Os Escritos de Maria Valtorta

604. Les procès et le reniement de Pierre.

604. Os processos e a renegação

604.1

Alors commence la douloureuse marche, par le chemin pierreux qui mène de la petite place où Jésus a été capturé au Cédron et, de là, par un autre chemin, à la ville. Aussitôt les moqueries s’élèvent, les sévices se déclenchent.

Jésus, lié aux poignets et à la ceinture comme s’il était un fou dangereux, avec les bouts des cordes confiés à des énergumènes ivres de haine, est ballotté d’un côté et de l’autre comme un chiffon abandonné à la colère d’une meute de chiens. Encore seraient-ils excusables si c’étaient des chiens. Mais ce sont des hommes, bien qu’ils n’aient d’humain que l’aspect. Pour accroître la souffrance, ils ont imaginé de joindre deux cordes en sens contraire : l’une sert seulement à emprisonner les poignets qu’elle griffe et irrite par son frottement rugueux, et l’autre, celle de la ceinture, comprime les coudes contre le thorax, et oppresse le haut de l’abdomen jusqu’à le scier, en torturant le foie et les reins où ils ont fait un énorme nœud. De temps à autre, l’homme qui tient les bouts des cordes s’en sert pour fouetter Jésus en lançant : “ Hue ! Allez ! Trotte, baudet ! ” et il y ajoute des coups de pieds, appliqués derrière les genoux du Torturé, qui chancelle. S’il ne tombe pas, c’est uniquement parce que les cordes le maintiennent debout. Mais cela n’évite pas que, tiré à droite par celui qui s’occupe des mains et à gauche par celui qui tient la corde de la ceinture, Jésus aille heurter les murets et les arbres, et tombe brutalement contre le parapet du petit pont sur le Cédron à cause d’un coup plus cruel reçu au moment de le franchir. La bouche contusionnée de Jésus saigne. Il lève ses mains liées pour essuyer le sang qui lui souille la barbe, en silence. C’est vraiment l’agneau qui ne mord pas son bourreau.

Pendant ce temps, des gens sont descendus ramasser des galets et des cailloux sur la rive et, d’en-bas, une grêle de pierres commence à s’abattre sur une cible facile à atteindre. Comme la marche s’est ralentie sur ce pont étroit et peu sûr, sur lequel les gens s’entassent au point de se gêner les uns les autres, les pierres atteignent Jésus à la tête et aux épaules, mais aussi ses gardiens, qui réagissent en lançant des bâtons et en renvoyant les pierres. Et tout sert à frapper de nouveau Jésus à la tête et au cou. Finalement le pont se dégage, et c’est alors une étroite ruelle qui jette son ombre sur la mêlée : en effet, la lune, qui commence à descendre, n’éclaire pas ce sentier tortueux, et beaucoup de torches se sont éteintes au cours de la cohue.

Mais la haine tient lieu de lumière pour voir le pauvre Martyr dont la haute taille facilite la torture. Comme il est le plus grand, il est facile de le frapper, de l’attrapper par les cheveux pour l’obliger à renverser violemment la tête, sur laquelle on lance une poignée d’immondices qui doit forcément entrer dans la bouche et dans les yeux, et provoquer nausée et souffrance.

604.2

Le cortège en vient à traverser le faubourg d’Ophel, ce faubourg où il a accordé tant de bienfaits. La foule hurle pour appeler les dormeurs sur les seuils. Les femmes poussent des cris de douleur et, terrorisées, s’enfuient à la vue de ce qui arrive, mais les hommes qui ont pourtant obtenu de Jésus guérisons, secours, paroles amicales soit baissent la tête par indifférence, soit affectent l’insouciance, quand ils ne passent pas de la curiosité à la colère, aux ricanements, aux gestes de menace, avant de suivre le cortège pour continuer à harceler Jésus. Satan est déjà à l’œuvre…

Un homme[1] qui veut suivre Jésus pour s’en prendre à lui, est saisi au bras par sa femme qui lui crie :

« Lâche ! C’est grâce à lui que tu es vivant, homme dégoûtant, espèce de pourri ! Souviens-t’en ! »

Mais la femme est vaincue par l’homme qui la frappe bestialement en la jetant par terre, et qui court ensuite rejoindre le Martyr sur la tête de qui il jette une pierre.

Une autre femme, d’un certain âge, cherche à barrer le chemin à son fils au visage de hyène qui accourt avec un bâton pour s’en prendre lui aussi à Jésus. Elle lui crie :

« Tant que je vivrai, tu ne seras pas l’assassin de ton Sauveur ! »

Mais la malheureuse, frappée par son fils d’un coup de pied brutal à l’aine, s’abat en hurlant :

« Déicide et matricide ! Pour le sein que tu déchires une seconde fois et pour le Messie que tu accables, sois maudit ! »

604.3

La violence s’accroît à mesure que le cortège approche de la ville.

Jean et Pierre se tiennent devant la porte de la ville. Elle est déjà ouverte, et les soldats romains, l’arme au pied, observent d’où vient le tumulte et comment il se développe, prêts à intervenir si le prestige de Rome devait être lésé. Je crois qu’ils sont arrivés là par un raccourci, après avoir franchi le Cédron en amont du pont, puis précédé rapidement la foule qui, gênée par le nombre, avance lentement. Ils se trouvent dans la pénombre d’une entrée, près d’une petite place qui précède les murs. Ils ont mis leurs manteaux sur la tête pour dissimuler leur visage. Mais à l’arrivée de Jésus, Jean laisse tomber son manteau et découvre son visage pâle et bouleversé au clair de lune, qui brille encore avant de disparaître derrière la colline qui se trouve au-delà des murs — je l’entends appeler Tofet par les sbires qui ont capturé Jésus. Pierre n’ose pas se découvrir, mais il s’avance pour être vu…

Jésus les regarde… Il a un sourire d’une infinie bonté. Pierre fait demi-tour et revient dans son coin obscur, les mains sur les yeux, courbé, vieilli, déjà une loque humaine. Jean reste courageusement à sa place et ne rejoint Pierre qu’une fois la foule hurlante passée. Il le prend par le coude, le conduit comme si c’était un jeune garçon qui guide son père aveugle, et ils entrent tous deux dans la ville, derrière la foule vociférante.

J’entends les exclamations étonnées, narquoises, affligées des soldats romains. L’un d’eux maudit ceux qui l’ont fait se lever à cause de ce “ mouton imbécile ” ; un autre se moque des Juifs capables de “ prendre une femmelette ” ; un troisième a pitié de la Victime “ qu’il a toujours vue pleine de bonté ” ; l’un des soldats va jusqu’à dire :

« J’aurais préféré qu’ils me tuent plutôt que de le voir entre leurs mains. C’est un grand homme. Si je vénère quoi que ce soit en ce monde, c’est bien lui et Rome.

– Par Jupiter ! s’écrie le plus élevé en grade, je ne veux pas d’ennuis. Je vais aller trouver le porte-enseigne. C’est à lui d’en parler à qui de droit. Je ne veux pas que l’on m’envoie combattre les Germains. Ces Hébreux sentent mauvais, ce sont des serpents qui ne nous causent que des ennuis. Mais ici, la vie est sûre. Or je suis sur le point de finir mon temps, et j’ai une petite fille près de Pompéi… »

604.4

Je perds le reste pour suivre Jésus. Celui-ci s’avance sur le chemin qui monte en tournant vers le Temple. Mais je vois et comprends que la maison d’Hanne, où ils veulent l’amener, est située dans ce labyrinthe qu’est le Temple, qui occupe toute la colline de Sion. Plus exactement, elle y est et elle n’y est pas : elle se trouve à son extrémité, près d’une série de grosses murailles qui semblent marquer la limite de la ville, avant de s’étendre avec des portiques et des cours à travers le flanc de la colline pour arriver dans l’enceinte du Temple proprement dit, c’est-à-dire là où les juifs se rendent pour les diverses manifestations du culte.

Un haut portail en fer perce la muraille. Vers lui accourent des hyènes volontaires qui y frappent violemment. A peine est-il entrebaillé qu’ils se ruent à l’intérieur en faisant presque tomber la servante venue pour ouvrir, et ils la piétinent afin d’ouvrir tout grand le vantail pour que la foule hurlante, avec le Capturé au milieu, puisse entrer. Une fois tous à l’intérieur, ils le ferment par une barre, peut-être par peur de Rome ou des partisans du Nazaréen.

Ses partisans ! Où sont-ils ?…

Une fois passé l’atrium de l’entrée, ils traversent une vaste cour, un couloir, un autre portique et une nouvelle cour. Traînant Jésus, ils lui font alors monter trois marches, puis ils le font passer au pas de course sous des arcades surélevées au-dessus de la cour, pour arriver plus vite à une riche salle où se trouve un homme âgé habillé en prêtre.

« Que Dieu te console, Hanne » dit celui qui semble être l’officier, si on peut appeler ainsi le gredin qui commande ces brigands. « Voici le coupable. Je le confie à ta sainteté pour qu’Israël soit purifié de la faute.

– Que Dieu te bénisse pour ta sagacité et ta foi. »

Belle sagacité ! Il avait suffi de la voix de Jésus pour les faire tomber par terre à Gethsémani.

604.5

« Qui es-tu ?

– Jésus de Nazareth, le Rabbi, le Christ. Tu me connais. Je n’ai pas agi dans les ténèbres.

– Dans les ténèbres, non. Mais tu as dévoyé les foules par des doctrines ténébreuses. Et le Temple a le droit et le devoir de protéger l’âme des enfants d’Abraham.

– L’âme ! Prêtre d’Israël, peux-tu dire que tu as souffert pour l’âme du plus petit ou du plus grand de ce peuple ?

– Et toi donc ? Qu’as-tu fait qui puisse s’appeler souffrance ?

– Ce que j’ai fait ? Pourquoi me le demandes-tu ? Israël tout entier en parle. De la cité sainte au plus misérable, les pierres elles-mêmes parlent pour dire ce que j’ai fait. J’ai rendu aux aveugles la vue des yeux et celle du cœur. J’ai ouvert l’ouïe à ceux qui étaient sourds aux voix de la terre et aux voix du Ciel. J’ai fait marcher les estropiés et les paralytiques pour qu’ils commencent leur marche vers Dieu par la chair, puis progressent avec l’esprit. J’ai purifié les lépreux : des lèpres que la Loi mosaïque signale et de celles qui rendent impur auprès de Dieu : les péchés. J’ai ressuscité les morts ; je ne prétends pas que rappeler à la vie une chair est extraordinaire, mais c’est une grande œuvre de racheter un pécheur, et je l’ai fait. J’ai secouru les pauvres en enseignant aux Hébreux avides et riches le saint précepte de l’amour du prochain et, en restant pauvre malgré les fleuves d’or qui me sont passés par les mains, j’ai essuyé plus de larmes, moi seul, que vous tous, les possesseurs de richesses. J’ai apporté enfin une richesse qui n’a pas de nom : la connaissance de la Loi, la connaissance de Dieu, la certitude que nous sommes tous égaux et que, aux yeux saints du Père, égaux sont les pleurs ou les crimes, qu’ils soient versés ou accomplis par le Tétrarque et le Pontife, ou par le mendiant et le lépreux qui meurt au bord du chemin. Voilà ce que j’ai fait. Rien de plus.

604.6

– Sais-tu que tu t’accuses toi-même ? Tu parles de lèpres qui rendent impur aux yeux de Dieu et ne sont pas signalées par Moïse. Tu insultes Moïse et tu insinues qu’il y a des lacunes dans sa Loi…

– Ce n’est pas la sienne, mais celle de Dieu. C’est ainsi. Plus que la lèpre, ce malheur de la chair qui a une fin, je déclare grave la faute qui est un malheur, et un malheur éternel de l’âme.

– Tu oses dire que tu peux remettre les péchés. Comment le fais-tu ?

– S’il est permis et croyable qu’on annule une faute par un peu d’eau lustrale et le sacrifice d’un bêlier, qu’on l’expie et qu’on en est purifié, comment mes larmes, mon sang et ma volonté ne le pourront-ils pas ?

– Mais tu n’es pas mort. Où donc est le sang ?

– Je ne suis pas encore mort. Mais je le serai, car c’est écrit. C’était écrit au Ciel avant que n’existent Moïse, Jacob et Abraham, mais depuis que le roi du Mal a mordu l’homme au cœur et l’a empoisonné, lui et sa descendance. C’est écrit sur la terre dans le Livre où sont rassemblées les paroles des prophètes. C’est écrit dans les cœurs : dans le tien, dans celui de Caïphe et des membres du Sanhédrin qui ne me pardonnent pas ; non, ces cœurs ne me le pardonnent pas d’être bon. J’ai absous, en anticipant sur mon sang. Maintenant, j’accomplis l’absolution par un bain dans ce sang.

– Tu nous accuses d’être avides et ignorants du précepte d’amour…

– N’est-ce pas vrai ? Pourquoi me tuez-vous ? Parce que vous avez peur que je vous détrône. Oh ! ne craignez rien. Mon Royaume n’est pas de ce monde. Je vous laisse maître de tout pouvoir. L’Eternel sait quand il faut dire les mots “ Cela suffit ! ” qui vous feront tomber, foudroyés…

– Comme Doras[2] ?

– Il est mort de colère, non par la foudre du Ciel. Dieu l’attendait de l’autre côté pour le foudroyer.

– C’est à moi, son parent, que tu oses dire cela ?

– Je suis la Vérité. La Vérité n’est jamais lâche.

– Orgueilleux et fou que tu es !

– Non : sincère. Tu m’accuses de vous offenser, mais est-ce que vous ne vous haïssez pas tous ? C’est votre animosité contre moi qui vous unit aujourd’hui. Mais demain, quand vous m’aurez tué, votre haine mutuelle renaîtra, encore plus féroce, et vous vivrez avec cette hyène dans le dos et ce serpent dans le cœur. J’ai enseigné l’amour, par pitié pour le monde. J’ai enseigné à ne pas être avide, à faire preuve de pitié.

604.7

De quoi m’accuses-tu ?

– D’avoir apporté une doctrine nouvelle.

– O prêtre ! Israël pullule de doctrines nouvelles : esséniens, sadducéens, pharisiens, tous ont la leur. Ensuite, chacun a sa doctrine secrète qui, pour l’un s’appelle plaisir, pour l’autre or, pour un troisième puissance. Chacun a son idole. Pas moi. J’ai repris la Loi piétinée de mon Père, du Dieu éternel, et je suis revenu dire simplement les dix propositions du Décalogue. Je me suis desséché les poumons pour les faire entrer dans des cœurs qui ne les connaissaient plus.

– Horreur ! Blasphème ! C’est à moi, un prêtre, que tu dis cela ? Israël n’a-t-il pas de Temple ? Sommes-nous comme les exilés à Babylone[3] ? Réponds.

– C’est ce que vous êtes et plus encore. Il y a bien un Temple, oui, un édifice. Mais Dieu n’y est pas. Il a fui devant l’abomination qui occupe sa maison. Mais pourquoi tant m’interroger puisque ma mort est décidée ?

– Nous ne sommes pas des assassins. Nous tuons si nous en avons le droit pour une faute avérée.

604.8

Mais moi, je veux te sauver. Parle, et je te sauverai. Où sont tes disciples ? Si tu me les livres, je te laisse libre. Je veux les noms de tous, et ceux qui sont secrets davantage que ceux qui sont connus. Dis-moi : Nicodème est-il à toi ? Et Joseph ? Et Eléazar ? Gamaliel aussi ? Et… pour celui-ci, je suis au courant… inutile de te le demander. Parle, parle. Tu le sais : je peux te tuer et te sauver. Je suis puissant.

– Tu n’es que fange. Je laisse à la fange le métier d’espion. Moi, je suis Lumière. »

Un sbire lui donne un coup de poing.

« Je suis Lumière. Lumière et Vérité. J’ai parlé ouvertement au monde, j’ai enseigné dans les synagogues et au Temple où se rassemblent les juifs, et je n’ai rien dit en secret. Je le répète : pourquoi m’interroges-tu ? Interroge ceux qui ont entendu mes paroles. Eux le savent. »

Un autre sbire le gifle en criant :

« C’est ainsi que tu réponds au grand-prêtre ?

– C’est à Hanne que je parle. Le grand-prêtre, c’est Caïphe. Et je m’adresse à lui avec le respect dû à un vieillard. Mais s’il te semble que j’ai mal parlé, montre-le-moi. Autrement, pourquoi me frappes-tu ?

– Laissez-le faire.

604.9

Je vais trouver Caïphe. Vous, gardez-le ici jusqu’à ce que j’en décide autrement. Et faites en sorte qu’il ne parle à personne. »

Hanne sort.

Jésus ne parle pas, non, il ne parle pas. Pas même à Jean qui ose rester sur le pas de la porte en défiant toute la gent policière. Mais Jésus doit, sans mot dire, lui donner un ordre, car Jean, après un regard affligé, sort de là, et je le perds de vue.

Jésus reste avec ses gardes. Coups de corde, crachats, injures, coups de pied, cheveux arrachés, c’est ce qui lui reste, jusqu’au moment où un serviteur vient demander qu’on amène le Prisonnier dans la maison de Caïphe.

Toujours lié et maltraité, Jésus passe de nouveau sous les arcades, jusqu’à une entrée, puis il traverse une cour où une foule nombreuse se réchauffe à un feu, car la nuit est devenue froide et venteuse à ces premières heures du vendredi. Pierre et Jean s’y trouvent, mêlés à la foule hostile. Ils doivent avoir un beau courage pour rester là… Jésus les regarde, et une ombre de sourire passe sur ses lèvres déjà enflées par les coups.

Le chemin est long, à travers portiques, atriums, cours et couloirs. Mais quelles maisons avaient donc ces personnages attachés au Temple ?

La foule n’entre pas dans les murs de la maison du grand-prêtre. Elle est repoussée dans l’atrium d’Hanne. Jésus s’avance, seul au milieu des sbires et des prêtres.

604.10

Il pénètre dans une vaste salle qui semble perdre sa forme rectangulaire à cause des nombreux sièges disposés en fer à cheval sur trois côtés, laissant au milieu un espace vide au-delà duquel se trouvent deux ou trois fauteuils montés sur des estrades.

Au moment où Jésus est sur le point d’entrer, le rabbi Gamaliel le rejoint, et les gardes donnent un coup au Prisonnier pour qu’il cède le passage au rabbi d’Israël. Mais celui-ci, raide comme un piquet, hiératique, ralentit et, presque sans remuer les lèvres, sans regarder personne, il demande :

« Qui es-tu ? Dis-le-moi. »

Et Jésus, doucement :

« Lis les prophètes et tu trouveras ta réponse. Le premier signe est chez eux. L’autre va venir. »

Gamaliel resserre son manteau et entre, suivi de Jésus. Pendant que Gamaliel va s’asseoir, Jésus est traîné au milieu de la salle, en face du grand-prêtre — une vraie figure de criminel —, et on attend qu’entrent tous les membres du Sanhédrin. Enfin, la séance commence. Mais Caïphe voit deux ou trois sièges vides, et il demande :

« Où est Eléazar ? Et où est Jean ? »

Un jeune scribe, je crois, se lève, s’incline :

« Ils ont refusé de venir. Voici l’écrit.

– Qu’on le conserve et qu’on le note, ils en répondront.

604.11

Qu’est-ce que les saints membres de ce Conseil ont à dire à son sujet ?

– C’est moi qui prends la parole : dans ma maison, il a violé le sabbat. Dieu m’est témoin que je ne mens pas. Ismaël ben Phabi ne ment jamais.

– Est-ce vrai, accusé ? »

Jésus se tait.

« Je l’ai vu vivre avec des courtisanes connues. En faisant le prophète, il avait transformé son repaire en lupanar, et pour comble avec des femmes païennes. Avec moi, il y avait Sadoq, Ben Calba Schéboua et Nahum, l’homme de confiance d’Hanne. Est-ce que je dis vrai, Sadoq et Ben Calba Schéboua ? Démentez-moi, si je le mérite.

– C’est vrai. C’est vrai.

– Que dis-tu ? »

Jésus se tait.

« Il ne manquait pas une occasion de nous ridiculiser et de nous faire ridiculiser. La foule ne nous aime plus à cause de lui.

– Tu les entends ? Tu as profané les membres saints. »

Jésus se tait.

« Cet homme est possédé du démon. Revenu d’Egypte, il exerce la magie noire.

– Peux-tu le prouver ?

– Je le jure par ma foi et par les tables de la Loi !

