Los Escritos de Maria Valtorta

281. Au Temple pour la fête des Tentes.

281. En el Templo durante la fiesta de los Tabernáculos.

281.1

Jésus se dirige vers le Temple. Il est précédé par les disciples en petits groupes, et suivi par les femmes en groupe : sa Mère, Marie femme de Cléophas, Marie Salomé, Suzanne, Jeanne femme de Kouza, Elise de Béth-çur, Annalia de Jérusalem, Marthe et Marcelle. Marie de Magdala n’est pas là. Autour de Jésus, les douze apôtres et Marziam.

Jérusalem est dans la pompe de ses jours de solennité. Il y a du monde de toutes les régions et sur toutes les routes. Cantiques, discours, murmures de prières, imprécations des âniers, quelques pleurs de bébés et, au-dessus de tout cela, un ciel clair qui se montre entre les maisons et un soleil qui vient gaiement raviver les couleurs des vêtements et embraser les teintes mourantes des tonnelles et des arbres que l’on aperçoit ici et là au-delà des murs des jardins clos ou des terrasses.

Parfois, Jésus croise des personnes de sa connaissance et la salutation est plus ou moins respectueuse selon l’humeur de celui qu’il croise. C’est ainsi que celle de Gamaliel est profonde, mais condescendante. Ce dernier regarde fixement Etienne, qui lui sourit du groupe des disciples. Après s’être incliné devant Jésus, Gamaliel appelle Etienne à part et lui dit quelques mots, après quoi Etienne revient dans son groupe. La salutation du vieux chef de la synagogue Cléophas d’Emmaüs, qui se dirige avec ses concitoyens vers le Temple, est empreinte de vénération. La réponse des pharisiens de Capharnaüm à la salutation de Jésus est dure comme une malédiction.

281.2

Quant aux paysans de Yokhanan, conduits par l’intendant, ils se prosternent dans la poussière de la route en baisant les pieds de Jésus. La foule s’arrête pour observer avec étonnement ce groupe d’hommes qui, à un carrefour, se précipitent en criant aux pieds d’un homme jeune qui n’est ni un pharisien ni un scribe renommé, ni un satrape ni un courtisan puissant. Quelqu’un demande de qui il s’agit. Et un chuchotement se répand :

« C’est le Rabbi de Nazareth, celui dont on dit qu’il est le Messie. »

Prosélytes et païens l’entourent alors avec curiosité, poussant le groupe contre le mur, créant un encombrement dans la toute petite place, jusqu’à ce qu’un groupe d’âniers les disperse en maudissant l’obstruction. Mais aussitôt la foule se rassemble de nouveau, séparant les femmes des hommes, exigeante, brutale dans ses manifestations qui sont encore de la foi. Tout le monde veut toucher les vêtements de Jésus, lui dire un mot, l’interroger. Et c’est un effort inutile parce que leur hâte même, leur anxiété, leur agitation pour passer aux premiers rangs en se repoussant mutuellement fait que personne n’y parvient, et même les questions et les réponses se fondent en une rumeur inintelligible.

Le seul qui s’arrache à la scène, c’est le grand-père de Marziam, qui a répondu par un cri au cri de son petit-fils et, aussitôt après avoir vénéré le Maître, a serré l’enfant sur son cœur ; se tenant ainsi, appuyé sur les talons, les genoux à terre, il l’a assis sur son sein, l’admire et le caresse avec des larmes et des baisers joyeux, le questionne et l’écoute. Le vieillard est déjà au paradis, tant il est heureux.

Les soldats romains accourent, croyant qu’il y a quelque rixe et se frayent un passage. Mais quand ils voient Jésus, ils ont un sourire et se retirent tranquillement, se bornant à conseiller à l’assistance de laisser libre l’important carrefour. Jésus obéit aussitôt, profitant de l’espace libre qu’ont fait les romains qui le précèdent de quelques pas comme pour lui ouvrir le chemin, en réalité pour revenir à leur poste de garde ; la garnison romaine est en effet bien renforcée, comme si Pilate savait qu’il y a du mécontentement dans la foule et craignait quelque soulèvement en ces jours où Jérusalem est remplie de juifs venus de toutes parts. Et il est beau de le voir marcher ainsi, précédé du détachement romain comme un roi dont on dégage la route pendant qu’il se rend à ses propriétés.

En marchant, il a dit à l’enfant et au vieillard : « Restez ensemble et suivez-moi » et à l’intendant : « Je te prie de me laisser tes hommes. Ils seront mes hôtes jusqu’au soir. »

L’intendant répond avec déférence : « Qu’il soit fait en tout comme tu le désires » et, après une profonde salutation, il repart seul.

281.3

Il est désormais près du Temple – et le fourmillement de la foule, réellement comme des fourmis près de la fourmilière, est encore plus dense – lorsqu’un paysan de Yokhanan s’écrie : « Voilà le maître ! » et, imité par les autres, il tombe à genoux pour le saluer.

Jésus reste debout au milieu du groupe des paysans prostrés parce qu’ils étaient serrés autour de lui, et il tourne les yeux vers le point indiqué. Il rencontre le regard d’un pharisien richement vêtu, qui n’est pas nouveau pour moi, mais je ne sais pas où je l’ai vu.

Le pharisien Yokhanan est avec d’autres de sa caste : c’est tout un amoncellement d’étoffes précieuses, de franges, de fibules, de ceintures, de phylactères, tout cela plus ample que d’ordinaire. Il regarde attentivement Jésus : c’est un regard de pure curiosité mais pas irrévérencieux. Il fait même un geste de salut plutôt empesé : il incline tout juste la tête. Mais c’est toujours une salutation à laquelle Jésus répond avec déférence. Deux ou trois autres pharisiens saluent eux aussi, pendant que d’autres regardent avec mépris ou font semblant de regarder ailleurs, et un seul lance une insulte. C’est sûr, car je vois ceux qui entourent Jésus sursauter, et même Yokhanan se retourne tout d’un coup pour foudroyer du regard l’insulteur, un homme plus jeune que lui, aux traits marqués et durs.

Une fois ces hommes dépassés, les paysans osent parler, et l’un d’eux dit :

« C’est Doras, Maître, celui qui t’a maudit.

– Laisse-le faire. Je vous ai, vous, pour me bénir » dit calmement Jésus.

Manahen se tient appuyé, avec d’autres, à une archivolte. Dès qu’il voit Jésus, il lève les bras avec une exclamation de joie :

« C’est une agréable journée, puisque je te trouve ! »

Il s’avance vers Jésus, suivi de ceux qui l’accompagnent. Il le vénère sous l’archivolte ombragée où les voix résonnent comme sous une coupole.

Juste au moment où il le vénère, Simon et Joseph, les cousins de Jésus, passent tout près du groupe apostolique avec d’autres nazaréens… mais ils ne saluent pas… Jésus les regarde avec tristesse, mais ne dit mot.

Jude et Jacques, excités, se parlent l’un à l’autre. Jude s’enflamme d’indignation, puis il part en courant, sans que son frère puisse le retenir. Mais Jésus le rappelle d’un ton si impérieux : « Jude, viens ici ! » que le fils excité d’Alphée fait demi-tour…

« Laisse-les faire. Ce sont des semences qui n’ont pas encore senti le printemps. Laisse-les dans l’obscurité de la motte rétive. Je les pénétrerai quand même, même si la motte devient du jaspe qui enveloppe la semence. Je le ferai en temps voulu. »

Les gémissements de Marie, femme d’Alphée, désolée, s’élèvent plus fort que la réponse de Jude. C’est la longue plainte d’une personne humiliée… Mais Jésus ne se retourne pas pour la consoler bien que cette lamentation résonne nettement sous l’archivolte qui lui fait de multiples échos.

Il continue de parler avec Manahen qui lui dit :

« Ceux qui m’accompagnent sont des disciples de Jean. Ils veulent, comme moi, t’appartenir.

– Que la paix soit avec les bons disciples. Là, en avant, ce sont Mathias, Jean et Siméon, avec moi pour toujours. Je vous accueille comme je les ai accueillis, car tout ce qui me vient du saint Précurseur m’est cher. »

281.4

Après avoir rejoint l’enceinte du Temple, Jésus donne des ordres à Judas et à Simon le Zélote pour les achats et les of­frandes d’usage. Puis il appelle le prêtre Jean et dit :

« Toi qui appartiens à ce lieu, tu t’occuperas d’inviter quelque lévite que tu sais digne de connaître la vérité. Car vraiment, cette année, je peux célébrer une fête joyeuse. Jamais plus il n’y aura un jour aussi doux…

– Pourquoi, Seigneur ? demande le scribe Jean.

– Parce que je vous ai autour de moi, tous, présents visiblement ou spirituellement.

– Mais nous y serons toujours ! Et avec nous beaucoup d’autres » affirme avec véhémence l’apôtre Jean ; tous font chorus.

Jésus sourit et se tait pendant que le prêtre Jean part en avant avec Etienne dans le Temple pour exécuter l’ordre. Jésus leur crie par derrière :

« Rejoignez-nous au portique des Païens ! »

Ils entrent et rencontrent presque aussitôt Nicodème, qui salue profondément, mais ne s’approche pas de Jésus. Pourtant il échange avec Jésus un sourire entendu et paisible.

Pendant que les femmes s’arrêtent à l’endroit qui leur est permis, Jésus se rend avec les hommes à la prière à l’endroit réservé aux hébreux, puis il revient, après avoir accompli tous les rites, pour retrouver ceux qui l’attendent au portique des Païens.

Les portiques très vastes et très élevés sont remplis d’une foule qui écoute les instructions des rabbins. Jésus se dirige vers l’endroit où il voit arrêtés les deux apôtres et les deux disciples envoyés en avant. Aussitôt, on fait cercle autour de lui, et aux apôtres et disciples s’unissent de nombreuses personnes qui se tenaient ici et là dans la cour de marbre remplie de monde. La curiosité est telle que certains élèves des rabbins – je ne sais si c’est spontanément ou envoyés par les maîtres – s’approchent du cercle qui se presse autour de Jésus.

281.5

Jésus demande à brûle-pourpoint :

« Pourquoi vous serrez-vous autour de moi ? Dites-le-moi. Vous avez des rabbis connus et sages, bien vus de tout le monde. Moi, je suis l’Inconnu et le mal vu. Pourquoi donc venez-vous à moi ?

– Parce que nous t’aimons » disent certains, d’autres : « Parce que tu as des paroles différentes des autres », et d’autres en­core : « Pour voir tes miracles » ou « Parce que nous avons entendu parler de toi » ou encore « Parce que toi seul as des paroles de vie éternelle et des œuvres qui correspondent aux paroles » et enfin : « Parce que nous voulons nous unir à tes disciples. »

Jésus regarde les gens au fur et à mesure qu’ils parlent comme s’il voulait les transpercer par le regard pour lire leurs impressions les plus cachées, et certains, ne résistant pas à ce regard, s’éloignent ou bien se cachent derrière une colonne ou des gens plus grands qu’eux.

