Los Escritos de Maria Valtorta

465. A Bethsaïde, pour confier une tâche secrète

465. En Betsaida para un encargo secreto

465.1

« Dirige la barque vers Bethsaïde » ordonne Jésus, qui se trouve avec Jean dans une petite embarcation, une vraie coquille de noix, au milieu du lac qui s’éclaircit lentement en même temps que la lumière du jour.

Jean obéit sans mot dire. Une bonne brise tend la petite voile et fait glisser prestement la barque, qui penche même d’un côté, tant est vive son allure. La côte orientale fuit rapidement et la courbe du côté nord du lac devient de plus en plus proche.

« Aborde avant le village. Je veux aller chez Porphyrée sans être vu par d’autres. Quant à toi, rejoins-moi ensuite à l’endroit habituel, et attends-moi dans la barque.

– Oui, Maître. Et si quelqu’un me voit ?

– Retiens-les tous sans dire où je suis. J’aurai vite fait. »

Jean repère sur la plage un endroit favorable pour l’abordage ; il le trouve dans un semblant, un vrai semblant de torrent sableux dans lequel on a enlevé du sable pour quelque besoin. Cela forme un petit golfe de quelques mètres, mais dans lequel une barque peut accoster à la rive, qui est à environ cinquante centimètres au-dessus de l’eau. C’est là qu’il se dirige. La barque frôle légèrement la grève mais réussit à accoster. Jean la tient arrêtée contre le bord en s’agrippant à une racine qui sort du sable.

Jésus saute sur la rive. Jean y appuie la rame et pousse pour permettre à la barque de repartir. Il y parvient. Il lève son visage éclairé par son bon sourire et dit :

« Adieu, Maître.

– Adieu, Jean. »

Jésus s’éloigne au milieu des arbres tandis que Jean louvoie avec sa petite barque.

465.2

Jésus tourne et prend la direction de l’intérieur. Il traverse rapidement les jardins à l’arrière de Bethsaïde, pour éviter d’entrer dans le village à l’heure où il va s’animer. Il arrive, sans rencontrer personne, à la maison de Pierre et frappe à la porte de la cuisine. Après quelques secondes, Porphyrée, hésitante, passe la tête au-dessus du muret du toit. Elle le voit et pousse un “ Oh ! ” de stupeur. Elle rassemble de la main sa splendide chevelure — c’est sa seule beauté —, toute défaite sur ses épaules, et se hâte de descendre par le petit escalier, pieds nus, dans sa toilette rapide du matin.

« Seigneur, toi ! Tu es seul ?

– Oui, Porphyrée. Où est Marziam ?

– Il dort encore. Il était un peu triste, abattu… Je le ménage un peu. C’est l’âge aussi… la croissance… Quand il dort, il ne pense pas et ne pleure pas…

– Il pleure souvent ?

– Oui, Maître. Je crois que c’est sa faiblesse actuelle, et je cherche à le fortifier… et à le consoler… Mais il dit : “ Je reste seul. Tous ceux que j’aime s’en vont. Et quand Jésus ne sera plus là… ” Il dit cela comme si tu devais nous quitter… Bien sûr… il a eu beaucoup de peines dans sa vie… Mais Simon et moi, nous l’aimons… beaucoup, sois-en sûr, Maître.

– Je le sais. Mais son âme devine… Porphyrée, j’ai justement besoin de te parler de ces choses. C’est pour cela que je suis venu, sans Simon, à cette heure. Où devons-nous aller pour que Marziam n’entende pas et que personne ne nous dérange ?

– Seigneur… Je n’ai que… ma chambre matrimoniale, ou bien la salle des filets… Marziam est au-dessus. J’y étais moi aussi car, pour fuir la chaleur, nous sommes allés dormir là-haut…

– Allons dans la salle des filets. Elle est plus loin et Marziam n’entendra pas, même s’il se réveille.

– Viens, Seigneur. »

Porphyrée le conduit dans la pièce, encombrée d’un véritable fourbi : filets, rames, provisions, du foin pour les brebis, un métier à tisser…

Elle se hâte de débarrasser une sorte de coffre appuyé contre le mur et de l’essuyer avec un paquet d’étoupe pour que le Maître s’y asseye.

« Peu importe, femme, je ne suis pas fatigué. »

Porphyrée lève ses yeux pleins de douceur sur le visage défait, tiré de Jésus, et elle semble vouloir lui dire : “ Si, tu l’es. ” Mais, habituée à se taire, elle garde le silence.

465.3

« Ecoute, Porphyrée. Tu es une brave femme et un bon disciple. Je t’ai beaucoup aimée depuis que je te connais, et c’est avec une grande joie que je t’ai accueillie comme disciple et que je t’ai confié l’enfant. Je te sais prudente et vertueuse comme il y en a peu. Tu sais te taire, vertu très rare chez les femmes. Pour toutes ces raisons, je suis venu te parler en secret et te donner une consigne que personne ne connaît, pas même les apôtres, pas même Simon. Je te la confie pour te dire comment tu dois te comporter à l’avenir avec Marziam… et avec tout le monde… Je suis sûr que tu satisferas ton Maître en ce que je te demande, et que tu seras prudente comme toujours… »

Porphyrée, qui est devenue toute rouge en entendant l’éloge de son Seigneur, n’acquiesce que de la tête. Elle qui est si timide et si habituée à être dominée par des volontés autoritaires qui s’imposent à elle sans savoir si elle est disposée à consentir, elle est trop émue pour dire par des mots qu’elle acquiesce.

« Porphyrée… je ne reviendrai plus jamais ici, plus jamais, jusqu’à ce que tout soit accompli… Tu sais, n’est-ce pas, ce que je dois accomplir ?… »

Porphyrée, à ces mots, a laissé retomber ses cheveux, qu’elle retenait encore sur la nuque de la main gauche et elle a, plus qu’un cri, un sanglot qu’elle étouffe en portant ses deux mains à son visage, tandis qu’elle glisse à genoux en gémissant :

« Je le sais, Seigneur, mon Dieu… »

Elle pleure en silence ; on ne s’en aperçoit que par les larmes qui gouttent par terre de ses doigts appuyés sur son visage.

