Lévi. Tous sont effrayés, et même furieux. Je ne vois aucun des autres disciples qui étaient auparavant au Temple avec lui.

Ils discutent. Je pourrais même dire que le débat a lieu entre eux, Jésus, et Judas en particulier. Ils reprochent à ce dernier les colères des juifs et le font avec une ironie quelque peu mordante. Judas les laisse dire, mais il ne cesse de répéter :

« J’avais parlé avec des pharisiens, des scribes et des prêtres, or aucun n’était présent. »

Ils reprochent à Jésus de ne pas avoir arrêté la discussion après l’avoir fait tomber une première fois. Jésus répond :

« Je devais compléter ma manifestation. »

Qui plus est, ils sont en désaccord sur l’endroit où aller, maintenant que le sabbat approche et que ce sont des jours de fête. Simon-Pierre propose la maison de Joseph d’Arimathie, puisque, à Béthanie, ils ne feraient que causer du dérangement ; d’ailleurs, Jésus a déclaré qu’il ne fallait plus s’y rendre.

Thomas répond :

« Joseph n’est pas chez lui, et Nicodème non plus. Ils sont partis à cause de la fête. Je les ai salués hier quand nous attendions Judas, et ils me l’ont dit.

– Chez Nikê, alors, suggère Matthieu.

– Elle est à Jéricho pour la fête, assure Philippe.

– Chez Joseph de Séphoris, propose Jacques, fils d’Alphée.

– Hum ! Joseph… dit Pierre. Nous ne serions pas un cadeau pour lui ! Il a eu des ennuis et… mais oui, je le dis ! Il vénère le Maître, mais il veut être tranquille. Il ressemble à une barque prise entre deux courants opposés… et pour être toujours à flot… il tient compte de tout le lest, même du petit Martial… au point que cela lui semble trop beau de l’avoir passé à Joseph d’Arimathie.

– Ah ! c’est pour cela qu’il était avec lui hier ? s’exclame André.

– Bien sûr ! Il vaut donc mieux le laisser en paix dans un petit port bien tranquille… Hé ! on n’est pas très courageux ! Et le Sanhédrin fait peur à tout le monde ! ajoute Pierre.

– Parle pour toi, je t’en prie. Moi, je n’ai peur de personne, lance Judas.

– Moi non plus. Pour défendre le Maître, je défierais toutes les légions. Mais nous, c’est nous… Les autres… Hé ! Ils ont leurs affaires, leurs maisons, leurs épouses, leurs filles… Ils y pensent.

– Nous aussi, nous en avons, fait remarquer Barthélemy.

– Mais nous sommes les apôtres et…

– Et vous êtes pareils aux autres. Ne critiquez personne, car l’épreuve n’est pas encore venue, dit Jésus.

– Elle n’est pas venue ? Et que veux-tu de plus que celles que nous avons déjà traversées ? Et pourtant, tu as vu aujourd’hui comme je t’ai défendu ! Tous, nous t’avons défendu. Mais moi, plus que les autres ! J’ai joué des coudes avec certaines poussées qui

auraient fait chavirer une barque !…

538.2

J’ai une idée ! Allons à Nobé. Le vieil homme sera heureux !

– Oui, oui, allons à Nobé. »

Tous sont d’accord. Mais Jésus intervient :

« Jean est absent. Vous feriez la route pour rien. Vous pouvez vous rendre à Nobé, mais pas chez Jean.

– Vous pouvez ? Et toi, tu ne peux pas ?

– Je ne le veux pas, Pierre. J’ai déjà un lieu qui m’attend en ces soirs d’Encénies. Mais, en mon absence, vous pouvez être tranquilles n’importe où. C’est pour cela que je vous dis : allez où vous voulez. Je vous bénis. Je vous rappelle que vous devez rester unis de corps et d’esprit, soumis à Pierre votre chef, mais pas comme à un maître, plutôt comme à un frère aîné. Dès que Lévi sera de retour avec mon sac, nous nous séparerons.

– Cela non, mon Seigneur ! Te laisser partir seul, jamais de la vie ! s’exclame Pierre.

– Toujours, si c’est moi qui le veux, Simon, fils de Jonas. Mais n’aie pas peur. Je ne resterai pas en ville. Personne, à moins d’être ange ou démon, ne découvrira mon abri.

– C’est bien. Car il y a trop de démons qui te haïssent. Mais moi, je t’assure que tu ne partiras pas seul !

– Il y a aussi des anges, Simon. Et moi, j’irai.

– Mais où ? Dans quelle maison, puisque tu as refusé les meilleures, soit volontairement, soit en raison des circonstances ? Tu n’iras certainement pas, en cette saison, dans quelque grotte des montagnes ?

– Et si c’était le cas ? Ce serait toujours moins glacial que les cœurs des hommes qui ne m’aiment pas, dit Jésus comme s’il se parlait à lui-même, en baissant la tête pour cacher une larme qui brille dans ses yeux.

538.3

– Voici Lévi. Il arrive en courant, remarque André, qui regarde du bord de la route.

– Alors donnons-nous la paix et séparons-nous. Si vous voulez vous rendre à Nobé, vous en avez juste le temps avant le coucher du soleil. »

Lévi est tout essoufflé :

« Ils te recherchent partout, Maître… Ceux qui t’aiment m’en ont informé… Ils sont entrés dans de nombreuses maisons, surtout chez de pauvres gens…

– T’ont-ils vu ? demande Jacques, fils de Zébédée.

