Gli Scritti di Maria Valtorta

583. La veille du sabbat qui précède l’entrée

583. Vigilia del sabato avanti l’entrata in Gerusalemme.

583.1

La belle salle — l’une de celles qui servent aux banquets, avec ses murs blancs, comme son plafond, ses lourds rideaux, les tapisseries qui recouvrent les sièges, et les plaques de mica ou d’albâtre qui remplacent les vitres aux fenêtres et laissent passer la lumière —, la salle blanche, est remplie du bavardage des femmes.

Une quinzaine de femmes qui papotent, ce n’est pas une mince affaire ! Mais dès que Jésus écarte le rideau et paraît sur le seuil, un silence absolu s’instaure. Toutes se lèvent et s’inclinent avec le plus grand respect.

« Paix à vous toutes » dit Jésus avec un doux sourire…

Son visage ne porte aucune trace de la tempête de douleur qui vient de se terminer : il est serein, lumineux, paisible comme si rien de pénible n’était arrivé ou sur le point d’arriver, avec une pleine conscience de sa part.

« Paix à toi, Maître. Nous sommes venues. Tu as envoyé dire : “ avec autant de femmes qu’il y en a chez Jeanne ”, et je t’ai obéi. Elise était chez moi. Je la garde auprès de moi, ces jours-ci. Il y avait aussi celle qui dit te suivre. Elle était venue chercher quelque information sur toi, car nul n’ignore que je suis ta fidèle disciple. Quant à Valéria, elle est chez moi, depuis que je suis dans mon palais. Et Plautina était venue lui rendre visite. Avec elles, se trouvait celle-ci. Valéria t’en parlera. Plus tard est arrivée Annalia, avertie de ton désir, ainsi que cette jeune fille, sa parente, je crois. Nous nous sommes arrangées pour venir, et nous n’avons pas oublié Nikê. Il est si beau de nous sentir sœurs dans une même foi en toi… d’espérer que celles qui en sont encore à un amour naturel pour le Maître, s’élèvent, comme l’a fait Valéria, dit Jeanne en regardant discrètement Plautina, qui… en est restée à l’amour naturel…

– Les diamants se forment lentement, Jeanne. Il faut des siècles de feu caché… Il ne faut jamais être pressé… Et ne jamais se décourager, Jeanne…

– Et quand un diamant redevient… cendre ?

– C’est signe que ce n’était pas encore un diamant parfait. Il faut recommencer, avec patience et ardeur, en mettant son espoir dans le Seigneur. Ce qui semble être un échec la première fois, se change souvent en triomphe la seconde.

– Ou la troisième, la quatrième, si ce n’est davantage.

583.2

Moi, j’ai été un échec de nombreuses fois, mais finalement, tu as triomphé, Rabbouni ! lance, du fond de la salle, la belle voix d’orgue de Marie de Magdala.

– Marie est contente chaque fois qu’elle peut s’humilier en rappelant le passé… soupire Marthe, qui le voudrait effacé du souvenir de tous les cœurs.

– Il est pourtant vrai, ma sœur, que tout s’est passé ainsi ! Je suis contente de faire mémoire du passé, mais non pas pour m’humilier, comme tu dis : pour m’élever encore, poussée par le souvenir du mal que j’ai commis, et par la reconnaissance envers Celui qui m’a sauvée. Et aussi afin que celui qui hésite pour lui-même, ou pour un être qui lui est cher, puisse reprendre courage et parvenir à cette foi dont mon Maître assure qu’elle est capable de déplacer les montagnes.

– Et tu la possèdes, heureuse que tu es ! Tu ne connais pas la peur… » soupire Jeanne.

Elle, qui est si douce et si timide, paraît l’être encore davantage si on la compare à Marie-Madeleine.

« En effet, je ne la connais pas. Elle n’a jamais été dans ma nature humaine. Maintenant, depuis que j’appartiens à mon Sauveur, je ne la connais même plus dans ma nature spirituelle. Tout a servi à augmenter ma foi. Serait-il possible qu’une femme, ressuscitée comme je le suis, et qui a vu ressusciter son frère, puisse douter de quoi que ce soit ? Non. Rien ne me fera plus douter.

– Tant que Dieu est avec toi, c’est-à-dire tant que le Rabbi est avec toi…

583.3

Mais il dit qu’il va bientôt nous quitter. Que sera alors notre foi ? Ou plutôt votre foi, car moi, je n’ai pas encore pénétré au-delà des frontières humaines… s’interroge Plautina.

– Sa présence ou son absence matérielle sera sans effet sur ma foi. Je n’aurai pas peur. Ce n’est pas de l’orgueil de ma part : tout simplement, je me connais. Si les menaces du Sanhédrin devaient se réaliser… je ne craindrais rien…

– Mais qu’est-ce que tu ne craindras pas ? Que le Juste soit juste ? Cette crainte, je ne l’aurai pas non plus. Nous qualifions ainsi de nombreux sages dont nous savourons la sagesse, et dont la pensée continue à nous nourrir et à vivre en nous, des siècles après leur disparition. Mais toi… insiste Plautina.

– Même s’il meurt, je ne craindrai pas. La Vie ne peut mourir. Lazare est ressuscité, lui qui n’était qu’un pauvre homme…

– Mais ce n’est pas par lui-même qu’il est ressuscité : le Maître a rappelé son âme d’outre-tombe. Or seul le Maître peut accomplir un tel acte. Mais qui rappellera l’esprit du Maître si le Maître est tué ?

– Qui ? Lui-même, c’est-à-dire Dieu. Dieu s’est fait lui-même, Dieu peut se ressusciter lui-même.

– Dieu… oui… dans votre foi, Dieu s’est fait lui-même. Il nous est déjà difficile de l’admettre, car nous savons que les dieux proviennent l’un de l’autre, par suite d’amours entre dieux.

– Par suite d’amours obscènes, condamnables, devrais-tu dire, l’interrompt impétueusement Marie de Magdala.

– Comme tu veux…» concède Plautina.

Et elle est sur le point d’achever quand Marie lui coupe la parole :

« “ Mais l’Homme ne peut se ressusciter lui-même ”, veux-tu dire. Mais de la même manière que le Saint des Saints s’est fait homme lui-même — car rien ne lui est impossible —, il se donnera à lui-même le commandement de ressusciter. Tu ne peux pas comprendre. Tu ne connais pas les figures de notre histoire d’Israël. Lui et ses prodiges s’y trouvent. Et tout s’accomplira comme c’est écrit.

583.4

Moi, je crois à l’avance, Seigneur. Je crois tout : que tu es le Fils de Dieu et le Fils de la Vierge, que tu es l’Agneau du salut, que tu es le Messie très saint, que tu es le Libérateur et le Roi universel, que ton Royaume ne connaîtra pas de fin ni de limites, et enfin que la mort ne prévaudra pas sur toi : car la vie et la mort, en effet, ont été créées par Dieu, et elles lui sont soumises comme toute chose. Je crois. Et si la douleur de te voir méconnu et méprisé sera grande, plus grande sera ma foi en ton Etre éternel. Je crois. Je crois à tout ce qui est dit de toi. Je crois à tout ce que tu dis. J’ai su croire aussi pour Lazare. J’ai été la seule qui ait su obéir et croire, la seule qui ait su réagir contre les hommes et les événements qui voulaient me convaincre de ne pas croire. Ce n’est qu’à l’extrême limite, près de la fin de l’épreuve, que j’ai eu une défaillance… Mais l’épreuve durait depuis si longtemps… et je ne pensais plus que même toi, Maître béni, tu pourrais t’approcher du golal après tant de jours de mort… Désormais… je ne douterai plus même si un tombeau devrait être ouvert pour rendre la proie qu’il contient depuis, non pas quelques jours, mais des mois. Oh ! mon Seigneur ! Je sais qui tu es ! La fange a reconnu l’Etoile ! »

Marie s’est accroupie aux pieds de Jésus, sur le dallage. Elle n’est plus véhémente, mais douce, et son visage tourné vers Jésus exprime l’adoration.

« Qui suis-je ?

– Celui qui est. C’est cela. Ta personne humaine n’est que le vêtement, le vêtement nécessaire posé sur ta splendeur et sur ta sainteté pour venir parmi nous et nous sauver. Mais tu es Dieu, mon Dieu. »

Et elle se jette par terre pour baiser les pieds du Christ. Elle semble ne pas pouvoir détacher ses lèvres des doigts qui dépassent du long vêtement de lin.

« Relève-toi, Marie. Garde fermement ta foi. Et, pendant les heures de tempête, élève-la comme une étoile pour que les cœurs s’y fixent, et sachent espérer… au moins cela. »

583.5

Puis il s’adresse à toutes :

« Je vous ai appelées car, dans les jours à venir, il ne sera pas facile de nous voir en paix. Le monde nous entourera, et les secrets des cœurs ont une pudeur plus grande que celle des corps. Je ne suis pas le Maître, aujourd’hui. Je suis l’Ami. Vous n’avez pas toutes d’espoirs ou de craintes à me partager. Mais vous aviez toutes envie de me voir paisiblement encore une fois. Et je vous ai appelées, vous qui êtes la fleur d’Israël et du nouveau Royaume, et vous, qui représentez la fleur du paganisme qui quitte le lieu des ombres pour entrer dans la Vie. Gardez cela au fond du cœur pour les jours qui viennent : que l’honneur que vous rendez au Roi persécuté d’Israël, à l’Innocent accusé, au Maître qu’on n’écoute pas, adoucisse ma douleur.

Je vous demande de rester très unies, vous qui appartenez au peuple d’Israël, vous qui êtes venues en Israël, vous qui venez vers Israël. Que les unes secourent les autres. Que celles dont la vie spirituelle est plus forte secourent les plus faibles. Que les plus sages secourent celles qui savent peu de choses ou même rien, et ont seulement le désir de sagesses nouvelles, de sorte que leur désir humain s’épanouisse en un désir surnaturel de la Vérité, grâce aux soins de leurs sœurs plus avancées.

Soyez pleines de pitié les unes pour les autres. Que celles que des siècles de la loi divine ont formées à la justice compatissent à celles que le paganisme rend… différentes. Les habitudes morales ne se changent pas du jour au lendemain, sauf dans des cas exceptionnels dans lesquels une puissance divine intervient pour opérer le changement, afin de seconder une volonté très bonne. Ne vous étonnez pas si vous assistez, chez celles qui viennent d’autres religions, à des arrêts dans leurs progrès et parfois même à des retours sur les vieux chemins. Pensez au comportement d’Israël envers moi, et n’attendez pas des païens la souplesse et la vertu qu’Israël n’a pas su, n’a pas voulu avoir envers le Maître.

Considérez-vous comme des sœurs les unes pour les autres, des sœurs que le destin a réunies autour de moi, dans ce dernier temps de ma vie mortelle… Ne pleurez pas ! Je vous ai réunies en vous amenant de lieux différents, de sorte que la diversité de vos coutumes et de vos langues rend un peu difficile votre mutuelle compréhension humaine. Mais, en vérité, l’amour a un langage unique, et le voici : faire ce que l’être aimé enseigne, et cela pour lui rendre honneur et le réjouir. Sur ce point, vous pouvez toutes vous comprendre, et que celles qui comprennent davantage aident les autres à mieux comprendre.

583.6

Plus tard… dans un avenir plus ou moins lointain, en des circonstances diverses, vous vous séparerez de nouveau pour vous disperser en diverses régions de la terre, certaines en revenant dans vos pays natals, d’autres en partant vers un exil qui ne leur pèsera pas ; car celles qui le subiront seront déjà arrivées à la perfection de vérité, qui leur permettra de comprendre que ce n’est pas d’être conduites ici ou là qui constitue un exil de la vraie Patrie.

En effet, la vraie Patrie, c’est le Ciel. Car celui qui est dans la vérité est en Dieu, et il a Dieu en lui. Il est donc déjà dans le Royaume de Dieu ; or le Royaume de Dieu ne connaît pas de frontières : par conséquent, la personne qui quitte Jérusalem pour des contrées comme l’Ibérie, la Pannonie, la Gaule ou l’Illyrie ne sort pas du Royaume. Vous serez toujours dans le Royaume si vous restez en Jésus, ou si vous venez à Lui.

Je suis venu rassembler toutes les brebis : celles du troupeau de mon Père, celles des autres, et même celles qui n’ont pas de pasteur, qui sont sauvages, perdues, plongées dans des ténèbres si profondes qu’elles ne leur permettent pas de voir ne serait-ce qu’un iota, non de la loi divine, mais même de la loi morale. Il s’agit de peuplades ignorées qui attendent d’être connues, à l’heure fixée par Dieu, et qui ensuite viendront s’aggréger au troupeau du Christ. Quand ? Qu’il s’agisse d’années ou de siècles, cela revient au même pour l’Eternel ! Mais vous serez les précurseurs de celles qui iront, avec les futurs pasteurs, rassembler dans l’amour chrétien les brebis et les agneaux sauvages pour les conduire dans les pâturages divins. Que votre premier champ d’expérience soit ces lieux.