« Ne pleure pas, Porphyrée. C’est pour cela que je suis venu. Je suis prêt… de même que les hommes qui, en servant le Mal, feront en réalité le Bien, parce qu’ils provoqueront la venue de l’heure de la Rédemption. Elle pourrait s’accomplir dès maintenant parce que, moi aussi bien qu’eux, nous sommes préparés… Et toute heure supplémentaire qui passe, ou tout événement qui surviendra ne seront que… un perfectionnement pour leur crime et… pour mon Sacrifice. Mais même ces heures, nombreuses encore, qui précéderont cette heure-là, serviront… Il y a encore quelque chose à faire et à dire pour que tout ce qui était à accomplir, en me faisant connaître, soit réalisé… Mais je ne reviendrai plus ici… Je regarde pour la dernière fois cet endroit… et j’entre pour la dernière fois dans cette maison honnête… Ne pleure pas… Je n’ai pas voulu partir sans te dire adieu et t’apporter la bénédiction de ton Maître. Maintenant, je vais emmener Marziam sur la route des confins de la Phénicie, puis quand je descendrai en Judée pour la fête des Tentes. Je trouverai bien un moyen de le renvoyer avant le plein hiver. Pauvre enfant ! Il va profiter de moi pendant quelque temps.

465.4

Et puis… Porphyrée, il n’est pas bon que Marziam soit présent à mon heure. Tu ne le laisseras donc pas partir pour la Pâque…

– Mais le précepte, Seigneur…

– Je l’absous du précepte. Je suis le Maître, Porphyrée, et je suis Dieu, tu le sais. Comme Dieu, je peux l’absoudre à l’avance d’une omission qui n’en est même pas une, puisque je l’ordonne pour un motif de justice. L’obéissance à mon ordre est déjà par elle-même une absolution à l’omission du précepte, car l’obéissance à Dieu — et c’est aussi un sacrifice pour Marziam — est toujours supérieure à toute autre chose. Et je suis le Maître. N’est pas un bon Maître celui qui ne sait pas mesurer les possibilités et les réactions de son disciple, et ne réfléchit pas aux conséquences qu’un effort supérieur à ce qu’un disciple peut supporter, peut produire en lui. Même en imposant les vertus, il faut être prudent et ne pas demander un maximum que la formation spirituelle et les ressources générales de l’être ne peuvent fournir. En exigeant une vertu ou une maîtrise spirituelle trop forte, par rapport au niveau des forces spirituelles, morales et même physiques atteint par une créature, on peut produire une dispersion des forces déjà accumulées et un brisement de l’être dans ses trois degrés : spirituel, moral et physique. Marziam, ce pauvre enfant, n’a déjà que trop souffert. Il a connu la brutalité de ses semblables, jusqu’à éprouver de la haine pour eux. Il ne pourrait supporter ce que sera ma Passion : une mer d’amour douloureux dans laquelle je laverai les péchés du monde, et une mer de haine satanique qui essaiera de submerger tous ceux que j’ai aimés et d’anéantir tout mon travail de Maître. En vérité, je te dis que même les plus forts ploieront sous la marée de Satan, du moins pour un court laps de temps… Mais je ne veux pas que Marziam fléchisse et boive cette eau désolante… C’est un innocent… et il m’est cher… J’ai pitié de lui, une grande pitié, car il a déjà souffert plus que ses forces ne le lui permettaient… J’ai rappelé dans l’au-delà l’âme de Jean d’En-Dor…

– Jean est mort? Oh ! Marziam avait écrit plusieurs rouleaux pour lui… Ce sera une souffrance de plus pour l’enfant…

– Je le lui annoncerai moi-même… Je disais que je l’ai enlevé de la vie, pour le préserver lui aussi du choc de cette heure. Jean, de même, avait trop souffert à cause des hommes. Pourquoi réveiller les sentiments assoupis ? Dieu est bon. Il éprouve ses enfants, mais ce n’est pas un expérimentateur imprudent… Ah ! si les hommes savaient en faire autant ! Combien de ruines des cœurs, ou simplement combien de bourrasques dangereuses dans les cœurs seraient évitées ! Mais, pour en revenir à Marziam, il ne doit pas venir à la prochaine Pâque. Pour le moment, tu ne lui diras rien. Le moment venu, tu lui parleras ainsi : “ Le Maître m’a donné l’ordre de ne pas t’envoyer à Jérusalem, et il te promet une récompense spéciale si tu lui obéis. ” Marziam est bon et il obéira…

465.5

Porphyrée, voilà ce que j’attends de toi : ton silence, ta fidélité, ton amour.

– Tout ce que tu veux, mon Seigneur. Tu honores trop ta pauvre servante… Je ne mérite pas tant… Va en paix, mon Maître et mon Dieu. Je ferai ce que tu veux… »

Mais la douleur a raison d’elle. Elle, qui était jusque là restée à genoux, assise sur les talons, les yeux fixés sur le visage de Jésus, tombe maintenant à terre, toute couverte du manteau de ses cheveux de jais, et éclate en sanglots :

« Mais quelle souffrance, Maître, quelle souffrance ! C’est fini ! C’est fini pour le monde ! Pour nous qui t’aimons ! Pour ta servante ! Tu es le seul à m’avoir vraiment aimée ! Tu ne m’a jamais méprisée, tu n’as pas été autoritaire avec moi, tu m’as traitée comme les autres, moi qui suis si ignorante, si pauvre, si sotte ! Oh ! Marziam et moi, car c’est Marziam qui me l’avait dit le premier, puis nous nous étions tranquillisés… Tout le monde disait que cela ne pouvait être vrai… Tous : Simon, Nathanaël, Philippe… leurs femmes… et eux savent, eux sont sages… et Simon… ah ! si tu as choisi mon Simon, il doit valoir quelque chose !… tous prétendaient que c’est impossible… Mais maintenant, c’est toi qui l’annonces… et on ne peut douter de ta parole… »

Elle est vraiment bouleversée, et sa douleur est émouvante.

