The Writings of Maria Valtorta

10. Le cantique de Marie.

10. Mary’s canticle imploring the coming of Christ.

10.1

C’est seulement hier soir, vendredi, que mon âme a été éclairée par cette vision. Je n’ai rien vu d’autre qu’une Marie toute jeune, qui devait avoir douze ans tout au plus ; son visage avait perdu les rondeurs de l’enfance, mais on devine déjà ses futurs traits de femme par l’ovale qui s’allonge. Ses cheveux ne sont plus dénoués sur la nuque, en boucles légères, mais sont rassemblés en deux lourdes tresses d’un or très pâle – ils sont clairs à en pa­raître mêlés d’argent – sur les épaules et tombent jusqu’aux hanches. Le visage est plus réfléchi, plus mûr, bien que ce soit toujours un visage d’enfant, d’une belle et pure enfant. Entièrement vêtue de blanc, elle est en train de coudre dans une pièce minuscule, toute blanche. Par la fenêtre grande ouverte, on voit l’édifice imposant et central du Temple, puis la descente des escaliers, des petites cours, des portiques et, par-delà les murs d’enceinte, la ville avec ses rues, ses maisons et jardins et, tout au fond, le sommet vert et bombé du mont des Oliviers.

Elle coud et chante à mi-voix. Je ne sais s’il s’agit d’un chant sacré. Le voici :

« Comme une étoile se mirant dans l’eau claire,

Une lumière brille au fond de mon cœur.

Depuis mon enfance, elle ne m’a pas quittée

Et elle me guide avec amour et douceur.

J’ai un chant au fond du cœur.

D’où peut-il donc venir ?

Ô homme, tu l’ignores.

Il vient d’où le Saint repose.

Je contemple ma claire étoile

Et ne désire rien d’autre,

Même ce qui me serait le plus doux et le plus cher,

Que cette douce lumière qui est toute à moi.

Tu m’as portée du plus haut des Cieux,

Etoile, dans le sein d’une mère.

A présent tu vis en moi, mais au-delà des voiles

Je te vois, ô glorieux visage du Père.

Quand me feras-tu l’honneur

De devenir l’humble servante du Sauveur ?

Du Ciel envoie-nous le Messie.

Accepte, ô Père saint, l’offrande de Marie. »

10.2

Marie se tait, sourit et soupire, puis s’agenouille pour prier. Son petit visage n’est que lumière. Le regard levé vers l’azur merveilleux d’un beau ciel d’été, elle semble en attirer sur elle toute la luminosité et en être irradiée. Plus exactement, on dirait qu’un soleil caché en elle rayonne de ses lumières et éclaire la neige à peine rosée du corps de Marie, puis se répand sur les choses et sur le soleil qui luit sur la terre, en la bénissant et en lui promettant mille bienfaits.

Au moment où Marie va se relever après sa prière pleine d’amour, et alors que la clarté de l’extase persiste sur son vi­sage, la vieille Anne, fille de Phanuel, entre. Elle s’arrête, interdite, ou pour le moins dans l’admiration devant le geste et l’aspect de Marie.

Elle l’appelle : « Marie ! », et l’enfant se tourne vers elle avec un sourire, différent mais toujours très beau ; elle la salue :

« Anne, la paix soit avec toi.

10.3

– Tu priais ? Tu n’as donc jamais fini de prier ?

– La prière me suffirait, mais je parle avec Dieu. Anne, tu ne peux savoir combien je le sens proche de moi. Plus que proche : dans mon cœur. Que Dieu me pardonne un tel orgueil, mais je ne me sens pas seule. Tu vois ? Là se trouve le Saint des Saints, dans cette maison d’or et de neige, derrière le double voile. Jamais aucun œil, si ce n’est celui du grand-prêtre, ne peut se fixer sur le Propitiatoire sur lequel repose la gloire du Seigneur. Mais, moi, je n’ai pas besoin de voir de toute mon âme – qui le vénère – ce Voile brodé qui vibre au son des chants des vierges et des lé­vites, et qui sent l’encens précieux, comme pour en percer l’épaisseur et permettre de voir le Témoignage. Bien sûr, je le regarde ! Ne crains pas que je ne le regarde pas avec respect, comme tout fils d’Israël. Ne crains pas que l’orgueil m’aveugle au point de me faire penser ce que je suis en train de dire. Je le regarde, et il n’y a pas, dans tout le peuple de Dieu, de plus humble serviteur qui regarde avec plus d’humilité la Maison du Seigneur que moi, car je suis convaincue d’être la plus insignifiante de tous. Mais qu’est-ce que je vois ? Un voile. A quoi je pense, au-delà du Voile ? A un tabernacle. Et à quoi, dans ce tabernacle ? Mais si je regarde le fond de mon cœur, c’est Dieu que je vois resplendir dans sa gloire d’amour et me dire : “ Je t’aime ”. Je lui réponds : “ Je t’aime ”, et je fonds, je me renouvelle à chaque battement de cœur en ce baiser réciproque…