– Bien sûr. Ils m’ont même arrêté. Mais moi, qui le savais déjà, j’ai répondu : “ Je vais à Gabaon ” et je suis sorti par la Porte de Damas, puis j’ai couru derrière les murs… Je n’ai pas menti, Seigneur, car eux et moi, nous allons à Gabaon après le sabbat. Cette nuit, nous resterons dans les campagnes de la cité de David… Ce sont des jours de souvenir pour nous… »

Tout en parlant, il contemple Jésus avec un sourire angélique sur son visage viril et barbu, un sourire qui réveille dans ses traits l’enfant de cette nuit lointaine[1].

« C’est bien. Allez-y vous aussi, et vous de même. J’en ferai autant. Mais chacun par son chemin. Vous me précéderez dans le village de Salomon, où j’arriverai dans quelques jours. Et avant de vous quitter, je vous répète ce que je vous ai dit avant de vous envoyer deux par deux passer de ville en ville : “ Allez, prêchez, annoncez que le Royaume de Dieu est tout proche. Guérissez les malades, purifiez les lépreux, ressuscitez les morts de l’esprit et de la chair en leur imposant en mon nom la résurrection spirituelle, la recherche de moi — qui suis la vie —, ou la résurrection de la mort. Et ne tirez pas orgueil de ce que vous opérez. Evitez les disputes entre vous et avec ceux qui ne nous aiment pas. N’exigez rien en échange de ce que vous faites. Allez plutôt parmi les brebis perdues de la maison d’Israël que parmi les païens et les Samaritains, et cela non par aversion, mais parce que vous n’êtes pas encore à même de les convertir. Donnez ce que vous avez, sans vous préoccuper du lendemain. Agissez en toute chose comme vous m’avez vu faire, et dans un esprit semblable au mien. Voilà, je vous donne le pouvoir d’accomplir les mêmes actions que moi ; et je veux que vous fassiez cela pour que Dieu soit glorifié. ” »

Il souffle sur eux, les embrasse un par un et les congédie.

538.4

Tous s’en vont à contrecœur, en se retournant plusieurs fois. Lui les salue de la main jusqu’à ce qu’il les voie tous partis, puis descend dans le lit du Cédron, parmi les buissons, et s’assied sur un rocher de la rive, près de l’eau qui gargouille, boit de cette eau claire et certainement glaciale, se lave le visage, les mains, les pieds, puis reprend ses vêtements et revient s’asseoir. Il réfléchit… et ne s’aperçoit pas de ce qui se passe autour de lui. En effet l’apôtre Jean, qui s’était éloigné avec ses compagnons, revient seul sur ses pas et l’imite en se dissimulant dans un épais buisson…

Jésus reste là quelque temps, puis se lève, met son sac en bandoulière et, en suivant le Cédron, dans les fourrés, arrive au puits d’En-Rogel. Là, il tourne vers le sud-ouest pour prendre la route de Bethléem. A une centaine de mètres derrière, Jean le suit, tout emmitouflé dans son manteau, pour n’être pas reconnu.

Ils marchent sans arrêt le long des chemins dégarnis par l’hiver. Jésus, de son long pas, dévore la route. Jean a du mal à avancer au même rythme, parce qu’il doit être prudent pour n’être pas découvert. A deux reprises, Jésus s’arrête et se retourne. La première fois, en passant près de la petite colline où Judas était allé parler avec Caïphe et ses compagnons, la seconde fois près d’un puits où il s’assied et grignote un peu de pain en buvant ensuite à l’amphore d’un homme. Puis il reprend sa route, tandis que le soleil descend et que le crépuscule arrive. Le tombeau de Rachel est en vue quand la dernière rougeur du couchant s’éteint en une traînée de violet. Le ciel, vers l’occident, ressemble à une tonnelle de glycine en fleurs alors qu’à l’orient on voit déjà le pur cobalt d’un froid firmament hivernal d’orient ; les premières lueurs des étoiles apparaissent aux plus lointaines limites du ciel.

Jésus se hâte pour arriver avant la tombée de la nuit. Mais, sur une hauteur d’où l’œil embrasse toute la petite ville de Bethléem, il s’arrête, regarde, soupire… puis il descend rapidement, mais sans entrer dans la ville, en contourne les dernières habitations et va droit aux ruines de la maison — ou tour — de David, à l’endroit de sa naissance. Après avoir franchi le ruisseau qui coule près de la grotte, il pose le pied sur le petit espace couvert de feuilles sèches et jette un coup d’œil à l’intérieur. Il n’y a personne. Il entre…

Prudemment, Jean reste en deçà, pour n’être ni vu ni entendu. Il fouille, inspecte. Mais c’est plutôt à tâtons qu’il trouve une autre étable en ruines. Il y entre à son tour et fait de la lumière dans un coin. On voit un peu de paille, une litière sale, quelques branches, du foin dans la mangeoire.

