Los Escritos de Maria Valtorta

445. A Tibériade, pendant une tempête, le retour

445. Dos parábolas durante una tormenta en Tiberíades.

445.1

Jésus et ses disciples arrivent à Tibériade par une matinée orageuse, après un court trajet de Tarichée à Tibériade en barque. Ces barques balancent fortement sur le lac très agité et grisâtre comme le ciel parcouru de nuages qui n’annoncent rien de bon.

Pierre scrute le ciel et le lac et il ordonne aux employés de mettre les barques en lieu sûr :

« Dans un moment, vous allez entendre une de ces musiques ! Je ne suis plus Simon le pêcheur, si bientôt les averses et les vagues du lac ne font pas de dégâts. Il n’y a personne sur le lac ? » se demande-t-il à lui-même, en scrutant la mer troublée de Galilée.

Elle a beau être parcourue par des vagues de plus en plus fortes, sous la chape d’un ciel de plus en plus menaçant, il la voit déserte et se console en pensant qu’elle ne fera pas de victimes humaines. C’est donc avec quelque satisfaction qu’il suit le Maître, qui fait face à des coups de vent si forts que les hommes ont du mal à marcher dans les nuages de poussière. La bourrasque fait claquer leurs vêtements.

Ce quartier de Tibériade est habité par des gens du peuple, des familles de pêcheurs ou d’artisans occupés à des travaux qui se rapportent à la pêche ; on assiste donc à toutes sortes d’allées et venues pour rentrer dans les maisons tout ce que l’orage pourrait détériorer. Des gens courent, chargés de filets et de rames des barques déjà mises à l’abri, d’autres emportent à l’intérieur leurs outils de travail, pendant que siffle le vent, que s’élèvent des nuages de poussière et que claquent les portes. L’autre Tibériade, celle qui est plus au nord, le quartier des palais qui s’étendent le long du lac, des beaux parcs que l’on voit sur l’arc de la rive, dort paresseusement. Seuls des serviteurs ou des esclaves — selon que les maisons appartiennent aux Juifs ou aux Romains — s’affairent à enlever des rideaux sur le haut des terrasses, à retirer les légères embarcations de plaisance, les sièges épars dans les jardins…

445.2

Jésus, qui s’est dirigé de ce côté, dit à Simon le Zélote et à son cousin Jude :

« Allez demander au portier de Jeanne, femme de Kouza, si aucun des nôtres n’est venu à notre recherche. Moi, j’attends ici.

– Bien. Et Jeanne ?

– Nous la verrons plus tard. Allez, et faites ce que je dis. »

Les deux apôtres s’éloignent rapidement et, pendant que les autres attendent, Jésus les envoie ici et là chercher des vivres “ pour eux et les femmes, parce qu’il n’est pas juste d’imposer des frais à la famille du disciple ”, dit Jésus. Il reste donc seul, appuyé au mur d’un jardin d’où provient une rumeur d’ouragan, tant est forte la lutte du vent contre les grands arbres.

Jésus est tout ramassé sur lui-même ; il tient ses vêtements bien serrés dans son manteau, qu’il a ramené sur sa tête où il fait office de capuchon pour se protéger du vent qui lui rejette les cheveux dans les yeux. Couvert de poussière, le visage à demi-caché par les pans du manteau, adossé à un mur presque au coin de la rue qui croise une belle artère qui va du lac au centre de la ville, il a l’air d’un mendiant qui attend l’obole. Quelques passants le regardent, mais comme il ne dit rien, ne demande rien et reste ainsi, tête penchée, personne ne s’arrête pour lui donner quelque chose ou lui parler. Pendant ce temps, la bourrasque redouble d’intensité, et le bruit du lac se fait plus violent, remplissant la ville tout entière de son rugissement.

445.3

Un homme de grande taille avance, courbé pour se défendre du vent, lui aussi enveloppé de son manteau qu’il tient serré sous le cou avec la main, arrivant du chemin qui va de l’intérieur de la ville vers la rive. Pour éviter une file d’ânes de maraîchers qui, après avoir déchargé leurs légumes aux marchés reviennent chez eux, il lève la tête et voit Jésus. Je me rends compte alors que ce jeune homme, c’est Judas.

« Oh ! Maître ! » dit-il de l’autre côté de la file des ânes. « Je venais justement chez Jeanne pour te chercher. Je suis allé à Capharnaüm dans ce but, mais… »

Le dernier âne est passé et Judas se hâte de rejoindre le Maître en achevant :

«… mais à Capharnaüm, il n’y avait personne. J’ai attendu plusieurs jours puis je suis revenu ici, et tous les jours j’allais chez Joseph et chez Jeanne voir si tu t’y trouvais… »

Jésus le fixe de son regard pénétrant et arrête cette avalanche de paroles en disant seulement :

« La paix soit avec toi.

– C’est vrai ! Je ne t’ai même pas salué ! La paix soit avec toi, Maître. Mais toi, tu l’as toujours cette paix !

– Pas toi ?

– Je suis un homme, Maître.

– L’homme juste a la paix. Seul l’homme coupable est troublé. L’es-tu ?

– Moi ?… Non, non, Maître. Du moins… à vrai dire, il est certain qu’être loin de toi ne me rendait pas heureux… Mais ce n’était pas encore être privé de paix. C’était la nostalgie de toi, en raison de l’affection que j’ai pour toi… Mais la paix, c’est autre chose, n’est-ce pas ?…

– Oui, c’est autre chose. Les séparations ne peuvent porter atteinte à la paix du cœur, à moins que l’être éloigné ne commette des fautes que sa conscience lui indique comme susceptibles d’affliger l’aimé, s’il les connaissait.

– Mais les absents ne savent pas… Sauf si quelqu’un les en informe. »

Jésus le regarde et se tait.

445.4

« Tu es seul, Maître ? demande Judas en cherchant à détourner la conversation vers des sujets plus banals.

– J’attends ceux que j’ai envoyés chez Jeanne pour savoir si ma Mère est arrivée de Nazareth.

– Ta Mère ? Tu fais venir ta Mère ici ?

– Oui. Je resterai avec elle à Capharnaüm pendant toute la lune, en me rendant en barque dans les villages de la rive, mais en revenant chaque jour à Capharnaüm. Il doit y avoir beaucoup de disciples…

– Oui… Beaucoup… »

Judas a perdu sa faconde. Il est pensif…

« Tu n’as rien à me dire, Judas ? Nous sommes tous les deux seuls… Rien ne t’est arrivé, pendant ce temps de séparation, aucun fait sur lequel tu sentes nécessaire d’entendre la parole de ton Jésus ? dit doucement Jésus, comme pour aider le disciple à avouer, en lui faisant sentir tout son amour miséricordieux.

– Et toi, tu ne sais rien qui en moi demande ta parole ? Si oui — moi, en vérité, je ne vois pas ce qui mérite cette parole —, parle. Il est difficile à un homme de devoir se rappeler ses fautes et ses défauts et de les avouer à un autre…

– Moi qui te parle, je ne suis pas un autre homme, mais…

– Non : tu es Dieu. Je le sais. Mais à cause de cela, il n’est pas nécessaire que ce soit moi qui parle. Toi, tu sais…

– Je ne suis pas un autre homme, disais-je, mais je suis ton ami le plus affectueux. Je ne te dis pas le Maître, le supérieur, mais : l’ami…

– C’est toujours la même chose ! Il est fastidieux de devoir toujours rechercher ce qu’on a fait dans le passé, et dont l’aveu pourrait provoquer des reproches. Mais, plus que les reproches, c’est de déchoir dans l’estime de l’ami qui afflige…

445.5

– Lors du dernier sabbat où je me trouvais à Nazareth, Simon-Pierre a révélé par inadvertance à un de ses compagnons une chose qu’il devait taire. Ce n’était pas une désobéissance volontaire, ce n’était pas une médisance, rien de susceptible de faire tort au prochain. Simon-Pierre l’avait dit à un cœur honnête et à un homme sérieux. Ce dernier, se voyant amené à connaître un secret sans que lui-même ou Pierre l’aient voulu, jura qu’il ne le répéterait à personne. Simon pouvait être tranquille… Mais il ne le devint que lorsqu’il m’eut fait l’aveu de la faute. Immédiatement… Pauvre Simon ! Il appelait cela une faute ! Mais si, dans le cœur de mes disciples, il n’y avait que des fautes comme celle-là, et autant d’humilité, de confiance, d’amour que Pierre, je devrais me proclamer Maître d’une troupe de saints !…

– Tu veux me dire par là que Pierre est saint et que je ne le suis pas. C’est vrai. Je ne suis pas un saint. Dans ce cas, chasse-moi…

– Tu n’es pas humble, Judas. L’orgueil te mine. Et tu ne me connais pas encore… » termine Jésus avec une immense tristesse.