Je me tiens au milieu de vous, mes bien chères maîtresses et compagnes, mais un cercle de flammes m’isole de vous. Dans ce cercle, il y a Dieu, et moi. Je vous vois à travers le Feu de Dieu, et c’est ainsi que je vous aime… mais je ne peux vous aimer selon la chair, je ne pourrai jamais aimer personne selon la chair. Mon seul amour est celui qui m’aime selon l’esprit.

10.4

Je connais mon sort. La Loi séculaire d’Israël veut que toute jeune fille devienne une épouse, et toute épouse une mère. Mais, moi, sans désobéir à la Loi, j’obéis à la Voix qui me dit : “ Je te veux. ” Je suis vierge et je le resterai. Comment le pourrai-je ? Cette Présence douce, invisible, qui est avec moi m’y aidera, parce que c’est elle qui le désire. Je n’ai pas peur. Je n’ai plus ni père ni mère… et seul l’Eternel sait avec quelle douleur ce que j’avais d’humain s’est consumé : avec une douleur atroce. C’est donc à lui que j’obéis aveuglément. Je l’aurais même fait contre la volonté de mes parents, car la Voix m’apprend que celui qui veut la suivre doit passer outre la volonté de ses parents : certes, ils sont des gardes aimants sur le chemin de ronde des remparts qui protègent leur enfant et ils veulent les conduire au bonheur par leur chemin à eux… Mais ils ne savent pas qu’il existe d’autres chemins qui conduisent à une joie infinie… J’aurais abandonné vêtements et manteau pour suivre la Voix qui me dit : “ Viens, ma bien-aimée, mon épouse ! ” J’aurais tout quitté. Les perles de mes larmes – car j’aurais pleuré de devoir leur désobéir –, les rubis de mon sang – car j’aurais même défié la mort pour suivre la Voix qui appelle – leur auraient montré qu’il existe quelque chose de plus grand et de plus doux que l’amour d’un père et d’une mère : la voix de Dieu. Mais sa volonté m’a dégagée désormais des liens de la piété filiale. D’ailleurs, ils ne m’auraient pas retenue. C’étaient deux justes, et Dieu leur parlait certainement au fond du cœur comme il me parle. Ils auraient suivi le chemin de la justice et de la vérité. Quand je pense à eux, je les vois dans la paix de l’attente auprès des patriarches, et je hâte par mon sacrifice l’avènement du Messie qui leur ouvrira les portes du ciel. C’est moi qui me dirige sur la terre, ou plutôt c’est Dieu qui dirige sa pauvre servante en lui dictant ses commandements. Et je les accomplis, parce que c’est là toute ma joie. Quand l’heure sera venue, je dirai à mon époux mon secret… et il l’accueillera.

– Mais, Marie… quels mots trouveras-tu pour le convaincre ? Tu auras contre toi l’amour d’un homme, la Loi et la vie.

– J’aurai Dieu avec moi… Dieu ouvrira le cœur de mon époux à la lumière… La vie perdra l’aiguillon des sens et deviendra une fleur qui exhalera le parfum de la charité.

