Los Escritos de Maria Valtorta

524. A Jéricho. Dans la maison de Zachée

524. En Jericó. En casa de Zaqueo

524.1

Ils sont tous rassemblés dans une pièce vaste et nue. Elle a sûrement dû être belle auparavant, mais ce n’est plus aujourd’hui qu’un grand local. Ils ont apporté des sièges et des lits pris dans les salles à manger ou dans les chambres à coucher, et se sont tous assis autour du Maître qu’ils ont installé sur une sorte de fauteuil tout en bois sculpté couvert d’un tapis de haute lice. C’est le meuble le plus luxueux de la maison.

Zachée parle d’un domaine acheté avec l’argent recueilli entre eux :

« Il nous fallait bien faire quelque chose ! L’oisiveté n’est pas un bon remède pour ne pas pécher. C’est une terre encore peu fertile car elle avait été négligée, comme nous, et comme nous elle était pleine de ronces, de pierres, de lieux arides et d’herbes nuisibles. Nikê nous a prêté ses serviteurs paysans pour nous apprendre comment dégager les puits négligés, nettoyer les champs, tailler les rares arbres qu’il y avait et en planter de jeunes. Nous avions bien des acquis… mais pas les saints labeurs de l’homme. Mais dans ce travail, si nouveau pour nous, nous trouvons vraiment une vie nouvelle. Rien ne rappelle le passé autour de nous, si ce n’est notre conscience, mais c’est une bénédiction… Nous sommes des pécheurs… Viendras-tu le voir ?

– Nous sortirons ensemble d’ici pour nous diriger vers le Jourdain, et je m’arrêterai à cet endroit. Tu me dis qu’il se trouve justement sur la route du fleuve ?

– Oui, Maître, mais c’est en mauvais état. La maison tombe en ruines, et elle est vide de meubles. Nous n’avions pas d’argent pour tout… après avoir, dans la mesure du possible, réparé nos manquements au prochain. Ceux-ci se contentent du foin, sauf Démétès, Valens et Lévi, qui sont trop âgés pour certaines privations et qui dorment ici, Seigneur.

– Bien des fois, je n’ai pas même cela. Je dormirai sur le foin, moi aussi, Zachée. J’y ai passé mes premiers sommeils et ils étaient doux, car l’amour les veillait. Je peux y dormir encore cette fois, et mon sommeil ne sera pas tourmenté, car je serai parmi des hommes qui ont retrouvé la bonne volonté. »

Et il dévisage, d’un regard qui est une caresse, ces prémices des rachetés de tous pays. Eux aussi le regardent… Ce ne sont pas des hommes qui ont les larmes faciles. Qui sait même combien de personnes ils ont fait pleurer ! Leurs visages sont autant de livres sur lequel est écrit leur passé malheureux, et si maintenant leur nouvelle vie voile la brutalité de ces paroles, on peut cependant encore assez les déchiffrer pour permettre de voir de quels gouffres ils remontent vers la lumière. Et pourtant ces visages s’éclairent, s’illuminent, leurs regards prennent de l’assurance, une lueur d’espérance surnaturelle, de satisfaction morale y brille quand ils entendent le Maître leur dire qu’ils sont revenus à la bonne volonté.

524.2

Zachée dit :

« Alors tu approuves tout ce que j’ai fait ? Vois, Maître, j’avais dit ce jour-là : “ Je te suivrai ”, et je voulais vraiment te suivre matériellement. Mais, justement ce soir-là, Démétès vint chez moi me proposer… un de ses infâmes marchés… et il avait besoin d’argent. Il arrivait de Jérusalem… : on la dit sainte, mais on y trouve toutes sortes de hontes, et les premiers à vouloir cette honte sont des gens qui ensuite nous lapident comme si nous étions lépreux… Mais ce sont nos péchés que je dois avouer, et non les leurs. Je n’avais plus d’argent, je t’avais tout donné. Même ce qui restait encore chez moi pouvait être considéré comme déjà donné, car j’avais déjà fait les parts que je devais rendre à ceux à qui je l’avais soutiré par l’usure. Je lui ai répondu : “ Je n’ai pas d’argent, mais ce que je possède a plus de valeur que tous les trésors. ” Et je lui ai raconté ma conversion, tes paroles, la paix qui était en moi… J’ai tant parlé, que je n’avais pas fini quand la lumière du jour nouveau est entrée pour blanchir les visages et rendre les lampes inutiles. J’ai oublié ce que j’ai dit exactement. Je sais que Démétès a donné un grand coup de poing sur la table près de laquelle nous étions assis, et il s’est écrié : “ Mercure a perdu un de ses disciples et les satyres un compagnon. Prends aussi cet argent : il n’y en avait pas suffisamment pour le crime, mais assez pour donner du pain à un mendiant, et prends-moi avec toi. Je veux connaître un parfum après tant de puanteurs. ” Et il est resté.

Nous sommes allés ensemble à Jérusalem, moi pour vendre des objets, lui pour se libérer de tout… engagement. Et en revenant j’ai dit… — j’avais prié au Temple, depuis si longtemps, avec le cœur pur et pacifié d’un enfant — je me suis dit à moi-même : “ Est-ce que, pour suivre le Maître, il ne vaut pas mieux rester à Jéricho où mes malheureux amis publicains, tenanciers de tripots, maquereaux, usuriers, surintendants de galériens et de forçats, d’esclaves, tortionnaires de toutes les misères, soldats sans loi ni pitié, noceurs pour oublier leurs remords dans l’ivresse, viennent me trouver pour employer leur argent maudit, me proposer des affaires, ou m’inviter à des banquets et autres souillures infâmes ? La ville me méprise. Les Hébreux me tiennent toujours pour pécheur, mais eux, non. Eux, ils sont comme moi. Ils sont impurs, mais peuvent avoir en eux quelque chose qui les pousse au bien, et ils ne trouvent personne pour leur tendre une main secourable. Moi, je les ai aidés dans le mal. Peut-être ont-ils péché aussi à cause de mes conseils, de ce que je leur ai demandé parfois. J’ai le devoir de les aider pour venir au bien. De même que j’ai rendu à ceux à qui j’avais fait tort, de même que j’ai réparé pour mes concitoyens, je dois chercher à réparer envers eux. ”

Je suis donc resté ici. Ils sont venus, tantôt l’un, tantôt l’autre, de cette ville ou d’une autre, et je leur ai parlé. Tous n’ont pas réagi comme Démétès. Certains se sont enfuis en me méprisant, d’autres ont tergiversé, d’autres encore se sont arrêtés, mais après quelque temps sont retournés à leur enfer. Ceux-là sont restés. Et désormais, je sens que je dois te suivre ainsi, que nous devons te suivre ainsi, pour lutter contre nous-mêmes, pour supporter les mépris

du monde qui ne sait pas nous pardonner.