– Grave accusation. Disculpe-toi. »

Jésus se tait.

« Ton ministère est illégal, tu le sais, et passible de mort. Parle. »

Mais Gamaliel intervient :

« Cette séance est illégale. Lève-toi, Siméon, et partons.

– Mais rabbi, tu deviens fou ?

– Je respecte les règles. Il n’est pas permis de procéder ainsi, et j’en ferai une accusation publique. »

Et le rabbi Gamaliel sort, raide comme une statue, suivi d’un homme d’environ trente-cinq ans qui lui ressemble.

604.12

Il se fait un peu de tumulte dont profitent Nicodème et Joseph pour parler en faveur du Martyr.

« Gamaliel a raison. L’heure et l’endroit sont illicites, et les accusations manquent de consistance. Quelqu’un peut-il l’accuser d’avoir méprisé notoirement la Loi ? Je suis son ami et je jure que je l’ai toujours trouvé respectueux de la Loi, déclare Nicodème.

– Et moi également. Et pour ne pas souscrire à un crime je me couvre la tête, non à cause de lui, mais à cause de nous. Je sors. »

Joseph s’apprête à descendre de sa place pour partir.

Mais Caïphe braille :

« C’est-ce que vous dites ? Dans ce cas, faisons entrer les témoins assermentés. Ecoutez-les, puis vous vous en irez. »

Entrent deux figures de galériens. Regards fuyants, sourires cruels, mouvements sournois.

« Parlez.

– Il n’est pas licite de les entendre ensemble, crie Joseph.

– Je suis le grand-prêtre. C’est moi qui commande. Et silence ! »

Joseph donne un coup de poing sur la table et lance :

« Que les flammes du Ciel s’ouvrent sur toi ! A partir de ce moment, sache que Joseph l’Ancien est ennemi du Sanhédrin et ami du Christ. Et je vais de ce pas avertir le Préteur qu’ici on tue sans respect pour Rome ! »

A ces mots, il sort en repoussant violemment un jeune scribe maigre qui tentait de le retenir.

Nicodème, plus paisible, s’éloigne sans dire un mot. En passant devant Jésus, il le regarde…

604.13

Nouveau tumulte. On craint Rome. Et la victime expiatoire est encore et toujours Jésus.

« Tout cela, c’est à cause de toi ! Tu es le corrupteur des meilleurs Juifs. Tu les as prostitués. »

Jésus se tait.

« Qu’on entende les témoins ! crie Caïphe.

– Oui, celui-ci utilisait le… le… Nous le savions… Comment ça s’appelle, déjà?

– Le tétragramme, peut-être ?

– Voilà ! Tu l’as dit ! Il invoquait les morts. Il enseignait la rébellion pour le sabbat et la profanation pour l’autel. Nous le jurons. Il disait qu’il voulait détruire le Temple pour le reconstruire en trois jours avec l’aide des démons.

– Non. Il disait : il ne sera pas fait de main d’homme. »

Caïphe descend de son siège et s’approche de Jésus. Petit, obèse, laid, il ressemble à un énorme crapaud près d’une fleur. Car Jésus, malgré ses blessures, ses contusions, souillé et dépeigné, est encore très beau et majestueux.

« Tu ne dis rien? Quelles horribles accusations ils font contre toi ! Parle pour te laver de cette honte ! »

Mais Jésus se tait. Il le regarde et se tait.

604.14

« Adresse-toi à moi, alors. Je suis ton grand-prêtre. Au nom du Dieu vivant, je t’en conjure. Réponds-moi : es-tu le Christ, le Fils de Dieu ?

– C’est toi qui l’a dit. Je le suis. Et vous verrez le Fils de l’homme, assis à la droite de la puissance du Père, venir sur les nuées du ciel. Du reste, pourquoi m’interroges-tu ? J’ai parlé en public pendant trois ans. Je n’ai rien dit de caché. Interroge ceux qui m’ont entendu. Ils te rapporteront ce que j’ai dit et ce que j’ai fait. »

Un des soldats qui le tiennent le frappe sur la bouche en le faisant saigner de nouveau, et hurle :

« C’est ainsi que tu réponds au Grand Prêtre, ô satan ? »

Mais Jésus leur répond à tous les deux avec douceur :

« Si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? Si j’ai mal parlé, pourquoi ne me dis-tu pas en quoi je me trompe ? Je le répète : je suis le Christ, Fils de Dieu. Je ne puis mentir. Le Grand-prêtre, le Prêtre éternel, c’est moi. Je suis seul à porter le vrai Rational sur lequel il est écrit : Doctrine et Vérité. Et je leur suis fidèle, jusqu’à la mort, ignominieuse aux yeux des hommes, sainte aux yeux de Dieu, et jusqu’à la bienheureuse Résurrection. Je suis l’Oint. Je suis Grand-prêtre et Roi. Je suis sur le point de prendre mon sceptre et de m’en servir comme d’un van pour purifier l’aire. Ce Temple sera détruit et ressuscitera, nouveau, saint, car celui-ci est corrompu et Dieu l’a abandonné à son destin.

– Blasphémateur ! crient-ils tous ensemble.

– Tu ferais cela en trois jours ? Tu es fou et possédé !

– Non, pas celui-ci, mais le mien se dressera, le Temple du Dieu vrai, vivant, saint, trois fois saint.

– Anathème ! » hurlent-ils de nouveau.

Caïphe déchire ses vêtements de lin avec des gestes d’horreur étudiés, et s’exclame de sa voix éraillée :

« Quels autres témoignages avons-nous besoin d’entendre ? Il a blasphémé. Que faisons-nous donc ? »

Et tous en chœur :

« Il est passible de mort. »

Avec des gestes indignés et scandalisés, ils sortent de la salle, laissant Jésus à la merci des sbires et de la populace des faux témoins. Ceux-ci le giflent, lui donnent des coups de poing, le couvrent de crachats, lui bandent les yeux avec un chiffon puis, en lui tirant violemment les cheveux, ils l’envoient çà et là, les mains liées de façon qu’il heurte les tables, les chaises et les murs. En même temps il lui demandent :

« Qui t’a frappé ? Devine ! »

Plusieurs fois, ils lui font des crocs-en-jambe pour le faire tomber par terre et rient vulgairement en voyant comment, les mains liées, il peine à se relever.

604.15

Les heures passent ainsi, et les bourreaux fatigués songent à prendre un peu de repos. Ils décident de conduire Jésus dans un débarras, mais ils doivent pour cela traverser de nombreuses cours au milieu des moqueries de la foule, déjà dense dans l’enceinte des maisons pontificales.

Jésus arrive dans la cour où se trouve Pierre près de son feu, et il le regarde. Mais Pierre évite son regard. Jean n’est plus là, je ne le vois pas. Je pense qu’il est parti avec Nicodème…

L’aurore apporte une lueur vert pâle. Un ordre est donné : il faut ramener le Prisonnier dans la salle du Conseil pour un procès plus légal. C’est à ce moment-là que Pierre nie pour la troisième fois connaître le Christ quand celui-ci passe, déjà marqué par ses souffrances. Et dans la lumière verte de l’aube, les contusions semblent encore plus atroces sur le visage terreux de Jésus, ses yeux plus profonds et vitreux. Jésus est comme assombri par la douleur du monde…

Un coq lance dans l’air à peine remué de l’aube son cri railleur, sarcastique, gamin. Dans le grand silence qui s’est fait à l’apparition du Christ, on entend la voix rauque de Pierre qui dit : “ Je te le jure, femme. Je ne le connais pas ”, affirmation tranchante, sûre, à laquelle, comme un rire moqueur, répond aussitôt le chant du petit coq.

Pierre sursaute. Il fait demi-tour pour fuir et se trouve en face de Jésus, qui le regarde avec une infinie pitié, avec une douleur si profonde et si intense qu’elle me brise le cœur comme si, après cela, je devais voir se dissoudre mon Jésus, et pour toujours. Pierre fait entendre un sanglot et sort en titubant comme s’il était ivre. Il s’enfuit derrière deux serviteurs qui sortent dans la rue et se perd dans la route encore à moitié obscure.

Jésus est ramené dans la salle, et ils lui répètent en chœur la question captieuse :

« Au nom du vrai Dieu, réponds-nous : es-tu le Christ ? »

Comme ils obtiennent la même réponse que précédemment, ils le condamnent à mort et donnent l’ordre de le conduire à Pilate.

604.16

Jésus, escorté par tous ses ennemis hormis Hanne et Caïphe, sort, en repassant par ces cours du Temple où tant de fois il avait parlé, répandu des bienfaits et guéri. Après avoir franchi l’enceinte crénelée, il entre dans les rues et, plutôt traîné que conduit, descend vers la ville qui rosit dans une première annonce de l’aurore.

Je crois que, dans l’unique but de le tourmenter plus longuement, ils lui font faire un long tour vicieux dans Jérusalem, en passant exprès par les marchés, devant les écuries et les auberges bondées en raison de la Pâque. Les déchets des légumes des marchés, tout comme les excréments des animaux des écuries deviennent alors des projectiles lancés sur l’Innocent dont le visage, voilé par les ordures variées qui se sont répandues sur lui, montre de plus en plus de bleus et de petites lacérations sanglantes. Les cheveux, déjà alourdis et légèrement plaqués par la sueur sanguinolente, sont devenus plus opaques. Comme on les lui ébouriffe pour lui voiler le visage, ils pendent, dépeignés, mêlés de pailles et d’immondices, devant ses yeux.

Sur les marchés, acheteurs et vendeurs laissent tout en plan pour suivre, et non par amour, le Malheureux. Les garçons d’écuries et les serviteurs des auberges sortent en masse, sourds aux appels et aux ordres de leurs maîtresses. A dire vrai, celles-ci comme presque toutes les autres femmes sont, sinon opposées aux offenses, du moins indifférentes au tumulte, et elles se retirent en grommelant parce qu’on les laisse seules avec tant de clients à servir.

La troupe hurlante grossit de minute en minute. Il semble que, par quelque subite épidémie, les âmes et les physionomies changent de nature : les premières deviennent des âmes de criminels et les secondes des masques féroces sur des visages bleus de rage ou rouges de colère ; les mains deviennent des griffes, les bouches changent de forme pour hurler comme des loups, les yeux deviennent torves, comme ceux des fous. Seul Jésus est toujours lui-même, bien que maintenant couvert d’immondices jetées sur son corps et altéré par les bleus et les œdèmes.

604.17

A une arcade qui resserre le chemin comme un anneau, alors que tout s’engorge et ralentit, un cri fend l’air : “ Jésus ! ” C’est Elie, le berger, qui cherche à se frayer un passage en faisant tournoyer une lourde matraque. Vieux, puissant, menaçant et fort, il parvient presque à rejoindre le Maître. Mais la foule, déroutée par l’assaut imprévu, serre les rangs et sépare, repousse, maîtrise cet homme qui est seul contre tout un peuple.

« Maître ! crie-t-il pendant que le tourbillon de la foule l’absorbe et le repousse.

– Va !… Ma Mère… Je te bénis… »

Une fois le passage étroit franchi, le cortège, comme une eau qui retrouve le large après une écluse, se déverse tumultueusement dans une vaste avenue élevée au-dessus d’une dépression entre deux collines, au bout desquelles s’élèvent de splendides palais de grands seigneurs.

Je recommence à voir le Temple en haut de sa colline, et je comprends que l’on revient au point de départ après le tour inutile imposé au Condamné pour en faire un objet de moquerie pour toute la ville et pour permettre à tous de l’injurier, en augmentant à chaque pas le nombre de ceux qui l’insultent.

604.18

D’un palais, un cavalier sort au galop. Le caparaçon pourpre sur la blancheur du cheval arabe et la majesté de son aspect, l’épée brandie nue et manœuvrée d’estoc et de taille sur les échines et sur les têtes qui saignent, le font ressembler à un archange. Il a trouvé le meilleur moyen de s’ouvrir un passage dans la foule : il pousse son cheval à se cabrer, en faisant des sabots une arme de défense pour la monture et son maître. Ce mouvement fait tomber de sa tête le voile pourpre et or qui la couvrait, tenu serré par une bande d’or, et je reconnais Manahen.

« Arrière ! » crie-t-il. « Comment vous permettez-vous de troubler le repos du Tétrarque ? » Mais ce n’est qu’une feinte pour justifier son intervention et sa tentative d’arriver à Jésus. « Cet homme… Laissez-moi le voir… Ecartez-vous, ou j’appelle les gardes… »

Sous la grêle de coups de plat d’épée et des ruades du cheval et devant les menaces du cavalier, la foule s’ouvre, et Manahen rejoint le groupe de Jésus et des gardes du Temple qui le maintiennent.

« Laissez passer ! Le Tétrarque est plus grand que vous, serviteurs dégoûtants. Arrière ! Je veux lui parler ! »

Et il y arrive en chargeant avec son épée le plus acharné des geôliers.

« Maître !…

– Merci, mais va-t’en ! Et que Dieu te réconforte !»

Et, comme il le peut de ses mains liées, Jésus esquisse un geste de bénédiction.

La foule siffle de loin, et dès qu’elle voit que Manahen s’est retiré, elle se venge d’avoir été repoussée, par une grêle de pierres et d’immondices sur le Condamné.

604.19

Par une ruelle qui monte et que le soleil a déjà réchauffée, le cortège se dirige vers la tour Antonia, dont la masse apparaît au loin.

Un cri aigu de femme fend l’air :

« Oh ! mon Sauveur ! Ma vie pour la sienne, ô Eternel ! »

Jésus tourne la tête et voit, en haut de la loge fleurie qui couronne une belle maison, Jeanne, femme de Kouza, qui se tient au milieu de ses servantes et serviteurs, avec les petits Matthias et Marie autour d’elle, et lève les bras au ciel.

Mais le Ciel n’entend pas les prières, aujourd’hui ! Jésus lève les mains et trace un geste de bénédiction et d’adieu.

« A mort ! A mort le blasphémateur, le corrupteur, le satan ! A mort ses amis ! »

Sifflets et pierres volent vers la haute terrasse. Je ne sais si quelqu’un est blessé. J’entends un cri aigu et je vois le groupe se séparer et disparaître.

La longue montée se poursuit… Jérusalem montre ses maisons au soleil, vidées par la haine qui pousse contre Jésus désarmé toute une cité, avec ses habitants effectifs et les occasionels venus pour la Pâque.

604.20

Des soldats romains, tout un manipule, sortent en courant de l’Antonia, leurs lances dirigées contre la populace, qui se disperse en criant. Restent au milieu du chemin Jésus, les gardes et les chefs des prêtres, des scribes et des anciens du peuple.

« Qui est cet homme ? Pourquoi cette sédition ? Vous en répondrez à Rome, dit avec hauteur un centurion.

– Il est passible de mort selon notre loi.

– Et depuis quand vous a-t-on rendu le jus gladii et sanguinis[4] ? » demande toujours le plus ancien des centurions, un vrai Romain au visage sévère dont une joue est lacérée par une cicatrice profonde. Il parle avec le mépris et le dégoût avec lequel il se serait adressé à des galériens pouilleux.

« Nous savons que nous n’avons pas ce droit. Nous sommes les fidèles sujets de Rome…

– Ah ! Ah ! Ah ! Entends-les, Longinus ! Fidèles ! Sujets ! Charognes ! Je vous donnerais les flèches de mes archers en guise de récompense.

– Ce serait une trop noble mort ! Pour les échines des mulets, il n’y a que le fouet… » répond Longinus avec un flegme ironique.

Les chefs des prêtres, les scribes et les anciens écument leur venin. Mais ils veulent parvenir à leur but. Alors ils se taisent, ils avalent l’offense sans montrer qu’ils la comprennent et, s’inclinant devant les deux chefs, ils demandent que Jésus soit conduit à Ponce Pilate pour qu’il “ le juge et le condamne avec la justice bien connue et honnête de Rome ”.

« Ah ! Ah ! Ah ! Tu les entends ? Nous sommes devenus plus sages que Minerve… Ici ! Amenez-le ! Et marchez en avant ! On ne sait jamais. Vous êtes d’immondes chacals. Vous avoir derrière nous est un danger. En avant !

– Nous ne pouvons pas.

– Et pourquoi ? Quand quelqu’un accuse, il doit venir devant le juge avec l’accusé. C’est le règlement de Rome.

– La maison d’un païen est impure à nos yeux, or nous nous sommes déjà purifiés pour la Pâque.

– Oh ! les pauvres ! Ils se contaminent à entrer ! Et le meurtre de l’unique Hébreu qui soit un homme et non un chacal, un reptile comme vous, cela ne vous souille pas ? C’est bien. Restez là où vous êtes, alors. N’avancez pas, sinon on vous enfilera sur les lances. Une décurie autour de l’Accusé ! Les autres contre cette racaille qui sent du bec mal lavé. »

604.21

Jésus entre au Prétoire au milieu des dix lanciers, qui forment un carré de hallebardes autour de sa personne. Les deux centurions marchent en avant. Jésus s’arrête dans un large atrium, au-delà duquel se trouve une cour que l’on entrevoit derrière un rideau que le vent remue ; eux disparaissent derrière une porte. Ils reviennent avec le Gouverneur, vêtu d’une toge très blanche sur laquelle est posé un manteau écarlate. C’est peut-être ainsi qu’il leur fallait s’habiller quand ils représentaient officiellement Rome.

L’air indolent, un sourire sceptique sur son visage rasé, il entre en frottant entre ses mains des feuilles de cédrat dont il hume l’odeur avec volupté. Il se dirige vers un cadran solaire, y jette un coup d’œil et fait demi-tour. Il lance quelques grains d’encens dans un brasier placé aux pieds d’une divinité. Il se fait apporter de l’eau de cédrat et se gargarise. Il regarde sa coiffure toute bouclée dans un miroir de métal très propre. Il semble avoir oublié le Condamné qui attend son assentiment à sa mort. Il mettrait même des pierres en colère.

Comme l’atrium est complètement ouvert par devant et surélevé de trois hautes marches au-dessus du niveau du vestibule, qui s’ouvre sur la rue, déjà surélevé de trois autres marches par rapport à celle-ci, les Juifs voient tout parfaitement et frémissent, mais ils n’osent pas se rebeller par peur des lances et des javelots.

Finalement, après avoir marché en long et en large dans la vaste pièce, Pilate va se placer en face de Jésus, le regarde et demande aux deux centurions :

« C’est lui ?

– Oui.

– Que ses accusateurs approchent ! »

Et il va s’asseoir sur un siège placé sur une estrade. Au-dessus de sa tête, les insignes de Rome s’entrecroisent avec leurs aigles dorées et leur sigle puissant.

« Ils ne peuvent pas venir : ils se contamineraient.

– Eh bien, cela vaut mieux. Nous épargnerons des fleuves d’essences pour enlever de la pièce leur odeur de bouc. Faites-les du moins approcher là-dessous, et veillez à qu’ils n’entrent pas, puisqu’ils s’y refusent. Cet homme peut être un prétexte pour une sédition.»

Un soldat part porter l’ordre du Procurateur romain. Les autres s’alignent sur le devant de l’atrium à des distances régulières, beaux comme neuf statues de héros.

604.22

Les chefs des prêtres, les scribes et les anciens s’avancent alors et saluent avec des courbettes serviles, puis ils s’arrêtent sur la petite place qui se trouve devant le Prétoire, au-delà des trois degrés du vestibule.

« Parlez, mais soyez brefs. Déjà vous êtes en faute pour avoir troublé la nuit et obtenu par la force l’ouverture des portes. Mais je vérifierai cela. Mandants et mandataires répondront de leur désobéissance au décret. »

Pilate s’est avancé vers eux, tout en restant dans le vestibule.

« Nous venons soumettre à Rome, dont tu représentes le divin empereur, notre jugement sur cet homme.

– Quelle accusation portez-vous contre lui ? Il me semble inoffensif…

– Si ce n’était pas un malfaiteur, nous ne te l’aurions pas amené. »

Et dans leur violent désir d’accuser, ils font quelques pas en avant.

« Repoussez cette plèbe ! Six pas au-delà des gradins de la place ! Les deux centuries aux armes ! »

Les soldats obéissent rapidement : cent s’alignent sur le degré extérieur le plus haut, dos au vestibule, et cent sur la petite place sur laquelle s’ouvre le portail d’entrée de la demeure de Pilate. J’ai parlé de portail d’entrée : je devrais dire porte cochère ou arc de triomphe, parce que c’est une très vaste ouverture bordée d’une grille, actuellement ouverte, qui permet de pénétrer dans l’atrium grâce au long couloir du vestibule large de six mètres au moins, de sorte que l’on voit bien ce qui arrive dans l’atrium surélevé. Au-delà du vestibule, on voit les figures bestiales des Juifs qui regardent, l’air menaçant, satanique même, vers l’intérieur, par delà la barrière armée des soldats qui, coude à coude, comme pour une parade, présente deux cents pointes de lances aux lâches assassins.

