Los Escritos de Maria Valtorta

357. Jean et les fautes de Judas Iscariote.

357. Juan y las culpas de Judas Iscariote.

357.1

Les magnifiques étoiles d’une sereine nuit de mars resplendissent dans le ciel d’Orient, si visibles et si vives que le firmament semble s’être abaissé comme un baldaquin sur la terrasse de la maison qui a accueilli Jésus. C’est une maison très haute, située à l’un des endroits les plus élevés de la ville, de sorte qu’un horizon infini s’ouvre devant et autour dans toutes les directions. Et si la terre disparaît dans l’obscurité de la nuit que n’égaie pas encore la lune qui décroît, le ciel resplendit de milliers de lumières. C’est vraiment la revanche du firmament qui présente victorieusement ses parterres d’astres, ses prairies de la Voie Lactée, ses planètes gigantesques, ses bosquets de constellations en face des éphémères végétations de la terre qui, bien que séculaires, ne sont toujours qu’une heure par rapport à ce que sont les étoiles depuis le moment où le Créateur a fait le firmament. Et quand on se perd à regarder là-haut, en promenant les yeux sur les jardins éthérés où les plantes sont les galaxies, on a l’impression d’entendre les voix, les chants de ces forêts de splendeurs, de cet orgue énorme de la plus sublime des cathédrales, où il me plaît d’imaginer que les soufflets et les registres sont les vents des courses des astres et que les voix sont les étoiles lancées sur leurs trajectoires. Cette impression s’impose d’autant plus à moi que le silence nocturne de Gadara est absolu. Pas gangouillis de fontaine, pas un chant d’oiseau. Le monde est endormi et les créatures aussi. Les hommes reposent, moins innocents que les autres créatures, d’un sommeil plus ou moins tranquille dans leurs maisons obscures.

357.2

Mais de la porte qui donne sur la terrasse inférieure — car il y a une terrasse plus élevée au-dessus de la plus haute pièce — débouche une grande ombre, à peine visible dans la nuit, mais où se devine la blancheur du visage et des mains qui ressort sur le vêtement sombre. Elle est suivie d’une autre plus petite. Les deux marchent sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller ceux qui dorment peut-être dans la pièce inférieure, et montent l’escalier extérieur qui mène à la plus haute terrasse. Puis ils se prennent par la main et vont ainsi s’asseoir sur un banc qui longe le parapet très haut entourant la terrasse. A cause du banc très bas et du parapet très haut, tout disparaît à leurs yeux. Même s’il y avait le plus beau clair de lune, descendu pour éclairer le monde, pour eux cela ne servirait de rien. La ville est cachée tout entière par le mur, et avec elle, dans l’obscurité de la nuit, les ombres les plus sombres des montagnes voisines. Seul le ciel se découvre à eux avec les constellations du printemps et les magnifiques étoiles d’Orion, de Rigel et de Bételgeuse, d’Aldébaran, de Persée, d’Andromède et de Cassiopée, ainsi que les Pléiades unies comme des sœurs ; Vénus couleur de saphir et éclatante comme le diamant, le pâle rubis de Mars et le topaze de Jupiter sont les rois du peuple astral et palpitent comme pour saluer le Seigneur, multipliant leurs rayonnements de lumière en l’honneur de la Lumière du monde.

Pour les admirer, Jésus lève la tête en l’appuyant contre le haut muret et Jean l’imite, le regard perdu là-haut où l’on peut ignorer le monde… Puis Jésus dit :

« Et maintenant que nous nous sommes purifiés au spectacle des étoiles, prions. »

Il se lève et Jean l’imite. Une prière prolongée, silencieuse, pressante, tout âme, les bras en croix, le visage levé, tourné vers l’orient où s’annonce une première lueur lunaire. Puis le “ Notre Père ” qu’ils disent ensemble, lentement, non pas une fois mais trois, et en mettant toujours plus d’insistance dans leur demande, ce que leurs voix manifestent clairement. C’est une supplication qui sépare l’âme de la chair, si ardente qu’elle les laisse sur les chemins de l’infini.

Puis vient le silence. Ils s’asseyent là où ils étaient avant, tandis que la lune éclaire toujours plus la terre endormie.

357.3

Jésus passe un bras autour des épaules de Jean et l’attire à lui :

« Dis-moi donc ce que tu sens devoir me confier. Qu’est-ce que mon Jean a vu à l’aide de la lumière spirituelle, dans l’âme ténébreuse de notre compagnon ?

– Maître… je me repens de t’avoir dit cela. Je ferais deux péchés…

– Pourquoi ?

– Parce que je te ferais souffrir en te révélant ce que tu ne sais pas, et… parce que… Maître, est-ce un péché de dire le mal que nous voyons dans un autre ? Oui, n’est-ce pas ? Alors comment pourrais-je le dire, en blessant la charité !… »

Jean est angoissé.

Jésus éclaire son âme :

« Ecoute, Jean : qu’est-ce qui compte le plus pour toi, le Maître ou le condisciple ?

– Le Maître, Seigneur. C’est toi qui comptes le plus.

– Et que suis-je pour toi ?

– Le Commencement et la Fin. Tu es Tout.

– Crois-tu que, puisque je suis Tout, je sais aussi tout ce qui existe ?

– Oui, Seigneur. C’est la raison pour laquelle je suis très embarrassé. Car je pense que tu sais et que tu souffres. Et parce que je me souviens que tu m’as dit un jour que parfois tu es l’homme, seulement l’homme, et que par conséquent le Père te fait connaître ce que c’est que d’être homme, un homme qui doit se conduire selon la raison. Et je pense aussi que Dieu, ton Père, par pitié pour toi, pourrait te cacher ces laides réalités…

– Tiens-t’en à cette pensée, Jean, et parle en toute confiance. Confier ce que tu sais à celui qui pour toi est “ Tout ”, ce n’est pas un péché. Car le “ Tout ” ne se scandalise pas, ne médit pas et ne manquera pas de charité, pas même en pensée, à l’égard du malheureux. Ce serait un péché si tu disais ce que tu sais à quelqu’un qui ne peut être tout amour, à tes compagnons par exemple, qui seraient médisants et même attaqueraient le coupable sans miséricorde, nuisant ainsi à lui et à eux-mêmes. Car il faut faire preuve de miséricorde, une miséricorde toujours d’autant plus grande que l’on se trouve devant une pauvre âme qui souffre de tous les maux. Un médecin, un infirmier compatissant, ou bien une mère, s’il s’agit d’un simple malaise s’impressionnent peu et ne se tourmentent pas de la guérison. Mais si l’enfant ou l’homme est très malade, en danger de mort, déjà gangrené et paralysé, comme ils luttent pour le guérir, en surmontant toute répugnance et fatigue ! N’en est-il pas ainsi ?