524.3

Les larmes du cœur ne manquent pas, quand nous voyons que le monde ne pardonne pas, quand les souvenirs nous reviennent… et ils sont si nombreux et si pénibles… Chez certains, ils sont…

– L’horrible Némésis qui nous reproche nos crimes et qui nous promet la vengeance outre-tombe, dit l’un d’eux.

– Ce sont les lamentations de ceux qui étaient épuisés et que j’ai frappés pour les faire travailler.

– Ce sont les malédictions de ceux que j’ai réduits en esclavage après avoir pris tous leurs biens par l’usure.

– Ce sont les supplications des veuves et des orphelins qui ne pouvaient pas payer et auxquels j’ai confisqué, au nom de la loi, leurs dernières ressources.

– Ce sont les férocités accomplies dans les pays conquis sur des gens désarmés, terrorisés par la défaite.

– Ce sont les larmes de ma mère, de ma femme, de ma fille, mortes de privations, alors que je gaspillais tout en festins.

– Ce sont… Oh ! pour moi, c’est le crime sans nom ! Seigneur, moi je n’ai pas de sang sur les mains, je n’ai pas dérobé d’argent, je n’ai pas imposé de gabelles exagérées, d’intérêts usuraires, je n’ai pas frappé les vaincus, mais j’ai exploité toutes les misères, je me suis enrichi sur les filles innocentes des vaincus, sur des orphelines, sur des femmes vendues pour une bouchée de pain comme de la marchandise. J’ai fait le tour du monde pour saisir ces occasions, derrière les armées, là où il y avait de la disette, là où le débordement d’un fleuve avait enlevé toute nourriture, là où une épidémie avait laissé de jeunes vies sans protection, et j’en ai fait un trafic, une infâme et pourtant innocente marchandise. Infâme pour moi qui en retirais de l’argent, innocente car elle n’en connaissait pas encore l’horreur. Seigneur, j’ai sur les mains la virginité de fillettes déshonorées, et l’honneur de jeunes épouses prises dans les villes conquises. Mes magasins… et mes lupanars étaient célèbres, Seigneur. Ne me maudis pas, maintenant que tu sais !… »

524.4

Les apôtres se sont involontairement écartés du dernier qui a parlé. Jésus se lève et s’approche de lui. Il lui pose la main sur l’épaule et lui dit :

« C’est vrai ! Ton crime est grand. Tu as beaucoup à réparer. Mais moi, la Miséricorde, je t’affirme que, même si tu étais le démon en personne et si tu avais commis tous les crimes de la terre, si tu le veux, tu peux tout réparer et être pardonné par Dieu, par le Dieu vrai, grand et paternel. Si tu le veux. Unis ta volonté à la mienne. Moi aussi, je veux que tu sois pardonné. Unis-toi à moi. Donne-moi ta pauvre âme déshonorée, ruinée, couverte de cicatrices et avilie, depuis que tu as abandonné le péché. Je la mettrai dans mon cœur, là où je mets les plus grands pécheurs, et je l’emmènerai avec moi dans le Sacrifice rédempteur. Le sang le plus saint, celui de mon cœur, le dernier sang de celui qui sera consumé pour les hommes, se répandra sur les plus grandes ruines et les régénérera. Pour le moment, garde l’espérance, une espérance plus grande que ton crime immense, dans la miséricorde de Dieu, car elle est sans bornes, ô homme, pour qui sait se confier à elle. »

L’homme voudrait bien prendre et baiser cette main posée sur son épaule, si pâle et si décharnée sur son vêtement brun, et sur son épaule robuste, mais il n’ose pas. Jésus le comprend et il lui présente la main en disant :

« Baise sa paume, homme. Je retrouverai ce baiser pour guérir une de mes tortures. Main baisée, main blessée. Baisée par amour, blessée par l’amour. Ah ! si tous savaient embrasser la grande Victime, et qu’elle meure dans son vêtement de plaies en sachant que dans chacune se trouvent les baisers, les affections de tous les hommes rachetés ! »

Il appuie la paume de sa main sur les lèvres rasées de l’homme que, à mille détails, je crois romain. Il l’y tient jusqu’à ce que l’homme s’en détache, comme rassasié, après avoir éteint la brûlure de ses remords en buvant la miséricorde du Seigneur dans le creux de la main divine.

524.5

Jésus revient à sa place et, en passant, pose sa main sur la chevelure bouclée d’un tout jeune homme. Je lui donnerais tout au plus vingt ans, peut-être moins. Lui n’a jamais parlé. Il est certainement de race hébraïque. Jésus l’interroge :

« Et toi, mon fils, tu ne dis rien à ton Sauveur ? »

Le jeune homme lève la tête et le regarde… Ce regard parle de lui-même. C’est une histoire de douleur, de haine, de repentir, d’amour.

Jésus, un peu penché sur lui, les yeux dans les yeux du jeune, y lit quelque histoire muette et il dit :

« C’est pour cela que je t’ai appelé “ mon fils ”. Tu n’es plus seul. Pardonne à tous ceux de ton sang et aux étrangers, comme Dieu te pardonne. Et aime l’Amour qui t’a sauvé. Viens un moment avec moi, je veux te dire un mot en particulier. »

Le jeune homme se lève et le suit. Quand ils sont seuls, Jésus reprend :

« Je veux te dire ceci, mon fils. Le Seigneur t’a beaucoup aimé, bien que cela n’apparaisse pas à un jugement superficiel. La vie t’a beaucoup éprouvé. Les hommes t’ont fait grandement tort. L’une et les autres pouvaient faire de toi une ruine irréparable. Derrière eux, il y avait Satan qui était envieux de ton âme, mais sur toi, il y avait l’œil de Dieu, et cet œil béni a arrêté tes ennemis. Son amour a mis Zachée sur ta route et, avec Zachée, moi qui te parle. Maintenant, moi qui te parle, je te dis que tu dois trouver dans cet amour tout ce que tu n’as pas eu, tu dois oublier tout ce qui t’a aigri, et pardonner, pardonner à ta mère, pardonner à ton maître infâme, te pardonner à toi-même. N’aie pas pour toi une mauvaise haine, mon fils. Eprouve de la haine pour le temps où tu as péché, mais pas pour ton âme qui a su quitter ce péché. Que ta pensée soit pour ton esprit une bonne amie et, qu’ensemble, ils atteignent la perfection.