Jésus reprend :

« Mais savez-vous ce que cela veut dire et ce que cela impose de marcher à ma suite ? Je vais répondre à ces seules paroles, parce que la curiosité ne mérite pas qu’on lui réponde et parce que celui qui a faim de mes paroles me donne, en conséquence, son amour et désire s’unir à moi. Car, parmi ceux qui ont parlé, il y a deux groupes : les curieux, dont je ne m’occupe pas, et les volontaires que j’instruis, sans les tromper sur la sévérité de cette vocation.

281.6

Venir à moi comme disciple, cela veut dire renoncer à tous les amours pour un seul amour : le mien. L’amour égoïste pour soi-même, l’amour coupable pour les richesses, la sensualité ou la puissance, l’amour honnête pour son épouse, l’amour saint pour ses parents, l’amour affectueux des enfants et des frères ou pour les enfants et les frères, tout doit faire place à l’amour pour moi, si on veut être mien. En vérité, je vous dis que mes disciples doivent être plus libres que les oiseaux qui planent dans les cieux, plus libres que les vents qui parcourent les espaces sans que personne les retienne, personne ni rien. Libres, sans lourdes chaînes, sans lacets d’amour matériel, sans même les fils d’araignée fins des plus légères barrières. L’âme est comme un papillon délicat enfermé dans un lourd cocon de chair, et son vol peut s’alourdir ou s’arrêter complètement, par l’action d’une iridescente et impalpable toile d’araignée : l’araignée de la sensualité, du manque de générosité dans le sacrifice. Moi, je veux tout, sans réserve. L’âme a besoin de cette liberté de donner, de cette générosité de donner, pour pouvoir être certaine de ne pas rester prise dans la toile d’araignée des affections, des habitudes, des réflexions, des peurs, tendues comme autant de fils de cette araignée monstrueuse qu’est Satan, le voleur des âmes.

Si quelqu’un veut venir à moi et ne hait pas saintement son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et ses sœurs, et jusqu’à sa vie même, il ne peut être mon disciple. J’ai dit : “ hait saintement ”. Vous, dans votre cœur, vous dites : “ La haine – il l’enseigne lui-même –, n’est jamais sainte. Donc il se contredit. ” Non. Je ne me contredis pas. Je dis de haïr la pesanteur de l’amour, la passion charnelle de l’amour pour ses parents, son épouse et ses enfants, ses frères et sœurs, et sa vie elle-même, mais, d’autre part, j’ordonne d’aimer avec la liberté légère qui est le propre des âmes, ses parents et la vie. Aimez-les en Dieu et pour Dieu, en ne faisant jamais passer Dieu après eux, en vous occupant et vous préoccupant de les amener là où le disciple est arrivé, c’est-à-dire à Dieu Vérité. Ainsi vous aimerez saintement vos parents et Dieu, en conciliant les deux amours et en faisant des liens du sang, non pas un poids, mais une aile, non pas une faute, mais la justice.

Même votre vie, vous devez être prêts à la haïr pour me suivre. Hait sa vie celui qui, sans peur de la perdre ou de la rendre humainement triste, la consacre à mon service. Mais ce n’est qu’une haine apparente. Un sentiment appelé de manière incorrecte “ haine ”, par la pensée de l’homme qui ne sait pas s’élever, de l’homme uniquement terrestre, de peu supérieur à une brute. En réalité, cette haine apparente qui est le refus des satisfactions sensuelles à l’existence, pour donner une vie toujours plus grande à l’âme, c’est de l’amour. C’est de l’amour, le plus élevé qui soit, le plus béni.

Ce refus des basses satisfactions, cette interdiction de la sen­sualité des affections, ce risque de reproches et de commen­taires injustes, de punitions, de répudiations, de malédictions et, peut-être, de persécutions, est une suite de peines. Mais il faut les embrasser et se les imposer comme une croix, un gibet sur lequel on expie toutes les fautes passées pour aller justifiés vers Dieu. C’est ainsi qu’on obtient de Dieu toute grâce vraie, puissante, sainte, pour ceux que nous aimons. Celui qui ne porte pas sa croix et ne me suit pas, celui qui ne sait pas le faire, ne peut être mon disciple.

281.7

Réfléchissez-y donc bien, vous qui déclarez : “ Nous sommes venus parce que nous voulons nous unir à tes disciples. ” Il n’y a rien de honteux – c’est au contraire de la sagesse – à s’estimer, à se juger, à avouer à soi-même et aux autres : “ Je n’ai pas l’étoffe d’un disciple. ” Eh quoi ? Les païens ont, à la base de l’un de leurs enseignements, la nécessité de “ se connaître soi-même ”: et vous, juifs, vous ne sauriez pas le faire pour conquérir le Ciel ?

Car, rappelez-le-vous toujours, bienheureux ceux qui viendront à moi. Mais, plutôt que de venir pour ensuite me trahir, moi et Celui qui m’a envoyé, il vaut mieux ne pas venir du tout et rester les fils de la Loi comme vous l’avez été jusqu’à présent. Malheur à ceux qui, ayant dit : “ Je viens ”, nuisent plus tard au Christ en trahissant l’idée chrétienne et en scandalisant les petits, les gens honnêtes ! Malheur à eux ! Et pourtant, il y en aura toujours !

Imitez donc celui qui veut construire une tour. Il commence par calculer attentivement les dépenses nécessaires et il compte son argent pour voir s’il a de quoi l’achever, afin qu’après avoir fait les fondations il ne doive pas suspendre les travaux par manque d’argent. Dans ce cas, il perdrait même ce qu’il possédait avant, en restant sans tour et sans talents, et en échange il s’attirerait les moqueries du peuple qui dirait : “ Il a commencé à construire sans pouvoir finir. Maintenant, il peut se remplir l’estomac avec les ruines de sa construction inachevée ! ”

Imitez encore les rois de la terre, en faisant servir les pauvres événements du monde à un enseignement surnaturel. Quand ils veulent faire la guerre à un autre roi, ils examinent tout avec calme et attention, pèsent le pour et le contre, réfléchissent pour voir si l’intérêt de la conquête vaut le sacrifice de la vie des sujets. Ils étudient s’il est possible de conquérir ce lieu, si leurs troupes, inférieures de moitié en nombre à celles de leur rival, même si elles sont plus combatives, peuvent vaincre. S’ils estiment avec justesse qu’il est improbable que dix mille hommes viennent à bout de vingt mille, ils envoient à leur rival, avant le combat, une ambassade avec de riches présents ; ils apaisent leur rival, déjà inquiet des mouvements de troupes de l’autre, le désarment par des témoignages d’amitié, font disparaître ses soupçons et signent avec lui un traité de paix, en vérité toujours plus avantageux qu’une guerre, aussi bien humainement que spirituellement.

C’est ainsi que vous devez agir avant de commencer une nouvelle vie et de partir en guerre contre le monde. Car voici ce que être mes disciples implique : marcher contre le tourbillonnement et la violence de l’entraînement du monde, de la chair, de Satan. Et si vous ne vous sentez pas le courage de renoncer à tout par amour pour moi, ne venez pas à moi, parce que vous ne pouvez pas être mes disciples.

281.8

– C’est bien. Ce que tu dis est vrai » admet un scribe qui s’est mêlé au groupe. « Mais si nous nous dépouillons de tout, avec quoi allons-nous te servir ensuite ? La Loi a des commandements qui sont comme de la monnaie que Dieu donne à l’homme pour que, en s’en servant, il achète la vie éternelle. Tu dis : “ Renoncez à tout ” et tu indiques son père, sa mère, les richesses, les honneurs. Dieu a pourtant donné tout cela et il nous a dit, par la bouche de Moïse, de nous en servir saintement pour paraître justes aux yeux de Dieu. Si tu nous enlèves tout, qu’est-ce que tu nous donnes ?

– Le véritable amour, je l’ai dit, rabbi. Je vous donne ma doctrine qui n’enlève pas un iota à la Loi ancienne, mais au contraire la perfectionne.

– Dans ce cas, nous sommes tous des disciples égaux parce que nous avons tous les mêmes choses.

– Nous les avons tous selon la Loi de Moïse. Mais pas tous selon la Loi perfectionnée par moi selon l’amour. Tous n’atteignent pas, dans cette Loi, la même quantité de mérites. Même parmi les disciples qui m’appartiennent, tous n’arriveront pas à avoir une égale somme de mérites et certains, non seulement n’auront pas cette somme, mais perdront même leur unique monnaie : leur âme.

– Comment ? A qui on a donné davantage, il restera davan­tage. Tes disciples, ou mieux tes apôtres, te suivent dans ta mission et sont au courant de tes façons de faire, ils ont reçu énormément ; tes disciples effectifs ont beaucoup reçu, ceux qui ne sont dis­ciples que de nom, moins, et ceux qui, comme moi, ne t’é­coutent que par hasard, rien. Il est évident que les apôtres recevront énormément au Ciel, les disciples effectifs beaucoup, ceux qui ne le sont que de nom moins, ceux qui sont comme moi rien.

– Humainement c’est évident, et c’est faux aussi humainement. Car tous ne sont pas capables de faire fructifier les biens qu’ils ont reçus. Ecoute cette parabole et pardonne-moi si je développe trop ici mon enseignement. Mais je suis l’hirondelle de passage et je ne séjourne que peu de temps dans la Maison du Père, car je suis venu pour le monde entier et ce petit monde qu’est le Temple de Jérusalem ne veut pas me permettre de suspendre mon vol et de rester là où la gloire de Dieu m’appelle.

– Pourquoi dis-tu cela ?

– Parce que c’est la vérité. »

Le scribe regarde autour de lui et baisse la tête. Que ce soit la vérité, il le voit écrit sur trop de visages de membres du Sanhédrin, de rabbis et de pharisiens qui ont grossi de plus en plus le groupe qui entoure Jésus. Ce sont autant de visages verts de rage ou rouges de colère, de regards qui équivalent à des paroles de malédiction et à des crachats empoisonnés, de rancœur qui fermente de tous côtés, de désir de brutaliser le Christ – même si cela reste seulement un désir par peur de la foule qui entoure le Maître avec dévotion, prête à tout pour le défendre, peur aussi peut-être d’être punis par Rome, qui est bienveillante envers le doux Maître galiléen –.

281.9

Jésus se remet calmement à exposer sa pensée en parabole :

« Un homme qui allait entreprendre un long voyage et s’absenter longtemps appela tous ses serviteurs et leur confia tous ses biens. A l’un, il donna cinq talents d’argent, à un autre deux talents d’argent, à un troisième un seul talent, mais d’or. A chacun selon sa situation et son habileté. Puis il partit.