538.5

Jean est content et se parle tout seul :

« Au moins… j’entendrai… et… Soit nous mourons ensemble, soit je le sauve. »

Puis il soupire :

« Dire qu’il est né comme cela ! Et il vient ici pleurer sa douleur… Et… Ah ! Dieu éternel ! Sauve ton Christ ! Mon cœur tremble, ô Dieu très-haut, car il s’isole toujours avant de grandes œuvres… Et quelle grande œuvre peut-il faire, sinon se manifester comme le Roi Messie ? Ah ! toutes ses paroles sont en moi… Je ne suis qu’un enfant borné, et j’ai du mal à comprendre. Tous, nous avons du mal à comprendre, ô Père éternel ! Mais moi, j’ai peur. J’ai peur parce qu’il parle de mort — d’une mort cruelle —, de trahison, et d’autres horreurs… J’ai peur ! J’ai peur, mon Dieu ! Fortifie mon cœur, Seigneur éternel. Fortifie mon cœur de pauvre enfant, comme certainement tu fortifies celui de ton Fils pour les événements à venir… Je le sens ! Il est venu ici pour cela, pour t’entendre mieux que jamais, et se fortifier dans ton amour. Moi, je l’imite, ô Père très saint ! Aime-moi et fais que je t’aime, pour avoir la force de tout souffrir sans lâcheté et pour réconforter ton Fils. »

Jean prie longuement, debout, les bras levés, à la lumière tremblante des deux branches qu’il a allumées sur le foyer primitif. Il prie jusqu’à ce que le feu soit près de s’éteindre. Il monte alors dans la large mangeoire et s’accroupit dans le foin. Ce n’est plus qu’une ombre dans l’ombre, enveloppé comme il l’est dans son manteau foncé, à l’intérieur de cette caverne entourée de ténèbres. A un moment, un premier rayon de la lune pénètre par l’ouverture tournée vers l’orient, pour dire combien profonde est la nuit. Mais Jean, fatigué, s’est endormi. Sa respiration et le léger murmure du ruisseau sont les seuls bruits en cette nuit de décembre.

En haut, le ciel, sur lequel flottent des nuages légers comme des voiles que la lune heurte, semble parcouru tout entier par des troupes d’anges… Pourtant, il n’y a pas de chants angéliques. Par intervalles, dans les ruines, se répondent les “ hou ! hou ! hou ! ” plaintifs des oiseaux de nuit, et parfois ils se terminent par cet espèce de rire de sorcière particulier aux chouettes. De loin, arrive une plainte qui ressemble à un ululement : ce sera quelque chien enfermé dans un bercail et qui jappe à la lune, ou bien un loup auquel le vent apporte l’odeur d’une proie et qui se bat les flancs avec sa queue et hurle de désir sans oser approcher des étables bien gardées… Je ne sais.

538.6

Puis voici des voix et des bruits de pas, ainsi qu’une lumière rougeâtre qui tremble dans les ruines. L’un derrière l’autre, apparaissent les bergers disciples Matthias, Jean, Lévi, Joseph, Daniel, Benjamin, Elie et Siméon. Matthias tient en hauteur une branche allumée pour éclairer la route. Mais celui qui court en avant, c’est Lévi, et il est le premier à passer la tête à l’intérieur de la grotte de Jésus. Il se retourne aussitôt et fait signe de s’arrêter et de se taire, puis il regarde encore… Enfin, il fait un geste pour dire aux autres de venir, et il s’écarte, en gardant un doigt sur les lèvres pour recommander de garder le silence, laissant la place aux autres qui, l’un après l’autre, regardent et se retirent, aussi émus que Lévi.

« Que faisons-nous ? chuchote Elie.

– Nous restons ici à le contempler, murmure Joseph.

– Non. Il n’est permis à personne de violer les secrets spirituels des âmes. Eloignons-nous, conseille Matthias.

– Tu as raison. Entrons dans l’étable à côté, nous serons encore sur place et près de lui, propose Lévi.

– Allons-y » approuvent-ils.

Mais avant de partir, ils regardent encore une fois, à la dérobée, à l’intérieur de la grotte de la Nativité, puis ils s’en vont, tout émus, en cherchant à ne pas faire de bruit.

Mais quand ils arrivent sur le seuil de l’étable voisine, ils entendent le ronflement de Jean.

« Il y a quelqu’un, dit Matthias en s’arrêtant.

– Qu’est-ce que cela fait ? Entrons, nous aussi. Puisqu’un mendiant s’est réfugié ici — c’est sûrement un mendiant —, nous pouvons nous y réfugier » réplique Benjamin.

Ils entrent, en tenant haut la branche allumée. Jean tout pelotonné sur son lit improvisé et incommode, le visage caché par ses cheveux et son manteau, continue de dormir. Ils s’approchent doucement dans l’intention de s’asseoir sur la paille étendue près de la mangeoire, et Daniel en profite pour jeter un coup d’œil plus attentif sur le dormeur.

Il le reconnaît et dit :

« C’est Jean, l’apôtre du Seigneur. Ils se sont réfugiés ici pour prier… et le sommeil aura vaincu l’apôtre… Retirons-nous. Il pourrait se sentir humilié de se savoir découvert endormi alors qu’il devrait être en prière… »

538.7

Ils ressortent, puis entrent à regret dans le refuge suivant. Siméon lui-même s’en plaint :

« Pourquoi ne pas rester sur le seuil de sa grotte, et le regarder de temps en temps ? Nous avons passé tant d’années sous la rosée et à la lumière des étoiles pour veiller les agneaux, et nous ne le ferions pas pour l’Agneau de Dieu ? Nous en avons bien le droit, nous qui l’avons adoré pendant son premier sommeil !