– Parfait, moi !

– Tu as entendu ce que j’ai dit à cet homme ? Et pourtant, lui est descendu au fond de l’abîme !…

524.6

Et merci, mon fils !

– De quoi, mon Seigneur ? C’est à moi de te remercier…

– De n’avoir pas voulu aller chez ceux qui achètent des hommes pour me trahir.

– Oh ! Seigneur ! Comment aurais-je pu le faire, sachant que tu ne nous méprises pas, même nous, les voleurs ? J’étais moi aussi parmi ceux[1] qui t’ont apporté l’agneau au Carit. L’un de nous, qui est maintenant dans les mains des Romains — c’est du moins ce que l’on dit ; ce qui est certain, c’est que bien avant la fête des Tentes on ne l’a plus vu dans les refuges de voleurs —, m’a rapporté tes paroles dans une vallée près de Modin… Car alors, je n’étais pas encore avec les voleurs. J’y suis allé à la fin du dernier mois d’Adar et je les ai quittés au commencement d’Etanim. Mais je n’ai rien fait qui mérite ton remerciement. Tu étais bon. J’ai voulu être bon. Et avertir l’un de tes amis… puis-je appeler ainsi Zachée ?

– Oui, tu le peux. Tous ceux qui m’aiment sont mes amis. Toi aussi, tu l’es.

– Oh !… j’ai voulu l’avertir pour que tu fasses attention à toi. Mais un avertissement ne mérite pas un merci…

– Je te le répète : c’est parce que tu ne t’es pas vendu contre moi que je te remercie. C’est cela qui a de la valeur.

– Pas l’avertissement ?

– Mon fils, rien ne pourra empêcher la Haine de m’assaillir. As-tu jamais vu un torrent qui déborde ?

– Oui, j’étais près de Jabès Galaad et j’ai vu les dégâts provoqués par le fleuve sorti de son lit avant d’arriver au Jourdain.

– Est-ce que quelque chose a pu arrêter les eaux ?

– Non, elles ont tout recouvert et dévasté, elles ont même renversé des maisons.

– Ainsi en est-il de la Haine. Mais elle ne me renversera pas. J’en serai submergé, mais non détruit. Et à l’heure très amère, l’amour de celui qui n’a pas voulu haïr l’Innocent sera mon réconfort, ma lumière dans les ténèbres de cette heure de ténèbres, ma douceur dans la coupe de vin mêlée de fiel et de myrrhe.

– Toi ?… Tu parles de toi comme si… Une telle coupe, c’est pour les voleurs, pour celui qui va à la mort de la croix. Mais toi, tu n’es pas un voleur ! Tu n’es pas coupable ! Tu es…

– Le Rédempteur. Donne-moi un baiser, mon fils. »

II lui prend la tête entre ses mains et dépose un baiser sur son front, puis il se penche pour recevoir le baiser du jeune homme. C’est un baiser timide qui effleure tout juste la joue décharnée… Puis le jeune tombe en pleurant sur la poitrine de Jésus.

« Ne pleure pas, mon fils ! Je suis sacrifié par l’amour. Et c’est toujours un doux sacrifice, même si c’est une torture pour la nature humaine. »

Il le tient dans ses bras jusqu’à ce que ses larmes cessent, puis revient en le tenant près de lui, par la main, à la place qu’occupait Pierre auparavant.

524.7

Il recommence à parler :

« Pendant que nous prenions notre repas, l’un d’entre vous, qui n’est pas du peuple d’Israël, m’a dit qu’il voulait me demander une explication. Qu’il le fasse maintenant, parce que nous devrons bientôt retourner parmi les gens, et ensuite nous quitter.

– C’est moi qui ai dit cela. Mais plusieurs désirent connaître ta réponse. Zachée ne sait pas bien l’expliquer, pas plus que d’autres d’entre nous qui sont de ta religion. Nous avons interrogé tes disciples quand ils sont passés par ici, mais ils ne nous ont pas répondu avec clarté.

– Que veux-tu donc savoir ?

– Nous ne savions même pas que nous avions une âme. C’est-à-dire… nous au moins aurions dû le savoir, car nos anciens… Mais nous ne lisions plus les anciens. Nous étions des bêtes… Et nous ne savions plus ce qu’est cette âme. Maintenant encore, nous l’ignorons. Qu’est-ce que l’âme ? La raison peut-être ? Nous ne le croyons pas, parce que, dans ce cas, nous aurions été sans elle, or nous avons entendu dire que, sans l’âme, il n’y a pas de vie. Qu’est donc l’âme que l’on nous dit incorporelle, et immortelle, si ce n’est pas la raison ? La pensée est incorporelle, mais elle n’est pas immortelle, car elle cesse avec notre vie. Même l’homme le plus sage ne pense plus après la mort.

– L’âme n’est pas la pensée, homme. L’âme, c’est l’esprit, le principe immatériel de la vie, le principe impalpable, mais véritable, qui anime tout l’homme et perdure après lui. C’est pour cela qu’elle est dite immortelle. Elle sest tellement sublime que la pensée, même la plus puissante, n’est rien en comparaison. La pensée a une fin, mais l’âme, bien qu’elle ait un commencement, n’a pas de fin. Bienheureuse ou damnée, elle continue d’exister. Bienheureux ceux qui savent la garder pure ou la faire redevenir pure après l’avoir polluée, pour la rendre à son Créateur comme il l’a donnée à l’homme pour animer son humanité.

– Mais est-elle en nous, ou au-dessus de nous, comme l’œil de Dieu ?

– En nous.

– Prisonnière jusqu’à la mort, alors ? Esclave ?

– Non : reine. Dans la pensée éternelle, l’âme, l’esprit, est la perle qui règne dans l’homme, dans cet animal créé que l’on appelle : homme. Elle est venue du Roi et Père de tous les rois et pères, son souffle et son image, son don et son droit, et elle a pour mission de faire de la créature appelée homme, un roi du grand royaume éternel, de faire de la créature humaine un élu au-delà de la vie, un “ vivant ” dans la Demeure du très sublime, unique Dieu ; créée reine, elle a l’autorité et le destin d’une reine. Ses suivantes, ce sont toutes les vertus et facultés de l’homme, son ministre la bonne volonté de l’homme, son intendant, la pensée de l’homme. C’est pas l’esprit que la pensée acquiert puissance et justice, obtient vérité et sagesse, et peut s’élever à une perfection royale. Une pensée privée de la lumière de l’esprit aura toujours des lacunes et des ténèbres, et ne pourra jamais comprendre les vérités. En effet, pour celui qui est séparé de Dieu après avoir perdu la royauté de l’âme, ces vérités sont plus incompréhensibles que des mystères. Sa pensée sera aveugle, elle sera infirme, s’il lui manque le point d’appui du levier indispensable pour comprendre, pour s’élever en quittant la terre et en s’élançant vers les hauteurs, à la rencontre de l’Intelligence, de la Puissance, de la Divinité en un mot.