583.7

La petite hirondelle qui lève son aile pour voler ne se jette pas immédiatement dans la grande aventure. Elle essaie son premier vol de l’avant-toit jusqu’à la vigne qui ombrage la terrasse, puis elle revient à son nid ; de nouveau, elle s’élance vers une terrasse au-delà de la sienne, et elle revient. Et toujours plus loin… jusqu’à ce qu’elle sente que son aile devient forte et son orientation sûre. Alors, elle joue avec les vents et les espaces, et elle va et vient en gazouillant, à la poursuite des insectes, en effleurant l’eau, en remontant vers le soleil, jusqu’à ce que, le moment venu, elle ouvre avec assurance ses ailes pour voler longuement vers les pays plus chauds et riches d’une nourriture nouvelle. Elle ne craint pas de franchir les mers, petite comme elle est, point d’acier bruni perdu entre les immensités bleues de la mer et du ciel, un point qui va sans peur, alors, qu’il y a peu, elle craignait le petit vol du bord du toit au sarment feuillu. Elle a désormais un corps nerveux, parfait, qui fend l’air comme une flèche, et on se demande si c’est l’air qui transporte avec amour ce petit roi de l’air, ou si c’est lui qui, avec amour, sillonne ses domaines. En voyant son vol assuré utiliser les vents et la densité de l’atmosphère pour aller plus vite, qui pense encore à son premier battement d’ailes gauche et apeuré ?

Il en sera ainsi de vous. Qu’il en soit ainsi de vous, comme de toutes les âmes qui vous imiteront. On ne devient pas capable à l’improviste. Ne vous découragez pas devant vos premières défaites, ne tirez pas orgueil de vos premières victoires. Les premières défaites servent à mieux vous y prendre une autre fois, les premières victoires sont un encouragement à faire encore mieux à l’avenir et vous permettent de croire avec assurance que Dieu aide les bonnes volontés.

583.8

Soyez toujours soumises aux bergers et obéissez à leurs con­seils et à leurs ordres. Soyez toujours pour eux des sœurs qui leur soient une aide dans leur mission et un soutien dans la fatigue. Faites part de mes paroles à celles qui sont absentes aujourd’hui, ainsi qu’à celles qui viendront à l’avenir.

Maintenant et toujours, soyez comme des filles pour ma Mère. Elle vous guidera en tout. Elle peut guider les jeunes filles comme les veuves, les épouses comme les mères, car elle a connu les obligations de tous les états, par sagesse surnaturelle certes, mais aussi par son expérience personnelle. Aimez-vous et aimez-moi en Marie. Vous ne défaillirez jamais, car elle est l’Arbre de la Vie, la vivante Arche de Dieu, la forme de Dieu et la forme pour Dieu[1] en laquelle la Sagesse s’est fait un siège et en laquelle la Grâce s’est faite chair.

583.9

Et maintenant que j’ai parlé en général, maintenant que je vous ai vues, je désire écouter mes disciples et celles qui sont l’espérance des disciples futures. Allez. Moi, je reste ici. Que celles qui souhaitent s’entretenir avec moi viennent me trouver, car nous n’aurons plus jamais un moment de paix intime semblable à celui-ci. »

Les femmes se consultent. Elise sort avec Marie et Marie, femme de Cléophas. Marie de Magdala écoute Plautina qui veut la persuader de quelque chose, mais il semble que Marie le refuse, car elle a fait des signes de dénégation puis s’éloigne, laissant en plan son interlocutrice. En passant, elle prend avec elle sa sœur et Suzanne en disant :

« Nous aurons bien le temps de lui parler. Laissons celles qui doivent s’en aller profiter de sa présence.

– Viens, Sarah. Nous serons les dernières à venir » propose Annalia.

583.10

Toutes sortent peu à peu, sauf Marie Salomé qui reste à la porte, l’air indécis.

« Viens ici, Marie. Ferme la porte et approche. De quoi as-tu peur ? lui dit Jésus.

– C’est que, moi… je suis toujours avec toi. Tu as entendu Marie, sœur de Lazare ?

– Oui, mais viens plus près. Tu es la mère de mes premiers apôtres[2]. Que veux-tu me dire ? »

La femme s’approche avec la lenteur de quelqu’un qui doit demander une chose importante, mais ne sait pas s’il peut le faire.

Jésus l’encourage d’un sourire :

« Quoi ? Veux-tu peut-être me demander une troisième place pour Zébédée ? Mais c’est un sage. Il ne t’a certainement pas envoyée me faire une telle requête ! Parle donc…

– Ah ! Seigneur ! C’est justement de cette place que je voulais te parler. Tu parles d’une façon… comme si tu devais nous quitter… et je voudrais que, avant ton départ, tu m’aies vraiment pardonnée. Je n’ai pas de paix à la pensée de t’avoir déplu.

– Tu y penses encore ? Ne vois-tu pas que je t’aime comme avant, plus qu’avant ?

– Si, Seigneur. Mais prononce vraiment cette parole de pardon, pour que je puisse raconter à mon époux combien tu t’es montré bon à mon égard.

– Mais il n’est pas besoin, femme, que tu racontes une faute pardonnée !

– Je le ferai pourtant ! Car Zébédée, voyant à quel point tu aimes ses fils, pourrait tomber dans le même péché que moi et… si tu nous quittes, qui pourrait nous en absoudre ? Je voudrais que nous entrions tous dans ton Royaume. Mon mari aussi. Je ne crois pas que ce désir me mette hors de la justice. Je suis une pauvre femme, et je ne connais pas les livres. Mais quand ta Mère nous lit ou nous dit des passages de l’Ecriture, à nous les femmes, elle parle souvent des femmes élues d’Israël et des passages qui font mention de nous. Et dans les Proverbes, qui me plaisent tellement, il est dit[3] que le cœur de l’époux se fie à sa femme courageuse. Moi, je pense qu’il est juste que la femme fasse preuve de la même confiance envers son mari, même pour ce qui tient du commerce céleste. Si je lui procure une place sûre au Ciel, en l’empêchant de pécher, je pense que je fais une bonne action.

– Oui, Salomé. Tu as vraiment ouvert ta bouche à la sagesse et à des principes de bonté. Va en paix. Tu as plus que mon pardon. Tes fils, selon le livre qui te plaît tant, te proclameront bienheureuse, et ton mari te louera dans la Patrie des justes. Sois tranquille. Va en paix. Sois heureuse. »

Il la bénit et la congédie.

Salomé s’en va, toute joyeuse.

583.11

Entre la vieille Anne de la maison près du lac de Mérom, tenant par la main deux petits garçons et suivie par une fillette timide et pâlotte, qui avance en baissant la tête, déjà un peu maman à sa manière d’aider un enfant qui sait à peine marcher.

« Anne ! Toi aussi, tu veux donc me parler ? Et ton mari ?

– Il est malade, Seigneur, très malade. Je ne vais peut-être pas le retrouver vivant… »

Des larmes coulent à travers les rides du visage sénile.

« Et tu es ici ?

– Oui. C’est lui qui m’a dit : “ Moi, je ne peux pas. Toi, va pour la Pâque et veille à ce que nos fils… »

Elle redouble de larmes et sa voix s’étrangle.

« Pourquoi pleures-tu ainsi, femme ? Ton mari a bien dit : “ Veille à ce que nos fils ne soient pas contre le Christ pour leur éternelle paix. ” Jude est un juste. Plus que de sa vie et du réconfort que tes soins pourraient lui prodiguer, il se préoccupe du bien de ses enfants. Les voiles se lèvent dans les heures qui précèdent la mort des justes, et les yeux de l’âme voient la Vérité. Mais tes fils ne t’écoutent pas, femme. Et que puis-je faire, moi, s’ils me repoussent ?

– Ne les hais pas, Seigneur !

– Et pourquoi le devrais-je ? Je prierai pour eux. Et je vais imposer les mains à ces innocents qui t’accompagnent pour tenir loin d’eux la haine qui tue. Venez près de moi. Toi, qui es-tu ?

– Jude, comme le père de mon père » déclare le plus grand des garçons.

Et le plus petit, que sa sœur tient par la main, saute et s’écrie :

« Moi, c’est moi, Jude !

– Oui. Ils ont honoré leur père en donnant son nom à leurs fils, mais pas d’une autre manière… dit la vieille femme.

– Ses vertus ressusciteront en eux. Approche, toi aussi, fillette. Sois bonne et sage comme celle qui t’a conduite ici.

– Ah ! Marie l’est effectivement ! Pour ne pas être seule, je l’emmènerai avec moi en Galilée. »

Jésus bénit les enfants en laissant sa main sur la tête de la gentille fillette. Puis il demande :

« Et pour toi, tu ne demandes rien, Anne ?

– De retrouver mon Jude vivant et d’avoir la force de mentir, en disant que ses fils…

– Non, pas de mensonge, jamais. Même pas pour qu’un agonisant meure en paix. Tu rapporteras ceci à Jude : “ Le Maître a dit qu’il te bénit et qu’avec toi, il bénit ton sang. ” Ces enfants innocents sont aussi de son sang, et je les ai bénis.

– Mais s’il demande si nos fils…

– Tu répondras : “ Le Maître a prié pour eux. ” Jude reposera dans la certitude que ma prière est puissante, et la vérité sera dite sans décourager le mourant. Car je prierai également pour eux. Va en paix, toi aussi, Anne. Quand quittes-tu la ville ?

– Après-demain, pour ne pas être arrêtée en route par le sabbat.

– C’est bien. Je suis heureux que tu sois ici après le sabbat. Reste bien unie à Elise et à Nikê. Va, et sois forte et fidèle. »

La femme a déjà presque atteint la porte, quand Jésus la rappelle :

« Ecoute : tes petits-enfants passent beaucoup de temps avec toi, n’est-ce pas ?

– Toujours, pendant que je suis en ville.

– Pendant ces jours… laisse-les à la maison, si tu en sors pour me suivre.

– Pourquoi, Seigneur ? Tu crains la persécution ?

– Oui. Et il vaut mieux que l’innocence ne voie pas et n’entende pas…

– Mais… que penses-tu qu’il va arriver ?

– Va, Anne, va…

– Seigneur, si… s’ils devaient te faire ce que l’on annonce, certainement mes fils… et alors la maison sera pire que la rue…

– Ne pleure pas. Dieu pourvoira. Paix à toi. »

La vieille femme s’éloigne, en larmes.

583.12

Pendant un moment, personne n’entre, puis Jeanne et Valéria arrivent ensemble. Elles sont angoissées, Jeanne surtout. L’autre est pâle et soupire, mais elle montre plus de courage.

« Maître, Anne nous a effrayées. Tu lui as dit… mais ce n’est sûrement pas passible ! Kouza peut être indécis… calculateur, mais il n’a rien d’un menteur ! Il me certifie qu’Hérode n’a aucun désir de te nuire… Je ne sais rien de Ponce… »

Jeanne jette un coup d’œil à Valéria, qui se tait. Alors elle reprend :

« J’espérais en savoir un peu plus par Plautina, mais je n’ai pas compris grand-chose…

– Rien, devrais-tu dire, sauf qu’elle n’a pas avancé d’un pas. A moi non plus, elle n’a pas parlé. Mais, si j’ai bien compris, l’indifférence romaine, toujours forte tant qu’un fait ne peut avoir de répercussion sur la patrie ou sur la vie personnelle, a eu raison de celles qui paraissaient prêtes à changer autrefois. Ce qui nous sépare, comme un fossé s’interpose entre deux terrains auparavant unis, c’est moins le fait que je me sois approchée de la synagogue, que leur indifférence, leur paresse spirituelles, si éloignées de moi. Mais à leur manière, elles sont heureuses… Et la félicité humaine n’aide pas à tenir éveillée la pensée.

– Et à éveiller l’esprit, Valéria, dit Jésus.