Alors le serviteur qui avait reçu cinq talents d’argent alla les faire valoir habilement et, après quelque temps, ils lui en rapportèrent cinq autres. Celui qui avait reçu deux talents d’argent fit la même chose et il doubla la somme qu’il avait reçue. Mais celui auquel le maître avait donné davantage, un talent d’or pur, paralysé par la peur de ne pas savoir s’y prendre, par la crainte des voleurs, de mille choses chimériques et surtout par la paresse, fit un grand trou dans la terre et y cacha l’argent de son maître.

De nombreux mois passèrent, et le maître revint. Il appela aussitôt ses serviteurs pour qu’ils lui rendent l’argent laissé en dépôt.

Celui qui avait reçu cinq talents d’argent se présenta et dit : “ Voici, mon seigneur. Tu m’en as donné cinq. Comme il me semblait qu’il était mal de ne pas faire fructifier l’argent que tu m’avais donné, je me suis débrouillé et je t’ai gagné cinq autres talents. Je n’ai pas pu faire davantage… ” “ C’est bien, très bien, serviteur bon et fidèle. Tu t’es montré fidèle en peu de choses, entreprenant et honnête. Je te donnerai de l’autorité sur beaucoup de choses. Entre dans la joie de ton maître. ”

Puis celui qui avait reçu deux talents se présenta et dit : “ Je me suis permis d’employer tes biens dans ton intérêt. Voici les comptes qui montrent comment j’ai employé ton argent. Tu vois ? Il y avait deux talents d’argent, maintenant il y en a quatre. Es-tu content, mon seigneur ? ” Et le maître fit au bon serviteur la même réponse qu’au premier.

Arriva en dernier celui qui, jouissant de la plus grande confiance de son maître, avait reçu le talent d’or. Il le sortit de sa cachette et dit : “ Tu m’as confié la plus grande valeur parce que tu sais que je suis prudent et fidèle, comme moi je sais que tu es intransigeant et exigeant, et que tu ne supportes pas des pertes d’argent, mais en cas de perte, tu t’en prends à celui qui est près de toi. Car, en vérité, tu moissonnes là où tu n’as pas semé et tu ramasses là où tu n’as rien répandu, sans faire cadeau du moindre sou à ton banquier ou à ton régisseur, pour quelque raison que ce soit. Il te faut autant d’argent que tu en réclames. Or moi, par crainte de diminuer ce trésor, je l’ai pris et l’ai caché. Je ne me suis fié à personne pas plus qu’à moi-même. Maintenant, je l’ai déterré et je te le rends. Voici ton talent. ”

“ – Serviteur injuste et paresseux ! En vérité, tu ne m’as pas aimé parce que tu ne m’as pas connu et que tu n’as pas aimé mon bien-être, puisque tu as laissé mon argent improductif. Tu as trahi l’estime que j’avais pour toi et c’est toi-même qui te contredis, t’accuses et te condamnes. Tu savais que je moissonne là où je n’ai pas semé, et que je ramasse là où je n’ai rien répandu. Alors pourquoi n’as-tu pas fait en sorte que je puisse moissonner et ramasser ? C’est ainsi que tu réponds à ma confiance ? C’est ainsi que tu me connais ? Pourquoi n’as-tu pas porté mon argent aux banquiers pour qu’à mon retour je le retire avec les intérêts ? Je t’avais instruit avec un soin particulier dans ce but et toi, paresseux et imbécile, tu n’en as pas tenu compte. Qu’on t’enlève donc le talent ainsi que tous tes autres biens, et qu’on les donne à celui qui a les dix talents. ”

“ – Mais lui en a déjà dix alors que celui-ci reste sans rien… ” lui objecta-t-on.

“ – C’est bien ainsi. A celui qui possède et le fait fructifier, il sera donné encore davantage, et même en surabondance. Mais à celui qui n’a pas parce qu’il n’a pas la volonté d’avoir, on enlèvera ce qui lui a été donné. Quant au serviteur inutile qui a trahi ma confiance et a laissé improductifs les dons que je lui avais faits, qu’on l’expulse de ma propriété et qu’il aille pleurer et se ronger le cœur. ”

Voilà la parabole. Comme tu le vois, rabbi, à qui avait reçu le plus il est resté le moins, car il n’a pas su mériter de conserver le don de Dieu. Et il n’est pas sûr qu’un de ceux dont tu dis qu’ils ne sont disciples que de nom et ont par conséquent peu de chose à faire valoir, ou même l’un de ceux qui, comme tu dis, m’en­tendent par hasard et ont seulement leur âme pour unique capital, n’ar­rive pas à avoir le talent d’or et même ce qu’il aura rapporté, qu’on aura enlevé à quelqu’un qui avait reçu davantage. Les surprises du Seigneur sont infinies parce que les réactions de l’homme sont innombrables. Vous verrez des païens arriver à la vie éternelle et des samaritains posséder le Ciel, et vous verrez des purs Israélites qui me suivent perdre le Ciel et la vie éternelle. »

281.10

Jésus se tait et, comme s’il voulait couper court à toute discussion, se tourne vers l’enceinte du Temple.

Mais un docteur de la Loi, qui s’était assis pour écouter sérieusement sous le portique, se lève et s’avance pour demander :

« Maître, que dois-je faire pour obtenir la vie éternelle ? Tu as répondu à d’autres, réponds-moi, à moi aussi.

– Pourquoi veux-tu me tenter ? Pourquoi veux-tu mentir ? Espères-tu que je dise des choses qui déforment la Loi parce que je lui ajoute des idées plus lumineuses et plus parfaites ? Qu’est-ce qui est écrit dans la Loi ? Réponds ! Quel est son principal commandement ?

– “ Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces, de toute ton intelligence. Tu aimeras ton prochain comme toi-même. ”

– Voilà, tu as bien répondu. Fais cela et tu auras la vie éternelle.

– Et quel est mon prochain ? Le monde est plein de gens qui sont bons et mauvais, connus ou inconnus, amis et ennemis d’Israël. Qui est mon prochain ?

– Un homme, qui descendait de Jérusalem à Jéricho par les défilés des montagnes, tomba aux mains de voleurs. Ceux-ci, après l’avoir cruellement blessé, le dépouillèrent de tous ses biens et même de ses vêtements, le laissant plus mort que vif au bord de la route.

Par le même chemin passa un prêtre qui avait terminé son office au Temple. Il était encore parfumé par les encens du Saint ! Et il aurait dû avoir l’âme parfumée de bonté surnaturelle et d’amour puisqu’il s’était tenu dans la Maison de Dieu, pour ainsi dire au contact du Très-Haut. Le prêtre avait hâte de rentrer chez lui. Il regarda donc le blessé, mais ne s’arrêta pas. Il passa outre rapidement, laissant le malheureux sur le bord du chemin.

Un lévite vint à passer. Devait-il se contaminer, lui qui devait servir au Temple ? Allons donc ! Il releva son vêtement pour ne pas se souiller de sang, jeta un regard fuyant sur l’homme qui gémissait dans son sang et hâta le pas vers Jérusalem, vers le Temple.

En troisième lieu, venant de la Samarie en direction du gué, arriva un samaritain. Il vit le sang, s’arrêta, découvrit le blessé dans le crépuscule qui avançait, descendit de sa monture, s’approcha du blessé, lui rendit des forces en lui faisant boire une gorgée d’un vin généreux. Il déchira son manteau pour en faire des bandages, puis il lava les blessures avec du vinaigre et les oignit avec de l’huile, et le banda avec amour. Après avoir chargé le blessé sur sa monture, il conduisit avec précaution l’animal, soutenant en même temps le blessé, le réconfortant par de bonnes paroles sans se préoccuper de la fatigue et sans dédain pour ce blessé, bien qu’il soit de nationalité judéenne. Arrivé en ville, il le conduisit à l’auberge, le veilla toute la nuit. A l’aube, voyant qu’il allait mieux, il le confia à l’hôtelier en lui donnant d’avance des deniers pour le payer et lui dit : “ Prends-en soin comme si c’était moi-même. A mon retour, je te rendrai ce que tu auras dépensé en plus, et dans une bonne mesure si tu as bien fait ce qu’il fallait. ” Puis il partit.

Docteur de la Loi, réponds-moi. Lequel de ces trois hommes a été le “ prochain ” pour l’homme tombé aux mains des voleurs ? Le prêtre, peut-être ? Ou le lévite ? Ne serait-ce pas plutôt le samaritain, qui ne s’est pas demandé qui était le blessé, pourquoi il était blessé, si lui-même agissait mal en le secourant, en perdant son temps, son argent et en risquant d’être accusé de l’avoir blessé ? »

Le docteur de la Loi répond :

« Le prochain, c’est ce dernier car il a fait preuve de miséricorde.

– Toi aussi, fais de même et tu aimeras ton prochain et Dieu dans le prochain, méritant ainsi la vie éternelle. »

281.11

Personne n’ose plus parler et Jésus en profite pour re­joindre les femmes qui l’attendaient près de l’enceinte et, avec elles, aller de nouveau dans la ville. Deux prêtres se sont maintenant unis aux disciples, ou plutôt un prêtre et un lévite, ce dernier très jeune, l’autre d’âge patriarcal.

Mais Jésus parle avec sa Mère, avec Marziam au milieu, entre lui et elle. Et il lui demande :

« M’as-tu entendu, Mère ?

– Oui, mon Fils, et à la tristesse de Marie, femme de Cléophas, s’est ajoutée la mienne. Elle était en larmes un peu avant d’entrer au Temple…

– Je le sais, Mère, et j’en connais le motif. Mais elle ne doit pas pleurer. Seulement prier.

– Ah ! Elle prie tant ! Ces soirs-ci, dans sa cabane, entre ses fils endormis, elle priait et pleurait. Je l’entendais à travers la mince paroi de feuillage voisine. De voir à quelques pas Joseph et Simon, tout près mais ainsi séparés… Et elle n’est pas la seule à se lamenter. Jeanne, qui te paraît si sereine, a pleuré avec moi…

– Pourquoi, Mère ?

– Parce que Kouza… a une conduite… inexplicable. Il la seconde un peu en tout. Il la repousse un peu en tout. S’ils sont seuls et que personne ne les voit, c’est le mari exemplaire de toujours. Mais s’il y a d’autres personnes avec lui – de la Cour bien entendu –, le voilà qui devient autoritaire et méprisant envers sa douce épouse. Elle ne comprend pas pourquoi…

– Je vais te le dire : Kouza est serviteur d’Hérode. Comprends-moi, Mère : “ serviteur. ” Je ne le dis pas à Jeanne pour ne pas lui faire de peine. Mais c’est ainsi. Quand il ne craint pas de blâme et de moquerie du souverain, c’est le bon Kouza. Quand il peut les craindre, il n’est plus le même.