– Tu as raison comme homme et comme adorateur de l’Homme-Dieu. Mais qu’as-tu vu, en regardant à l’intérieur ? L’Homme, peut-être ? Non. Sans le vouloir, nous avons passé le seuil infranchissable après avoir écarté le triple voile étendu pour protéger le mystère, et nous avons vu ce que le grand-prêtre lui-même ne voit pas en entrant dans le Saint des Saints. Nous avons vu l’amour ineffable de Dieu pour Dieu. Il ne nous est pas permis de l’épier encore. La puissance de Dieu pourrait punir nos pupilles audacieuses qui ont vu l’extase du Fils de Dieu. Soyons contents de ce que nous avons eu ! Nous voulions venir ici pour passer la nuit en prière avant de partir pour notre mission. Prier et nous rappeler la nuit lointaine… Nous avons au contraire contemplé l’amour de Dieu ! Oh ! l’Eternel nous a vraiment beaucoup aimés, en nous donnant la joie de contempler le Tout-Petit, celle de souffrir pour lui, et celle de l’annoncer au monde comme disciples de l’Enfant-Dieu et de l’Homme-Dieu ! Aujourd’hui, il nous a même accordé aussi ce mystère… Bénissons le Très-Haut et ne désirons pas davantage ! » déclare Matthias.

J’ai l’impression que c’est le berger qui, de par sa sagesse et sa justice, a le plus d’autorité.

« Tu as raison. Dieu nous a beaucoup aimés. Nous ne devons pas exiger davantage.

538.8

Samuel, Joseph, et Jonathan[2] n’ont eu que la joie d’adorer le Tout-Petit et de souffrir pour lui. Jonas est mort sans pouvoir le suivre. Isaac lui-même n’est pas ici pour voir ce que nous avons vu. Et s’il y a quelqu’un qui le mérite, c’est bien Isaac, qui s’est consumé pour l’annoncer, dit Jean.

– C’est vrai ! C’est vrai ! Comme il aurait été heureux de voir cela ! Mais nous le lui raconterons, s’exclame Daniel.

– Oui. Gardons tout dans notre cœur pour le lui rapporter, suggère Elie.

– Ainsi qu’aux autres disciples et fidèles ! s’écrie Benjamin.

– Non, pas aux autres. Pas par égoïsme, mais par prudence et par respect pour le mystère. Si Dieu le veut, l’heure viendra où nous pourrons le raconter. Pour l’instant, nous devons savoir nous taire » reprend Matthias, qui ajoute, en s’adressant à Siméon : « Tu as été comme moi un disciple de Jean. Rappelle-toi comme il nous instruisait en matière de prudence sur les choses saintes : “ Si un jour Dieu, qui vous a déjà accordé de tels bienfaits, vous comble encore de dons extraordinaires, que cela ne fasse pas de vous des bavards ivres. Rappelez-vous que Dieu se manifeste aux âmes, qui sont enfermées dans la chair, parce que ce sont des joyaux célestes qui ne doivent pas être exposés aux souillures du monde. Que vos membres et vos sens soient saints, pour refréner toute poussée charnelle, et qu’il en soit autant de vos yeux, de vos oreilles, de votre langue comme de vos mains. Que votre pensée soit sainte, pour brider l’orgueil de faire savoir ce que vous possédez. Car les sens, les organes et l’intelligence doivent servir et non pas régner. Servir l’esprit, ne pas régner sur l’esprit. Ils doivent protéger l’esprit, non pas le troubler. Par conséquent mettez le sceau de votre prudence sur les mystères de Dieu en vous — à moins d’un ordre explicite —, de la même manière que l’âme est scellée par son emprisonnement temporaire dans le corps. La chair et l’intelligence seraient inutiles, mauvaises et dangereuses, si notre effort pour résister aux excitations qu’elles nous causent ne servaient pas à augmenter notre mérite, et si elles ne devenaient pas un temple pour l’autel sur lequel plane la gloire de Dieu : notre âme. ” Vous vous le rappelez ? Toi, Jean, et toi, Siméon ? J’espère que oui, car si vous ne vous rappeliez pas les paroles de notre premier maître, vraiment il serait mort pour vous. Un maître vit tant que sa doctrine demeure chez ses disciples. Et même s’il est remplacé par un maître plus grand, et pour les disciples de Jésus, par le Maître des maîtres, il n’est jamais permis d’oublier les paroles du premier, qui nous ont préparés à comprendre et à aimer avec sagesse l’Agneau de Dieu.

– C’est vrai. Tu parles avec sagesse. Nous t’obéirons.

538.9

– Mais comme il est pénible, fatigant, de résister alors que nous sommes ainsi tout près de lui, et de ne pas le regarder encore une fois ! Sera-t-il encore comme il était ? demande Siméon.

– Qui sait ! Comme son visage resplendissait !

– Plus que la lune par une nuit sereine !

– II y avait sur sa bouche un sourire divin…

– Et de ses yeux coulait une larme divine…

– Il ne disait rien, mais tout était prière en lui.

– Qu’aura-t-il donc vu ?