– C’est exact, Maître. Pour moi… c’est autre chose… Tu as vu cette femme qui était avec nous ? Elle est de ma famille. Veuve et seule, elle m’a été envoyée par des parents pour me convaincre de retourner en Italie. Il y a là beaucoup de promesses de joies pour l’avenir ! Mais comme ce sont des joies que je n’apprécie plus, je les méprise. Je n’irai pas en Italie. Ici, je t’ai toi, ainsi que ma fillette que tu as sauvée[4], et que tu m’as appris à aimer pour son âme. Je ne quitterai pas ces lieux… Marcelle… Je l’ai amenée avec moi pour qu’elle te voie et comprenne que je ne reste pas ici à cause d’un amour déshonorant pour un juif — pour nous, c’est déshonorant —, mais parce que j’ai trouvé en toi un réconfort dans ma souffrance d’épouse répudiée. Marcelle n’est pas mauvaise : elle a souffert, donc elle comprend. Mais elle est encore incapable de comprendre ma nouvelle religion et, comme elle y voit des chimères, elle me rabroue un peu… Mais cela n’a guère d’importance. Si elle en éprouve le désir, elle viendra là où je suis désormais. Sinon, je resterai ici avec Tusnilde[5]. Je suis libre, je suis riche, je peux faire ce que je veux. Et en ne faisant pas de mal, je fais ce que je veux.

583.13

– Et quand le Maître ne sera plus là ? demande Jeanne.

– Il restera ses disciples. Plautina, Lydia, Claudia elle-même qui, après moi, est celle qui suit de plus près ta doctrine et t’honore davantage, n’ont pas encore compris que je ne suis plus la femme qu’elles connaissaient et croient connaître encore. Mais je suis sûre de me connaître moi-même désormais. J’irai jusqu’à dire que, si je perds beaucoup en perdant le Maître, je ne perdrai pas tout, car ma foi restera ; or je veux rester là où elle est née. Je ne veux pas emmener Fausta dans des contrées où rien ne parle de toi. C’est ici que tout parle de toi. D’ailleurs, tu ne nous laisseras sûrement pas sans guide, nous qui avons voulu te suivre. Pourquoi est-ce à moi, une femme issue d’une nation païenne, d’avoir ces pensées alors que plusieurs d’entre vous, et toi-même, vous êtes comme perdues en pensant au jour où le Maître ne sera plus parmi nous ?

– C’est qu’elles se sont accoutumées à des siècles d’immobilisme, Valéria. Elles se représentent le Très-Haut au loin, dans sa maison, au-dessus de l’autel invisible que seul le grand-prêtre voit à des occasions solennelles. Cela les a aidées à venir vers moi. Elles pouvaient enfin s’approcher du Seigneur. Aujourd’hui, elles tremblent de ne plus avoir ni le Très-Haut dans sa gloire, ni le Verbe du Père parmi elles. Mais il faut excuser… Et t’élever spirituellement, Jeanne. Je serai en vous. Rappelle-le-toi. Je m’en irai, mais je ne vous laisserai pas orphelins. Je vous laisserai ma maison : mon Eglise, et ma parole : la Bonne Nouvelle. Mon amour habitera dans vos cœurs. Enfin, je vous laisserai un don plus grand qui vous nourrira de moi, et fera en sorte que je sois parmi vous et en vous — et pas seulement spirituellement. Je le ferai pour vous donner force et réconfort.

583.14

Mais maintenant… Anne est très affligée, à cause des enfants…

– Elle nous en a parlé avec angoisse…

– Oui. Je lui ai conseillé de les garder loin des gens. Je vous dis la même chose à vous deux.

– J’enverrai Fausta avec Tusnilde à Béther, avant le temps fixé. Elles devaient s’y rendre après la fête.

– Moi, non. Je ne me sépare pas des enfants. Je les garderai à la maison, mais je dirai à Anne d’y laisser les siens. Les fils de cette femme sont de tristes sires, mais ils seront honorés de mon invitation et ne contrediront pas leur mère. Quant à moi…

– Moi, je voudrais…

– Quoi, Maître ?

– Que vous soyez toutes très unies en ces jours. Je garderai avec moi la sœur de ma Mère, Salomé, Suzanne et les sœurs de Lazare. Mais je voudrais vous voir unies, très unies.

– Mais ne pourrons-nous pas te rejoindre là où tu seras ?

– Ces jours-ci, je serai comme un éclair qui brille rapidement et disparaît. Je monterai au Temple le matin, puis je quitterai la ville. En dehors de ce passage au Temple, chaque matin, vous ne pourrez me rencontrer.

– L’an dernier, tu es venu chez moi…

– Cette année, je ne me rendrai chez personne. Je serai un éclair fulgurant…

– Mais la Pâque…

– Je désire la consommer avec mes apôtres, Jeanne. Si c’est la volonté de ton Maître, il a certainement une bonne raison.

– C’est vrai…

583.15

Je serai donc seule… car mes frères m’ont fait savoir qu’ils souhaitaient être libres pendant ces jours, et Kouza…

– Maître, je m’en vais. Il pleut à verse. Je vais trouver les enfants qui se sont rassemblés sous le portique, intervient Valéria, qui se retire prudemment.

– Dans ton cœur aussi, il pleut bien fort, Jeanne.

– C’est vrai, Maître. Kouza est tellement… étrange. Je ne le comprends plus. C’est une contradiction continuelle. Peut-être a-t-il des amis qui l’influencent… peut-être lui a-t-on fait quelque menace… ou encore, il craint pour l’avenir.

– Il n’est pas le seul. Je puis même dire que rares sont ceux qui, comme moi, ne craignent pas le lendemain. Ils sont éparpillés çà et là, et ils seront de moins en moins nombreux. Sois très douce et très patiente avec lui. Ce n’est qu’un homme…

– Mais il a tant reçu de Dieu, de toi, qu’il devrait…

– Qu’il devrait ! Oui. Mais qui n’a pas reçu de moi en Israël ? J’ai fait du bien à mes amis et à mes ennemis, j’ai pardonné, guéri, consolé, instruit… Tu vois, et tu verras toujours plus, comme Dieu seul est immuable, comme les réactions des hommes sont diverses, et comme souvent celui qui a reçu le plus est aussi le plus prompt à frapper son bienfaiteur. Vraiment, on pourra dire[6] que celui qui a mangé mon pain en ma compagnie, a levé contre moi son talon.

– Ce n’est pas moi qui ferai cela, Maître !

– Toi, non. Mais beaucoup, oui.

– Mon époux est-il l’un d’eux ? Si c’était le cas, je ne rentrerai pas chez moi ce soir !

– Non, pas ce soir. Mais même s’il faisait partie de leur groupe, ta place est là-bas. Car si lui pèche, toi, tu ne dois pas pécher. S’il chancelle, tu dois le soutenir. S’il te piétine, tu dois pardonner.

– Oh ! me piétiner, non ! Il m’aime, mais je le voudrais plus sûr de lui. Il a beaucoup d’influence sur Hérode. Je voudrais qu’il arrache au Tétrarque une promesse en ta faveur, comme Claudia essaie d’en obtenir une de Pilate. Mais Kouza a seulement pu me rapporter de vagues phrases d’Hérode… et m’assurer que celui-ci n’a que le désir de te voir accomplir quelque prodige, et qu’il ne te persécutera pas… Il espère de cette façon faire taire ses remords au sujet de Jean-Baptiste. Kouza dit : “ Mon roi ne cesse de répéter : ‘Même si le Ciel le commandait, je ne lèverais pas la main sur lui. J’ai trop peur !’ ”

– Il dit vrai. Il ne lèvera pas la main sur moi. Beaucoup en Israël ne le feront pas, par peur de me condamner matériellement, mais ils demanderont que d’autres s’en chargent à leur place. Comme s’il y avait une différence aux yeux de Dieu entre celui qui frappe sous la pression du peuple, et celui qui ordonne de frapper !

– Mais le peuple t’aime ! De grandes fêtes se préparent pour toi. Et Pilate ne veut pas de désordre. Il a renforcé les troupes, ces jours-ci. J’espère tant que… Je ne sais pas ce que j’espère, Seigneur… J’espère et désespère… Ma pensée est changeante comme ces jours où le soleil alterne avec la pluie…

– Prie, Jeanne, et reste en paix. Ne cesse pas de penser que tu n’as jamais causé la moindre peine à ton Maître, et qu’il s’en souvient. Va. »

Jeanne, qui est devenue pâle et s’est amaigrie pendant ces quelques jours, sort toute pensive.

583.16

C’est alors le doux visage d’Annalia qui apparaît.

« Avance. Ta compagne, où est-elle ?

– A côté, Seigneur. Elle veut s’en aller, elles vont partir. Marthe a compris mon désir, et elle me garde jusqu’au coucher du soleil de demain. Sarah retourne à la maison pour avertir que je reste. Elle voudrait ta bénédiction, car… Mais je te parlerai ensuite.

– Qu’elle vienne, je la bénirai. »

La jeune fille sort pour revenir avec sa compagne, qui se prosterne devant le Seigneur.

« Que la paix soit avec toi, et que la grâce du Seigneur te conduise sur les sentiers où t’a menée celle qui t’a précédée. Sois affectueuse envers sa mère, et bénis le Ciel qui t’a épargné les liens et les souffrances afin de t’avoir tout entière pour lui. Un jour, plus que maintenant, tu le béniras d’être restée vierge par ta volonté. Va ! »

La jeune fille repart, tout émue.

« Tu lui as dit ce qu’elle espérait entendre. Ces paroles étaient son rêve. Sarah me confiait souvent : “ Ta destinée me plaît, bien qu’elle soit nouvelle en Israël, et je la désire pour moi aussi. N’ayant plus de père, et ma mère étant douce comme une colombe, je ne crains pas de ne pouvoir la suivre. Mais pour être certaine de pouvoir l’accomplir, et afin qu’elle soit sainte pour moi comme elle l’est pour toi, je voudrais l’entendre de sa bouche. ” Son souhait vient d’être exaucé, et moi aussi, je suis en paix, car je craignais parfois d’avoir exalté un cœur…

– Depuis quand est-elle avec toi ?

– Depuis…

583.17

Quand l’ordre du Sanhédrin est arrivé, j’ai pensé : “ L’heure du Seigneur est venue, et je dois me préparer à mourir. ” Car je te l’ai demandé[7], Seigneur… Et maintenant je te le rappelle… Si tu vas au sacrifice, je veux t’y accompagner, et être hostie.

– Ce désir est-il toujours ferme ?

– Oui, Maître. Je ne pourrais pas vivre dans un monde où tu ne serais pas… et je ne pourrais survivre à ta torture. J’ai tellement peur pour toi ! Beaucoup d’entre nous se font des illusions… Pas moi ! Je sens que l’heure est venue. Il y a trop de haine… Et j’espère que tu accepteras mon offrande. Je n’ai que ma vie à te donner, car je suis pauvre, tu le sais. Ma vie et ma pureté. C’est pour cela que j’ai persuadé ma mère d’appeler sa sœur auprès d’elle, afin qu’elle ne reste pas seule… Sarah sera sa fille à ma place, et la mère de Sarah sera pour elle un réconfort.

Ne déçois pas mon cœur, Seigneur ! Le monde n’a aucun attrait pour moi. C’est pour moi une prison où beaucoup de choses me répugnent fortement. C’est peut-être parce que j’ai été au seuil de la mort, que j’ai compris comment ce qui, pour beaucoup, représente la joie, n’est qu’un vide qui ne rassasie pas. Je suis absolument certaine de ne désirer que le sacrifice… et de vouloir te précéder… pour ne pas voir la haine du monde lancée comme une arme de torture sur mon Seigneur, et pour te ressembler dans la souffrance…

– Dans ce cas, nous déposerons le lys coupé sur l’autel où s’immole l’Agneau, et il deviendra rouge du sang rédempteur. Les anges seront seuls à savoir que l’Amour a été le sacrificateur d’une agnelle toute blanche, et ils marqueront le nom de la première victime de l’Amour, de la première continuatrice du Christ.

– Quand, Seigneur ?

– Tiens ta lampe allumée[8] et reste en vêtements de noces.

L’Epoux est à la porte. Tu verras son triomphe et non sa mort, mais tu triompheras avec lui en entrant dans son Royaume.

– Ah ! je suis la femme la plus heureuse d’Israël ! Je suis la reine couronnée de ton diadème ! Puis-je, comme telle, te demander une grâce ?

– Laquelle ?

– J’ai aimé un homme, tu le sais. Je ne l’ai plus aimé comme époux, car un amour plus grand est entré en moi, et dès lors cet homme ne m’a plus aimée, parce que… Mais je ne veux pas rappeler son passé. Je te demande de racheter ce cœur. Le puis-je ? Ce n’est pas pécher que de vouloir me souvenir, au moment où j’arrive au seuil de la Vie, de celui que j’aimais, pour lui obtenir la vie éternelle, n’est-ce pas ?

– Ce n’est pas pécher. Bien au contraire, c’est porter l’amour jusqu’au terme saint du sacrifice, pour le bien de l’être aimé.