– Si, Maître, dit Jean qui a pris sa pose habituelle, le bras enlacé autour du cou de son Maître et la tête appuyée sur son épaule.

– Eh bien ! Ce n’est pas tout le monde qui sait se montrer miséricordieux envers les âmes malades. On doit donc être prudent pour révéler leurs maux, pour que le monde ne les fuie pas et ne leur nuise pas par son mépris. Un malade qui se voit méprisé s’assombrit et son état empire. En revanche, si on le soigne avec une joyeuse espérance, il peut guérir, car la bonne humeur confiante de celui qui l’assiste le pénètre et renforce l’efficacité du remède. Mais tu sais que je suis la Miséricorde et que je n’humilierai pas Judas. Parle donc sans scrupules. Tu n’es pas un espion. Tu es un fils qui confie à son père, avec une affectueuse anxiété, le mal découvert dans son frère pour que le père le soigne. Allons… »

357.4

Jean pousse un profond soupir, puis il baisse encore plus la tête en la laissant glisser sur la poitrine de Jésus, et dit :

« Comme il est pénible de parler de corruption !… Seigneur… Judas est impur… et il cherche à m’amener à l’impureté. Qu’il me méprise ne m’importe guère. Mais je suis affligé qu’il vienne vers toi, souillé par ses amours. Depuis son retour, il m’a tenté plusieurs fois. Quand le hasard nous laisse seuls – et il essaie de toutes manières que cela arrive –, il ne fait que parler de femmes… et j’en éprouve le dégoût que j’aurais si on m’immergeait dans une pourriture qu’on essaierait de m’introduire dans la bouche…

– Mais en es-tu troublé au plus profond de toi-même ?

– Troublé, comment ? Mon âme frémit. Ma raison crie contre ces tentations… Moi, je ne veux pas être corrompu…

– Mais ta chair, qu’éprouve-t-elle ?

– Elle frissonne d’horreur.

– Cela seulement ?

– Oui, Maître. Et alors je pleure, car il me semble que Judas ne pourrait faire une plus grande offense à quelqu’un qui s’est consacré à Dieu. Dis-moi : cela portera-t-il atteinte à mon of­frande ?

– Non, pas plus qu’une poignée de boue jetée sur une plaque de diamant. Elle ne raie pas la plaque, elle ne la pénètre pas. Il suffit d’une coupe d’eau pure que l’on jette sur elle pour la rendre nette. Elle devient plus belle qu’auparavant.

– Purifie-moi, alors.

– Ta charité te purifie, et aussi ton ange gardien. Rien ne reste sur toi. Tu es un autel purifié sur lequel Dieu descend.

357.5

Et qu’est-ce que Judas fait d’autre ?

– Seigneur, il… Ah, Seigneur ! »

La tête de Jean glisse encore plus bas.

« Quoi ?

– Il… ce n’est pas vrai que c’est son argent qu’il te donne pour les pauvres. C’est de l’argent des pauvres qu’il dérobe pour lui, pour qu’on le loue d’une générosité qui n’existe pas. Tu l’as rendu furieux parce qu’au retour du mont Thabor tu lui as enlevé tout l’argent. Et il m’a dit : “ Il y a des espions parmi nous. ” Je lui ai répliqué : “ Pour espionner quoi ? Tu voles, peut-être ? ” “ Non, m’a-t-il répondu, mais je suis prévoyant et j’ai deux bourses. Quelqu’un l’a dit au Maître et il m’a imposé de tout donner ; il me l’a imposé si fortement que j’ai été pour ainsi dire obligé de le faire. ” Mais ce n’est pas vrai, Seigneur, qu’il fait cela par prévoyance. Il le fait pour avoir de l’argent. Je pourrais l’affirmer avec la quasi certitude de dire la vérité.

– Quasi certitude ! Ce doute, oui, est une légère faute. Tu ne peux l’accuser d’être un voleur, si tu n’en es pas absolument certain. Les actions des hommes ont parfois une apparence fâ­cheuse, tout en étant bonnes.

– C’est vrai, Maître. Je ne l’accuserai plus, pas même en pensée. Mais qu’il ait deux bourses et que celle qu’il dit lui appartenir et qu’il te donne est encore la tienne et qu’il le fait pour être loué, c’est vrai. Moi, je ne ferais pas cela. Je sens qu’il n’est pas bien de le faire. »

– Tu as raison.

357.6

Que dois-tu dire encore ? »

Jean lève un visage épouvanté, il est sur le point de parler mais préfère se taire et il glisse à genoux en cachant son visage dans le vêtement de Jésus, qui pose la main sur ses cheveux.

« Allons, donc ! Tu pourrais avoir mal vu. Je t’aiderai à bien voir. Tu dois aussi me dire ce que tu penses des causes probables du péché de Judas.

– Seigneur, Judas se sent privé de la force qu’il voudrait pour faire des miracles… Tu sais qu’il y a toujours aspiré… Tu te souviens d’En-Dor ? Et au contraire… c’est lui qui en fait le moins. Depuis qu’il est revenu, il ne réussit plus à rien… Même la nuit il s’en plaint en songe comme si c’était un cauchemar et… Maître, mon Maître !

– Allons, parle. Va jusqu’au bout.

– Il lance des imprécations… et il fait de la magie. Cela, ce n’est ni mensonge ni doute. Je l’ai vu de mes propres yeux. Il m’a choisi comme compagnon parce que je dors profondément, ou plutôt parce que je dormais profondément. Maintenant, je l’avoue, je le surveille et mon sommeil est moins profond car, dès qu’il remue, je l’entends… J’ai mal fait, peut-être. Mais j’ai feint de dormir pour voir ce qu’il faisait. Et deux fois je l’ai vu et entendu faire des choses qui ne conviennent pas. Je ne m’y connais pas en magie, mais c’est bien de cela qu’il s’agit.

– Seul ?

– Oui et non. A Tibériade, je l’ai suivi. Il est allé dans une maison. J’ai demandé par la suite qui y habite. C’est un homme qui fait de la nécromancie avec d’autres. Et quand Judas est sorti, presque au matin, j’ai compris d’après les paroles échangées qu’ils se connaissaient ; et ils sont si nombreux… pas tous des étrangers. Il demande au démon la force que tu ne lui donnes pas. C’est pour cela que j’ai fait au Père le sacrifice de la mienne, pour qu’il la lui passe et qu’il ne soit plus pécheur.