Jésus se penche pour lui poser la main sur la tête :

« Ne pleure pas ainsi… Marziam va entendre… Je le sais… Personne n’y croit, personne ne veut arriver à croire… C’est d’ailleurs leur sagesse et leur amour qui sont la cause de leur refus de croire… Mais c’est ainsi… Porphyrée, je m’en vais. Avant de te quitter, je te bénis pour maintenant et pour toujours. Rappelle-toi toujours que je t’ai aimée et que je me suis réjoui de ton amour pour moi. Je ne te dis pas : persévère en lui. Je sais que tu le feras, car le souvenir de ton Maître sera toujours ta douceur et tu y trouveras ton refuge… ta douceur et ta paix, même à l’heure de la mort. Pense à ce moment-là que ton Maître est mort pour t’ouvrir le Paradis et qu’il t’y attend… Allons, lève-toi ! Je vais réveiller Marziam et le retenir. Toi, efface les traces de tes larmes, puis rejoins-nous. Jean m’attend pour me conduire à Capharnaüm. Si tu as des choses à faire parvenir à Simon, prépare-les. Rappelle-toi qu’il va avoir besoin de ses vêtements chauds… »

Toute soumise et prompte à obéir, Porphyrée baise les pieds de Jésus et va se lever quand une vague d’amour lui fait soudain perdre la tête et, en rougissant vivement, elle saisit les deux mains de Jésus et les baise une, deux, dix fois. Puis elle se lève et le laisse partir…

465.6

Jésus sort, monte sur la terrasse, pénètre sous une sorte de pavillon fait de voiles tendues sur des cordes, sous lequel se trouvent deux couchettes. Marziam dort encore, le visage presque baissé, appuyé sur le petit oreiller. On ne voit qu’une pommette de son visage brun et un bras long et maigre qui sort de sous le drap qui le couvre.

Jésus s’assied par terre, près du petit lit, et caresse légèrement les mèches dépeignées qui retombent sur la joue pâle du dormeur, qui fait un mouvement sans encore s’éveiller. Son visage est maintenant découvert. Jésus répète son geste, et se penche pour déposer un baiser sur son front. Marziam ouvre les yeux et voit Jésus à côté de lui, penché sur lui. Il a du mal à croire — peut-être pense-t-il rêver —, mais Jésus l’appelle ; le jeune garçon se dresse alors et se jette dans les bras de Jésus, s’y réfugie…

« Toi ici, Maître ?

– Je suis venu te chercher pour t’emmener pendant quelques mois. Es-tu content ?

– Oh ! et Simon ?

– Il est à Capharnaüm. Je suis venu avec Jean…

– Il est revenu lui aussi ? Il doit être heureux! Je lui donnerai ce que j’ai écrit.

– Je ne parle pas de Jean d’En-Dor, mais de Jean, fils de Zébédée. N’es-tu pas content ?

– Si, je l’aime bien. L’autre aussi… presque davantage…

– Pourquoi, Marziam ? Jean, fils de Zébédée, est si bon !

– Oui, mais l’autre est très malheureux. Moi aussi je l’ai été, et je le suis encore un peu… Entre gens qui souffrent, on se comprend et on s’aime…

– Serais-tu content de savoir qu’il ne souffre plus et qu’il est très heureux ?

– Oui, je le serais. Mais il ne peut l’être que s’il est avec toi. Ou bien… Serait-il mort, Seigneur ?

– Il est dans la paix. Il faut s’en réjouir, sans égoïsme, car il est mort en juste et parce que maintenant il n’y a plus de séparation entre son âme et la nôtre. Nous avons un ami de plus qui prie pour nous. »

Marziam a deux grosses larmes qui coulent sur son visage vraiment très amaigri et pâle, mais il murmure :

« C’est vrai. »

Jésus ne dit rien de plus à ce sujet, et il ne fait aucune observation sur l’état physique et moral de Marziam, qui est visiblement affaibli. Au contraire, il dit :

« Allons, partons ! J’ai déjà parlé à Porphyrée qui a certainement préparé tes vêtements. Prépare-toi, toi aussi, car Jean nous attend. Nous allons faire une surprise à Simon. N’est-ce pas sa barque qui revient à Capharnaüm ? Il a peut-être pêché au retour…

– Oui, c’est bien elle. Où allons-nous, Seigneur ?

– Au nord, puis en Judée.

– Pour longtemps ?

– Pour longtemps. »

Marziam, tout heureux à la pensée de rester avec Jésus, se lève promptement et court se laver au lac ; il revient avec les cheveux encore humides, en criant :

« J’ai vu Jean, il m’a fait un signe pour me saluer. Il est à l’embouchure, au milieu des roseaux…

– Allons-y. »

465.7

Ils descendent. Porphyrée est en train de fermer deux sacs, et elle explique :

« J’ai pensé envoyer plus tard les gros vêtements chauds, par mon frère, pour la fête des Tentes, à Gethsémani. Vous marcherez plus à l’aise, aussi bien toi que ton père. »

Et tout en finissant de lier les courroies, elle montre ce qu’elle a mis dans les sacs : du lait, du pain, des fruits…

« Nous allons tout prendre et nous mangerons sur l’eau. Je veux partir avant qu’il n’y ait trop de monde sur la rive. Adieu, Porphyrée. Que Dieu te bénisse toujours et que la paix des justes soit toujours en toi. Viens, Marziam. »

Ils ont vite parcouru le court trajet et, pendant que Marziam va trouver Jean, Jésus se dirige vers la barque. Il est aussitôt rejoint par les deux jeunes hommes, qui courent à travers les roseaux. Ils sautent à bord en appuyant la rame contre le rivage pour s’éloigner en eau profonde.

La traversée est rapide, et ils s’arrêtent sur la plage de Capharnaüm, pour attendre la barque de Pierre qui va arriver. L’heure leur permet d’échapper à l’assaut des gens et, couchés sur le sable, à l’ombre de leur embarcation, ils peuvent manger en paix leur pain et leurs fruits.