– Alors bénis-moi, Maître. Absous-moi de tout mon péché. Prépare-moi pour les noces et pour ta venue. Car c’est toi qui viens, mon Dieu, pour prendre ta pauvre servante et en faire ton épouse. »

La jeune femme, radieuse de joie et de santé, s’incline pour baiser les pieds du Maître, pendant qu’il la bénit en priant sur elle. La salle, blanche comme si elle était toute de lys, est vraiment le cadre qui convient pour ce rite, et il s’harmonise bien avec ses deux protagonistes, jeunes, beaux, tout de blanc vêtus, dans la splendeur d’un amour angélique et divin.

583.18

Jésus quitte la jeune fille remplie d’allégresse, et il sort doucement pour aller bénir les enfants, qui se précipitent avec des cris de joie vers le char, où ils montent avec les femmes qui s’en vont. Elise et Nikê restent, pour reconduire Annalia en ville le lendemain. Il a cessé de pleuvoir et, une fois les nuages dispersés, le ciel bleu apparaît, et les rayons du soleil rendent étincelantes de lumière les gouttes de pluie. Un magnifique arc-en-ciel unit Béthanie à Jérusalem. Le char part en grinçant, sort par le portail et disparaît.

Lazare, qui se tient à côté de Jésus, au bout du porche, demande en observant le Maître :

« Les disciples t’ont-elles réjoui le cœur ?

– Non, Lazare. A l’exception de l’une d’elles, elles m’ont toutes confié leurs douleurs, et m’ont déçu, si du moins je pouvais me faire des illusions.

– Ce sont les Romaines qui t’ont déçu ? T’ont-elles parlé de Pilate ?

– Non.

– Dans ce cas, il me faut le faire. J’espérais qu’elles t’en parleraient. C’est pour cela que j’avais attendu. Entrons dans cette pièce isolée. Les femmes vaquent à leurs travaux avec Marthe. Marie, de son côté, est avec ta Mère dans l’autre maison. Ta Mère est longuement restée avec Judas, et maintenant elle l’a emmené avec elle… Assieds-toi, Maître…

583.19

Je suis allé chez le Proconsul… Je l’avais promis, et je l’ai fait. Mais Simon-Pierre ne serait pas très satisfait de ma mission ! Heureusement, il n’y pense plus. Le Proconsul m’a écouté et m’a répondu : “ Moi ? Moi, m’en occuper ? Mais je n’ai pas l’ombre de la plus lointaine pensée de le faire ! Je dis seulement ceci : ce n’est pas à cause de cet homme — de toi, Maître —, mais en raison de tous les ennuis qu’il me procure, que je suis bien décidé à ne plus m’en occuper, ni en bien ni en mal. Je m’en lave les mains. Je renforcerai la garde, car je ne veux pas de désordres. De cette façon, je satisferai César, mon épouse et moi-même, c’est-à-dire les seuls dont je me préoccupe d’une manière sacrée. Pour le reste, je ne lèverai pas le petit doigt. Ce sont encore des querelles de ces éternels mécontents. Ce sont eux qui les provoquent, eux qui y prennent plaisir. Moi, j’ignore cet homme aussi bien comme malfaiteur que comme vertueux ou comme sage. Je l’ignore, et je veux continuer à l’ignorer. Pourtant, malgré mon désir, je n’y arrive que difficilement, car les chefs d’Israël m’en parlent en se plaignant, Claudia en faisant son éloge, et les partisans du Galiléen en récriminant contre le Sanhédrin. Si ce n’était pas pour Claudia, je le ferais arrêter et je le leur livrerais pour qu’ils en finissent avec cette affaire, et que je n’en entende plus parler. Cet homme est le sujet le plus paisible de tout l’Empire, mais malgré cela, il m’a procuré tant d’ennuis que je voudrais une solution… ” Voilà quelle est son humeur, Maître…

– Tu veux dire qu’il n’y a pas lieu de se rassurer. Avec les hommes, on n’est jamais sûr…

– J’ai néanmoins l’impression que le Sanhédrin est plus calme. On n’a pas rappelé l’ordre d’arrestation, les disciples n’ont pas été importunés. D’ici peu, ceux qui sont allés en ville vont revenir et ils nous informeront… Te contredire, les membres du Sanhédrin le feront toujours. Mais t’attaquer ?… Les foules t’aiment trop pour pouvoir les défier imprudemment.

583.20

– Et si nous marchions à la rencontre de ceux qui reviennent ? propose Jésus.

– Allons-y. »

Ils sortent dans le jardin et sont à mi-route quand Lazare demande :

« J’y pense, quand as-tu dîné ? Et où ?

– A prime.

– Mais le soleil va bientôt se coucher. Rentrons.

– Non, je n’en sens pas le besoin. Je préfère marcher. J’aperçois là-bas un pauvre enfant agrippé à la grille. Il a probablement faim. Il est pâle et déguenillé. Je l’observe depuis un moment. Il était déjà là quand le char est sorti, et il s’est enfui pour n’être pas vu et peut-être chassé. Puis il est revenu, et il regarde avec insistance vers la maison et vers nous.

– S’il a faim, il serait bon que j’aille chercher de quoi le nourrir. Va devant, Maître. Je te rejoins tout de suite. »

Et Lazare retourne sur ses pas en courant pendant que Jésus se hâte vers la grille.

583.21

L’enfant a un visage souffreteux et ingrat, où seuls brillent de beaux yeux vifs qui le regardent.

Jésus lui sourit doucement et lui dit, tout en poussant le verrou :

« Qui cherches-tu, mon enfant ?

– Tu es le Seigneur Jésus ?

– Je le suis.

– C’est toi que je cherche.

– Qui t’envoie ?

– Personne. Mais je veux te parler. Il y a plein de monde qui vient te parler. Moi aussi. Tu en exauces tant ! Alors, moi aussi. »

Jésus a fait jouer la fermeture et il prie l’enfant de lâcher les barres qu’il serre entre ses mains décharnées afin de pouvoir ouvrir. Le garçon s’écarte et, par ce geste, il remue son petit vêtement déteint sur son corps déformé. On voit alors que c’est un pauvre enfant rachitique, à la tête enfoncée dans les épaules à cause d’un commencement de gibbosité, et aux jambes écartées par une démarche mal assurée. Vraiment un petit malheureux. Il est peut-être plus âgé que ne le laisse penser sa taille, qui est celle d’un enfant de six ans environ, alors que son petit visage est déjà celui d’un homme, un peu fané, avec le menton proéminent, presque le visage d’un vieillard.

Jésus se penche pour le caresser :

« Dis-moi donc ce que tu veux. Je suis ton ami. Je suis l’ami de tous les enfants. »

Avec quelle affectueuse douceur Jésus prend dans ses mains sa tête et dépose un baiser sur son front !

« Je le sais, c’est pour ça que je suis venu. Tu vois comme je suis ? Je voudrais mourir pour ne plus souffrir et pour ne plus appartenir à personne… Toi, qui en as tant guéri et qui as ressuscité des morts, fais-moi mourir, moi que personne n’aime et qui ne pourrai jamais travailler.

583.22

– N’as-tu pas quelque famille ? Es-tu orphelin ?

– Un père, oui, j’en ai un. Mais il ne m’aime pas, parce que je suis comme ça. Il a chassé ma mère et lui a donné un libelle de divorce, et il m’a chassé avec elle. Puis maman est morte à cause de moi, parce que je suis difforme.

– Mais avec qui vis-tu ?

– A la mort de maman, les serviteurs m’ont reconduit chez mon père, mais lui, qui s’est marié de nouveau et a de beaux enfants, m’a chassé. Il m’a donné à ses paysans, qui agissent comme leur maître pour lui plaire, et ils me font souffrir.

– Ils te frappent ?

– Non. Mais ils prennent plus soin des bêtes que de moi, et ils me méprisent. Et comme je suis souvent malade, je suis pour eux une source d’ennui. Je deviens de plus en plus difforme, alors leurs enfants se moquent de moi et me font tomber. Personne ne m’aime. Cet hiver, quand j’ai tant toussé qu’il me fallait des remèdes, mon père n’a rien voulu dépenser : il disait que ce que je pouvais faire de mieux, c’était de mourir. Depuis ce moment-là, je t’attends pour pourvoir te demander : “ Fais-moi mourir ”. »

Jésus le prend à son cou, sourd aux paroles de l’enfant qui lui dit :

« Mes pieds sont pleins de boue, et mon vêtement aussi, car je me suis assis en route. Je vais te salir.

– Tu viens de loin ?

– Des alentours de Jérusalem, car c’est là qu’habite celui qui me garde. J’ai vu passer tes apôtres. Je sais que ce sont eux, car les paysans ont commenté : “ Voilà les disciples du Rabbi galiléen. Mais lui, il est absent. ” Alors je suis venu.

– Tu es trempé, mon enfant. Pauvre garçon ! Tu vas de nouveau tomber malade.

– Si tu ne m’écoutes pas, qu’au moins la maladie me fasse mourir. Où m’emmènes-tu ?

– A la maison. Tu ne peux rester ainsi. »

583.23

Portant dans ses bras l’enfant, Jésus rentre dans le jardin. Il crie à Lazare, qui arrive :

« Referme le portail toi-même. J’ai ce gamin tout trempé dans les bras.

– Mais qui est-ce, Maître ?

– Je ne sais pas. J’ignore même son nom.

– D’ailleurs, je ne le dis pas, reprend le garçonnet. Je ne veux pas être reconnu. Je veux ce dont je t’ai parlé. Maman me confiait : “ Mon fils, mon pauvre fils, moi je meurs, mais je voudrais que tu meures avec moi, car là-haut tu ne serais plus difforme au point de souffrir dans tes os et dans ton cœur. Là-haut, on ne se moque pas de ceux qui naissent malheureux, car Dieu est bon pour les innocents et les malheureux. ” Tu m’envoies chez Dieu ?

– L’enfant veut mourir. C’est une triste histoire… »

Lazare, qui regarde fixement le petit garçon, s’exclame soudain :

« Mais ne serais-tu pas le petit-fils de Nahum[9] ? N’est-ce pas toi qui restes assis au soleil, près du sycomore qui se trouve à la limite des oliviers de Nahum, et que ton père a confié à Josias, le gérant de son domaine ?

– C’est bien moi. Mais pourquoi l’as-tu révélé ?

– Mon pauvre enfant ! Ce n’est pas pour me moquer de toi. Maître, le sort d’un chien en Israël est moins triste que celui de cet enfant. S’il ne retournait plus à la maison d’où il est venu, personne ne partirait à sa recherche. Les serviteurs comme les maîtres sont des hyènes au cœur féroce. Joseph connaît bien l’histoire… Elle a fait grand bruit. Mais moi, à ce moment-là, j’étais tellement affligé à cause de Marie… Ensuite, après la mort de sa malheureuse épouse, ce garçon est venu chez Josias. Je le voyais en passant… On l’oubliait sur l’aire, au soleil ou au vent, car il a su marcher très tard… et toujours bien peu. Je ne sais pas comment, aujourd’hui, il a pu venir jusqu’ici. Qui sait depuis combien de temps il est en route !

– Depuis que Pierre est passé par là.

– Et maintenant, qu’en faisons-nous ?

– Moi, je ne retourne pas là-bas ! Je veux mourir, m’en aller. Grâce et pitié pour moi, Seigneur ! »

583.24

Une fois dans la maison, Lazare hèle un serviteur pour qu’il apporte une couverture et envoie Noémi pour soigner l’enfant, qui est livide de froid dans ses vêtements trempés.

« C’est le fils de l’un de tes ennemis les plus acharnés ! L’un des plus mauvais en Israël. Quel âge as-tu, mon enfant ?

– Dix ans.

– Dix ans ! Dix ans de souffrance !

– Et c’est assez ! » s’exclame Jésus en posant l’enfant par terre.

Il est bien difforme ! L’épaule droite est plus haute que la gauche, la poitrine ressort excessivement, le cou étroit s’enfonce dans les clavicules, les jambes sont torses…

Jésus le regarde avec pitié, pendant que Noémi le déshabille et l’essuie, avant de l’envelopper dans une chaude couverture. Lazare aussi l’observe avec commisération.

« Je vais le coucher dans mon lit, Seigneur, après lui avoir donné du lait chaud, dit Noémi.

– Mais tu ne me fais pas mourir ? Aie pitié de moi ! Pourquoi me laisser vivre pour être ainsi et tant souffrir ? » et il achève : « J’avais espéré en toi, Seigneur. »

On sent dans sa voix un reproche, une déception.

« Sois gentil, obéis, et le Ciel te consolera » répond Jésus

Et il se penche pour passer sa main sur les pauvres membres déformés en un geste de caresse.

« Porte-le au lit et veille-le. Ensuite… on pourvoira. »

On emmène l’enfant, en larmes.

« Et ce sont ces gens-là qui se croient saints ! » s’écrie Lazare en pensant à Nahum.

