Gli Scritti di Maria Valtorta

550. Les apôtres sont euphoriques.

550. Euforia tra gli apostoli. Missione d’amore

550.1

Il fait bon rester ainsi, sans rien faire, entourés de l’amour de ses amis et près du Maître, dans les journées ensoleillées qui annoncent déjà un précoce sourire de printemps ! Le regard se pose sur les champs qui ouvrent leurs sillons à un verdoiement innocent du blé en herbe, sur les prés dont les premières fleurs multicolores rompent le vert uniforme de l’hiver, sur les haies qui, aux endroits les plus ensoleillés, présentent déjà le sourire des boutons qui s’ouvrent, sur les amandiers dont les premières fleurs éclosent à leur sommet en formant une sorte de mousse.

Jésus, les apôtres, et les trois amis de Béthanie s’émerveillent. Combien semblent loin, la malveillance, la douleur, la tristesse, la maladie, la mort, la haine, l’envie, tout ce qui est peine, tourment, préoccupation sur la terre !

Les apôtres jubilent, et ils le manifestent. Ils expriment leur conviction — si sûre, si triomphante ! — que Jésus a d’ores et déjà vaincu tous ses ennemis, que sa mission continuera désormais sans obstacles, qu’il sera reconnu comme Messie même par ceux qui s’obstinaient davantage à le nier. Ils parlent avec un peu d’exaltation, comme rajeunis, tant ils sont heureux, en faisant des projets pour l’avenir, en rêvant… en rêvant tellement… et si humainement…

550.2

Le plus enthousiaste, à cause de son caractère qui le porte aux extrêmes, c’est Judas. Il se félicite d’avoir su attendre et d’avoir su agir, il se félicite de sa longue foi dans le triomphe du Maître, il se félicite d’avoir défié les menaces du Sanhédrin… Il est tellement euphorique qu’il finit par révéler ce qu’il a toujours tenu caché jusqu’ici, au grand étonnement de ses compagnons :

« Oui, ils voulaient m’acheter, ils voulaient me séduire par des flatteries, et, voyant qu’elles ne servaient pas, par des menaces. Si vous saviez ! Mais moi, je les ai payés de la même monnaie. J’ai feint de ressentir de la sympathie pour eux, comme eux pour moi. Je les ai flattés comme eux me flattaient, et je les ai trahis comme eux voulaient me trahir… Car c’est bien ce qu’ils voulaient ! Me faire croire que c’était dans une bonne intention qu’ils éprouvaient le Maître pour pouvoir le proclamer solennellement le Saint de Dieu. Mais moi, je les connais ! Je les connais ! Et dans toutes les manigances qu’ils m’annonçaient, je m’y prenais de façon telle que la sainteté de Jésus se manifeste avec plus d’éclat que le soleil de midi dans un ciel sans nuages… J’ai joué un jeu dangereux! S’ils l’avaient compris ! Mais j’étais prêt à tout, même à mourir, pour servir Dieu dans mon Maître. Et ainsi je savais tout… J’ai dû parfois vous paraître fou, mauvais, sauvage. Si vous aviez su ! Moi seul, je connais mes nuits, les précautions que je devais prendre pour faire du bien sans attirer l’attention de personne ! Vous me suspectiez tous quelque peu, j’en suis conscient, mais je ne vous en garde pas rancune. Ma manière de faire… oui… pouvait susciter des soupçons, mais mon but était bon et je ne me préoccupais que de cela. Jésus ne sait rien, ou plutôt je crois que lui aussi me suspecte. Mais je saurai me taire sans exiger de lui le moindre éloge. Et taisez-vous, vous aussi. Un jour, dans les premiers temps où j’étais avec lui — toi, Simon le Zélote, et toi, Jean, vous étiez avec moi —, il m’a reproché de m’être vanté d’avoir le sens pratique. Depuis lors… je ne lui ai jamais fait ressortir cette qualité, mais j’ai continué à m’en servir, pour son bien. J’ai agi comme une mère pour son enfant inexpérimenté : elle écarte les obstacles de son chemin, elle plie pour lui la branche sans épines et lève celle qui peut le blesser, ou bien, par des gestes avisés, elle l’amène à son insu à faire ce qu’il doit savoir faire et à éviter ce qui est mal. Ainsi le fils croit être arrivé de lui-même à marcher sans trébucher, à cueillir une belle fleur pour sa mère, à faire ceci ou cela spontanément. C’est ainsi que je me suis comporté envers le Maître, car la sainteté ne suffit pas dans un monde d’hommes et de satans. Il faut aussi combattre à armes égales, au moins en hommes… et parfois… même un rien de fourberie d’enfer n’est pas de trop. C’est mon idée. Mais lui ne veut pas en entendre parler… Il est trop saint… Violà ! Moi, je comprends tout et tout le monde, et je ne vous tiens pas rigueur des mauvaises pensées que vous avez pu avoir sur mon compte. Maintenant, vous voilà au courant. Aimons-nous en bons compagnons, et faisons tout pour son amour et sa gloire. »

Et il désigne Jésus, qui se promène beaucoup plus loin dans une allée ensoleillée en devisant avec Lazare, qui l’écoute avec un sourire extasié sur le visage.

550.3

Les apôtres s’éloignent vers la maison de Simon. Inversement, Jésus s’approche avec son ami. Je les écoute. Lazare dit :

« Oui : j’avais compris que, si tu me laissais mourir, c’est que tu avais une bonne raison, certainement. Je pensais que c’était pour m’épargner la vue de la persécution qu’ils te font subir. Et — tu sais que je dis la vérité — j’étais content de mourir pour ne pas la voir. Elle m’aigrit, elle me trouble. Vois-tu, Maître, j’ai pardonné tant de choses à ceux qui sont les chefs de notre peuple. J’ai dû pardonner jusqu’aux derniers jours… Elchias… Mais ma mort et ma résurrection ont annulé tout ce qui s’y rapportait. A quoi bon me rappeler leurs dernières actions pour m’en affliger ? J’ai tout pardonné à Marie. Elle semble en douter. Et même, depuis que je suis ressuscité, elle a adopté à mon égard une attitude que… je ne sais comment définir. J’ignore la raison de ce changement. Elle est d’une douceur et d’une soumission si étranges chez ma Marie… Même dans les premiers moments où, rachetée par toi, elle est revenue ici, elle n’était pas ainsi… Comme Marie te dit tout, peut-être en sais-tu quelque chose, peut-être peux-tu m’en parler… J’ignore si ceux qui sont venus ici lui ont fait trop de reproches. J’ai toujours cherché à amoindrir le souvenir de sa faute quand je la voyais absorbée dans le souvenir de son passé, pour guérir sa souffrance. Elle n’arrive pas à trouver la paix. Elle semble tellement… au-dessus de ce qui pourrait être de l’avilissement. A certains, elle pourrait paraître même peu repentie… Mais moi, je comprends… Je sais. Elle fait tout pour expier. Je crois qu’elle fait de grandes pénitences, de toutes sortes. Je ne m’étonnerais pas que sous ses vêtements, elle porte un cilice et que sa chair connaisse la morsure des fouets… Mais l’amour fraternel que je lui porte, et qui veut la soutenir en mettant un voile entre le passé et le présent, les autres n’en font pas preuve… Sais-tu si, peut-être, elle a été maltraitée par ceux qui ne savent pas pardonner… elle qui a tant besoin de pardon ?

– Je l’ignore, Lazare. Marie ne m’en a pas parlé. Elle m’a seulement confié qu’elle a beaucoup souffert en entendant les pharisiens insinuer que je n’étais pas le Messie sous prétexte que je ne te guérissais pas ou que je ne te ressuscitais pas.

– Et… elle ne t’a rien dit de moi ? Tu sais… j’avais si mal… Je me rappelle que ma mère, à ses derniers moments, révéla des choses qui nous étaient passées inaperçues, à Marthe et à moi. Ce fut comme si le fond de son âme et de son passé était revenu à la surface dans les derniers soulèvements du cœur. Moi, je ne voudrais pas… Mon cœur a tant souffert pour Marie… et s’est tant efforcé de ne jamais lui laisser comprendre à quel point cela m’a meurtri… Je ne voudrais pas l’avoir affligée, maintenant qu’elle est bonne, alors que par amour fraternel d’abord, par amour pour toi ensuite, je ne l’ai jamais frappée au temps infâme où elle était un opprobre. Que t’a-t-elle dit à mon sujet, Maître ?

– Sa douleur d’avoir eu trop peu de temps pour te manifester son saint amour de sœur et de condisciple. En te perdant, elle a mesuré l’étendue des trésors d’affection qu’elle avait piétinés autrefois… et maintenant, elle est heureuse de pouvoir te montrer tout l’amour qu’elle veut, pour te dire que, à ses yeux, tu es son saint et bien-aimé frère.