Judas se rend compte de cette peine, et il murmure :

« Pardonne-moi, Maître !…

– Toujours. Mais sois bon, mon fils ! Sois bon ! Pourquoi veux-tu te faire du mal à toi-même ? »

Judas a des larmes sur les cils — vraies ou fausses je ne sais —, et il se réfugie dans les bras de Jésus en pleurant sur son épaule. Jésus lui caresse les cheveux en murmurant :

« Pauvre Judas ! Pauvre, pauvre Judas qui va chercher ailleurs là où il ne peut la trouver, sa paix et quelqu’un qui puisse le comprendre…

– Oui, c’est vrai. Tu as raison, Maître. La paix est ici… Dans tes bras… Je suis un malheureux… Toi seul me comprends et m’aimes… Toi seul… Je suis un pauvre type… Pardonne-moi, Maître.

– Oui, sois bon, sois humble. Si tu tombes, viens vers moi et je te relèverai. Si tu es tenté, accours vers moi. Je te défendrai contre toi-même, contre ceux qui te haïssent, contre tout…

445.6

Mais relève-toi. Les autres arrivent…

– Un baiser, Maître… Un baiser… »

Jésus l’embrasse… et Judas se reprend… en attendant, je me dis qu’il n’a nullement avoué ses fautes…

« Nous avons tardé un peu, car Jeanne était déjà levée et le portier a voulu l’avertir. Elle passera dans la journée chez Joseph, pour te vénérer, annonce Jude.

– Chez Joseph ? S’il tombe la masse d’eau que le ciel promet, ces rues seront un vrai bourbier. Jeanne ne viendra sûrement pas dans ce taudis et par ces rues. Il vaudrait mieux que nous allions chez elle » dit Judas, qui a déjà repris son assurance.

Jésus ne lui répond rien, mais il demande à son cousin :

« Est-ce qu’aucun des nôtres ne nous a cherchés chez Jeanne ?

– Personne encore.

– C’est bien. Allons chez Joseph. Les autres nous y rejoindront.

– Si j’étais sûr que nos mères sont en route, j’irais bien à leur rencontre, dit Jude.

– Ce serait une bonne idée, mais plusieurs routes arrivent à Tibériade, et elles n’ont peut-être pas pris la principale.

– C’est vrai, Jésus. Allons… »

445.7

Ils marchent rapidement au milieu des éclairs qui sillonnent le ciel blême et les premiers roulements du tonnerre qui résonnent brutalement dans les gorges des collines qui entourent le lac presque de tous côtés. Ils entrent dans la pauvre maison de Joseph qui, dans la tempête, paraît encore plus misérable et plus sombre. De lumineux, il n’y a que le visage du disciple et des siens, tout à la joie d’avoir le Maître chez eux.

« Mais tu tombes mal, Seigneur » s’excuse le batelier. « Je n’ai pas pu pêcher dans ce lac, et… je n’ai que des légumes…

– Et ton bon cœur. Mais j’y ai veillé. Mes compagnons vont venir avec tout ce qu’il faut. Ne te fatigue pas, Anne… Nous pouvons bien nous asseoir par terre. C’est si propre ! Tu es une brave femme, je le sais, et l’ordre que je vois ici le confirme.

– Ah ! mon épouse est une vraie femme forte ! Elle fait ma joie, notre joie » proclame le batelier, ravi de l’éloge du Seigneur qui s’est assis tranquillement au bord du foyer éteint, presque par terre, en prenant sur ses genoux un petit enfant qui l’observe d’un air étonné.

Au moment de la première averse, ceux qui sont allés faire les achats entrent, et, sur le seuil, ils secouent manteaux et sandales pour ne pas apporter d’eau ni de boue dans la maison.

C’est une fin du monde de tonnerre, d’éclairs, de pluie, de vent. Le mugissement du lac accompagne les solos des éclairs et les hurlements du vent.

« Salut ! L’été se baigne les plumes et arrose le foyer… Après, cela ira mieux… Pourvu que cela n’endommage pas les vignes…

445.8

Puis-je aller là-haut, pour regarder le lac ? Je veux voir quelle humeur il a…

– Va, va. La maison est à vous » répond le disciple à Pierre.

Tout heureux, ce dernier sort avec sa seule tunique pour profiter de la tempête, il monte l’escalier extérieur et reste sur la terrasse pour se rafraîchir, et il donne son avis à ceux de l’intérieur comme s’il était sur le pont de sa barque à commander les manœuvres.

Les autres sont assis çà et là dans la cuisine, où l’on y voit à peine : on doit en effet tenir la porte à moitié fermée à cause de la pluie et, par la fente, il entre un filet de lumière verdâtre qu’interrompt la brève et éblouissante lueur des éclairs…

Pierre revient, trempé comme s’il était tombé dans le lac, et déclare :

« L’orage est en ce moment au-dessus de notre tête. Il s’éloigne vers la Samarie. Ça va mouiller là-bas…

– Il t’a déjà bien douché ! Tu coules comme une fontaine, remarque Thomas.

– Oui, mais je me sens bien après une pareille chaleur.

– Rentre. Ainsi ruisselant, tu vas tomber malade en restant à la porte, lui conseille Barthélemy.

– Non ! Je suis comme du bois à l’épreuve de l’eau… J’ai commencé alors que je ne savais pas encore dire “ papa ” à rester à l’humidité. Ah ! comme on respire facilement !… Pourtant… la rue… est un fleuve… Si vous voyiez le lac ! Il a toutes les couleurs et il bout comme une marmite. On ne comprend même plus dans quelle direction vont les vagues. Elles bouillonnent sur place… Il fallait cela, pourtant…

– Oui, il fallait cela. Les murs ne se refroidissaient plus tant ils étaient brûlés par le soleil.

445.9

Ma vigne avait les feuilles recroquevillées, poussiéreuses… Je l’arrosais au pied… mais que fait un peu d’eau quand tout le reste est en feu ? dit Joseph.

– Plus de mal que de bien, mon ami » déclare Barthélemy. « Les plantes ont besoin de l’eau du ciel, car elles boivent même par les feuilles ! On pourrait croire que non, mais il en est ainsi. Les racines, les racines ! C’est bien, mais les feuillages aussi y sont pour quelque chose, et ils ont leurs droits…

– Tu n’as pas l’impression, Maître, que Barthélemy propose le sujet d’une belle parabole ? » demande Simon le Zélote pour l’encourager à parler.

Jésus, qui est en train de bercer le petit enfant effrayé par les éclairs, ne dit pas la parabole, mais donne son accord :

« Comment la proposerais-tu, toi ?