– L’Eternel, son Père. En doutes-tu ? Il n’y a que cette contemplation pour donner cet aspect. Et, que dis-je ? Plutôt que de le voir, il était avec lui, en lui ! Le Verbe avec la Pensée ! Et ils s’aimaient !… Ah !… s’exclame Lévi, qui paraît en extase lui aussi.

– C’est bien pour cela que je disais qu’il ne nous est pas permis de rester ici. Pensez qu’il n’a même pas voulu que son apôtre soit présent…

– C’est vrai ! Maître saint ! Plus qu’une terre desséchée a soif d’eau, il a besoin d’être inondé par l’amour de Dieu ! Si grande est la haine autour de lui !…

– Mais aussi : si grand est l’amour. Moi, je voudrais… Oui, je le fais ! Le Très-Haut est ici présent. Je m’offre et je dis : “ Seigneur, Dieu très-haut, Dieu et Père de ton peuple, qui acceptes et consacres les cœurs et les autels, et immoles les victimes qui te sont agréables, que ta volonté descende comme un feu et me consume comme victime avec le Christ, comme le Christ et par le Christ, ton Fils et ton Messie, mon Dieu et Maître. C’est à toi que je me recommande. Exauce ma prière. ” »

Et Matthias, qui a prié debout, les bras levés, revient s’asseoir sur le tas de branchages qui leur sert de siège.

538.10

La lune cesse d’éclairer la caverne, car elle tourne vers l’occident. Si son éclat se répand encore sur la campagne, ce n’est plus le cas à l’intérieur, de sorte que visages et objets se fondent en une seule ombre. Les paroles se font plus rares, et les voix plus basses, jusqu’au moment où la somnolence triomphe de la bonne volonté, et où il ne reste que des phrases détachées, parfois sans réponse… Le froid, qui se fait piquant vers l’aube, est un stimulant contre le sommeil, et ils se relèvent, allument des branches, réchauffent leurs membres engourdis…

« Comment va-t-il faire, lui qui ne pense sûrement pas au feu ? demande Lévi, qui claque presque des dents.

– Et aura-t-il au moins de quoi manger ? » s’interroge Elie, qui ajoute : « Maintenant, nous n’avons plus que notre amour et quelques pauvres vivres… or c’est aujourd’hui le sabbat…

– Tu sais ? Déposons toute notre nourriture sur le seuil de la grotte, puis partons. Nous pourrons toujours trouver un pain avant le soir chez Rachel ou chez Elichia. Nous serons ainsi la providence de la Providence, du Fils de celui qui a pourvu à tout pour nous, propose Joseph.

– Oui, oui ! Faisons une belle flambée pour y voir clair et bien nous réchauffer, puis portons tout là-bas, et nous nous éloignerons à l’aube, avant que lui ou l’apôtre sorte et nous voie. »

A la lueur du feu, ils ouvrent leurs sacs et en sortent du pain, des fromages secs, quelques pommes. Puis ils prennent une charge de bois et sortent sans bruit, pendant que Matthias les éclaire avec une branche tirée du feu. Ils mettent tout devant l’entrée de la grotte, le bois par terre et par dessus le pain et les autres aliments. Puis ils s’en vont, repassent le ruisseau, l’un derrière l’autre, et s’éloignent à la première clarté silencieuse de l’aube, qu’un chant de coq déchire tout à coup.

538.1

Jesus is behind the Temple, near the Gate of the Sheep, outside the town. Around Him there are the apostles and the shepherd disciples, with the exception of Levi, and they are dismayed and very angry. I do not see any of the other disciples who were previously at the Temple with Him.

They are discussing among themselves. I should say that they are discussing among themselves and with Jesus, and in particular with Judas of Kerioth. They are reproaching the latter for the fury of the Judaeans, and they do so with rather biting irony. Judas lets them speak repeating: «I spoke to Pharisees, scribes and priests, and not one of them was among the crowd.» They reproach Jesus for not breaking off the discussion after making it subside the first time. And Jesus replies: «I had to complete My manifestation.»

And they are also at variance on where they should go, as the Sabbath is close at hand and the oncoming days are feast days. Simon Peter suggests Joseph of Arimathea, Bethany being out of the question as they do not want to disturb the people there, par­ticularly because Jesus has stated that they must not go to Bethany any more.

Thomas replies: «Neither Joseph nor Nicodemus is there. They have gone away, for the feast. I greeted them yesterday when we were waiting for Judas and they told me.»

«Let us go to Nike, then» suggests Matthew.

«She is at Jericho for the feast» replies Philip.

«To Joseph of Sephoris» says James of Alphaeus.

«H’m! Joseph… We would not be giving him a present! He has had trouble and… Well, I may as well tell you! He venerates the Master, but he wants to be at peace. He seems to be a boat caught between two opposed currents… and to keep afloat… he takes into account all the ballast, including little Martial… so much so that he could not believe that Joseph of Arimathea would take him» says Peter.

«Ah! is that why he was with him yesterday?!» exclaims Andrew.

«Of course! So it is better to let him calm down in a little safe har­bour… Eh! we are not very brave! Everybody is frightened of the Sanhedrin!» says Peter.

«Please speak for yourself. I am not afraid of anybody» says the Iscariot.

«Neither am I. I would defy all the legions to defend the Master. But we are in a different position… The others… Eh! They have their business, their homes, wives, daughters… They bear that in mind.»