– Ah ! voilà ! J’en avais l’intuition ! Je m’en réjouis, mais je craignais de l’avoir offensée… Depuis hier, je pense, je pense… j’essaie de me souvenir… mais je n’y arrive pas…

– Mais pourquoi veux-tu te le remettre en mémoire ? Tu as l’avenir devant toi. Le passé est resté dans la tombe, ou plutôt il n’y est même pas resté : il a brûlé en même temps que les bandelettes funèbres, mais si cela doit t’apaiser, je vais te rapporter les derniers mots que tu as adressés à tes sœurs, en particulier à Marie : tu as dit que c’était grâce à Marie que je suis venu ici et que j’y viens encore, parce que Marie sait aimer mieux que quiconque. C’est vrai. Tu as ajouté qu’elle t’a aimé plus que tous ceux qui t’ont aimé. Cela aussi est vrai, car elle t’a aimé en se renouvelant par amour pour Dieu et pour toi. Tu lui as confié précisément que toute une vie de délices ne t’aurait pas donné la joie qu’elle t’a procurée. Et tu les as bénies comme un patriarche bénissait ses enfants préférés. Tu as pareillement béni Marthe que tu appelais : ta paix, et Marie que tu appelais : ta joie. As-tu retrouvé ta sérénité, maintenant ?

– Maintenant, oui, Maître.

– Dans ce cas, puisque la paix permet la miséricorde, pardonne aussi aux chefs du peuple qui me persécutent. Car tu voulais dire que tu peux tout pardonner, sauf le mal qu’ils me font.

– C’est cela, Maître.

– Non, Lazare. Moi, je leur pardonne. Tu dois aussi leur pardonner si tu veux être semblable à moi.

– Semblable à toi ! Cela m’est impossible, je suis un simple homme !

– L’homme est resté là-dessous. L’homme ! Ton esprit…

550.4

Tu sais ce qui arrive à la mort de l’homme…

– Non, Seigneur, je ne me souviens de rien[1] de ce qui m’est arrivé » interrompt vivement Lazare.

Jésus sourit et répond :

« Je ne parlais pas de ton savoir personnel, de ton expérience particulière, mais de ce que tout croyant connaît sur ce qui lui arrive après sa mort.

– Ah ! le jugement particulier ! Je sais. Je crois. L’âme se présente à Dieu, et Dieu la juge.

– C’est cela. Et le jugement de Dieu est juste et inviolable, sa valeur est infinie. Si l’âme jugée est coupable mortellement, elle devient une âme damnée. Si elle est légèrement coupable, elle est envoyée au purgatoire. Si elle est juste, elle va dans la paix des limbes en attendant que j’ouvre la porte des Cieux. J’ai donc rappelé ton esprit après qu’il était déjà jugé par Dieu. Si tu avais été damné, je n’aurais pas pu te rappeler à la vie, car j’aurais annulé le jugement de mon Père. Pour les damnés, il n’y a plus de changement possible. Ils sont jugés pour toujours. Tu étais donc au nombre de ceux qui n’étaient pas damnés. Tu faisais partie de la classe des bienheureux ou de la classe de ceux qui le seront après leur purification. Mais réfléchis, mon ami : la volonté sincère de repentir que l’homme peut avoir alors qu’il est encore homme, c’est-à-dire chair et âme, a valeur de purification ; un rite symbolique de baptême dans l’eau, voulu par esprit de contrition des souillures contractées dans le monde et à cause de la chair, a, pour nous autres juifs, valeur de purification ; par conséquent, imagine quelle valeur aura le repentir plus réel et plus parfait, beaucoup plus parfait, d’une âme libérée de la chair, consciente de ce qu’est Dieu, instruite de la gravité de ses erreurs, éclairée sur l’immensité de la joie qui s’est éloignée pendant des heures, pendant des années ou pendant des siècles — la joie de la paix des limbes, qui bientôt sera la joie de la possession de Dieu enfin atteinte — ; imagine ce que sera la purification double, triple, du repentir parfait, de l’amour parfait, du bain dans l’ardeur des flammes allumées par l’amour de Dieu et par l’amour des âmes, dans lequel et par lequel les esprits se dépouillent de toute impureté et d’où ils sortent beaux comme des séraphins, couronnés de ce qui ne couronne même pas les séraphins : leur martyre d’ici-bas et dans l’au-delà contre les vices et grâce à l’amour. Qu’est-ce que cela sera ? Dis-le donc, mon ami.

– Mais… je ne sais pas… une perfection. Ou plutôt… une nouvelle création.

– Exactement. C’est le mot juste. L’âme en est comme créée à nouveau, elle devient semblable à celle d’un enfant. Elle est neuve. Tout son passé d’homme n’existe plus. Une fois le péché originel disparu, l’âme, exempte de toute ombre de taches, sera digne du Paradis. J’ai rappelé ton âme qui déjà s’était recréée par son attachement au Bien, par l’expiation de la souffrance et de la mort, et grâce au parfait repentir et au parfait amour que tu avais atteints au-delà de la mort. Tu as donc l’âme tout à fait innocente d’un bébé né depuis quelques heures. Et si tu es un nouveau-né, pourquoi veux-tu endosser sur cette enfance spirituelle les vêtements lourds, accablants de l’homme adulte ? Les âmes joyeuses des petits enfants ont des ailes et non des chaînes. Eux m’imitent facilement, parce qu’ils n’ont pas encore construit leur personnalité. Ils deviennent comme je suis, car ma figure et mon enseignement peuvent s’imprimer, sur leur âme vierge de toute empreinte, sans confusion de lignes. Ils ont l’âme exempte de souvenirs humains, de ressentiments, de préjugés. Il ne s’y trouve rien. Et je puis y être, moi qui suis parfait, absolu comme je suis dans le Ciel. Toi qui es comme re-né, nouvellement né — puisque dans ta vieille chair, la puissance motrice est nouvelle, sans passé, pure, sans traces de ce qui a été —, toi qui es revenu pour me servir et seulement pour cela, tu dois être comme je suis, plus que tous. Regarde-moi. Regarde-moi bien. Mire-toi en moi, reflète-toi en moi. Soyons deux miroirs qui se regardent pour réfléchir l’un dans l’autre la figure de ce qu’ils aiment. Tu es un homme et tu es un enfant. Tu es homme quant à l’âge, tu es enfant quant à la pureté du cœur. Tu as sur les enfants l’avantage de connaître déjà le bien et le mal, et d’avoir déjà su choisir le bien, avant même d’être baptisé dans les flammes de l’amour. Eh bien ! je te dis, à toi dont l’âme a été purifiée : “ Sois parfait comme l’est notre Père des Cieux et comme je le suis. Sois parfait, c’est-à-dire sois semblable à moi qui t’ai aimé au point d’aller contre toutes les lois de la vie et de la mort, du ciel et de la terre pour avoir de nouveau sur la terre un serviteur de Dieu, pour moi un véritable ami, et au Ciel un bienheureux, un grand bienheureux. ” Je le dis à tous : “ Soyez parfaits. ” Eux, pour la plupart, n’ont pas le cœur que tu avais : digne du miracle, digne d’être pris comme instrument pour rendre gloire à Dieu en son Fils bien-aimé. Et eux n’ont pas tes dettes d’amour envers Dieu… Je puis le dire, je peux l’exiger de toi. Et en premier lieu, j’exige que tu n’éprouves aucune rancœur à l’égard de ceux qui m’ont offensé et m’offensent encore. Pardonne, pardonne, Lazare. Tu as été plongé dans les flammes allumées par l’amour. Tu dois être “ amour ”, pour ne plus jamais connaître autre chose que l’étreinte amoureuse de Dieu.

– Et en agissant ainsi, j’accomplirai la mission pour laquelle tu m’as ressuscité ?

– En agissant ainsi, tu l’accompliras.

– Cela me suffit, Seigneur. Je n’ai pas besoin d’en demander et d’en savoir davantage. Te servir était mon rêve. Si je t’ai servi même dans le peu de chose que peut faire un homme malade et mort, et si je peux te servir avec les pauvres moyens de cet homme qui a recouvré la santé, mon rêve est réalisé et je ne demande rien de plus. Sois béni, Jésus, mon Seigneur et mon Maître ! Et qu’avec toi soit béni Celui qui t’a envoyé.

– Béni soit toujours le Seigneur Dieu tout-puissant. »

550.5

Ils se dirigent vers la maison, mais s’arrêtent de temps à autre pour observer le réveil des arbres. Jésus lève un bras et, grand comme il est, cueille un petit bouquet de fleurs sur un amandier qui se chauffe au soleil contre le mur méridional de la demeure.

Marie sort et, à leur vue, s’approche pour entendre ce que dit Jésus :

« Tu vois, Lazare ? A eux aussi, le Maître a dit : “ Sortez. ” Et ils ont obéi pour servir le Seigneur.

– Quel mystère que la germination ! Il paraît impossible que, d’un tronc dur et d’une semence résistante puissent sortir des pétales si fragiles et des tiges si tendres, pour se changer en fruits ou en arbres. Est-ce une erreur, Maître, de dire que la sève ou le germe correspondent à l’âme de la plante ou de la semence ?