Simon ne connaît pas la petite barque. Aussi, c’est seulement lorsqu’il pose le pied sur la rive et qu’il voit Jésus se lever par derrière, qu’il le remarque.

« Maître ! Toi aussi, tu es là, Marziam ! Mais depuis quand ?

– Depuis tout à l’heure. Je suis passé par Bethsaïde. Dépêche-toi. Il nous faut partir tout de suite… »

Pierre le regarde sans mot dire. Lui et ses compagnons déchargent la barque du poisson qu’il a pris, des sacs de vêtements, y compris celui de Jean qui peut enfin s’habiller. Et Simon demande quelque chose à son compagnon, qui lui fait un signe, comme pour lui dire : “ Attends… ”

Ils arrivent à la maison, et entrent. Les apôtres qui étaient restés accourent.

« Faites vite. Nous partons sur-le-champ. Prenez tout, car nous ne reviendrons pas ici » ordonne Jésus.

Les apôtres se regardent, et c’est tout une mimique de signes entre les deux groupes. Mais ils obéissent. Je crois même qu’ils le font avec empressement pour pouvoir parler entre eux dans les autres pièces…

465.8

Jésus reste dans la cuisine avec Marziam et prend congé des maîtres de maison. Il ne dit à personne qu’il ne reviendra pas, pas plus à eux qu’aux habitants de Capharnaüm qui le voient et lui disent bonjour. Il se contente de les saluer, comme il le fait à chaque départ. Il s’arrête seulement chez Jaïre, mais le chef de la synaguogue n’est pas rentré…

Il rencontre, près de la fontaine, la vieille femme qui habite à côté de la maison du petit Alphée et lui dit :

« Une veuve va bientôt venir ici. Elle te cherchera. Elle va s’établir ici. Sois une amie pour elle et aimez beaucoup l’enfant et ses frères… Faites-le saintement, en mon nom… »

Il reprend sa marche en disant :

« J’aurais voulu saluer tous les enfants…

– Tu peux le faire, Maître. Pourquoi ne t’es-tu pas reposé ? Tu es bien las. Ton visage est pâle et ton œil fatigué. Cela va te faire mal… Il fait encore chaud et tu n’as certainement pas dormi, ni à Tibériade, ni là-bas, chez Kouza…

– Je ne peux pas, Simon. Je dois aller en plusieurs endroits, et le temps presse… »

Ils sont arrivés au rivage. Jésus appelle les acolytes de Pierre et les salue, en leur donnant l’ordre de reconduire la petite barque dans le village qui précède Hippos, et de la rendre à Saül, fils de Zacharie.

Prenant la route ombragée qui côtoie le fleuve, il la suit jusqu’à une bifurcation, dans laquelle il s’engage.

« Où allons-nous, Seigneur ? demande Simon, qui jusqu’alors conversait à voix basse avec ses compagnons.

– Chez Jude et Anne, puis à Chorazeïn. Je veux saluer mes bons amis. »

Autres coups d’œil des apôtres entre eux et autre murmure à voix basse.

465.9

Enfin Jacques, fils d’Alphée, s’avance et rejoint Jésus, qui marche en tête avec Marziam.

« Mon Frère, tu dis que tu veux saluer tes amis : cela signifie que nous ne reviendrons plus ici ? Nous aimerions le savoir.

– Vous y reviendrez certainement, mais dans plusieurs mois.

– Et toi ? »

Jésus fait un geste évasif… Marziam se retire discrètement et se joint aux autres, c’est-à-dire à tous, sauf à Jacques, fils d’Alphée, qui est avec Jésus, et à Judas qui marche seul, à l’arrière, l’air plutôt sombre et ennuyé.

« Frère, que t’est-il arrivé ? dit Jacques en mettant une main sur l’épaule de Jésus.

– Pourquoi me poses-tu cette question ?

– Parce que… Je ne sais pas. Nous nous le demandons tous. Tu nous sembles différent… Tu es venu seul avec Jean… Simon a dit que tu as été l’hôte de Kouza… Tu ne prends pas de repos… Tu ne salues que peu de gens… On dirait que tu ne veux plus revenir ici… Et ton visage… Nous ne méritons plus de savoir ? Pas même moi… ? Tu m’aimais… Tu m’as dit des choses que je suis seul à connaître…

– Je t’aime encore, mais je n’ai rien à dire. J’ai perdu un jour de plus que prévu. Je le rattrape.

– Etait-il nécessaire d’aller au nord ?

– Oui, mon frère.

– Alors… Ah ! tu as souffert, je le sens… »

Jésus enlace son cousin en lui passant un bras derrière les épaules :

« Jean d’En-Dor est mort. Tu le sais ?

– Simon me l’a dit pendant que je préparais les vêtements. Et puis ?…

– Je me suis séparé de ma Mère.

– Et puis ? »

Jacques, plus petit que Jésus, le regarde par en dessous, insistant, inquisiteur.

« Et puis je suis content d’être avec toi, avec vous, avec Marziam. Je vais le garder avec moi pendant quelques mois. Il en a besoin. Il est triste et souffrant. Tu l’as vu ?

– Oui, mais il ne s’agit pas de cela… Tu ne veux pas me le confier, peu importe. Je t’aime bien, même si tu ne me traites pas en ami.

– Jacques, tu es pour moi plus qu’un ami. Mais mon cœur a besoin de repos…

– Et donc de ne pas parler de ce qui te fait souffrir. J’ai compris. C’est Judas qui t’afflige ?

– Qui? Ton frère[1] ?

– Non, l’autre.

– Pourquoi cette question ?

– Je ne sais pas. Pendant que tu étais absent, un homme, envoyé par nous ne savons qui, a cherché Judas plusieurs fois. Lui l’a toujours repoussé, mais…

– Pour vous, tout acte de Judas est toujours un crime. Pourquoi manquer à la charité ?