524.8

C’est à toi que je m’adresse, Démétès, parce que tu n’as pas toujours été seulement un changeur, et tu peux comprendre, et expliquer aux autres.

– Tu es vraiment un voyant, Maître. Non, je n’ai pas été seulement un changeur… Cela a même été le dernier degré de ma descente… Dis-moi, Maître : si l’âme est reine, pourquoi donc ne règne-t-elle pas et ne dompte-t-elle pas la pensée et la chair mauvaises de l’homme ?

– Dompter ne respecterait pas la liberté et ne laisserait pas place au mérite, ce serait de l’oppression.

– Mais la pensée et la chair accablent souvent l’âme — je parle de moi, de nous —, et la rendent trop souvent esclave. C’est pour cela que je disais qu’elle était en nous esclave. Comment Dieu peut-il permettre qu’une perle si sublime — tu l’as qualifiée de “ souffle de Dieu et son image ” — soit avilie par ce qui est inférieur ?

– La Pensée divine était que l’âme ne connaisse pas l’esclavage. Mais oublies-tu l’ennemi de Dieu et de l’homme ? Les esprits infernaux vous sont connus à vous aussi.

– Oui, et tous avec des désirs cruels. Pour mon compte, je puis dire, en me rappelant l’enfant que j’étais, que c’est seulement à ces esprits infernaux que je peux attribuer l’homme que je suis devenu et que j’ai été jusqu’au seuil de la vieillesse. Maintenant, je retrouve l’enfant égaré d’alors. Mais pourrai-je me rendre assez enfant pour revenir à la pureté de cette époque ? Est-il permis de remonter le temps ?

– Pas besoin de retourner en arrière. Tu ne pourrais le faire. Le temps écoulé ne revient plus. On ne peut le faire renaître et on ne peut y revenir. Mais ce n’est pas nécessaire.

524.9

Certains d’entre vous proviennent de régions où l’on connaît la théorie de l’école pythagoricienne. C’est une théorie erronée. Les âmes, une fois passé leur séjour sur la terre, ne reviennent plus jamais ici-bas dans aucun corps. Pas dans un animal, car il ne convient pas que quelque chose d’aussi surnaturelle, habite dans une bête. Pas dans un homme, car comment le corps serait-il récompensé une fois réuni à l’âme au jugement dernier, si cette âme avait été revêtue de plusieurs corps ? On dit, chez ceux qui croient à cette théorie, que c’est le dernier corps qui a la jouissance, parce qu’au cours des purifications successives, au cours de vies successives, c’est seulement dans la dernière réincarnation que l’âme atteint une perfection qui mérite une récompense. C’est une erreur et une offense ! Une erreur et une offense envers Dieu, puisque c’est admettre qu’il n’a pu créer qu’un nombre limité d’âmes. Une erreur et une offense envers l’homme, puisque cela revient à le juger si corrompu qu’il mérite difficilement une récompense. Il ne sera pas tout de suite récompensé, il devra subir une purification après la vie, quatre-vingt-dix-neuf fois sur cent, mais la purification prépare à la joie. Aussi celui qui se purifie est déjà quelqu’un de sauvé. Et une fois sauvé, il jouira de cette récompense avec son corps après le dernier Jour. Il ne pourra avoir qu’un seul corps pour son âme, qu’une seule vie ici-bas, et c’est avec le corps que lui ont fait ceux qui l’ont procréé, et avec l’âme que le Créateur lui a créée pour vivifier sa chair, qu’il jouira de sa récompense.

524.10

Il n’est pas permis de se réincarner, pas plus qu’il n’est possible de remonter le temps. Mais se recréer par un mouvement d’une libre volonté, oui, c’est accordé : Dieu bénit cette volonté et l’aide. Vous tous l’avez eue. Voilà alors que, sous le bain du repentir, l’homme pécheur, vicieux, souillé, criminel, voleur, dépravé, corrupteur, homicide, sacrilège, adultère, renaît spirituellement, détruit la substance corrompue du vieil homme, disperse le moi mental encore plus perverti, comme si la volonté de se racheter était un acide qui attaque et détruit l’enveloppe malsaine où se cache un trésor, et met à nu son esprit purifié, redevenu sain, revêtu d’une nouvelle pensée, d’un nouveau vêtement d’enfant pur, bon. C’est un vêtement qui peut s’approcher de Dieu, qui peut couvrir dignement l’âme recréée, la garder et l’aider jusqu’à sa supercréation, la sainteté achevée qui, demain — un lendemain peut-être lointain, si on le mesure à l’aune du temps humain, très proche si on le contemple par la pensée de l’éternité — sera glorieuse dans le Royaume de Dieu.

Et tous peuvent, s’ils le veulent, recréer en eux-mêmes le pur enfant de leurs premières années, l’enfant affectueux, humble, franc, bon, que sa mère serrait sur son sein, que son père regardait avec fierté, que l’ange de Dieu protégeait et que Dieu contemplait avec amour.

Vos mères ! Elles étaient peut-être des femmes de grande vertu… Dieu ne laissera pas leur vertu sans récompense. Faites donc en sorte d’en avoir une pareille pour vous réunir à elles, quand il y aura pour tous les vertueux une seule récompense : le Royaume de Dieu pour les bons. Il est possible qu’elles n’aient pas été bonnes et qu’elles aient contribué à votre malheur. Mais si elles ne vous ont pas aimés, si vous ne connaissez pas l’amour, si cette absence d’amour vous a rendus mauvais, maintenant qu’un Amour divin vous a recueillis, soyez saints, pour pouvoir dans une joie céleste jouir de l’Amour qui surpasse tout amour.

524.11

Avez-vous une autre question à poser ?

