Jean, ô petit Jean, a partagé la douleur de Marie et de Jésus. Sois toujours comme lui, en cela aussi. Je te l’ai déjà dit : “ Ce ne seront jamais les contemplations ou les dictées qui te rendront grande. Elles sont miennes. Ce sera par ton amour. Or l’amour le plus élevé est la participation à la souffrance. ” C’est là le moyen de comprendre les moindres désirs de Dieu et de les réaliser en dépit de tous les obstacles.
Vois avec quelle sensibilité, avec quelle délicatesse Jean se conduit en cette nuit du vendredi saint. Plus tard aussi, mais observons-le pendant ces heures-là.
Un instant d’égarement, une heure de pesanteur. Mais une fois le sommeil surmonté par le choc de la capture, et le choc par l’amour, il vient, en entraînant Pierre, afin que le Maître soit réconforté par la vue du chef des apôtres et de son apôtre bien-aimé.
Puis il pense à ma Mère, à qui quelque personne méchante pourrait apprendre cruellement ma capture. Et il se rend auprès d’elle. Il ne sait pas que Marie vit déjà les tourments de son Fils et que, pendant que les apôtres dormaient, elle veillait et priait, et elle agonisait avec son Fils. Comme Jean l’ignore, il va la trouver et la prépare à apprendre cette nouvelle.
Il fait ensuite la navette entre la maison de Caïphe et le Prétoire, entre la maison de Caïphe et le Palais d’Hérode, et de nouveau entre la maison de Caïphe et le Prétoire. Courir ainsi ce matin-là, en traversant la foule enivrée de haine, avec des vêtements qui trahissent son origine galiléenne, ce n’est pas chose facile. Mais l’amour le soutient, et il ne pense pas à lui-même, mais à ma souffrance et à celle de ma Mère. Comme disciple du Nazaréen, il risque d’être lapidé. Peu lui importe. Il défie tout. Les autres se sont enfuis, ils sont cachés, ils sont menés par la peur ou la prudence. Lui, c’est l’amour qui le conduit, donc il reste et se montre. C’est un pur. L’amour prospère dans la pureté.
Et si sa pitié et son bon sens populaire le poussent à tenir Marie éloignée de la foule et du Prétoire — il ne se doute pas que Marie partage toutes les tortures de son Fils en les souffrant spirituellement —, il n’hésite pas à la conduire à lui quand il estime que le moment est venu où Jésus a besoin de sa Mère et qu’il n’est pas permis de garder davantage la Mère séparée de son Fils. Mais il reste présent pour la soutenir et la défendre.
Il a la poigne des personnes fidèles : que peut un homme seul, désarmé, jeune, sans autorité, à la tête de quelques femmes, contre toute une foule bestiale ? Rien. C’est un tas de feuilles que le vent peut disperser. Peu importe. L’amour est la force de Jean, la voile qui l’entraîne. C’est armé d’amour qu’il part, et protège la Femme et les femmes jusqu’à la fin.
Jean a possédé l’amour de compassion comme personne au monde, excepté ma Mère. Il est le chef de file des amoureux de cet amour. Il est ton maître en cela. Suis l’exemple de pureté et de charité qu’il te donne, et tu seras grande.
Maintenant, va en paix. Je te bénis. »
[Le 7 avril 1945]