– Tu devrais lui donner ton âme, mais cela ni le Père ni moi ne le permettrions… »

357.7

Un long silence. Puis Jésus dit d’une voix lasse :

« Allons, Jean. Descendons. Nous nous reposerons en attendant l’aube.

– Tu es plus triste qu’avant, Seigneur ! J’ai mal fait de parler !

– Non. Je le savais déjà. Mais toi, au moins, tu es soulagé… et c’est cela qui compte.

– Seigneur, dois-je le fuir ?

– Non. Ne crains rien. Satan ne nuit pas aux Jean. Il les terrorise, mais il ne peut leur enlever la grâce que Dieu ne cesse de leur donner. Viens. Au matin je parlerai, et ensuite nous irons à Pella. Il faut faire vite, car le fleuve a déjà grossi à cause de la fonte des neiges et de la pluie de ces derniers jours. Il sera bientôt en crue, d’autant plus que le halo de la lune annonce des pluies abondantes… »

Ils descendent et disparaissent dans la pièce située sous la terrasse.

357.8

C’est le matin, un matin de mars. Aussi nuages et éclaircies se succèdent-ils dans le ciel. Mais il y a plus de nuages que d’éclaircies et ils tendent à couvrir le ciel. Un air chaud souffle par à-coups syncopés et alourdit l’atmosphère en la voilant d’une poussière venue peut-être des régions du haut plateau.

« Si le vent ne change pas, ce sera de l’eau ! » dit sentencieusement Pierre en quittant la maison avec les autres.

Jésus sort en dernier après avoir pris congé du maître de maison et part avec lui. Ils se dirigent vers une place. Après quelques pas, ils sont arrêtés par un officier romain accompagné de soldats.

« C’est toi, Jésus de Nazareth ?

– Oui.

– Que fais-tu ?

– Je parle aux foules.

– Où ?

– Sur la place.

– Des paroles séditieuses ?

– Non. Des préceptes de vertus.

– Attention ! Ne mens pas ! Rome en a assez des faux dieux.

– Viens, toi aussi. Tu verras que je ne mens pas. »

L’homme qui a logé Jésus sent qu’il doit intervenir :

« Mais depuis quand tant de questions à un rabbi ?

– Il est dénoncé comme séditieux.

– Séditieux ? Lui ? Mais tu te trompes, Marius Sévère ! C’est l’homme le plus doux de la terre. C’est moi qui te le dis. »

L’officier hausse les épaules et répond :

« Cela vaut mieux pour lui. Mais c’est pour cette raison qu’on l’a dénoncé au centurion. Va, donc. Le voilà prévenu. »

Et il fait demi-tour pour s’en aller avec ses subalternes.

« Mais qui cela peut-il être ? Moi, je ne comprends pas ! S’étonnent plusieurs.

– Ne cherchez pas à comprendre » répond Jésus. « C’est inutile. Allons pendant qu’il y a beaucoup de monde sur la place. Puis nous partirons également d’ici. »

357.9

Ce doit être une place plutôt commerciale. Ce n’est pas un marché mais presque, car elle est entourée de magasins où sont entreposées toutes sortes de marchandises. Une foule de gens s’y pressent. Il y a aussi beaucoup de monde sur la place ; quelqu’un fait signe que c’est Jésus, et le “ Nazaréen ” est aussitôt entouré. Il y a des gens de toutes classes et de toutes nationalités. Certains sont venus par vénération, les autres par curiosité.

Jésus fait signe qu’il va parler.

« Ecoutons-le ! Dit un Romain qui sort d’un magasin.

– Est-ce que ce sera pour entendre une lamentation ? lui répond un camarade.

– Ne crois pas cela, Constance. Il est moins indigeste que l’un ou l’autre de nos rhéteurs habituels.

– Paix à ceux qui m’écoutent ! Il est dit dans Esdras, dans la prière d’Esdras[1] : “ Et que dirons-nous maintenant, ô notre Dieu, après ce qui est arrivé ? Car nous avons abandonné tes commandements, ceux que tu nous as prescrits par l’intermédiaire de tes serviteurs… ”

– Arrête-toi, toi qui parles ! C’est nous qui te donnons le sujet » crient une poignée de pharisiens qui se fraient un chemin au milieu de la foule.

Presque aussitôt l’escorte armée réapparaît et s’arrête dans le coin le plus proche. Les pharisiens se tiennent maintenant en face de Jésus.

« C’est toi, le Galiléen ? Jésus de Nazareth ?

– Oui !

– Loué soit Dieu que nous t’ayons trouvé ! »

Vraiment ils ont des visages si haineux qu’ils ne semblent pas heureux de la rencontre… Le plus âgé prend la parole :

« Nous te suivions depuis plusieurs jours, mais nous arrivions toujours après ton départ.

– Pourquoi me suivez-vous ?

– Parce que tu es le Maître et que nous voulons être éclairés sur un point obscur de la Loi.

– Il n’y a pas de points obscurs dans la Loi de Dieu.

– En elle, non. Mais, hé ! Hé !… Mais sur la Loi sont venues se greffer les “ choses ajoutées ”, comme tu dis, hé ! Hé !… et elles ont créé l’obscurité.

– De la pénombre, tout au plus. Et il suffit de tourner son intelligence vers Dieu pour la dissiper.

– Tout le monde ne sait pas le faire. Nous, par exemple, nous restons dans la pénombre. Tu es le Rabbi, hé ! Hé ! Aide-nous donc.

357.10

– Que désirez-vous savoir ?

– Nous voulions savoir s’il est permis à l’homme de répudier sa femme pour un motif quelconque. C’est une chose qui arrive souvent, et chaque fois cela fait du bruit là où cela arrive. Les gens s’adressent à nous pour savoir si c’est permis et nous répondons suivant les cas.

– En approuvant le fait accompli quatre-vingt-dix fois sur cent. Pour les dix pour cent que vous n’approuvez pas, il s’agit des pauvres ou de vos ennemis.

– Comment le sais-tu ?

– Parce qu’il en est ainsi de toutes les affaires humaines. Et j’ajoute une troisième catégorie : celle où, si le divorce était permis, il se justifierait davantage, comme dans les vrais cas pénibles tels qu’une lèpre incurable, une condamnation à vie, ou une maladie honteuse…

– Alors, pour toi, ce n’est jamais permis ?