10.5

Quant à la Loi… Anne, ne me traite pas de blasphématrice, mais je pense que la Loi va bientôt changer. Qui le fera, puisqu’elle est divine ? Le seul qui en ait le pouvoir, c’est-à-dire Dieu. Je vous l’affirme, le temps est plus proche que vous ne l’imaginez. En lisant Daniel, une grande lumière s’est faite en moi ; elle me venait du fond du cœur, et mon intelligence a saisi le sens de ces paroles secrètes. Les soixante-dix semaines seront abrégées grâce aux prières des justes. Le nombre des années sera-t-il donc changé ? Non, la prophétie ne ment pas. Mais la mesure du temps prophétique ne se fonde pas sur la course du soleil, mais sur celle de la lune. C’est pourquoi je l’affirme : “ L’heure est proche où l’on entendra vagir le fils d’une vierge. ” Ah, si seulement cette Lumière qui m’aime voulait bien me dire – puisqu’elle me dit tant de choses – où se trouve l’heureuse vierge[1] qui enfantera un fils à Dieu et le Messie à son peuple ! Je marcherais pieds nus et je parcourrais la terre, et rien ne m’arrêterait, ni le froid ni le gel, ni la poussière ni la canicule, ni les bêtes sauvages ni la faim, jusqu’à ce que je la trouve et lui dise : “ Accorde à ta servante et à la servante des serviteurs du Christ de vivre sous ton toit. Je tournerai la meule et le pressoir, mets-moi comme esclave à la meule, comme ber­gère à ton troupeau, mets-moi à laver les langes de ton Enfant, aux cuisines, aux fours… où tu voudras, mais accueille-moi. Que je le voie ! Que j’entende sa voix ! Que son regard se pose sur moi ! ” Et si elle ne veut pas de moi, je me ferai mendiante à sa porte et je vivrai d’aumônes et de railleries, je coucherai dehors sous la canicule pour entendre la voix du Messie enfant et l’écho de ses éclats de rire, ou simplement pour le voir passer… Un jour, peut-être recevrai-je de lui l’obole d’un pain… Ah, même si la faim me torturait l’estomac au point que je me sente défaillir après un si long jeûne, je ne mangerais pas de ce pain. Je le serrerais contre mon cœur comme un sachet de perles et je l’embrasserais pour sentir le parfum de la main du Christ ; je n’aurais plus ni faim ni froid, parce que ce contact me procurerait extase et chaleur, extase et nourriture…

10.6

– Tu devrais être la mère du Christ, puisque tu l’aimes à ce point ! C’est pour cela que tu désires rester vierge ?

– Oh, non ! Je ne suis que misère et poussière. Je n’ose lever les yeux vers la Gloire. C’est pour cela que, plus que le double Voile derrière lequel, je le sais, se trouve la présence invisible de Yah­vé, j’aime regarder au-dedans de mon cœur. Là-bas se trouve le Dieu terrible du Sinaï. Mais ici, en moi, je vois notre Père, un visage aimant qui me sourit et me bénit, parce que je suis aussi petite qu’un oisillon que le vent soulève sans en sentir le poids ; je suis aussi faible que du muguet sauvage qui ne sait que fleurir et sentir bon, et ne peut opposer au vent d’autre force que sa douceur parfumée et pure. Dieu, mon vent d’amour !

Ce n’est pas pour cette raison. Mais voici pourquoi : la pureté que, du ciel, il a choisie pour mère et qui, sur la terre, lui parle de son Père du Ciel, ne peut que plaire à celui qui naîtra de Dieu et d’une vierge, au Saint du Très-Saint. Si la Loi méditait là-dessus, si les rabbins, qui l’ont amplifiée par toutes les subtilités de leur enseignement, tournaient leur esprit vers des horizons plus élevés, se plongeaient dans le surnaturel et laissaient de côté l’humain et l’utile qu’ils recherchent en oubliant la Fin suprême, ils devraient orienter leur enseignement tout particulièrement vers la pureté pour que le Roi d’Israël la trouve quand il viendra. A côté de l’olivier du Pacifique et des palmes du Triomphateur, répandez des lys, une multitude de lys…

Que de sang le Sauveur devra-t-il verser pour nous sauver ! Que de sang ! Telle la rosée d’un vase poreux, une pluie de sang tombera des milliers de blessures qu’Isaïe a vues sur l’Homme des douleurs. Que ce sang divin ne tombe pas là où il y a profanation et blasphème, mais dans des coupes au parfum de pureté qui le reçoivent et le recueillent pour le déverser sur les malades spirituels, sur les lépreux de l’âme, sur ceux qui sont morts à Dieu. Offrez des lys, offrez des lys pour essuyer, avec la robe blanche des pétales purs, la sueur et les larmes du Christ ! Offrez des lys, offrez-lui des lys pour l’ardeur de sa fièvre de Martyr ! Ah, où sera-t-il, ce lys qui te portera, qui étanchera ta soif, qui se teindra de ton sang, qui mourra de douleur en te voyant mourir et pleurera sur ton corps exsangue ? Oh ! Christ ! Oh ! Christ ! Mon soupir… »

En larmes, accablée, Marie se tait.