– C’est qu’il est tellement renfrogné, troublé. Il fuit ses compagnons. Il est nonchalant…

– Laisse-le faire. Depuis plus de deux années qu’il est avec nous, il a toujours été ainsi… Pense aux deux petits vieux, comme ils vont être heureux. Et sais-tu pourquoi je vais là ? Je veux leur recommander le petit menuisier de Chorazeïn … »

Ils s’éloignent en parlant. Derrière eux, en groupe, suivent les apôtres qui ont attendu Judas pour ne pas le laisser seul en arrière, bien qu’il ait un air si visiblement bougon que cela n’incite vraiment pas à désirer sa compagnie.

465.1

«Dirige la barca a Betsaida» ordena Jesús, que está con Juan en una pequeña barca, verdaderamente una cáscara de nuez, en medio del lago, que lentamente va aclarándose con el clarear del día.

Juan obedece sin decir nada. Un vientecillo más bien enérgico pone tirante la pequeña vela y da veloz movimiento a la barca, que hasta se inclina hacia uno de los lados, de tan veloz como es su marcha. La costa oriental va pasando rápidamente y la curva del lado septentrional se va acercando cada vez más.

«Aborda antes del pueblo. Quiero ir donde Porfiria sin que me vean otros, y luego ve al lugar de siempre y me esperas en la barca».

«Sí, Maestro. ¿Y si me ve alguien?».

«Reténlos a todos, pero no les digas dónde estoy. Tardaré poco».

Juan observa si en la playa hay un lugar bueno para abordar. Lo encuentra: es un recuerdo, sólo un recuerdo, de torrente arenoso al que los hombres le han extraído tierra para alguna necesidad que tuvieran; de manera que forma un golfito de pocos metros, pero suficiente para que una barca se arrime a la orilla, elevada unos cincuenta centímetros por encima del agua. Va allí. La barca roza un poco en el guijo pero logra abordar, y Juan la mantiene arrimada a la orilla agarrando una raíz que sobresale de la tierra.

Jesús salta a la orilla. Juan dirige el remo contra ella y hace fuerza para impulsar a la barca de nuevo al lago. Lo consigue. Levanta la cara, iluminada con su sonrisa buena, y dice: «Adiós, Maestro».

«Adiós, Juan» y Jesús se encamina por entre los árboles, mientras Juan da bordadas con su barquita.

465.2

Jesús tuerce hacia el interior, pasa entre unas huertas situadas a espaldas de Betsaida. Va raudo para evitar entrar en el pueblo cuando éste se anima. Llega, sin toparse con nadie en el camino, a la casa de Pedro. Llama a la puerta de la cocina. Pasados unos segundos, la cabeza de Porfiria se asoma cauta por encima del pretil de la azotea. Ve y emite una exclamación de estupor. Recoge con una mano sus espléndidos cabellos —su única belleza— que le caen sueltos por la espalda, y baja corriendo por la pequeña escalera, descalza (así está en este momento del apresurado aseo de la mañana).

«¡Señor, Tú! ¿Solo?».

«Sí, Porfiria. ¿Margziam dónde está?».

«Está durmiendo. Todavía duerme. El muchacho se ha quedado un poco triste, un poco lánguido… así que le descargo un poco. Es también la edad… el desarrollo… Mientras duerme ni piensa ni llora…».

«¿Llora a menudo?».

«Sí, Maestro. Creo que es su debilidad actual. Y trato de fortalecerle… y consolarle… Pero dice: “Me quedo solo. Todas las personas a las que quiero se marchan. Cuando no esté ya Jesús…”, y lo dice como si estuvieras para dejarnos… Es verdad que ha sufrido mucho en su vida… Pero yo y Simón le queremos… Mucho. Créelo, Maestro».

«Lo sé. Pero su alma siente… Porfiria, necesito hablarte precisamente de estas cosas. Por este motivo he venido, sin Simón, a esta hora. ¿Dónde podemos ir para hablar, de forma que Margziam no nos oiga y que nadie moleste?».

«Señor… Sólo tengo… mi habitación nupcial, o el cuarto de las redes… Arriba está Margziam. Yo también estaba, porque, para huir del calor nos hemos ido a dormir ahí arriba…».

«Vamos al cuarto de las redes. Está más lejos. Margziam no nos oirá aunque se despierte».

«Ven, Señor», y Porfiria le guía hasta el rústico y amplio cuarto, ocupado por un poco de todo: redes, remos, comestibles, heno para las ovejas, un telar…

Porfiria se apresura a liberar una especie de tabla adosada a la pared, y a desempolvarla con un ovillo de estopa, para que el Maestro se siente.

«No importa, mujer. No estoy cansado».

Porfiria alza sus mansos ojos para mirar el rostro ajado, fatigado de Jesús, y parecer querer decir: «Sí que lo estás». Pero, acostumbrada a callar, no habla.

465.3

«Escucha, Porfiria. Tú eres una mujer buena y una buena discípula. Te he querido mucho desde que te conocí, y con mucha alegría te he recibido como discípula y he puesto en tus manos al niño. Sé que eres prudente y virtuosa como pocas. Y sé que sabes guardar silencio, virtud rarísima en las mujeres. Por todo esto he venido a hablarte en secreto y a confiarte una cosa que ninguno sabe, ni siquiera los apóstoles, ni siquiera Simón. Te la confío porque debo decirte cómo te debes comportar en el futuro con Margziam… y con todos… Estoy seguro de que complacerás a tu Maestro en lo que te pide y que serás prudente como siempre…».

Porfiria, que se ha puesto como la púrpura al oír de su Señor este encomio, no hace más que asentir con la cabeza, estando, como está, demasiado conmovida —ella que es tan tímida y que está acostumbrada a sufrir siempre la presión de voluntades dominantes que imponen sin saber si ella está dispuesta a asentir…—, demasiado conmovida para poder decir con las palabras que acepta.

«Porfiria… Yo no volveré nunca más por aquí. Nunca más hasta que todo esté consumado… ¿Sabes, no es verdad, lo que debo consumar?…».