– Mal, assurément, Maître. Je ne suis pas toi…

– Raconte-la comme tu peux. Il vous sera très utile de prêcher en paraboles. Habituez-vous. Je t’écoute, Simon…

– Oh !… Toi, tu es le Maître, moi… un novice ! Mais j’obéis. Je dirais ceci : “ Un homme avait un beau pied de vigne. Mais comme il n’était pas propriétaire d’un vignoble, il avait planté sa vigne dans le petit jardin de sa maison, pour la faire monter sur la terrasse où elle donnerait de l’ombre et des grappes de raisin ; il veillait soigneusement sur elle. Mais elle poussait au milieu des maisons, près de la rue, de sorte que la fumée des cuisines et des fours tout comme la poussière de la route montaient et l’abîmaient. Et encore, tant que tombaient du ciel les pluies du mois de Nisan, les feuilles de la vigne se débarrassaient des impuretés et elles profitaient du soleil et de l’air sans avoir à leur surface une couche de saletés pour l’en empêcher. Mais quand vint l’été et que les pluies cessèrent, la fumée, la poussière, les excréments des oiseaux se déposèrent en couches épaisses sur les feuilles pendant que le soleil trop brûlant les desséchait. Le maître de la vigne arrosait les racines enfouies dans le sol, de sorte que la vigne ne mourait pas mais végétait péniblement, car l’eau absorbée par les racines ne montait que par le tronc et les branches, et le pauvre feuillage n’en profitait pas. Au contraire, du sol desséché, mouillé par un peu d’eau, montaient des fermentations et des exhalaisons qui abîmaient les feuilles en les tachant de sortes de pustules malignes. Enfin il tomba du ciel une grande pluie qui descendit sur les feuillages, courut le long des branches, des grappes, du tronc, éteignit la chaleur des murs et du sol. Une fois la tempête passée, le maître de la vigne la vit nettoyée, fraîche, toute pimpante sous le ciel serein. ” Voilà la parabole.

– C’est bien.

445.10

Mais comment l’appliques-tu à l’homme ?…

– Maître, c’est à toi qu’il revient de le faire.

– Non, à toi. Nous sommes entre frères. Tu ne dois pas craindre de faire piètre figure.

– Je ne crains pas de faire piètre figure : cela ne me serait pas pénible, mais au contraire, servirait à me garder humble. Mais c’est que je ne voudrais pas dire des choses inexactes…

– Je te les corrigerai.

– Dans ce cas, je dirais : “ Voilà ce qui arrive à l’homme qui ne vit pas à l’abri dans les jardins de Dieu, mais au milieu de la poussière et de la fumée des souillures du monde. Elles le recouvrent, presque sans qu’il s’en aperçoive, et il trouve son esprit stérilisé sous une croûte d’humanité si épaisse que la brise de Dieu et le soleil de la Sagesse ne peuvent lui être utiles. Et c’est en vain qu’il cherche à y suppléer avec un peu d’eau qu’il puise dans les pratiques et qu’il donne avec tant d’humanité à la partie inférieure de sorte que la partie supérieure n’en profite pas… Malheur à l’homme qui ne se purifie pas avec l’eau du Ciel qui lave des impuretés, éteint l’ardeur des passions, et nourrit vraiment le moi tout entier. ” J’ai fini.

– Tu as bien parlé. J’ajouterais qu’à la différence de l’arbre, créature privée du libre arbitre et attachée à la terre, et qui par conséquent n’est pas en mesure de trouver ce qui lui est utile et de fuir ce qui lui nuit, l’homme peut aller à la recherche de l’eau du Ciel, et éviter la poussière, la fumée, et l’ardeur de la chair, du monde et du démon. L’enseignement serait plus complet.

– Merci, Maître. Je m’en souviendrai, dit Simon le Zélote.

445.11

– On n’est pas solitaire… Nous vivons dans le monde… Par conséquent… intervient Judas.

– Pourquoi ce : par conséquent ? Veux-tu dire que Simon a parlé comme un sot ? lui demande Jude.

– Je ne dis pas cela. Je dis que, ne pouvant nous isoler… nous devons forcément être contaminés par ce qui est du monde.

– Le Maître et Simon exposent justement que l’on doit chercher l’eau du Ciel pour se garder propre en dépit du monde qui nous entoure, dit Jacques, fils d’Alphée.

– Bon ! Mais l’eau du Ciel est-elle toujours à notre disposition, pour nous nettoyer ?

– Oui, répond Jean avec assurance.

– Oui ? Et où la trouves-tu ?

– Dans l’amour.

– L’amour, c’est du feu. Il te brûle davantage.

– C’est du feu, oui, mais c’est aussi l’eau qui lave. Car il éloigne tout ce qui est de la terre et apporte tout ce qui est du Ciel.

– …Voilà des opérations que je ne comprends pas : il éloigne, il apporte…

– Oui, je ne suis pas fou. Je dis qu’il t’enlève ce qui est humanité et te donne ce qui vient de Dieu, et qui par conséquent est divin. Or une chose divine ne peut que nourrir et sanctifier. Jour après jour, l’amour te nettoie de ce que le monde a déposé en toi. »

445.12

Judas est sur le point de répliquer, quand l’enfant qui est sur le sein de Jésus, dit :

« Une autre parabole, belle, belle… pour moi… »

Cela apporte une diversion à la discussion.

« Sur quoi, mon petit ? » demande Jésus avec bienveillance.

L’enfant regarde autour de lui, et trouve. Il dirige un doigt vers sa mère, et dit :

« Sur maman.

– Une maman est pour l’âme et pour le corps ce que Dieu est pour eux. Que fait ta maman pour toi ? Elle veille sur toi, elle te soigne, elle t’apprend tout, elle t’aime, elle fait attention à ce que tu ne te fasses pas mal, elle te protège, comme le fait la colombe avec ses petits, sous les ailes de son amour. Il faut obéir à sa mère et l’aimer, parce que tout ce qu’elle fait, elle le fait pour notre bien. Le bon Dieu aussi, et bien plus parfaitement que la plus parfaite des mères, garde ses enfants sous les ailes de son amour, les protège, les instruit, les aide, pense à eux nuit et jour. Mais le bon Dieu, aussi et beaucoup plus qu’une mère — elle est en effet le plus grand amour de la terre, mais Dieu est le plus grand et l’éternel amour de la terre et du Ciel — doit être obéi et aimé, car tout ce qu’il fait, il le fait pour notre bien…

– Même les éclairs ? interrompt l’enfant qui en a une grande peur.

– Eux aussi.

– Pourquoi ?

– Parce qu’ils nettoient le ciel et l’air et…

– Et après arrive l’arc-en-ciel !… » s’écrie Pierre qui, moitié dehors moitié dedans, a écouté et s’est tu. Et il ajoute : « Viens, mon poulet, que je te le montre. Regarde comme c’est beau!… »

Et, en effet, le soleil est de retour, car la tempête est passée, et un immense arc-en-ciel, qui part des rives de Hippos, lance le ruban de son demi-cercle par dessus le lac pour aller se perdre au-delà des montagnes en arrière de Magdala.

Tout le monde se rend sur le seuil, mais pour voir le lac il faut se déchausser, car la cour s’est transformée en un marécage boueux qui décroît lentement. Comme souvenir de la tempête, il reste le lac devenu jaunâtre avec des vagues encore agitées, mais qui tendent à se calmer. Mais le ciel est serein, l’air léger, et les feuillages ont repris leur couleur.

445.13

Tibériade reprend vie… Et bientôt on voit, par la rue encore pleine d’eau et de boue, arriver Jeanne avec Jonathas. Elle lève les yeux pour saluer le Maître, debout sur la terrasse. Tout à sa joie, elle monte vivement pour se prosterner… Les apôtres parlent entre eux et Judas seul, à mi-chemin entre Jésus et Jeanne d’une part et les apôtres de l’autre, reste à part, tout pensif. Je parie qu’il écoute avec la plus grande attention les paroles de Jeanne dont la pensée, en ce qui le concerne, est restée indéchiffrable, car elle a salué tous les apôtres d’un unique : “ Paix à vous. ”

Mais Jeanne parle uniquement des enfants et de la permission que Kouza lui a donnée d’aller en barque à Capharnaüm pendant que le Maître s’y trouve. Alors les soupçons de Judas se calment, et il rejoint ses compagnons…

Avec leurs vêtements ourlés de boue, mais sèches par ailleurs, voici que s’avancent la Vierge Marie et Marie, femme d’Alphée, avec les cinq hommes qui sont allés les chercher. Le sourire de Marie, pendant qu’elle monte le court escalier, est plus merveilleux que l’arc-en-ciel toujours présent.