– Ni pour moi, ni pour le Très-Haut, ni pour aucune âme droite. N’avez-vous pas lu que le Créateur, au commencement des jours, a créé l’homme et la femme ? Et qu’il les créa mâle et femelle ? Il n’avait pas besoin de le faire. S’il l’avait voulu, il aurait pu, pour le roi de la Création fait à son image et à sa ressemblance, créer un autre mode de procréation, qui aurait été tout aussi bon, bien que différent de tout autre moyen naturel. Et il a dit : “ Pour cette raison, l’homme quittera son père et sa mère et s’unira à la femme, et les deux seront une seule chair. ” Dieu les a liés en une seule unité. Ils ne sont donc plus “ deux ” chairs mais “ une ” seule. Ce que Dieu a uni, parce qu’il a vu que c’était “ bon ”, que l’homme ne le sépare pas, car si cela arrivait, ce ne serait plus bon.

357.11

– Dans ce cas, pourquoi Moïse a-t-il donc dit : “ Si un homme a pris une femme, mais qu’elle n’a pas trouvé grâce à ses yeux pour quelque chose de honteux, il lui écrira un libelle de répudiation, le lui remettra en mains propres et la renverra de sa maison ” ?

– C’est à cause de la dureté de votre cœur : pour éviter, par un ordre, des désordres trop graves. C’est pour cela qu’il vous a permis de répudier vos femmes. Mais au commencement, il n’en était pas ainsi. Car la femme n’est pas une bête qui, selon les caprices de son maître ou les libres circonstances naturelles, est soumise à tel ou tel mâle, chair sans âme qui s’accouple pour la reproduction. Vos femmes ont une âme comme vous, et il n’est pas juste que vous la piétiniez sans pitié. S’il est dit dans sa condamnation : “ Tu seras soumise au pouvoir de ton mari et il te dominera ”, cela doit se produire selon la justice et non selon la tyrannie qui lèse les droits d’une âme libre et digne de respect.

En répudiant alors que ce n’est pas permis, vous offensez l’âme de votre compagne, la chair jumelle qui s’est unie à la vôtre, ce tout qu’est la femme que vous avez épousée en exigeant son honnêteté, alors que vous, parjures, vous allez vers elle, déshonorés, diminués, parfois corrompus, et vous continuez à l’être en profitant de toute bonne occasion pour la blesser et donner libre cours à vos passions insatiables. Vous faites de vos femmes des prostituées ! Pour aucun motif, vous ne pouvez vous séparer de la femme qui vous est unie selon la Loi et la Bénédiction. C’est seulement dans le cas où la grâce vous touche, quand vous comprenez que la femme n’est pas un objet que l’on possède mais une âme et donc qu’elle a des droits égaux aux vôtres d’être reconnue comme faisant partie intégrante de l’homme et non pas comme son objet de plaisir, et c’est seulement dans le cas où votre cœur est assez dur pour ne pas épouser une femme après avoir profité d’elle comme d’une courtisane, seulement pour faire disparaître le scandale de deux personnes qui vivent ensemble sans la bénédiction de Dieu sur leur union que vous pouvez renvoyer une femme. C’est qu’alors il ne s’agit pas d’union mais de fornication, et qui souvent n’est pas honorée par la venue des enfants supprimés contre nature ou éloignés comme déshonorants.

Dans aucun autre cas, dans aucun autre. Car si vous avez des enfants illégitimes d’une concubine, vous avez le devoir de mettre fin au scandale en l’épousant si vous êtes libres. Je ne m’arrête pas à l’adultère consommé au détriment d’une femme ignorante. Pour cela, il y a les pierres de la lapidation et les flammes du shéol. Mais pour celui qui renvoie son épouse légitime parce qu’il en est las et qui en prend une autre, il n’y a qu’un jugement : c’est un adultère. Il en est de même pour celui qui prend une femme répudiée, car si l’homme s’est arrogé le droit de séparer ce que Dieu a uni, l’union matrimoniale continue aux yeux de Dieu et celui qui passe à une seconde femme sans être veuf est maudit. Quant à l’homme qui, après avoir répudié sa femme, après l’avoir abandonnée aux craintes de l’existence qui l’obligent à se remarier pour avoir du pain, la reprend si elle reste veuve du second mari, il est également maudit. Car, bien qu’étant veuve, elle a été adultère par votre faute et vous redoubleriez son adultère. Avez-vous compris, ô pharisiens qui me tentez ? »

Ceux-ci s’en vont tout penauds, sans répondre.

357.12

« Cet homme est sévère. S’il était à Rome, il verrait pourtant fermenter une boue encore plus fétide » dit un Romain.

Certains hommes de Gadara murmurent aussi :

« Il est difficile d’être homme, s’il faut être aussi chaste !… »

D’autres disent plus haut :

« Si telle est la situation de l’homme par rapport à la femme, il vaut mieux ne pas se marier. »

Les apôtres eux aussi tiennent ce raisonnement tandis qu’ils reprennent la route vers la campagne, après avoir quitté les habitants de Gadara. Judas en parle d’un air méprisant, Jacques avec respect et réflexion. Jésus répond à l’un et à l’autre :

« Tous ne comprennent pas cela, ou alors pas comme il faut. Certains, en effet, préfèrent le célibat pour être libres de satisfaire leurs vices. D’autres pour éviter la possibilité de pécher, en n’étant pas de bons maris. Mais il y en a seulement quelques-uns auxquels il est accordé de comprendre la beauté d’être exempts de sensualité et même d’un désir honnête de la femme. Et ce sont les plus saints, les plus libres, les plus angéliques sur la terre. Je parle de ceux qui deviennent eunuques pour le Royaume de Dieu. Il y a des hommes qui naissent ainsi; d’autres que l’on a rendus tels. Pour les premiers, leurs impuissance doit susciter la compassion, pour les seconds il s’agit d’un attentat condamnable. Mais il y a enfin la troisième catégorie : celle des eunuques volontaires qui, sans se faire violence et par conséquent avec un double mérite, savent adhérer à la demande de Dieu et vivent comme des anges pour que l’autel délaissé de la terre porte encore des fleurs et de l’encens pour le Seigneur. Ces derniers refusent de satisfaire la partie inférieure de leur être pour faire grandir en eux la partie supérieure, par laquelle ils fleurissent au Ciel dans les parterres les plus proches du trône du Roi. Et en vérité, je vous dis que ce ne sont pas des mutilés, mais des êtres doués de ce qui manque à la plupart des hommes. Non pas les objets d’un mépris imbécile, mais plutôt d’une grande vénération. Que celui qui doit le comprendre le comprenne et le respecte, s’il le peut. »

Les apôtres mariés chuchotent entre eux.

