126.1
« Il est dit : “ Tu ne tueras pas. ” Auquel des deux groupes de commandements appartient celui-ci ? “ Au second ”, dites-vous ? En êtes-vous sûrs ? Je vous demande encore : est-ce un péché qui offense Dieu ou celui qui en est la victime ? Vous répondez : “ La victime ” ? Etes-vous sûrs aussi de cela ? Je vous demande enfin : n’y a-t-il qu’un péché d’homicide ? En tuant, ne commettez-vous que ce seul péché ? “ Oui ”, répondez-vous ? Personne n’en doute ? Répondez à haute voix. Qu’un seul parle au nom de tous ! J’attends. »
Jésus se penche pour caresser une petite fille venue à côté de lui et qui le regarde, extasiée, oubliant même de grignoter la pomme que sa mère lui a donnée pour qu’elle se tienne tranquille.
Un vieillard imposant se lève et dit :
« Maître, écoute. Je suis un vieux chef de synagogue et ils m’ont dit de parler au nom de tous. Je parle donc. Il me semble, et il nous semble, avoir répondu selon la justice et selon ce qu’on nous a enseigné. J’appuie ma certitude sur le chapitre de la Loi[1] relatif à l’homicide et aux coups. Mais toi, tu sais pourquoi nous sommes venus : pour que tu nous enseignes, car nous reconnaissons en toi la sagesse et la vérité. Si donc je me trompe, éclaire mes ténèbres pour que le vieux serviteur que je suis puisse s’avancer vers son Roi, revêtu de lumière ; rends aussi ce service à ceux-ci qui sont de mon troupeau et qui sont venus, avec leur berger, boire à la fontaine de vie. »
Avant de s’asseoir, il s’incline avec le plus grand respect.
« Qui es-tu, père ?
– Cléophas d’Emmaüs, ton serviteur.
– Pas le mien : mais celui du Père qui m’a envoyé parce que c’est à lui qu’on doit laisser toute préséance et donner tout amour au Ciel, sur terre et dans les cœurs. Et le premier à lui rendre cet honneur, c’est son Verbe qui prend et offre, sur une table sans défauts, les cœurs des bons, comme le fait le prêtre avec les pains de proposition. Mais écoute, Cléophas, pour aller à Dieu tout illuminé, selon ton saint désir.