– C’est parce qu’Hérode est très irrité à cause de Manahen et…

– Et parce qu’Hérode est devenu fou par le remords tardif d’avoir cédé à Hérodiade. Mais Jeanne a déjà tant de bien dans sa vie. Elle doit, sous le diadème, porter son cilice.

– Annalia aussi pleure…

– Pourquoi ?

– Parce que son fiancé se retourne contre toi.

– Qu’elle ne pleure pas. Dis-le-lui. C’est une résolution. Une bonté de Dieu. Son sacrifice ramènera Samuel au bien. Pour le moment, ce dernier la laissera libre de pressions pour le mariage. Je lui ai promis de la prendre avec moi. Elle me précédera dans la mort…

– Mon Fils !… »

Marie serre la main de Jésus. Son visage devient exsangue.

« Maman bien-aimée ! C’est pour les hommes. Tu le sais. C’est pour l’amour des hommes. Buvons notre calice de bon cœur, n’est-ce pas ? »

Marie avale ses larmes et répond : « Oui. » Un « oui » tellement déchiré et déchirant !

281.12

Marziam lève la tête et dit à Jésus :

« Pourquoi dis-tu ces choses si dures qui font de la peine à ta Mère ? Moi, je ne te laisserai pas mourir. Comme j’ai défendu les agneaux, je te défendrai, toi. »

Jésus lui fait une caresse et, pour remonter le moral des deux affligés, il demande à l’enfant :

« Que vont faire maintenant tes brebis ? Tu ne les regrettes pas ?

– Oh ! Je suis avec toi ! Mais j’y pense toujours, et je me demande : “ Est-ce que Porphyrée les aura emmenées au pâturage ? Et est-ce qu’elle aura veillé à ce que Spuma n’aille pas dans le lac ? ” Elle est si vive, Spuma, tu sais… Sa mère l’appelle, l’appelle… Mais rien à faire ! Elle fait ce qu’elle veut. Et Neve, si gloutonne qu’elle mange à s’en rendre malade ? Tu sais, Maître ? Moi, je comprends ce que c’est que d’être prêtre en ton Nom. Je le comprends mieux que les autres. Eux (il montre de la main les apôtres qui les suivent) eux, ils disent plein de belles paroles, ils font plein de projets… pour plus tard. Moi, je dis : “ Je ferai le berger pour les hommes comme pour les brebis. Et ça suffira. ” Notre Mère à tous les deux m’a dit hier un très beau passage des prophètes… et elle a ajouté : “ C’est exactement ce qu’est notre Jésus. ” Et moi, dans mon cœur, j’ai dit : “ moi aussi, je serai tout à fait comme ça. ” Puis j’ai dit à notre Mère : “ Pour le moment, je suis agneau, ensuite je serai berger. Au contraire, maintenant Jésus est Berger et il est aussi Agneau. Mais toi, tu es toujours l’Agnelle, seulement notre Agnelle blanche, belle, aimée, aux paroles plus douces que le lait. C’est pour ça que Jésus est tellement Agneau : parce qu’il est né de toi, l’Agnelle du Seigneur. ” »

Jésus se penche vivement et l’embrasse. Puis il demande :

« Tu veux donc vraiment être prêtre ?

– Bien sûr, mon Seigneur ! C’est pour ça que je m’efforce de devenir bon et de savoir beaucoup de choses. Je vais toujours près de Jean d’En-Dor. Il me traite toujours en homme et avec beaucoup de bonté. Je veux être berger des brebis dévoyées et non dévoyées, et médecin-berger de celles qui sont blessées et malades, comme dit le prophète[1]. Oh, que c’est beau ! »

Et l’enfant saute en battant des mains.

« Qu’est-ce qu’il a, cette petite tête noire, à être si heureux ? demande Pierre en s’approchant.

– Il voit sa route. Nettement, jusqu’à la fin… Et moi, je con­sacre la vision qu’il en a, par mon “ oui ”. »

281.13

Ils s’arrêtent devant une haute maison qui, si je ne me trompe, se trouve du côté du faubourg d’Ophel, mais l’endroit est plus riche.

« Est-ce ici que nous nous arrêtons ?

– C’est la maison que Lazare m’a offerte pour le banquet de réjouissance. Marie est déjà là.

– Pourquoi n’est-elle pas venue avec nous ? Par peur des moqueries ?

– Oh non ! Moi seul le lui ai ordonné.

– Pourquoi, Seigneur ?

– Parce que le Temple est plus susceptible qu’une épouse enceinte. Tant que je le peux, et non par lâcheté, je ne veux pas le heurter.

– Cela ne te servira à rien, Maître. Moi, si j’étais toi, non seulement je le heurterais, mais je le jetterais en bas du mont Moriah avec tous ceux qui sont dedans.

– Tu es un pécheur, Simon. Il faut prier pour ses semblables, pas les tuer.

– Je suis un pécheur. Mais, toi, non… et… tu devrais le faire.

– Il y aura quelqu’un pour le faire. Et après qu’on aura atteint la mesure du péché.

– Quelle mesure ?

– Une mesure telle qu’elle emplira tout le Temple et débordera sur Jérusalem. Tu ne peux comprendre… Oh, Marthe ! Ouvre donc ta maison au Pèlerin ! »

Marthe se fait reconnaître et ouvrir. Ils entrent tous dans un long atrium qui débouche sur une cour pavée, avec un arbre à chaque coin. Une vaste salle s’ouvre au-dessus du rez-de-chaussée et, par les fenêtres ouvertes, on découvre toute la ville avec ses montées et descentes. J’en conclus donc que la maison est sur les pentes sud ou sud-est de la ville. La salle est préparée pour un très grand nombre d’invités. Des tables, en abondance, sont disposées parallèlement. Une centaine de personnes peuvent s’y restaurer sans encombre.

Marie-Madeleine accourt. Elle était ailleurs, occupée dans les communs, et elle se prosterne devant Jésus. Lazare arrive aussi, avec un sourire bienheureux sur son visage maladif. Les hôtes entrent peu à peu, certains un peu embarrassés, d’autres avec plus d’assurance. Mais la gentillesse des femmes a vite fait de les mettre à l’aise.

281.14

Le prêtre Jean amène à Jésus les deux hommes qu’il a conviés au Temple.

« Maître, voici mon bon ami Jonathas et mon jeune ami Zacharie. Ce sont de vrais juifs, sans malice ni rancœur.

– Paix à vous. Je suis heureux de vous avoir. Il faut observer le rite, même dans ces douces coutumes. Il est beau que la foi ancienne tende une main amie à la nouvelle foi venue de son propre cep. Asseyez-vous à mes côtés en attendant qu’arrive l’heure du repas. »

Le patriarcal Jonathas parle, alors que le jeune lévite regarde ici et là, curieux, étonné, et peut-être même intimidé. Je pense qu’il veut se donner un air dégagé, mais qu’en réalité il est comme un poisson hors de l’eau. Heureusement, Etienne vient à son secours et lui amène l’un après l’autre les apôtres et les principaux disciples.

Le vieux prêtre dit, en caressant sa barbe neigeuse :

« Quand Jean est venu me trouver, justement moi, son maître, pour me montrer sa guérison, j’ai eu envie de te connaître. Mais, Maître, je ne sors pour ainsi dire plus de mon enceinte. Je suis vieux… J’espérais cependant te voir avant de mourir et Yahvé m’a exaucé. Qu’il en soit loué ! Aujourd’hui, je t’ai entendu au Temple. Tu surpasses Hillel, l’ancien, le sage. Je ne veux pas, même je ne peux douter que tu es celui que mon cœur attend. Mais sais-tu ce que c’est que d’avoir bu pendant près de quatre-vingts ans la foi d’Israël telle qu’elle est devenue pendant des siècles… d’élaboration humaine ? Elle est devenue notre sang. Et je suis si vieux ! T’entendre, c’est comme boire de l’eau qui sort d’une source fraîche. Ah oui ! Une eau vierge ! Mais moi… mais moi, je suis saturé de l’eau usée qui vient de tellement loin… que tant d’inutilités ont alourdie. Comment ferai-je pour me débarrasser de cette saturation et te goûter, toi ?

– Croire en moi et m’aimer. Rien d’autre n’est nécessaire pour le juste Jonathas.

– Mais je mourrai bientôt ! Arriverai-je à temps pour croire tout ce que tu dis ? Je n’arriverai même plus à suivre toutes tes paroles ou à les connaître de la bouche d’autrui. Et alors ?

– Tu les apprendras au Ciel. Il n’y a que le damné qui meure à la Sagesse, alors que celui qui meurt dans la grâce de Dieu arrive à la Vie et vit dans la Sagesse. Que crois-tu que je suis ?

– Tu ne peux être que l’Attendu qu’a précédé le fils de mon ami Zacharie. L’as-tu connu ?

– C’était mon parent.

– Oh ! Alors, tu es parent de Jean-Baptiste ?

– Oui, prêtre.

– Il est mort… et je ne peux dire : “ Malheureux ! ” Car il est mort fidèle à la justice, après avoir accompli sa mission, et parce que… Ah ! Quels temps atroces nous vivons ! Ne vaut-il pas mieux revenir vers Abraham ?

– Oui, mais il en viendra de plus atroces, prêtre.

– Tu dis cela ? Rome, hein ?

– Pas Rome seule. C’est Israël coupable qui en sera la première cause.

– C’est vrai. Dieu nous frappe. Nous le méritons. Mais même Rome…

281.15

Tu as entendu parler de ces galiléens tués par Pilate pendant qu’ils accomplissaient un sacrifice ? Leur sang s’est mêlé à celui de la victime. Tout près de l’autel ! Tout près de l’autel !

– Je l’ai appris. »

Tous les galiléens sont révoltés par cette injustice. Ils s’écrient :

« C’est vrai qu’il s’agissait d’un faux Messie. Mais pourquoi tuer ses partisans, après l’avoir frappé, lui ? Et pourquoi à ce moment-là ? Ils étaient plus pécheurs, peut-être ? »

Jésus impose la paix et dit :

« Vous vous demandez s’ils étaient plus pécheurs que tant d’autres galiléens et si c’est pour cela qu’ils ont été tués ? Non, ils ne l’étaient pas. En vérité, je vous dis qu’ils ont payé et que beaucoup d’autres paieront si vous ne vous convertissez pas au Seigneur. Si vous ne faites pas tous pénitence, vous périrez tous de la même façon, en Galilée et ailleurs. Dieu est indigné contre son peuple. Je vous l’assure. Il ne faut pas croire que ceux qui sont frappés sont toujours les plus mauvais. Que chacun s’examine soi-même, qu’il se juge, lui, et pas les autres. Ces dix-huit hommes aussi, sur lesquels est tombée la tour de Siloé qui les a tués, n’étaient pas les plus coupables de Jérusalem. Je vous le déclare : faites pénitence si vous ne voulez pas être écrasés comme eux, et même dans votre âme.