– Non, Seigneur. Nous avons tout à apprendre, mais pour le moment, nous ne voyons rien d’autre…

– Je vais vous laisser Jean et André pour quelques jours. Ensuite, je vous enverrai des disciples bons et sages. Je veux que les poulains sauvages connaissent les voies du Seigneur et ses pâturages, tout comme ceux d’Israël, car je suis venu pour tous et je les aime tous de la même manière. Levez-vous et allons. »

Et il sort le premier dans le jardin défriché, suivi de près par les siens qui se plaignent doucement ;

« Maître, tu leur as parlé comme tu parles rarement à ceux que tu as choisis…

– Et vous vous en plaignez ? Ne savez-vous pas que c’est ainsi que l’on fait aussi dans le monde quand on veut conquérir quelqu’un que l’on aime ? Mais avec ceux dont nous savons qu’ils nous aiment de tout leur être, et qu’ils sont désormais de notre famille, il n’est pas besoin de l’art de la conquête. Il suffit de se voir pour être les uns dans les autres, dans la joie et la paix » répond Jésus avec un sourire divin, vraiment divin, tant il communique de joie.

Et les apôtres ne se plaignent plus, et même ils le regardent d’un air heureux en se perdant dans l’allégresse de l’amour mutuel.

524.1

Están todos recogidos en una habitación grande y desnuda, en otros tiempos, sin duda, hermosa. Ahora es sólo un local grande. Han tomado sillas y lechos de las otras habitaciones de comer o de dormir y las han traído. Se han sentado alrededor del Maestro, al que le han ofrecido para que se siente una especie de sillón todo de madera labrada cubierto con un paramento de lizo alto: es el mueble más lujoso de la casa.

Zaqueo está hablando de una propiedad adquirida con el dinero de una colecta hecha entre ellos: «¡Algo teníamos que hacer, ¿no?! El ocio no es buena medicina para no pecar. Es un lugar poco fértil todavía porque estaba desatendido, como nosotros, y, como nosotros, lleno de tríbulos, piedras, sequío y hierbas nocivas. Nique nos ha prestado a los campesinos que están a su servicio para que nos enseñen cómo hay que hacer para abrir los pozos abandonados, para limpiar las tierras, podar los pocos árboles que había y plantar otros nuevos. Nosotros sabíamos hacer muchas cosas… aunque no eran las santas obras del hombre. Pero en este trabajo tan nuevo para nosotros encontramos una vida verdaderamente nueva. Nada de lo que nos rodea recuerda el pasado. Sólo la conciencia lo recuerda, pero eso está bien… Somos pecadores… ¿Vas a ir a ver esa propiedad?».

«Saldremos juntos de aquí para dirigirnos hacia el Jordán, y me detendré en ese lugar. Me dices que está al lado del camino que va al río…».

«Sí, Maestro. Pero es un lugar feo. La casa está que se cae. No tiene muebles, está vacía. No teníamos dinero para todo… después de haber compensado —siempre que ha sido posible hacerlo— a nuestro prójimo por nuestros delitos. Éstos, para dormir, se arreglan encima de heno; menos Demetes, Valente y Leví, que son demasiado ancianos para ciertas privaciones y que duermen aquí, Señor».

«Muchas veces Yo no tengo ni eso. Dormiré en el heno Yo también, Zaqueo, que es donde dormí mis primeros sueños, sueños dulces porque los velaba el amor. Puedo dormir también éste; y no será un sueño atormentado, porque lo conciliaré entre hombres en los que ha resucitado la buena voluntad». Y mira, con una mirada que es una caricia, a estas primicias de redimidos de todo territorio.

Y ellos le miran… No son hombres que lloren fácilmente. Al contrario, ¡quién sabe cuánto llanto habrán hecho derramar! Cada cara de estos hombres es un libro en que está escrito su calamitoso pasado, y, si ahora la nueva vida vela la brutalidad de las palabras, éstas son todavía descifrables lo suficiente como para permitir intuir desde qué simas se alzan de nuevo hacia la Luz. Bueno, pues, a pesar de todo, su rostro se hace claro, se ilumina; su mirada toma nuevo vigor, resplandeciendo en ella una luz de esperanza sobrenatural, de satisfacción moral, al oír que el Maestro los considera resucitados a la buena voluntad.

524.2

Zaqueo dice: «¿Entonces apruebas todo esto que he hecho? Fíjate, Maestro, yo aquel día había dicho “te seguiré”, y quería seguirte… bueno, materialmente. Pero esa misma noche vino a mi casa Demetes, para una de esas… para uno de esos infames manejos… y necesitaba dinero. Venía de Jerusalén… porque se la llama santa, pero en ella hay toda clase de vergüenzas, y los primeros que las promueven son los que luego arremeten furiosamente contra nosotros como si fuéramos leprosos… Pero debo hablar de nuestros pecados, no de los de ellos. Yo ya no tenía dinero. Te lo había dado. Todo. Incluso el dinero que estaba todavía en casa ya era como si hubiera sido dado, porque había hecho ya las partes que debía devolver a aquellos a quienes se lo había arrebatado con usura. Le dije: “No tengo dinero. Pero tengo algo que vale más que todos los tesoros”. Y le narré mi conversión, tus palabras, la paz que había en mí… Hablé tanto, que, mientras todavía hablaba, la luz del nuevo día entró a blanquecer las caras y a hacer inútiles las lámparas. No sé con exactitud lo que dije. Sé que él dio un puerte puñetazo en la mesa junto a la cual estábamos sentados y exclamó: “Mercurio ha perdido un seguidor y los sátiros un compañero. Toma incluso estas monedas, insuficientes para el delito pero útiles para un pan para el mendigo, y tómame contigo. Quiero conocer un perfume después de tantos hedores”. Y se ha quedado. Fuimos juntos a Jerusalén: yo, para vender objetos; él, para deshacerse de todos los… compromisos. Y, regresando, me dije —había orado en el Templo, después de tanto tiempo, con el corazón puro y pacificado de un niño—, me dije a mí mismo: “¿No es esto también seguir al Maestro, y quizás seguirle mejor, quedándome en Jericó, donde mis desdichados amigos —publicanos como yo, gariteros, lenones, usureros, después de haber sido vigilantes de galeotes y forzados, de esclavos, torturadores de todo desdichado, soldados sin ley ni piedad, juerguistas para ahogar los remordimientos en las borracheras— vienen a verme para emplear su dinero maldito, o proponerme negocios, o invitarme a convites y a otras bajezas infames? La ciudad me desprecia. Los hebreos me tendrán siempre por pecador. Pero ellos no. Ellos son como yo. Son basura, pero pueden tener algo, dentro de sí, algo que los impulsa hacia el bien, y no encuentran a nadie que les eche una mano. Yo los he ayudado en el mal. Quizás pecaron también por mis consejos, por las cosas que alguna vez les he pedido. Tengo el deber de ayudarlos para ir al bien. De la misma forma que he hecho acto de devolución a aquellos a quienes había perjudicado, de la misma forma que he indemnizado a mis convecinos, también tengo que tratar de hacer reparación con ellos”. Y me he quedado aquí. Una vez uno, otra vez otro, han venido, de una u otra ciudad, y he hablado. No todos fueron como Demetes. Algunos, tras burlarse de mí, huyeron. Otros han dado largas. Otros se han detenido, pero, pasado un tiempo, han vuelto a su infierno. Éstos han permanecido. Y… bueno pues ahora siento que debo seguirte así, que debemos seguirte así, luchando con nosotros mismos, soportando los desprecios del mundo que no nos sabe perdonar.