– Ce n’est pas une erreur puisque c’en est la partie vitale. Chez eux, elle n’est pas éternelle, créée pour chaque espèce au premier jour de l’existence des arbres ou des blés. Chez l’homme, elle est éternelle, ressemblant à son Créateur, créée chaque fois pour chaque nouvel être conçu. Mais c’est par elle que la matière vit. C’est pourquoi j’affirme que c’est seulement par son âme qu’un homme vit, non seulement ici, mais dans l’au-delà. Il vit par son âme.

Nous autres Hébreux, nous ne traçons pas de dessins sur les tombeaux comme les font les païens. Mais si nous en faisions, il nous faudrait toujours représenter, non pas le flambeau éteint, la clepsydre vide ou quelque autre symbole de fin, mais bien la semence jetée dans le sillon qui fleurit en épi. C’est en effet la mort de la chair qui libère l’âme de son écorce et la fait fructifier dans les parterres du Seigneur. La semence, c’est l’étincelle de vie que Dieu a déposée dans notre poussière et qui devient épi si nous savons par la volonté — mais aussi par la douleur — rendre fertile la motte qui l’enserre. La semence, le symbole de la vie qui se perpétue… Mais Maximin t’appelle…

– J’y vais, Maître. Il sera venu des régisseurs. Tout était arrêté ces derniers mois. Ils s’empressent maintenant de me rendre leurs comptes…

– Que tu approuves d’avance, car tu es un bon maître.

– Et parce que ce sont de bons serviteurs.

– Le bon maître fait les bons serviteurs.

– Dans ce cas, je deviendrai certainement un bon serviteur, car j’ai en toi un Maître parfait. »

A ces mots, il s’éloigne en souriant, agile, bien différent du pauvre Lazare qu’il était depuis des années.

550.6

Marie reste avec Jésus.

« Et toi, Marie, deviendras-tu une bonne servante de ton Seigneur ?

– C’est toi qui peux le savoir, Rabbouni. Moi… moi, je sais seulement que j’ai été une grande pécheresse. »

Jésus sourit :

« Tu as vu Lazare ? Lui aussi était un grand malade, or ne te semble-t-il pas qu’il est maintenant en excellente santé ?

– C’est exact, Rabbouni. Tu l’as guéri. Ce que tu fais est toujours parfait. Lazare n’a jamais été aussi fort et joyeux que depuis qu’il est sorti du tombeau.

– Tu l’as dit, Marie. Ce que je fais est toujours parfait. C’est pour cela aussi que ta rédemption l’est, car c’est moi qui l’ai accomplie.

– C’est vrai, mon Sauveur bien-aimé, mon Rédempteur, mon Roi, mon Dieu. C’est vrai. Et si tu le veux, je serai, moi aussi, une bonne servante de mon Seigneur. Moi, de mon côté, je le désire. Je ne sais pas si toi tu le veux.

– Oui, Marie, sois une bonne servante pour moi. Aujourd’hui plus qu’hier, demain plus qu’aujourd’hui, jusqu’à ce que je te dise : “ Cela suffit, Marie. Voici venue l’heure de ton repos. ”

– D’accord, Seigneur. Alors je voudrais que tu m’appelles, comme tu as appelé mon frère à sortir du tombeau. Oh ! appelle-moi, toi, hors de la vie !

– Non, pas hors de la vie. Je t’appellerai à la Vie, à la vraie Vie. Je t’appellerai à quitter ce tombeau qu’est la chair et la terre. Je t’appellerai aux noces de ton âme avec ton Seigneur.

– Mes noces ! Tu aimes les vierges, Seigneur…

– J’aime ceux qui m’aiment, Marie.

– Tu es divinement bon, Rabbouni ! C’est pour cela que j’étais bouleversée d’entendre dire que tu étais mauvais parce que tu ne venais pas. C’était comme si tout s’écroulait. Je me répétais, non sans peine : “ Non. Non ! Tu ne dois pas accepter cette évidence. Ce qui te paraît flagrant est un rêve. La réalité, c’est la puissance, la bonté, la divinité de ton Seigneur. ” Ah ! combien j’ai souffert ! Autant que de la mort de Lazare et de ses paroles… Ne t’en a-t-il rien dit ? Ne se souvient-il pas ? Dis-moi la vérité…

– Je ne mens jamais, Marie. Il craint d’avoir trop parlé et d’avoir révélé ce qui avait été la douleur de sa vie. Mais je l’ai rassuré, sans mentir, de sorte qu’il est maintenant tranquillisé.

– Merci, Seigneur. Tes paroles… m’ont fait du bien, comme les soins d’un médecin qui met à nu les racines d’un mal et les brûle. Elles ont fini de détruire la Marie d’autrefois. J’avais encore une trop haute idée de moi. Désormais… je mesure le fond de mon abjection et je sais que je dois faire une longue route pour en remonter. Mais je la ferai, si tu m’aides.

550.7

– Je t’aiderai, Marie, même quand je serai parti.

– Comment, mon Seigneur ?

– En accroissant ton amour dans une mesure incalculable. Pour toi, il n’y a pas d’autre voie que celle-là.

– Elle est encore trop douce pour ce que j’ai à expier ! C’est par leur amour que les hommes sont sauvés. C’est comme cela qu’ils méritent le Ciel. Mais ce qui suffit pour les purs, les justes, n’est pas suffisant pour la grande coupable que je suis.

– Il n’y a pas d’autre voie pour toi, Marie : quelle que soit celle que tu prendras, elle sera toujours amour. Amour si tu rends service en mon nom. Amour si tu évangélises. Amour si tu t’isoles. Amour si tu deviens martyre. Amour si tu te fais martyriser. Tu ne sais qu’aimer, Marie. C’est ta nature. Les flammes ne peuvent que brûler, soit qu’elles rampent sur le sol pour consumer des herbes, soit qu’elles s’élèvent en une merveilleuse étreinte autour d’un tronc, d’une maison, ou d’un autel pour s’élancer vers le ciel. A chacun sa nature. La sagesse des maîtres spirituels consiste à savoir faire fructifier les tendances de l’homme en le conduisant à la voie par laquelle il peut le mieux se développer. Cette loi existe même chez les plantes et les animaux, et il serait sot de vouloir prétendre qu’un arbre fruitier ne donne que des fleurs ou des fruits différents de ceux qui correspondent à sa nature, ou qu’un animal joue un rôle propre à une autre espèce. Pourrais-tu demander à cette abeille, dont le destin est de faire du miel, de devenir un oiseau qui chante dans le feuillage des haies ? Ou à ce rameau d’amandier que je tiens dans les mains, ainsi qu’à tout l’arbuste d’où il provient, de laisser suinter de son écorce des résines odoriférantes au lieu de produire des amandes? L’abeille travaille, l’oiseau chante, l’amandier donne son fruit, l’arbre résineux ses résines aromatiques, et tous remplissent leur office. Il en est ainsi des âmes. Ton rôle à toi, c’est d’aimer.

– Alors, brûle-moi, Seigneur. Je te le demande comme une grâce.

– La force d’amour que tu possèdes ne te suffit-elle pas ?

– C’est trop peu, Seigneur. Elle pouvait servir pour aimer des hommes, pas pour toi qui es le Seigneur infini.

– Mais, justement parce que je le suis, il conviendrait d’avoir un amour sans limites…

– Oui, mon Seigneur. C’est cela que je veux : que tu mettes en moi un amour sans limites.

– Marie, le Très-Haut, qui sait ce qu’est l’amour, a dit à l’homme : “ Tu m’aimeras de toutes tes forces. ” Il n’exige pas davantage, car il sait quel martyre c’est d’aimer de toutes ses forces…

– Peu importe, mon Seigneur. Donne-moi un amour infini pour t’aimer comme tu dois être aimé, pour t’aimer comme je n’ai aimé personne.

– Tu me demandes une souffrance semblable à un bûcher qui brûle et consume, Marie. Il brûle et se consume lentement… Réfléchis bien.

– Il y a longtemps que j’y pense, mon Seigneur, mais je n’osais te le demander. Maintenant, je sais vraiment à quel point tu m’aimes, et j’ose le faire. Donne-moi cet amour infini, Seigneur. »

Jésus la regarde. Elle se tient devant lui, encore amaigrie par les veilles et la souffrance, avec un vêtement modeste, une coiffure simple, comme une petite fille sans malice ; elle a un visage pâle où s’allume le désir, les yeux suppliants et pourtant déjà étincelants d’amour ; en un mot, elle est déjà plus séraphin que femme. C’est vraiment la contemplatrice qui demande le martyre de la contemplation absolue.

Après l’avoir bien regardée, comme pour mesurer sa volonté, Jésus lui dit un seul mot :

« Oui.

– Ah ! mon Seigneur ! Quelle grâce de mourir d’amour pour toi ! »

Elle tombe à genoux pour baiser les pieds de Jésus.