« Je le répète : quelle accusation portez-vous contre lui ?

– Il a commis un crime contre la Loi de nos pères.

– Et vous venez me déranger pour cela ? Prenez-le vous-mêmes, et jugez-le selon vos lois.

– Nous ne pouvons pas mettre quelqu’un à mort. Nous ne sommes pas savants. Le droit hébraïque n’est qu’un enfant déficient en comparaison du droit parfait de Rome. En tant qu’ignorants et sujets de Rome, notre maîtresse, nous avons besoin…

– Depuis quand vous faites-vous tout miel ? Mais vous avez dit une vérité, ô maîtres du mensonge ! Vous avez besoin de Rome ! Oui. Pour vous débarrasser de lui, qui vous gêne. J’ai compris. »

Et Pilate rit en regardant le ciel serein qui s’encadre comme un ruban rectangulaire de turquoise foncée entre les blancs murs de marbre de l’atrium.

« Dites-moi : en quoi a-t-il commis un crime contre vos lois ?

– Nous avons trouvé qu’il mettait le désordre dans notre nation et qu’il empêchait de payer le tribut à César, en se prétendant le Christ, le roi des Juifs. »

604.23

Pilate retourne près de Jésus, qui se tient au milieu de l’atrium, laissé là par les soldats, lié mais sans escorte tant apparaît nettement sa douceur. Il lui demande :

« Es-tu le roi des Juifs ?

– Me poses-tu cette question de toi-même ou parce que d’autres l’insinuent ?

– Que m’importe ton royaume ? Est-ce que je suis juif, moi ? Ta nation et ses chefs t’ont livré pour que je juge. Qu’as-tu fait ? Je sais que tu es loyal. Parle. Est-il vrai que tu aspires à régner ?

– Mon Royaume n’est pas de ce monde. Si c’était un royaume du monde, mes ministres et mes soldats auraient combattu pour que les Juifs ne s’emparent pas de moi. Mais mon Royaume n’est pas de la terre et tu sais que je ne brigue pas le pouvoir.

– C’est vrai. Je le sais, on me l’a dit. Mais tu ne nies pas que tu es roi ?

– Tu le dis. Je suis Roi. C’est pour cela que je suis venu au monde : pour rendre témoignage à la Vérité. Qui est ami de la vérité écoute ma voix.

– Qu’est-ce que c’est la vérité ? Tu es philosophe ? Cela ne sert à rien devant la mort. Socrate est quand même mort.

– Mais cela lui a servi devant la vie, à bien vivre, mais aussi à bien mourir et à entrer dans la seconde vie sans avoir trahi les vertus civiques.

– Par Jupiter ! »

Pilate le regarde un instant avec admiration, puis il reprend son sarcasme sceptique. Il fait un geste d’ennui, lui tourne le dos, et retourne vers les Juifs.

« Je ne trouve en lui aucune faute. »

La foule se déchaîne, prise par la panique de perdre sa proie et le spectacle du supplice. Elle hurle :

« C’est un rebelle !

– Un blasphémateur !

– Il encourage le libertinage !

– Il pousse à la rébellion !

– Il refuse le respect dû à César !

– Il veut se faire passer pour prophète !

– Il fait de la magie !

– C’est un satan !

– Il soulève le peuple par ses doctrines en les enseignant dans toute la Judée, où il est venu de Galilée enseigner.

– A mort !

– A mort !

– Il est galiléen ? Tu es galiléen ? »

Pilate revient vers Jésus :

« Tu entends comme ils t’accusent ? Disculpe-toi. »

Mais Jésus se tait.

604.24

Pilate réfléchit… Puis il prend sa décision.

« Une centurie ! Qu’on le conduise à Hérode ! Qu’il le juge, c’est son sujet. Je reconnais le droit du Tétrarque et je souscris à l’avance à son verdict. Qu’on le lui dise. Allez. »

Encadré comme un gredin par cent soldats, Jésus retraverse la ville et rencontre une nouvelle fois Judas, qu’il avait déjà rencontré près d’un marché. J’avais oublié de le dire, tant j’étais écœurée par la bagarre de la populace. Même regard de pitié sur le traître…

Maintenant, il est plus difficile de lui donner des coups de pieds et de bâtons, mais les pierres et les immondices ne manquent pas et, si les pierres font seulement du bruit sur les casques et les cuirasses des Romains, elles laissent des marques quand elles atteignent Jésus qui s’avance avec son seul vêtement, puisqu’il a laissé son manteau à Gethsémani.

En entrant dans le somptueux palais d’Hérode, il rencontre Kouza… qui ne peut le regarder et qui se couvre la tête de son manteau pour ne pas le voir dans cet état.

604.25

Le voilà dans la salle, devant Hérode. Derrière lui se tiennent les scribes et les pharisiens, qui se sentent ici à leur aise, et entrent en qualité de faux accusateurs. Seul le centurion et quatre soldats l’escortent devant le Tétrarque.

Celui-ci descend de son siège et tourne autour de Jésus en écoutant les accusations de ses ennemis. Il sourit et se moque. Puis il feint une pitié et un respect qui ne troublent pas plus le Martyr que ses railleries.

« Tu es grand, je le sais. Je t’ai suivi et je me suis réjoui que Kouza soit ton ami et Manahen ton disciple. Moi… les soucis de l’Etat… Mais je désire vivement te dire combien tu es grand… et te demander pardon… L’œil de Jean… sa voix… m’accusent et sont toujours devant moi. Tu es le saint qui efface les péchés du monde. Absous-moi, ô Christ. »

Jésus se tait.

« J’ai entendu dire qu’on t’accuse de t’être dressé contre Rome. Mais n’es-tu la verge promise[5] pour frapper Assur ? »

Jésus se tait.

« On m’a dit que tu prophétises la fin du Temple et de Jérusalem. Mais le Temple n’est-il pas éternel comme esprit, puisqu’il est voulu par Dieu, qui est éternel ? »

Jésus se tait.

« Tu es fou ? Tu as perdu ton pouvoir ? Satan te coupe la parole ? Il t’a abandonné ? »

Hérode rit franchement.

604.26

Mais sur son ordre, des serviteurs accourent avec un lévrier dont la jambe est cassée et qui glapit lamentablement, et un palefrenier simple d’esprit dont la tête est pleine d’eau, un avorton qui bave, le jouet des serviteurs.

Les scribes et les prêtres fuient en criant au sacrilège à la vue du chien sur un brancard.

Hérode, faux et railleur, explique :

« C’est le préféré d’Hérodiade. Un cadeau de Rome. Il s’est cassé une patte hier et elle pleure. Ordonne qu’il guérisse. Fais un miracle. »

Jésus le regarde avec sévérité et se tait.

« Je t’ai offensé ? Alors celui-ci : c’est un homme, bien qu’il ne soit guère plus qu’une bête. Donne-lui l’intelligence, toi qui es l’Intelligence du Père… N’est-ce pas ce que tu dis ? »

Et il rit, offensant.

Autre regard plus sévère de Jésus, et même silence…

« Cet homme est trop abstinent et le voilà maintenant abruti par les mépris. Amenez du vin et des femmes, et qu’on le délie. »

Pendant qu’on libère Jésus de ses liens, des serviteurs en grand nombre apportent des amphores et des coupes, des danseuses entrent… couvertes de rien. Une frange multicolore de lin ceint pour unique vêtement leur mince personne de la taille aux hanches. Rien d’autre. Bronzées parce qu’africaines, souples comme de jeunes gazelles, elles commencent une danse silencieuse et lascive.

Jésus repousse les coupes et ferme les yeux sans mot dire. La cour d’Hérode rit de son indignation.

« Prends celle que tu veux. Vis donc ! Apprends à vivre !… » insinue Hérode.

Jésus est une vraie statue. Les bras croisés, les yeux fermés, il ne bouge pas même quand les danseuses impudiques le frôlent de leurs corps nus.

« Cela suffit. Je t’ai traité en Dieu, et tu n’as pas agi en Dieu. Je t’ai traité en homme, et tu n’as pas agi en homme. Tu es fou. Un vêtement blanc ! Revêtez-le de celui-ci pour que Ponce Pilate sache que le Tétrarque a jugé son sujet fou. Centurion, tu diras au Proconsul qu’Hérode lui présente humblement son respect et vénère Rome. Allez. »

Alors Jésus, attaché de nouveau, sort avec une tunique de lin qui lui arrive aux genoux par dessus son vêtement rouge de laine.

Et ils reviennent chez Pilate.

604.27

Maintenant la centurie fend non sans peine la foule, qui ne s’est pas lassée d’attendre devant le palais proconsulaire. Il est étrange de voir une foule si nombreuse en ce lieu et dans le voisinage, alors que le reste de la ville paraît vide. Jésus voit les bergers en groupe ; ils sont au complet : il y a là Isaac, Jonathas, Lévi, Joseph, Elie, Matthias, Jean, Siméon, Benjamin et Daniel, avec un petit groupe de Galiléens parmi lesquels je reconnais Alphée et Joseph, fils d’Alphée, ainsi que deux autres que je ne connais pas, mais leur coiffure me laisse croire qu’ils sont juifs. Plus loin, il aperçoit Jean qui s’est glissé à l’intérieur du vestibule, à demi caché derrière une colonne, avec un Romain, probablement un serviteur. Il sourit à celui-ci et à ceux-là… Ses amis… Mais que sont ces quelques amis, et Jeanne, Manahen, ou Kouza au milieu d’un océan de haine qui bout ?…

604.28

Le centurion salue Ponce Pilate et fait son rapport.

« Encore là ? Maudite race ! Faites avancer la populace et amenez ici l’accusé. Ah ! Quel ennui ! »

Il s’avance vers la foule en s’arrêtant toujours au milieu du vestibule.

« Hébreux, écoutez. Vous m’avez amené cet homme comme fauteur de troubles. Devant vous, je l’ai examiné, et je n’ai trouvé en lui aucun des crimes dont vous l’accusez. Hérode lui non plus n’a rien vu de coupable, et il nous l’a renvoyé. Il ne mérite pas la mort. Rome a parlé. Cependant, pour ne pas vous déplaire en vous enlevant votre amusement, je vais vous donner Barabbas[6] en échange.

Et lui, je le ferai frapper par quarante coups de bâton. Cela suffit.

– Non, non ! Pas Barabbas ! Pas Barabbas ! Pour Jésus il faut la mort ! Une mort horrible ! Libère Barabbas et condamne le Nazaréen.

– Ecoutez ! J’ai parlé de coups de bâton. Cela ne suffit pas ? Je vais le faire flageller alors ! C’est atroce, savez-vous ? On peut en mourir. Qu’a-t-il fait de mal ? Je ne trouve aucune faute en lui et je le délivrerai.

– Crucifie-le ! Crucifie-le ! A mort ! Tu protèges les criminels ! Païen ! Satan toi aussi ! »

La foule s’avance par dessous et le premier rang de soldats se déforme dans le heurt, car ils ne peuvent se servir de leurs lances. Mais le second rang, descendant d’un degré, fait tourner les lances et dégage ses compagnons.

« Qu’on le flagelle, ordonne Pilate à un centurion.

– Combien de coups ?

– Comme bon te semble… Le tout est d’en finir. Tout cela m’ennuie. Va… »

604.29

Jésus est emmené par quatre soldats dans la cour au-delà de l’atrium. Au milieu de cette cour pavée de marbres de couleur, il y a une haute colonne semblable à celle du portique. A environ trois mètres du sol, un bras de fer dépasse d’au moins un mètre et se termine en anneau. On y attache Jésus, mains jointes au-dessus de la tête, après l’avoir fait déshabiller. Il ne garde qu’un petit caleçon de lin et ses sandales. Les mains, attachées au niveau des poignets, sont élevées jusqu’à l’anneau, de façon que, malgré sa haute taille, il ne touche le sol que de la pointe des pieds… Cette position doit être une torture.

J’ai lu, je ne sais où, que la colonne était basse et que Jésus se tenait courbé. C’est possible. Moi, je dis ce que je vois.

Derrière lui se place un bourreau au net profil hébraïque, devant lui un autre personnage semblable. Ils sont armés d’un fouet composé de sept lanières de cuir, attachées à un manche et qui se terminent par un martelet de plomb. Rythmiquement, comme pour un exercice, ils se mettent à frapper, l’un devant, l’autre derrière, de manière que le tronc de Jésus se trouve pris dans un tourbillon de coups de fouets.

Indifférents, les quatre soldats auxquels il a été remis se sont mis à jouer aux dés avec trois autres qui se sont joints à eux. Et les voix des joueurs suivent la cadence des fouets, qui sifflent comme des serpents puis résonnent comme des pierres lancées sur la peau tendue d’un tambour. Ils frappent le pauvre corps si mince et d’un blanc de vieil ivoire de Jésus. D’abord zébré d’un rosé de plus en plus vif, puis violet, il se couvre de traces d’indigo gonflées de sang, qui se rompent en laissant couler du sang de tous côtés. Ils frappent en particulier le thorax et l’abdomen, mais il ne manque pas de coups donnés aux jambes et aux bras et même à la tête, pour qu’il ne reste pas un lambeau de la peau qui ne souffre pas.

Et pas une plainte… S’il n’était pas soutenu par les cordes, il tomberait. Mais il ne tombe pas et ne gémit pas. Seulement, après une grêle de coups, sa tête pend sur sa poitrine comme s’il s’évanouissait.

« Arrête-toi ! Il doit être tué vivant » bougonne un soldat.

Les deux bourreaux s’arrêtent et essuient leur sueur.

« Nous sommes épuisés » disent-ils. « Donnez-nous notre paye, pour que nous puissions boire et nous désaltérer…

– C’est la potence que je vous donnerais ! Mais prenez… ! »

Et le décurion jette une grande pièce à chacun des deux bourreaux.

« Vous avez bien travaillé. Il ressemble à une mosaïque. Titus, tu dis que c’était vraiment lui, l’amour d’Alexandre[7] ? Dans ce cas, nous l’en informerons pour qu’il en fasse le deuil. Détachons-le un peu. »

604.30

Une fois délié, Jésus s’abat sur le sol comme s’il était mort. Ils le laissent là, le heurtant de temps en temps de leurs pieds chaussés de caliges pour voir s’il gémit.

Mais lui se tait.

« Est-il possible qu’il soit mort ? Il est jeune et c’est un artisan, m’a-t-on dit… or on dirait une dame délicate.

– Je vais m’en occuper » propose un soldat.

Il l’assied, le dos appuyé à la colonne. Des caillots de sang restent à l’endroit où Jésus se trouvait… Puis il se dirige vers une fontaine qui coule sous le portique, remplit d’eau une cuvette et la renverse sur la tête et le corps de Jésus.

« Voilà ! L’eau fait du bien aux fleurs. »

Jésus soupire profondément et fait mine de se lever, mais il garde les yeux fermés.

« Bien ! Allons, mon mignon ! Ta dame t’attend !… »

Mais c’est en vain que Jésus appuie ses mains sur le sol pour tenter de se redresser.

« Allons ! Vite ! Tu es faible ? Voilà pour te redonner des forces » ironise un autre soldat.

Et du manche de sa hallebarde, il lui donne une volée de coups au visage et atteint Jésus entre la pommette droite et le nez, qui se met à saigner.

Jésus ouvre les yeux, il les tourne. Un regard voilé… Il fixe le soldat qui l’a frappé, s’essuie le sang avec la main, puis se lève avec effort.

« Habille-toi. Ce n’est pas décent de rester ainsi. Impudique ! »

Tous rient, en cercle autour de lui.

Il obéit sans mot dire. Il s’incline et lui seul sait ce qu’il souffre en se penchant ainsi vers le sol, couvert de contusions comme il l’est et avec des plaies qui s’ouvrent plus encore lorsque la peau se tend, et d’autres qui se forment à cause des cloques qui crèvent. Un soldat donne un coup de pied aux vêtements et les éparpille. Jésus titube vers l’endroit où ils sont tombés, mais chaque fois qu’il veut les reprendre, un soldat les repousse ou les lance dans une autre direction. Et Jésus, qui éprouve une souffrance aiguë, les suit sans dire un mot pendant que les soldats se moquent de lui en tenant des propos obscènes.

Il peut finalement se rhabiller. Il remet aussi son vêtement blanc, resté propre dans un coin. Il semble qu’il veuille cacher le rouge qui, hier seulement, était si beau et qui maintenant est sale et taché par le sang versé à Gethsémani. Avant d’enfiler sa tunique courte sur la peau, il s’en sert pour essuyer son visage mouillé et le nettoie ainsi de la poussière et des crachats. Le pauvre, le saint visage de Jésus, paraît alors propre, marqué seulement de bleus et de petites blessures. Il redresse sa coiffure tombée en désordre, et sa barbe, par un besoin inné d’être ordonné.

Puis il s’accroupit au soleil, car il tremble, mon Jésus… La fièvre commence à se glisser en lui avec ses frissons, et la faiblesse due au sang perdu, au jeûne, au long chemin se fait sentir.

604.31

On lui lie de nouveau les mains, et la corde revient le scier à l’endroit où l’on voit déjà un bracelet rouge de peau écorchée.

« Et maintenant ? Qu’en faisons-nous ? Moi, je m’ennuie !

– Attends. Les Juifs veulent un roi, nous allons leur en donner un. Celui-là… » dit un soldat.

Et il sort en courant, certainement dans une cour qui se trouve derrière, d’où il revient avec un fagot de branches d’aubépine sauvage. Elles sont encore flexibles, car le printemps garde les branches relativement souples, mais leurs épines longues et pointues sont bien dures. De leur dague, ils enlèvent les feuilles et les fleurs, ils plient les branches en forme de cercle et les enfoncent sur la pauvre tête de Jésus. Mais cette couronne barbare lui retombe sur le cou.

« Elle ne tient pas. Il la faut plus étroite. Retire-la. »

En l’enlevant, ils griffent les joues de Jésus en risquant de l’aveugler et arrachent ses cheveux. Ils la resserrent. Elle est maintenant trop étroite et, bien qu’ils l’enfoncent en faisant pénétrer les épines dans la tête, elle menace de tomber. Ils l’enlèvent de nouveau en lui arrachant d’autres cheveux. Ils la modifient encore. Finalement, elle va bien. Par devant, elle forme un triple cordon épineux, mais derrière, là où les extrémités des branches se croisent, c’est un vrai nœud d’épines qui pénètrent dans la nuque.

« Tu vois comme tu es beau ? Bronze naturel et vrais rubis. Regarde-toi, ô roi, dans ma cuirasse, bougonne celui qui a eu l’idée du supplice.

– La couronne ne suffit pas pour faire un roi. Il faut la pourpre et le sceptre. Dans l’écurie, il y a un roseau et aux ordures une chlamyde rouge. Va les chercher, Cornélius. »

Ils placent donc ce sale chiffon rouge sur les épaules de Jésus. Avant de mettre le roseau dans ses mains, ils lui en donnent des coups sur la tête en s’inclinant et en saluant : “ Salut, roi des Juifs ” et ils se tordent de rire.

Jésus les laisse faire. Il accepte de s’asseoir sur le “ trône ”, un bassin retourné, certainement employé pour abreuver les chevaux. Il se laisse frapper, railler, sans jamais parler. Il les regarde seulement… et c’est un regard d’une douceur et d’une souffrance si atroce que je ne puis le soutenir sans m’en sentir blessée au cœur.

604.32

Les soldats ne cessent leurs railleries qu’en entendant la voix acerbe d’un supérieur qui demande que l’on traduise le coupable devant Pilate.

Coupable ! Mais de quoi ?

Jésus est ramené dans l’atrium, maintenant couvert d’un précieux vélarium à cause du soleil. Il a encore la couronne, le roseau et la chlamyde.

« Avance, que je te montre au peuple. »

Jésus, bien que brisé, se redresse avec dignité. Oh ! comme il est vraiment roi !

« Ecoutez, Hébreux. L’homme est ici, je l’ai puni. Mais maintenant laissez-le aller.

– Non, non ! Nous voulons le voir ! Dehors ! Nous voulons voir le blasphémateur !