«Well, we have them, too» remarks Bartholomew.

«But we are apostles, and…»

«And you are like the others. Do not criticise anybody, because the trial has not yet come» says Jesus.

«It has not come? And what would You expect more than what we have suffered? And yet You saw how I defended You today! We have all defended You, and I more than anybody else! I elbowed our way through the crowd pushing with such strength that it was enough to launch a boat!…

538.2

An idea! Let’s go to Nob. The old man will be happy!»

«Yes. To Nob» they all say approving.

«John is not there. You would be walking all the road for nothing. You can go to Nob, but not to John’s.»

«We can! And can You not?»

«I do not want to go, Simon of Jonas. I already have somewhere to go these evenings of the Feast of the Dedication. But once I have gone away, you can remain peacefully anywhere. So I say to you: go wherever you wish. I bless you. I remind you to be united physically and spiritually, subject to Peter, who is your head, not as a master, but as an elder brother. As soon as Levi comes back with My bag, we shall part.»

«No, my Lord! Never let it be said that I let you go alone!» ex­claims Peter.

«Let it always be said, if I want it, Simon of Jonas. But be not afraid. I shall not be in town. No one, but an angel or a demon, will find out my refuge.»

«And that is good. Because too many demons hate You. I am tell­ing You that You will not go by Yourself!»

«There are also angels, Simon. And I will go.»

«But where? To which house, if You refused the best ones by Your own will or because of circumstances?! You are not going to stay in a cave on the mountains in this season?»

«And if I were? It would be less icy than the hearts of men who do not love Me» Jesus says almost to Himself, lowering His head to conceal tears shining in His eyes.

538.3

«Here is Levi. He is coming in haste» says Andrew who is look­ing from the roadside.

«Then let us exchange greetings of peace and part. If you want to go to Nob you will be just in time before sunset.»

Levi arrives panting: «They are looking for You everywhere, Master… Those who love You told me… They have been to many houses, particularly to those of poor people…»

«Have they seen you?» asks James of Zebedee.

«Certainly. They even stopped me. But as I was already aware, I said: “I am going to Gibeon” and I came out by the Damascus Gate and I ran behind the walls… I did not lie, Lord, because I and these people are going to Gibeon after the Sabbath. We shall spend the night in the country of the town of David… These are days of memories for us…» and he looks at Jesus with an angelical smile on his virile bearded face, a smile that revives in his features the boy of the remote night[1].

«All right. You may go. And you, too. I am going as well. Each his own way. You will precede Me in Solomon’s village[2], where I shall be in a few days’ time. And before leaving you, I will repeat to you the words which I spoke[3] before sending you in twos around the towns: “Go, preach, announce that the Kingdom of Heaven is very near at hand. Cure sick people, cleanse lepers, raise the dead of the spirit and of the body, ordering the resurrection of the spirit in My Name, the pursuit of Me Who am life, or the resurrection from death. And do not pride yourselves on what you do. Avoid disputes with one another and with those who do not love us. Do not exact anything for what you do. Prefer to go among the lost sheep of Israel than among Gentiles and Samaritans, not out of disgust, but because you are not yet able to convert them. Give what you have without worrying about the morrow. Do what you have seen Me do, and with the same spirit as Mine. Now, I give you the power to do what I do and what I want you to do, so that God may be glorified”.» He breathes on them, He kisses them one by one and dismisses them.

538.4

They all depart reluctantly and turn around several times. He waves His hand to them, until they have all gone, and then He goes down to the river-bed of the Kidron, among bushes, and sits on a rock near the babbling water. He drinks of the water, which is clear and certainly ice-cold. He washes His face, hands and feet. He puts His clothes on and sits down again. He is pensive… And He does not notice what is happening around Him, that John, the apostle, who was already far away with his companions, has come back all alone and is imitating Him hiding in a thick bush…

Jesus remains there for some time, then He gets up, He puts His bag across His back, and following the Kidron, among bushes, he arrives at the well of En-Rogel, He then turns south-west until He takes the Bethlehem road. And John, about a hundred steps behind Him, follows Him, all wrapped in his mantle not to be recognised.

And He goes on and on, along the roads stripped by winter. Jesus, striding, devours the road. John follows Him with difficul­ty, also because he has to be careful not to be seen. Twice Jesus stops and turns round. The first time when passing near the little hill where Judas went to speak to Caiaphas, the second time near a well, where He sits down and nibbles at a piece of bread and then drinks from the amphora of a man. He then resumes walking while the sun descends… and it is twilight. He arrives at Rachel’s tomb when the last red sunbeams at sunset fade into violet. The sky to the west looks like a pergola of wistaria in bloom, whereas to the east it is already the pure cobalt-blue of a cold eastern winter sky and the first stars are already appearing on the farthest end of the firmament.

Jesus quickens His pace in order to arrive before it is dark. But when He is on a high spot from which He can see all the town of Bethlehem, He stops, looks and sighs… He then goes down quick­ly. He does not enter the town. He goes around the last houses. He goes straight to the ruins of the house or tower of David, where He was born. He crosses the stream flowing near the grotto, He goes on to the little open space covered with dry leaves… He scans the ruins. There is no one. He goes in… John stops a little farther on, he is cautious not to be heard or seen. He searches, he looks. He finds another dilapidated stable groping rather than by sight. He goes in as well and strikes a light in a corner. In it there is some straw, some dirty litter, a few dry branches and some hay in the manger.