« Lève-toi, Marie, prends ces fleurs. Ce seront celles de tes noces spirituelles. Sois douce comme le fruit de l’amandier, pure comme sa fleur, lumineuse comme l’huile que l’on extrait de son fruit quand on l’allume, et parfumée comme cette huile saturée d’essences quand on la fait couler dans les banquets ou sur la tête des rois, parfumée par tes vertus. Alors, tu verseras vraiment sur ton Seigneur le baume qui lui sera infiniment agréable. »

Marie prend les fleurs mais, au lieu de se lever, elle anticipe les baumes de l’amour par ses baisers et ses larmes qu’elle répand sur les pieds de son Maître.

550.8

Lazare les rejoint :

« Maître, il y a un petit garçon qui te demande. Il était allé chez Simon pour te chercher et n’y a trouvé que Jean, qui l’a conduit ici. Mais il ne veut parler à personne d’autre que toi.

– C’est bien, amène-le-moi. Je vais sous la tonnelle des jasmins. »

Marie rentre dans la maison avec Lazare. Jésus va sous la tonnelle. Lazare revient en tenant par la main cet enfant que j’ai vu[2] chez Joseph de Séphoris. Jésus le reconnaît tout de suite et le salue :

« Toi, Martial ? Que la paix soit avec toi. Pourquoi es-tu ici ?

– On m’envoie te dire quelque chose… »

Et il jette un coup d’œil à Lazare, qui comprend et s’apprête à s’éloigner.

« Reste, Lazare. C’est Lazare, mon ami. Tu peux parler devant lui, mon enfant, car je n’ai pas d’ami plus fidèle que lui. »

Rassuré, le garçon reprend :

« C’est Joseph l’Ancien qui m’envoie — car j’habite maintenant avec lui — te demander de te rendre immédiatement à Bethphagé, chez Cléonte. Il doit te parler tout de suite, mais vraiment tout de suite. Et il te prie de venir seul, parce que ce doit être en grand secret.

– Maître ! Qu’arrive-t-il ? questionne Lazare, impressionné.

– Je l’ignore, Lazare. Il nous suffit d’y aller. Viens avec moi.

– Tout de suite, Seigneur. Nous pouvons faire chemin avec l’enfant.

– Non, Seigneur. J’y vais tout seul. Joseph me l’a recommandé. Il a dit : “ Si tu sais te débrouiller seul, je t’aimerai comme un père ”, or moi, je veux que Joseph m’aime comme un fils. Je pars au pas de course. Toi, viens après. Salut, Seigneur. Salut, homme.

– Paix à toi, Martial. »

Le petit garçon s’envole comme une hirondelle.

« Allons-y, Lazare. Apporte-moi mon manteau. Moi, je me mets déjà en chemin car, comme tu le vois, l’enfant n’arrive pas à ouvrir la grille, et il ne veut sûrement appeler personne. »

Jésus se hâte vers la grille, Lazare vers la maison. Le premier ouvre les fermetures de fer à l’enfant, qui file comme une flèche. Le second apporte son manteau à Jésus, puis tous deux prennent la direction de Bethphagé.

550.9

« Que peut bien vouloir Joseph, pour envoyer si secrètement un enfant ?

– Un enfant échappe à ceux qui peuvent surveiller, répond Jésus.

– Tu crois que… Tu soupçonnes que… Tu te sens en danger, Seigneur ?

– J’en suis certain, mon ami.

– Comment ? Même maintenant ? Mais tu ne pouvais pas donner une preuve plus grande !…

– La haine croît sous l’aiguillon de la réalité.

– Oh ! c’est à cause de moi, alors ! Je t’ai porté tort !… Ma peine est sans pareille ! s’exclame Lazare, qui est manifestement accablé.

– Ce n’est pas à cause de toi. Ne t’afflige pas sans raison. Tu as été le moyen, mais la cause a été la nécessité, tu comprends, la nécessité de donner au monde la preuve de ma nature divine. Si ce n’avait pas été toi, cela aurait été un autre, car je devais prouver au monde que, en Dieu que je suis, je peux tout ce que je veux. Or ramener à la vie un homme mort depuis plusieurs jours et déjà décomposé, ce ne peut être que l’œuvre de Dieu.

– Ah ! Tu veux me consoler. Mais ma joie, toute ma joie, est dissipée… Je souffre, Seigneur. »

Jésus fait un geste comme pour dire : “ Qu’y faire ! ” puis tous deux gardent le silence.

Ils marchent à vive allure. La distance est courte entre Béthanie et Bethphagé, et ils ont tôt fait d’arriver.

550.10

Joseph fait les cent pas sur la route à l’entrée du village. Il a le dos tourné quand Jésus et Lazare débouchent d’un sentier caché par une haie. Lazare le hèle.

« Oh ! paix à vous ! Viens, Maître. Je t’ai attendu ici pour te voir tout de suite, mais allons dans l’oliveraie. Je ne veux pas qu’on nous remarque… »

Il les conduit derrière les maisons, dans un bosquet d’oliviers dont les frondaisons touffues et ébouriffées qui cachent les pentes, sont un refuge commode pour parler discrètement.

« Maître, je t’ai envoyé l’enfant, qui est éveillé et obéissant et qui m’aime beaucoup, parce que je devais te parler et que je ne devais pas être vu. J’ai longé le Cédron pour venir ici… Maître, tu dois partir sur-le-champ. Le Sanhédrin a décrété ton arrestation et demain, dans les synagogues, on lira le décret. Quiconque sait où tu te trouves, a le devoir de l’indiquer. Je n’ai pas besoin de te dire, Lazare, que ta maison sera la première perquisitionnée. Je suis sorti à sexte du Temple et je me suis hâté ; car pendant qu’ils parlaient, j’avais déjà fait mon plan. Je suis allé à la maison, j’ai pris l’enfant. Je suis sorti à cheval par la Porte d’Hérode comme pour quitter la ville, puis j’ai traversé le Cédron et je l’ai suivi. J’ai laissé l’animal à Gethsémani, j’ai envoyé en vitesse l’enfant qui connaissait déjà la route pour être venu avec moi à Béthanie. Maître, pars immédiatement en lieu sûr. Sais-tu où te rendre ? As-tu un endroit où t’abriter ?

– Mais ne suffit-il pas qu’il s’éloigne d’ici ? De la Judée, tout au plus ?

– Non, Lazare, ce n’est pas assez : ils sont furieux. Il faut qu’il aille là où eux n’iront pas le trouver…

– Mais ils fouinent partout ! Tu ne voudrais pas que le Maître quitte la Palestine !… s’exclame Lazare, tout agité.

– Mais que dois-je te dire ? ! Le Sanhédrin le veut…

– C’est à cause de moi, n’est-ce pas ? Dis-le !

– Hum ! Oui… ! A cause de toi… mais plutôt parce que tous se convertissent à lui, or eux… ne veulent pas de cela.

– Mais c’est un crime ! C’est un sacrilège… C’est… »

Jésus, pâle mais calme, lève la main pour imposer le silence :

« Tais-toi, Lazare. Chacun fait son travail. Tout est écrit. Je te remercie, Joseph, et je t’assure que je vais m’éloigner. Va, va, Joseph. Qu’ils ne remarquent pas ton absence… Que Dieu te bénisse. Par Lazare, je te ferai savoir où je suis. Va ! Je te bénis toi, Nicodème et tous ceux qui ont le cœur droit. »

Il l’embrasse, puis ils se séparent. Jésus et Lazare passent par l’oliveraie pour rentrer à Béthanie, tandis que Joseph se dirige vers la ville.

550.11

« Que vas-tu faire, Maître ? demande Lazare avec angoisse.

– Je ne sais pas. Les femmes disciples doivent arriver ces jours-ci avec ma Mère. J’aurais voulu les attendre…

– Je pourrais les accueillir en ton nom, et te les amener. Mais, toi, en attendant où vas-tu ? Je ne pense pas que ce soit dans la maison de Salomon… ni chez des disciples connus. Demain ! C’est immédiatement que tu dois partir !

– J’aurais bien un endroit où aller, mais je voudrais attendre ma Mère. Son angoisse commencerait trop tôt si elle ne me trouvait pas…

– Où iras-tu, Maître ?

– A Ephraïm.

– En Samarie ?

– En Samarie. Les Samaritains sont moins samaritains que beaucoup d’autres, et ils m’aiment. Ephraïm se trouve à la frontière…

– Ah ! c’est pour s’opposer aux juifs qu’ils te feront honneur et qu’ils te défendront ! Mais… attends ! Pour venir, ta Mère est obligée de passer par la route de la Samarie ou par celle du Jourdain. J’irai avec des serviteurs par l’une, et Maximin avec d’autres serviteurs par l’autre, et l’un de nous la rencontrera. Nous ne reviendrons qu’avec elles. Tu sais que personne de la maison de Lazare ne peut trahir. Tu vas te rendre pendant ce temps à Ephraïm, en partant tout de suite. Ah ! il était dit que je ne pourrais pas profiter de ta présence ! Mais j’arriverai par les monts d’Hadomim. Je suis en bonne santé, désormais. Je peux faire ce que je veux. Et même, oui ! Je ferai croire que je prends la route de la Samarie pour aller à Ptolémaïs afin de m’embarquer pour Antioche. Tout le monde sait que j’y possède des terres… Mes sœurs resteront à Béthanie… Toi… Oui, je vais faire préparer deux chars et vous vous en servirez pour aller à Jéricho. Puis, demain, à l’aube, vous continuerez à pied. Oh ! Maître ! Mon Maître ! Sauve-toi ! Sauve-toi ! »

Après l’excitation du premier moment, Lazare tombe dans la tristesse et pleure. Jésus soupire, mais ne dit mot. D’ailleurs, que pourrait-il dire ?