Porfiria, al oír estas palabras, ha dejado sueltos sus cabellos, que tenía recogidos todavía en la nuca con la izquierda, y emite, más que un grito, un sollozo, un sollozo que sofoca llevándose las dos manos a la cara, mientras lentamente cae de rodillas gimiendo: «Lo sé, Señor, mi Dios…», y llora con silencioso llanto, que no se acusa sino por las lágrimas, que gotean contra el suelo a través de los dedos que comprimen la cara.

«No llores, Porfiria. Para esto he venido. Yo estoy preparado… y también lo están los que, sirviendo al Mal, servirán al Bien, en verdad, porque harán surgir la hora de la Redención. Podría cumplirse incluso ahora, porque tanto Yo como ellos estamos preparados… y cada hora que pase o cada hecho que suceda no serán sino… perfeccionamiento para su delito… y para mi Sacrificio. Y serán útiles, también, estas horas, todavía numerosas, que transcurrirán antes de esa hora… Hay todavía algunas cosas que cumplir y que decir, para que todo lo que debía cumplirse para conocimiento de mí quede realizado… Pero Yo no volveré a venir aquí… Miro por última vez este lugar… y entro por última vez en esta casa honrada… No llores… No he querido irme sin darte el adiós y la bendición de tu Maestro. Me llevaré conmigo a Margziam. Le llevaré conmigo ahora, yendo hacia los confines fenicios, y luego, cuando baje a Judea para los Tabernáculos. No me faltará el modo de mandarle para acá antes del pleno invierno. ¡Pobre niño! Gozará de mí durante un tiempo.

465.4

Y además… Porfiria, no es indicado que Margziam esté presente en mi hora. Por tanto, no le dejarás partir para la Pascua…».

«El precepto, Señor…».

«Yo le libero del precepto. Soy el Maestro, Porfiria, y soy Dios, tú lo sabes. Como Dios puedo absolver anticipadamente de una omisión, que ni siquiera lo es porque la ordeno Yo por un motivo de justicia. La obediencia a mi orden es ya de por sí absolución a la omisión del precepto, porque la obediencia a Dios —y ésta es también un sacrificio para Margziam— es siempre superior a cualquier otra cosa. Y soy Maestro. No es buen Maestro el que no sabe medir las cualidades y las reacciones de un discípulo suyo, y no sabe meditar sobre las consecuencias que un esfuerzo superior a lo que el discípulo puede soportar puede producir en él. También cuando se impone la virtud hay que ser prudentes y no pretender un máximo que la formación espiritual o las fuerzas generales del ser no pueden dar. Exigiendo una virtud o un dominio espiritual demasiado fuertes respecto al grado de fuerzas espirituales, morales e incluso físicas alcanzado por la criatura, se puede producir una dispersión de las fuerzas ya acumuladas y un quebrantamiento del ser en sus tres grados: espiritual, moral, físico. Margziam, un pobre niño, ha sufrido demasiado ya, y ha conocido demasiado la brutalidad de sus semejantes, hasta rozar el odio hacia ellos. No podría soportar lo que será mi Pasión: mar de amor doloroso en que lavaré los pecados del mundo, y mar de odio satánico que tratará de sumergir a todos aquellos que Yo he amado y de anular todo mi trabajo de Maestro. En verdad te digo que hasta los más fuertes se plegarán bajo la marea de Satanás, al menos durante un breve tiempo… Pero no quiero que Margziam se pliegue y que beba esa ola desoladora… Es un inocente… y le quiero… Yo siento piedad, mucha, por quien ya ha sufrido más que lo que sus fuerzas consienten… He llamado al más allá al espíritu de Juan de Endor…».

«¿Ha muerto Juan? ¡Oh! Margziam había escrito muchos rollos para él… Otro dolor para el niño…».

«Le hablaré Yo de la muerte de Juan… Decía que le he arrebatado a esta vida para preservarle también a él del choque de esa hora. También Juan había sufrido demasiado por parte de los hombres. ¿Por qué despertar los sentimientos adormecidos? Dios es bueno. Prueba a sus hijos. Pero no es un incauto experimentador… ¡Oh, si los hombres supieran hacer lo mismo! ¡Cuántas menos destrucciones de corazones, o simplemente cuántas menos borrascas peligrosas en los corazones!… Pero, volviendo a Margziam, él no debe venir a la Pascua próxima. Por ahora tú no hablarás. Cuando llegue el momento, le dirás esto: “El Maestro me ha dado la orden de no mandarte a Jerusalén. Y te promete un premio singular si le obedeces”. Margziam es bueno y obedecerá…

465.5

Porfiria, esto es lo que quiero de ti, tu silencio, tu fidelidad, tu amor».

«Todo lo que quieras, mi Señor. Honras demasiado a tu pobre sierva… No merezco tanto… Ve tranquilo, Maestro y Dios. Haré lo que quieres…». Pero el dolor la vence y cae rostro en tierra —antes había permanecido siempre arrodillada, relajada sobre los talones, con los ojos fijos en la cara de Jesús—; cae al suelo, cubierta toda por el manto de sus cabellos de azabache, y solloza fuertemente: «¡Qué dolor, Maestro! ¡Oh, qué dolor! ¡Qué termina! ¡Qué termina para el mundo! ¡Qué, para nosotros que te amamos! ¡Qué, para tu sierva! ¡El Único! ¡El Único que realmente me ha amado, que no me ha despreciado nunca, que no ha sido dominante conmigo, que me ha tratado como a las otras, a mí que soy tan ignorante, tan poca cosa, tan torpe! ¡Oh, y yo y Margziam, porque primero me lo dijo Margziam a mí, nos habíamos serenado…! Todos decían que no podía ser cierto… Todos: Simón, Natanael, Felipe… sus mujeres… y ellos saben, son hombres sabios… y Simón… ¡hombre, mi Simón… si Tú le has elegido debe valer algo!… ¡y todos… todos decían que no podía ser!… Pero ahora lo dices Tú, Tú lo dices… y no se puede dudar de tu palabra…». Está verdaderamente desolada, y conmueve por su dolor.