524.3

No faltan las lágrimas del corazón cuando vemos que el mundo no perdona, cuando los recuerdos vuelven… y son muchos y penosos… En algunos son…».

«La Némesis horrenda que nos echa en cara nuestros delitos y que nos promete la venganza en el ultramundo» dice uno.

«Son los quejidos de los que estaban agotados y yo los pegaba para hacerles trabajar».

«Son las maldiciones de los que hice esclavos tras haber tomado con usura todo lo que poseían».

«Son las súplicas de viudas y huérfanos que no podían pagar y yo les confiscaba en nombre de la ley sus últimos bienes».

«Son las atrocidades llevadas a cabo en los países conquistados, con personas inermes aterrorizadas por la derrota».

«Son las lágrimas de mi madre, de mi mujer, de mi hija, muertas de penalidades mientras yo derrochaba todo en los festines».

«Son… ¡Oh, mi delito no tiene nombre! Señor, yo no tengo sangre en mis manos, no he robado dinero, no he impuesto tributos insoportables ni intereses asfixiantes, no he maltratado a los vencidos, pero he sacado partido de todos los desdichados, y he sacado dinero de niñas inocentes, niñas de vencidos, de huérfanas, de niñas vendidas como mercancía por un pan. He dado la vuelta al mundo aprovechando estas ocasiones, detrás de los ejércitos, yendo a los lugares donde había una carestía, o a donde un río desbordado había dejado completamente sin alimentos, o a donde una epidemia había dejado jóvenes vidas sin protección, y de ahí he hecho mercancía, una mercancía inocente pero infame: infame para mí, que obtenía dinero de ella, inocente ella porque aún no conocía el horror. Señor, en mis manos están las virginidades de jovencitas deshonradas y el honor de jóvenes esposas arrebatadas en ciudades de conquista. Mis bazares… y mis prostíbulos eran célebres, Señor… ¡No me maldigas, ahora que lo sabes!…».

524.4

Los apóstoles, involuntariamente, se han apartado del último que ha hablado. Jesús se levanta y se acerca a él. Le pone la mano en el hombro y dice: «¡Es verdad! Tu delito es grande. Tienes que reparar mucho. Pero Yo, la Misericordia, te digo que aunque fueras el mismo demonio y sobre ti pesarán todos los delitos de la Tierra, si quieres, puedes expiar todo y ser perdonado por Dios, perdonado por el verdadero, grande, paterno Dios. Si tú quieres. Une tu voluntad a la mía. También Yo quiero que seas perdonado. Únete a mí. Dame tu pobre espíritu cubierto de infamia, quebrantado, tu espíritu que, después de que has dejado el pecado, está lleno de cicatrices y humillación. Yo le pondré en mi corazón, en el lugar donde pongo a los mayores pecadores, y lo llevaré conmigo al sacrificio redentor. La Sangre más santa, la de mi corazón, la última Sangre del Inmolado por los hombres, se esparcirá sobre los espíritus más quebrantados y los regenerará. Por ahora, ten esperanza. Una esperanza mayor que tu inmenso delito en la misericordia de Dios, porque es una misericordia sin límites, hombre, para quien sabe confiar en ella».

El hombre casi querría coger y besar esa mano que está puesta en su hombro, esa mano tan pálida y delgada sobre su túnica oscura y su hombro fuerte. Pero no se atreve. Jesús comprende esto y le ofrece la mano mientras dice: «Hombre, besa su palma. Encontraré ese beso como medicamento para una tortura. Mano besada, mano herida: besada por amor, herida por el amor. ¡Oh, si todos supieran besar a la gran Víctima, y Ella muriera vestida de llagas sabiendo en cada una los besos y amores de todos los hombres redimidos!», y tiene su palma apretada contra los labios rasos de este hombre que, por todo el conjunto, yo diría que es romano. Y la tiene ahí hasta que el hombre, como saciado, se separa de ella, después de haber apagado la quemazón de sus remordimientos bebiendo la misericordia del Señor en el cuenco de la mano divina.

524.5

Jesús vuelve a su sitio, y, al pasar, pone la mano en la cabeza crespa de uno muy joven. Yo diría que no tiene más de veinte años, si es que los tiene. Uno que no ha hablado en todo este tiempo, uno que es, sin duda, de raza hebrea. Jesús le hace esta pregunta: «¿Y tú, hijo mío, no dices nada a tu Salvador?».

El joven alza la cabeza y le mira… En esa mirada hay toda una narración: una historia de dolor, odio, arrepentimiento, amor.

Jesús, un poco agachado hacia él, fijos los ojos en los ojos, lee alguna de estas historias mudas y dice: «Por este motivo te llamo “hijo”. Ya no estás solo. Perdona a todos, a los de tu misma sangre y a los extraños, de la misma forma que Dios te perdona. Y ama al Amor que te ha salvado. Ven un momento conmigo. Quiero decirte unas palabras aparte».

El joven se alza y le sigue. Cuando están solos, Jesús dice: «Quiero decirte esto, hijo. El Señor te ha amado mucho, aunque no lo parezca a la luz de un juicio superficial. La vida te ha probado mucho; los hombres te han causado mucho daño: aquélla y éstos hubieran podido hacer de ti una ruina irreparable. Detrás de ellos estaba Satanás, envidioso de tu alma. Pero sobre ti estaba la mirada de Dios. Y esa mirada bendita ha detenido a tus enemigos. Su amor ha enviado a Zaqueo por tu sendero. Y, con Zaqueo, al que te habla, a mí. Ahora, Yo, que te hablo, de digo que debes hallar en este amor todo aquello que no has tenido; que debes olvidar todo aquello que te ha agriado, y perdonar, perdonar a tu madre, perdonar al amo infame, perdonarte a ti mismo. No te odies de mala manera, hijo. Odia tu tiempo de pecado, pero no odies tu espíritu, que ha sabido dejar este pecado. Que tu mente sea buena amiga de tu espíritu, y que juntos alcancen la perfección».