538.5

John is content. He talks to himself: «At least… I shall hear… and… We either die together or I will save Him.» He then sighs and says: «And He was born here! And He comes here to weep tears of grief… And… Ah! Eternal God! Save Your Christ! My heart is trembling, o Most High God, because He always wants to be alone before great deeds… And what great deed can He accomplish, but manifest Himself as the King Messiah? Oh! all His words are here within me… I am a silly boy and I understand very little. We all understand very little, o Eternal Father! But I am afraid. I really am afraid! Because He speaks of death. Of a painful death, of betrayal and of horrible things… I am afraid, my God! Fortify my heart, o Eternal Lord. Fortify my heart of a poor boy, as You cer­tainly fortify the heart of Your Son for future events… Oh! I can feel it! That is why He came here. To be close to You more than ever and fortify Himself in Your love. I want to imitate Him, o Most Holy Father! Love me and let me love You to have the strength to suffer everything without cowardice, to console Your Son.»

John prays for a long time, standing with his arms raised, in the trembling light of a fire he has lit in the rustic fireplace. He prays until he sees the fire about to go out. He then climbs into the large manger and crouches in the hay. He is a shadow in the shadow, wrapped as he is in a dark mantle and as the cave is enveloped in darkness, until the first moonlight penetrates from the east through an opening in the roof, announcing that it is the dead of night. But John, who is tired, falls asleep. His breathing and the light babbling of the stream are the only noises to be heard in the December night.

High above, groups of angels seem to be flying all over the sky, where clouds as light as veils are illuminated by the moonlight… But there is no singing of angels. At intervals, night birds call one another plaintively, and at times they end up with the witch­-laughter typical of owls, and from afar, a lamentation like a howl is heard. Perhaps a dog closed in a fold and yelping at the moon or a wolf scenting prey in the wind, striking its sides with its tail, and howling with eagerness without daring to approach the well watched pens? I do not know.

538.6

Then voices and steps are heard and a reddish quivering light appears among the ruins. And then, one after the other, the shepherd disciples come: Matthias, John, Levi, Joseph, Daniel, Benjamin, Elias, Simeon. Matthias is holding a lighted branch to see the way. But the one who runs ahead is Levi and he is the first to look into Jesus’ grotto. And he soon turns around and beckons to the others to stop and be silent and he looks again… and then, with his right arm stretched backwards, he beckons to the others to come and he moves aside to make room for them, holding his finger on his lip to tell them to be silent, as one after the other they look in and then withdraw as deeply moved as Levi.

«What shall we do?» asks Elias in a whisper.

«Let us stay here and contemplate Him» says Joseph.

«No, it is not right to violate the spiritual secrets of souls. Let us withdraw over there» says Matthias.

«You are right. Let us go into the next stable. We shall still be here and close to Him» says Levi.

«Let us go» they say. But before going away they look hastily once again into the grotto of the Nativity and then withdraw, deeply affected, trying not to make any noise.

But when they are at the entrance of the adjoining stable, they hear John snore. «There is someone here» says Matthias stopping.

«What does it matter? Let us go in as well. As a beggar, for it must be a beggar, took shelter in here, we can take shelter as well» replies Benjamin.

They go in holding up the branch ablaze. John, all curled up in his improvised uncomfortable bed, his face half veiled by his hair and mantle, continues to sleep. They approach him slowly with the intention of sitting on the straw spread near the manger. In doing so Daniel looks more carefully at the man asleep and recognises him. He says: «It’s the apostle of the Lord, John of Zebedee. They have taken shelter here to pray… and sleep has overcome the apos­tle… Let us withdraw. He might feel mortified knowing that he has been found asleep instead of praying…»

538.7

They go out again and reluctantly enter the other grotto beyond this one. Simeon complains about it saying: «Why not stay at the entrance of His grotto, and see Him now and again? For years we have got wet with heavy due under an open sky to watch over our lambs! And can we not do the same for the Lamb of God? We are entitled to do it, because we worshipped Him in His first sleep!»

«You are right as a man and as a worshipper of the Man-God. But what did you see, when you looked in there? A man, perhaps? No. Without knowing it, we have crossed the impassable threshold after removing the treble veil laid to protect the mystery and we have seen what not even the High Priest sees, when he enters the Holy of Holies. We have seen the ineffable love of God for God. It is not right to spy on it again. The power of God might punish our bold eyes that have seen the ecstasy of the Son of God. Oh! let us be happy with what we have had! We had come here to spend the night in prayer before going away on our mission. We came to pray and to remember the night of long ago… We have instead con­templated the love of God! Oh! The Eternal Father has really loved us very much, by giving us the joy of contemplating the Child and suffering for Him, and the joy of announcing Him to the world as disciples of the Child God and of the Man-God! He has now granted us this mystery as well… Let us bless the Most High and do not let us wish for anything else!» says Matthias, who I think is the most authoritative in wisdom and justice among the shepherds.

«You are right. God has loved us very much. We must not pre­tend more.

538.8

Samuel, Joseph and Matthias had but the joy of wor­shipping the Child and suffering for Him. Jonas died without be­ing able to follow Him. Isaac is not here either to see what we have seen. And if there is one who deserves it, it is Isaac, who is wearing himself out to announce Him» says John.