550.12

Parvenus à la maison de Simon, ils se séparent. Jésus entre. Les apôtres, déjà étonnés que le Maître soit parti sans rien dire, se serrent autour de Jésus, qui leur ordonne :

« Prenez les vêtements et faites les sacs. Il nous faut partir sur-le-champ. Dépêchez-vous, et rejoignez-moi chez Lazare.

– Même les vêtements mouillés ? Ne pouvons-nous les reprendre à notre retour ? demande Thomas.

– Nous ne reviendrons pas. Emportez tout. »

Les apôtres s’éloignent en se lançant des coups d’œil expressifs. Jésus va chercher ses affaires chez Lazare et salue les sœurs, consternées…

Les chars sont vite prêts, des chars lourds, couverts, tirés par des chevaux robustes. Jésus prend congé de Lazare, de Maximin, des serviteurs qui sont accourus.

Ils montent dans les véhicules, qui attendent à une sortie de derrière la maison. Les cochers fouettent les animaux et le voyage commence, par la même route que Jésus a empruntée pour ressusciter Lazare quelques jours plus tôt.

550.1

È bello stare così, in riposo, fra l’amore degli amici e presso il Maestro nelle giornate solari che già risentono di un primo precoce sorridere di primavera, guardando i campi che aprono le loro zolle ad un verzicare innocente di grani che spuntano, guardando i prati che rompono il verde uniforme dell’inverno con i primi fioretti multicolori, guardando le siepi che nei posti più solari hanno già dei sorrisi di gemme che si schiudono, guardando i mandorli che già spumano nelle cime per i primi fiori che sbocciano. E Gesù ne gode, e ne godono gli apostoli, e ne godono i tre amici di Betania. Sembra così lontano il malanimo, il dolore, la tristezza, la malattia, la morte, l’odio, l’invidia, tutto quanto è pena, tormento, preoccupazione sulla Terra.

Gli apostoli, tutti, sono gongolanti e lo dicono. Dicono la loro persuasione — oh!, così certa, così trionfante! — che ormai Gesù ha vinto tutti i nemici, che la sua missione procederà ormai senza ostacoli, che Egli sarà riconosciuto per Messia anche dai più tenaci a negarlo. E parlano, un poco esaltati, ringiovaniti tanto sono felici, facendo progetti per l’avvenire, sognando… sognando tanto… e umanamente.

550.2

Il più esaltato, per la sua psiche che lo porta sempre agli estremi, è Giuda di Keriot. Si felicita di aver saputo attendere e di aver saputo fare, si felicita della sua lunga fede nel trionfo del Maestro, si felicita di avere sfidato le minacce del Sinedrio… È tanto esaltato che finisce col dire anche quello che ha sempre tenuto celato sin qui, fra lo stupore attonito dei compagni.

«Sì. Mi volevano comperare, sedurre mi volevano con blandizie e, vedendo che non servivano queste, con minacce. Se sapeste! Ma io! Io li ho pagati con uguale moneta. Ho finto amore a loro come essi a me. Li ho lusingati come essi mi lusingavano e li ho traditi come essi mi volevano tradire… Perché questo volevano. Farmi credere che con spirito buono provavano il Maestro per poterlo proclamare solennemente il Santo di Dio. Ma io li conosco! Io li conosco. E in tutte le cose che essi mi dicevano di voler fare mi destreggiavo in modo che la santità di Gesù veramente apparisse più lucente del sole meridiano in un cielo senza nubi… Un giuoco pericoloso il mio! Se lo avessero capito! Ma ero pronto a tutto, anche alla morte, per servire Dio nel mio Maestro. E così sapevo tutto… Eh! delle volte vi sarò sembrato pazzo, cattivo, scontroso. Se aveste saputo! Io solo so le mie notti, le cure che dovevo avere per fare del bene senza dare nell’occhio a nessuno! Tutti sospettaste un poco di me. Lo so. Ma non ve ne ho rancore. Il mio modo di fare… sì… poteva dar luogo a sospetti. Ma il fine era buono, e io non mi preoccupavo che di quello. Gesù non sa nulla. Ossia credo che Egli pure sospetti di me. Ma saprò tacere senza esigere una sua lode. E tacete anche voi. Un giorno, ai primi tempi che ero con Lui — e tu, Simone Zelote, e tu, Giovanni di Zebedeo, eravate con me — Egli mi rimproverò perché mi ero vantato di avere il senso pratico. Da allora io… non gliel’ho mai fatta risaltare questa qualità, ma l’ho continuata ad usare, per suo bene. Ho fatto come una madre per il suo bambino inesperto. Ella gli leva gli ostacoli dal cammino, gli curva il ramo senza spine e alza quello che può ferire, o con atti avveduti lo porta a fare ciò che deve saper fare e a schivare ciò che è male senza che neppure il figlio se ne avveda. Anzi, il figlio crede di esserci arrivato da sé a camminare senza inciampare, a cogliere il bel fiore per la mamma, a fare questo e quello spontaneamente. Io ho fatto uguale col Maestro. Perché la santità non basta in un mondo di uomini e di satana. Bisogna anche combattere con armi pari, almeno da uomini… e qualche volta… anche un pizzico di furbizia d’inferno non è male mettercela fra le altre armi. È la mia idea. Ma Lui non la vuole sentire… È troppo buono… Bene. Io capisco tutto e tutti, e scuso tutti dei mali pensieri che potete aver avuto su di me. Ora sapete. Ora ci amiamo da buoni compagni, tutto per suo amore e a sua gloria», e accenna a Gesù che passeggia molto più lontano in un viale pieno di sole parlando con Lazzaro, che lo ascolta con un sorriso d’estasi sul viso.

550.3

Gli apostoli si allontanano verso la casa di Simone. Gesù si avvicina invece con l’amico. Li ascolto.

Dice Lazzaro: «Sì. Lo avevo capito che c’era un grande scopo, e certo di bontà, nel lasciarmi morire. Pensavo che fosse per risparmiarmi la vista della persecuzione che ti fanno. E, Tu sai se dico il vero, ero contento di morire per non vederla. Mi inasprisce. Mi turba. Vedi, Maestro. Io ho perdonato tante cose a quelli che sono i capi del nostro popolo. Ho dovuto perdonare sino agli ultimi giorni… Elchia… Ma la morte e la risurrezione hanno annullato ciò che era prima di esse. A che ricordare le loro ultime azioni per darmi dolore? Io ho perdonato tutto a Maria. Ella sembra dubitarne. Anzi, non so perché, da quando sono risorto ha preso con me un atteggiamento così… non so come definirlo. È di una dolcezza e di una sommissione così strana nella mia Maria… Neppure nei primi momenti in cui tornò qui, redenta da Te, era così… Anzi, forse Tu sai e me ne puoi dire qualcosa, perché Maria tutto ti dice… Sai se quelli che sono qui venuti l’hanno forse rimproverata troppo. Io ho sempre cercato di sminuire il ricordo del suo fallo, quando la vedevo assorta nel pensiero del passato, per medicare il suo soffrire. Non se ne sa dare pace. Sembra così… al di sopra di ciò che potrebbe essere avvilimento. A certuni potrà parere anche poco pentita… Ma io comprendo… Io so. Tutto fa per espiare. Io credo che faccia grandi penitenze, di ogni specie. Non mi stupirei che sotto le vesti avesse il cilicio e che le sue carni conoscessero il morso dei flagelli… Ma l’amore fraterno che ho io, e che la vuole sorreggere facendo velo fra il passato e il presente, non ce l’hanno gli altri… Sai se, forse, ella fu maltrattata da chi non sa perdonare… ed è così bisognevole di perdono?».

«Non so, Lazzaro. Maria non me ne ha parlato. Mi ha detto solo di aver molto sofferto sentendo l’insinuazione dei farisei che Io non ero il Messia perché non ti guarivo o non ti risuscitavo».

«E… non ti ha detto nulla di me? Sai… Avevo tanto male… Ricordo che mia madre nelle ultime ore svelò cose che erano passate inosservate a Marta e a me. Fu come se il fondo della sua anima e del suo passato rigalleggiassero negli ultimi sommovimenti del cuore. Io non vorrei… Ha tanto sofferto il mio cuore per Maria… e ha fatto tanto sforzo per non darle mai la sensazione di ciò che per lei ho sofferto… Non vorrei averla colpita ora che è buona mentre, per amore di fratello prima, per tuo amore poi, non l’ho mai colpita nel tempo infame, quando era un obbrobrio. Che ti ha detto di me, Maestro?».