10.7

Anne garde le silence quelque temps puis, de sa voix blanche de femme âgée prise par l’émotion, elle dit

« As-tu autre chose à m’enseigner, Marie ? »

Marie sursaute. Dans son humilité, elle doit croire que sa maîtresse lui fait un reproche, et elle dit :

« Oh, pardon ! C’est toi la maîtresse, moi je ne suis rien, mais cette parole me jaillit du cœur. J’ai beau la surveiller pour ne pas parler, c’est comme un fleuve impétueux qui rompt ses digues. Elle m’a saisie et a débordé. Ne tiens pas compte de mes paroles et mortifie ma présomption. Les paroles mystérieuses devraient rester dans l’arche secrète du cœur auquel Dieu, dans sa bonté, accorde ce bienfait. Je le sais bien. Mais cette présence invisible est si douce qu’elle m’enivre… Anne, pardonne à ta petite servante ! »

Anne la serre sur son cœur. Tout son vieux visage ridé tremble et luit sous les pleurs. Ses larmes s’insinuent dans ses rides comme le fait l’eau sur un terrain accidenté avant de se changer en un marais tremblotant. Toutefois, la vieille maîtresse ne fait pas rire : bien au contraire, ses larmes font naître la plus grande vénération.

Marie est dans ses bras, son petit visage serré sur la poitrine de sa vieille maîtresse, et tout finit comme cela.

10.8

Jésus dit :

« Marie se souvenait de Dieu. Elle rêvait de Dieu. Elle croyait rêver, mais elle ne faisait que revoir ce que son âme avait contemplé dans la splendeur du Ciel de Dieu, à l’instant où elle a été créée pour être unie à la chair conçue sur la terre. Elle partageait avec Dieu – bien que de manière très inférieure, comme la justice l’exigeait – l’une des propriétés de Dieu : celle de se souvenir, de voir et de prévoir, grâce à l’attribut d’une intelligence puissante et parfaite, puisqu’elle n’était pas blessée par le péché originel.

10.9

L’homme est créé à l’image et à la ressemblance de Dieu. L’une de ces ressemblances réside dans la possibilité pour l’âme de se souvenir, de voir et de prévoir. Cela explique la faculté de lire dans le futur. Cette faculté s’exerce, de par la volonté de Dieu, à maintes reprises et directement, d’autres fois par un souvenir qui se lève comme le soleil sur une matinée, éclairant un point précis de l’horizon des siècles déjà vu dans le sein de Dieu.

Ce sont là des mystères trop élevés pour que vous puissiez pleinement les comprendre. Mais réfléchissez.

Cette Intelligence suprême, cette Pensée qui sait tout, cette Vue qui voit tout, qui vous crée d’un acte de sa volonté et d’un souffle de son amour infini, faisant ainsi de vous ses enfants par votre origine et par votre destinée, pourrait-il vous donner quelque chose de différent de lui ? Il vous en donne une part infinitésimale, car la créature ne saurait contenir son Créateur. Il n’empêche que cette part est parfaite et complète.

Quel trésor d’intelligence Dieu n’a-t-il pas donné à l’homme, à Adam ! La faute l’a amoindri, mais mon sacrifice le rétablit et vous ouvre les splendeurs de l’intelligence, ses fleuves, sa science. Oh, sublimité de l’esprit humain uni à Dieu par le moyen de la grâce, et qui partage avec lui sa capacité à connaître… sublimité de l’esprit humain uni à Dieu par le moyen de la grâce.

Il n’existe pas d’autre mode de connaissance. Que ceux qui recherchent avec curiosité des secrets qui dépassent les capacités humaines s’en souviennent. Toute connaissance qui ne vient pas d’une âme en état de grâce – or une âme n’est pas en état de grâce si elle s’oppose à la Loi de Dieu, dont les commandements sont fort clairs – ne peut provenir que de Satan. S’il est difficile qu’elle corresponde à la vérité quand il s’agit de sujets humains, elle n’y correspond jamais quand il s’agit de sujets surnaturels, car le Démon est le père du mensonge et il entraîne les hommes sur le chemin du mensonge. Pour connaître la vérité, il n’y a aucun autre moyen que celui qui vient de Dieu. Il nous parle ou rappelle à notre mémoire, comme un père rappelle à son fils un souvenir qui a trait à la maison paternelle en disant : “ Te souviens-tu quand tu faisais telle chose avec moi, tu as vu ceci, entendu cela ? Te souviens-tu quand je t’ai embrassé à ton départ ? Te rappelles-tu le moment où tu as vu pour la première fois le soleil éclatant de mon visage sur ton âme vierge à peine créée et encore pure – parce que tout juste sortie de moi – de la souillure qui t’a ensuite amoindri ? Te rappelles-tu quand tu as compris en tressaillant d’amour ce qu’est l’Amour ? Quel est le mystère de notre être et de notre procession ? ” Or, là où l’homme en état de grâce ne peut parvenir à cause de ses capacités limitées, l’Esprit de science parle et instruit.