« Ta Mère, Maître ! » annonce Thomas.

Jésus va à sa rencontre, et tous les autres avec lui. Et ils se félicitent de ce que les femmes n’aient pas eu d’autre ennui qu’un peu de boue en bas de leurs manteaux.

« Nous nous sommes arrêtés aux premières gouttes chez un maraîcher » explique Matthieu, et il demande : « Vous nous attendiez depuis longtemps ?

– Non. Nous sommes arrivés à l’aurore.

– Nous avons tardé à cause d’un malheureux… dit André.

445.14

– Bien. Maintenant que vous êtes tous ici et que le beau temps est revenu, je serais d’avis de partir ce soir pour Capharnaüm » dit Pierre.

Marie, qui consent toujours, dit cette fois :

« Non, Simon. Nous ne pouvons pas partir si…d’abord… : mon Fils, une mère s’est recommandée à moi pour que toi, toi seul, qui peux le faire, tu convertisses l’âme de son unique garçon. Je t’en prie, écoute-moi, car je l’ai promis… Pardonne-lui… Ton pardon…

– Il est déjà accordé, Marie. Moi, j’ai déjà parlé au Maître… interrompt Judas, croyant que Marie parle de lui.

– Je ne parle pas de toi, Judas. Je parle d’Esther de Lévi, une Nazaréenne, une mère tuée par le comportement de son fils. Jésus, elle est morte dans la nuit où tu es parti. Elle ne cessait de t’invoquer, mais ce n’était pas pour elle, cette pauvre mère martyre à cause d’un fils infâme, mais pour son fils… car nous autres, vos mères, nous ne nous inquiétons guère pour nous… Elle veut que son Samuel soit sauvé… Mais maintenant qu’elle est morte, Samuel, en proie aux remords, paraît fou et il ne veut absolument pas entendre raison… Mon Fils, tu peux sauver son intelligence et son esprit…

– S’est-il repenti ?

– Comment veux-tu qu’il le soit s’il est désespéré ?

– En effet, le fait d’avoir tué sa mère en la faisant continuellement souffrir doit le rendre désespéré. On ne viole pas impunément le premier des commandements de l’amour envers le prochain. Mère, comment veux-tu que, moi, je pardonne et que Dieu donne la paix à ce matricide impénitent ?

– Mon Fils, cette mère demande la paix de l’autre vie… Elle était bonne… elle a tant souffert…

– Elle aura la paix pour elle…

– Non, Jésus. L’âme d’une mère ne peut être en paix si elle voit son enfant privé de Dieu…

– Il est juste qu’il en soit privé.

– Oui, mon Fils, oui. Mais pour la pauvre Esther… Ses derniers mots ont été une prière pour son fils… Et elle m’a demandé de te le rapporter. Jésus, Esther n’a jamais connu la moindre joie de toute sa vie, tu le sais. Donne-lui celle-là, maintenant qu’elle est morte, donne-la à son âme qui souffre à cause de son fils.

– Mère, j’ai cherché à convertir Samuel pendant mes séjours à Nazareth. Mais c’était en vain, car en lui l’amour était éteint …

– Je le sais. Mais Esther a offert son pardon, ses souffrances, pour que l’amour renaisse en Samuel. Et qui sait ? Ce tourment qu’il souffre actuellement ne pourrait-il pas être un amour qui revit ? Un douloureux amour, on pourrait même dire : un inutile amour, puisque sa mère ne peut en profiter. Mais toi et moi, nous savons que la charité des trépassés est attentive et toute proche. Nous le savons, moi par la foi, toi directement. Les morts ne se désintéressent pas de nous, et ils n’ignorent pas ce qui arrive aux êtres aimés qu’ils ont quittés… Donc Esther peut encore profiter de ce tardif amour de son fils ingrat, et maintenant bouleversé par le remords. Mon Jésus, je le sais, cet homme t’inspire du dégoût à cause de l’énormité de sa faute. Un fils qui hait sa mère est un monstre pour toi, qui es tout amour pour la tienne ! Mais justement parce que tu es tout amour pour moi, écoute-moi. Retournons ensemble à Nazareth, tout de suite. La route ne me pèse pas, rien ne me pèse, si cela sert à sauver une âme…

– C’est bien. Tu as gagné, Mère…

445.15

Judas, prends avec toi Joseph et va à Nazareth. Tu m’amèneras Samuel à Capharnaüm.

– Moi ? Pourquoi moi ?

– Parce que tu n’es pas fatigué. Les autres, si. Ils ont tant marché pendant que tu te reposais…

– J’ai marché, moi aussi. Je suis allé à Nazareth te chercher. Ta Mère peut le dire.

– Tes compagnons sont allés à Nazareth tous les sabbats et maintenant ils reviennent d’un long voyage. Va et ne discute pas…

– C’est que… A Nazareth on ne m’aime guère… Pourquoi m’envoies-tu, justement moi ?

– Moi aussi, ils ne m’aiment pas, et pourtant je vais là-bas. Il n’est pas nécessaire d’être aimé dans un lieu pour y aller. Va et ne discute pas, je te le répète.

– Maître… j’ai peur des déments…

– L’homme est bouleversé par le remords, mais il n’est pas dément.

– Ta Mère l’a dit…

– Et moi, je te dis pour la troisième fois : va et ne discute pas. Cela ne peut te faire que du bien de méditer à quoi cela peut amener de faire souffrir une mère…

– Tu me compares à Samuel ? Ma mère est reine dans sa maison. Moi, je ne suis même pas près d’elle pour la surveiller et lui être une charge à cause de mon entretien…

– Ce ne sont pas ces choses qui sont une charge pour les mères. Mais c’est un lourd fardeau qui les écrase que le manque d’amour de leurs enfants, leur conduite imparfaite aux yeux de Dieu et des hommes. Va, te dis-je.

– Je pars. Et que vais-je dire à l’homme ?

– De venir à Capharnaüm, chez moi.

– S’il n’a jamais obéi, pas même à sa mère, comment veux-tu qu’il m’obéisse à moi maintenant, puisqu’il est si désespéré ?

– Tu n’as pas encore compris que, si je t’envoie, c’est signe que j’ai déjà travaillé l’âme de Samuel en le faisant sortir du délire de son remords désespéré ?

– J’y vais. Adieu, Maître. Adieu, Mère. Adieu, mes amis. »

Sur ce, il part, rien moins qu’enthousiaste, suivi de Joseph qui, au contraire, est tout heureux d’avoir été choisi pour cette mission.

445.16

Pierre chantonne…

Jésus lui demande :

« Que chantes-tu, Simon ?

– Un vieil air du lac…

– Lequel ?

– Voici : “ C’est toujours la même chose ! La pêche plaît au cultivateur, mais le pêcheur n’aime pas pêcher ! ” Et en vérité, ici on a vu que c’était le disciple qui avait le désir de pêcher plutôt que l’apôtre… »

Plusieurs rient. Jésus, lui, soupire.

« Je t’ai peiné, Maître ? demande Pierre.

– Non. Mais ne critique pas sans cesse.

– C’est à cause de Judas que mon Frère est affligé, dit Jude.

– Toi aussi, tais-toi et surtout au fond de ton cœur.

– Mais, vraiment, Samuel a-t-il déjà obtenu le miracle ? demande Thomas, curieux et un peu incrédule.

– Oui.

– Alors il est inutile qu’il vienne à Capharnaüm.