«That is true! Very true! How happy Isaac would have been to see all this! But we shall tell him» says Daniel.

«Yes. Let us remember everything in our hearts to tell him» says Elias.

«And the other disciples and believers!» exclaims Benjamin.

«No. Not the others. Not out of selfishness, but out of prudence and respect for the mystery. If God wants, the hour will come when we are able to speak. For the time being we must be quiet» says Matthias again, and addressing Simeon he goes on: «You and I were disciples of John. Remember how he taught us prudence concerning holy things: “If God, who has already blessed you, will grant you extraordinary gifts one day, do not let that make intoxicated chatterboxes of you. Remember that God reveals Himself to the spirits, which are enclosed in the flesh, because they are celestial gems not to be exposed to the filth of the world. Be holy in your bodies and in your senses in order to be able to control every carnal instinct, in your eyes and your ears, in your tongues and in your hands. And be holy in your thoughts checking the pride of let­ting other people know what you have. Because your senses, organs and intellects must serve and not reign. They must serve the spirit, not rule over the spirit. They must protect, not upset the spirit. So put the seal of your prudence on the mysteries of God in you, unless He gives you an explicit order otherwise, as the spirit as the seal of temporary imprisonment in the body. Our bodies and intellects would be completely useless, harmful and dangerous, if they did not serve to give us merit through the afflic­tions we compel them to suffer in reply to the wicked incentives by which they urge us, and if they did not serve as temple for the altar over which hovers the glory of God: our spirits”. Do you remember, John, and you, Simeon? I hope you do, because if you do not remember the words of our first master, he would be really dead as far as you are concerned. A master lives as long as his doc­trine lives in his disciples. And even if he is replaced by a greater master – and in the case of Jesus’ disciples, by the Master of masters – it is never right to forget the words of the previous one, who prepared us to understand and love the Lamb of God with wisdom.»

«That is true. You speak wisely and we will obey you.»

538.9

«But how painful and fatiguing it is to resist looking at Him again, when we are so close to Him! Will He still be as He was?» asks Simeon.

«Who knows?! How His face shone!»

«More than the moon in a clear night!»

«His lips had a divine smile…»

«And His eyes shed divine tears…»

«He did not utter one word. But everything was prayer in Him.»

«What will He have seen?»

«His Eternal Father. Do you doubt it? Only that sight can give such an aspect. Nay, what am I saying? Rather than see Him, He was with Him, in Him! The Word with the Thought! And they loved each other!… Ah!…» says Levi, who seems to be in an ecstasy as well.

«That is exactly why I said that it was not right for us to stay there. Consider that He did not even want His apostle with Him…»

«Of course. That’s true! Holy Master! He needs to be overflown with the love of God, more than dry land needs water! There is so much hatred around Him!…»

«But also so much love. I would like… Yes, I will do it! The Most High is present here. I offer myself and I say: “Most High God, God and Father of Your people, Who accept and consecrate hearts and altars and sacrifice the victims pleasing to You, let Your will descend like fire and consume me as a victim with Christ, like Christ, and for Christ, Your Son and Your Messiah, my God and Master. I implore You. Hear my prayer”.” And Matthias, who had prayed standing up with raised arms, sits down again on the bun­dle of sticks, where they were sitting.

538.10

The moon stops illuminating the cave because it moves westwards. It still shines brightly on the country, but no longer in here, and faces and things disappear in the darkness. Words also become rarer and voices lower, until sleepiness overcomes their goodwill, and words are intermittent, and at times without reply… The cold, which is biting at dawn, is a stimulant against sleep, and they get up, they light some twigs and warm their limbs numb with cold…

«What will He do, as He certainly will not think of a fire?» says Levi whose teeth are almost chattering with cold.

«Will He have at least some food?» asks Elias and he adds: «Now we have but our love and some poor food… and today is a Sabbath…»

«Do you know what? Let us put all our food at the entrance to the grotto and then we shall go away. We can always find some bread before evening, either at Rachel’s or at Elishah’s. And we shall be the providence of the Providence, of the Son of Him Who provides for us all» suggests Joseph.

«Yes. Let us light a good fire so that we can see and warm ourselves properly, then we shall take everything there, and go away before He or the apostle may come out at dawn and see us.»

They open their sacks near the blazing fire and take out bread, cheese and some apples. They then load themselves with firewood and go out cautiously while Matthias shows the way with a branch taken from the fire. They put everything at the entrance to the grotto, the faggots on the ground, the bread and the other foodstuffs on top of them. They then withdraw, they cross the river, one after the other, and they go away in the silent first faint light of dawn, broken by the sudden crowing of a cock.


Notes

  1. l’enfant de cette nuit lointaine, en 30.2/3.6 ; dans le village de Salomon, c’est-à-dire de l’autre côté du Jourdain, comme dans le passage de Jn 10, 40-42, qui comble un vide du récit valtortien ; ce que je vous ai dit, en 265.
  2. Jonathan et Isaac sont les noms des bergers absents. Samuel, Joseph (père de Joseph, qui est présent) et Jonas sont les noms des bergers décédés.

Notes

  1. the boy of the remote night, in 30.2/3.6.
  2. in Solomon’s village, that is beyond the Jordan, as in the piece by John 10,40-42.
  3. the words which I spoke, in 265.