281.16

Viens, prêtre d’Israël. La table est servie. Il t’appartient à toi – puisque le prêtre est toujours celui qu’il faut honorer pour l’Idée qu’il représente et rappelle –, il t’appartient à toi, le patriarche parmi nous qui sommes tous plus jeunes, d’offrir et de bénir.

– Non. Maître ! Non ! Je ne puis devant toi ! Tu es le Fils de Dieu !

– Tu offres bien l’encens devant l’autel ! Et tu ne crois pas, peut-être, que Dieu est là ?

– Si, je le crois ! De toutes mes forces !

– Et alors ? Si tu ne crains pas de faire l’offrande devant la Gloire très sainte du Très-Haut, pourquoi veux-tu craindre devant la Miséricorde qui s’est revêtue de chair pour t’apporter, à toi aussi, la bénédiction de Dieu avant que ne vienne à toi la nuit ? Ah ! Vous ne savez pas, hommes d’Israël, que c’est justement pour que l’homme puisse approcher Dieu sans en mourir, que j’ai mis le voile de la chair sur mon insoutenable divinité. Viens, crois, et sois heureux. En toi je vénère tous les prêtres saints, depuis Aaron jusqu’au dernier qui, avec justice, sera prêtre d’Israël, jusqu’à toi peut-être, parce qu’en vérité la sainteté sacerdotale s’affaiblit parmi nous comme une plante qu’on a délaissée. »

281.1

Jesús se dirige al Templo. Le preceden en grupos los discípulos, le siguen en grupo las discípulas, es decir, su Madre, María Cleofás, María Salomé, Susana, Juana de Cusa, Elisa de Betsur, Analía de Jerusalén, Marta y Marcela. No está la Magdalena. En torno a Jesús, los doce apóstoles y Margziam.

Jerusalén muestra la pompa de las ocasiones solemnes. Gente de todos los lugares en todas sus calles. Cantos, discursos, murmullo de oraciones, imprecaciones de asnerizos, algún llanto de niño. Cubriéndolo todo, un cielo nítido que se deja ver entre las casas, y un sol que desciende alegre a dar vivacidad a los colores de los vestidos, a encender los mortecinos colores de las pérgolas y árboles que acá o allá se vislumbran tras las tapias de los jardines recintados o de los antepechos de las terrazas.

Hay veces que Jesús se cruza con personas conocidas; entonces el saludo es más o menos deferente, según la disposición de éstas. Así, es respetuosísimo, aunque gravedoso, el de Gamaliel, que mira fijamente a Esteban; éste le sonríe desde el grupo de los discípulos (Gamaliel, después de inclinarse ante Jesús, llama aparte a Esteban y le dice unas palabras, y luego Esteban regresa al grupo). De veneración es el saludo del anciano arquisinagogo Cleofás de Emaús, que se dirige con sus paisanos al Templo. Desabrido como una maldición, el saludo de respuesta de los fariseos de Cafarnaúm.

281.2

Los campesinos de Jocanán, capitaneados por el administrador, saludan echándose al suelo y besando los pies de Jesús entre el polvo del camino. La gente, extrañada, se detiene a observar a este grupo de hombres que, en un cruce de calles, se arroja con un grito a los pies de un hombre joven, que no es ni un fariseo ni un famoso escriba, que no es ni un sátrapa ni un alto cortesano. Alguno pregunta que quién es. Corre un murmullo: «Es el Rabí de Nazaret, el que se dice que es el Mesías».

Entonces, prosélitos y gentiles se arremolinan, curiosos, de forma que empujan al grupo hacia una pared y crean un atasco en la minúscula placita; hasta que un grupo de arrieros los disgrega gritando imprecaciones contra el obstáculo. Mas la multitud, exigente, brutal en esta manifestación suya que es también de fe, se aglomera de nuevo, separando las mujeres de los hombres. Todos quieren tocar el vestido de Jesús, decirle una palabra, hacerle alguna pregunta… esfuerzo inútil, porque esa misma prisa, esa ansia, ese nerviosismo por pasar adelante rechazándose unos a otros, hace que ninguno pueda llegar. Las preguntas y respuestas se confunden también en un único rumor incomprensible.

El único que se abstrae de la escena es el abuelo de Margziam. Ha respondido con un grito al grito de su nietecito, y, en seguida, tras venerar al Maestro, ha estrechado contra su corazón al nieto, y luego, todavía apoyado sobre los talones, ambas rodillas en tierra, le ha sentado en su regazo, y le admira y acaricia con lágrimas y besos de dicha mientras le pregunta y escucha. El anciano se siente tan feliz que está ya en el Paraíso.

Acuden los soldados romanos, creyendo que hay alguna pelea. Se abren paso. Pero sonríen cuando ven a Jesús, y, limitándose a aconsejar a los presentes que dejen libre ese importante cruce, se retiran tranquilos. Jesús obedece inmediatamente, aprovechando el espacio que crean los romanos, que van unos pasos delante de Él como para abrirle camino, aunque en realidad es para volver a su puesto de piquete, porque la guardia romana ha sido reforzada mucho, como si Pilatos fuera al corriente de un descontento entre la muchedumbre y temiera amotinamientos en estos días en que Jerusalén está colmada de hebreos procedentes de todas partes. Y es bonito verle caminar precedido por este grupo armado romano, como un rey al que se va abriendo paso cuando se dirige a sus posesiones.

Cuando ha empezado a moverse ha dicho al niño y al anciano: «Estad juntos y seguidme» y al administrador de Jocanán: «Te ruego que me dejes a tus hombres. Serán invitados míos hasta la noche».

El administrador responde obsequioso: «Hágase todo lo que quieras» y, tras un respetuoso saludo, se marcha solo.

281.3

El Templo está ya cerca, y el bullicio de la multitud, como movimiento de hormigas junto a la entrada del hormiguero, es aún mayor. En esto, un campesino de Jocanán grita: «¡El amo!» y cae de rodillas para saludar, y le imitan los demás.

Jesús está en pie en medio de un grupo de hombres postrados (porque los campesinos se habían arrimado bien a Él). Vuelve la mirada hacia el lugar señalado y encuentra la mirada de un fariseo pomposamente vestido, que no me resulta nuevo pero que no sé dónde le he visto.

El fariseo Jocanán está con otros de su casta: un montón de preciosos tejidos, de franjas, hebillas, cinturones, filacterias; todo de dimensiones exageradas respecto a lo común. Jocanán fija su atención en Jesús: es una mirada de pura curiosidad, aunque no irreverente. Es más, le saluda: estirado, apenas una inclinación de cabeza… pero al fin y al cabo es un saludo, al cual Jesús responde con deferencia. También le saludan otros dos o tres fariseos, mientras que otros miran despreciativos o fingen mirar a otra parte; sólo uno lanza una ofensa (seguro, porque veo que los que van en torno a Jesús se sobresaltan, y el mismo Jocanán se vuelve de repente para fulminar con la mirada al ofensor, que es un hombre más joven que él, de facciones marcadas y duras).

Una vez rebasados, cuando ya los campesinos se atreven a hablar, uno de ellos dice: «El que te ha maldecido es Doras, Maestro».

«Déjale. Os tengo a vosotros, que me bendecís» dice tranquilo Jesú­s.

Apoyado en el intradós de un arco, junto con otros, está Manaén, el cual, en cuanto ve a Jesús, alza los brazos acompañando el gesto con una exclamación de alegría: «¡Éste es un día jubiloso, porque te he encontrado!» y viene hacia Jesús, seguido por los que le acompañan. Le venera bajo el umbrío arco que hace retumbar las voces como si fuera una cúpula.

Precisamente mientras le está venerando, pasan, rozando al grupo apostólico, los primos Simón y José con otros nazarenos… y no saludan… Jesús los mira apenado, pero no dice nada.

Judas y Santiago, agitados, cambian recíprocamente unas palabras, y Judas, encendido su rostro de indignación, inútilmente sujetado por su hermano, echa a correr tras ellos. Pero Jesús le llama con un tan imperioso: «¡Judas, ven aquí!», que el inquieto hijo de Alfeo se vuelve para atrás… «Déjalos. Son semillas que todavía no han sentido la primavera. Déjales que estén en la sombra del avariento terrón. Penetraré igualmente, aunque éste se transformase en jaspe cerrado en torno a la semilla. Lo haré a su tiempo».

Más fuerte que la respuesta de Judas de Alfeo resuena el llanto de María de Alfeo, desolada: un llanto largo, propio de una persona abatida… Pero Jesús no se vuelve para consolarla, a pesar de que se oiga bien nítido ese lamento bajo el arco lleno de ecos.

Sigue hablando con Manaén, el cual le dice: «Éstos que están conmigo son discípulos de Juan. Quieren, como yo, ser tuyos».

«Paz a los buenos discípulos. Allá delante están Matías, Juan y Simeón, conmigo para siempre. Os recibo a vosotros como los recibí a ellos, porque Yo amo todo lo que me viene del santo Precursor».

281.4

Llegan a los muros del Templo.

Jesús da órdenes al Iscariote y a Simón Zelote para las compras y ofrendas de rito. Luego llama al sacerdote Juan y dice: «Tú, que eres de este lugar, te encargarás de invitar a algún levita que sepas que es digno de conocer la Verdad. Porque verdaderamente este año puedo celebrar una fiesta de alegría. Nunca volverá a ser tan dulce el día…».

«¿Por qué, Señor?» pregunta el escriba Juan.

«Porque os tengo a todos en torno a mí, o con la presencia visible o en espíritu».

«¡Siempre estaremos! Y, con nosotros, muchos otros» asegura con vehemencia el apóstol Juan, secundado en coro por todos los demás.

Jesús sonríe y calla mientras el sacerdote Juan, con Esteban, se adelanta, al Templo, para cumplir la orden. Jesús le grita detrás: «Nos encontraréis en el pórtico de los Paganos».

Luego entran, y, casi en seguida, se topan con Nicodemo, el cual hace un gesto respetuoso de saludo; no se acerca a Jesús, pero le dirige una sonrisa de avenencia llena de paz.

Las mujeres, no pudiendo ir más allá, se detienen. Mientras, Jesús con los hombres va a la oración, al lugar de los hebreos, y luego, cumplidos todos los ritos, se vuelve para reunirse con los que le esperan en el pórtico de los Paganos.