« Qu’avez-vous ? demande Jésus.

– Et nous ? » dit Barthélemy au nom de tous. « Nous ne savions pas cela et nous avons pris femme. Mais il nous plairait d’être comme tu dis…

– Il ne vous est pas défendu de l’être désormais. Vivez dans la continence en voyant dans votre compagne une sœur, et vous en aurez grand mérite aux yeux de Dieu. Mais hâtez le pas pour être à Pella avant la pluie[2]. »

357.1

Las magníficas estrellas de una serena noche de marzo resplandecen en el cielo de Oriente; tan amplias y vivaces, que parece que el firmamento haya descendido, como un baldaquino, hacia la terraza de la casa que ha acogido a Jesús: una casa muy alta, y edificada en uno de los puntos más altos de la ciudad; de modo que el horizonte infinito se abre delante, y alrededor, de quien mira, desde cualquier ángulo. Y, si la tierra — no alegrada todavía por la Luna, que está en su fase menguante — se anula en la obscuridad de la noche, el cielo resplandece con un sinfín de luces. Es verdaderamente la revancha del firmamento, que expone victoriosamente sus pensiles de astros, sus praderas de Galatea, sus gigantes planetarios, sus bosques de constelaciones contra la efímera vegetación de la tierra, que, aunque sea secular, es, en todo caso, de una hora respecto a éstas, que existen desde cuando el Creador hizo el firmamento. Y, perdiéndose mirando arriba, paseando la mirada por esas esplendorosas avenidas, en que las estrellas son los árboles, uno tiene la impresión de percibir las voces, los cantos de aquellas florestas de esplendores, de ese enorme órgano de la más sublime de las catedrales, en que gustosamente imagino que hacen de fuelles y registros los vientos de las carreras astrales, y de voces las estrellas lanzadas en sus trayectorias. Y parece percibirse mucho más, dado que el silencio nocturno de esta Gadara durmiente es absoluto. No canta una fuente, no canta un pájaro. El mundo duerme, duermen las criaturas. Duermen los hombres — menos inocentes que las otras criaturas — sus sueños, más o menos tranquilos, en las casas obscuras.

357.2

Pero, por la puerta de la habitación que da a la terraza inferior — porque hay otra, superior, que está encima de la habitación más alta — se muestra una sombra alta, apenas visible en la noche, por la blancura del rostro y de las manos que contrastan con el indumento obscuro; la sigue otra más baja. Caminan de puntillas para no despertar a los que quizás duermen en la habitación de abajo, y de puntillas suben la escalera externa que conduce a la última terraza. Luego se toman de la mano y van, así, a sentarse en un banco que está adosado a todo lo largo del antepecho, muy alto, que circunda la terraza. El banco bajo y el antepecho alto hacen que todas las cosas desaparezcan ante sus ojos. Aunque hubiera en el cielo la más clara Luna, que bajara a iluminar el mundo, para ellos no sería nada; porque la ciudad está escondida toda, y con ella las sombras más obscuras, en la obscuridad de la noche, de los montes cercanos. Solamente se les muestra el cielo con sus constelaciones de primavera y las magníficas estrellas de Orión (Rigel y Betelgeuse), Aldebarán, Perseo, y Andrómeda y Casiopea, y las Pléyades unidas como hermanas. Y Venus (zafíreo y diamantino), Marte (de pálido rubí) y el topacio de Júpiter son los reyes del pueblo astral, y titilan, titilan como saludando al Señor, acelerando sus latidos de luz para la Luz del mundo.

Jesús levanta la cabeza, apoyándola contra el alto pretil, para mirarlas; Juan hace lo mismo, perdiéndose mirando arriba, donde se puede ignorar el mundo… Luego Jesús dice: «Y ahora que nos hemos limpiado en las estrellas, vamos a orar».

Se pone en pie. Juan también. Una larga oración, silenciosa, apremiante, toda alma, con los brazos abiertos en cruz, la cara alzada vuelta hacia oriente, donde se preludia un primer claror de luna. Y luego el Pater dicho en común, lentamente, no una vez sino tres, y — lo manifiesta claramente la voz — con un progresivo aumento de insistencia en la súplica; una súplica que es tan ardiente, que separa de la carne el alma y deja a ésta por los caminos del infinito.

Luego silencio. Se sientan donde estaban antes, mientras la Luna blanquece cada vez más la tierra durmiente.

357.3

Jesús pasa un brazo por los hombros de Juan, le arrima hacia sí, y dice: «Dime, pues, lo que sientes que tienes que decirme. ¿Qué cosas son las que mi Juan ha intuido, con ayuda de la luz espiritual, en el alma tenebrosa del compañero?».

«Maestro… estoy arrepentido de haberte dicho eso. Cometeré dos pecados…».

«¿Por qué?».

«Porque te voy a causar dolor manifestándote incluso lo que no sabes, y… porque… Maestro, ¿es pecado manifestar el mal que vemos en otro? Sí, ¿no es verdad? ¿Y entonces cómo puedo decir esto si lesiono la caridad!…». Juan está angustiado.

Jesús da luz a su alma: «Escucha, Juan. ¿Para ti es más el Maestro o el condiscípulo?».

«El Maestro, Señor. Tú estás por encima de todos».

«¿Y qué soy Yo para ti?».

«El Principio y el Fin. Eres el Todo».

«¿Crees que Yo, siendo Todo, conozco también todo lo que existe?».

«Sí, Señor. Por esto siento una gran contrariedad dentro de mí. Porque pienso que sabes y sufres. Y porque recuerdo que un día me dijiste que en ocasiones Tú eres el Hombre, sólo el Hombre, y por tanto el Padre te hace conocer lo que es ser hombre que debe conducirse según razón. Y pienso también que Dios, por compasión hacia ti, podría ocultarte estas feas verdades…».

«Atente a este pensamiento, Juan. Y habla. Con confidencia. Confiar lo que sabes a quien para ti es “Todo” no es pecado. Porque el “Todo” no se escandaliza, ni murmura, ni faltará a la caridad, ni siquiera con el pensamiento, hacia el desdichado. Sería pecado si dijeras lo que sabes a quien no puede ser todo amor, a tus compañeros por ejemplo, que murmurarían, e incluso agredirían sin misericordia al culpable, dañándole a él y a sí mismos. Porque hay que tener misericordia, una misericordia que ha de ser mucho mayor en la medida en que tengamos ante nosotros a una pobre alma enferma de todas las enfermedades: un médico, un enfermero compasivo, o una madre, si es poco el mal que sufre un enfermo, se impresionan poco, y poco luchan por curarle; pero si el hijo, o el hombre, está muy enfermo, en peligro de muerte, ya gangrenoso y paralizado, ¡cómo luchan, venciendo repugnancias y fatigas, para curarle! ¿No es así?».