«¡Perfecto yo?».

«¿Has oído lo que le he dicho a aquel hombre? ¡Y él ha estado en el fondo del abismo!…

524.6

¡Y gracias, hijo!».

«¿Por qué cosa, mi Señor? Soy yo el que debe decirte gracias…».

«Por no haber querido ir donde quien compra a hombres para traicionarme».

«¡Oh, Señor! ¿Hubiera podido hacerlo sabiendo que no nos desprecias ni siquiera a nosotros siendo bandidos? Yo estaba entre aquellos que te llevaron el cordero al Carit[1], y uno de nosotros, que ahora ha sido apresado por los romanos —al menos eso se dice, y lo cierto es que desde antes de los Tabernáculos no se le ha vuelto a ver por los refugios de los bandidos— me refirió las palabras que dijiste en un valle de cerca de Modín… Porque yo no estaba todavía con los bandidos. Fui con ellos al final del último Adar y los he dejado al principio de Etanim. Pero no he hecho nada que merezca tu “gracias”. Tú eres bueno. Quise ser bueno y advertir a un amigo tuyo… ¿Puedo llamarle así a Zaqueo?».

«Sí, puedes llamarle así. Todos los que me aman son mis amigos. Tú también lo eres».

«¡Bueno!… quise advertir para que estuvieras en guardia. Pero advertir no merece las gracias…».

«Te repito que te doy las gracias por no haberte vendido contra mí. Esto tiene valor».

«¿Y el aviso no?».

«Hijo mío, nada podrá impedirle al Odio arremeter contra mí. ¿Has visto alguna vez derbordarse un torrente?».

«Sí. Estaba en Yabés Galaad y vi la destrucción causada por el río, salido de su cauce antes del Jordán».

«¿Y pudo alguna cosa detener las aguas?».

«No. Todo lo cubrieron y lo destruyeron. Incluso se llevaron casas».

«Así es el Odio. Pero no me arrastrará. Quedaré sumergido, pero no destruido. Y, en la hora amarguísima, el amor de quien no quiso odiar al Inocente será mi confortación, mi luz en las tinieblas de esa hora de Tinieblas, mi dulzura en el cáliz del vino con hiel y mirra».

«¿Tú?… Hablas de ti como si… Ese cáliz es para los ladrones, para quien va a la muerte de cruz. ¡Pero Tú no eres un ladrón! ¡Tú no eres culpable! Tú eres…».

«El Redentor. Dame un beso, hijo».

Le toma la cabeza entre las manos y le besa en la frente y luego se inclina para recibir el beso del joven, un beso tímido, que apenas roza la mejilla enjuta… Y luego el joven se deja caer, llorando, en el pecho de Jesús.

«¡No llores, hijo mío! Yo soy sacrificado por el amor. Y es siempre un dulce sacrificio, aunque sea atormentador para la naturaleza humana».

Le tiene entre sus brazos hasta que el llanto cesa, y luego —llevándole cogido de la mano, junto a sí— regresa al lugar donde antes estaba Pedro.

524.7

Habla de nuevo: «Mientras tomábamos el alimento, uno de vosotros, no de Israel, ha dicho que quería que le explicara algo. Que lo pregunte ahora, porque pronto tendremos que volver donde la gente y después dejarnos».

«Soy yo el que ha dicho eso. Pero muchos desean saberlo. Zaqueo no lo sabe explicar bien, y tampoco otros de los nuestros que son de tu religión. Hemos preguntado a tus discípulos cuando han pasado por aquí, pero no nos han hablado con claridad».

«¿Y qué es lo que quieres saber?».

«Nosotros, respecto al alma, ni siquiera sabíamos que la teníamos. O sea… al menos nosotros habríamos debido saberlo, porque nuestros antiguos… Pero no leíamos a los antiguos. Éramos animales… Y ya no sabíamos qué es esta alma. Ni siquiera ahora lo sabemos. ¿Qué es el alma? ¿Acaso nuestra razón? No creemos que lo sea, porque en tal caso nosotros no la habríamos tenido, y hemos oído decir que sin alma no hay vida. ¿Qué es, entonces, el alma —que nos dicen que es incorpórea, inmortal—, si no es la razón? El pensamiento es incorpóreo, pero no es inmortal porque cesa con nuestra vida. Ni el más sabio piensa después de la muerte».

«El alma, hombre, no es el pensamiento. El alma es el espíritu, es el principio inmaterial de la vida, el principio impalpable, pero verdadero, que anima todo el hombre y perdura después del hombre. Por eso se la llama inmortal. Es algo tan sublime, que hasta el más poderoso pensamiento es nada respecto a ella. El pensamiento termina; el alma, por el contrario, tiene, ciertamente, un principio, pero no un fin. Bienaventurada o réproba, continúa siendo. ¡Dichosos aquellos que saben conservarla pura, o hacerla de nuevo pura después de haberla hecho impura, para devolverla a su Creador como Él se la dio al hombre para animar su humanidad!».

«Pero ¿está en nosotros o por encima de nosotros, como el ojo de Dios?».

«En nosotros».

«¿Entonces, prisionera en nosotros hasta la muerte? ¿Esclava?».

«No. Reina. En el pensamiento eterno, el alma, el espíritu, es la cosa que reina en el hombre, en el animal creado llamado hombre. Ella, viniendo del Rey y Padre de todos los reyes y padres, siendo parte e imagen de Él, don y derecho de Él, teniendo como misión hacer de la criatura llamada hombre un dios después de la vida, un “habitante” de la Morada del sublimísimo, único Dios, es creada reina, y con autoridad y destino de reina. Siervas suyas, todas las virtudes y las facultades del hombre; ministra suya, la buena voluntad del hombre. Siervo suyo, el pensamiento: siervo y alumno, el pensamiento del hombre. Desde el espíritu el pensamiento adquiere potencia y verdad, justicia y sabiduría, y puede elevarse a perfección regia. Un pensamiento privado de la luz del espíritu tendrá siempre lagunas y tinieblas, no podrá nunca darse razón de verdades que son más incomprensibles que misterios para quien, habiendo perdido la regalidad del alma, está separado de Dios. El pensamiento del hombre estará ciego, sufrirá idiotez, si carece del punto base, del ceprén indispensable para comprender, para —dejando la Tierra y lanzándose hacia arriba— alzarse al encuentro de la Inteligencia, de la Potencia, de… en una palabra, de la Divinidad.

524.8

Te hablo así a ti, Demetes, porque no has sido siempre simplemente un cambista, y puedes comprender y dar explicación a los demás».

