Le soleil a beau resplendir dans un ciel serein, la vallée du Kishon est froide, parcourue par un vent glacial qui souffle après avoir franchi les collines du nord, ruinant les tendres cultures qui frissonnent et se recroquevillent, comme brûlées, destinées à mourir dans leur verdeur nouvelle.
« Mais est-ce que ce froid va durer encore longtemps ? » demande Matthieu qui s’emmitoufle encore plus dans son manteau, d’où seule une partie de la figure émerge, c’est-à-dire les yeux et le nez.
La voix étouffée par son grand manteau qu’il a lui aussi jusque sur la bouche, Barthélemy lui répond :
« Peut-être le reste de la lune.
– Nous voilà frais, alors ! Mais patience ! Heureusement qu’à Nazareth nous logerons dans des maisons hospitalières… Et pendant ce temps cela passera.
– Oui, Matthieu. Mais pour moi, c’est déjà passé, puisque j’ai vu Jésus moins accablé. Ne te semble-t-il pas plus heureux ? demande André.
– Il l’est. Mais moi… voilà, il me paraît impossible qu’il ait été aussi mal en point à cause de ce que nous savons. N’y a-t-il vraiment rien eu de nouveau à votre connaissance ? demande Philippe.
– Rien, absolument rien. Je t’affirme qu’à la frontière syro-phé-nicienne, il a même eu beaucoup de joie grâce à des âmes croyantes et il a fait ces miracles dont nous t’avons parlé, assure Jacques, fils d’Alphée.
– Il est beaucoup avec Simon-Pierre depuis quelques jours. Et Simon a beaucoup changé… D’ailleurs, vous avez tous changé ! Je ne sais pas… Vous êtes plus… austères, voilà, dit Philippe.
– Mais ce n’est qu’une impression ! En réalité, nous sommes tels que nous étions. Certainement, voir le Maître ainsi affligé pour tant de raisons ne nous a pas fait plaisir, et aussi entendre comment ils s’acharnent contre lui… Mais nous, nous le défendrons. Ah ! Ils ne lui feront rien si nous sommes avec lui !