«Así es, Maestro» dice Juan, que ahora está en esa postura suya del brazo en torno al cuello del Maestro y la cabeza apoyada en su hombro.

«Pues bien, no todos saben tener misericordia con las almas enfermas. Por eso hay que ser prudentes en dar a conocer sus males, para que el mundo no las rehúya y no las dañe con el desprecio. Un enfermo que se ve menospreciado se entristece, y empeora. Si, por el contrario, le asisten con alegre esperanza, puede sanar, porque la alegría esperanzada del que le asiste entra en él y ayuda a la acción de la medicina. Pero tú sabes que Yo soy la Misericordia y que no humillaré a Judas. Habla, pues, sin escrúpulos. No eres un espía. Eres un hijo que confía a su padre, con amorosa solicitud, el mal que ha descubierto en su hermano, para que el padre le asista. ¡Ánimo, pues…!».

357.4

Juan emite un fuerte suspiro, luego inclina aún más la cabeza, dejándola caer hasta el pecho de Jesús, y dice: «¡Cuán penoso es hablar de cosas corrompidas!… Señor… Judas es un impuro… y me tienta a la impureza. No me importan sus escarnios hacia mí, lo que me duele es que se acerque a ti manchado de sus amores. Desde que ha vuelto me ha tentado varias veces. Cuando las circunstancias nos dejan solos — cosa que él provoca en todos los modos — no hace otra cosa que hablar de mujeres… y yo siento la repulsa que sentiría si me sumergieran en materias fétidas que trataran de introducirme en la boca…».

«¿Pero en lo profundo te sientes turbado?».

«¿En qué sentido turbado? Mi alma se estremece. La razón grita contra estas tentaciones… No quiero ser corrompido…».

«¿Y tu carne qué hace?».

«Se retrae horrorizada».

«¿Solamente esto?».

«Esto, Maestro, y lloro entonces, porque me parece que Judas no podría ofender más a quien se ha consagrado a Dios. Dime: ¿esto va a lesionar mi ofrenda?».

«No. No más que un puñado de barro arrojado a una lámina de diamante. No raya la lámina, no penetra en ella. Para limpiarla basta echar encima una copa de agua. Y queda más bonita que antes».

«Límpiame entonces».

«Tu caridad te limpia, y tu ángel. Nada queda en ti. Eres un altar limpio y Dios baja a él.

357.5

¿Qué más hace Judas?».

«Señor, él… ¡Oh, Señor!» la cabeza de Juan desciende más todavía.

«¿Qué?».

«Él… No es verdad que sea dinero suyo el que te da para los pobres; es el dinero de los pobres que roba para sí: para ser alabado por una generosidad no verdadera. Le enfureciste al quitarle todo el dinero al regreso del Tabor. Y a mí me dijo: “Hay soplones entre nosotros”. Yo dije: “¿Soplones de qué? ¿Acaso robas?”. “No” me respondió, “pero soy previsor y hago dos bolsas. Alguno se lo ha dicho al Maestro y Él me ha impuesto que dé todo; tan enérgicamente lo ha impuesto, que me he visto constreñido a hacerlo”. Pero no es verdad, Señor, que haga eso por previsión. Lo hace para tener dinero. Podría declararlo con la casi certeza de decir la verdad».

«¡Casi certeza! Esta duda sí que es leve culpa. No puedes acusarle de ser ladrón si no estás absolutamente seguro de ello. Las acciones de los hombres a veces tienen apariencia mala y son buenas».

«Es verdad, Maestro. No le volveré a acusar, ni siquiera con el pensamiento. De todas formas, eso de que tiene dos bolsas, y que la que dice que es suya y te da es tuya, y que lo hace buscando alabanza, eso es verdad. Y yo eso no lo haría. Siento que no está bien hacerlo».

«Tienes razón.

357.6

¿Qué más debes decir?».

Juan alza una cara asustada, abre la boca para hablar, pero la cierra. Se desliza hasta caer de rodillas. Esconde la cara en la túnica de Jesús. Él le pone una mano sobre sus cabellos.

«¡Ánimo! Quizás has juzgado equivocadamente. Yo te ayudaré a juzgar bien. Me debes decir también lo que piensas acerca de las posibles causas de que Judas peque».

«Señor, Judas se siente sin la fuerza que querría para hacer milagros… Tú sabes que siempre lo ha deseado fogosamente… ¿Te acuerdas de Endor? Y, sin embargo, es el que hace menos milagros. Y… bueno… desde que ha regresado, ya no consigue nada… y por la noche se queja de ello incluso en sueños, como si fuera una pesadilla, y… ¡Maestro, Maestro mío!».

«Venga. Habla. Todo».

«Impreca… y practica la magia. Esto no es una mentira ni una duda. Le he visto. Me elige como compañero porque tengo un sueño profundo. Es más, lo tenía. Ahora, lo confieso, le vigilo, y mi sueño es menos profundo porque en cuanto se mueve le oigo… Quizás he hecho mal. Pero he fingido dormir para ver lo que hacía. Y dos veces le he visto y oído hacer cosas feas. No es que yo entienda de magia, pero eso es magia».

«¿Sólo?».

«No y sí. En Tiberíades le seguí. Fue a una casa. Después pregunté quién vivía allí. Uno que practica la necromancia con otros. Y, cuando Judas salió, casi de mañana, por las palabras que dijeron, comprendí que se conocen y que son muchos… y no todos extranjeros. Pide al demonio la fuerza que Tú no le das. Por esto sacrifico yo mi fuerza al Padre, para que se la pase a él, y él deje de ser pecador».

«Haría falta que le dieras tu alma. Pero eso no lo permitiríamos ni el Padre ni Yo…».

357.7

Un largo silencio. Luego dice Jesús con voz cansada: «Vamos, Juan. Vamos a bajar y a descansar en espera del alba».

«¡Estás más triste que antes, Señor! ¡No debía haber hablado!».

«No. Yo ya lo sabía. Pero tú al menos estás más tranquilo… y eso es lo que importa…».

«Señor, ¿debo evitarle?».

«No. No temas. Satanás no perjudica a los Juanes. Los aterroriza, pero no puede quitarles la gracia que Dios continuamente les otorga. Ven. Por la mañana voy a hablar. Luego iremos a Pel.la. No podemos demorarnos, porque el río está crecido, por la fusión de las nieves y el agua de los días pasados. Pronto estará colmo, y mucho más teniendo en cuenta que la Luna aureolada predice lluvias abundantes…».