«Eres verdaderamente un vidente, Maestro. No, no he sido solamente un cambista… Es más, éste ha sido el último peldaño de mi descenso… Dime, Maestro, pero, si el alma es reina, ¿por qué no reina entonces y no domeña al mal pensamiento y a la mala carne del hombre?».

«Domeñar no sería ni libertad ni mérito, sería opresión».

«Pero también el pensamiento y la carne dominan al alma —hablo de mí, de nosotros— y la hacen esclava demasiadas veces. Por esto decía que si estaba en nosotros en forma de esclava. ¿Cómo puede permitir Dios que algo tan sublime —la has definido “parte de Dios e imagen de Él”— sea humillada por aquello que es inferior?».

«Lo que había en el Pensamiento divino era que el alma no conociera la esclavitud. Pero ¿olvidas al enemigo de Dios y del hombre? Los espíritus infernales a vosotros también os son conocidos».

«Sí, y todos con deseos crueles. Y puedo decir que, recordando al niño que era yo, sólo a estos espíritus infernales puedo atribuir el hombre que vine a ser y que he sido hasta el umbral de la vejez. Ahora encuentro otra vez a aquel niño pequeño perdido de entonces. Pero ¿podré hacerme tan niño como para volver a la pureza de entonces? ¿Es que se nos concede el camino hacia atrás en el tiempo?».

«No hace falta andar hacia atrás. No podrías hacerlo. El tiempo pasado no regresa, no se puede hacer que vuelva ni se puede volver a él. Pero no es necesario.

524.9

Algunos de vosotros son de lugares donde es conocida la teoría de la escuela pitagórica. Teoría de error. Las almas, superada la espera de la Tierra, no vuelven ya jamás a la Tierra en ningún cuerpo. Ni de animal, pues no es conveniente que algo tan sobrenatural viva dentro de un animal; ni de hombre, porque ¿cómo se daría premio al cuerpo reunido con el alma en el último Juicio, si esa alma hubiera tenido como vestido muchos cuerpos? Dicen los que creen en la teoría mencionada que es el último cuerpo el que goza, porque, a través de sucesivas purificaciones, en sucesivas vidas, el alma sólo en la última reencarnación alcanza la perfección digna de premio. ¡Error y ofensa! Error y ofensa a Dios: pensando que Él no ha podido crear sino un número limitado de almas; error y ofensa al hombre: juzgándole tan corrompido como que merezca difícilmente premio. El premio no se producirá inmediatamente; el noventa y nueve por ciento de las veces deberá sufrir una purificación después de esta vida. Pero purificación es preparación al gozo. Por tanto, quien se purifica es uno que ya se ha salvado. Y, una vez salvado, gozará, pasado el último Día, con su cuerpo. No podrá tener más que un cuerpo para su alma, ni más de una vida aquí, y, con el cuerpo que le hicieron sus procreadores y el alma que le creó el Creador para vivificar a la carne, gozará el premio.

524.10

No se hace posible ni la reencarnación ni la retrocesión en el tiempo. Pero sí se hace posible recrearse con movimiento de libre voluntad, y Dios bendice a estas voluntades y las ayuda. Todos vosotros las habéis tenido. Vese entonces, bajo el lavacro del arrepentimiento, al hombre pecador, vicioso, sucio, delincuente, ladrón, corrompido, corruptor, homicida, sacrílego, adúltero, renacer espiritualmente, destruir la carne corrompida del hombre viejo, deshacer el yo mental aún más corrompido —como si la voluntad de redimirse fuera un ácido, un ácido que ataca y destruye la envoltura malsana tras la cual se esconde un tesoro— y, sacado al desnudo el propio espíritu, habiéndolo purificado, habiéndolo curado, revestirle con un nuevo pensamiento, con un nuevo vestido de pureza, de bondad, de niñez. ¡Oh, un vestido que puede acercarse a Dios, que puede cubrir dignamente al alma recreada, y custodiarla y ayudarla hasta su supercreación, que es la santidad cabal que mañana —un mañana quizás lejano, si se considera con mente y medida humanas de tiempo; cercanísimo, si es contemplado con pensamiento de eternidad— será gloriosa en el Reino de Dios. Y todos pueden, si quieren, recrear en sí al niño puro de los días infantiles, al niño amoroso, humilde, franco, bueno, al que la madre apretaba contra su pecho, al que el padre miraba gloriándose de él, amado por el ángel de Dios y mirado por Dios con amor. ¡Vuestras madres! Quizás eran mujeres de gran virtud… Dios no dejará sin premio su virtud. Procuraos, pues, una igual, para reuniros con ellas cuando habrá para todos los virtuosos una sola cosa: el Reino de Dios para los buenos. Quizás no eran buenas y contribuyeron a vuestro hundimiento. Pero, si ellas no os han amado, si no conocéis el amor, si esta carencia os ha hecho malos, ahora, que un Amor divino os ha recogido, sed santos para poder en una exultancia celeste gozar del Amor que a todo amor supera.

524.11

¿Tenéis algo más que preguntar?».

«No, Señor. Todo lo tenemos que aprender. Pero, por el momento, no encontramos nada más…».

«Os dejaré a Juan y a Andrés durante unos días. Luego mandaré aquí a discípulos buenos y sabios. Quiero que los potros salvajes conozcan los caminos del Señor y sus pastos, como los de Israel, porque he venido para todos y para todos tengo un mismo modo de amar. Levantaos y vámonos».

Y es el primero en salir al mudado jardín, seguido muy de cerca por los suyos, que se quejan dulcemente: «Maestro, has hablado a éstos como pocas veces hablas a los tuyos…».

«¿Y eso os contraría? ¿No sabéis que así se hace también en el mundo cuando se quiere conquistar a una persona amada? Sin embargo, con aquellos que sabemos que nos aman con todo su ser, y ya forman parte de nuestra familia, no hay necesidad de arte de conquista; basta que nos veamos, para estar los unos en los otros con gozo y paz» dice Jesús con una sonrisa divina (tanto comunica la alegría, que hay que decirla efectivamente divina).

Y los apóstoles ya no se quejan; es más, beatos, le miran, y se quedan arrobados en la exultación del recíproco amor.


Notes

  1. J’étais moi aussi parmi ceux… comme on le voit en 380.3 ; tes paroles… près de Modin, dans un épisode de l’année précédente, en 223.6/8.

Notas

  1. los que te llevaron el cordero al Carit, como resulta en 380.3; las palabras que dijiste… cerca de Modín, en un episodio precedente, en 223.6/8.