583.25

On entend Pierre qui appelle son Maître…

« Oh ! Maître ! Tu es ici ? Tout va bien. Pas d’ennuis. Beaucoup de calme, au contraire. Au Temple, personne ne nous a dérangés. Jean a eu de bonnes nouvelles. On laisse les disciples en paix. Les gens t’attendent joyeusement. Je suis content. Et toi, Maître, qu’as-tu fait ? »

Ils s’éloignent en devisant, tandis que Lazare se rend là où Maximin l’appelle.

583.1

La bella sala — una di quelle adibite ai banchetti, bianca nelle pareti e nei soffitti, bianca nelle tende pesanti, nelle tappezzerie che coprono i sedili, nelle lastre di mica o alabastro che fungono da vetri alle finestre e da lumiere — è piena del cicaleccio delle donne. Una quindicina di donne che parlano fra loro non è cosa da poco. Ma appena Gesù appare sulla soglia, spostando la tenda pesante, si fa un silenzio assoluto, mentre tutte si alzano e si inchinano col massimo rispetto.

«La pace a voi tutte», dice Gesù con un dolce sorriso… Della appena cessata bufera di dolore nessuna traccia è sul suo volto, che è sereno, luminoso, pacifico come nulla di penoso fosse accaduto o stesse per accadere con piena conoscenza da parte di Lui.

«La pace a Te, Maestro. Siamo venute. Tu hai mandato a dire: “con quante donne sono con Giovanna”, e io ti ho ubbidito. Era da me Elisa. Con me la tengo in questi giorni. E da me era costei che si dice tua seguace. Era venuta a cercare di Te, perché non si ignora che io sono la tua felice discepola. E anche Valeria è con me, nella mia casa da quando sono nel mio palazzo. Con Valeria era Plautina, venuta a visitarla. Con loro era questa. Valeria ti dirà di lei. Più tardi è venuta Annalia, avvisata del tuo desiderio, e questa giovinetta, sua parente, credo. Ci combinammo per venire, né trascurammo Niche. È così bello sentirsi sorelle in un’unica fede in Te… Sperare che anche quelle che ancora sono ad un amor naturale per il Maestro salgano più oltre, come ha fatto Valeria», dice Giovanna sogguardando Plautina che… è rimasta all’amor naturale…

«I diamanti si formano con lentezza, Giovanna. Occorrono secoli di fuoco sepolto… Non occorre aver fretta, mai… E non sconfortarsi mai, Giovanna…».

«E quando un diamante torna… cenere?».

«Segno è che ancor non era diamante perfetto. Ci vuole ancora pazienza e fuoco. Ricominciare da capo, sperando nel Signore. Ciò che sembra un fallimento la prima volta, sovente si muta in trionfo la seconda».

«O la terza, o la quarta e anche più.

583.2

Io sono stata un fallimento molte volte, ma infine Tu hai trionfato, Rabboni!», dice Maria di Magdala con la sua voce d’organo dal fondo della sala.

«Maria è contenta ogni volta che può avvilirsi ricordando il passato…», sospira Marta che lo vorrebbe cancellato dal ricordo di ogni cuore.

«In verità, sorella, che è così! Sono contenta di ricordare il passato. Ma non per avvilirmi come tu dici. Per salire ancora, spinta dal ricordo del male commesso e dalla riconoscenza per Colui che mi ha salvata. E anche perché chi tituba per se stesso, o per qualche essere a lui caro, possa rincuorarsi e giungere a quella fede che il mio Maestro dice che sarebbe atta a far muovere le montagne».

«E tu la possiedi. Te beata! Tu non conosci il timore…», sospira Giovanna, così mite e timida, e pare ancor più tale se la si confronta alla Maddalena.

«Non lo conosco. Non è mai stato nella mia natura umana. Ora, da quando sono del mio Salvatore, non lo conosco più neppure nella mia natura spirituale. Tutto ha servito per aumentare la mia fede. Può forse una, che è risorta come io e che vide risorgere il fratello suo, dubitare più di nulla? No. Nessuna cosa mi farà più dubitare».

«Sinché Dio è con te, ossia teco è il Rabbi…

583.3

Ma Egli dice che presto ci lascerà. Che sarà allora la nostra fede? Ossia la vostra fede, perché io ancora non sono penetrata al di là dei confini umani…», dice Plautina.

«La sua presenza materiale o la sua materiale assenza non lederà la mia fede. Non temerò. Non è superbia la mia. È conoscenza di me. Se le minacce del Sinedrio si dovessero avverare… ecco, io non temerò…».

«Ma che non temerai? Che il Giusto sia giusto? Questo temere anche io non lo avrò. Lo crediamo di molti saggi dei quali gustiamo la sapienza, direi dei quali ci nutriamo con la vita del loro pensiero, dopo che da secoli sono scomparsi. Ma se tu…», insiste Plautina.

«Io non temerò neppur per la sua morte. La Vita non può morire. È risorto Lazzaro che era un misero uomo…».

«Non per sé è risorto. Ma perché il Maestro gli ha evocato lo spirito dall’oltre tomba. Opera che solo il Maestro può fare. Ma chi evocherà lo spirito del Maestro, se il Maestro sarà ucciso?».

«Chi? Egli. Ossia Dio. Dio da Se stesso si è fatto, Dio da Se stesso si può risuscitare».

«Dio… sì… nella vostra fede Dio da Sé si è fatto. È già arduo ammetterlo per noi, che sappiamo gli dèi venire l’un dall’altro, per divini amori».

«Per sconci, irreali amori, devi dire», la interrompe irruenta Maria di Magdala.

«Come vuoi…», concilia Plautina e sta per finire la frase, ma Maria di Magdala ancora la precede e dice: «“Ma l’Uomo”, vuoi dire, “non può da sé risuscitarsi”. Ma Egli, come da Sé si è fatto Uomo, perché nulla è impossibile al Santo dei santi, così Egli da Sé darà a Sé comando di risorgere. Tu non puoi capire. Tu non conosci le figure della nostra storia d’Israele. Egli e i suoi prodigi sono in quelle. E ogni cosa si compirà così come è detto.

583.4

Io credo in anticipo, Signore. Tutto credo. Che Tu sei il Figlio di Dio e il Figlio della Vergine, che Tu sei l’Agnello di salute, che Tu sei il Messia santissimo, che Tu sei il Liberatore e Re universale, che il tuo Regno non avrà fine e confine, e infine che la morte non prevarrà su Te, perché la vita e la morte Dio le ha create e gli sono soggette come tutte le cose. Io credo. E se grande sarà il dolore di vedere Te sconosciuto e vilipeso, più grande sarà la mia fede nel tuo Essere eterno. Io credo. In tutto quanto è detto di Te, credo. In tutto quanto Tu dici, credo. Ho saputo credere anche per Lazzaro, unica che sapessi ubbidire e credere, unica che sapessi reagire a quegli uomini e a quelle cose che mi volevano persuadere a non credere. Solo al limite, presso la fine della prova, ho avuto uno smarrimento… Ma essa durava da tanto… e non pensavo più che neppur Tu, Maestro benedetto, potessi accostarti al golal dopo tanti giorni dalla morte… Ora… non dubiterei più neppure se, in luogo di giorni, un sepolcro dovesse essere riaperto per restituire la sua preda dopo mesi che essa è nel suo ventre. Oh! mio Signore! Io so chi Tu sei! Il fango ha conosciuto la Stella!». Maria gli si è accosciata ai piedi, sul suolo marmoreo, non più veemente, ma mite, adorante nell’espressione del volto alzato verso Gesù.

«Chi sono?».

«Colui che è. Questo sei. L’altra cosa, la persona umana, è la veste, la necessaria veste messa sul tuo splendore e sulla tua santità, perché Essa potesse venire fra noi e salvarci. Ma Tu sei Dio, il mio Dio». E si getta giù, a baciare i piedi di Cristo, e sembra non possa staccare le labbra dalle dita sporgenti dalla lunga veste di lino.

«Alzati, Maria. Tieni sempre forte a questa tua fede. E alzala come una stella nelle ore della burrasca, perché i cuori vi si affissino e sappiano sperare, quello almeno…».

583.5

Poi si volge a tutte e dice:

«Vi ho chiamate perché nei giorni futuri poco potremo vederci e con pace. Il mondo ci sarà intorno. E i segreti dei cuori hanno un pudore più grande di quello dei corpi. Non sono il Maestro, oggi. Sono l’Amico. Non tutte fra voi avete speranze o timori da dirmi. Ma a tutte piaceva vedermi con pace ancora una volta. Ed Io vi ho chiamate, voi, fior di Israele e del nuovo Regno, e voi, fior dei gentili che lasciano il luogo delle ombre per entrare nella Vita. Tenete questo nel cuore, per i giorni futuri: che il vostro onore al perseguitato Re d’Israele, all’Innocente accusato, al Maestro non ascoltato, tempera il mio dolore.

Io vi chiedo di stare molto unite, voi di Israele, voi che siete venute in Israele, voi che venite verso Israele. Le une soccorrano le altre. Le più forti di spirito soccorrano le più deboli. Le più sapienti quelle che poco sanno o non sanno affatto e solo hanno desiderio di saggezze nuove, di modo che il loro desiderio umano, per la cura delle sorelle più progredite, evolva in desiderio soprannaturale di Verità.

Siate pietose le une alle altre. Quelle che secoli di legge divina hanno formate in giustizia compatiscano a quelle che il gentilesimo fa… diverse. Non si muta l’abito morale dall’oggi al domani altro che in casi eccezionali, nei quali interviene una potenza divina ad operare il mutamento per secondare una volontà molto buona. Non fatevi stupore se in quelle che vengono da altre religioni vedete arresti nel progredire e talora anche ritorni sulle vecchie vie. Abbiate presente lo stesso Israele nel suo comportamento verso di Me, e non pretendete dalle gentili la arrendevolezza e la virtù che Israele non ha saputo, non ha voluto avere verso il Maestro.

Sentitevi sorelle le une alle altre. Sorelle che il destino ha riunite intorno a Me, in questo ultimo tempo della mia vita mortale… Non piangete! E che vi ha riunite prendendovi da luoghi diversi. Perciò con idiomi e costumi diversi, che rendono un poco difficile il comprendersi umanamente. Ma, in verità, l’amore ha un unico linguaggio, ed è questo: fare ciò che l’amato insegna e farlo per dargli onore e gioia. Ecco che in questo potete comprendervi tutte, e quelle che più capiscono aiutino le altre a capire.

583.6

Poi… in futuro, in un futuro più o meno lontano, in circostanze diverse, tornerete a dividervi per le regioni della Terra, parte tornando alle regioni natie e parte andando in un esilio che non peserà, perché quelle che lo subiranno saranno già giunte a quella perfezione di verità, che farà loro comprendere che non è l’esser condotte qui o là che costituisce esilio dalla Patria vera. Perché la vera Patria è il Cielo. Perché chi è nella verità è in Dio e ha Dio in sé. È dunque già nel Regno di Dio, e il Regno di Dio non conosce frontiere, né esce da quel Regno chi da Gerusalemme verrà, per un esempio, portato in Iberia, o in Pannonia, o in Gallia, o in Illiria. Sempre sarete nel Regno se resterete sempre in Gesù, o se in Gesù verrete.

Io sono venuto a radunare tutte le pecore. Quelle del gregge paterno, quelle di altri, e anche quelle senza pastore, selvatiche, selvagge più ancor di selvatiche, sprofondate in tenebre così oscure da non permettere loro di vedere neppure un iota, non di legge divina ma anche di legge morale. Genti sconosciute che attendono di divenire note all’ora che Dio destina per questo e che poi entreranno a far parte del gregge di Cristo. Quando? Oh! anni o secoli sono pari rispetto all’Eterno! Ma voi sarete le anticipatrici di quelle che andranno, coi Pastori futuri, a raccogliere nell’amore cristiano pecore e agnelli selvaggi per condurli nei pascoli divini. E vostro primo campo di prova siano questi luoghi.

583.7

Il rondinino che leva l’ala per il volo non si getta subito alla grande avventura. Tenta il primo volo dalla gronda alla vite che ombreggia la terrazza. Poi torna al nido e nuovamente si lancia alla terrazza oltre la sua, e ritorna. E poi di nuovo più lontano… sinché sente farsi forte il nervo dell’ala e sicuro il suo orientamento, e allora giuoca coi venti e gli spazi e va e viene garrendo, inseguendo gli insetti, sfiorando le acque, risalendo verso il sole, sinché all’epoca giusta apre sicuro le ali al lungo volo per le zone più calde e ricche di nuovo cibo, né teme di valicare i mari, esso tanto piccolo, un punto di acciaio brunito sperso fra le due immensità azzurre del mare e del cielo, un punto che va, senza paura, mentre prima temeva il breve voletto dalla gronda al tralcio fronzuto, un corpo nervoso, perfetto, che fende l’aria come una freccia e non si sa se sia l’aria che lo trasporta con amore, questo piccolo re dell’aria, o se sia esso, il piccolo re dell’aria, che con amore solchi i suoi domini. Chi pensa, vedendo il suo volo sicuro che sfrutta venti e densità d’atmosfera per andar più veloce, al suo primo, goffo, starnazzante volo, pieno di paura?