Jesús se curva hasta ponerle una mano en la cabeza. No llores así… Va a oír Margziam… Ya sé que ninguno lo cree, ninguno quiere llegar a creer… y su propia sabiduría y su propio amor causa en ellos el no creer… Y, no obstante, así es… Porfiria, Yo me marcho. Antes de dejarte, te bendigo para este momento y para siempre. Piensa siempre que te he amado y que he estado contento de tu amor por mí. No te digo: persevera en él. Sé que lo harás, porque el recuerdo de tu Maestro será siempre tu dulzura, en la que te refugiarás. Tu dulzura y tu paz, incluso en la hora de la muerte. Piensa entonces que tu Maestro murió para abrirte el Paraíso, y que te espera allí… ¡Hala, levántate! Voy a despertar a Margziam y a entretenerle un poco. Tú, mientras, borra las huellas de tu llanto, y luego ven donde nosotros. Juan me espera para llevarme a Cafarnaúm. Si tienes algo que mandar a Simón, prepáralo. Recuerda que tendrá necesidad de su ropa gruesa…».

Porfiria, verdadera criatura de sumisión y solícita obediencia, besa los pies de Jesús y hace ademán de levantarse, pero una ola de amor le hace perder el control y, ruborizándose vivamente, toma las dos manos de Jesús y las besa: una, dos, diez veces. Luego se levanta y deja que se marche…

465.6

Jesús sale, sube a la terraza, entra en una especie de pabellón hecho de velas extendidas y sujetas por cuerdas, bajo el cual están los dos lechos. Margziam duerme todavía, con la cara casi hacia abajo, comprimida contra la pequeña almohada. Se ve solamente un pómulo de su cara morenita, y un brazo, largo y delgado, fuera de la sábana que le cubre. Jesús se sienta en el suelo, al lado del lecho, y acaricia levemente los cabellos desordenados que caen sobre el pálido carrillo del durmiente, el cual se mueve un poco pero sin despertarse todavía. Jesús repite el gesto, y luego se inclina a besar en la frente el rostro, que ahora está descubierto. Margziam abre los ojos y ve a Jesús a su lado, inclinado hacia él. Casi no da crédito a lo que ve, quizás piensa que está soñando; pero Jesús le llama, y entonces el jovencito se incorpora, y se echa en los brazos de Jesús, se refugia en sus brazos…

«¿Tú aquí, Maestro?».

«He venido a recogerte, para llevarte conmigo durante unos meses. ¿Te gusta?».

«¡Oh! ¿Y Simón?».

«Está en Cafarnaúm. Hemos venido Yo y Juan…».

«¿Ha vuelto también él? ¡Se va a alegrar! Le daré lo que he escrito».

«No hablo de Juan de Endor, sino de Juan de Zebedeo. ¿No estás contento?».

«Sí. Le quiero. Pero también al otro… casi más…».

«¿Por qué, Margziam? Juan de Zebedeo es muy bueno».

«Sí, pero el otro es muy infeliz, y yo también he sido infeliz, y un poco infeliz me siento todavía… Entre los que sufrimos nos comprendemos y nos queremos…».

«¿Te alegraría el saber que ya no sufre y que es muy feliz?».

«Claro que me alegraría. Pero el sólo puede ser feliz si está contigo… O es que… ¿es que ha muerto, Señor?».

«Está en la paz, y hay que alegrarse de ello, sin egoísmos, porque ha muerto como un justo y porque ahora ya no hay separación entre su espíritu y el nuestro. Tenemos un amigo más que ora por nosotros».

Margziam tiene dos lagrimones en la cara, verdaderamente muy enflaquecida y pálida; pero susurra: «Es verdad».

Jesús no dice nada más al respecto, ni hace observaciones sobre el estado físico y moral de Margziam, que está visiblemente debilitado. Antes al contrario, dice: «¡Hala, vamos! He hablado ya con Porfiria. Ya seguro que ha preparado tu ropa. Arréglate tú también, que Juan nos espera. Le daremos una sorpresa a Simón. ¿No es aquélla su barca, de vuelta para Cafarnaúm? Quizás ha pescado al regresar…».

«Es aquélla, sí. ¿A dónde vamos, Señor?».

«A septentrión y luego a Judea».

«¿Tanto?».

«Tanto».

Margziam, animado por la idea de estar con Jesús, se alza rápidamente y baja corriendo al lago, a lavarse. Vuelve, todavía con el pelo húmedo, gritando: «He visto a Juan. Me ha hecho una señal de saludo. Está en la desembocadura, en el cañizar…».

«Vamos».

465.7

Bajan. Porfiria está terminando de cerrar dos sacas y explica: «He pensado mandar después la ropa gruesa. Al Getsemaní con mi hermano para los Tabernáculos. Así caminaréis más rápido tanto tú como tu padre», y, mientras termina de atar las correas, alude a lo que ha preparado: leche, pan, fruta…

«Tomamos todo. Comeremos en la barca. Quiero marcharme antes de que la orilla se llene de gente. Adiós, Porfiria. Que Dios te bendiga siempre y que la paz de los justos esté siempre en ti. Ven, Margziam»…

Recorren pronto el pequeño tramo de camino y, mientras Margziam va donde Juan, Jesús va a la barca. Enseguida se reúnen con Él los dos, corriendo entre las cañas y saltando luego a la barca. Empujan en seguida con el remo contra la orilla para meterse en aguas profundas.

Pronto el pequeño trayecto queda recorrido. Se detienen en la playa de Cafarnaúm, en espera de la barca de Pedro, que está llegando. La hora los salva del asedio de la gente, así que pueden comer en paz su pan y su fruta, echados en la arena a la sombra de la barca.

Simón no conoce la barquita, y, por tanto, sólo cuando pone pie en la orilla y ve levantarse detrás de la barca a Jesús, se da cuenta de que está Él allí.

«¡Maestro! ¡Y tú, Margziam! ¿Pero, desde cuándo?».