Los pórticos, vastísimos y altísimos, están llenos de gente que escucha las lecciones de los rabíes. Jesús se dirige a donde ve que están parados los dos apóstoles y los dos discípulos que había mandado delante. En seguida se forma un círculo alrededor de Él; a los apóstoles y discípulos se unen otras, numerosas personas que estaban, acá o allá, entre la muchedumbre que llena el patio marmóreo. Tanta es la curiosidad, que hasta algunos alumnos de rabíes —no sé si espontáneamente o mandados por sus maestros— se acercan al círculo que se ciñe en torno a Jesús.

281.5

Él, sin rodeo alguno, dice: «¿Por qué os apiñáis alrededor de mí? Responded. Tenéis rabíes conocidos y sabios, bienquistos de todos; Yo soy el Desconocido y el Malquisto. ¿Por qué, pues, venís a mí?».

«Porque te amamos» dicen algunos, y otros: «Porque tienes palabras distintas de los otros», y otros: «Para ver tus milagros», y: «Porque hemos oído hablar de ti», y: «Porque sólo Tú tienes palabras de vida eterna y obras que corresponden a las palabras», y, en fin: «Porque queremos unirnos a tus discípulos».

Jesús mira a cada uno según va hablando, como para trasparsarlos con la mirada y leer los más ocultos sentimientos; alguno, no resistiendo esa mirada, se aleja, o, cuanto menos, se esconde detrás de una columna o de gente más alta.

Jesús continúa:

«¿Pero sabéis qué quiere decir y qué es el hecho de seguirme? Doy respuesta solamente a estas palabras, porque la curiosidad no merece respuesta, y porque quien tiene hambre de mis palabras, como consecuencia, me ama y desea unirse a mí. Por tanto, los que han hablado se clasifican en dos grupos: los curiosos, de los cuales no me ocupo, y los que ponen buena voluntad; a éstos los adoctrino sin engaño acerca de la severidad de esta vocación.

281.6

Venir a mí como discípulo quiere decir renuncia de todos los amores en aras de un solo amor: el mío. Amor egoísta a uno mismo; amor culpable a las riquezas, a la sensualidad o el poder; amor justo a la propia esposa; santo, hacia la madre o el padre; amor cariñoso de los hijos y a los hijos o hermanos: todo debe ceder ante mi amor, si uno quiere ser mío. En verdad os digo que mis discípulos han de ser más libres que las aves que extienden su vuelo por el cielo, más libres que los vientos que recorren el firmamento sin ser detenidos por nadie ni por nada; libres, sin pesadas cadenas, sin vínculos de amor material, sin siquiera las finas telarañas de las más leves barreras. El espíritu es como una delicada mariposa enclaustrada dentro del capullo pesado de la carne; su vuelo lo puede obstaculizar —o pararlo del todo— simplemente la irisada e impalpable tela de una araña: la araña de la propia sensibilidad, de la falta de generosidad en el sacrificio. Quiero todo, sin reservas. El espíritu tiene necesidad de esta libertad de dar, de esta generosidad de dar, para poder estar seguro de no caer en la telaraña de las inclinaciones, costumbres, reflexiones, miedos, tejido todo ello como otros tantos hilos de esa monstruosa araña que es Satanás, ladrón de almas.

Si uno quiere venir a mí y no odia santamente a su padre, a su madre, su mujer y sus hijos, a sus hermanos y hermanas, e incluso la propia vida, no puede ser discípulo mío. He dicho: “odia santamente”. En vuestro corazón decís: “El odio —Él lo enseña— no es jamás santo. Por tanto, se contradice”. No. No me contradigo. Digo que se odie lo grave del amor, la pasionalidad terrenal del amor al padre y a la madre, a la esposa y a los hijos, a los hermanos y hermanas, a la propia vida; pero ordeno que se ame, con la libertad ingrávida propia de los espíritus, a los padres y la vida. Amadlos en Dios y por Dios, no posponiendo jamás a Dios, no posponiéndole a ellos, ocupándoos y preocupándoos de conducirlos a donde el discípulo ha llegado, o sea, a Dios Verdad. Así amaréis santamente a los padres y a Dios, y conciliaréis los dos amores, y haréis de los vínculos de la sangre no un peso sino alas, no culpa sino justicia.

Debéis estar dispuestos a odiar también vuestra vida para seguirme a mí. Odia su vida aquel que, sin miedo a perderla o a que sea humanamente triste, la pone a mi servicio. Pero es sólo apariencia de odio, un sentimiento erróneamente llamado “odio” por la mente del hombre que no sabe elevarse, del hombre todo terrenal, superior en poco a los animales. En realidad, este aparente odio, que es el negar las satisfacciones sensuales a la existencia para dar cada vez más amplia vida al espíritu, es amor; amor es, y del más alto que existe, del más bendito. Negarse las bajas satisfacciones, prohibirse la sensualidad de los deseos, atraerse reprensiones y comentarios injustos, arriesgarse a sufrir castigos, rechazos, maldiciones, quizás persecuciones, todo esto es una serie continua de penas. Mas es necesario abrazarse a ellas, e imponérselas como una cruz, un patíbulo en que expiar todos los pecados pasados para presentarse uno justificado ante Dios; un patíbulo del cual se obtienen todas las gracias, verdaderas, poderosas, santas gracias de Dios para aquellos a quienes amamos. Quien no carga con su cruz y no me sigue, quien no sabe hacer esto, no puede ser discípulo mío.

281.7

Por tanto, los que decís: “Hemos venido porque queremos unirnos a tus discípulos” pensadlo mucho, mucho. No es vergüenza, sino sabiduría, sopesarse, juzgarse y confesar, a sí mismo y a los demás: “No tengo la aptitud del discípulo”. Los paganos, como base de una de sus disciplinas, tienen la necesidad de “conocerse uno a sí mismo”. ¿Acaso vosotros, israelitas, no vais a saber hacerlo para conquistar el Cielo? Porque —recordad esto siempre— bienaventurados los que vienen a mí. Pero, si venís para luego traicionarme a mí y al que me ha enviado, mejor es no venir para nada y seguir siendo hijos de la Ley como habéis sido hasta ahora. ¡Ay de aquellos que primero dicen: “Voy” y luego, traicionando la idea cristiana, escandalizando a los pequeños y buenos, perjudican al Cristo! ¡Ay de ellos!… ¡Y los habrá, siempre los habrá!

Sed, pues, como aquel hombre que, queriendo edificar una torre, primero calcula atentamente los gastos necesarios y hace balance de su dinero, para ver si tiene los medios para concluirla, y no verse obligado, una vez echados los cimientos, a suspender la obra por falta de dinero. Si esto sucediera, perdería incluso lo que tenía primero y se quedaría sin torre y sin talentos; a cambio atraería hacia sí las burlas del pueblo, que diría: “Éste empezó a edificar, pero no pudo concluir; ahora tendrá que llenar su estómago con los restos de su construcción inacabada”.

Sed también —sacando así enseñanza sobrenatural de los pobres hechos de este mundo— como los reyes de la Tierra, que, cuando quieren hacer la guerra a otro rey, examinan todo con calma y atención, los pros y los contras; meditan si lo que van a sacar con la conquista les compensa o no el sacrificio de las vidas de sus súbditos; estudian si es posible conquistar el lugar, estudian la posibilidad de victoria de su ejército (numéricamente la mitad del de su rival pero más combativo); y, si, logicamente, ven que es improbable que diez mil venzan a veinte mil, entonces, antes de que estalle la batalla, mandan al encuentro de su rival —que ya está en guardia a causa de las operaciones militares del otro— una embajada con ricos presentes, y le amansan, le apaciguan con pruebas de amistad, anulan sus sospechas, en fin firman un tratado de paz, que siempre es más ventajoso, humana y espiritualmente, que una guerra.

Eso es lo que debéis hacer vosotros antes de empezar la nueva vida y de tomar partido contra el mundo. Porque ser discípulo mío significa eso: presentar batalla a la vortiginosa y violenta corriente del mundo, de la carne, de Satanás. Si no os sentís con valor de renunciar a todo por amor a mí, no vengáis porque no podéis ser discípulos míos».

281.8

«Bien. Lo que dices es verdad» admite un escriba que se ha mezclado en el grupo. «Pero, si nos despojamos de todo, ¿con qué te servimos? La Ley tiene prescripciones que son como monedas que Dios ha dado al hombre para que, usándolas, se compre la vida eterna. Dices: “Renunciad a todo”, y mencionas el padre, la madre, las riquezas, los honores. Dios ha dado también estas cosas, y nos ha dicho, por boca de Moisés, que las usáramos con santidad para aparecer justos ante los ojos de Dios. Si nos quitas todo, ¿qué nos das?».

«He dicho, rabí, que el verdadero amor. Os doy mi doctrina, que no quita ni una iota a la antigua Ley; antes bien, la perfecciona».

«Entonces todos somos discípulos iguales, porque todos tenemos las mismas cosas».

«Todos según la Ley mosaica, no todos según la Ley que perfecciono Yo según el Amor. Mas no todos, en ésta, alcanzan la misma suma de méritos. Entre mis propios discípulos no todos obtendrán una suma de méritos igual; y alguno de ellos, no sólo no alcanzará suma alguna, sino que perderá incluso su única moneda: su alma».

«¿Cómo! A quien más se le da, más le quedará. Tus discípulos, y más tus apóstoles, te siguen en tu misión, y conocen tu forma de actuar; han recibido muchísimo. Mucho han recibido tus discípulos efectivos; menos, los discípulos que lo son sólo de nombre. Nada han recibido los que, como yo, te oyen sólo por una contingencia. Es evidente que en el Cielo los apóstoles tendrán muchísimo; mucho, los discípulos efectivos; menos, los discípulos de nombre; nada, los que son como yo».

«Humanamente es evidente, y humanamente puede ser también un mal. Porque no todos son capaces de hacer producir los bienes recibidos. Escucha esta parábola, y perdona si adoctrino demasiado tiempo aquí; pero es que Yo soy la golondrina que va de paso, y estaré poco tiempo en la Casa del Padre, pues he venido para todo el mundo y, además, este pequeño mundo que es el Templo de Jerusalén no quiere dejarme recoger el vuelo y permanecer donde la gloria del Señor me llama».

«¿Por qué dices eso?».

«Porque es la verdad».

El escriba mira a su alrededor y agacha la cabeza. Ve que lo que ha dicho Jesús es verdad. Lo ve en demasiados rostros de miembros del Sanedrín, rabíes y fariseos, que han ido engrosando cada vez más la aglomeración de gente que hay en torno a Él: rostros verdes de bilis o purpúreos de ira; miradas que equivalen a maldiciones y a esputos de veneno; rencor en fermentación por todas partes; deseos de pegarle a Cristo, que queda en deseo sólo por miedo a los muchos que circundan al Maestro con devoción y que están dispuestos a todo por defenderle, miedo quizás también a represalias por parte de Roma, que mira con benignidad al pacífico Maestro galileo.