Bajan y deja de vérselos en la habitación de debajo de la terraza.

357.8

Es por la mañana. Una mañana de marzo. Por tanto, nubes y claros se alternan en el cielo. Pero las nubes sobrepujan a los claros y tratan de apoderarse del cielo. Un aire caliente, con rachas rítmicas, sopla y carga el ambiente enrareciéndolo con polvo venido probablemente de las zonas del altiplano.

«¡Si no cambia el viento, esto es agua!» sentencia Pedro al salir de la casa con los otros.

El último en salir es Jesús, que se despide de las dueñas de la casa. El dueño acompaña a Jesús. Se dirigen hacia una plaza.

Dados pocos pasos, los para un suboficial romano que está con otros soldados. «¿Eres Tú Jesús de Nazaret?».

«Lo soy».

«¿Qué haces?».

«Hablo a las gentes».

«¿Dónde?».

«En la plaza».

«¿Palabras sediciosas?».

«No. Preceptos de virtud».

«¡Ojo! No mientas. Roma ya tiene suficientes falsos dioses».

«Ven tú también. Verás como no estoy mintiendo».

El hombre que ha alojado a Jesús siente el deber de intervenir: «¡Pero desde cuándo tantas preguntas a un rabí?».

«Denuncia de hombre sedicioso».

«¿Sedicioso? ¿Él? ¡Pero hombre, Mario Severo, eso es una ilusión! Éste es el hombre más manso de la Tierra. Te lo digo yo».

El suboficial se encoge de hombros y responde: «Mejor para Él. Pero esta es la denuncia que ha recibido el centurión. Que vaya si quiere. Está avisado». Se da la media vuelta y se marcha con los subalternos.

«¿Pero quién puede haber sido? ¡No lo entiendo!» dicen varios.

Jesús responde: «Dejad de entender. No hace falta. Vamos a la plaza mientras haya muchos. Luego nos marcharemos también de aquí».

357.9

Debe ser una plaza más bien comercial. No es un mercado pero poco le falta, porque está circundada de fondaques en los que hay depósitos de mercancías de todos los tipos. Y la gente se aglomera en ellos. Por tanto, hay mucha gente en la plaza, y alguno hace señas de que está Jesús, de forma que pronto un círculo de gente está alrededor del “Nazareno”. Un círculo compuesto de personas de todo tipo, clase y nación. Quién por veneración, quién por curiosidad.

Jesús hace un gesto de querer hablar.

«¡Vamos a escucharle!» dice un romano que sale de un almacén.

«¿No nos tocará oír alguna lamentación?» le responde un compañero suyo.

«No lo creas, Constancio. Es menos indigesto que uno de nuestros oradores de rigor».

«¡Paz a quien me escucha! Está escrito en el libro de Esdras, enbla oración de Esdras[1]: “¿Qué vamos a decir ahora, Dios nuestro, después de las cosas que han sucedido? ¿Qué, si hemos abandonado los preceptos que habías decretado por medio de tus siervos…?”».

«Deténte, Tú que hablas. Nosotros proponemos el tema» grita un puñado de fariseos que se abre paso entre la gente. Casi al mismo tiempo, vuelve a aparecer la unidad armada y se detiene en el ángulo más cercano. Los fariseos están ya frente a Jesús. «¿Eres Tú el Galileo? ¿Eres Jesús de Nazaret?».

«¡Lo soy!».

«¡Bendito sea Dios por haberte encontrado!». La verdad es que tienen unas caras de tanta mala uva, que no se ve que estén alegres por el encuentro…

El más viejo habla: «Te seguimos desde hace muchos días, pero llegamos siempre cuando Tú ya te has marchado».

«¿Por qué me seguís?».

«Porque eres el Maestro y deseamos ser adoctrinados sobre un punto obscuro de la Ley».

«No hay puntos obscuros en la Ley de Dios».

«En ella no. Pero… en fin… pero la Ley ha sufrido “superposiciones”, como Tú dices… en fin… que han proyectado obscuridad».

«Penumbras, al máximo. Y basta volver el intelecto a Dios para eliminarlas».

«No todos lo saben hacer. Nosotros, por ejemplo, permanecemos en penumbra. Tú eres el Rabí, así que ayúdanos».

357.10

«¿Qué queréis saber?».

«Queríamos saber si le es lícito al hombre repudiar por un motivo cualquiera a su mujer. Es una cosa que sucede frecuentemente, y, siempre, donde sucede esto, da mucho que hablar. Vienen a nosotros para saber si es lícito. Y nosotros, según el caso, respondemos».

«Aprobando lo sucedido en el noventa por ciento de los casos. Y el diez por ciento que queda desaprobado pertenece a la categoría de los pobres o de vuestros enemigos».

«¿Cómo lo sabes?».

«Porque sucede así en todas las cosas humanas. Y agrego a la categoría la tercera clase: la que — si fuera lícito el divorcio — más derecho tendría, por ser la de los verdaderos casos penosos: como una lepra incurable, o una cadena perpetua, o enfermedades innominables…».

«¿Entonces para ti nunca es lícito?».

«Ni para mí ni para el Altísimo ni para ninguno de corazón recto. ¿No habéis leído que el Creador, al comienzo de los días, creó al hombre y a la mujer? Y los creó varón y hembra; y no tenía necesidad de hacerlo, porque, si hubiera querido, habría podido, para el rey de la creación, hecho a su imagen y semejanza, crear otro modo de procreación, y hubiera sido igualmente bueno aun siendo distinto de todos los otros naturales. Y dijo: “Así, por esto el hombre dejará a su padre y a su madre y se unirá a su mujer y los dos serán una sola carne”. Así pues, Dios los unió en una sola unidad. No son, por tanto, ya “dos” sino “una” sola carne. Lo que Dios ha unido, porque vio que “es buena cosa”, no lo separe el hombre, pues si así sucediera sería una cosa ya no buena».

357.11

«¿Pero por qué, entonces, Moisés dijo: “Si el hombre ha tomado consigo una mujer, pero la mujer no ha hallado gracia ante sus ojos por algún defecto desagradable, él escribirá un libelo de repudio, se lo entregará en mano y la despedirá de su casa”?».