– Conduisez-le dehors et veillez à ce qu’on ne s’empare pas de lui. »

Et pendant que Jésus sort dans le vestibule et se montre dans le carré des soldats, Ponce Pilate le désigne de la main en disant :

« Voici l’homme. Voici votre roi. Cela ne suffit pas encore ? »

Le soleil d’une journée accablante, qui maintenant descend presque à pic — nous sommes juste entre tierce et sexte —, éclaire et met en relief les regards et les visages. Est-ce que ce sont des hommes ? Non, des hyènes enragées. Ils crient, montrent le poing, demandent la mort…

Jésus se tient debout. Et je vous assure que jamais il n’a eu une telle noblesse, pas même quand il faisait les miracles les plus puissants. Noblesse de la souffrance. Mais il est tellement divin que cela suffirait à le marquer du nom de Dieu. Mais pour dire ce nom, il faut être au moins des hommes. Or il n’y a pas d’hommes à Jérusalem aujourd’hui, seulement des démons.

Jésus tourne les yeux vers la foule, cherche, découvre quelques amis dans cette mer de visages haineux. Combien ? Moins de vingt amis parmi les milliers d’ennemis… Alors il incline la tête, frappé par cet abandon. Une larme tombe… puis une autre… encore une… La vue de ses pleurs ne suscite pas la pitié, mais une haine encore plus forte.

604.33

On le ramène dans l’atrium.

« Alors ? Laissez-le aller. C’est justice.

– Non. A mort ! Crucifie-le.

– Je vous donne Barabbas.

– Non. Le Christ !

– Dans ce cas, chargez-vous-en. Prenez sur vous de le crucifier, car moi je ne trouve aucune faute en lui qui justifie que je le fasse.

– Il s’est proclamé Fils de Dieu. Notre loi prescrit la mort pour celui qui se rend coupable d’un tel blasphème. »

Pilate devient pensif. Il rentre, et s’assied sur son petit trône. Il met la main à son front, son coude sur son genoux, et il scrute Jésus.

« Approche-toi » dit-il.

Jésus s’avance au pied de l’estrade.

« Est-ce vrai ? Réponds. »

Jésus se tait.

« D’où viens-tu ? Qu’est-ce que Dieu ?

– C’est le Tout.

– Et puis ? Que veut dire le Tout ? Qu’est le Tout pour l’homme qui meurt ? Tu es fou… Dieu n’existe pas. Moi, j’existe. »

Jésus se tait. Il a prononcé la grande parole à dire, puis il recommence à s’envelopper de silence.

604.34

Quelqu’un annonce :

« Ponce : l’affranchie de Claudia Procula demande à entrer. Elle a un écrit pour toi.

– Voici que les femmes s’en mêlent ! Qu’elle entre. »

Une Romaine entre et s’agenouille pour présenter une tablette de cire. Ce doit être celle où Procula prie son mari de ne pas condamner Jésus. La femme se retire à reculons pendant que Pilate lit.

« On me conseille d’éviter ton homicide. Est-ce vrai que tu es plus grand qu’un haruspice ? Tu me fais peur. »

Jésus se tait.

« Ne sais-tu pas que j’ai le pouvoir de te libérer ou de te crucifier ?

– Tu n’aurais aucun pouvoir s’il ne t’avait été donné d’en-haut. Aussi celui qui m’a mis entre tes mains est-il plus coupable que toi.

– Qui est-ce ? Ton Dieu ? J’ai peur… »

Jésus se tait. Pilate est sur des charbons ardents : il voudrait et ne voudrait pas. Il craint le châtiment de Dieu, il craint celui de Rome, il craint la vengeance des Juifs. Un moment, c’est la peur de Dieu qui l’emporte. Il va sur le devant de l’atrium et dit d’une voix tonitruante :

« Il n’est pas coupable.

– Si tu dis cela, tu es l’ennemi de César. Celui qui se fait roi est son ennemi. Tu veux libérer le Nazaréen. Nous en informerons César. »

Pilate est pris par la peur de l’homme.

« Vous voulez sa mort, en somme ? Soit ! Mais que le sang de ce juste ne soit pas sur mes mains. »

Et, s’étant fait apporter un bassin, il se lave les mains en présence du peuple, qui paraît pris de frénésie et crie :

« Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants. Nous ne le craignons pas. A la croix ! A la croix ! »

604.35

Ponce Pilate retourne sur son trône, il appelle le centurion Longinus et un esclave. Il se fait apporter par l’esclave une table sur laquelle il pose une pancarte et y fait écrire : “ Jésus de Nazareth, Roi des Juifs. ” Puis il la montre au peuple. Beaucoup s’exclament :

« Non, pas cela : pas roi des Juifs, mais : il s’est dit le roi des Juifs.

– Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit » déclare durement Pilate.

Puis, debout, il étend les mains les paumes en avant et en bas et ordonne :

« Qu’il aille à la croix. Soldat, va préparer la croix. » (Ibis ad crucem ! I, miles, expedi crucem).

Puis il descend, sans même plus se retourner vers la foule agitée, ni vers le pâle Condamné. Il sort…

Jésus reste au milieu de l’atrium sous la garde des soldats, attendant la croix.

Le 10 mars 1944. Vendredi.

604.36

Jésus dit :

« Je veux te faire méditer le passage qui se rapporte à mes rencontres avec Pilate.

Jean a été presque toujours présent ou du moins très proche, ce qui fait de lui le témoin et le narrateur le plus exact. Il raconte comment, au sortir de la maison de Caïphe, je fus amené au Prétoire. Et il précise “ de bon matin ”. En fait, tu l’as vu, le jour commençait à peine. Il précise aussi : “ Eux (les Juifs) n’entrèrent pas pour ne pas se contaminer et pour pouvoir manger la Pâque. ” Hypocrites, comme toujours, ils pensaient se contaminer en piétinant la poussière de la maison d’un païen, mais ils ne trouvaient pas que tuer un innocent était un péché. Et, l’âme satisfaite par le crime accompli, ils purent, mieux encore, goûter la Pâque.

Ils ont, eux aussi, de nombreux imitateurs. Tous ceux qui intérieurement agissent mal et extérieurement professent le respect pour la religion et l’amour pour Dieu, leur ressemblent. Des formules, des formules, et pas de religion vraie ! Ils m’inspirent répugnance et indignation.

Les Juifs n’entrant pas chez Pilate, celui-ci sortit pour entendre ce qu’avait cette foule vociférante. Expert comme il l’était en matière de gouvernement et de jugement, il comprit dès le premier regard que le coupable n’était pas moi, mais ce peuple ivre de haine. La rencontre de nos regards fut une lecture réciproque de nos cœurs. Je jugeai l’homme pour ce qu’il était[8], et lui me jugea pour ce que j’étais. J’éprouvai pour lui de la pitié parce que c’était un faible. Il éprouva pour moi de la pitié parce que j’étais un innocent. Il chercha à me sauver dès le premier instant. Et comme c’était uniquement à Rome qu’était déféré et réservé le droit d’exercer la justice envers les malfaiteurs, il tenta de me sauver en disant : “ Jugez-le selon votre Loi. ”

604.37

Hypocrites une seconde fois, les Juifs ne voulaient pas prononcer de condamnation. Il est vrai que Rome avait le droit de juger, mais quand, par exemple, Etienne fut lapidé, Rome dominait toujours à Jérusalem et, malgré cela, ils prononcèrent le jugement et exécutèrent le supplice sans se soucier de Rome. Mais pour moi, ils avaient non pas de l’amour, mais de la haine et de la peur ; ils ne voulaient pas croire que j’étais le Messie, mais ne voulaient pas me tuer matériellement au cas où je l’aurais été. C’est pourquoi ils agirent d’une manière différente et m’accusèrent d’être un fauteur de troubles contre la puissance de Rome — vous diriez : “ rebelle ” —, pour obtenir que Rome me juge.

Dans leur salle infâme, et plusieurs fois pendant les trois ans de mon ministère, ils m’avaient accusé d’être blasphémateur et faux prophète ; comme tel, j’aurais dû être lapidé, ou tué d’une manière ou d’une autre. Mais cette fois, pour ne pas accomplir matériellement le crime dont ils sentaient instinctivement qu’ils seraient punis, ils le firent accomplir par Rome en m’accusant d’être malfaiteur et rebelle.

Rien de plus facile, quand les foules sont perverties et les chefs soumis à Satan, que d’accuser un innocent pour défouler leur passion de férocité et d’usurpation, et de supprimer celui qui représente un obstacle et un jugement.

Nous sommes revenus aux temps de cette époque. De temps en temps, et toujours après une incubation d’idées corrompues, le monde explose en de telles manifestations de perversité. Comme si elle était toute en état de gestation, la foule, après avoir nourri dans son sein son monstre avec des doctrines de fauves, le met au jour pour qu’il se révèle, qu’il dévore d’abord les meilleurs, puis se dévore elle-même.

604.38

Pilate rentre au Prétoire, m’appelle auprès de lui et m’interroge. Il avait déjà entendu parler de moi. Certains de ses centurions répétaient mon nom avec un amour reconnaissant, les larmes aux yeux et le sourire au cœur, et parlaient de moi comme d’un bienfaiteur. Dans leurs rapports au Préteur, lorsqu’on les interrogeait sur ce prophète qui attirait à lui les foules et prêchait une doctrine nouvelle qui traitait d’un royaume étrange, inconcevable à une mentalité païenne, ils avaient toujours répondu que j’étais un homme doux, bon, qui ne cherchait pas les honneurs de cette terre, et qui inculquait et pratiquait le respect et l’obéissance aux autorités. Plus sincères que les Juifs, ils voyaient la vérité et déposaient en sa faveur.

Le dimanche précédent, attiré par les cris de la foule, il s’était avancé sur la route et avait vu passer sur une jeune ânesse un homme désarmé qui bénissait, entouré d’enfants et de femmes. Il avait compris que cet homme n’aurait pu constituer un danger pour Rome.

Il veut donc savoir si je suis roi. Avec son ironique scepticisme païen, il voulait rire un peu de ce roi qui chevauche un âne, qui a pour courtisans des enfants nu-pieds, des femmes souriantes, des hommes du peuple, ce roi qui, depuis trois ans, prêche qu’il ne faut pas avoir d’attirance pour les richesses et le pouvoir, et qui ne parle d’autres conquêtes que de celles de l’esprit et de l’âme. Qu’est l’âme pour un païen ? Même ses dieux n’ont pas d’âme. Et l’homme pourrait-il en avoir une ? Maintenant aussi ce roi sans couronne, sans palais, sans cour, sans soldats, lui répète que son royaume n’est pas de ce monde. C’est si vrai qu’aucun ministre et aucune troupe ne se lèvent pour défendre leur roi et l’arracher à ses ennemis.

Pilate, assis sur son siège, me scrute : je suis une énigme pour lui. S’il débarrassait son âme des soucis humains, de l’orgueil de sa charge, de l’erreur du paganisme, il comprendrait tout de suite qui je suis. Mais comment la lumière pourrait-elle pénétrer là où trop de préjugés bouchent les ouvertures pour empêcher la lumière d’entrer ?

604.39

Il en est toujours ainsi, mes enfants, maintenant encore. Comment Dieu et sa lumière pourraient-ils entrer là où il n’y a plus de place pour eux, là où les portes et les fenêtres sont barricadées et défendues par l’orgueil, l’humanité, par le vice, par l’usure, par tant de gardiens au service de Satan contre Dieu ?

Pilate ne peut comprendre ce qu’est mon royaume. Et ce qui est plus douloureux, il ne demande pas que je le lui explique. A mon invitation à lui faire connaître la vérité, lui, l’indomptable païen, répond : “ Qu’est-ce que la vérité ? ”, et il laisse tomber la question en haussant les épaules.

Oh ! mes enfants ! mes enfants ! mes Pilate de maintenant ! Vous aussi, comme Ponce Pilate, vous laissez tomber, en haussant les épaules, les questions les plus vitales. Elles vous semblent inutiles, dépassées. Qu’est-ce que la vérité ? De l’argent ? Non. Des femmes ? Non. Le pouvoir ? Non. La santé physique ? Non. La gloire humaine ? Non. Dans ce cas, laissons-la tomber. Cette chimère ne mérite pas que l’on coure après elle. Argent, femmes, puissance, santé, confort, honneurs, voilà des choses concrètes, utiles, à aimer et à atteindre de toutes façons. C’est ainsi que vous raisonnez. Et, pires en cela qu’Esaü, vous troquez les biens éternels pour un aliment grossier qui nuit à votre santé physique et qui vous nuit pour votre salut éternel. Pourquoi ne persistez-vous pas à demander : “ Qu’est-ce que la vérité ” ? Elle, la Vérité, ne demande qu’à se faire connaître pour vous instruire à son sujet. Elle est devant vous comme pour Pilate, et elle vous observe avec les yeux d’un amour suppliant en vous implorant : “ Interroge-moi, je t’éclairerai ”.

Tu vois comment je regarde Pilate ? Je vous regarde tous ainsi. Et si j’ai un regard d’amour pour celui qui m’aime et demande à entendre mes paroles, je considère avec un amour affligé celui qui ne m’aime pas, ne me cherche pas, ne m’écoute pas. Mais c’est toujours de l’amour, car l’Amour est ma nature.

604.40

Pilate me laisse là où je suis sans m’interroger davantage, et il va trouver les mauvais qui parlent plus fort et s’imposent par leur violence. Et il les écoute, ce malheureux qui ne m’a pas écouté et qui a repoussé d’un haussement d’épaule mon invitation à connaître la vérité. Il écoute le mensonge. L’idolâtrie, quelle qu’en soit la forme, est toujours portée à respecter et à accepter le mensonge, quel qu’il soit. Et le mensonge, accepté par un faible, l’amène au crime.

Cependant Pilate, sur le seuil du crime, veut encore me sauver à plusieurs reprises. C’est alors qu’il m’envoie à Hérode. Il sait bien que le roi rusé, qui louvoie entre Rome et son peuple, agira de manière à ne pas blesser Rome et à ne pas heurter le peuple juif. Mais, comme tous les faibles, il recule de quelques heures la décision qu’il ne se sent pas en mesure de prendre, dans l’espoir que l’émeute se calmera.

Je vous l’ai dit[9] : “ Que votre parole soit : oui, oui ; non, non. ” Mais lui ne m’a pas entendu ou si quelqu’un le lui a répété, il a haussé les épaules comme d’habitude. Pour triompher dans le monde, pour obtenir honneurs et profits, il faut savoir faire un non d’un oui, ou un oui d’un non selon, que le bon sens (lis : le sens humain) le conseille.

Combien de Pilate compte le vingtième siècle ! Où sont les héros du christianisme qui disaient oui, constamment oui, à la vérité et pour la vérité, et non, constamment non, au mensonge ? Où sont les héros qui savent affronter le danger et les événements avec la force de l’acier et avec une sereine promptitude et sans atermoiement, car le bien, il faut l’accomplir tout de suite et fuir tout de suite le mal sans “ mais ” et sans “ si ” ?

604.41

A mon retour de chez Hérode, Pilate a tenté une nouvelle transaction : la flagellation. Qu’espérait-il ? Ne savait-il pas que la foule est un fauve qui devient plus féroce à la vue du sang ? Mais je devais être brisé pour expier vos péchés de la chair. Et je fus brisé. Il n’y a pas une partie de mon corps qui n’ait été frappée. Je suis l’Homme dont parle Isaïe. Et au supplice ordonné par Pilate s’ajouta celui qui ne l’était pas, mais qui fut suscité par la cruauté humaine : les épines.

Vous le voyez, hommes, votre Sauveur, votre Roi, couronné de douleur pour vous libérer la tête de tant de fautes qui y fermentent ? Réfléchissez-vous à la torture qu’a subie ma tête innocente pour expier pour vous, pour vos péchés toujours plus atroces de pensée qui se transforment en actes ? Vous qui vous offensez même quand il n’y a pas de motif de le faire, regardez le Roi offensé : et il est Dieu, avec son dérisoire manteau de pourpre déchiré, son sceptre de roseau et sa couronne d’épines. Il a beau être déjà mourant, ils le fouettent encore de leurs mains et de leurs moqueries. Et vous n’en éprouvez pas de pitié. Comme les Juifs, vous continuez à me montrer le poing et à crier : “ Dehors, dehors ! Nous n’avons pas d’autre Dieu que César ”, ô idolâtres qui n’adorez pas Dieu, mais vous-mêmes, et parmi vous celui qui est le plus autoritaire. Vous ne voulez pas du Fils de Dieu. Pour vos crimes, il ne vous aide pas. Satan est plus serviable. Aussi vous préférez Satan. Du Fils de l’homme, vous avez peur, comme Pilate. Et quand vous le sentez vous dominer par sa puissance, et s’agiter par la voix de la conscience qui vous fait des reproches en son nom, vous demandez comme Pilate : “ Qui es-tu ? ”

Qui je suis, vous le savez. Même ceux qui me nient savent ce que je suis et qui je suis. Ne mentez pas. Vingt siècles m’entourent, mettent en lumière qui je suis et vous font connaître mes prodiges. Pilate est plus pardonnable. Pas vous, qui avez un héritage de vingt siècles de christianisme pour soutenir votre foi ou pour vous l’inculquer, et ne voulez rien savoir. Pourtant je me suis montré plus sévère avec Pilate qu’avec vous. Je ne lui ai pas répondu. Avec vous je parle et, malgré cela, je ne réussis pas à vous persuader que je suis le Christ, et que vous me devez adoration et obéissance.

Vous m’accusez même d’être votre ruine, parce que je ne vous écoute pas. Vous dites que vous perdez la foi à cause de cela. Oh ! menteurs ! Où est-elle, votre foi ? Où est-il, votre amour ? Quand donc priez-vous et vivez-vous avec amour et foi ? Etes-vous des grands ? Rappelez-vous que vous êtes tels parce que je le permets. Etes-vous des anonymes dans la foule ? Rappelez-vous qu’il n’y a pas d’autre Dieu que moi. Personne n’est plus grand que moi et personne n’existait avant moi. Rendez-moi donc ce culte d’amour qui me revient et je vous écouterai, car vous ne serez plus des bâtards, mais des enfants de Dieu.

604.42

J’en viens à la dernière tentative de Pilate pour me sauver la vie, en admettant qu’il ait pu la sauver après l’impitoyable et illimitée flagellation que j’ai subie. Il me présente à la foule : “ Voilà l’Homme ! ” Je lui fais humainement pitié. Il espère dans la pitié de la foule. Mais devant la dureté qui résiste et la menace qui avance, il ne sait pas accomplir un acte surnaturellement — juste et bon par conséquent —, et dire : “ Je le libère parce qu’il est innocent. C’est vous qui êtes coupables, et si vous ne vous dispersez pas, vous allez connaître la rigueur de Rome. ” C’est cela qu’il devait dire s’il avait été juste sans calculer le mal qui pouvait lui en venir par la suite.

Pilate n’est pas vraiment bon. Longinus l’est, lui qui, bien que moins puissant que le Préteur et moins défendu — il est au milieu du chemin, entouré de peu de soldats et d’une multitude ennemie —, ose me défendre, m’aider, m’accorder du repos, me réconforter par la présence des saintes femmes, demander l’intervention de Simon de Cyrène pour m’aider, et enfin permettre à ma Mère de venir au pied de la croix. Celui-là fut un héros de la justice et devint ainsi un héros du Christ.

Sachez-le, ô hommes qui vous préoccupez uniquement de votre confort matériel, Dieu intervient même pour ses besoins quand il vous voit fidèles à la justice, qui est une émanation de Dieu. Je récompense toujours celui qui agit avec rectitude. Je défends celui qui me défend. Je l’aime et le secours. Je suis toujours celui qui a dit[10] : “ Qui donnera un verre d’eau en mon nom aura sa récompense. ” A qui me donne de l’amour – cette eau qui désaltère mes lèvres de Martyr divin –, je me donne moi-même, avec ma protection et ma bénédiction. »

604.1

Começa o caminho doloroso pela pequena estrada pedregosa que conduz da pracinha onde Jesus foi capturado ao Cedron; e deste, por outra pequena estrada, até à cidade… E logo começam as chalaças e as crueldades.