Così sarà di voi. Così di voi sia. Di voi e di tutte le anime che vi imiteranno. Non si diviene capaci d’improvviso. Non sconforti per le prime sconfitte. Non superbie per le prime vittorie. Le prime sconfitte servono a far meglio un’altra volta. Le prime vittorie servono ad esser sprone a far ancor meglio in futuro e a persuadersi che Dio aiuta le buone volontà.

583.8

Siate sempre soggette ai Pastori in quel che è ubbidienza ai loro consigli e ordini. Siate sempre a loro sorelle in quello che è aiuto nella missione e sostegno alle loro fatiche. Dite questo anche a quelle che oggi non sono qui presenti. Ditelo a quelle che verranno in futuro.

E ora e sempre siate come figlie per mia Madre. Ella vi guiderà in ogni cosa. Può guidare le fanciulle come le vedove, le mogli come le madri, avendo Ella conosciuto tutte le conseguenze di tutti gli stati per esperienza propria, oltre che per sapienza soprannaturale. Amatevi e amatemi in Maria. Non fallirete mai, perché Ella è l’Albero della Vita, la vivente Arca di Dio, la Forma di Dio[1] in cui la Sapienza si fece una Sede e la Grazia si fece Carne.

583.9

Ed ora che ho parlato in generale, ora che vi ho vedute, desidero ascoltare le mie discepole e quelle che sono le speranze delle discepole future. Andate. Io resto qui. Quelle fra voi che hanno da parlarmi vengano. Perché non avremo mai più un momento di intima pace simile a questo».

Le donne si consultano fra loro. Elisa esce insieme a Maria e Maria Cleofe. Maria di Lazzaro ascolta Plautina che la vuole persuadere a qualche cosa, ma pare che Maria non voglia, perché ha recisi cenni di diniego col capo e poi se ne va lasciando in asso la sua interlocutrice, e nel passare prende con sé sua sorella e Susanna dicendo: «Noi avremo tempo di parlargli. Lasciamo queste, che devono tornare via, qui con Lui».

«Vieni, Sara. Noi verremo per ultime», dice Annalia.

583.10

Escono lentamente tutte, meno Maria Salome che sta incerta sulla porta.

«Vieni qui, Maria. Chiudi e vieni qui. Che temi?», le dice Gesù.

«È che io… io sono sempre con Te. Hai sentito Maria di Lazzaro?».

«Ho sentito. Ma vieni qui. Tu sei madre dei miei primi apostoli[2]. Che vuoi dirmi?».

La donna si avvicina con la lentezza di chi deve chiedere una grande cosa e non sa se poterlo fare.

Gesù l’incoraggia con un sorriso e con le parole: «Che? Vuoi forse chiedermi un terzo posto per Zebedeo? Ma egli è saggio. Certo non ti ha mandata a dire questo! Parla, dunque…».

«Ah! Signore! Proprio di quel posto io ti volevo parlare. Tu… parli in un modo… Come fossi per lasciarci. E io vorrei che prima Tu mi dicessi che mi hai proprio perdonata. Io non ho pace pensando che ti ho disgustato».

«Ci pensi ancora? Non ti pare che Io ti ami come prima e più di prima?».

«Oh! questo sì, Signore. Ma dimmela proprio la parola di perdono. Perché io possa dire al mio sposo quanto Tu sei stato buono con me».

«Ma non c’è bisogno che tu racconti una colpa perdonata, donna!».

«Sì che la racconterò! Perché, vedi?, Zebedeo, vedendo come Tu ami i suoi figli, potrebbe cadere nello stesso mio peccato e… se Tu ci lasci, chi lo assolverebbe più? Io vorrei che tutti noi si entrasse nel tuo Regno. Anche il mio uomo. Né credo di essere fuori della giustizia volendo questo. Io sono una povera donna e non so di libri. Ma quando tua Madre ci legge, o ci dice brani della Scrittura, a noi donne, parla sovente delle donne elette di Israele e dei punti che parlano di noi. E nei Proverbi, che mi piacciono tanto, è detto[3] che nella donna forte confida il cuore del suo sposo. Io penso che è giusto che questa fiducia la donna la dia al proprio uomo, anche per ciò che è commercio celeste. Se io compero per lui un posto sicuro nel Cielo, impedendogli di peccare, io penso di fare cosa buona».

«Sì, Salome. Veramente tu hai aperto ora la bocca alla sapienza e hai legge di bontà sulla tua lingua. Va’ in pace. Hai più che il mio perdono. I tuoi figli, secondo il libro che tanto ti piace, ti proclameranno felice, e ti darà lode tuo marito nella Patria dei giusti. Va’ tranquilla. Va’ in pace. Sii felice».

La benedice e congeda. Salome se ne va tutta lieta.

583.11

Entra la vecchia Anna della casa presso il Meron, e ha per mano due maschietti e dietro una fanciullina timida e pallidina che cammina a capo basso, già mammina nell’atto di guidare un bambinello che appena sa camminare bene.

«Oh! Anna! Anche tu mi vuoi dunque parlare? E tuo marito?».

«Malato, Signore. Malato. Molto malato. Forse non lo ritroverò vivo…». Delle lacrime scendono fra le rughe del volto senile.

«E tu sei qui?».

«Qui sono. Egli ha detto: “Io non posso. Va’ tu per la Pasqua e vedi che i nostri figli…”». Il pianto cresce. Impedisce le parole.

«Perché piangi così, donna? Tuo marito ha detto bene: “Vedi che i nostri figli non siano contro il Cristo per la loro eterna pace”. Giuda è un giusto. Più che della sua vita e del conforto che essa avrebbe dalle tue cure, si preoccupa del bene dei suoi figli. I veli si alzano, nelle ore che precedono la morte dei giusti, e gli occhi dello spirito vedono la Verità. Ma i tuoi figli non ti ascoltano, donna. E Io che posso fare se essi mi respin­go­no?».

«Non li odiare, Signore!».

«E perché dovrei farlo? Pregherò per loro. E a questi, che sono innocenti, imporrò le mani per tenere lungi da loro l’odio che uccide. Venite a Me. Tu chi sei?».

«Giuda, come il padre di mio padre», dice il maschietto più grande, e il più piccino per mano alla sorella saltella e strilla: «Io, io Giuda!».

«Sì. Hanno onorato il padre nel nome da mettere ai figli. Ma non in altre cose…», dice la vecchia.

«Le sue virtù risorgeranno in questi. Vieni tu pure, fanciulla. Sii buona e saggia come quella che qui ti ha condotta».

«Oh! Maria lo è! Per non essere sola la condurrò con me in Galilea».

Gesù benedice i bambini, sostando con la mano sulla testa della fanciullina che è buona. Poi chiede: «E per te non chiedi nulla, Anna?».

«Di ritrovare vivo il mio Giuda e di avere la forza di mentire dicendo che i suoi figli…».

«No. Mentire no. Mai. Neppure per far morire in pace un morente. Dirai questo a Giuda: “Ha detto il Maestro che ti benedice, e con te benedice il tuo sangue”. È suo sangue anche questa fanciullezza innocente, ed Io l’ho benedetta».

«Ma se chiede se i figli nostri…».

«Dirai: “Il Maestro ha pregato per loro”. Giuda riposerà nella certezza che la mia preghiera è potente, e sarà detto il vero senza sconfortare chi muore. Perché Io pregherò anche per i tuoi figli. Va’ tu pure in pace, Anna. Quando lasci la città?».

«Il giorno dopo il sabato, per non essere fermata per via dal sabato».

«Va bene. Ho gioia che tu sia qui dopo il sabato. Resta molto unita a Elisa e Niche. Va’. E sii forte e fedele».

La donna è già quasi alla porta quando Gesù la richiama: «Ascolta. I tuoi piccoli figli stanno molto con te, non è vero?».

«Sempre, mentre io sono in città».

«In questi giorni… lasciali nella casa, se tu ne esci per seguirmi».

«Perché, Signore? Temi persecuzione?».

«Sì. Ed è bene che l’innocenza non veda e non senta…».

«Ma… cosa pensi che avvenga?».

«Va’, Anna. Va’».

«Signore, se… se ti avessero a fare quello che si dice, certo i miei figli… e allora la casa sarà peggio della strada…».

«Non piangere. Dio provvederà. La pace a te».

La vecchia se ne va in lacrime.

583.12

Per un poco nessuno entra; poi, insieme, entrano Giovanna e Valeria. Sono affannate. Specie Giovanna. L’altra è pallida e sospira, ma con più fortezza.

«Maestro, Anna ci ha spaventate. Tu le hai detto… Oh! ma non è vero! Cusa sarà incerto, sarà… calcolatore. Ma menzognero non è! Egli mi assicura che Erode non ha voglia alcuna di nuocerti… Io non so di Ponzio…», e guarda Valeria che tace. Riprende: «Speravo capire qualcosa da Plautina, ma non ho capito molto…».

«Nulla, devi dire, fuorché che ella non ha proseguito di un passo dal limite dove era. A me pure non ha parlato. Ma, se bene ho capito, l’indifferenza romana, che è sempre tanto forte quando un fatto non può aver ripercussioni sulla Patria o sul proprio io, ha ottuso forte quelle che parevano così disposte a scuotersi un tempo. Più ancora che l’essermi accostata alla sinagoga ci separa, come un crepaccio separa due zolle prima unite, questa indifferenza, quest’ozio del loro spirito, così… diverso ormai dal mio. Ma esse sono felici. A loro modo sono felici… E la felicità umana non è un aiuto a tener desto il pensiero».

«E a svegliare lo spirito, Valeria», dice Gesù.

«Così, Maestro. Io… è un’altra cosa… Hai visto quella donna che era con noi? È una della mia famiglia. Vedova e sola, mi viene mandata dai parenti per persuadermi a tornare in Italia. Oh! molte promesse di gioie future! Sono gioie che io non apprezzo più e che perciò non mi sembrano più tali, e le calpesto.

Non andrò in Italia. Qui ho Te e ho la mia bambina[4], che Tu mi hai salvata e che Tu mi hai insegnato ad amare per la sua anima. Non lascerò questi luoghi… Marcella… L’ho portata con me perché ti vedesse e comprendesse che non resto qui per un disonorevole amore verso un ebreo — per noi è disonorevole — ma perché in Te ho trovato il conforto in questo mio dolore di moglie ripudiata. Marcella non è cattiva. Ha sofferto. Capisce. Ma è però ancora incapace di capire la mia nuova religione. E un poco mi rampogna, parendole la mia una chimera… Non importa. Se vorrà, verrà dove io sono ormai. Se no, resterò qui con Tusnilde[5]. Sono libera. Sono ricca. Posso fare ciò che voglio. E, non facendo del male, farò ciò che voglio».

583.13

«E quando il Maestro non ci sarà più?».

«Resteranno i suoi discepoli. Plautina, Lidia, la stessa Claudia che, dopo me, è quella che più ti segue nella dottrina e più ti onora, non hanno ancora capito che io non sono più la donna che esse conoscevano e credono conoscere ancora. Ma io sono sicura di conoscermi ormai. Tanto che dico che, se molto perderò perdendo il Maestro, non perderò tutto, perché la fede resterà. E io resterò dove essa è nata. Non voglio portare Fausta dove nulla parla di Te. Qui… Tutto parla di Te, e certo Tu non ci lascerai senza guida, noi che abbiamo voluto seguirti. Perché devo essere io, la gentile, ad avere questi pensieri, mentre molte di voi, tu stessa, siete come smarrite pensando al giorno in cui il Maestro non sarà fra noi?».

«Perché esse si sono abituate a secoli di staticità, Valeria. È loro pensiero che l’Altissimo sia là, nella sua Casa, sopra l’altare invisibile che solo il Sommo Sacerdote vede in occasioni solenni. Questo le ha aiutate a venire a Me. Potevano finalmente avvicinarsi anche esse al Signore. Ma ora tremano di non aver più né l’Altissimo sulla sua gloria né il Verbo del Padre fra loro. Bisogna compatire… E alzare lo spirito, Giovanna. Io sarò in voi. Ricordalo. Io me ne andrò. Ma non vi lascerò orfani. Vi lascerò una casa mia: la mia Chiesa. La mia parola: la Buona Novella. Il mio amore abiterà nei vostri cuori. E infine vi lascerò un dono più grande, che vi nutrirà di Me e farà, non solo spiritualmente, che Io sia fra voi e in voi. Lo farò per darvi conforto e forza.

