409.1
Joseph d’Arimathie se repose dans une pièce à demi-obscure, car tous les rideaux sont baissés pour protéger du soleil. Un silence absolu règne dans toute la maison. Joseph somnole sur un siège bas couvert d’une natte… Entre un serviteur qui se dirige vers son maître, et le touche pour l’éveiller. Joseph ouvre des yeux encore ensommeillés et lève vers son serviteur un regard interrogatif.
« Maître, ton ami Jean est là…
– Mon ami Jean ? Comment est-il ici, puisque le sabbat n’est pas fini ? »
La surprise de la visite d’un membre du Sanhédrin un jour de sabbat réveille pleinement Joseph :
« Fais-le immédiatement entrer. »
Le serviteur sort, et Joseph, en attendant, va et vient d’un air pensif, dans la pièce à demi-obscure et fraîche…
« Que Dieu soit avec toi, Joseph ! » dit le membre du Sanhédrin, Jean.
C’est celui que nous avons vu[1] au premier banquet donné pour Jésus à Arimathie, ainsi que chez Lazare à la dernière Pâque, toujours en qualité, sinon de disciple, du moins de personne qui n’éprouve pas de haine envers Jésus.
« Et avec toi, Jean ! Mais… te sachant juste, je m’étonne de te voir avant le crépuscule…
– C’est vrai. J’ai violé la loi du Sabbat. Et j’ai péché en toute connaissance de cause. C’est donc un grand péché… Et le sacrifice que je consommerai pour être pardonné sera grand lui aussi. Mais la raison qui m’y a poussé est beaucoup plus importante… Yahvé, qui est juste, aura pitié de son serviteur coupable, à cause du motif sérieux qui m’a poussé à la faute…
– Autrefois, tu ne parlais pas ainsi. Pour toi, le Très-Haut était seulement rigoureux, inflexible. Et tu étais parfait parce que tu le craignais comme un Dieu inexorable…
– Oh ! parfait… Joseph, je ne t’ai jamais confessé mes fautes secrètes… Mais, c’est vrai, je jugeais Dieu inexorable, comme beaucoup de gens en Israël. On nous a appris à croire qu’il est le Dieu des vengeances…
– Et tu as continué à le penser même après la venue du Rabbi pour faire connaître à son peuple le vrai visage de Dieu, son vrai cœur… Un visage, un cœur de Père…
– C’est vrai, c’est vrai. Mais… je ne l’avais pas encore entendu parler longuement… Cependant… tu te rappelleras que, dès la première fois que je l’ai vu au banquet chez toi, j’ai gardé une attitude de respect… sinon d’amour pour le Rabbi.
– C’est juste… Mais pour le bien que je te veux, je souhaiterais que tu arrives à une attitude d’amour pour lui. C’est trop peu que le respect…
– Toi, tu l’aimes, n’est-ce pas, Joseph ?
– Oui. Et je te l’affirme, bien que je sache que les princes des prêtres haïssent ceux qui aiment le Rabbi. Mais tu n’es pas capable d’être un délateur…
– Non, c’est juste… Je voudrais être comme toi. Mais y parviendrai-je jamais ?
– Je prierai à cette intention. Ce serait ton salut éternel, mon ami… »