Jesus, com os pulsos amarrados como está, e até à cintura, como se Ele fosse doido perigoso, e com as pontas das cordas entregues a uns energúmenos cheios de ódio, é puxado para cá e para lá, como se fosse um trapo abandonado à ira de um bando de cachorrinhos. Mas se fossem cães os que estivessem fazendo aquilo, ainda seriam desculpáveis. Mas estes querem ter nomes de homens, ainda que de homens eles só tenham a aparência. E foi para fazer doer mais que eles pensaram em fazer uma amarração das duas pontas opostas das cordas, uma das quais está mantém ligados os pulsos de Jesus, e os arranha e corta com o atrito áspero; e a outra ponta, ligada à cintura dele, comprime os cotovelos contra o tórax, apertando e cortando o alto do abdome, torturando o fígado e os rins, onde eles fizeram um grande nó e, nesse ponto, o que segura as pontas das cordas bate de vez em quando, dando-lhe chicotadas e dizendo: – Arre! Vamos! Vamos, burrinho, trota! –, e lhe dá também seus pontapés, por detrás dos joelhos do Torturado, que com isso cambaleia, e só não cai porque as cordas puxadas de um lado e do outro o conservam de pé. Mas eles não evitam que, puxado para a direita por aquele que se ocupa das mãos e para a esquerda por aquele que cuida da cintura, Jesus vá esbarrar contra as muretas e troncos, e vá bater fortemente contra o parapeito da pequena ponte sobre o Cedron. Sua boca, contundida, está sangrando. Jesus levanta as mãos amarradas para limpar o sangue que lhe está sujando a barba, mas não diz nada. É verdadeiramente o cordeiro, que não morde a quem o tortura.

Nesse meio tempo, algumas pessoas desceram, para irem apanhar seixos e calhaus no leito do rio, e lá debaixo começa uma chuva de pedras sobre Jesus, alvo tão fácil. Como a passagem se torna difícil sobre a ponte pequena e estreita, as pessoas se aglomeram, criando um obstáculo para si mesmas, e as pedradas vão atingindo Jesus na cabeça, nas costas, e não somente Jesus, mas também os carrascos dele, que reagem, jogando bastões e as mesmas pedras que lhes jogaram. E tudo isso serve para ferir de novo a Jesus na cabeça e no pescoço. Mas eles já chegaram ao fim da ponte, e agora uma ruazinha estreita está projetando as sombras de suas casas sobre a confusão, pois a lua, que está para sumir, não desce com sua luz até aquele beco contorcido, e muitas tochas no parapeito já se apagaram. Mas o ódio arranja luzes para poder ver o pobre Mártir, ao qual até sua própria estatura ajuda a torturá-lo. Ele é o mais alto de todos. Por isso, é mais fácil atingi-lo, agarrá-lo pelos cabelos, obrigando-o a virar violentamente a cabeça para trás, e sobre a qual lhe jogam muitas coisas sujas, que sem dúvida vão escorrer até sua boca e por sobre os olhos, causando-lhe náusea e dor.

604.2

Começam a fazer a travessia do bairro de Ofel, deste bairro em que Ele fez tanto bem e que tratou com tantas carícias. A multidão em alvoroço desperta os que estão dormindo, incitando-os às soleiras das portas; e se as mulheres soltam gritos de dor e fogem aterrorizadas pelo que estão vendo, os homens, sim, justamente os homens que foram por Ele curados, socorridos ou atendidos com palavras amigas, ou abaixam as cabeças ficando indiferentes, ou ao menos fingindo indiferença, ou passam da curiosidade para o ódio, para o escárnio, para a ameaça, e até vão fazer parte do tétrico cortejo, para também eles poderem torturá-lo. Satanás já está em ação…

Um homem, um marido[1] que quer acompanhá-lo para ofendê-lo, é agarrado por sua mulher, que grita:

– Velhaco! Se estás vivo é por Ele, ó homem cheio de sujeira e podridão. Lembra-te disso!

Mas a mulher é dominada pelo homem, que bate nela bestialmente, joga-a no chão e depois sai correndo para alcançar o Mártir, sobre cuja cabeça ele dá uma pedrada.

Outra mulher, já velha, procura barrar a passagem a seu filho, que corre com cara de hiena e com um bastão para ele também feri-lo, e lhe grita:

– Assassino do teu Salvador é que tu não serás, enquanto eu estiver viva!

Mas a infeliz, atingida pelo filho com um pontapé brutal nas virilhas, cai por terra, gritando:

– Deicida e matricida! Por este seio que tu rasgas pela segunda vez e pelo Messias que tu feres, que sejas amaldiçoado.

604.3

A cena vai aumentando sempre mais em violência, à medida que vão chegando mais perto da cidade.

Antes de chegarem aos muros — e já estão abertas as portas, e os soldados romanos com suas armas prontas estão observando onde e como vai-se formando o tumulto, preparados para intervir se o prestígio de Roma o exigisse — lá está João com Pedro. Eu creio que eles tenham chegado ali por algum atalho que tenham tomado passando a vau o Cedron acima da ponte, e indo velozmente bem à frente da multidão, que vai devagar, por causa de si mesma ao criar obstáculos para andar. Eles estão na sombra de um corredor, perto de uma pequena praça que fica antes dos muros. E estão com os mantos sobre as cabeças, fazendo um véu para seus rostos. Mas, quando Jesus chega, João deixa cair o seu manto e mostra sua face pálida e desfigurada ao livre clarão da lua, que ali ainda faz chegar sua luz antes de sumir atrás da colina, que está para lá dos muros e que eu ouço ser chamada Tofet pelos esbirros da captura. Pedro não tem coragem de descobrir-se. Mas vai para frente a fim de ser visto…

Jesus olha para os dois… e tem um sorriso de uma bondade infinita. Pedro gira sobre si mesmo e volta para o seu canto escuro, com as mãos sobre os olhos, todo encurvado, envelhecido, já transformado em um farrapo de homem. João fica corajosamente onde está, e somente quando a multidão barulhenta acabou de passar é que ele vai alcançar Pedro e o pega por um cotovelo, guia-o como se fosse alguém que guia seu pai cego, e entram os dois na cidade, indo atrás da turba que vai vociferando.

Ouço as exclamações assombradas, zombeteiras de alguns e as de compaixão dos soldados romanos. Há quem amaldiçoe por ter se levantado da cama por causa daquele idiota; há quem zombe dos judeus, capazes de prender “uma mulherzinha”; quem têm compaixão da Vítima, “pois Ele sempre foi bom”; e houve quem dissesse:

– Eu gostaria mais que me tivessem matado para não vê-lo naquelas mãos. Esse foi um grande. A minha estima é por duas coisas neste mundo: esse Homem e Roma.

– Por Júpiter! –exclama o de grau mais alto–. Eu não quero saber de aborrecimentos. Agora vou falar com o Alferes. Que ele pense em dizê-lo a quem deve. Eu não quero ser mandado a combater os Germanos. Estes hebreus são uns fedorentos, umas serpentes, umas sarnas. Mas aqui a vida está garantida, e perto de Pompéia eu tenho uma menina!…

604.4

Eu deixo todos para acompanhar Jesus, que vai andando pelo caminho que faz uma volta na subida que se dirige para o Templo. Contudo, eu estou vendo e compreendendo que a casa de Anás, para onde o querem levar, é e não é naquele labirinto, naquele aglomerado que é o Templo, pois este ocupa toda a colina de Sião. E esta fica nas extremidades, perto de uma série de paredões que parecem estar no limite da cidade, e que deste lugar se estendem com pórticos e pátios pelo lado do monte até chegar ao recinto do Templo verdadeiro e propriamente dito, isto é, daquele ao qual vão os israelitas para as suas diversas manifestações de culto. Um alto portão de ferro se abre na muralha. A ele acorrem e batem com força na porta essas hienas ávidas. E, mal a porta se lhes abre, eles, como um pé de vento em redemoinho, irrompem para dentro, quase derrubando e pisando na serva que foi abrir a porta e a escancaram completamente, a fim de que a turba vozeadora possa entrar. E, tendo esta entrado, eles a fecham e trancam, pois estão cheios de medo talvez de Roma ou dos seguidores do Nazareno. Os seus seguidores! Onde estão?…

A turba percorre o átrio da entrada, depois atravessa um amplo pátio, um corredor e um outro pátio com mais outro corredor, e vão arrastando Jesus por cima de três degraus e percorrendo de carreira uma série de pórticos elevada sobre um pátio, para poderem chegar mais depressa a uma rica sala onde está um homem, já de idade, vestido de sacerdote.

– Deus te console, Anás –diz aquele que parece ser o oficial, se é que oficial pode ser chamado o carrasco que foi comandando aqueles bandidos–. Eis aí o culpado. À tua santidade eu o confio, a fim de que Israel fique livre da culpa.

– Deus te abençoe pela tua sagacidade e pela tua fé.

Que bela sagacidade! Teria bastado uma palavra de Jesus para fazê-los cair por terra, como no Getsêmani.

604.5

– Quem és tu?

– Jesus de Nazaré, o Rabi, o Cristo. E tu me conheces. Não fiz nada no escuro.

– No escuro, não. Mas desencaminhaste as turbas com doutrinas tenebrosas. E o Templo tem o direito e o dever de tutelar a alma dos filhos de Abraão.

– A alma! Sacerdote de Israel, podes tu dizer que pela alma do menor ou do maior deste povo tu sofreste?

– E tu, então? Que foi que fizeste e que possa chamar-se um sofrimento?

– Que foi que Eu fiz? Por que me perguntas isso? Todo Israel fala. Desde a Cidade Santa ao mais pobre dos bairros até as pedras falam para dizerem o que foi que eu fiz. Eu dei a vista aos cegos: a vista dos olhos e do coração. Abri o ouvido aos surdos para as vozes da terra e as vozes do Céu. Fiz caminhar os estropiados e os paralíticos, para que começassem a marcha para Deus, desde a carne, e a continuassem pelo espírito. Eu purifiquei os leprosos: das lepras de que fala a Lei Mosaica e daquela que fazem o infectado aos olhos de Deus: os pecados. Eu ressuscitei os mortos, e não digo que seja grande coisa chamar de novo à vida uma carne, mas grande coisa é redimir um pecador, e Eu o fiz. Eu socorri os pobres, ensinando aos ávidos e ricos hebreus o preceito santo do amor, e permanecendo pobre, não obstante o rio de ouro que passou pelas minhas mãos; Eu sozinho enxuguei mais lágrimas do que todos vós, que sois possuidores de riquezas. Mas, afinal, Eu dei uma riqueza que não tem nome: o conhecimento da Lei, a certeza de que somos todos iguais e de que, aos olhos santos do Pai, igual é o pranto e o delito, que sejam derramados ou praticados pelo Tetrarca que pelo Pontífice, pelo mendigo ou pelo leproso que morre na estrada. Isso foi o que Eu fiz. E nada mais.

604.6

– Sabes que estás acusando a ti mesmo? Tu dizes: as lepras que tornam infectados aos olhos de Deus, mas não constam na Lei de Moisés. Tu insultas Moisés e insinuas que existem lacunas na Lei dele.

– A Lei não é dele. É de Deus. Isto é que é. Mais do que a lepra, que é uma desventura na carne que tem um fim, Eu julgo grave, e assim é, a culpa que é uma desventura eterna para o espírito.

– Tu ousas dizer que podes perdoar pecados. Como é que fazes isso?

– Se com um pouco de água lustral e o sacrifício de um carneiro é lícito e se pode crer que se anule a culpa, que ela fique espiada e se possa ficar livre dela, como é que não poderá fazê-lo o meu pranto, o meu Sangue e a minha vontade?

– Mas Tu não estás morto. Então, onde está o Sangue?

– Eu ainda não estou morto. Mas estarei, conforme está escrito. No Céu, desde quando Sião ainda não existia, desde quando Moisés ainda não existia, desde quando Jacó não existia, desde quando o Rei do mal mordeu o coração do homem, e o envenenou nele e em seus filhos. Está escrito na Terra no Livro em que estão as palavras dos profetas. Está escrito nos corações. No teu, no de Caifás e dos sinedritas, que não me perdoam, não, esses corações não me perdoam por ser bom. Eu os absolvo, antecipando o Sangue. Agora Eu realizo a absolvição com a purificação nele.

– Tu dizes que nós somos ávidos e ignorantes quanto ao preceito do amor…

– E não é verdade? Por que é que me matais? É porque tendes medo de que Eu vos destrone. Oh! Não temais. O meu Reino não é deste mundo. Eu vos deixo com uns patrões que têm todo poder. Mas o Eterno é que sabe quando se há de dizer o “Basta”, que vos fará cair fulminados…

– Como foi com Doras[2], não?

– Ele morreu de raiva. Não foi pelo raio do céu. Deus estava do outro lado, esperando-o para fulminá-lo.

– E Tu o ficas repetindo a mim, que sou parente dele? E tens essa coragem?

– Eu sou a Verdade. E a Verdade nunca é medrosa.

– Soberbo e doido!

– Não. Eu sou sincero. Tu me acusas de ofender-vos. Mas não tendes ódio, todos vós? Vós vos odiais uns aos outros. Agora o que vos está unindo é o ódio a Mim. Mas amanhã, quando me tiverdes matado, vosso ódio voltará para ficar entre vós, e mais feroz ainda, e vivereis com esta hiena nas costas e esta serpente no coração. Eu ensinei o amor. Por ter piedade do mundo. Eu ensinei a ser não ávidos, e ter misericórdia.

604.7

De que me acusas?

– Por teres inventado uma doutrina nova.

– Ó sacerdote! Israel já está cheio de novas doutrinas: os essênios têm a deles; os sadoquitas, a deles; os fariseus, a deles. E cada um tem a sua secreta que para um se chama prazer; para outro é o ouro; para outro, o poder, e cada um tem o seu ídolo. Mas Eu, não. Eu tenho restabelecido a espezinhada fé de meu Pai, o Deus Eterno, e simplesmente voltei a ensinar as dez proposições do Decálogo, gastando todas as forças dos meus pulmões para fazer que elas entrassem nos corações que não as conheciam mais.

– Que horror! Que blasfêmia! Não existe um Templo em Jerusalém? Seremos agora como os desterrados da Babilônia[3]? Responde.

– É isto mesmo que sois. E mais ainda. Aqui há um Templo. Sim. Um edifício. Deus não está nele. Ele fugiu de lá diante da abominação que se pratica em sua Casa. Mas por que é que me fazes tantas perguntas, se minha morte já está decidida?

– Nós não somos assassinos. Matamos, quando temos o direito disso, por uma culpa provada.

604.8

Mas eu quero salvar-te. Fala-me e eu te salvarei. Onde estão os teus discípulos? Se Tu os entregas, eu te deixo livre. Dá-me os nomes de todos, e antes os dos escondidos do que os conhecidos. Dize-me: Nicodemos é teu discípulo? E José? E Gamaliel? E Eleazar? E… Mas deste eu já sei. Não é preciso dizer. Mas fala. Tu bem sabes: eu posso te matar ou te salvar. Eu sou poderoso.

– Tu és uma lama, um lodo. Eu deixo à lama, ao lodo, o papel de espião. Eu sou a Luz.

Um dos esbirros lhe dá um soco.

– Eu sou Luz. Luz e Verdade. Eu falei abertamente ao mundo, ensinei nas sinagogas e no Templo, onde se reúnem os judeus, e não disse nada em segredo. Eu repito: Por que é que me interrogas? Interroga àqueles que ouviram o que Eu disse. Eles o sabem.

Um outro esbirro lhe dá uma bofetada, gritando:

– É assim que respondes ao Sumo Sacerdote?

– Eu estou falando a Anás. O Pontífice é Caifás. E Eu falo com o respeito devido a um ancião. Mas, se te parece que Eu falei mal, dize-me o que foi. E se não, por que me bates?

– Deixa-o falar.

604.9

Eu vou a Caifás. Vós, segurai-o aqui, até contraordem minha. E não deixeis que Ele fale com ninguém.

E Anás sai.

Jesus não fala nada. Nem mesmo com João, que ousa ficar na porta, desafiando aquela súcia de esbirros. Mas Jesus, sem dizer nada, lhe deve ter dado uma ordem, porque João, depois de um olhar aflito, sai de lá, e eu o perco de vista.

Jesus fica entre os esbirros. Estes lhe dão lambadas com a corda, escarram sobre Ele, dizem-lhe chalaças, dão-lhe pontapés, puxam-lhe os cabelos que ainda estão na cabeça. Finalmente chega um servo dizendo que devem levar o Prisioneiro à casa de Caifás.

E Jesus, amarrado e maltratado, sai de novo por baixo do pórtico e o percorre até um corredor, depois atravessa um pátio, no qual muita gente está se esquentando junto ao fogo, pois a noite foi dura e ventosa, nas primeiras horas desta sexta-feira. Aí estão agora Pedro e João, misturados com a multidão dos inimigos. E certamente eles precisam ter muita coragem para ficarem lá. Jesus olha para eles e tem uma sombra de sorriso em seus lábios, que estão inchados pelos muitos tapas recebidos.

É longo o caminho por entre pórticos, pátios e corredores. Mas que casas tinham esse pessoal do Templo?

Mas no recinto pontifical a multidão não entra. Ela é repelida no átrio de Anás. E Jesus vai sozinho, entre os esbirros e os sacerdotes.

604.10

Entra em uma grande sala, que parece perder sua forma retangular por causa da grande quantidade de cadeiras, fixadas com uns grampos nas paredes, mas deixando no centro um espaço vazio, para lá do qual há duas ou três cadeiras colocadas sobre estrados.

Enquanto Jesus ainda está para entrar, o rabi Gamaliel o alcança, e os guardas dão uma brusca arrancada no Prisioneiro, para que Ele abra caminho, pois o Rabi de Israel vai passar. Mas este, rígido como uma estátua, hierático, vai mais devagar, e mal movendo os lábios, sem olhar para ninguém, pergunta:

– Quem és Tu? Dize-o a mim.

E Jesus docemente lhe responde:

– Lê os Profetas e neles encontrarás resposta. O primeiro sinal está neles. E o outro está por vir.

Gamaliel recolhe o seu manto e entra. Atrás dele entra Jesus. E, enquanto Gamaliel vai para uma cadeira, Jesus é arrastado para o centro do átrio, de frente para o Pontífice. E ficam ali esperando, até que tenham entrado todos os membros do Sinédrio. Depois tem início a sessão. Mas Caifás vê duas ou três cadeiras desocupadas, e pergunta:

– Onde está Eleazar? E João?

Aí se levanta um jovem escriba, como me parece ser, inclina-se, e diz:

– Eles não quiseram vir. Aqui está o que escreveram.

604.11

– Que se conserve. Responderão por isso. 11Que é que têm os santos membros deste Conselho a dizer sobre esse homem?

– Eu vou falar. Na minha casa Ele violou o sábado. Deus é minha testemunha disso, se eu estiver mentindo. Ismael ben Fabi não mente nunca.

– É verdade isso, acusado?

Jesus fica calado.

– Eu o vi convivendo com meretrizes conhecidas. Fingindo-se profeta, Ele tinha feito do seu covil um lupanar e, pior ainda, com mulheres pagãs. Comigo estavam Sadoque, Calachebona e Naum, confidente de Anás. Eu estou dizendo a verdade, Sadoque e Calachebona? Se não estiver, desmenti-me.

– É verdade. É verdade.

– E, então, que dizes?

Jesus fica calado.

– Não lhe faltava ocasião para zombar de nós e fazer que de nós zombassem os outros. O povo já não nos ama por causa dele.

– Tu os odeias? Profanaste os membros santos.

Jesus fica calado.

– Este homem é um endemoninhado. Tendo voltado do Egito, Ele pratica a magia negra…

– Como o provas?

– Pelo meu crédito e pelas tábuas da Lei.

– Esta acusação é grave. Defende-te!

Jesus fica calado.

– O teu ministério é ilegal e tu sabes disso. E é passível de morte. Fala…

– Ilegal é esta nossa sessão. Levanta-te, Simeão, e vamos embora –diz Gamaliel.

– Mas, rabi, não estás ficando doido?

– Eu respeito as fórmulas. Não nos é lícito proceder como estamos procedendo. E disso eu farei uma acusação pública.

E o rabi Gamaliel sai, rígido como uma estátua, acompanhado por um homem de seus trinta e cinco anos, e que é parecido com ele.

604.12

Faz-se um pouco de tumulto e disso se aproveitam Nicodemos e José para falarem a favor do Mártir.

– Gamaliel tem razão. Ilícita é a hora, e ilícito é o lugar, e as acusações não são consistentes. Pode alguém acusá-lo de um notório desprezo da Lei? Eu sou amigo dele, e juro que sempre o achei respeitador da Lei –diz Nicodemos.

– E eu também. E, para não subscrever a um delito, eu cubro a minha cabeça, não por Ele, mas por nós, e saio.