«Lo dijo por la dureza de vuestro corazón. Para evitar, con una orden, desórdenes demasiado graves. Por esto os permitió repudiar a vuestras mujeres. Pero desde el principio no fue así. Porque la mujer es más que el animal, el cual sigue el capricho del amo o de las libres circunstancias naturales, y va a este o a aquel macho, es carne sin alma que hace pareja para reproducirse. Vuestras mujeres tienen un alma como vosotros, y no es justo pisotearla despiadadamente. Porque, si bien la condena dice: “Estarás sometida a la potestad de tu marido y él te dominará”, ello debe acaecer según justicia y no con atropello lesivo de los derechos del alma libre y digna de respeto. Vosotros, con el repudio, que no os es lícito, ofendéis al alma de vuestra compañera, a la carne gemela que se ha unido a la vuestra, a ese todo que es la mujer con que os habéis casado exigiendo su honestidad, mientras que vosotros, ¡perjuros!, vais a ella deshonestos, minorados, a veces corrompidos, y seguís corrompidos, y aprovecháis todas las ocasiones para herirla y dar mayor campo a la lujuria insaciable que hay en vosotros. ¡Prostituidores de vuestras esposas! Por ningún motivo podéis separaros de la mujer que está unida a vosotros según la Ley y la Bendición. Sólo en el caso de que la gracia os toque, y comprendáis que la mujer no es una propiedad sino un alma, y que, por tanto, tiene iguales derechos que vosotros de ser reconocida parte del hombre y no su objeto de placer, y sólo en el caso de que vuestro corazón sea tan duro que no sepáis elevarla a esposa, después de haber gozado de ella como una prostituta, sólo en el caso de anular este escándalo de dos que conviven sin que Dios bendiga su unión, podéis despedirla. Porque entonces vuestra unión no es tal, sino que es fornicación, y frecuentemente sin el honor de unos hijos, porque, o son eliminados forzando la naturaleza, o repudiados como una vergüenza. En ningún otro caso. En ningún otro. Porque si tenéis hijos ilegítimos de vuestra concubina, tenéis el deber de poner término al escándalo casándoos con ella, si sois libres. No contemplo el caso del adulterio consumado contra la esposa ignara. Para ese caso, santas son las piedras de la lapidación y las llamas del Seol. Y para el que repudia a su esposa legítima, porque está saciado de ella, y toma a otra, hay sólo una sentencia: ése es adultero. Y es adúltero el que toma a la repudiada, porque, si el hombre se ha arrogado el derecho de separar lo que Dios ha unido, la unión matrimonial continúa ante los ojos de Dios, y maldito aquel que pasa a segunda esposa sin ser viudo. Y maldito aquel que toma otra vez a su mujer primera después de haberla despedido por repudio y haberla abandonado a los miedos de la vida, siendo así que ella haya cedido a nuevo matrimonio para ganarse el pan, si queda viuda del segundo marido. Porque, aunque sea viuda, fue adúltera por culpa vuestra, y haríais doble su adulterio. ¿Habéis comprendido, fariseos que me tentáis?».

Éstos se van humillados, sin responder.

357.12

«Es un hombre severo. Si fuera a Roma, vería que allí fermenta un fango aún más hediondo» dice un romano.

También algunos de Gadara se quejan: «¡Dura cosa ser hombres, si hay que ser castos de esa forma!…».

Y algunos, más fuerte: «Si tal es la condición del hombre respecto a la mujer, es mejor no casarse».

Y también los apóstoles repiten este razonamiento mientras toman de nuevo el camino que conduce a los campos, tras haber dejado a los de Gadara. Lo dice Judas con sarcasmo. Lo dice Santiago de Zebedeo con respeto y reflexión. Y Jesús responde al uno y al otro:

«No todos comprenden esto, ni lo comprenden bien. Algunos, efectivamente, prefieren el celibato para tener libertad de secundar sus vicios; otros para evitar la posibilidad de pecar siendo maridos no buenos. Sólo algunos — a los cuales les es concedido — comprenden la belleza de estar limpios de sensualidad e incluso de una honesta hambre de mujer. Y son los más santos, los más libres, los más angélicos sobre la faz de la tierra. Hablo de aquellos que se hacen eunucos por el Reino de Dios. Hay hombres que nacen así. A otros los hacen eunucos. Los primeros son personas deformes que deben suscitar compasión; los segundos… son abusos que hay que reprimir. Mas está esa tercera categoría de eunucos voluntarios, los cuales, sin usar violencia para consigo — por tanto con doble mérito —, saben adherirse a eso que Dios pide, y viven como ángeles para que el altar abandonado de la tierra tenga todavía flores e inciensos para el Señor. Éstos no complacen a su parte inferior, para crecer en la parte superior, de forma que ésta florezca, en el Cielo, en los arriates más próximos al trono del Rey. Y en verdad os digo que no son personas mutiladas, sino seres dotados de aquello que a la mayor parte de los hombres les falta. No son, pues, objeto de necio escarnio; antes al contrario, de gran veneración. Comprenda esto quien debe, y respete, si puede».

Los apóstoles casados musitan entre sí.

«¿Qué os pasa?» pregunta Jesús.

«¿Y nosotros? No sabíamos esto, y hemos tomado mujer. Pero nos gustaría ser como Tú dices…» dice por todos Bartolomé.

«Y no os está prohibido hacerlo de ahora en adelante. Vivid en continencia, viendo en vuestra compañera a vuestra hermana, y tendréis gran mérito ante los ojos de Dios. Vamos a acelerar el paso. Para estar en Pel.la antes de la lluvia».


Notes

  1. la prière d’Esdras : elle se trouve en Esd 9, 6-15. La partie reprise commence au v.10.
  2. avant la pluie : Une esquisse de Maria Valtorta suit, qui montre, verticalement et vers l’ouest, le cours du Jourdain vers lequel conflue le Yarloq, qui coule du nord vers l’ouest. C’est sur son cours que se trouvent les sources d’eau sulfureuse. Gadara se situe au centre, sur le tracé d’une chaîne de montagnes. Les quatre points cardinaux sont également indiqués. Cette même région est représentée dans l’esquisse de Maria Valtorta au début du chapitre suivant. Il s’y trouve en plus deux autres affluents du Jourdain sans nom, et la localisation de la ville de Pella est indiquée. Entre celle-ci et Gadara, il y a cette note : Espèce de bas haut plateau entre deux chaînes de collines, les premières des montagnes, à l’orient. Et à droite, écrit transversalement, on peut lire cette autre note : Les monts de l’Auranite devraient se trouver ici, mais la chaîne qui s’interpose ne permet d’en voir que deux sommets éloignés, sûrement les plus hauts.

Notas

  1. La oración de Esdras está en Esdras 9, 6-15. El fragmento tomado comienza en el versículo 10.