«Il suo dolore di avere avuto troppo poco tempo per darti il suo santo amore di sorella e condiscepola. Nella tua perdita ha misurato tutta l’estensione dei tesori di affetto che ella aveva calpestato un tempo… ed ora è felice di poterti dare tutto l’amore che ella vuole darti, per dirti che tu per lei sei il santo, amato fratello».

«Ah! ecco! Lo avevo intuito! Di questo ne godo. Ma temevo di averla offesa… Da ieri penso, penso… mi sforzo a ricordare… ma non ci riesco…».

«Ma perché vuoi ricordare? Hai davanti il futuro. Il passato è rimasto nella tomba. Anzi, neppure è rimasto là. È stato bruciato insieme alle funebri bende. Ma se ti deve dar pace, ti dico le ultime parole che tu avesti per le sorelle. Per Maria in specie. Hai detto che per Maria Io sono venuto qui e ci vengo, perché Maria sa amare più di tutti. È vero. Le hai detto che ella ti ha amato più di tutti quelli che ti hanno amato. Anche questo è vero, perché ella ti ha amato rinnovandosi per amore di Dio e tuo. Le hai detto, giustamente, che tutta una vita di delizie non ti avrebbe dato la gioia che hai goduto per merito di lei. E le hai benedette, come un patriarca benediceva le sue più amate creature. Hai benedetto ugualmente Marta, che dicevi tua pace, e Maria, che dicevi tua gioia. Sei in pace, ora?».

«Ora sì, Maestro. Sono in pace».

«E allora, poiché la pace dà misericordia, perdona anche ai capi del popolo che mi perseguitano. Poiché questo volevi dire: che tu tutto puoi perdonare, ma non il male che fanno a Me».

«Così, Maestro».

«No, Lazzaro. Io li perdono. Tu li devi perdonare se vuoi essere simile a Me».

«Oh! Simile a Te! Non posso. Sono un semplice uomo!».

550.4

«L’uomo è rimasto là sotto. L’uomo! Il tuo spirito…

550.4Tu sai che cosa avviene alla morte dell’uomo…».

«No, Signore. Non ricordo nulla[1] di ciò che m’avvenne», interrompe veemente Lazzaro.

Gesù sorride e risponde: «Non parlavo del tuo personale sapere, della tua particolare esperienza. Parlavo di ciò che ogni credente sa che gli avviene quando muore».

«Ah! Il giudizio particolare. So. Credo. L’anima si presenta a Dio, e Dio la giudica».

«È così. E il giudizio di Dio è giusto e inviolabile. Ed ha un infinito valore. Se l’anima giudicata è colpevole mortalmente, diviene anima dannata. Se essa è lievemente colpevole, è mandata al Purgatorio. Se essa è giusta, va nella pace del Limbo in attesa che Io apra le porte dei Cieli. Dunque, Io ti ho richiamato lo spirito dopo che esso era già giudicato da Dio. Se tu fossi stato un dannato, non ti avrei potuto richiamare alla vita, perché facendolo avrei annullato il giudizio del Padre mio. Per i dannati non ci sono mutazioni più. Sono giudicati in eterno. Dunque tu eri del numero di quelli che dannati non erano. Perciò, o della classe dei beati, o di quella che saranno beati dopo la purificazione. Ma rifletti, amico mio. Se la sincera volontà di pentimento che può avere l’uomo essendo ancora uomo, ossia carne e anima, ha valore di purificazione; se un simbolico rito di battesimo nelle acque, voluto per spirito di contrizione, dalle sozzure contratte nel mondo e per la carne, ha per noi ebrei valore di purificazione; che valore avrà il pentimento, più reale e perfetto, molto più perfetto, di un’anima liberata dalla carne, conscia di ciò che è Dio, illuminata sulla gravità dei suoi errori, illuminata sulla vastità della gioia che si è allontanata per ore, per anni, o per secoli: la gioia della pace limbale, che presto sarà la gioia del raggiunto possesso di Dio; che sarà la purificazione duplice, triplice, del pentimento perfetto, dell’amore perfetto, del bagno nell’ardore delle fiamme accese dall’amore di Dio e dall’amore degli spiriti, nel quale e dal quale gli spiriti si spogliano da ogni impurità ed emergono belli come serafini, coronati da ciò che non corona neppure i serafini: il loro martirio terreno e ultraterreno contro i vizi e per l’amore? Che sarà? Dillo, dunque, amico mio».

«Ma… non so… una perfezione. Meglio… una ricreazione».

«Ecco. Hai detto la giusta parola. L’anima ne viene come ricreata. L’anima diviene simile a quella di un infante. È nuova. Tutto il passato non è più. Il suo passato d’uomo. Quando cadrà la colpa d’origine, l’anima, senza più macchia e ombra di macchie, sarà supercreata e sarà degna del Paradiso. Io ho richiamato la tua anima che già si era ricreata per la volontà al Bene, per l’espiazione della sofferenza e della morte, e per il tuo perfetto pentimento e perfetto amore raggiunti oltre la morte. Tu hai dunque l’anima tutt’affatto innocente di un pargolo nato da poche ore. E se sei un fanciullino neonato, perché vuoi indossare su questa fanciullezza spirituale le grevi, pesanti vesti dell’uomo adulto? I fanciulli hanno ali e non catene al loro spirito ilare. Essi mi imitano con facilità, perché non hanno ancora preso nessuna personalità. Si fanno come Io sono, perché sulla loro anima vergine di impronte si può imprimere senza confusione di linee la mia figura e la mia dottrina. Hanno l’anima priva di umani ricordi, di risentimenti, di preconcetti. Non c’è nulla. E ci posso essere Io, perfetto, assoluto come sono in Cielo. Tu, che sei come rinato, un nato novellamente, perché nella tua vecchia carne il potere motore è nuovo, senza passato, mondo, senza tracce di ciò che fu, tu che sei tornato per servirmi, solo per questo, devi essere come Io sono, più di tutti. Guardami. Guardami bene. Specchiati in Me, e in te riflettimi. Due specchi che si guardano per riflettere uno nell’altro la figura di ciò che amano. Tu sei uomo e sei bambino. Sei uomo per età, sei bambino per mondezza di cuore. Hai sui bambini il vantaggio di conoscere già il Bene e il Male, e di aver già saputo scegliere il Bene anche prima del battesimo nelle fiamme dell’a­mo­re. Ebbene, Io ti dico, a te, uomo dallo spirito mondo dalla purificazione avuta: “Sii perfetto come lo è il Padre nostro dei Cieli e come Io lo sono. Sii perfetto, ossia sii simile a Me, che ti ho amato tanto da andare contro a tutte le leggi della vita e della morte, del Cielo e della Terra, per riavere sulla Terra un servo di Dio e un vero amico mio, e in Cielo un beato, un grande beato”. Lo dico a tutti: “Siate perfetti”. Ed essi, i più, non hanno il cuore che tu avevi, degno del miracolo, degno di essere preso per strumento ad una glorificazione di Dio nel suo Figliuolo. Ed essi non hanno il tuo debito d’amore verso Dio… Lo posso dire, lo posso esigere da te. E per prima cosa lo esigo nel non avere rancore per chi ti ha offeso e mi offende. Perdona, perdona, Lazzaro. Sei stato immerso nelle fiamme accese dall’amore. Devi essere “amore” per non conoscere mai più altro che l’amplesso di Dio».

«E così facendo compirò la missione per la quale Tu mi hai risuscitato?».

«Così facendo la compirai».

«Basta così, Signore. Non ho bisogno di chiedere e di sapere di più. Servirti era il mio sogno. Se ti ho servito anche nel nulla che può fare il malato e il morto, e se potrò servirti nel molto che può fare il risanato, il mio sogno è compiuto e non chiedo di più. Che Tu sia benedetto, Gesù, Signore e Maestro mio! E con Te benedetto Colui che ti ha mandato».

«Benedetto sempre il Signore Iddio onnipotente».

550.5

Vanno verso la casa, fermandosi ogni tanto ad osservare il risveglio degli alberi, e Gesù alza un braccio e coglie, alto come è, un ciuffettino di fiori da un mandorlo che si scalda al sole contro il muro meridionale della casa.

Esce Maria, che li vede e si avvicina a sentire ciò che Gesù dice: «Vedi, Lazzaro? Anche a questi il Signore ha detto: “Venite fuori”. Ed essi hanno ubbidito per servire il Signore».

«Che mistero la germinazione! Pare impossibile che dal tronco duro o dal duro seme possano uscire petali così fragili e steli così teneri e mutarsi in frutta o piante. È sbagliato, Maestro, dire che la linfa o il germe è come l’anima della pianta o del seme?».