– C’est nécessaire. Je n’ai pas guéri complètement son cœur. C’est à lui, de lui-même, de chercher la guérison, c’est-à-dire le pardon par un saint repentir. Mais j’ai fait en sorte qu’il puisse raisonner de nouveau. A lui, maintenant, d’obtenir le reste par sa libre volonté. Descendons. Nous allons parmi les humbles…

– Pas chez moi, Maître ?

– Non, Jeanne. Tu pourras venir quand tu voudras chez moi, mais eux sont retenus par leurs travaux, et c’est moi qui vais à eux… »

Jésus descend de la terrasse et sort dans la rue, suivi des autres, et aussi de Jeanne qui a envoyé Jonathas à la maison et qui est bien décidée à ne pas se séparer de Jésus, puisque Jésus n’est pas disposé à aller chez elle.

Ils marchent vers des endroits de plus en plus pauvres et périphériques, en direction des misérables maisonnettes… Et la vision cesse ainsi.

445.1

Jesús llega con los suyos a Tiberíades en una mañana borrascosa. Y llega, cabeceando fuertemente las barcas en el lago, que está muy agitado y gris, como el cielo en que corretean nubarrones poco prometedores, por el breve trayecto que une Tariquea a Tiberíades.

Pedro escudriña el cielo y el lago, y ordena a los mozos que pongan las barcas en seguro: «¡Dentro de poco vais a oír qué música! Dejo de ser Simón el pescador, si dentro de poco las avalanchas de agua del cielo y del lago no causan daños. ¿Hay alguien en el lago?» se pregunta a sí mismo, mientras escudriña el agitado mar de Galilea. Y lo ve desierto, recorrido sólo por fuertes olas, cada vez más altas bajo la cada vez más amenazadora bóveda del cielo. Se consuela al verlo vacío, pensando que no causará víctimas humanas. Y sigue más contento al Maestro, que ya camina en medio de las embestidas del viento, tan fuertes que con dificultad avanzan los hombres entre nubes de polvo y en medio de un gran golpeteo de túnicas.

En Tiberíades, en esta parte de Tiberíades, la popular, constituida por familias de pescadores o de obreros menores dedicados a trabajos inherentes a la pesca, hay un intenso ajetreo para guardar en las casas aquellas cosas que podría dañar el temporal: quién corre cargado con las redes, con los remos de las barcas ya puestas en seguro, quién arrastra hasta las casas los instrumentos de trabajo: todo entre silbidos de viento y nubes de polvo y portazos. La otra Tiberíades, la que está más al Norte, la de las construcciones dispuestas a lo largo del lago, la de los hermosos parques que se ven en el arco de la orilla, duerme ociosa. Únicamente algunos criados o esclavos —según sean de israelitas o romanos las casas— se afanan en quitar toldos en lo alto de las terrazas, en retirar las barcas ligeras de recreo, los asientos que están desperdigados por los jardines…

445.2

Jesús, que ha dirigido sus pasos hacia esta parte, dice a su primo Judas y a Simón Zelote: «Id donde el portero de Juana de Cusa, a ver si alguno de los nuestros ha preguntado por nosotros. Yo espero aquí».

«De acuerdo. ¿Y Juana?».

«La veremos después. Id y haced esto que digo».

Los dos van sin demora, y, mientras los otros esperan su regreso, Jesús manda a éstos, a uno acá a otro allá, a conseguir comida «para ellos y para las mujeres, porque no es justo cargarlo sobre la familia del discípulo» dice Jesús. Y se queda solo, apoyado en la tapia de un jardín del que viene —tan grande es la lucha que sus altos árboles sostienen contra el viento— un ruido de huracán.

Jesús está recogido dentro de sí mismo y en los indumentos (los ha ajustado bien bajo su manto, y el manto se lo ha echado sobre la cabeza, ciñéndolo bien a ella como una capucha, para defenderse del viento, que mete el pelo en los ojos). Y así, lleno de polvo, el rostro semioculto con los extremos del manto, apoyado en una tapia que está casi en la esquina de la calle que se cruza con una bella arteria que va del lago al centro de la ciudad, parece un mendigo en espera de limosnas. Alguno pasa y le mira. Pero, dado que Él no dice nada ni pide nada y está así con la cabeza agachada, ninguno se para a dar nada ni a decir nada. Y, mientras tanto, la borrasca aumenta de intensidad y el rumor del lago crece en violencia llenando ya toda la ciudad con su mugido.

445.3

Un hombre alto, caminando encorvado para defenderse del viento, también todo arropado en su manto, que mantiene ceñido bajo la garganta con la mano, viene desde el camino interior hacia este camino litoral. Cuando levanta la mirada del suelo para esquivar una fila de burritos de hortelanos que, dejadas las verduras en los mercados, vuelven a sus huertos, ve a Jesús (y yo veo que el joven es Judas de Keriot).

«¡Oh, Maestro!» dice desde el otro lado, separado por la fila asnal. «Venía precisamente a casa de Juana a buscarte a ti. He estado en Cafarnaúm buscándote, pero…». El último asno ha pasado y Judas se apresura a acercarse al Maestro, y termina lo que estaba diciendo: «…pero en Cafarnaúm no estaba ninguno. He esperado algunos días y luego he vuelto aquí, y todos los días iba donde José y donde Juana a buscarte…».

Jesús le mira con sus ojos penetrantes, y detiene esta avalancha de palabras diciendo solamente: «La paz sea contigo».

«¡Es verdad! ¡Ni siquiera te he saludado! La paz sea contigo, Maestro. ¡Bueno, pero Tú siempre tienes esta paz!».

«¿Y tú no?».

«Yo soy un hombre, Maestro».

«El hombre justo tiene la paz. Sólo el hombre culpable está turbado. ¿Tal eres tú?».

«¿Yo?… No, no, Maestro. Al menos… Bueno, si he de decir la verdad, estar lejos de ti no me ponía feliz… pero eso no era todavía estar sin paz. Era nostalgia de ti, por el afecto que te tengo… Pero la paz es otra cosa, ¿no es verdad?…».

«Sí. Es otra cosa. Las separaciones no lesionan la paz del corazón, si el corazón del ausente no hace cosas que su conciencia le dice que entristecerían al amado si las supiera».

«Pero los ausentes no saben… A menos que haya alguien que los informe».

Jesús le mira y calla.

445.4

«¿Estás solo, Maestro?» pregunta Judas, tratando de desviar la conversación hacia argumentos más banales.

«Estoy esperando a los que he enviado a casa de Juana para preguntar si mi Madre ha venido de Nazaret».

«¿Tu Madre? ¿Traes aquí a tu Madre?».

«Sí. Voy a estar con ella en Cafarnaún durante toda esta luna. Iré con las barcas por los pueblos de la ribera, pero volviendo todos los días a Cafarnaúm. Debe haber muchos discípulos en esta zo­na…».

«Sí… Muchos…». Judas ha perdido la parlería. Está pensativo…

«¿No tienes nada que decirme, Judas? Estamos los dos solos… ¿No te ha sucedido nada en este tiempo de separación, ningún hecho respecto al cual sientas necesario oír la palabra de tu Jesús?» dice Jesús dulcemente, como para ayudar al discípulo a confesar haciéndole sentir todo su misericordioso amor.

«¿Y Tú conoces algo en mí que necesite tus palabras? Si lo conoces —yo la verdad es que no sé de nada que pueda merecer esas palabras—, habla. Es duro para un hombre el tener que indagar sobre las culpas y los defectos y confesarlos a otro…».

«El que te habla no es otro hombre, sino…».

«No. Eres Dios. Lo sé. Por eso mismo, no es ni siquiera necesario que sea yo el que hable. Tú ya conoces…».

«Yo no soy otro hombre, te estaba diciendo, sino tu amigo más amoroso; no te digo el Maestro, el superior, sino que te digo: el amigo…».