583.14

Ma ora… Anna è molto afflitta per i bambini…».

«Ce ne ha parlato, con angoscia…».

«Sì. Le ho detto di tenerli lontano dalla gente. Dico lo stesso a te, Giovanna, e a te, Valeria».

«Manderò Fausta con Tusnilde a Bétèr prima del tempo fissato. Dovevano andarvi dopo la Festa».

«Io no. Non mi separo dai fanciulli. Li terrò nella casa. Ma dirò ad Anna di lasciare andar là i suoi. Quella donna ha dei tristi figli, ma essi saranno onorati del mio invito e non contraddiranno la madre. E io…».

«Io vorrei…».

«Che, Maestro?».

«Che steste tutte molto unite in questi giorni. Terrò con Me la sorella di mia Madre, Salome e Susanna e le sorelle di Lazzaro. Ma voi vi vorrei unite, molto unite».

«Ma non potremo venire dove Tu sei?».

«Io sarò come un lampo che splende rapido e scompare, in questi giorni. Salirò al Tempio nella mattina e poi lascerò la città. Fuor che al Tempio, ogni mattina non potreste incontrarmi».

«L’anno passato fosti da me…».

«Quest’anno non sarò in nessuna casa. Sarò un lampo che scorre…».

«Ma la Pasqua…».

«Desidero consumarla con i miei apostoli, Giovanna. Se così vuole il tuo Maestro, certo lo vuole per giusta ragione».

«È vero…

583.15

Sarò dunque sola… Perché i miei fratelli mi hanno detto di voler essere liberi in questi giorni, e Cusa…».

«Maestro, io mi ritiro. Piove forte. Vado dai bambini che sento raccolti sotto il portico», dice Valeria e si ritira prudentemente.

«Anche nel tuo cuore piove forte, Giovanna».

«È vero, Maestro. Cusa è così… strano. Io non lo capisco più. Una contraddizione continua. Forse ha degli amici che premono sul suo pensiero… o ha avuto qualche minaccia… o teme per il suo domani».

«Non è il solo. Anzi, posso dire che sono pochi e solitari sparsi qua e là quelli che, come Me, non temono del domani, e sempre più pochi saranno. Sii molto dolce e paziente con lui. Egli non è che un uomo…».

«Ma ha avuto tanto da Dio, da Te, che dovrebbe…».

«Che dovrebbe! Sì. Ma chi non ha avuto da Me in Israele? Ho beneficato amici e nemici, ho perdonato, guarito, consolato, istruito… Tu vedi, e più vedrai, come solo Dio è immutabile, come sono diverse le reazioni degli uomini, e come sovente colui che più ha avuto è colui che più è pronto a percuotere il suo benefattore. Veramente si potrà dire[6] che colui che ha mangiato con Me il mio pane ha alzato contro Me il suo piede».

«Io non lo farò, Maestro».

«Tu no. Ma molti sì».

«Il mio sposo è forse fra questi? Se così fosse, io non tornerei alla mia casa questa sera».

«No. Non è fra questi, in questa sera. Ma, anche lo fosse, il tuo posto è là. Perché, se egli pecca, tu non devi peccare. Se egli vacilla, tu lo devi sorreggere. Se egli ti calpesta, tu devi perdonare».

«Oh! calpestare, no! Egli mi ama. Ma io lo vorrei più sicuro. Egli può tanto su Erode. Io vorrei che egli strappasse al Tetrarca una promessa per Te. Così come Claudia tenta strapparla a Pilato. Ma Cusa mi ha saputo solo riportare delle frasi vaghe di Erode… e assicurarmi che Erode non ha che il desiderio di vederti compiere qualche prodigio e non ti perseguiterà… Spera con ciò di far tacere i suoi rimorsi per Giovanni. Cusa dice: “Il mio re dice sempre: ‘Me lo comandasse il Cielo, io non alzerei la mano. Ho troppa paura’”!».

«Dice il vero. Non alzerà la mano su Me. Molti in Israele non lo faranno perché molti hanno paura a condannarmi materialmente. Ma chiederanno sia fatto da altri. Come se vi fosse differenza agli occhi di Dio tra chi colpisce, premuto da un volere di popolo, e chi fa colpire».

«Oh! ma il popolo ti ama! Gran feste si preparano per Te. E Pilato non vuole tumulti. Ha rinforzato le milizie in questi giorni. Io spero tanto che… Non so cosa spero, Signore. Spero e dispero. Il mio pensiero è mutevole come questi giorni in cui il sole si alterna alla pioggia…».

«Prega, Giovanna, e sta’ in pace. Pensa sempre che tu non hai mai dato dolore al Maestro e che Egli se lo ricorda. Va’».

Giovanna, che si è fatta pallida e smagrita in questi pochi giorni, esce pensierosa.

583.16

Ed è il volto gentile di Annalia che si affaccia.

«Vieni avanti. La tua compagna dove è?».

«Di là, Signore. Vuole tornare via, stanno per partire. Marta ha compreso il mio desiderio e mi trattiene sino al tramonto di domani. Sara torna a casa, a dire che resto. Vorrebbe la tua benedizione perché… Ma ti dirò dopo».

«Che venga. La benedirò».

La giovane esce per tornare con la compagna, che si prostra al Signore.

«La pace sia con te e la grazia del Signore ti conduca sui sentieri dove ti ha condotta costei che ti ha preceduta. Sii amorosa alla madre di questa e benedici il Cielo che ti ha risparmiata da legami e da dolori per averti tutta per Sé. Un giorno, più di ora, benedirai di esser stata sterile per volontà tua. Va’».

La giovane se ne va commossa.

«Tu le hai detto tutto quello che ella sperava. Queste parole erano il suo sogno. Sara diceva sempre: “Mi piace la tua sorte, benché sia tanto nuova in Israele. E la voglio io pure. Non avendo più un padre ed essendo mia madre dolce come una colomba, non temo di non poterla seguire. Ma per essere certa di poterla compire, e che santa sia per me, come lo è per te, lo vorrei sentire dalla sua bocca”. Ora Tu glielo hai detto. E anche io ho pace. Perché temevo talora di aver esaltato un cuore…».

«Da quando è con te?».

«Da…

583.17

Venuto l’ordine del Sinedrio, io mi sono detta: “L’ora del Signore è venuta, e io devo prepararmi a morire”.

Perché io te l’ho chiesto[7], Signore… Oggi te lo rammento… Se Tu vai al Sacrificio, io, ostia, con Te».

«Vuoi ancora fermamente la stessa cosa?».

«Sì, Maestro. Io non potrei vivere in un mondo dove Tu non fossi… e non potrei sopravvivere alla tua tortura. Ho tanta paura per Te! Molte fra noi si illudono… Non io! Io sento che l’ora è venuta. Troppo è l’odio… E spero che Tu accoglierai la mia offerta. Non ho che la mia vita da darti, perché sono povera, lo sai. La mia vita e la mia purezza. Per questo ho persuaso la mamma a chiamare sua sorella presso di sé. Perché non resti sola… Sara le sarà figlia in mia vece, e la madre di Sara le sarà di conforto. Non deludere il mio cuore, Signore! Nessuna attrattiva ha il mondo per me. Mi è come un carcere dove molte cose mi ripugnano forte. Forse è perché chi fu sulle soglie della morte ha compreso come ciò che per molti rappresenta la gioia non è che un vuoto che non sazia. Certo è che io non desidero che il sacrificio… e precederti,… per non vedere l’odio del mondo gettato come arma di tortura sul mio Signore, e per somigliarti nel dolore…».

«Deporremo allora il giglio reciso sull’altare dove si immola l’Agnello. Ed esso diverrà rosso del Sangue redentivo. E solo gli angeli sapranno che l’Amore fu il sacrificatore di un’agnella tutta bianca e segneranno il nome della prima vittima del­l’Amore, della prima continuatrice del Cristo».

«Quando, Signore?».

«Tieni pronta la lampada[8] e sta’ in veste di nozze. Lo Sposo è alle porte. Tu ne vedrai il trionfo e non la morte, ma trionferai con Lui entrando nel suo Regno».

«Ah! io sono la donna più felice di Israele! Io sono regina incoronata del tuo serto! Posso, come tale, chiederti una grazia?».

«Quale?».

«Ho amato un uomo, lo sai. Non l’ho più amato come sposo perché un amore più grande è entrato in me, ed egli non mi ha più amata perché… Ma non voglio ricordare il suo passato. Ti chiedo di redimere quel cuore. Posso? Non è peccare volermi ricordare, mentre sono sulle soglie della Vita, di chi amai per dargli la Vita eterna, non è vero?».

«Non è peccare. È portare l’amore al termine santo del sacrificio per il bene dell’amato».

«Benedicimi, allora, Maestro. Assolvimi da ogni mio peccato. Fammi pronta alle nozze e alla tua venuta. Perché sei Tu che vieni, mio Dio, a prendere la tua povera serva e a farla tua sposa».

La giovinetta, radiosa di gioia e di salute, si curva a baciare i piedi del Maestro, mentre Egli la benedice pregando su lei. E veramente la sala, bianca come fosse tutta di gigli, è degno ambiente per questo rito e ben si intona con i due protagonisti di esso, giovani, belli, biancovestiti, splendenti di amore angelico e divino.

583.18

Gesù lascia là la giovanetta, assorta nella sua gioia, ed esce quietamente per andare a benedire i fanciulli, che con strilli di gioia si precipitano verso il carro e vi salgono lieti insieme alle donne che se ne vanno. Restano Elisa e Niche per riaccompagnare il giorno seguente Annalia in città. Ha smesso di piovere e il cielo, rotte le nubi, mostra il suo azzurro, e il sole fa scendere i suoi raggi ad accendere di luce le gocce della pioggia. Un arcobaleno vaghissimo si incurva da Betania a Gerusalemme. Il carro se ne va stridendo ed esce dal cancello. Scompare.

Lazzaro, che è vicino a Gesù, sul limitare del portico, chiede: «Ti hanno dato gioia le discepole?», e osserva il Maestro.

«No, Lazzaro. Mi hanno dato, tutte meno una, i loro dolori e anche delle delusioni, se potessi illudermi».

«Le romane, vuoi dire, ti hanno deluso? Ti hanno parlato di Pilato?».

«No».

«Allora lo devo fare io. Speravo che esse te ne parlassero. Avevo atteso per questo. Entriamo in questa stanza solitaria. Le donne sono andate ai loro lavori con Marta. Maria è invece con tua Madre, nell’altra casa. Tua Madre è stata tanto con

Giuda, ed ora se lo è condotto con sé… Siedi, Maestro…

583.19

Sono stato dal Proconsole… Lo avevo promesso e l’ho fatto. Ma Simone di Giona non sarebbe molto soddisfatto della mia missione!… Fortunatamente non ci pensa più, Simone. Il Proconsole mi ha ascoltato e mi ha risposto queste parole: “Io? Occuparmene io? Ma neanche l’ombra del più lontano pensiero di farlo è in me! Questo soltanto dico: che non per l’Uomo — Tu, Maestro — ma per tutte le noie che mi vengono per suo riflesso, io sono ben deciso a non occuparmene più, né in bene né in male. Me ne lavo le mani. Rinforzerò la guardia, perché non voglio disordini. In tal modo accontenterò Cesare, mia moglie e me stesso. Ossia gli unici dei quali ho sacra cura. E per il resto non muovo un dito. Beghe di questi eterni malcontenti. Loro se le creano, loro se le godono. Io l’Uomo, come malfattore lo ignoro, come virtuoso lo ignoro, come sapiente lo ignoro. E lo voglio ignorare. Continuare a ignorare. Purtroppo, anche volendolo, non ci riesco che male, perché i capi di Israele me ne parlano con le loro lamentele, Claudia con i suoi elogi, i seguaci del Galileo con i loro lamenti verso il Sinedrio. Se non fosse per Claudia, lo farei prendere e lo darei loro, perché definissero la faccenda e non ne sentissi più parlare. L’Uomo è il suddito più quieto di tutto l’Impero. Ma, ciò nonostante, mi ha dato tante noie che vorrei una soluzione…”. Con questo umore, Maestro…».

«Vuoi dire che non c’è da essere sicuri. Con gli uomini non si è mai sicuri…».

«Ma però mi risulta che il Sinedrio è più calmo. Non è stato ricordato il bando, non si sono importunati i discepoli. Fra poco torneranno quelli andati in città. E sentiremo… Contraddirti, sempre. Ma procedere?… Le folle ti amano troppo per poterle sfidare imprudentemente».

583.20

«Andiamo verso la via, incontro a quelli che tornano?», propone Gesù.