«Non è sbagliato, poiché è la parte vitale. In essi non eterna, creata per ogni specie nel primo giorno che piante e biade furono. Nell’uomo eterna, somigliante al suo Creatore, creata di volta in volta per ogni novello uomo che è concepito. Ma è per essa che la materia vive. È per questo che Io dico che solo per l’anima l’uomo vive. Non soltanto qui vive. Ma oltre. Vive per la sua anima. Noi ebrei non facciamo disegni sui sepolcri come li fanno i gentili. Ma, se li facessimo, dovremmo sempre disegnare non la face spenta, la clessidra vuota o altro simbolo di fine, sibbene il seme gettato nel solco che fiorisce in spiga. Perché è la morte della carne che libera l’anima dalla scorza e la fa fruttificare nelle aiuole di Dio. Il seme. La scintilla vitale che Dio ha messo nella nostra polvere e che diviene spiga se noi sappiamo con la volontà, e anche col dolore, far fertile la zolla che la serra. Il seme. Il simbolo della vita che si perpetua… Ma Massimino ti chiama…».

«Vado, Maestro. Saranno venuti degli intendenti. Tutto era fermo in questi ultimi mesi. Ora essi si affrettano a rendermi i conti…».

«Che tu approvi in anticipo, perché sei un buon padrone».

«E perché essi sono dei buoni servi».

«Il buon padrone fa i buoni servi».

«Allora certo io diventerò un buon servo, perché ho Te per perfetto Padrone», e se ne va sorridendo, agile, così diverso dal povero Lazzaro che era da anni.

550.6

Maria resta con Gesù.

«E tu, Maria, diventerai una buona serva del tuo Signore?».

«Tu lo puoi sapere, Rabboni. Io… io so soltanto di essere stata una grande peccatrice».

Gesù sorride: «Hai visto Lazzaro? Egli pure era un grande malato, eppure non ti sembra che ora sia ben sano?».

«Così è, Rabboni. Tu lo hai guarito. Ciò che Tu fai è sempre totale. Lazzaro non è mai stato così forte e allegro come da quando è uscito dal sepolcro».

«Tu lo hai detto, Maria. Ciò che Io faccio è sempre totale. Perciò anche la tua redenzione è totale perché Io l’ho compiu­ta».

«È vero, mio amato Salvatore, Redentore, Re, Dio. È vero. E se Tu lo vorrai, sarò io pure una buona serva del mio Signore. Io per la mia parte lo voglio, Signore. Non so se Tu lo vuoi».

«Lo voglio, Maria. Una mia buona serva. Oggi più di ieri. Domani più di oggi. Sino a che Io ti dirò: “Basta, Maria. È l’ora del tuo riposo”».

«È detto, Signore. Io vorrei che Tu mi chiamassi, allora. Come hai chiamato mio fratello fuor dal sepolcro. Oh! chiamami Tu fuori dalla vita!».

«No, fuori dalla vita no. Ti chiamerò alla Vita, alla vera Vita. Ti chiamerò fuori dal sepolcro che è la carne e la terra. Ti chiamerò alle nozze della tua anima col tuo Signore».

«Le mie nozze! Tu ami i vergini, Signore…».

«Io amo quelli che mi amano, Maria».

«Tu sei divinamente buono, Rabboni! Per questo non sapevo darmi pace di sentirti dire cattivo perché non venivi. Era come se tutto crollasse. Che fatica dire a me stessa: “No. No! Non devi accettare questa evidenza. Questa che ti pare evidenza è un sogno. La realtà è la potenza, la bontà, la divinità del tuo Signore”. Ah! quanto ho sofferto! Tanto il dolore per la morte di Lazzaro e per le sue parole… Te ne ha detto nulla? Non ricorda? Dimmi il vero…».

«Non mento mai, Maria. Egli teme di aver parlato e di aver detto ciò che era stato il dolore della sua vita. Ma Io l’ho rassicurato, senza mentire, ed egli ora è tranquillo».

«Grazie, Signore. Quelle parole… mi hanno fatto bene. Sì. Come fa bene la cura di un medico che mette a nudo le radici di un male e le brucia. Esse hanno finito di distruggere la vecchia Maria. Avevo ancora un troppo alto concetto di me. Ora… misuro il fondo della mia abbiezione e so che devo fare molta strada per risalirlo. Ma la farò, se Tu mi aiuti».

550.7

«Ti aiuterò, Maria. 7Anche quando me ne sarò andato, ti aiuterò».

«Come, mio Signore?».

«Aumentando il tuo amore a misura incalcolabile. Per te non c’è altra via che questa».

«Troppo dolce per quello che ho da espiare! Tutti si salvano con l’amore. Tutti acquistano il Cielo. Ma ciò che è sufficiente per i puri, i giusti, non è sufficiente per la grande colpevole».

«Non c’è altra via per te, Maria. Perché, quale che sia la via che prenderai, essa sarà sempre amore. Amore se benefichi in mio Nome. Amore se evangelizzi. Amore se ti isoli. Amore se ti martirizzi. Amore se ti farai martirizzare. Tu non sai che amare, Maria. È la tua natura. Le fiamme non possono che ardere. Sia che striscino al suolo bruciando dello strame, sia che salgano come un abbraccio di splendori intorno ad un tronco, ad una casa, o ad un altare per lanciarsi al cielo. A ognuno la sua natura. La sapienza dei maestri di spirito sta nel saper sfruttare le tendenze dell’uomo indirizzandole alla via per la quale possono svilupparsi in bene. Anche nelle piante e negli animali è questa legge, e sarebbe stolto voler pretendere che una pianta da frutto desse soltanto fiori, o desse frutti diversi da ciò che la sua natura comporta, o un animale compisse funzioni che sono proprie di un’altra specie. Potresti tu pretendere che quell’ape destinata a fare del miele divenisse uccellino che canta fra le fronde delle siepi? O che questo rametto di mandorlo che ho fra le mani, insieme a tutto il mandorlo dal quale l’ho colto, in luogo di mandorle colasse dalla scorza resine odorifere? L’ape lavora, l’uccello canta, il mandorlo dà frutto, la pianta da resine dà aromi. E tutti servono per il loro ufficio. Così le anime. Tu hai l’ufficio di amare».

«Allora ardimi, Signore. Te lo chiedo in grazia».

«Non ti basta la forza d’amore che possiedi?».

«È troppo poca, Signore. Poteva servire per amare degli uomini. Non per Te che sei il Signore infinito».

«Ma, appunto perché sono tale, sarebbe allora necessario un amore senza limiti…».

«Sì, mio Signore. Questo voglio. Che Tu metta in me un amore senza limiti».

«Maria, l’Altissimo, che sa cosa è l’amore, ha detto all’uomo: “Mi amerai con tutte le tue forze”. Non esige di più. Perché sa che è già martirio amare con tutte le forze…».

«Non importa, mio Signore. Dammi un amore infinito per amarti come vai amato, per amarti come non ho amato nessuno».

«Mi chiedi una sofferenza simile ad un rogo che brucia e consuma, Maria. Brucia e consuma lentamente… Pensaci».

«È tanto che lo penso, mio Signore. Ma non osavo chiedertelo. Ora so quanto mi ami. Proprio ora lo so in che misura mi ami, e oso chiedertelo. Dammi questo amore infinito, Signore».

Gesù la guarda. Ella gli è davanti, ancora smagrita dalle veglie e dal dolore, dimessa e semplice nella veste e nell’acconciatura dei capelli, come una fanciulla senza malizie, col viso pallido che si accende dal desiderio, gli occhi supplici eppure già brillanti di amore, già più serafino che donna. È veramente la contemplatrice che chiede il martirio della contemplazione assoluta.

Gesù dice una sola parola, dopo averla ben guardata quasi per misurarne la volontà: «Sì».

«Ah! mio Signore! Che grazia morire d’amore per Te!», cade in ginocchio baciando i piedi di Gesù.

«Alzati, Maria. Tieni questi fiori. Saranno quelli delle tue nozze spirituali. Sii dolce come il frutto del mandorlo, pura come il suo fiore e luminosa come l’olio, che da questi frutti si estrae, quando viene acceso, e profumata come quest’olio quando, saturo di essenze, lo si sparge nei conviti o sulle teste dei re, profumata dalle tue virtù. Allora veramente tu spargerai sul tuo Signore il balsamo che Egli gradirà infinitamente».

Maria prende i fiori, ma non si alza da terra, e anticipa i balsami dell’amore coi suoi baci e le sue lacrime sparse sui piedi del suo Maestro.

550.8

Li raggiunge Lazzaro: «Maestro, c’è un fanciullino che ti vuole. Era andato nella casa di Simone a cercarti e ha trovato là soltanto Giovanni, che lo ha condotto qui. Ma non vuole parlare altro che con Te».

«Va bene. Accompagnamelo. Io andrò sotto la pergola dei gelsomini».

Maria rientra in casa con Lazzaro. Gesù va sotto la pergola.

Torna Lazzaro avente per mano quel bambino che ho visto[2] in casa di Giuseppe di Sefori. Gesù lo riconosce subito e lo saluta: «Tu, Marziale? La pace sia con te. Come qui?».