«Sigue siendo lo mismo. Y sigue siendo fastidiosa la indagación sobre lo que se ha hecho en el pasado y cuya confesión podría acarrearle a uno una serie de reproches. Aunque la verdad es que más que los reproches duele el hecho de venir a menos en la estima del amigo…».

445.5

«En Nazaret, el último sábado que estuve allí, Simón Pedro dijo a un compañero, sin darse cuenta, una cosa que debía callar. No era una desobediencia voluntaria, no era maledicencia, no era algo que pudiera causar daño al prójimo. Simón Pedro se la había dicho a un corazón honesto y a un hombre serio, el cual, viendo que tenía conocimiento, sin voluntad suya ni de Pedro, de una cosa secreta, juró que no repetiría a otros el secreto. Simón podía tranquilizarse… Pero no se tranquilizó hasta que no me confesó la culpa. Enseguida… ¡Pobre Simón! ¡La llamaba culpa! Pero si en el corazón de los discípulos hubiera sólo culpas como ésa, y mucha, mucha humildad, mucha confidencia, mucho amor, como tiene Pedro, ¡debería proclamarme Maestro de una muchedumbre de santos!…».

«Lo que me quieres decir con esto es que Pedro es santo y yo no. Es verdad. No soy un santo. Arrójame de tu presencia entonces…».

«Lo que no eres es humilde, Judas. La soberbia te destruye. Y no me conoces todavía…» termina Jesús tristísimamente.

Judas siente esta pena y susurra: «¡Perdóname, Maestro!…».

«Siempre. Pero sé bueno, hijo. ¡Sé bueno! ¿Por qué quieres causarte el mal a ti mismo?».

Judas —si son verdaderas o falsas no lo sé— tiene lágrimas en las pestañas y se refugia entre los brazos de Jesús, llorando encima de su hombro.

Y Jesús le acaricia en el pelo susurrando: «¡Pobre Judas! ¡Pobre, pobre Judas, que va buscando su paz, y a quien pueda comprenderle, en lugares donde no puede encontrarlos!…».

«Sí. Es verdad. Tienes razón, Maestro. La paz está aquí… entre tus brazos… Soy un desdichado… Sólo Tú me comprendes y me amas… Sólo Tú… El necio soy yo… Perdóname, Maestro».

«Sí, sé bueno, sé humilde. Si caes, ven a mí y te levantaré. Si te sientes tentado, corre a mí; te defenderé, de ti mismo, de quien te odie, de todo…

445.6

Pero, estáte erguido. Vienen los demás…».

«Un beso, Maestro… Un beso…».

Jesús le besa… y Judas recupera su compostura… Sí, pero —pienso yo— la realidad es que no ha confesado en absoluto sus culpas…

«Hemos tardado mucho porque Juana estaba ya levantada y el portero ha querido avisarla. Vendrá hoy, a venerarte, a casa de José» dice Judas Tadeo.

«¿A casa de José? Si cae toda el agua que el cielo promete, esos caminos serán pantanos. No, está claro que Juana no va a venir ni a esa choza ni por esos caminos. Sería mejor que fuéramos nosotros a su casa…» dice Judas, que ya ha recuperado la seguridad.

Jesús no le responde, pero contesta a su primo preguntando: «¿No nos ha buscado ninguno de los nuestros en casa de Juana?».

«Todavía ninguno».

«De acuerdo. Vamos a casa de José. Los otros nos alcanzarán allí…».

«Para estar seguros de que nuestras madres están en camino, yo iría a su encuentro…» dice Judas de Alfeo.

«Estaría bien. Pero más de un camino trae a Tiberíades. Y quizás no han tomado el principal…».

«Es verdad, Jesús… Vamos…».

445.7

Andan a buen paso, entre los primeros truenos, con su fuerte fragor en las hoces de los collados que rodean casi por completo al lago, y entre los primeros relámpagos que surcan el cielo lívido. Entran en la casa pobre de José, que parece aún más pobre y obscura con el aire borrascoso. Lo único luminoso que hay es el rostro del discípulo y de sus familiares, dichosos de tener en su casa al Maestro.

«Pero llegas en mal momento, Señor» dice el barquero disculpándose. «Con este lago no he podido pescar y… tengo sólo verduras…».

«Y tu buen corazón. Pero ya he pensado en ello: ahora van a venir los compañeros con lo que necesitamos. No estés trajinando, mujer… Podemos sentarnos también en el suelo. Hay mucha limpieza. Eres una mujer excelente, lo sé. Y el orden que aquí veo lo confirma».

«¡Oh, mi esposa! ¡Una verdadera mujer fuerte! Mi alegría, nuestra alegría» proclama el barquero, embelesado por el elogio del Señor, que se ha sentado tranquilamente en el borde bajo del hogar apagado, casi en el suelo, y ha puesto entre sus rodillas a un niñito que le observa asombrado.

Los que habían ido a las compras entran bajo el primer chaparrón. En el umbral de la puerta sacuden los mantos y las sandalias para no meter agua y barro en la casa. Es un maremágnum de truenos, relámpagos, lluvia, viento. El fragor del lago hace de acompañamiento a los solos de las centellas y a los aullidos del viento.

«¡Salud! El verano se moja las plumas y remoja el hogar… Después estaremos mejor… Con tal de que no haga daños a las vides…

445.8

¿Puedo ir arriba a mirar el lago? Quiero ver que humor tiene…».

«Ve, ve. La casa es vuestra» responde el discípulo a Pedro.

Y Pedro, sólo con la túnica, sale feliz para fruir con la tempestad. Sube la escalera exterior y se queda en la terraza, refrescándose y dando sus responsos a los de dentro, como si estuviera en el puente de su barca y dirigiera las maniobras.

Los demás están sentados, acá o allá, en la cocina, donde apenas se ve, porque tienen que tener la puerta entornada, por el chaparrón; y por el resquicio entra un hilo de luz verdosa, excepto cuando relumbran breves y cegadores los relámpagos…

Vuelve Pedro, mojado como si se hubiera caído en el lago, y sentencia: «Ahora la tenemos encima de la cabeza. Se aleja hacia Samaria. Va a mojar allí…».

«¡A ti te ha mojado ya! Estás chorreando como una fuente» observa Tomás.

«Sí. Pero estoy muy bien después de tanto calor».

«Pasa, que te va a caer mal estar en la puerta mojado de esa forma» aconseja Bartolomé.

«¡No, hombre, no! Yo soy madera añejada… Ya estaba en el agua y todavía no sabía decir bien “padre”. ¡Ah, con qué facilidad se respira!… Pero… el camino… es un río… ¡Si vierais el lago! Está de todos los colores y hierve como una cazuela. Ya no sabe uno siquiera hacia dónde van las olas. Hierven donde están… Pero hacía falta…».

«Sí, hacía falta. Las paredes ya no se enfriaban, de tanto como las calentaba el Sol.

445.9

Mi vid tenía las hojas abarquilladas, polvorientas… Le echaba agua en la base… Pero, ¡ya, ya!… ¿Qué hace un poco de agua cuando todo el resto es fuego?» dice José.

«Más mal que bien, amigo» sentencia Bartolomé. «Las plantas necesitan el agua del cielo, porque beben también con las hojas, ¿eh! Parece que no, pero es así. ¡Las raíces, las raíces! Está bien. Pero también las hojas están para algo y tienen sus derechos…».

«¿No te parece, Maestro, que Bartolomé está proponiendo el tema de una hermosa parábola?» dice el Zelote, incitando a Jesús a hablar.

Pero Jesús, que está arrullando al niñito, que tiene miedo a los rayos, no dice la parábola, sino que asiente diciendo: «¿Y tú cómo la plantearías?».

«Sin duda, mal, Maestro. Yo no soy Tú…».

«Dila como la sepas. Predicar con parábolas os servirá mucho. Acostumbraos. Te escucho, Simón…».