«Andiamo».

Escono nel giardino, e sono a mezza via quando Lazzaro chiede: «Ma Tu quando hai mangiato? E dove?».

«A prima».

«Ma è quasi il tramonto. Torniamo indietro».

«No. Non ne sento bisogno. Preferisco andare. Là al cancello vedo aggrappato un povero bambino. Forse ha fame. È lacero e smunto. Lo osservo da qualche tempo. Era già là quando uscì il carro, e fuggì per non essere visto e forse scacciato. Poi è tornato e guarda con insistenza verso la casa e verso di noi».

«Se ha fame, sarà bene che io vada a prendere del cibo. Va’ avanti, Maestro. Io ti raggiungerò subito», e Lazzaro corre indietro mentre Gesù affretta il passo verso il cancello.

583.21

Il fanciullo, un viso patito e irregolare dove solo gli occhi splendono belli e vivi, lo guarda.

Gesù gli sorride e dolcemente gli dice, mentre fa agire il congegno della chiusura: «Chi cerchi, fanciullo?».

«Sei Tu il Signore Gesù?».

«Lo sono».

«Te cerco».

«Chi ti manda?».

«Nessuno. Ma voglio parlarti. Tanti vengono a parlarti. Anche io. Tanti esaudisci. Anche io».

Gesù ha fatto scattare la chiusura e prega il bambino di lasciare andare le sbarre, che tiene con le mani scarne, per poter aprire. Il fanciullo si scansa e nel farlo, movendosi la vesticciuola stinta sul corpo sbilenco, si vede che è un povero bambino rachitico, con la testa incassata nelle spalle per un principio di gobba, le gambe divaricate dal passo insicuro. Proprio un piccolo infelice. Forse ha più anni di quanto non faccia pensare la statura, che è quella di un fanciullo di sei anni circa, mentre il visetto è già quello di un uomo, un poco vizzo, con il mento pronunciato, un viso quasi di vecchietto.

Gesù si curva a carezzarlo e gli dice: «Dimmi dunque che vuoi. Ti sono amico. Sono amico di tutti i fanciulli». Con che amorosa dolcezza Gesù prende la faccina smunta nelle sue mani e lo bacia in fronte!

«Lo so. Per questo sono venuto. Lo vedi come sono? Vorrei morire per non soffrire più. E per non essere più di nessuno… Tu che guarisci tanti e fai risuscitare i morti, fa’ morire me che nessuno ama e che non potrò mai lavorare».

583.22

«Non hai parenti? Sei orfano?».

«Il padre ce l’ho. Ma non mi ama perché sono così. Ha cacciato via la mamma, le ha dato libello di divorzio, e me con lei ha cacciato, e la mamma è morta. Per colpa mia che sono storto così».

«Ma con chi vivi?».

«Quando è morta la mamma, i servi mi hanno ricondotto al padre. Ma egli, che si è sposato di nuovo e ha figli belli, mi ha cacciato. Mi ha dato a dei contadini suoi. Ma essi fanno ciò che fa il padrone per entrargli nel favore… e mi fanno soffrire».

«Ti picchiano?».

«No. Ma più cura hanno delle bestie che di me, e mi scherniscono, e perché sono sovente malato mi hanno a noia. Io divento sempre più storto, e i loro figli mi beffano e mi fanno cadere. Nessuno mi ama. E questo inverno, quando ebbi tanta tosse e occorrevano le medicine, mio padre non volle spendere, dicendo che l’unica cosa che potevo fare di bene era morire. Da allora io ti ho aspettato per dirti: “Fammi morire”».

Gesù lo prende in collo, sordo alle parole del fanciullo che gli dice: «Ho i piedi fangosi e fangosa la veste, perché mi sono seduto per via. Ti sporcherò la veste».

«Vieni da lontano?».

«Da presso la città, perché chi mi tiene è là che sta. Ho visto passare i tuoi apostoli. So che sono loro, perché i contadini hanno detto: “Eccoli i discepoli del Rabbi galileo. Ma Egli non c’è”. E sono venuto».

«Sei bagnato, fanciullo. Povero fanciullo! Ti ammalerai di nuovo».

«Se Tu non mi ascolti, mi facesse almeno morire la malattia! Dove mi porti?».

«In casa. Non puoi stare così».

583.23

Gesù rientra nel giardino col bambino deforme fra le braccia e grida a Lazzaro, che sta venendo: «Chiudi il cancello tu. Io ho questo piccolo tutto bagnato fra le braccia».

«Ma chi è, Maestro?».

«Non so. Neppure il suo nome so».

«E neppure lo dico. Non voglio essere conosciuto. Voglio ciò che ti ho detto. La mamma mi diceva: “Figlio mio, mio povero figlio, io muoio, ma vorrei che tu morissi con me, perché là non saresti più deforme tanto da soffrire nelle ossa e nel cuore. Là non hanno nome di scherno quelli che nascono infelici. Perché Dio è buono con gli innocenti e gli infelici”. Mi mandi a Dio?».

«Vuol morire il fanciullo. È una storia triste…».

Lazzaro, che guarda fisso il ragazzino, dice ad un tratto:

«Ma tu non sei figlio del figlio di Nahum[9]? Non sei quello che stai seduto al sole presso il sicomoro che è al limite degli ulivi di Nahum, e che il padre ha affidato a Giosia suo contadino?».

«Lo sono. Ma perché lo hai detto?».

«Povero bambino! Non per schernirti. Credi, Maestro, che è meno triste la sorte di un cane in Israele che questa di questo fanciullo. Se egli non tornasse più alla casa di dove è venuto, non uno lo cercherebbe. I servi come i padroni. Iene dal cuore feroce. Giuseppe sa bene la storia… Fece molto rumore. Ma io allora ero tanto afflitto per Maria… Però, morta la sposa infelice e venuto costui da Giosia, lo vedevo passando… Dimenticato al sole o al vento sull’aia, perché camminò molto tardi… e sempre poco. Non so come oggi è potuto venire sin qui. Chissà da quanto è per via!».

«Da quando Pietro passò da quel luogo».

«E ora? Che ne facciamo?».

«Io a casa non torno. Io voglio morire. Andarmene via. Grazia e pietà di me, Signore!».

583.24

Sono entrati in casa, e Lazzaro chiama un servo perché porti una coperta e mandi Noemi per curare il fanciullo, che è livido di freddo nelle sue vesti bagnate.

«Il figlio di uno dei più accaniti fra i tuoi nemici! Uno dei più cattivi in Israele. Quanti anni hai, fanciullo?».

«Dieci».

«Dieci! Dieci anni di dolore!».

«E bastano!», dice forte Gesù posando a terra il fanciullo.

È ben storto! La spalla destra più alta della sinistra, il petto eccessivamente sporgente, il collo esile sprofondato fra le clavicole alte, le gambe sbilenche!…

Gesù lo guarda con pietà, mentre Noemi lo sveste e lo asciuga prima di avvolgerlo in una calda coperta. Lazzaro pure lo guarda con pietà.

«Lo coricherò nel mio letto, Signore, dopo avergli dato del latte caldo», dice Noemi.

«Ma non mi fai morire? Abbi pietà! Perché farmi vivere per essere così e soffrire tanto?», e termina: «Io ho sperato in Te, Signore». Un rimprovero, una delusione è nella sua voce.

«Sii buono. Ubbidisci e il Cielo ti consolerà», dice Gesù e si curva a carezzarlo ancora, passando la sua mano sulle povere membra contorte.

«Portalo a letto e veglialo. Poi… si provvederà».

Il bambino viene portato via piangente.

«E sono coloro che si credono santi!», esclama Lazzaro pensando a Nahum…

583.25

La voce di Pietro che chiama il suo Maestro…

«Oh! Maestro! Sei qui? Tutto bene. Nessuna noia. Uh! molta calma, anzi. Al Tempio nessuno ci ha disturbato. Giovanni ha avuto buone notizie. I discepoli lasciati in pace. La gente che ti attende festosa. Io sono contento. E Tu che hai fatto, Maestro?».

Si allontanano insieme parlando, mentre Lazzaro va dove lo chiama Massimino.


Notes

  1. la forme de Dieu et la forme pour Dieu est une expression que Maria Valorta explicite, sur une copie dactylographiée, de la manière suivante : “ Forme de Dieu ”, car le Créateur, qui l’avait prédestinée à être la Mère de Dieu, lui avait donné une âme préservée du péché originel par privilège particulier, mais aussi un corps en tout point parfait, afin que Marie soit réellement créée spirituellement à l’image et à la ressemblance de Dieu et corporellement à celles du Fils de Dieu fait homme, le plus beau des enfants des hommes. “ Forme pour Dieu ”, car le Verbe s’est formé dans son sein en la prenant pour Mère, la seule qui ait servi à lui donner un corps, et donc la seule qui ait pu lui transmettre ses traits en engendrant sa forme humaine. Marie fut donc “ forme ” pour la deuxième personne de la Trinité qui s’incarnait pour devenir homme. Nous retrouvons cette même idée dans une note de Maria Valorta en 242.6 et dans le texte de 650.4. Ajoutons que, lorsque Jésus parle de sa Mère en 540.2, il affirme être “ son Fils de chair et de cœur ” ; et il dit en 600.21 : “ Je suis fait de pureté et d’amour, parce que Marie m’a nourri de sa virginité fécondée par l’Amour parfait qui vit au Ciel. ” L’idée que Marie soit “ la seule qui ait servi à lui donner un corps ” apparaît aussi dans les expressions admirables de Notre-Dame des Douleurs en 610.9 et en 611.15.
  2. mes premiers apôtres, dans l’Œuvre de Maria Valorta, furent Jean et Jacques, fils de Zébédée, comme on le voit en 47.8.10 et en 600.6.
  3. il est dit, en Pr 31, 10-11.26.28.
  4. ma fillette… sauvée, en 155.4/5. et que tu m’as appris à aimer, en 167.9.
  5. Tusnilde, l’affranchie anonyme de 531.16 et présentée en 534.1.
  6. on pourra dire, comme dans le Ps 41, 10.
  7. je te l’ai demandé, en 156.5/6.
  8. Tiens ta lampe allumée… sont des expressions tirées de la parabole racontée et illustrée en 206.2/6.
  9. Nahum est l’homme de confiance du grand-prêtre Hanne, et aussi un ennemi de Jésus, rencontré en 123.6 et en 537.4. Son sort misérable est décrit en 630.9.

Note

  1. la Forma di Dio è un’espressione che MV corregge, su una copia dattiloscritta, in forma di Dio e forma a Dio, spiegandola con la seguente nota: “Forma di Dio” perché il Creatore, che l’aveva predestinata a tal sorte, di essere la Madre di Dio, così come le aveva dato un’anima preservata per singolar privilegio dalla Colpa originale, così le aveva dato un corpo in ogni maniera perfetto, perché Maria fosse realmente fatta ad immagine e somiglianza spirituale di Dio e corporale del Figlio di Dio fattosi Uomo, il più bello tra i figli degli uomini. “Forma a Dio”, perché il Verbo si modellò nel suo seno prendendo dalla Madre, l’unica che aveva servito a dargli un corpo e quindi l’unica a trasmettergli la somiglianza col generante – qui: con la generatrice –, la forma umana. Quindi Ella fu “forma” alla seconda Persona che s’incarnava per farsi Uomo. Troviamo lo stesso concetto espresso dalla scrittrice in una nota a 242.6 e nel testo di 650.4. Aggiungiamo che Gesù, parlando della Madre in 540.2, afferma di essere “suo Figlio di carne e cuore”; e in 600.21 dice: “Io sono fatto di purità e di amore perché Maria mi ha nutrito della sua verginità fecondata dall’Amore perfetto che vive in Cielo”. Che Maria Ss. fosse l’unica che aveva servito a dargli un corpo risulta anche dalle mirabili espressioni della Vergine Addolorata in 610.9 e ancora in 611.15.
  2. primi apostoli, secondo l’opera valtortiana, furono Giovanni e Giacomo di Zebedeo, come si dichiara in 47.8.10 e in 600.6.
  3. è detto, in: Proverbi 31, 10-11.26.28.
  4. la mia bambina… salvata, in 155.4/5; e che Tu mi hai insegnato ad amare, in 167.9.
  5. Tusnilde, la liberta innominata di 531.16 e presentata in 534.1.
  6. si potrà dire, come nel Salmo 41, 10.
  7. te l’ho chiesto, in 156.5/6.
  8. Tieni pronta la lampada… sono espressioni prese dalla parabola narrata e illustrata in 206.2/6.
  9. Nahum, fiduciario del sommo sacerdote Anna e nemico di Gesù, incontrato in 123.6 e in 537.4. La sua miserevole sorte in 630.9.