E José se levanta de seu lugar para sair, e sai.

Mas Caifás brada:

– Ah! É assim que dizeis? Então, que venham as testemunhas juradas. Ouvi-as. E depois podereis ir-vos.

Entram dois tipos, que parecem delinquentes. Eles têm olhares desconfiados, um riso cruel e posturas aduladoras.

– Falai.

– Não é permitido ouvi-los juntos –grita José.

– Eu sou o Sumo Sacerdote. E o ordeno. E silêncio!

José dá um murro na mesa e diz:

– Desçam sobre ti as chamas do Céu! Desde este momento, fica sabendo que o ancião José é inimigo do Sinédrio e amigo do Cristo. E assim eu passo a informar ao Pretor que aqui se condena qualquer um à morte, sem contar com a permissão de Roma!

E ele sai violentamente, dando um empurrão a um fraco e jovem escriba, que o queria deter.

Nicodemos, mais pacato, sai sem dizer nada. E, ao sair, passa diante de Jesus e olha para Ele…

604.13

Há um novo tumulto. Estão com medo de Roma. Mas a vítima expiatória é sempre, e ainda, Jesus.

– Por causa de ti, olha tudo isso. Tu és o corruptor dos melhores dos judeus, Tu os tens prostituído.

Jesus se cala.

– Falem agora as testemunhas –grita Caifás.

– Sim, este homem fazia uso do… do… como é que se chama aquilo?

– Será o tetragrama?

– Sim! Isso mesmo! Ele evocava os mortos. Ensinava a revolta contra o sábado e a profanação do altar. Nós juramos que é assim. Ele dizia que queria destruir o Templo para edificá-lo de novo com ajuda dos demônios.

– Não. Ele dizia: Não será o homem que o edificará.

Caifás desce de sua cadeira e vai para perto de Jesus. Baixote, obeso, feio, fica parecendo um enorme sapo ao lado de uma flor. Porque Jesus, ainda que esteja ferido, contundido, sujo e despenteado, está ainda muito belo e majestoso:

– Não respondes? Não ouves que acusações fazem contra Ti? São horrendas. Fala, para afastares de ti a afronta deles!

Mas Jesus fica calado. Ele olha e se cala.

604.14

– Responde a mim, então. Eu sou o teu Pontífice. Em Nome do Deus vivo, eu te esconjuro. Dize-me: és Tu o Cristo, o Filho de Deus?

– Tu o disseste. Eu o sou. E vereis o Filho do homem sentado à direita do poder do Pai quando Ele vier sobre as nuvens do céu. Mas, afinal, por que é que me interrogas? Eu falei em público durante três anos. E nada falei ocultamente. Pergunta àqueles que me ouviram. Eles te dirão o que Eu disse e o que Eu fiz.

Um dos soldados, que o estão segurando, bate em sua boca, fazendo-a sangrar de novo, e grita:

– É assim que respondes, ó satanás, ao Sumo Pontífice?

E Jesus, com mansidão, responde a esse e àquele de antes:

– Se eu falei bem, por que é que me bates? E se Eu falei mal, por que é que não me dizes onde está o meu erro? Eu repito: Eu sou o Cristo, o Filho de Deus. Não posso mentir. O Sumo Sacerdote, o Eterno Sacerdote sou Eu. Somente Eu é que trago o verdadeiro Racional, sobre o qual está escrito: Doutrina e Verdade. E a estas Eu sou fiel. Até à morte, que é ignominiosa aos olhos do mundo, mas santa aos olhos de Deus, e até à feliz Ressurreição. Eu sou o Ungido. Pontífice e Rei Eu sou. E já estou para segurar o meu cetro, e com ele, como com uma peneira, Eu quero limpar a minha eira. Este Templo será destruído e ressurgirá, novo e santo. Porque este atual é corrompido, e Deus o entregou ao seu destino.

– Blasfemador! –todos gritam em coro–. Em três dias farás isso, ó doido e possesso?

– Este, não. Mas o meu ressurgirá, o Templo do Deus verdadeiro, vivo, santo, três vezes santo.

– Maldito! –gritam eles de novo, em coro.

Caifás levanta sua voz rouca e rasga suas vestes de linho, com gestos de um horror estudado, e diz:

– Que precisamos ouvir ainda? A blasfêmia está dita. Que é que faremos?

E todos em coro:

– Seja réu de morte!

E, com gestos de desprezo e de escândalo, eles saem da sala, deixando Jesus à mercê dos esbirros e do populacho, das falsas testemunhas, que lhe dão bofetadas com os punhos, sujando-o com escarros, cobrindo-lhe os olhos com um trapo, puxando-lhe violentamente os cabelos, jogando-o para um lado e para o outro, estando Ele com as mãos amarradas, de tal modo, que Ele esbarra contra as mesas, os bancos e as paredes e, enquanto isso, eles lhe vão perguntando:

– Quem foi que te bateu? Adivinha!

E tudo isso eles fazem muitas vezes, dando-lhe rasteiras, fazendo-o cair de bruços e se riem escancaradamente, ao verem como, com as mãos amarradas, Ele leva tempo para levantar-se.

604.15

Assim passam as horas, e os carrascos, cansados, pensam em tomar um pouco de repouso. Levam Jesus para um pequeno quarto, fazendo que Ele atravesse muitos pátios, ouvindo as chalaças da plebe que se reuniu no recinto das casas pontificais.

Jesus chega ao pátio onde está Pedro, ao lado de um fogo. E olha para ele. Mas Pedro evita aquele olhar. João não está mais lá. Eu não o vejo. Acho que ele foi-se embora com Nicodemos…

A aurora vem chegando com dificuldade e esverdeada. Foi dada uma ordem: que levem o Prisioneiro para o Salão do Conselho, para um processo mais legal. É nesse momento que Pedro nega pela terceira vez conhecer o Cristo, quando este passa já bem marcado pelos sofrimentos. E à luz esverdeada da aurora, a lividez de Jesus parece ainda maior sobre o rosto de cor térrea, com os olhos mais fundos e vidrados, um Jesus desfigurado pelas dores que lhe causa o mundo…

Um galo lança pelos ares ainda mal tocados pela aurora, o seu grito zombeteiro, sarcástico e gaiato. E precisamente no momento em que Jesus aparece, não se ouve outra coisa senão a voz rouca do Pedro, dizendo: “Eu juro, mulher, que não o conheço.” Suas palavras são secas, cortantes, e foi a elas que o galo respondeu, também com palavras secas, cortantes, como que brincando com elas.

Então Pedro sentiu um estremecimento. Girou sobre si mesmo, querendo fugir, mas foi logo dar de frente com Jesus, que está olhando para ele com uma grande compaixão, com uma dor tão amarga e intensa, que me rasga o coração, como se, depois disso fosse se dissolver, e para sempre, o meu Jesus. Pedro dá um soluço, e sai de lá, caindo em si, mas cambaleando como um ébrio. Ele foge atrás de dois servos que aparecem na estrada e desaparecem, descendo, pela estrada ainda meio escura.

Jesus é levado de novo para o tribunal. E todos, em coro, lhe repetem a pergunta capciosa:

– Em Nome do Deus verdadeiro, dize-nos: és tu o Cristo?

E, tendo recebido a mesma resposta de antes, eles o condenam à morte, e dão a ordem de conduzi-lo a Pilatos.

604.16

Jesus escoltado por todos os seus inimigos, menos Anás e Caifás, sai, tornando a passar por todos aqueles pátios do Templo nos quais muitas vezes havia falado, feito benefícios e curado. Ele atravessa o recinto de ameias, entra pelas ruas da cidade e, mais arrastado do que conduzido, desce para a cidade, que agora está cor de rosa, com o primeiro anúncio da aurora.

Eu acho que, com o único desejo de atormentá-lo por mais tempo, eles o façam ir por um longo giro errado para Jerusalém, passando de propósito pelos mercados, passando pela frente das estalagens e dos albergues cheios de gente que veio para a Páscoa. E, tanto as verduras jogadas fora pelos mercados como os excrementos dos animais que estão nas estalagens, tornam-se projéteis a serem jogados contra o Inocente, cujo rosto sempre vai aparecendo, cada vez mais, com maiores equimoses e pequenas lacerações sangrando, e sempre mais coberto pelas diferentes sujeiras, que sobre ele se esparziram. Seus cabelos, já pesados e um tanto espichados pelo suor de sangue e mais opacos, agora pendem despenteados, cobertos de palha e imundície, caindo sobre os olhos, desgrenhados para velar-lhe o rosto.

As pessoas do mercado, compradores e vendedores, deixam tudo parado, para acompanharem, não com amor, o Infeliz. Os moços das estrebarias, os servos dos albergues saem em grande número, surdos aos chamados e às ordens de suas patroas, às quais, para dizer a verdade, como quase todas as outras mulheres, se não são todas contrárias às ofensas, pelo menos são indiferentes àquele tumulto, e se retiram resmungando ao serem deixadas sozinhas com tanta gente a quem elas precisam atender.

O cortejo aos gritos vai aumentando de minuto a minuto, e até parece que, por uma repentina epidemia, os ânimos e as fisionomias mudem de natureza, tornando-se de delinquentes os ânimos. e as fisionomias, como máscaras de ferocidade nos rostos verdes de ódio, ou vermelhos de ira; suas mãos arranham, e suas bocas tomam a forma e emitem o uivo dos lobos; seus olhos ficam vesgos, vermelhos, estrábicos, como os dos loucos. Somente Jesus é sempre aquele, ainda que coberto com as imundícies espalhadas sobre seu corpo e alterado pela lividez e pelas inchações.

604.17

Perto de uma arquivolta, que estreita a rua como um anel, enquanto tudo se vai obstruindo e se tornando mais lento, um grito fende o ar: “Jesus!” Elias, o pastor, que procura abrir caminho, agitando um pesado cacete. Ele já está velho, mas valente, ameaçador e forte, e consegue chegar até o Mestre. Mas a multidão, vendo-se desbaratada pelo imprevisto assalto, aperta suas filas e vai separando, repelindo, até dominar aquele homem sozinho, que vem contra todo o populacho.

– Mestre! –ele grita, enquanto o redemoinho da multidão o absorve e o rejeita.

– Vai… A Mãe… Eu te abençoo…

Enquanto isso, o cortejo já passou além do ponto marcado. E, como a água que torna a encontrar largura depois de ter ficado presa, assim a multidão se despeja de modo tumultuado por sobre uma ampla alameda construída por cima de uma depressão, que fica entre duas colinas sobre cujas alturas há esplêndidos palácios de grandes senhores.

Vejo de novo o Templo sobre o alto de sua colina e compreendo agora que o giro ocioso, que fizeram que o condenado percorresse para que o pudessem insultar mais e fosse maior o número dos que zombavam dele, está chegando ao fim, voltando ao mesmo lugar de antes.

604.18

De um dos palácios, sai galopando um cavaleiro. O xairel vermelho, por cima da brancura do cavalo árabe e a imponência do seu aspecto, a espada brandida nua, de prancha ou para cortar, que está acima das cabeças, fazem que o cavaleiro pareça um arcanjo. Quando o cavalo empina ou corcoveia, fazendo dos cascos uma arma de defesa tanto para si mesmo como para o seu dono, sendo aquele o melhor dos meios para abrir caminho por entre o povo, e fazendo cair da cabeça do dono o véu de púrpura e ouro que o cobria, conservado preso por uma tira de ouro, então eu reconheci Manaém.

– Para trás! –grita ele–. Como tomais a liberdade de perturbar o repouso do Tetrarca?

Mas isso não é mais do que um drible para justificar a sua intervenção e sua tentativa de chegar até Jesus:

– Este homem… Deixai-me vê-lo… Afastai-vos, ou eu chamo os guardas…

O povo, pelo grande número de pranchadas, pelos coices do cavalo e pelas ameaças do cavaleiro, abre alas, e Manaém chega até o grupo onde está Jesus com os guardas do Templo que tomam conta dele.

– Fora! O tetrarca é mais do que vós, que sois uns servos sujos. Para trás! Eu quero falar com Ele.

E consegue isso batendo com sua espada no mais feroz dos carcereiros!…

– Mestre!…

– Obrigado. Mas vai. E que Deus te conforte!

E do modo que pode, estando com as mãos amarradas, Jesus faz um sinal de bênção.

A multidão fica assobiando de longe, mas logo que vê Manaém retirar-se, ela se vinga por ter sido repelida, com uma chuva de pedras e imundícies sobre o Condenado.

604.19

Pela alameda que fica na subida e já está toda aquecida pelo sol, vai-se à Fortaleza Antônia, cujo edifício já se vê de longe.

Ouve-se um grito agudo de mulher:

– Oh! O meu Salvador! Eu dou a minha vida pela dele, ó Eterno!

Jesus vira o rosto e vê, lá do alto do alpendre florido que adorna uma casa muito bonita, Joana de Cusa, entre as suas servas e servos, com os meninos Maria e Matias ao redor dela, estender os braços para o céu. Mas o Céu não escuta as orações hoje! Jesus eleva as mãos e faz um gesto de adeus e de bênção.

– À morte! À morte o blasfemador, o corruptor, o satã! À morte os amigos dele!

E os assobios silvam, as pedras são arremessadas com as fundas na direção do alto terraço. Não sei se alguém foi ferido. Ouço um grito muito agudo e depois vejo que o grupo se desfaz e desaparece.

E adiante, para frente, subindo… Jerusalém expõe suas casas ao sol. As casas estão vazias ou esvaziadas pelo ódio que impele a cidade inteira, com os seus habitantes naturais e com os postiços vindos para a Páscoa, contra um desamparado.

604.20

Alguns soldados romanos, formando um grupo, saem correndo da Fortaleza Antônia com suas hastas apontadas para a plebe, que, gritando, se dispersa. Ficam no meio da rua Jesus com os guardas e os chefes dos sacerdotes, os escribas e os anciãos do povo.

– Quem é esse homem? Que sedição é essa? Vós tereis que prestar contas a Roma –diz, com arrogância, um centurião.

– Ele é réu de morte segundo a nossa lei.

– E desde quando vos foi dado o direito sobre a espada e o sangue? –pergunta sempre o mais velho dos centuriões, com um rosto severo, verdadeiramente romano, com uma das faces marcada por uma cicatriz profunda. E ele fala com o desprezo e a náusea com que haveria falado se fosse a uns galeotes piolhentos.

– Nós sabemos que não temos tal direito. Somos fiéis dependentes de Roma…

– Ah! Ah! Ah! Escuta-os, Longino! Fiéis! Dependentes! Covardes! Eu vos daria como prêmio as flechas dos meus arqueiros.

– É nobre demais uma morte assim! Os lombos dos burros somente com o flagelo já ficam satisfeitos –responde, com uma fleuma irônica, Longino.

Os chefes dos sacerdotes, os escribas e os anciãos estão espumando veneno. Mas eles querem chegar ao seu escopo, e ficam calados, engolindo aquela ofensa sem darem sinal de a terem entendido, e, inclinando-se para os dois chefes, lhes pedem que Jesus seja levado a Pôncio Pilatos para que “o julgue e condene, de acordo com a bem notória e honesta justiça de Roma”.

– Ah! Ah! Escuta-os. Chegamos a ser mais sábios do que Minerva… Trazei-o aqui. E ide à frente. Sois uns chacais fedorentos. E irmos convosco, atrás de nós, é perigoso. Ide adiante!

– Não podemos.

– Por quê? Quando alguém acusa, deve apresentar-se diante do juiz com o acusado. Assim é a norma de Roma.

– A casa de um pagão é imunda para os nossos olhos, e nós já nos purificamos para a Páscoa.

– Desgraçados! Dizem que se contaminam se entram. Mas matar ao único hebreu que tem valor, que não é um chacal nem um réptil como sois vós, isto não vos suja? Pois bem. Ficai onde estais. E não deis nem um passo para frente, senão as hastas se cravarão em vós. Uma decúria ao lado do Acusado. As outras contra esta ralé fedorenta de bico mal lavado.

604.21

Jesus entra no pretório rodeado por dez soldados, que fazem um quadrado com as armas ao redor da sua pessoa. Os dois centuriões estão diante deles. E, enquanto Jesus se detém em um vasto vestíbulo para lá do qual há um pátio que se entrevê atrás de uma tenda que o vento agita, eles desaparecem atrás de uma porta.

Depois tornam a entrar com o Governador, vestido com uma toga alvíssima, sobre a qual traz um manto escarlate. Talvez fosse assim que se vestiam, quando representavam Roma oficialmente. Entra despreocupadamente, com um sorriso duvidoso em um rosto imberbe, esfrega nas mãos umas folhas de erva cidreira e as cheira com grande prazer. Vai a um relógio de sol e volta depois de ter olhado para ele. Joga uns grãos de incenso no braseiro, que está colocado aos pés de uma divindade. Manda que lhe levem água de cidra e faz uns gargarejos. Depois olha o penteado todo, usando um espelho de metal muito polido. Parece ter-se esquecido do condenado, que está esperando sua aprovação para ser morto. Isso daria raiva até às pedras.

Os hebreus, visto que o átrio está todo aberto na frente, e tendo sido aumentado em três altos degraus até acima do vestíbulo que se abre sobre a rua, já aumentado em três outros sobre a própria rua, veem muito bem tudo isso e vibram de fúria. Mas não ousam se rebelarem por medo das hastas e dos dardos.

Finalmente, depois de ter girado para cá e para lá, Pilatos vai ao encontro de Jesus, olha para Ele e pergunta aos dois centuriões:

– É este?

– É este.

– Que venham os seus acusadores!

E vai sentar-se na cadeira colocada sobre o estrado. Acima de sua cabeça, as insígnias de Roma se cruzam com suas águias douradas e com sua sigla poderosa.

– Eles não podem vir. Pois se contaminariam.

– É!!! Pois é melhor assim! Assim não teremos necessidade de rios de essência para limpar o lugar do cheiro de bodes. Fazei que, pelo menos, eles se aproximem. Aqui embaixo. E tomai cuidado para que não entrem, já que eles não o querem fazer. Esse homem deve ser um pretexto para a sedição.

Um soldado parte para ir levar a ordem do Procurador Romano. Os outros se enfileiram diante do átrio, a distâncias regulares, belos como umas estátuas novas de heróis.

604.22

Vêm na frente os chefes dos sacerdotes, os escribas e os anciãos, e saúdam com inclinações aduladoras, indo parar na pracinha que fica diante do pretório, para lá dos três degraus do vestíbulo.

– Falai e sede breves. Já estais culpados por haverdes perturbado a noite e conseguido a abertura das portas com violência. Mas eu vou verificar. E tanto os mandantes como os mandatários haverão de responder pela desobediência ao decreto.

Pilatos caminha na direção deles e para no vestíbulo.

– Nós viemos submeter a Roma, da qual tu representas o divino imperador, o nosso julgamento sobre este homem.

– Que acusações fazeis contra ele? Parece-me um inocente…

– Se não fosse um malfeitor não o teríamos trazido a ti.

E com um grande desejo de acusar eles avançam.

– Afastai esta plebe. Que fiquem seis passos para lá dos três degraus da praça. E as duas centúrias, às armas!

Os soldados obedecem prontamente, enfileirando-se cem deles sobre o degrau exterior mais alto, com as costas viradas para o vestíbulo, e os outros cem na pracinha sobre a qual se abre o portão de entrada para a casa de Pilatos. Eu disse portão: mas eu deveria ter dito corredor do arco triunfal, porque é uma abertura muito larga, limitada por uma cancela, que agora está escancarada, e que dá passagem para o átrio, indo-se pelo longo corredor do vestíbulo, que é longo pelo menos uns seis metros, de modo que se pode ver bem o que está acontecendo no átrio de cima. Para lá do amplo vestíbulo veem-se as faces bestiais dos judeus que, ameaçadores e satânicos, estão olhando para o interior, olhando do lado de lá da barreira armada que, lado a lado, como para um desfile, mostra duzentas pontas aos coelhos assassinos.

– Que acusação trazeis contra este homem, eu repito.

– Ele cometeu delito contra a Lei dos pais.

– E vós vindes me aborrecer por isso? Pegai-o, vós, e julgai-o segundo as vossas leis.

– Nós não podemos matar ninguém. Doutos nós não somos. O Direito hebraico é uma criança tola em comparação com o perfeito Direito de Roma. Como uns ignorantes e como sujeitos a Roma, que é mestra, temos necessidade de…

– Desde quando, até hoje, sois mel e manteiga?… Mas vós dissestes uma verdade, ó mestres da mentira! Vós tendes necessidade de Roma! Sim. Para vos verdes livres daquele homem que vos aborrece. Eu compreendo.