«Mi mandano a dirti una cosa…», e guarda Lazzaro che capisce e fa per andar via.

«Resta, Lazzaro. Questo è Lazzaro, amico mio. Puoi parlare davanti a lui, fanciullo, perché Io non ho altro amico più fedele di lui».

Il fanciullo si rassicura. Dice: «Mi manda Giuseppe l’Anziano, perché ora io sto con lui, a dirti di andare subito, subito a Betfage presso la casa di Cleante. Ti deve parlare subito. Ma proprio subito. E ha detto di venire da solo. Perché ti deve parlare con gran segreto».

«Maestro! Che avviene?», chiede Lazzaro impressionato.

«Non so, Lazzaro. Non ci resta che andare. Vieni con Me».

«Subito, Signore. Possiamo andare col fanciullo».

«No, signore. Io vado via da solo. Giuseppe me lo ha raccomandato. Ha detto: “Se sai fare da solo e bene, ti amerò come un padre”, e io voglio essere amato come figlio da Giuseppe. Io vado via subito, e corro. Tu vieni dopo. Salve, Signore. Salve, uomo».

«La pace a te, Marziale».

Il bimbo frulla via come una rondine.

«Andiamo, Lazzaro. Portami il mantello. Io vado avanti perché, come vedi, il fanciullino non riesce ad aprire il cancello e certo non vuol chiamare nessuno».

Gesù va svelto al cancello, Lazzaro svelto in casa. Il primo apre le ferree chiusure al fanciullino, che va via veloce. Il secondo porta il mantello a Gesù e, al fianco di Gesù, cammina sulla via verso Betfage.

550.9

«Che mai vorrà Giuseppe? Per mandare con tanto segreto un fanciullo…».

«Un fanciullo sfugge a chi può sorvegliare», risponde Gesù.

«Tu credi che… Sospetti che… Ti senti in pericolo, Signo­re?».

«Ne sono certo, amico».

«Come? Anche ora? Ma prova più grande non potevi averla data!…».

«L’odio cresce sotto il pungolo delle realtà».

«Oh! Per mia causa, allora! Io ti ho nuociuto!… La mia pena è senza pari!», dice Lazzaro veramente addolorato.

«Non per causa tua. Non darti pene senza motivo. Tu sei stato il mezzo, ma la causa è stata la necessità, comprendi, la necessità di dare al mondo la prova della mia natura divina. Se non eri tu, un altro sarebbe stato, perché Io dovevo provare al mondo che, da Dio quale sono, posso tutto ciò che voglio. E rendere in vita uno morto da giorni e già corrotto non può essere opera che di Dio».

«Ah! Tu mi vuoi consolare. Ma per me la gioia, tutta la mia gioia è dileguata… Io soffro, Signore».

Gesù fa un gesto come dire: «Mah!», e tacciono poi entrambi.

Vanno lesti. La distanza è breve fra Betania e Betfage, e presto vi giungono.

550.10

Giuseppe passeggia avanti e indietro per la via all’inizio del paese. Ha le spalle voltate quando Gesù e Lazzaro sbucano da un viottolo nascosto da una siepe. Lazzaro lo chiama.

«Oh! La pace a voi. Vieni, Maestro. Ti ho atteso qui per vederti subito, ma andiamo nell’uliveto. Non voglio che ci vedano…».

Li conduce dietro le case in un folto d’ulivi, che con le loro fronde folte e scapigliate che velano le pendici è un comodo rifugio per parlare senza essere notati.

«Maestro. Ho mandato il fanciullo, che è sveglio e ubbidiente e mi ama molto, perché dovevo parlarti e non dovevo essere visto. Ho fatto il Cedron per venire qui… Maestro, Tu devi andartene, subito, di qui. Il Sinedrio ha decretato la tua cattura e domani nelle sinagoghe sarà letto il bando. Chiunque sa dove Tu sei, ha il dovere di denunciarlo. Non occorre che ti dica, o Lazzaro, che la tua casa sarà la prima ad essere sorvegliata. Io sono uscito a sesta dal Tempio e ho subito fatto; perché, mentre essi parlavano, avevo già fatto il mio piano. Sono andato a casa, ho preso il fanciullo. Sono uscito a cavallo dalla porta di Erode come per lasciare la città. Poi ho traversato il Cedron e l’ho seguito. Ho lasciato l’asino al Getsemani, ho mandato di corsa il fanciullo, che già sapeva la via per essere venuto con me a Betania. Va’ via subito, Maestro. In luogo sicuro. Sai dove andare? Hai dove andare?».

«Ma non basta che si allontani di qui? Dalla Giudea al massimo?».

«Non basta, Lazzaro. Essi sono furenti. Bisogna che vada dove essi non vanno…».

«Ma vanno da per tutto, loro! Non vorrai già che il Maestro lasci la Palestina!…», dice Lazzaro agitato.

«Mah! Che ti devo dire?! Il Sinedrio lo vuole…».

«Per causa mia, non è vero? Dillo!».

«Uhm! Sssì! Per causa tua… ossia per causa che tutti si convertono a Lui, e loro… non vogliono questo».

«Ma è un delitto! È un sacrilegio… È…».

Gesù, pallido ma calmo, alza la mano imponendo silenzio e dice: «Taci, Lazzaro. Ognuno fa il suo lavoro. Tutto è scritto. Io ti ringrazio, Giuseppe, e ti assicuro che me ne vado. Va’, va’, Giuseppe. Che non notino la tua assenza… Dio ti benedica. Da Lazzaro ti farò sapere dove sono. Va’. Benedico te, Nicodemo e tutti i giusti di cuore».

Lo bacia e si separano, tornando Gesù con Lazzaro, per l’uliveto, verso Betania, mentre Giuseppe va verso la città.

550.11

«Che farai, Maestro?», chiede angosciato Lazzaro.

«Non so. A giorni vengono le discepole con mia Madre. Avrei voluto attenderle…».

«Per questo… io le accoglierei in tuo nome e te le potrei condurre. Ma Tu intanto dove vai? In casa di Salomon non mi pare… E neppure in case di discepoli noti. Domani!… Devi andare via subito!».

«Io avrei il posto. Ma vorrei attendere mia Madre. La sua angoscia avrebbe inizio troppo presto se non mi trovasse…».

«Dove andresti, Maestro?».

«A Efraim».

«In Samaria?».

«In Samaria. I samaritani sono meno samaritani di molti altri e mi amano. Efraim è di confine…».

«Oh! e per fare dispetto ai giudei ti faranno onore e difesa. Ma… attendi! Tua Madre non può che venire per la via di Samaria o per quella del Giordano. Andrò io coi servi da una e Massimino con altri servi dall’altra, e l’uno o l’altro la troverà. Non torneremo che con loro. Tu sai che nessuno della casa di Lazzaro può tradire. Tu andrai intanto a Efraim. Subito. Ah! era destino che non potessi godere di Te! Ma verrò. Per i monti di Adomin. Sono sano ora. Posso fare ciò che voglio. Anzi! Sì. Farò credere che per la via di Samaria vado a Tolemaide per prendere naviglio per Antiochia. Tutti sanno che là ho terre… Le sorelle resteranno a Betania… Tu… Sì. Ora farò preparare due carri e andrete a Gerico con essi. Poi, all’alba di domani, riprenderete a piedi il cammino. Oh! Maestro! Mio Maestro! Salvati! Salvati!». Dopo l’eccitazione del primo momento, Laz­zaro cade in tristezza e piange.

Gesù sospira, ma non dice nulla. Che deve dire?…

550.12

Eccoli alla casa di Simone. Si separano. Gesù entra nella casa. Gli apostoli, già stupiti che il Maestro sia andato senza dir nulla, si stringono a Lui che dice: «Prendete le vesti. Fate le sacche. Dobbiamo subito partire di qui. Fate presto. E raggiungetemi in casa di Lazzaro».

«Anche le vesti bagnate? Non possiamo riprenderle tornando?», chiede Tommaso.

«Non torneremo. Prendete tutto».

Gli apostoli se ne vanno parlandosi con gli sguardi.

Gesù va a prendere le sue cose nella casa di Lazzaro e saluta le sorelle costernate…

I carri sono presto pronti. Carri pesanti, coperti, tirati da robusti cavalli. Gesù si accomiata da Lazzaro, da Massimino, dai servi che sono accorsi. Montano sui carri che attendono ad una uscita posteriore. I conducenti frustano le bestie, e il viaggio ha inizio per la stessa via per la quale Gesù è venuto a risuscitare Lazzaro solo pochi giorni avanti.


Notes

  1. je ne me souviens de rien, comme en 548.15, 562.5, 585.2, 587.5 et, en ce qui con­cerne le ressuscité de Naïm, en 300.4. Un cas semblable se trouve en 632.47.
  2. j’ai vu, en 508.4/5.

Note

  1. Non ricordo nulla, come in 548.15, 562.5, 585.2, 587.5 e, per il risuscitato di Naim, in 300.4. Un altro caso in 632.47.
  2. ho visto, in 508.4/5.