Encore faut-il la grâce pour posséder l’Esprit, pour posséder la vérité et la science, pour avoir le Père avec soi. C’est la tente sous laquelle les trois Personnes établissent leur demeure, le propitiatoire sur lequel l’Eternel repose et parle, non pas de l’intérieur d’une nuée mais en révélant sa face à son enfant fidèle. Les saints se souviennent de Dieu, des paroles entendues dans la Pensée créatrice. La Bonté les suscite à nouveau dans leur cœur pour les élever comme des aigles dans la contemplation de la vérité, dans la connaissance du temps.

10.10

Marie était la Femme pleine de grâce. Toute la Grâce une et trine demeurait en elle. Toute la Grâce une et trine la préparait à être l’épouse aux noces, à être le lit nuptial pour sa descen­dance, à vivre sa maternité et sa mission de manière divine. Elle est celle qui ferme le cycle des prophétesses de l’Ancien Testament et ouvre celui des “ porte-parole de Dieu ” dans le Nouveau Testament.

Arche véritable de la Parole de Dieu, elle découvrait, en regardant dans son sein inviolé pour l’éternité, les paroles de la science éternelle tracées par le doigt de Dieu sur son cœur immaculé, et, comme tous les saints, elle se souvenait de les avoir déjà entendues lorsqu’elle avait été engendrée avec son âme immortelle par Dieu, le Père créateur de tout ce qui existe. Et, si elle ne se rappelait pas tout de sa mission à venir, c’était parce qu’en toute perfection humaine Dieu laisse des lacunes dues à une prudence divine qui est bonté pour sa créature en lui fournissant des occasions de mérite.

Pour être la Mère du Christ, Marie, cette nouvelle Eve, a dû conquérir sa part de mérite par une bonne volonté fidèle que Dieu a demandée à son Fils pareillement pour faire de lui le Rédempteur.

L’esprit de Marie était au Ciel. Son état moral et sa chair étaient sur terre, et il lui fallait fouler aux pieds terre et chair pour parvenir à l’esprit, et l’unir à l’Esprit en une étreinte féconde. »

10.11

Note personnelle.

Toute la journée d’hier, j’ai pensé voir l’annonce de la mort des parents de Marie et, je ne sais pourquoi, apportée par Zacharie. J’imaginais aussi, à ma manière, la façon dont Jésus allait traiter le point du “ souvenir de Dieu par les saints ”. Ce matin, quand la vision a commencé, j’ai dit : « Voilà, on dira désormais que Marie est orpheline », et j’en avais déjà le cœur serré car… c’était ma propre tristesse de ces derniers jours que j’aurais éprouvée et vue. Or la vision ne correspondait en rien à ce que je pensais voir et entendre, il n’y avait pas la moindre allusion. Cela me console, parce que cela me montre que rien ne vient de moi, pas même une honnête influence sur tel ou tel point. Tout provient vraiment d’une autre source. Ma crainte continuelle disparaît… jusqu’à la prochaine fois, car cette peur d’être trompée et de tromper ne cessera jamais de m’accompagner.

10.1

Only yesterday evening, Friday, I began to see. I saw nothing but a very young Mary, twelve years old at the most, Her face no longer roundish, as is typical of children, but already showing the future outlines of a woman in a perfect oval. Also Her hair is no longer falling loose on Her neck in soft curls, but it is plaited and two thick braids fall over Her shoulders down to Her waist. Her hair is a very pale gold colour, so light that it seems to be blended with silver. Her face is more pensive and mature, although it is the face of a young girl, a beautiful and pure girl, all dressed in white. She is sewing in a very small room, which is also completely white, and through the wide open window one can see the imposing central part of the Temple, the flights of steps of the yards and porches. Beyond the enclosure wall also the town can be seen with its streets, houses, gardens, and in the background the humped green top of the Mount of Olives.

Mary is sewing and singing in a low voice. I do not know whether it is a sacred song or not. It says:

«Like a star in clear water

a light is shining within My heart.

It has been with Me since My childhood

and it guides Me tenderly with love.

In the depths of My heart there is a song.

Where does it come from?

Man, you do not know.

It comes from where the Holy One rests.

I look at My clear star

And I do not want anything,

Not even the sweetest and dearest thing,

Except this sweet light that is all Mine.

You brought Me down from the Heavens above,

O star of Mine, into the womb of a mother,

Now You live in Me, but beyond the veil

I see Your glorious face, Father.

When will You grant Your servant the honour

Of being the humble maid of the Saviour?

Send us the Messiah from Heaven,

Accept, Holy Father, the offer of Mary.»