E Pilatos ri, olhando para o céu sereno, que se mostra como uma lousa de azul turquesa escura por entre as cândidas paredes de mármore do átrio:

– Dizei-me: em que ponto foi que Ele cometeu delito contra as vossas leis?

– Nós descobrimos que este homem ia introduzindo a desordem em nossa nação e que nos impedia de pagar o tributo a César, dizendo-se o Cristo, o rei dos Judeus.

604.23

Pilatos volta para perto de Jesus, que está no centro do átrio, deixado lá pelos soldados, amarrado, mas sem escolta, pois aparece bem clara a sua mansidão. E lhe pergunta:

– És tu o rei dos judeus?

– Dizes isso por ti mesmo ou por insinuação de outros?

– E por que queres que eu me importe com o teu reino? Será que eu sou judeu? A tua nação e os teus chefes te entregaram a mim para que eu julgue. Que foi que fizeste? Eu quero ser-te leal. Fala. É verdade que aspiras ao reino?

– O meu Reino não é deste mundo. Se ele fosse um reino do mundo, os meus ministros e os meus soldados teriam combatido para que os judeus não me prendessem. Mas o meu reino não é da terra. E tu sabes que Eu não tenho busco o poder.

– Isto é verdade. Eu sei. Isto me disseram. Contudo, tu não negas que és rei?

– Tu o dizes. Eu sou Rei. Para isso é que Eu vim a este mundo: para dar testemunho da verdade. Quem é amigo da verdade ouve a minha voz.

– E o que é a verdade? És tu um filosofo? Isso para nada serve diante da morte. Sócrates morreu do mesmo jeito.

– Contudo, ela lhe serviu durante a sua vida para bem viver. E até para morrer bem. E também a fim de ir para a segunda vida, sem deixar a fama de traidor das virtudes cívicas.

– Por Júpiter!

Pilatos, admirado, olha para ele por um momento. Depois retoma o sarcasmo dos céticos. Faz um gesto de estar aborrecido, vira-lhe as costas e volta para os judeus.

– Eu não acho nele nenhuma culpa.

A multidão começa a levantar um grande rumor e muita confusão, com medo de perder sua presa e o espetáculo que ia ser o suplício. E ela grita:

– Ele é um rebelde!

– É um blasfemador.

– Encoraja a libertinagem.

– Excita à rebelião.

– Nega respeito ao César.

– Finge-se profeta sem o ser.

– Pratica magias!

– É um satanás.

– Subleva o povo com suas doutrinas, ensinando por toda a Judeia para onde veio da Galileia.

– A morte!

– A morte!”

Pilatos volta para Jesus:

– É galileu? Tu és galileu? Estás vendo como te acusam? Defende-te.

Mas Jesus fica calado.

604.24

E Pilatos pensa… E decide:

– Que uma centúria leve este homem a Herodes. Que ele o julgue. Pois é súdito dele. Reconheço o direito do Tetrarca e ao seu veredito eu subscrevo antecipadamente. Que se lhe diga isso. Ide.

E Jesus, rodeado como se fosse um canalha, é levado por cem soldados, atravessa de novo a cidade e torna a encontrar-se com Judas Iscariotes, com quem já se havia encontrado uma vez perto da feira. Antes eu havia me esquecido de dizê-lo, porque eu estava muito aborrecida com aquela barafunda que o povo fazia. Jesus lança aquele mesmo olhar de piedade sobre o traidor…

Agora é mais difícil feri-lo com pontapés e bastonadas. E se as pedras nos capacetes e nas couraças romanas sem ferir os soldados, deixam, contudo, sua marca, ferindo Jesus, que vai indo só com a sua veste, pois deixou o manto no Getsêmani.

Ao entrar no faustoso palácio de Herodes, Ele vê Cusa… que não consegue olhar para Ele e foge para não vê-lo naquele estado, e cobre a cabeça com o manto.

604.25

Ei-lo agora na sala, diante de Herodes. E atrás dele vêm os escribas e os fariseus, que aqui se sentem à vontade, e entram como acusadores mentirosos. Somente o centurião com quatro soldados o escoltam até diante do Tetrarca.

Ele desce de sua cadeira e olha ao redor de Jesus, enquanto escuta as acusações dos inimigos dele. E Herodes sorri e escarnece dele. Depois finge ter piedade dele e respeito, mas essas coisas não perturbam o Mestre como também os motejos dele não o perturbaram.

– Tu és grande. Eu estou sabendo… Eu te acompanhei, e tive prazer em saber que Cusa era teu amigo, e Manaém teu discípulo. Eu… os cuidados do Estado… Mas tive vontade de dizer-te: grande… e de pedir-te perdão… Os olhos de João… e a voz dele me acusam, e estão sempre diante de mim.Tu és o santo que anulas o pecado do mundo. Absolve-me, ó Cristo.

Jesus se cala.

– Ouvi dizer que te acusam de te teres levantado contra Roma. Mas não és Tu a vara prometida[4] para derrotar Assur?

Jesus se cala.

– Disseram-me que Tu profetizas o fim do Templo e de Jerusalém. Mas o Templo não é eterno, como espírito, tendo sido querido por Quem é eterno?

Jesus se cala.

– Será que estás doido? Perdeste o poder? Satanás te embargou a voz? Ele te abandonou?

Agora Herodes ri.

604.26

Mas depois dá uma ordem. E uns servos chegam, trazendo um cão lebreiro, com uma perna esmagada e que grita lamentosamente, e um moço da estrebaria com a cabeça aquosa, babando, mais parecendo um aborto de homem e objeto de brincadeiras para os servos. Os escribas e os sacerdotes fogem de lá, gritando contra o sacrilégio ao verem a padiola com o cão.

Herodes, fingido e zombeteiro, explica:

– Ele é o preferido de Herodíades. É um presente de Roma. Mas ele teve a pata esmagada ontem, e ela está chorando. Manda que ele fique curado. Faze um milagre!

Sério, Jesus olha para ele, muito sério, e cala-se.

– Será que te ofendi? Se não, cura este. Ele é um homem, ainda que não muito diferente de um animal. Dá-lhe inteligência, Tu que és a inteligência do Pai. Não é assim que dizes?

E Herodes se ri sarcasticamente.

Outro olhar mais severo de Jesus e silêncio.

– Este homem é abstinente demais e agora está atordoado pelos maus tratos recebidos. Trazei aqui vinho e mulheres. E soltai-o.

Eles o desamarram. E, enquanto os servos, em grande quantidade trazem ânforas e taças, entram as dançarinas… completamente nuas, cobertas com nada: uma franja multicor de linho, única veste, cobre as carnes delas da cintura até os quadris. E nada mais. Todas bronzeadas, pois são africanas, ágeis como umas gazelas novas, elas iniciam uma dança silenciosa e lasciva.

Jesus rejeita as taças e fecha os olhos, sem dizer nada. A corte de Herodes ri diante do desprezo dele.

– Toma aquela que quiseres. Trata de viver, homem! Aprende a viver!… –insinua Herodes.

Mas Jesus parece uma estátua. Com os braços cruzados, os olhos fechados, não estremece nem quando as impudicas dançarinas passam roçando nele os seus corpos desnudos.

– Basta. Eu te tratei como Deus e Tu não agiste como Deus. Tu és um doido. Trazei aqui uma veste branca. E revesti-o com ela, para que Pôncio Pilatos fique sabendo que o Tetrarca julgou ser o seu súdito um doido. Centurião, dirás ao Procônsul que Herodes lhe apresenta os seus respeitos e venera Roma. Ide.

E Jesus, amarrado de novo, sai de lá com uma única túnica de linho, que lhe desce até os joelhos, por cima da veste vermelha de lã.

E voltam a Pilatos.

604.27

Agora, quando a centúria abre caminho com dificuldade por entre a multidão, que não se cansou de esperar diante do plano do Procônsul — e é estranho ver tão grande multidão naquele lugar e nas vizinhanças, enquanto o resto da cidade está vazio de pessoas — Jesus está vendo o grupo de pastores, e lá eles estão todos, isto é, Isaque, Levi, José, Elias, Matias, João, Simeão, Benjamim e Daniel, com um grupinho de galileus, entre os quais eu reconheço Alfeu e José de Alfeu, com dois outros que eu não conheço, mas que eu diria serem judeus pelo modo com que se apresentam. E mais longe, tendo deslizado até o fundo do vestíbulo, meio escondido atrás de uma coluna, junto a um romano que eu diria ser um servo, Ele vê João. Jesus sorri para ele e para aqueles outros… São os seus amigos… Mas que é que são esses poucos, com Joana, Manaém e Cusa, no meio de um oceano de ódio que está fervendo?…

604.28

O centurião saúda Pôncio Pilatos e dá o recado.

– Aqui outra vez? Ufa! Maldita seja esta raça! Fazei que andem para frente os plebeus e trazei para cá o Acusado. Eh! Que aborrecimento!

Ele vai em direção à multidão, parando sempre na metade do vestíbulo.

– Hebreus, escutai. Vós me trouxestes este homem como um incitador do povo. Diante de vós Eu o examinei e não achei nele nenhum dos delitos de que o acusais. Herodes não os encontrou mais do que eu. E no-lo mandou de volta. Ele não merece a morte. Roma falou. Mas para não desagradar-vos, tirando-vos este passatempo, vos darei em troca Barrabás[5]. E a Ele mandarei dar quarenta varadas. E isso basta.

– Não! Não! Barrabás, não! A morte a Jesus! E uma morte horrenda! Livra Barrabás e condena o Nazareno.

– Mas ouvi bem. Eu disse varadas. Não basta? Então, o farei flagelar. Isso é atroz, sabeis? Pode ser que morra durante o ato. Que foi que Ele fez de mal? Eu não acho nenhuma culpa nele. E o libertarei.

– Crucifica-o! Crucifica-o! Mata-o! Um protetor de criminosos és tu! Pagão! Satanás tu também!

A multidão se agita. E a primeira fileira dos soldados balança na colisão, não podendo fazer uso das hastas. Mas a segunda fileira, tendo descido um degrau, faz uso das hastas, abrindo caminho, e liberta os companheiros.

– Seja flagelado –ordena Pilatos a um centurião.

– Quanto?

– Quanto te parecer. O acordo está feito. Eu já estou aborrecido. Vai.

604.29

Jesus é levado por quatro soldados para o pátio além do átrio. E nele, todo calçado com mármores coloridos, está, no centro, uma alta coluna, semelhante à do corredor dos pórticos. A uns três metros do chão, ela tem um braço de ferro, que se estende por pelo menos um metro, e termina em um anel. A ela Jesus é amarrado com as mãos juntas sobre o alto da cabeça, depois de ter sido despido. Ele fica somente com umas pequenas calças de linho e com as sandálias. Suas mãos estão amarradas pelos pulsos e são levantadas até o anel, de tal modo que Ele, ainda que seja alto, só pode apoiar no chão as pontas dos pés E só essa posição já deve ser uma tortura.

Eu li, não sei onde, que a coluna era baixa e que Jesus estava encurvado. Poderá ter sido. Mas eu estou vendo assim e assim a descrevo.

Atrás dele vai colocar-se um com cara de verdugo, que tem um nítido perfil hebraico e diante do qual há um outro de cara igual. Eles estão armados com o flagelo feito com sete tiras de couro ligadas a um cabo e terminando em um pequeno martelo de chumbo. De modo ritmado, como se fosse um exercício, eles começam a bater. Um na frente e o outro atrás, de tal modo que o tronco de Jesus fica dentro de uma roda de azorragues e flagelos.

Os quatro soldados a quem Ele foi entregue, indiferentes, puseram-se a jogar dados com outros três soldados que chegaram. E as vozes dos jogadores entram na cadência do som dos flagelos, que assoviam no ar como serpentes, e depois soam como pedras jogadas sobre a pele estendida de um tambor, batendo no pobre corpo tão delgado e de uma brancura de marfim velho, que se torna primeiro listrado de uma cor rósea cada vez mais viva, e depois violeta, e, em seguida, vai-se ornando com relevos de anil, cheios de sangue, que depois se arrebentam, deixando correr o sangue de todos os lados. E eles se enfurecem especialmente contra o tórax e o abdome, mas não deixam de bater nas pernas e nos braços, e finalmente na cabeça, para que não fique nenhum espaço da pele sem dor.

E não se ouve nenhum lamento… Se Ele não estivesse seguro pela corda, cairia. Mas Ele não cai, nem geme. Somente sua cabeça é que fica pendente, depois dos golpes e mais golpes recebidos no peito, como nos desmaios.

– Cuidado! Para aí! Para Ele ser morto precisa ainda estar vivo

–grita gracejando um soldado.

Os dois carrascos param e enxugam o suor.

– Estamos esgotados –dizem eles–. Pagai nosso trabalho para que possamos ir beber e comer alguma coisa…

– O que eu vos darei é a forca! Em todo caso tomai…

E um decurião joga uma moeda grande a cada um dos verdugos.

– Vós trabalhastes como devíeis. Ele parece um mosaico. Tito, achas que era este mesmo o amor do Alexandre[6]? Se for, nós lhe levaremos a notícia para que ele se ponha de luto. Vamos afrouxá-lo um pouco.

604.30

Eles o afrouxam e Jesus cai no chão como morto. E eles o deixam lá, empurrando-o de vez em quando com o pé calçado com uma sandália para ver se Ele ainda geme. Mas Ele se cala.

– Será que está morto? Será possível? Ele é jovem e operário, como me disseram… mas parece uma dama delicada.

– Agora, nisto penso eu –diz um soldado.

E o faz sentar-se com a espinha encostada na coluna. No lugar em que Ele estava há grumos de sangue… Depois ele vai a uma fontezinha, que cantarola por baixo do pórtico, enche um balde de água e o derrama sobre a cabeça e sobre o corpo de Jesus.

– Isto! Às flores a água faz bem.

Jesus dá um suspiro profundo e procura levantar-se. Mas ainda está com os olhos fechados.

– Oh! Está bem. Vamos, belezinha, que a dama te está esperando…

Mas Jesus inutilmente apoia os punhos no chão na tentativa de se levantar.

– Vamos, depressa! Estás enfraquecido? Aqui está o fortificante

–zomba dele um outro soldado.

E com a hasta de sua alabarda dá uma pancada no rosto de Jesus, e o atinge entre o zigoma direito e o nariz, e este começa a sangrar.

Jesus abre os olhos e olha ao redor de Si. Sua vista está anuviada. Mas Ele olha fixamente para o soldado que lhe bateu, enxuga o sangue com a mão, e depois, com um grande esforço, se põe de pé.

– Põe as tuas vestes. Não é decente ficar assim, despudorado!

E todos se riem ao redor dele.

Jesus obedece sem dizer nada. Mas enquanto se inclina — e somente Ele é que sabe quanto está sofrendo ao inclinar-se para o chão, todo contundido como está e com aquelas feridas que, ao estender-se a pele, se abrem mais ainda, e as outras que se formam das vesículas que se rompem — um soldado dá um pontapé nas vestes e as espalha, e cada vez que Jesus as alcança indo cambaleando até o lugar de onde elas caíram, outro soldado as empurra ou joga para outro rumo. E Jesus, sofrendo fortemente, vai atrás delas sem dizer uma palavra, enquanto os soldados o xingam com palavras obscenas.

Afinal, Ele conseguiu vestir-se novamente. Põe de novo também a sua veste branca, que ainda ficou limpa num canto. Parece que Ele quer esconder a sua pobre veste vermelha, que ontem estava tão bonita e agora está cheia de imundícies e manchada com o sangue suado no Getsêmani. E antes de pôr a túnica curta sobre a pele, com ela enxuga o rosto molhado e o limpa, tirando a poeira e os escarros. E aquele pobre e santo rosto aparece limpo e somente marcado pelas lívidas e pequenas feridas. Ele compõe os cabelos desalinhados e a barba, conforme o seu costume de apresentar-se sempre com tudo em ordem.

Depois Ele vai agachar-se, exposto ao sol. Porque o meu Jesus está tremendo. A febre começa a percorrer seu corpo com os calafrios. E até a fraqueza pelo sangue perdido, pelo jejum e pela longa caminhada, tudo isso o molesta.

604.31

Amarram-lhe de novo as mãos. E a corda volta a friccionar rudemente nos pontos em que já estava feito um bracelete vermelho da pele esfolada.

– E agora? Que faremos com Ele? Isso me aborrece!

– Espera. Os judeus querem um rei. Pois agora vamos dar-lhe. Aquele ali… –diz um soldado.

E ele vai correndo para fora, para um pátio que fica mais atrás, e do qual volta com um feixe de ramos de pilriteiro selvagem, ainda flexíveis, por que a primavera conserva relativamente flexíveis os ramos, mas bem duros nos espinhos longos e agudos. Com a adaga tiram as folhas e as florzinhas, depois dobra os ramos em círculo e os calca sobre a pobre cabeça. Mas aquela bárbara coroa desliza para o pescoço.

– Aí ela não para. Precisa ser mais estreita. Tira-a.

Eles a tiram e arranham as maçãs do rosto, arriscando deixá-lo cego, e arrancam-lhe os cabelos, ao fazerem isso. Então, eles tornam a modificá-la. Agora está estreita demais e, mesmo se a forçam fincando os espinhos na cabeça, ameaça cair. Tiram de novo, arrancando mais cabelo. Modificam-na de novo. Agora está bem. Na frente é um cordão de espinhos triplicemente trançado. E atrás, onde as extremidades dos três ramos se cruzam, forma-se um verdadeiro nó de espinhos, que penetram na nuca.

– Estás vendo como ficou bem? Bronze natural e rubis genuínos. Olha, ó rei, pelo espelho de minha couraça –graceja o que teve a ideia de mais aquele suplício.

– Não basta a coroa para se fazer um rei. É necessário que se tenha a púrpura e o cetro. Lá na estrebaria há um caniço, e na latrina há um manto vermelho. Vai buscá-los, Cornélio.

E, já estando com essas coisas, põem o sujo molambo vermelho sobre os ombros de Jesus e, antes de lhe porem nas mãos o caniço, batem com ele sobre a cabeça de Jesus, e se inclinam, saudando-o: “Salve, ó Rei dos Judeus”, e quase se arrebentam de tanto rir.

Jesus os deixa fazer tudo isso. Deixa-se colocar sentado no “trono” — que é uma tina de boca para baixo, que certamente é usado para dar água aos cavalos — e deixa que lhe batam, que zombem dele, sem dizer nada. Somente olha para eles… E é um olhar com tanta doçura e com um sofrimento tão atroz que eu não posso deixar de sentir-me ferida no coração.

604.32

Os soldados só param com aquele escárnio quando a voz áspera de um superior lhes ordena que levem o réu para diante do Pilatos. Réu! Mas réu de quê?

Jesus é levado de novo para o átrio, que agora está com uma preciosa cortina por causa do sol. Está ainda com a coroa, o manto e o caniço.

– Vem para frente, a fim de que eu te mostre ao povo.

Jesus, já alquebrado, endireita-se com dignidade. Oh! Ele é verdadeiramente um rei!

– Ouvi, ó hebreus. Aqui está o homem. Eu o puni. E agora deixai-o ir embora.

– Não, não. Queremos vê-lo! Venha cá fora! Queremos ver o blasfemador!

– Levai-o para fora. Mas tomai cuidado para que ele não seja capturado.

E enquanto Jesus desce para o vestíbulo e se apresenta no quadrado dos soldados, Pôncio Pilatos o mostra com a mão, dizendo:

– Eis aqui o homem. O vosso rei. Ainda não vos basta?

O sol de um dia abafado, que já desce no horizonte nessa metade entre a hora terça e a sexta, eleva-se e dá realce aos olhares e aos semblantes. Serão homens, aqueles? Não. São hienas hidrófobas. Eles gritam, mostram os punhos, exigem morte…

Jesus está ereto. E eu lhes asseguro que Ele não havia mostrado a nobreza como nesta hora. Nem mesmo quando fazia os mais estupendos milagres. A nobreza na dor. Mas de tal modo divino, que bastaria para pôr-lhe o nome de Deus. Mas para dizer esse Nome é preciso que se seja, pelo menos, homens. E Jerusalém hoje não tem homens, só tem demônios.

Jesus passa o olhar sobre a multidão, procura e encontra, no meio dos rostos odientos, os rostos amigos. Quantos são? Menos de vinte amigos no meio de milhares de inimigos… E inclina a cabeça ferido por esse abandono. Uma lágrima cai… depois outra… e mais outra… A vista do seu pranto não gera piedade, mas um ódio ainda mais feroz.