«¡Oh… Tú, Maestro, yo… necio… Pero obedezco. Yo diría esto: “Un hombre tenía una hermosa planta de vid. Pero, no poseyendo aquel hombre una viña, había plantado su vid en el pequeño huerto de su casa, para que trepara hasta la terraza a dar sombra y a dar racimos; y cuidaba mucho a su vid. Pero ésta crecía entre casas, junto al camino: por tanto, el humo de las cocinas y hornos y el polvo que venía del camino subían a molestar a la vid. Y, mientras descendían del cielo las lluvias de Nisán, las hojas de la vid se limpiaban de las impurezas y, no teniendo en la superficie una fea costra de suciedad que lo impidiera, gozaban del sol y del aire. Pero, cuando llegó el verano y el agua dejó de caer del cielo, humo, polvo, excrementos de aves se depositaron en espesos estratos sobre las hojas, mientras el sol, demasiado ardiente, las secaba. El dueño de la vid echaba agua a las raíces que se hundían en el terreno, y por eso la planta no moría; pero vegetaba enfermiza, porque el agua que absorbían las raíces subía sólo internamente, sin que gozaran de ella las míseras hojas. Es más, del suelo tórrido, humedecido con poca agua, subían efervescencias y emanaciones que estropeaban las hojas, manchándolas como por pústulas dañinas. Pero al final vino una gran lluvia del cielo que cayó sobre las hojas, corrió por las ramas, por los racimos, por el tronco, sofocó el ardor de las paredes y del terreno. Pasada la tormenta, el dueño de la vid vio su planta limpia, fresca, gozando y produciendo gozo bajo el cielo sereno”. Ésta es la parábola».

«Está bien:

445.10

Pero ¿el parangón con el hombre?…».

«Maestro, hazle Tú».

«No. Tú. Estamos entre hermanos, no debes temer quedar mal».

«Si es por quedar mal, no lo temo como cosa desdichada. Es más, lo amo, porque sirve para mantenerme humilde. Es que no quisiera decir cosas equivocadas…».

«Te las corrijo Yo».

«¡Oh, entonces! Mira, yo diría: “Así le sucede al hombre que no vive aislado en los huertos de Dios, sino que vive en medio del polvo y del humo de las cosas del mundo, que lo recubren lentamente de una costra, casi desapercibidamente, y su espíritu se hace infecundo, debajo de una costra de humanidad tan espesa, que la brisa de Dios y el sol de la Sabiduría no pueden ya beneficiarle. Y trata inútilmente de poner remedio con un poco de agua, sacada de las prácticas y dada con mucha humanidad a la parte inferior, siendo así que la parte superior no se beneficia… ¡Ay del hombre que no se limpia con el agua del Cielo que limpia las impurezas, que sofoca los ardores de las pasiones, que verdaderamente nutre el yo todo”. He dicho».

«Bien has dicho. Yo diría también que, a diferencia de la planta, criatura carente de libre albedrío y clavada en la tierra —no libre, por tanto, de ir en busca de lo que la beneficia ni de evitar lo que la perjudica— el hombre puede ir a buscar el agua del Cielo y evitar el polvo, el humo y el ardor de la carne y del mundo y del demonio. Sería una enseñanza más completa».

«Gracias, Maestro. Lo recordaré» responde el Zelote.

445.11

«No somos unos solitarios… Vivimos en el mundo… Por tanto…» dice Judas de Keriot.

«¿Por tanto, qué? ¿Quieres decir que Simón ha hablado como un necio?» le pregunta Judas de Alfeo.

«No digo eso. Digo que, no pudiéndonos aislar…, tenemos que estar, por fuerza, cubiertos de lo que hay en el mundo».

«El Maestro y Simón dicen precisamente que se debe buscar el agua del Cielo para conservarse uno limpio, a pesar del mundo que nos rodea» dice Santiago de Alfeo.

«¡Ya, claro! Pero ¿está siempre preparada el agua del Cielo para limpiarnos?».

«Sí» dice seguro Juan.

«¿Sí? ¿Y dónde la encuentras?».

«En el amor».

«El amor es fuego. Te quema más».

«Es fuego, sí. Pero también es agua que lava. Porque se lleva todo lo que es de la Tierra y da todo lo que es del Cielo».

«…No entiendo esas operaciones. Quita, pone…».

«Sí. No estoy loco. Digo que te quita lo que es humanidad y te da lo que de Dios viene y por tanto es divino. Y una cosa divina no puede sino nutrir y santificar. Día tras día, el amor te purifica de lo que el mundo te ha dado».

445.12

Judas está para rebatir, pero el pequeñuelo que está sobre las piernas de Jesús dice: «Otra parábola, bonita, bonita… para mí…» y esto hace desviar la controversia.

«¿Sobre qué, niño?» pregunta, condescendiente, Jesús.

El niñito mira a su alrededor y halla. Dirige un dedito hacia su madre y dice: «Sobre mamá».

«Una mamá es para el alma y para el cuerpo lo que para estos mismos es Dios. ¿Qué te hace tu mamá? Vela por ti, te cuida, te enseña, te quiere, está atenta a que no te hagas daño, te tiene, como hace la paloma con sus crías, debajo de las alas de su amor. Y se ha de obedecer y querer a la propia mamá, porque todo lo que hace lo hace por nuestro bien. También el buen Dios, y mucho más perfectamente que la más perfecta de las mamás, tiene a sus hijos bajo las alas de su amor, los protege, los instruye, los ayuda, piensa en ellos de día y de noche. Pero también al buen Dios, como y mucho más que a la propia mamá —porque la mamá es el más grande amor de la Tierra, pero Dios es el más grande y eterno amor de la Tierra y del Cielo— ha de obedecérsele y amarle, porque todo lo que hace lo hace por nuestro bien…».

«¿También los rayos?» interrumpe el pequeño, que tiene mucho miedo de ellos.

«También».

«¿Por qué?».

«Porque limpian el cielo, el aire y…».

«¡Y después viene el arco iris!…» exclama Pedro, que, medio fuera y medio dentro, ha escuchado y ha callado. Y añade: «Ven, tortolito que te lo muestro. ¡Mira qué bonito!…».

Y, efectivamente, la luz se aclara porque la tempestad ha pasado, y un amplio arco iris, que empieza en las orillas de Ippo, proyecta su cinta en forma de arco sobre el lago, para desvanecerse tras los montes a espaldas de Magdala.

Van todos a la puerta, pero para ver el lago tienen que descalzarse, porque el patio es un pequeño estanque de agua amarillenta que lentamente mengua. De la tempestad, queda como recuerdo el color amarillento del lago y todavía una agitación de sus aguas que tiende a calmarse. Pero el cielo está sereno y el aire descargado, y las frondas han tomado de nuevo color.

445.13

Tiberíades recobra vida… Pronto se ve venir a Juana —viene con Jonatán— por el camino aún lleno de agua y barro. Alza su rostro para saludar al Maestro, que está en la terraza, y sube rauda para postrarse, feliz… Los apóstoles hablan entre sí; sólo Judas, a mitad de distancia entre Jesús y Juana por un lado y los apóstoles por el otro, se abstrae como pensativo. Apostaría por que está todo atento a escuchar las palabras de Juana, cuyo pensamiento respecto a Judas no se ha hecho descifrable, porque ha saludado a todos los apóstoles con un único: «La paz a vosotros». Pero Juana habla únicamente de los niños y del permiso que Cusa le ha dado para ir con la barca a Cafarnaúm mientras está el Maestro en la ciudad. Y la sospecha de Judas se calma. Se reúne entonces con los otros compañeros…

Embarradas en los bajos de los vestidos, pero secas en el resto del cuerpo, vese venir a María Stma. y a María de Alfeo, junto con los cinco que han ido a recogerlas. La sonrisa de María, mientras sube por la corta escalera, es más hermosa que el arco iris persistente aún en el cielo.