10.2

Mary is now quiet. She smiles and sighs, then She kneels down in prayer. Her little face is shining brightly. She is looking upwards, towards the clear blue summer sky and Her face seems to be absorbing and then radiating all the brightness in the air. Or rather, it looks as if from within Her a hidden sun is radiating its rays and lighting up Her face, colouring Her snow-white flesh with a light rosy hue. And the light from Her face spreads out towards the world and the sun shining on the world: a blessing and a promise of much good.

While Mary is getting up after Her prayer, with ecstatic brightness still on Her face, old Anna of Phanuel enters the room. She stands still, amazed or at least wondering at Mary’s attitude and appearance.

Then she calls Her: «Mary!» and the Girl turns around with a smile, a different one but still so beautiful and says: «Peace to you, Anna.»

10.3

«Were You praying? Are Your prayers never enough for You?»

«My prayers would be enough. But I speak to God. Anna, you cannot imagine how close I feel Him. More than close, within My heart. May God forgive Me for My pride. But I do not feel lonely. See? Over there, in that House of gold and snow, behind the double Curtain, there is the Holy of Holies. Nobody is ever allowed to look at the Propitiatory, on which the glory of the Lord rests, except the High Priest. But My worshipping soul does not need to look at the embroidered Curtain, which quivers at the songs of the virgins and Levites and is scented with precious incense, as if I wanted to pierce its fabric and see the Testimony shine through it. I do look at it! Do not think that I do not look at it with worshipping eyes like every son of Israel. Do not think that pride blinds Me making Me think what I will now tell you. I look at it and there is no humble servant amongst the people of God that looks more humbly at the House of the Lord than I do, because I am convinced that I am the least of all. But what do I see? A veil. What do I think there is behind the Veil? A Tabernacle. What is in it? If I listen to My heart, I see God shining in His loving glory and He says to Me: “I love You” and I reply to Him: “I love You” and I die and I am recreated at each beat of My heart in this mutual kiss… I am amongst you, My dear teachers and companions. But a circle of fire isolates Me from you. Within the circle, God and Myself. And I see you through the Fire of God and so I love you… but I cannot love you according to the flesh, neither shall I ever be able to love anyone according to the flesh. I can only love Him Who loves Me, according to the spirit.

10.4

This is My destiny. The secular Law of Israel wants every girl to be a wife, and every wife to be a mother. But, while obeying the Law, I must obey the Voice that whispers to Me: “I want You”; I am a virgin and a virgin I shall remain, How shall I succeed? This sweet invisible Presence that is with Me will help Me, because it is Its desire. I am not afraid. I have no longer My father and mother… and only God knows how My love for whatever human being belonged to Me was burnt in that pain. Now I have but God. I therefore obey Him unquestioningly… I would have done so also regardless of My father and mother, because I have been taught by the Voice that whoever wishes to follow It, must go beyond father and mother. Parents are loving patrols watching the hearts of their children, whom they wish to lead to happiness according to their plans… and they are not aware of other plans leading to infinite happiness… I would have left them My dresses and mantles, to follow the Voice that says to Me: “Come, My beloved Spouse”. I would have left them everything, and the pearls of My tears, for I would have cried having to disobey them, and the instincts of My blood, because I would have defied even death to follow the Voice calling Me who, would have told them that there is something greater and sweeter than the love of a father and mother and that is the Voice of God. But now, by His will, I am free from this tie of filial love. In fact, it would not have been a tie. My parents were two just people and God certainly spoke to them as He speaks to Me. They would have followed justice and truth. When I think of them, I imagine them in the quiet expectation among the Patriarchs and I hasten with My sacrifice the coming of the Messiah to open for them the gates of Heaven. I am My own guide on earth, or rather God guides His poor servant giving Her His commands and I fulfil them because it is a joy for Me to obey. When the time comes, I will reveal My secret to the spouse… and he will accept it.»

«But, Mary… which words will You find to persuade him? You will have the love of a man, the Law and life against you.»

«I shall have God with Me… God will enlighten the heart of the spouse… life will lose the incentives of the senses and become a pure flower with the fragrance of charity.