604.33

Ele é levado de novo para o átrio.

– E então? Deixai-o ir. É justiça.

– Não. Ele vai para a morte. Crucifica-o.

– Eu vos entrego Barrabás.

– Não. O Cristo!

– E, então, prendei-o vós. E por vós mesmos, crucificai-O. Porque eu não encontro culpa alguma nele para fazer isso.

– Ele se disse Filho de Deus. E a nossa lei castiga com a morte o réu de tal blasfêmia.

Pilatos fica pensativo. Depois torna a entrar. Vai assentar se em seu trono. Põe uma mão na fronte e o cotovelo sobre o joelho, e fica perscrutando Jesus:

– Aproxima-te –ele diz.

Jesus vai para os pés do estrado.

– É verdade? Responde-me.

Jesus fica calado.

– De onde vens? Quem é Deus?

– É o Tudo.

– E daí? Que quer dizer o Tudo? Que é o Tudo para quem morre? Estás doido… Não há Deus. Eu o sou.

Jesus fica calado. Ele deixou sair a grande palavra e depois volta a fechar-se em seu silêncio.

604.34

– Pôncio, a liberta da Cláudia Prócula está pedindo para entrar. Ela traz um escrito para ti.

– Senhores! Até as mulheres agora! Que venha.

Entra uma romana e se ajoelha, apresentando-lhe uma tabuinha encerada. Deve ser aquela na qual Prócula pede ao marido que não condene a Jesus. A mulher se retira, andando para trás, enquanto Pilatos lê.

– Estão me aconselhando a evitar a tua morte. É verdade que Tu és mais do que um arúspice? Tu me causas medo.

Jesus fica calado.

– Mas não sabes que eu tenho o poder para te livrar ou para te crucificar?

– Nenhum poder terias se não te fosse dado lá do alto. Por isso, quem me entregou em tuas mãos é mais culpado do que tu.

– Quem foi? O teu Deus? Eu tenho medo…

Jesus fica calado.

Pilatos está andando sobre espinhos. Quereria e não quereria. Tem medo do castigo de Deus, tem medo do castigo de Roma e tem medo das vinganças dos judeus. Por um momento o que vence é o medo de Deus. E assim ele vai para frente do átrio e troveja:

– Ele não é o culpado.

– Se dizes isso, és inimigo de César. Quem se torna réu é inimigo dele. Tu queres libertar o Nazareno. Nós vamos fazer que César fique sabendo disso.

Pilatos se vê tomado pelo medo do homem.

– Quereis vê-lo morto, então? Pois que seja. Mas que o sangue deste justo não esteja em minhas mãos.

E tendo feito que lhe levassem uma bacia, lavou suas mãos na presença do povo, que parece estar tomado por um frenesi, enquanto grita:

– Sobre nós caia, sobre nós o sangue dele. Caia sobre nós e sobre os nossos filhos. Nós não temos medo. Seja crucificado! Seja crucificado!

604.35

Pôncio Pilatos volta para o seu trono, chama o centurião Longino e um escravo. Pelo escravo ele faz que seja levada uma tábua sobre a qual coloca um cartaz, e manda que se escreva nele: “Jesus Nazareno, Rei dos Judeus.” E o mostra ao povo.

– Não. Assim, não. Não escrevas rei dos judeus, mas que ele disse que seria rei dos judeus –gritam muitos.

– O que eu escrevi está escrito –diz com dureza Pilatos.

E, de pé, estende a mão com a palma virada para a frente e depois para baixo, e ordena:

– Que vá para a cruz. Soldado, vai. Prepara a cruz –(Ibis ad crucem! I, miles, expedi crucem.)

E desce sem nem mesmo virar-se para a multidão tumultuada nem para o pálido Condenado. E ele sai do átrio.

Jesus fica no centro do átrio sob a guarda dos soldados, esperando a cruz.

10 de março de 1944. Sexta-feira.

604.36

Diz Jesus:

– Quero fazer-te meditar sobre o ponto que se refere aos meus encontros com Pilatos.

João, que tendo estado quase sempre presente ou pelo menos muito perto, é a testemunha e o narrador mais exato. É ele quem conta que da casa de Caifás eu fui levado ao Pretório. E especifica: “De manhã cedo.” De fato, tu viste, o dia estava apenas começando. E especifica mais ainda: “Eles (os judeus) não entraram para não se contaminarem, e poderem comer a Páscoa.”

Hipócritas como sempre, eles encontram perigo de contaminar-se ao pisar a poeira da casa de um gentio, mas não encontram pecado em matar um Inocente e, com o ânimo satisfeito pelo delito realizado, puderam saborear melhor ainda a Páscoa. Eles têm também muitos seguidores. Todos aqueles que em seu interior fazem o mal e externamente professam respeito à religião e amor a Deus são semelhantes a estes. Fórmulas, fórmulas e não verdadeira religião! Esses me causam repugnância e desprezo.

Como os judeus não entraram, Pilatos saiu para ouvir o povo que estava gritando e, como ele tinha experiência no governo e no julgamento, só com um olhar compreendeu logo que o réu não era Eu, mas, sim, aquele povo cheio de ódio. O encontro de nossos olhares foi também uma leitura de nossos corações. Eu julguei o homem por aquilo que ele era e ele me julgou pelo que eu era[7]. Em Mim senti piedade para com ele, pois era um homem fraco. E nele veio a piedade para comigo, porque Eu era um Inocente. No primeiro momento, ele procurou salvar-me. E, visto que somente a Roma era outorgado e reservado o direito de exercer a justiça contra os malfeitores, ele tentou me salvar dizendo: “Julgai-o conforme a vossa lei.”

604.37

Mostrando-se hipócritas pela segunda vez, os judeus não quiseram condenar-me. É verdade que Roma tinha o direito de fazer justiça, mas quando, por exemplo, Estêvão foi apedrejado, Roma naquele tempo imperava sobre Jerusalém, e eles, não obstante isso, definiram e consumaram o julgamento e o suplício sem se preocuparem com Roma. Comigo, por quem eles não sentiam amor, mas ódio e medo — pois não queriam reconhecer-me como Messias, mas também não queriam matar-me materialmente, na dúvida de que Eu o fosse — agiram de uma maneira diferente e passaram a acusar-me como sublevador do povo contra o poder de Roma (vós diríeis hoje: como um “rebelde”), para assim conseguirem que Roma me julgasse.

Em sua reunião infame, assim como outras vezes durante os três anos do meu ministério, eles me haviam acusado de ser blasfemador e falso profeta, e como tal deveria ter sido lapidado ou, de todo modo, morto. Mas agora, para realizar materialmente o delito do qual sentem por instinto que seriam punidos, fazem com que seja Roma a acusar-me de malfeitor e rebelde.

Não há nada de mais fácil, quando as multidões estão pervertidas e seus chefes estão endemoninhados, do que acusar um inocente a fim de satisfazerem à sua libidinagem, ferocidade e usurpação, e liquidar quem representa um obstáculo e um julgamento. Voltamos agora aos tempos de outrora. O mundo de vez em quando, depois de ter ficado incubando suas ideias perversas, explode nessas manifestações de perversidade. Como uma enorme gestante, a multidão, depois de ter nutrido em seu seio, com as doutrinas da fera, o seu monstro, o dá à luz para que ele passe a devorar. A devorar em primeiro lugar os melhores e depois a devorar a si mesma.

604.38

Pilatos entra de novo no Pretório e me chama para perto dele. E me faz perguntas. Ele já tinha ouvido falar de Mim. Entre os seus centuriões havia alguns que repetiam o meu Nome com um amor cheio de reconhecimento, com lágrimas nos olhos e o sorriso nos corações, e falavam de Mim como de um benfeitor. Nos seus relatórios ao Pretor, interrogados sobre este Profeta que atraía para Si as multidões e pregava uma doutrina nova, na qual se falava de um reino estranho, inconcebível para a mente pagã, eles haviam sempre atestado que Eu era manso, bom, que não ia atrás das honras desta terra, mas que inculcava e praticava o respeito e a obediência para com aqueles que são as autoridades. Mais sinceros do que os israelitas, eles viam e depunham em favor da verdade.

No último domingo, atraído pelo clamor da multidão, ele tinha ido olhar rua e visto passar sobre uma jumentinha um homem desarmado, que abençoava e estava rodeado de crianças e de mulheres. Ele tinha compreendido que não podia, com certeza, ser um perigo para Roma um homem como aquele.

Por isso é que ele quer saber se Eu sou rei. Em seu irônico ceticismo pagão, ele queria rir-se um pouco desta realeza que vai montada em um burro e que tem por seus cortesãos meninos descalços, mulheres sorridentes, homens do povo, desta realeza que há três anos vem pregando que não sente atração pela riqueza nem pelo poder, e que não fala de outras conquistas a não ser daquelas do espírito e da alma. E que é que vem a ser a alma para um pagão? Pois nem os deuses deles têm uma alma. E, então, o homem é que a irá ter? E agora mesmo, este rei sem coroa, sem palácio real, sem corte, sem soldados é que repete que o seu reino não é deste mundo. E isso é tão verdade que nenhum ministro e nenhuma milícia se levanta para defender o seu rei e arrancá-lo das mãos dos seus inimigos.

Pilatos, sentado em seu trono, fica me perscrutando, porque para ele Eu sou um enigma. Se ele livrasse sua alma dos cuidados humanos, do orgulho do cargo, do erro do paganismo, logo compreenderia quem Eu sou. Mas como pode a luz penetrar num lugar onde há muitas coisas fechando as aberturas para que a luz não entre?

604.39

É sempre assim, meus filhos. Agora também. Como pode Deus entrar com a sua luz onde não há mais espaço para eles, e onde as portas e as janelas estão barradas e protegidas pela soberba, pela humanidade, pelo vício, pela usura, por tantos, tantos guardas que estão a serviço de Satanás contra Deus?

Pilatos não pode entender como é o meu reino. E o que é mais doloroso é que ele não me pede que lhe explique. Ao meu convite para que ele procure conhecer a Verdade, o indomável pagão responde: “Que é a Verdade?” E, com um levantar de ombros, deixa de lado o assunto.

Ó filhos, meus filhos! Ó meus Pilatos de agora! Também vós, como Pôncio Pilatos, deixais cair, com um levantar de ombros, os assuntos mais vitais. A vós podem parecer coisas inúteis, já superadas. Que é a Verdade? Será o dinheiro? Não. Serão as mulheres? Não. Será o poder? Não. Será a saúde física? Não. A glória humana? Não. E, então, deixa de lado o assunto. Não vale a pena que correr atrás de uma quimera. Dinheiro, mulheres, poder, boa saúde, comodidades, honras, estas são coisas concretas, úteis, que se deverão amar e procurar conseguir de qualquer maneira. Vós raciocinais assim. E, pior do que fez Esaú, vós dissipais os bens eternos por um alimento grosseiro, que vos prejudica em vossa saúde física e em vossa saúde eterna. Por que é que não continuais a perguntar: “Que é a Verdade?” Ela, a Verdade, não pede outra coisa senão que se faça conhecer para vos instruir sobre ela. Ela está diante de vós como esteve diante de Pilatos, e olha para vós com olhos de um amor suplicante, implorando-vos: “Pergunta-me. E eu te instruirei.”

Estás vendo como Eu olho para Pilatos? Igualmente Eu olho para todos vós. E se Eu tenho um olhar de amor sereno para quem Me ama e quer ouvir as minhas palavras, tenho também olhares de um amor sincero por quem não me ama, não me busca, não me escuta. Mas é amor, é sempre amor, porque minha natureza é Amor.

604.40

Pilatos me deixa onde estou, sem me fazer mais perguntas, e vai aos malvados, que têm a voz mais grossa e que se impõem com sua violência. E os ouve, este infeliz que não Me ouviu e que rejeitou, com um mover de ombros, o meu convite para que procurasse conhecer a Verdade. Ele dá ouvidos à Mentira. A idolatria, seja qual for sua forma, é sempre levada a venerar e aceitar a Mentira, seja qual for. E a Mentira, aceita por um fraco, leva o fraco ao delito.

Mas Pilatos, já na soleira do delito, ainda me quer salvar uma e duas vezes. E neste ponto ele me manda a Herodes. Ele sabe muito bem que o rei astuto, que sabe lidar com Roma e com o povo, irá agir de tal modo que não desagradará a Roma nem provocará o povo hebreu. Mas, como todos os fracos, ele vai adiando por algumas horas a decisão, que ele não se sente capaz de tomar, e fica esperando que o tumulto do povo se acalme. Eu disse[8]: “Que a vossa linguagem seja: Sim, sim; não, não”. Mas ele não ouviu isso e, se alguém foi dizer-lhe, ele terá feito, como de costume, aquele movimento com os ombros. Para vencer no mundo, para receber honras e lucros, é preciso saber fazer do sim um não, ou do não um sim, como o bom senso (leia-se: o senso humano) aconselhar.

Quantos e quantos Pilatos existem neste século XX! Onde estão os heróis do Cristianismo que diziam sim constantemente sim à Verdade e pela Verdade, e não, constantemente não à Mentira? Onde é que estão os heróis que sabem enfrentar o perigo e os acontecimentos com uma fortaleza de aço e com uma serena prontidão, e não com adiamentos, para que o Bem logo seja feito, e o Mal logo seja evitado, sem”mas” e sem “se”?

604.41

Ao retornar de Herodes, eis qual foi a nova posição tomada por Pilatos: a flagelação. E que é que ele esperava? Não saberia ele que a multidão é como uma fera que, quando começa a ver o sangue, se assanha? Mas Eu tinha que ser todo machucado para expiar os vossos pecados da carne. E Eu fui machucado. Eu sou o Homem do qual fala Isaías. E, ao suplício que foi ordenado, acrescentou-se o que não foi ordenado, mas que foi inventado pela crueldade humana, o suplício dos espinhos.

Estais vendo, ó homens, o vosso Salvador, o vosso Rei, coroado de dor para livrar vossa cabeça de tantas culpas que nela fermentam? Não pensais, ó homens, qual foi a dor que sofreu minha cabeça inocente a fim de pagar por vós, pelos vossos pecados cada vez mais atrozes, por pensamentos que se transformam em ações? Vós que vos ofendeis até quando não há motivo para tanto, olhai para o Rei ofendido, e ele é Deus, com o seu irônico manto de púrpura rasgado, com o cetro, que é um caniço, e uma coroa, que é de espinhos. Ele já está quase morrendo e o esbofeteiam ainda, com suas mãos e com escárnios. Mas nem com tudo isso vós vos moveis à piedade. Como os judeus, continuais a mostrar-me os punhos e a gritar: “Fora, fora, não temos outro Deus a não ser César”, ó idólatras, que não adorais a Deus, mas a vós mesmos e a quem entre vós for o mais prepotente. Vós não quereis o Filho de Deus. Para os vossos delitos Ele não vos ajuda. Quem vos ajuda mais é Satanás. Por isso quereis Satanás. Do Filho de Deus vós tendes medo, como Pilatos. E quando ouvis que Ele vos ameaça com o seu poder, quando se agita dentro de vós a voz da consciência, que vos censura em nome dele, perguntais, como fez Pilatos: “Quem és Tu?”

Quem sou Eu, vós o sabeis. Até aqueles que me negam sabem quem são eles e Quem sou Eu. Não mintais. Vinte séculos estão ao redor de Mim e vos mostram quem Eu sou, e vos falam sobre os meus prodígios. Pilatos é mais digno de perdão. E não vós, que tendes uma herança de vinte séculos de Cristianismo, que servem de base para a vossa fé ou para vo-la inculcar, e vós não quereis saber disso. Contudo, Eu fui mais severo com Pilatos do que convosco. Eu não lhe dei resposta. Mas convosco Eu estou falando. E, não obstante isso, não consigo persuadir-vos de que sou Eu a quem vós deveis adoração e obediência.

Agora mesmo me estais acusando de ser Eu mesmo a ruína de Mim em vós, porque não vos escuto. Dizeis que perdeis a fé por isso. Oh! Mentirosos! Onde é que está a vossa fé? Onde está o vosso amor? Quando é que vós reagis e viveis com amor e fé? Sois grandes? Então, lembrai-vos de que sois tais porque Eu o permito. Ou será que sois anônimos no meio do povo? Lembrai-vos de que não há outro Deus além de Mim. Nenhum é mais do que Eu, nem existiu antes de Mim. Dai-me, pois, aquele culto de amor que me é devido e Eu vos ouvirei, porque já não sereis mais bastardos, mas filhos de Deus.

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E Pilatos fez uma última tentativa para salvar minha vida, se é que ele ainda a podia salvar depois daquela desapiedada e exagerada flagelação. Ele Me apresentou à multidão: “Eis o homem!” A ele humanamente Eu causo piedade. Ele espera pela compaixão coletiva. Mas diante da dureza que resiste e da ameaça que avança, ele não sabe praticar um ato sobrenaturalmente justo e, portanto, bom, e dizer: “Eu livro este homem porque Ele é inocente. Vós sois culpados, e se não vos dispersais ireis conhecer o rigor de Roma.” Isto era o que ele devia ter dito, se fosse um justo, sem ficar calculando qual o futuro que dali lhe teria vindo.

Pilatos é um falso homem de bem. Bom é Longino que, sendo menos poderoso do que o Pretor e menos defendido, no meio da rua e rodeado por poucos soldados e pela multidão inimiga, tem coragem de defender-me, de conceder-me licença para repousar, de receber o conforto de mulheres piedosas, de ser socorrido pelo Cireneu e, enfim, de ter minha Mãe aos pés da Cruz. Ele foi um herói da Justiça, e se tornou, por isso, um herói de Cristo.

Ficai sabendo disso, ó homens que vos preocupais unicamente com os vossos bens materiais, porque também no que se refere a eles o vosso Deus intervém quando vê que sois fiéis à justiça, que é uma emanação de Deus. Eu premio sempre quem age com retidão. Eu defendo quem me defende. Eu o amo e socorro. Eu sou sempre aquele que disse[9]: “Quem der um copo d’água em meu Nome terá recompensa.” A quem me dá amor, que é a água que dessedenta os meus lábios de Mártir divino, Eu dou a Mim mesmo, isto é, proteção e bênção.


Notes

  1. Un homme : il s’agit d’un certain Jacob, guéri par Jésus en 374.7/9. Le fils de l’alinéa suivant est Samuel, l’époux parjure d’Annalia, rencotré en 374.5/6 et en 375.6/9.
  2. Comme Doras, en 110.3 et 126.10.
  3. Les exilés à Babylone, récit relaté en 2 R, 24-25 et en 2 Chr 36.
  4. le jus gladii et sanguinis, littéralement le droit d’épée et de sang, était le droit de condamner à mort, réservé (comme Jésus le rappelle en 561.10 et en 604.36/37) au Procurateur de Rome.
  5. verge promise en Is 30, 30-32.
  6. Barabbas pourrait être le voleur assassin cité par Jésus en 567.12 (dans les dernières lignes) et par la foule en 576.3, parce que Matthieu nous apprend qu’il s’agissait d’un “ prisonnier bien connu ” (Mt 27, 16).
  7. Alexandre est un soldat romain rencontré dans les chapitres 86 et 115, et rappelé en 204.3 et en 461.19.
  8. ce qu’il était : le caractère de Pilate est magistralement décrit en 566.18.
  9. Je vous l’ai dit, en 172.4.
  10. celui qui a dit, en 265.13.

Notas

  1. um marido: trata-se de certo Jacó, curado por Jesus em 374.7/9. O filho do parágrafo seguinte é Samuel, esposo infiel de Anália, encontrado em 374.5/6 e em 375.6/9.
  2. Como Doras, em 110.3 e 126.10.
  3. os derrotados da Babilônia, segundo aquilo que se narra em: 2 Re 24-25; 2 Crônicas 36.
  4. a vara prometido, em: Isaías 30,30-32.
  5. Barrabás poderia ser o ladrão e assassino mencionado por Jesus em 567.12 (últimas linhas) e pelo povo em 576.3, porque aprendemos de Mateus 27,16 que se tratava de “um prisioneiro famoso”.
  6. Alexandre, soldado romano encontrado nos capítulos 86 e 115, mencionado em 204.3 e em 461.19.
  7. que eu era. O caráter de Pilatos está descrito magistralmente em 566.18.
  8. eu disse, em 172.4.
  9. aquele que disse, em 265.13.