«¡Tu Madre, Maestro!» avisa Tomás.

Jesús va a su encuentro, y todos los demás con Él. Y se felicitan de que las mujeres no presenten signos de dificultades aparte de un poco de barro en el borde de los vestidos.

«Nos hemos parado en casa de un hortelano cuando han empezado las primeras gotas» explica Mateo. Y pregunta: «¿Hace mucho que nos esperáis?».

«No. Hemos llegado al amanecer».

«Hemos tardado por causa de un necesitado…» dice Andrés.

445.14

«Bien. Ahora que estáis todos y que el tiempo se pone bueno, propondría salir al atardecer para Cafarnaúm» dice Pedro.

María, siempre condescendiente, esta vez dice: «No, Simón. No podemos partir si antes… Hijo mío, una madre me suplicó que Tú, que eres el único que puede hacerlo, conviertieras el alma de su único hijo varón. Yo te lo ruego, escúchame, porque le prometí… Perdónale… Tu perdón…».

«Ya está concedido, María. Ya he hablado yo con el Maestro…» interrumpe Judas Iscariote, creyendo que María habla de él.

«No hablo de ti, Judas de Simón. Hablo de Ester de Leví, nazarena, madre que ha muerto a causa de los comportamientos de su hijo. Jesús, ella murió en la noche que te marchaste. Sus invocaciones dirigidas a ti no eran por ella, pobre madre mártir de un hijo infame, sino por su hijo… porque nosotras las madres es de vosotros, los hijos, y no de nosotras, de quienes nos preocupamos… Ella quiere ver salvo a su Samuel… Pero ahora, ahora que ha muerto, Samuel, víctima del remordimiento, parece enloquecido, y no escucha ningún tipo de razones… Pero Tú puedes, Hijo, sanarle la mente y el espíritu…».

«¿Está arrepentido?».

«¿Cómo quieres que lo esté, si está desesperado?».

«Efectivamente, matar a la propia madre dándole un dolor continuo debe hacerle a uno un desesperado. No se viola impunemente el primero de los mandamientos de amor hacia el prójimo. Madre, ¿cómo quieres que Yo perdone y Dios dé paz al matricida impeniten­te?».

«Hijo mío, esa madre te pide paz desde la otra vida… Era buena… ha sufrido mucho…».

«La paz será suya…».

«No, Jesús. No puede tener paz un espíritu de madre, si ve a su hijo privado de Dios…».

«Justo es que esté privado».

«Sí, Hijo. Sí. Pero por la pobre Ester… La última palabra fue oración por su hijo… Y me dijo que te lo dijera. Jesús, Ester durante su vida no tuvo nunca una alegría, Tú lo sabes. Dale ésta, ahora que ha muerto; dásela a su espíritu, que sufre por su hijo».

«Madre, he tratado de convertir a Samuel en mis permanencias en Nazaret. Pero mis palabras han sido inútiles, porque en él estaba apagado el amor…».

«Lo sé. Pero Ester ofreció su perdón, sus sufrimientos, porque renaciera el amor en Samuel. Y, ¿quién sabe?, ¿este tormento suyo actual no podría ser amor que está resucitando? Un amor doloroso, y, alguno podría decir, un amor inútil, porque la madre ya no puede gozarlo. Pero Tú, pero yo, sabemos, yo por fe, Tú por conocimiento, que la caridad de los difuntos está atenta y cercana. Ni ignoran lo que sucede en los amados que han dejado aquí ni se desinteresan de ello… Y Ester puede aún gozar de este tardío amor por ella de su hijo ingrato, ahora perturbado por el remordimiento. ¡Oh, mi Jesús, ya sé que este hombre te causa horror por la enormidad de su culpa! ¡Un hijo que odia a su madre! Un monstruo para ti que eres todo amor hacia la tuya. Pero, precisamente porque eres todo amor hacia mí, escúchame. Volvamos juntos a Nazaret, en seguida. No siento el peso del camino, nada me pesa si sirve para salvar un alma…».

«Bien. Has vencido, Madre…

445.15

Judas de Simón, toma contigo a José y parte para Nazaret. Me llevarás a Samuel a Cafarnaúm».

«¿Yo? ¿Por qué yo?».

«Porque tú no estás cansado. Los otros sí. Durante mucho tiempo han andado, mientras tú descansabas…».

«También he andado yo. He estado en Nazaret, buscándote. Tu Madre lo puede decir».

«Tus compañeros han estado en Nazaret todos los sábados y ahora regresan de un largo recorrido. Ve y no discutas…».

«Es que… en Nazaret no me estiman… ¿Por qué me mandas precisamente a mí?».

«Tampoco me estiman a mí, y no obstante voy a Nazaret. No es necesario que le estimen a uno en un lugar para ir a él. Ve y no discutas, te repito».

«Maestro… yo tengo miedo de los dementes…».

«Ese hombre está perturbado por el remordimiento, pero no está loco».

«Tu Madre lo ha dicho…».

«Y Yo te digo por tercera vez: ve y no discutas. Meditar sobre las consecuencias que puede acarrear el hacer sufrir a una madre sólo podrá hacerte un bien…».

«¿Me estás comparando con Samuel? Mi madre es reina en su casa. Ni siquiera estoy con ella controlándola, ni siéndole gravoso con mi mantenimiento…».

«A las madres no les son gravosas estas cosas: Pero la falta de amor de los hijos, el que sean imperfectos a los ojos de Dios y de los hombres es una roca que las aplasta. Ve, te digo».

«Voy. ¿Y qué le voy a decir a ese hombre?».

«Que venga a verme a Cafarnaúm».

«Si no ha obedecido nunca ni siquiera a su madre, ¿cómo quieres que me obedezca a mí ahora, estando además tan desesperado?».

«¿Y no has comprendido todavía que si te envío es señal de que ya he actuado en el espíritu de Samuel, sacándole del delirio del remordimiento desesperado?».

«Voy. Adiós, Maestro. Adiós, Madre. Adiós, amigos». Y se marcha, sin ningún entusiasmo, seguido por José, que por el contrario está todo contento de ser elegido para esa misión.

445.16

Pedro, entre dientes, canturrea algunas palabras…

Jesús le pregunta: «¿Qué dices, Simón de Jonás».

«Cantaba una vieja canción del lago…».

«¿Y cuál es?».

«Es: “¡Siempre así! ¡Le gusta la pesca al agricultor, no le gusta pescar al pescador!”. Y en verdad aquí se ha visto que ha tenido más ganas de pescar el discípulo que el apóstol…».

Muchos se echan a reír. Jesús no se ríe, suspira.

«¿Te he apenado, Maestro?» pregunta Pedro.

«No. Pero no critiques siempre».

«Es por Judas por quien está apenado mi hermano» dice Judas de Alfeo.

«Guarda silencio también tú; sobre todo, en lo hondo de tu corazón».

«Pero ¿verdaderamente se ha efectuado ya en Samuel el mi­la­gro?» pregunta, curioso y un poco incrédulo, Tomás.

«Sí».

«Entonces es inútil que vaya a Cafarnaúm».

«Es necesario. No he curado del todo su corazón. Samuel tiene que buscar por sí mismo la curación, o sea, el perdón con un arrepentimiento santo. Pero he hecho que de nuevo sea capaz de razonar. Ahora le toca a él obtener el resto con su libre voluntad. Vamos a bajar. Vamos a estar con los humildes…».

«¿No a mi casa, Maestro?».

«No, Juana. Tú podrás venir a verme cuando quieras. Ellos están atados por sus trabajos, así que voy yo a ellos…».

Y Jesús baja de la terraza y sale a la calle seguido por los demás, también por Juana, que está bien decidida a no separarse de Jesús, dado que Jesús no está dispuesto a ir a su casa.

Van por entre las casitas pobres, en dirección a lugares cada vez más pobres y periféricos… Y la visión termina así.