10.5

The Law… Anna, don’t call Me a blasphemer. I think the Law is about to be changed. By whom, do you think, if it is divine? By the Only One Who can change it. By God. The time is closer than you think, I tell you. Because when I was reading Daniel, a great light came to Me from the depths of My heart and I understood the meaning of the enigmatic word. The seventy weeks will be shortened because of the prayers of just people. Does this mean that the number of years is being changed? No. A prophecy is never wrong. But the measure of the prophetic time is the course of the moon, not of the sun. Therefore I say: “Near is the hour when the Baby born of a Virgin will be heard crying”. Oh! Since this Light that loves Me tells Me so many things, I wish it would tell Me where the happy mother is, that will give birth to the Son of God and Messiah of His people! Barefooted I would travel all over the world, neither cold nor frost, neither dust nor heat, nor wild beast nor hunger would prevent Me from reaching Her and I would say to Her: “Grant Your servant and the servant of the servants of Christ to live under Your roof. I will turn Your millstone and Your press, use Me as a slave to work Your millstone and to watch Your herds, make Me wash the napkins of Your Child… I will work in Your kitchen, at Your oven, wherever You wish…. but receive Me. That I may see Him! And hear His voice! And receive His glance!” And if She did not want Me, I would live at Her doorstep like a beggar, in cold and hot weather, just to hear the voice of the Child Messiah and the echo of His laughter, and see Him passing by… And perhaps one day He would offer Me a piece of bread… Oh! If I were dying with hunger and I were fainting because of extensive fasting, I would not eat that bread. I would hold it close to My heart like a bag of precious pearls and I would kiss it to scent the perfume of Christ’s hand and I would never be hungry or cold, because its touch would give Me ecstasy and heat, ecstasy and food…»

10.6

«You ought to be the Mother of the Christ, since You love Him so much! Is that why You wish to remain a virgin?»

«Oh! No. I am misery and dust. I dare not lift My eyes towards the Glory. That is why, rather than the double Veil, beyond which I know dwells the invisible Presence of Jehovah, I love looking into My heart. Over there, there is the terrible God of Sinai. Here, within Me, I see our Father, a loving Face that smiles and blesses Me, because I am small like a little bird, that the wind sustains without feeling its weight and I am weak like the stem of a lily of the valley, that can only bloom and smell sweetly and can present no other force to the wind but its scented and pure sweetness. God, My loving wind! Not because of that. But because the Son of God and of a Virgin, the Holy of the Most Holy One, can but like what in Heaven He chose as his Mother and what on the earth speaks to Him of His Heavenly Father: Purity. If the Law pondered that, if the rabbis, who have complicated the Law with all the quibbles of their teaching, turned their minds to higher horizons and aimed at supernatural things, deserting the human and lucrative affairs which cause them to forget the supreme End, they should, above all, make Purity the main subject of their teaching, so that the King of Israel may find it when He comes. With the olive branches of the Peaceful One, with the Palms of the Triumpher, spread lilies, lilies, lilies… How much Blood the Saviour will have to shed to redeem us! How much indeed! From the thousands of wounds that Isaiah saw on the Man of Sorrows, a stream of Blood is falling, like dew from a porous vase. May this divine Blood not fall where there is desecration and blasphemy, but into chalices of fragrant purity that may receive it and gather it for the purpose of spreading it amongst the diseased and leprous souls and amongst those who are dead to God. Give lilies to wipe with their pure petals the sweat and the tears of Christ! Give lilies for His keen desire of Martyrdom! Oh! Where is the Lily that will bear You? Where is the Lily that will quench Your parching thirst, that will become red with Your Blood, will die for the pain of seeing You dying, and will cry over Your bloodless Body? Oh! Christ! Christ! My desire!…»

Mary is now silent, weeping and overwhelmed.

10.7

Anna is also silent for a little while and then with her clear voice of a deeply moved old woman, she asks: «Have You anything else to teach me, Mary?»

Mary rouses. She must think, in Her humbleness, that Her teacher is reproaching Her and She exclaims: «Oh! Forgive Me! You are My teacher. I am nothing. But this voice comes from My heart. I watch over it, to avoid speaking. But like a river that under the fury of water breaks its embankment, it has now overcome Me and overflowed. Please pay no attention to My words and chastise My presumption. Words of mystery should remain in the depths of one’s heart, which God helps in His goodness. I know. But this Invisible Presence is so sweet that I am filled with joy… Anna, please forgive your little servant!»

Anna embraces Her while tears shine on her old wrinkled and trembling face. The tears run along her wrinkles, like water along an uneven ground that becomes a trembling swamp. But the old teacher does not arouse laughter, on the contrary her crying stimulates the deepest respect.

Mary is clasped in her arms, Her little face against Her teacher’s breast. And it all finishes in this way.

10.8

Jesus says:

«Mary remembered God. She dreamt of God. She thought She was dreaming. She was only seeing again what She had seen in the splendour of God’s Heaven, in the instant She was created to be united to the body conceived on the earth. She shared with God one of God’s properties, although in a lesser degree, as was fitting. That is the property of remembering, seeing and foreseeing, which is an attribute of the mighty and perfect intelligence not impaired by Fault.