«Desde ahora. He pasado por Betsaida. Date prisa. Hay que partir inmediatamente…».

Pedro le mira y no dice nada. Él y los compañeros descargan de la barca los peces pescados, y las sacas de la ropa, incluida la de Juan, que por fin puede volverse a vestir. Y Simón dice algo a su compañero, el cual le hace un gesto como diciendo: «Espera…».

Van a la casa. Entran. Los apóstoles que se habían quedado vienen.

«Daos prisa. Nos marchamos en seguida. Coged todo porque no volvemos aquí» ordena Jesús.

Los apóstoles se miran un momento unos a otros, y tiene lugar una serie de gestos entre uno y otro grupo. Pero obedecen. Es más, yo creo que lo hacen con solicitud para poder hablar entre sí en las otras habitaciones…

465.8

Jesús se queda en la cocina con Margziam y se despide de los dueños de la casa. Pero no les dice “no voy a volver”, y tampoco dice esto, pasando por la calle, a quienes, de Cafarnaúm, le ven y le saludan. Simplemente los saluda, como hace todas las veces que se marcha. Se para sólo en la casa de Jairo. Pero Jairo no ha vuelto todavía…

Encuentra junto a la fuente a la viejecita que vive cerca de la casa de la madre del pequeño Alfeo, y le dice: «Dentro de poco vendrá aquí una viuda. Te buscará. Viene a vivir aquí. Sé amiga suya y quered mucho al niño y a sus hermanos… Hacedlo santamente, en nombre mío…».

Reanuda la marcha y dice: «Hubiera querido saludar a todos los niños…».

«Puedes hacerlo, Maestro. ¿Por qué no has descansado? Estás muy cansado. Tu cara está pálida y tienes la mirada cansada. Te va a dañar… Hace calor todavía y seguro que no has dormido ni en Tiberíades ni allí donde Cusa…».

«No puedo, Simón. Debo ir a algunos lugares y hay poco tiempo…».

Están junto a la orilla. Jesús llama a los mozos de Pedro y los saluda, y les da órdenes de que la pequeña barca sea llevada al pueblo que está antes de Ippo y que se le restituya a Saúl de Zacarías.

Toma el camino umbrío que orilla al río. Lo sigue hasta una bifurcación y se adentra por esta parte.

«¿A dónde vamos, Señor?» pregunta Simón, que hasta ahora había hablado en voz baja con los compañeros.

«A casa de Judas y Ana, y luego a Corazín. Quiero saludar a mis buenos amigos…».

Otra ojeada de los apóstoles entre sí y otro cuchicheo.

465.9

En fin, Santiago de Alfeo se adelanta y alcanza a Jesús, que va por delante de todos con Margziam. «Hermano, dices que quieres saludar a los amigos, ¿es que no vamos a volver por estos lugares? Deseamos saberlo».

«Volveréis, ciertamente, pero dentro de muchos meses».

«¿Y Tú?».

Jesús hace un gesto evasivo… Margziam se retira, discretamente, para reunirse con los demás, o sea, con todos los demás excepto Santiago de Alfeo, que está con Jesús, y Judas Iscariote, que va solo, en la cola, más bien taciturno, como apático.

«Hermano, ¿qué te ha sucedido?» dice Santiago mientras pone una mano en el hombro de Jesús.

«¿Por qué lo preguntas?».

«Porque… No sé. Todos nos lo preguntamos. Nos pareces distinto… Has venido sólo con Juan… Simón ha dicho que habías estado como invitado en casa de Cusa… No descansas… Saludas sólo a pocas personas… Da la impresión de que no quieres volver aquí… Y tu cara… ¿Ya no merecemos saber? Yo tampoco… Tú me querías… Me has dicho cosas que sólo yo sé…».

«Te sigo queriendo. Pero no tengo nada que decir. He perdido un día más de lo previsto. Lo estoy recuperando».

«¿Era necesario ir al septentrión?».

«Sí, hermano».

«Entonces… ¡Has sufrido! Lo percibo…».

Jesús le abraza, pasándole un brazo por detrás de la espalda a su primo: «Ha muerto Juan de Endor, ¿lo sabes?».

«Me lo ha dicho Simón mientras preparaba yo la ropa. ¿Y otras cosas?…».

«Un nuevo adiós a mi Madre».

«¿Y más cosas?». Santiago, más bajo que Jesús, le mira de abajo arriba, insistente, indagador.

«Pues que estoy contento de estar contigo, con vosotros, con Margziam. Le voy a tener conmigo algunos meses. Lo necesita. Está triste y sufre. ¿Le has visto?».

«Sí. Pero no es nada de esto… No quieres decirlo. No importa. Te quiero aun no tratándome como amigo».

«Santiago, tú para mí eres más que un amigo. Pero mi corazón necesita descansar…».

«Y, por tanto, no hablar de lo que para ti constituye dolor. Comprendo. ¿Es Judas el que te aflige?».

«¿Judas? ¿Tu hermano?».

«No. El otro».

«¿Por qué esta pregunta?».

«No sé. Mientras estabas fuera, uno, enviado no sabemos por quién, ha venido a buscar varias veces a Judas. Él le ha rechazado siempre, pero…».

«En vosotros toda acción de Judas es siempre un delito. ¿Por qué faltar a la caridad?…».

«Porque siempre está tan torvo, tan turbado. Evita a los compañeros. Es apático…».

«Déjale. Hace más de dos años que está con nosotros y siempre ha sido así… Piensa en lo felices que se van a sentir los dos ancianos. ¿Y sabes por qué voy allí? Quiero confiarles el pequeño carpintero de Corazín…».

Se alejan hablando. Detrás de ellos, en grupo, van los apóstoles, que han esperado a Judas para no dejarle atrás solo, a pesar de que esté tan visiblemente hastiado, que no despierta ningún interés de tenerle al lado.


Notes

  1. Judas… ton frère ? Les prénoms des deux apôtres que le français rend par Jude et Judas sont identiques en italien, ce qui explique la confusion possible.