281.9

Jesús reanuda sereno la exposición de su pensamiento con la parábola:

«Un hombre, antes de emprender un largo viaje y ausentarse por un largo período, llamó a todos sus siervos y les confió todos sus bienes. A uno le dio cinco talentos de plata; a otro, dos de plata; a uno, uno sólo, de oro. A cada uno según su grado y habilidad. Y luego se marchó.

Entonces, el siervo que había recibido cinco talentos de plata negoció sagazmente sus talentos, y, pasado un tiempo, le produjeron otros cinco. El que había recibido dos talentos de plata hizo lo mismo, y dobló la suma recibida. Pero el que había recibido más de su señor (un talento de oro puro), víctima del miedo a no saber negociar, del miedo a los ladrones, a mil quimeras, víctima, sobre todo, de la holgazanería, cavó un profundo hoyo en el suelo y escondió el dinero de su señor.

Pasaron muchos, muchos meses. Volvió el amo. Llamó en seguida a sus súbditos para que restituyeran el dinero que habían recibido en depósito.

Vino el que había recibido cinco talentos de plata y dijo: “Aquí tienes, mi señor. Me diste cinco talentos. Me parecía mal no hacer producir lo que me habías dado, así que me las he ingeniado para ganar otros cinco. No he podido más…”. “Bien, muy bien, siervo bueno y fiel. Has sido fiel en lo poco, te has aplicado con buena voluntad, has sido honesto. Te daré autoridad sobre muchas cosas. Entra en la alegría de tu señor”.

Luego vino el otro, el de los dos talentos, y dijo: “Me he permitido emplear tus bienes para beneficio tuyo. Aquí tienes las cuentas para que veas cómo he empleado tu dinero. ¿Ves? Eran dos talentos de plata. Ahora son cuatro. ¿Estás contento, mi señor?”. Y el amo dio a este siervo bueno la misma respuesta que había dado al primero.

Vino por último aquel que, por gozar de la máxima confianza del amo, había recibido el talento de oro. Desenrolló el paño en que lo conservaba, lo sacó y dijo: “Me confiaste lo que tenía mayor valor, porque me juzgas prudente y fiel, de la misma forma que yo sé que eres intransigente y exigente y que no toleras pérdidas de tu dinero, sino que si te sobreviene la desgracia te resarces con quien tienes a tu lado, porque, en verdad, cosechas donde no sembraste, recoges donde no esparciste, siendo así que no perdonas un centavo ni al encargado de tus tierras ni a tu banquero, por ninguna razón. Tu dinero debe ser el que tú dices. Ahora bien, yo, temiendo disminuir este tesoro, lo he cogido y lo he escondido. No me he fiado de nadie, ni siquiera de mí mismo. Ahora lo he desenterrado y te lo devuelvo. Aquí tienes tu talento”.

“¡Oh, siervo inicuo y holgazán! Verdaderamente no me has amado porque no me has conocido, ni has amado mi bienestar porque has dejado el talento improductivo. Has traicionado la estima que había depositado en ti. Te desautorizas a ti mismo. Por ti mismo te acusas y te condenas. Sabías que cosecho donde no he sembrado y recojo donde no he esparcido. ¿Por qué, entonces, no has obrado de forma que pudiera cosechar y recoger? ¿Así respondes a mi confianza? ¿Así me conoces? ¿Por qué no has llevado el dinero a los banqueros, de forma que a mi regreso lo hubiera retirado con los intereses? Te había instruido para ello con especial esmero, mas tú, necio holgazán, no lo has tenido en cuenta. Te sea, pues, arrebatado el talento, y todos los demás bienes, para el que tiene diez talentos”.

“Pero tiene ya diez, y éste se queda sin nada…” objetaron.

“Eso es. A quien tiene, y trabaja con eso que tiene, le será dado más, hasta que le sobre. Pero a quien no tiene, porque no quiso tener, le será arrebatado incluso lo que se le dio. Respecto al siervo parásito que ha traicionado mi confianza y ha dejado improductivos los dones recibidos, arrojadlo de mi propiedad, y que se aleje con lágrimas en los ojos y remordimiento en el corazón”.

Ésta es la parábola. Ves, rabí, que le quedó menos al que más tenía, porque no supo merecer la conservación del don de Dios. No se puede afirmar que uno de esos que llamas discípulos sólo de nombre (que tienen poco con que negociar), y de los que, como dices, me escuchan sólo por una contingencia, y que tienen la única moneda de su alma, no lleguen a poseer el talento de oro —arrebatado a uno de los más beneficiados— y sus frutos correspondientes. Las sorpresas del Señor son infinitas, porque infinitas son las reacciones del hombre. Veréis a gentiles que alcanzan la Vida eterna, a samaritanos recibiendo el Cielo, y veréis a israelitas puros y seguidores míos perder el Cielo y la eterna Vida».

281.10

Jesús calla y, como queriendo truncar toda discusión, se vuelve hacia los muros del Templo.

Pero un doctor de la Ley, que estaba sentado escuchando seriamente bajo el pórtico, se alza y se le pone delante para preguntarle: «Maestro, ¿qué debo hacer para alcanzar la vida eterna? Has respondido a los otros, respóndeme también a mí».

«¿Por qué quieres tentarme? ¿Por qué quieres mentir? ¿Esperas que diga algo disconforme con la Ley por el hecho de que añado a la Ley conceptos más luminosos y perfectos? ¿Qué está escrito en la Ley? ¡Responde! ¿Cuál es el mandamiento principal de la Ley?».

«”Amarás al Señor tu Dios con todo tu corazón, con toda tu alma, con todas tus fuerzas, con toda tu inteligencia. Amarás a tu prójimo como a ti mismo”».

«Bueno, has respondido bien; haz eso y obtendrás la vida eter­na».

«¿Y quién es mi prójimo? El mundo está lleno de gente buena y mala, conocida y desconocida, amiga y enemiga de Israel. ¿Cuál es mi prójimo?».

«Un hombre, bajando de Jerusalén a Jericó, en uno de los pasos estrechos de las montañas, se topó con unos ladrones. Éstos le hirieron cruelmente, le despojaron de todo cuanto llevaba, incluso de sus vestidos, y le dejaron más muerto que vivo en el borde del camino.

Pasó por ese mismo camino un sacerdote que había terminado su turno en el Templo. ¡Todavía perfumado de los inciensos del Santo! ¡Debería haber tenido también el alma perfumada de bondad sobrenatural y de amor, pues que había estado en la Casa de Dios, casi en contacto con el Altísimo! Este sacerdote tenía prisa de volver a su casa. Miró, pues, hacia el herido y no se detuvo. Pasó ligero de largo y dejó al desdichado en la cuneta.

Luego, un levita. ¡¿Contaminarse, teniendo que servir en el Templo?! ¡De ninguna manera! Recogió su vestido para que no se manchase de sangre, lanzó una mirada huidiza hacia el hombre que gemía en medio de su sangre y aceleró el paso en dirección a Jerusalén, hacia el Templo.

El tercero que pasó, viniendo de Samaria, en dirección al vado, fue un samaritano. Vio la sangre, se detuvo, descubrió la presencia del herido en el crepúsculo que ya se iba espesando; se apeó del burro, se acercó al herido, le confortó con un trago de vino generoso, desgarró su manto para hacerse vendas, le lavó las heridas con vinagre, se las ungió con aceite, se las vendó con amor; luego cargó al herido sobre su jumento, guió con cautela al animal, sujetando al mismo tiempo al herido y confortándole con buenas palabras, sin preocuparse del cansancio, sin enfado por el hecho de que el herido fuera de nacionalidad judía. Cuando llegó a la ciudad, le llevó a una posada y le veló toda la noche. Al alba, viéndole mejorado, le dejó en manos del posadero, a quien pagó con antelación unos denarios y dijo: “Cuídale como si se tratara de mí mismo. A mi regreso te daré lo que hayas gastado de más, y con medida generosa, si haces bien las cosas”. Y se marchó.

Doctor de la Ley, respóndeme: ¿Quién de estos tres fue “prójimo” del que se topó con los ladrones? ¿Acaso el sacerdote? ¿Acaso el levita? ¿No lo fue, más bien, el samaritano, que no se preguntó quién era el herido, porque estaba herido, o si hacía mal en socorrerle perdiendo tiempo y dinero y arriesgándose a ser acusado de haberle herido él?».

El doctor de la Ley respondió: «Fue “prójimo” éste, porque tuvo misericordia».

«Haz tú lo mismo, y amarás al prójimo y a Dios en el prójimo y merecerás la vida eterna».

281.11

Ya ninguno se atreve a hablar. Jesús aprovecha para ir donde las mujeres, que estaban esperando al pie de los muros, e ir con ellas de nuevo a la ciudad. Ahora se han añadido al grupo de los discípulos dos sacerdotes, o más exactamente un sacerdote y un levita: jovencísimo éste, patriarcal el otro.

Pero Jesús está ahora hablando con su Madre —entre sí y ella, tiene a Margziam—, y le pregunta: «¿Me has escuchado, Madre?».

«Sí, Hijo mío, y a la tristeza de María Cleofás se ha unido la mía. Ella ha llorado poco antes de entrar en el Templo…».

«Lo sé, Madre; sé el motivo. No debe llorar, sólo orar».

«¡Ora mucho! Las noches pasadas, dentro de su cabaña, entre sus hijos dormidos, oraba y lloraba. La oía llorar a través de la pared delgada de los ramajes adyacentes. ¡Ver a pocos pasos a José y a Simón, cercanos pero tan lejos!… Y no es la única que llora. Juana, que la ves tan serena, ha llorado en mi presencia…».

«¿Por qué, Madre?».

«Porque Cusa… se comporta de una forma… inexplicable. Un poco la complace en todo, un poco la rechaza en todo; si están solos, donde nadie los ve, es el marido ejemplar de siempre, pero si están con él otras personas — naturalmente de la Corte — se vuelve autoritario y despreciativo para con su mansa esposa. Ella no comprende por qué…».

«Te lo digo Yo. Cusa es siervo de Herodes. Entiéndeme, Madre: “Siervo”. Esto no se lo digo a Juana para no apenarla. Pero es así. Cuando no teme la reprensión y el escarnio del soberano, es el buen Cusa; cuando tiene motivo para temerlos, deja de serlo».

«Es porque Herodes está muy irritado por Manaén y…».

«Es porque Herodes ha perdido el juicio por el tardío remordimiento de haber cedido a las peticiones de Herodías. Mas Juana tiene ya mucho bien en la vida. Debe, bajo la diadema, llevar su cili­cio».

«Analía también llora…».

«¿Por qué?».

«Porque su prometido se está poniendo contra ti».

«Que no llore. Díselo. Se trata de una resolución. Es bondad de Dios. Su sacrificio conducirá de nuevo a Samuel al Bien. Por el momento esto la librará de presiones para la celebración del matrimonio. Le prometí que la tomaría conmigo. Me precederá en la muerte…».