10.9

Man was created in the image and likeness of God. One of the similarities is the capability, for the soul, of remembering, seeing and foreseeing. This explains the power to read into the future. This power sometimes comes directly, by God’s will, sometimes it is a power of recollection, that rises like the sun in the morning, illuminating a point on the horizon of centuries, already seen in the vision of God.

Such mysteries are too deep to be fully understood by you. But think about them.

Can the Supreme Intelligence, the Mind that knows everything, the Sight that sees everything, give you something different from Himself, having created you by an act of His will and a breath of His infinite love, and having made you His children both by your origin and your destination? He gives you it in an infinite part, as the creature cannot contain the Creator. But that part is perfect and complete, although infinite.

What treasure of intelligence God gave man, Adam! The Fall impaired it, but My sacrifice reinstates it and opens the splendour of Intelligence, its wealth, its science for you. How sublime is the human mind united to God by His grace, sharing with God the power of knowledge!… The human mind united to God by Grace.

There is no other way. Those who inquisitively seek extra-human secrets should remember that. All knowledge that does not come from a soul in grace — and is not in grace who is against God’s Law, which is very clear in its commandments — such knowledge comes from Satan. It seldom corresponds to the truth when human matters are concerned, it never corresponds to the truth with regard to super-human matters. The Demon is in fact the father of lies and can but lead onto the path of lies. There is no other method of knowing the truth, except the one that comes from God, Who speaks and says or reminds, as a father reminds his son of his paternal house and says to him: “Don’t you remember when you used to do this with Me, you saw that, you heard something else? Don’t you remember when I used to kiss you goodbye? Do you remember when you saw Me for the first time and you admired the bright light on My face shining on your virginal soul, which, having been just created by Me was still pure and free from the evil that later impaired you? Do you remember when you understood for the first time, in a throb of love, what Love is? Which is the mystery of our Being and Proceeding?” And what the limited capability of a man in grace cannot reach, the Spirit of science clarifies and teaches.

But to possess the Spirit, Grace is needed. To possess Truth and Science, Grace is required. To possess the Father, Grace is necessary. Grace is a tent in which the three Persons dwell, it is a Propitiatory on which the Eternal Father rests and speaks, not from within a cloud, but revealing His face to His faithful children. Saints and just people remember God. They remember the words they heard in the Creating Mind and which the Supreme Goodness revives in their hearts to raise them like eagles in contemplation of the Truth and to the knowledge of Time.

10.10

Mary was full of Grace. The whole One and Trine Grace was in Her. The whole One and Trine Grace prepared Her like a Bride for the Wedding, like a Nuptial Bed for the Offspring, like a Divine Person for Her Maternity and mission. She closes the cycle of the Prophetesses of the Old Testament and opens the period of the “spokesmen of God” of the New Testament.

True Ark of the Word of God, looking into Her immaculate heart, She discovered the words of eternal knowledge, which the finger of God had written there, and She remembered, as all saints do, that She had already heard them when Her immortal soul was being created by God the Father, the Creator of all living beings… And if She did not remember everything of Her future mission, the reason is that God leaves some gaps in every human perfection, according to a Law of divine prudence, out of goodness and as a reward to creatures.

Mary, the second Eve, had to achieve Her part of merit in being the Mother of Christ, with a faithful goodwill, that God expected also from His Christ to make Him a Redeemer.

The spirit of Mary was in Heaven. Her morale and Her body were on the earth and they had to tread on the earth and on the flesh to reach the spirit and join it to the Spirit in a fruitful embrace.»

10.11

A note of mine. All day yesterday I thought I was going to see the news of the death of Her parents being given to Mary by Zacharias, I do not know why. I also thought, in my way, that Jesus would have dealt with the point «remembrance of God by the saints». This morning, when the vision started, I said to myself: «Here we are, they will now tell Her that She is an orphan» and my heart was already trembling because I would have experienced my own sadness of these past days. Instead there has been absolutely nothing of what I thought I was going to see or hear. Not even one word by mistake. I am very happy about this because it confirms that there is nothing of my own in this work, not even an honest suggestion with regards to one situation. It all comes from a different source. My continuous fear ceases… until the next time because I shall always be afraid of being deceived and deceiving.


Notes

  1. où se trouve l’heureuse vierge… Maria Valtorta note sur une copie dactylographiée : « Il ne faut pas s’étonner de cette ignorance de Marie sur son avenir de Mère de Jésus. Dieu, qui lui avait accordé par un privi­lège particulier une sagesse proportionnée à son état d’Immaculée et de Mère prédestinée du Verbe incarné, voulut pour une raison insondable garder Marie dans l’ignorance de certaines choses jusqu’au moment convenable. » Cette idée est reprise dans en 10.10, 17.9, et en 108.2.