«¡Hijo!…». María, palideciendo, aprieta la mano de Jesús.

«¡Mi querida Mamá! Es por los hombres. Ya lo sabes. Es por amor a los hombres. Bebemos nuestro cáliz con buena voluntad, ¿no es verdad?».

María traga las lágrimas y responde: «Sí». (Un “sí” acongojado, verdaderamente desgarrador).

281.12

Margziam alza su carita y dice a Jesús: «¿Por qué dices estas cosas feas que hacen sufrir a Mamá? Yo no te voy a dejar morir. Te voy a defender como defendía a los corderos».

Jesús le acaricia, y, para animar a los dos afligidos, pregunta al niño: «¿Qué harán ahora tus ovejitas? ¿No las echas de menos?».

«¡Pero si estoy contigo! De todas formas pienso en ellas siempre, y me pregunto: “¿Las habrá sacado a pastar Porfiria?, ¿habrá tenido cuidado de que Espuma no se meta en el lago?”. Porque Espuma es muy vivaracho, ¿sabes? Su madre le llama una y otra vez, ¡pero nada! Hace lo que quiere. ¿Y Nieve, que es tan glotona que come hasta que se siente mal? Mira, Maestro, yo entiendo lo que es ser sacerdote en tu Nombre, lo comprendo mejor que los otros. Ellos —y señala con la mano a los apóstoles, que vienen detrás— dicen muchas palabras elevadas, hacen muchos proyectos… para el futuro. Yo digo: “Seré pastor. Seré para los hombres como con las ovejitas. Será suficiente”. Mamá, nuestra Mamá, me ha contado ayer un pasaje muy bonito de los profetas… y me ha dicho: “Exactamente así es nuestro Jesús”. Y yo dentro del corazón dije: “Pues yo también seré exactamente así”. Luego le dije a nuestra Mamá: “Por ahora soy cordero, pero luego seré pastor; sin embargo, Jesús ahora es Pastor, y… también Cordero. Pero tú eres siempre la Cordera, sólo nuestra Cordera, blanca, bonita, encantadora, con palabras más dulces que la propia leche. Por eso Jesús es tan Cordero: porque ha nacido de ti, Corderita del Señor”».

Jesús se inclina y le besa, impetuosamente. Luego pregunta: «¿Entonces verdaderamente quieres ser sacerdote?».

«¡Sí, claro, mi Señor! Por eso trato de hacerme bueno y de saber mucho. Voy siempre donde Juan de Endor. Me trata siempre como a un hombre, y con mucha bondad. Quiero ser pastor de las ovejas descarriadas y de las no descarriadas, y médico-pastor de las heridas y de las que tengan algún miembro fracturado, como dice el Profeta. ¡Qué bonito!». Y el niño da un salto y choca las manos.

«¿Por qué está tan contento este curruco?» pregunta Pedro mientras se acerca.

«Ve su camino. Clarísimamente. Hasta el final. Yo con mi “sí” consagro esta visión suya».

281.13

Se paran delante de una casa que, si no me equivoco, está en la zona del barrio de Ofel, pero en un lugar más distinguido.

«¿Nos detenemos aquí?».

«Ésta es la casa que Lázaro me ha ofrecido para el banquete de alegría. María ya está aquí».

«¿Por qué no ha venido con nosotros? ¿Por miedo a las burlas?».

«¡No! Ha sido una disposición mía».

«¿Por qué, Señor?».

«Porque el Templo es más susceptible que una esposa encinta. Mientras pueda, no quiero provocar ningún choque, y no es por cobardía».

«No te va a servir de nada, Maestro. Yo en tu lugar no sólo chocaría con él, sino que le echaría abajo del Moria junto con todos los que viven dentro».

«Simón, eres un pecador; se debe orar por los semejantes, no matarlos».

«Yo soy pecador, pero Tú no… y… deberías hacerlo».

«Habrá quien lo haga. Cuando se colme la medida del pecado».

«¿Qué medida?».

«Una medida tan grande, que henchirá el Templo y rebosará hacia Jerusalén. No puedes comprender… ¡Marta, abre, pues, tu casa al Peregrino!».

Marta se hace reconocer y abren. Entran todos en un largo atrio terminado en un patio empedrado que tiene cuatro árboles en sus cuatro ángulos. Una amplia sala se abre en el piso superior; por sus ventanas abiertas, se ve toda la ciudad con sus subidas y bajadas. Deduzco, por tanto, que la casa está en las pendientes meridionales, o sur-orientales de la ciudad. La sala está preparada para recibir a una gran cantidad de invitados. Han colocado gran número de mesas, paralelas las unas a las otras. Un centenar de personas puede cómodamente comer.

María Magdalena, que estaba en otra parte de la casa ocupándose de las despensas, viene en seguida y se postra delante de Jesús. Y viene Lázaro, con una sonrisa feliz en su cara achacosa. Van llegando también los invitados: unos, un poco azorados; más seguros otros: pero la amabilidad de las mujeres hace que pronto todos se sientan a gusto.

281.14

El sacerdote Juan lleva a la presencia de Jesús a los dos que ha traído del Templo. «Maestro, mi buen amigo Jonatán y mi joven amigo Zacarías. Son auténticos israelitas, sin malicias ni rencores».

«Paz a vosotros. Me alegro de que hayáis venido. El rito debe ser observado incluso en estas delicadas costumbres. Es hermoso que la Fe antigua tienda su mano amiga a la nueva Fe nacida de su mismo tronco. Sentaos a mi lado hasta que llegue la hora de ponerse a la mesa».

Habla el patriarcal Jonatán, mientras el joven levita mira a todas las partes, curioso, asombrado y, quizás, también acobardado. Creo que quiere dar la impresión de desenvoltura, aunque en realidad se sienta como un pez fuera del agua. Tiene la suerte de que Esteban viene en su ayuda y le trae, uno tras otro, a los apóstoles y discípulos principales.

El viejo sacerdote, acariciándose la barba de nieve, dice: «Cuando Juan vino a mí, precisamente a mí, su maestro, a que viera que estaba curado, sentí ganas de conocerte. Pero, Maestro, ya casi no salgo de mi recinto. Soy viejo… De todas formas, tenía esperanza de verte antes de morir. Yeohveh ha escuchado mi deseo. ¡Loado sea! Hoy te he oído en el Templo. Superas a Hil.lel, el anciano, el sabio. No quiero —es más, no puedo— dudar de que eres lo que mi corazón espera. ¿Sabes lo que significa beber durante ochenta años esta fe de Israel, como es ahora, tras siglos de… elaboración humana? Se ha hecho sangre nuestra. ¡Y soy tan viejo!… Oírte a ti es como oír el agua que brota de manantial fresco. ¡Sí, agua virgen! Y yo… estoy harto de esta agua cansada que viene de muy lejos y está cargada de muchas cosas. ¿Cómo librarme de esta hartura para saborearte a ti?».

«Creyendo en mí y amándome. No es necesario nada más para el justo Jonatán».

«¡Pero si voy a morir pronto! ¿Me va a dar tiempo a creer en todo lo que dices? Ni siquiera tendré tiempo para seguir todas tus palabras, o para conocerlas por boca de otros. ¿Entonces!».

«Las aprenderás en el Cielo. Sólo el réprobo muere a la Sabiduría. Sin embargo, quien muere en gracia de Dios alcanza la Vida y vive en la Sabiduría. ¿Qué crees que soy Yo?».

«Sólo puedes ser el Esperado, que ha sido precedido por el hijo de mi amigo Zacarías. ¿Le conociste?».

«Era pariente mío».

«¡Oh, ¿eres pariente del Bautista?!».

«Sí, sacerdote».

«Ha muerto… y no puedo decir: “¡Desdichado!”. Porque ha muerto fiel a la justicia, tras haber cumplido su misión, y porque… ¡Oh, qué tiempos más atroces vivimos! ¿No sería mejor volver a Abraham?».

«Sí. Pero vendrán tiempos aún más atroces, sacerdote».

«¿Tú crees? ¿Roma, no?».

«No sólo Roma. Israel, con su culpabilidad, será la primera cau­sa».

«Es verdad. Dios nos castiga. Lo merecemos. Pero también Roma…

281.15

Habrás oído lo de los galileos asesinados por Pilatos mientras consumaban un sacrificio. Su sangre se unió a la de la víctima. ¡Hasta el mismo altar! ¡Hasta el mismo altar!».

«Sí, lo he oído».

Todos los galileos se alborotan por este atropello. Gritan: «Es verdad que era un falso Mesías. Pero por qué ha tenido que matar a sus seguidores después de haber descargado su mano sobre él? ¿Y por qué en ese momento? ¿Es que quizás eran más pecadores?».

Jesús impone paz y dice: «¿Os preguntáis si éstos eran más pecadores que muchos otros galileos, y si ha sido éste el motivo de su muerte? No, no lo eran. En verdad os digo que han pagado; y que muchos otros pagarán, si no os convertís al Señor. Si no hacéis todos penitencia, pereceréis todos igualmente, en Galilea y en otros lugares. Dios está enojado con su pueblo. Os lo digo. No se crea que son siempre los peores los que sufren el daño. Que cada uno se examine a sí mismo, se juzgue a sí mismo, y no a otros. También esos dieciocho sobre los que cayó la torre de Siloé y los mató no eran los más pecadores de Jerusalén. Os lo digo. Haced penitencia, haced penitencia si no queréis morir aplastados como ellos incluso en el espíritu.

281.16

Ven, sacerdote de Israel. La mesa está preparada. Te toca a ti —porque el sacerdote debe ser siempre enaltecido por la Idea que representa y recuerda—, te toca a ti, patriarca entre todos nosotros más jóvenes, ofrecer y bendecir».

«¡No, Maestro! ¡No! ¡No puedo delante de ti! ¡Tú eres el Hijo de Dios!».

«¡Tú ofreces el incienso ante el altar! ¿No crees que allí está Dios?».

«¡Sí que lo creo! ¡Con todas mis fuerzas!».

«¿Entonces? Si no vacilas en ofrecer dones antes la Gloria santísima del Altísimo, por qué quieres temblar ante la Misericordia, que se ha vestido de carne para traerte —también a ti— la bendición de Dios antes de que te alcance la noche? ¡Oh, no sabéis los de Israel que he corrido sobre mi Divinidad irresistible el velo de la carne precisamente para que el hombre pueda aproximarse a Dios sin morir por ello! Ven y cree, y sé feliz. En ti venero a todos los sacerdotes santos, desde Aarón hasta el último sacerdote justo de Israel; quizás hasta ti, porque, verdaderamente, la santidad sacerdotal languidece entre nosotros como planta sin asistencia».


Notes

  1. dit le prophète en Ez 34, 16.