The Writings of Maria Valtorta

169. Premier sermon sur la Montagne :

169. The first sermon on the Mount

169.1

Jésus marche seul et à grands pas sur une grande route. Il se dirige vers une montagne. Il me faut expliquer ce à quoi elle ressemble, car je crois bien que je n’y parviendrai pas par le dessin[1] que voici :

Donc ce mont se dresse près de la route principale qui, partant du lac, se dirige vers l’ouest. Après quelque temps, le terrain monte en pente douce, puis s’étend sur un long espace, formant un plateau d’où l’on voit tout le lac avec la cité de Tibériade vers le sud et les autres villes, moins belles, qui s’étagent vers le nord. Puis la montagne s’élève plus rapidement jusqu’à un pic et, après un creux, elle remonte encore pour former un second pic semblable au premier, l’ensemble des deux formant bizarrement une sorte de selle.

Jésus entreprend la montée vers le plateau par un chemin muletier encore assez beau et il atteint un petit village dont les habitants cultivent ce plateau surélevé où le blé commence à former des épis. Il traverse le hameau et s’avance à travers des champs et des prés tout parsemés de fleurs ou bruissants de moissons. Le jour est serein et met en valeur toute la beauté de la nature environnante.

Au-delà de la petite montagne solitaire vers laquelle Jésus se dirige, on aperçoit au nord la cime imposante de l’Hermon dont le sommet semble être une perle gigantesque reposant sur une base d’émeraude tant est blanche la cime tout enneigée contrastant avec la teinte verte des pentes couvertes de forêts. Au-delà du lac, mais entre celui-ci et l’Hermon, s’étend la plaine verdoyante où se trouve le lac de Mérom – mais on ne le voit pas d’ici –, et puis encore d’autres montagnes qui vont vers le lac de Tibériade du côté nord-ouest et, au-delà du lac, des montagnes encore, dans le lointain qui les adoucit, et d’autres plaines. Au sud, au-delà de la grand-route, il y a des collines qui, je crois, cachent Nazareth. Plus l’on monte et plus l’horizon s’élargit. Je ne vois pas ce qu’il y a à l’ouest parce que la montagne m’en cache la vue.

169.2

Jésus rencontre en premier l’apôtre Philippe, qui semble posté en sentinelle à cet endroit.

« Comment, Maître ? Toi ici ? Nous t’attendions sur la route. Moi, je suis ici pour attendre mes compagnons qui sont allés chercher du lait auprès des bergers qui font paître leurs troupeaux sur les sommets. En bas, sur la route, il y a Simon et Judas et avec eux Isaac et… Ah ! Voilà. Venez ! Venez ! Le Maître est ici ! »

Les apôtres, qui descendent avec des calebasses et des gourdes se mettent à courir et naturellement les plus jeunes arrivent en premier. Ils font fête au Maître, c’est émouvant. Enfin ils sont réunis et, tandis que Jésus sourit, ils veulent tous parler, raconter…

« Mais, nous t’attendions sur la grand-route !

– Nous pensions que tu n’arriverais pas aujourd’hui.

– Il y a beaucoup de monde, sais-tu ?

– Oh, nous étions fort gênés, car il y avait des scribes et même des disciples de Gamaliel…

– Mais oui, Seigneur ! Tu nous as quittés vraiment au bon moment ! Je n’ai jamais eu aussi peur qu’à ce moment-là. Ne me joue plus un tour comme celui-ci ! »

Comme Pierre se plaint, Jésus demande en souriant :

« Mais vous est-il arrivé malheur ?

– Oh non ! Au contraire… Ah, mon Maître ! Tu ne sais pas que Jean a parlé ? On aurait dit que c’était toi qui parlais en lui. Moi… nous étions abasourdis… Ce garçon qui, il y a à peine un an, était seulement capable de jeter le filet… ah ! »

Pierre est encore sous le coup de l’admiration et il secoue Jean qui rit et se tait.

« Voyez s’il paraît possible que cet enfant, de sa bouche rieuse, ait prononcé ces paroles-là ! On aurait dit Salomon.

– Simon aussi a bien parlé, mon Seigneur. Il a été vraiment le “ chef ”, dit Jean.

– Pardi, il m’a mis au pied du mur ! Mais… ils assurent que j’ai bien parlé. C’est possible. Moi, je ne sais pas… car à cause de la stupeur que m’ont causée les paroles de Jean et la peur de parler au milieu de tant de gens et de te faire faire piètre figure, j’étais bouleversé…

– De me faire faire piètre figure ? A moi ? Mais c’était toi qui parlais et c’est toi qui aurais fait piètre figure, Simon, lui dit Jésus pour le taquiner.

– Oh, en ce qui me concerne, cela m’importait peu ! Je ne voulais pas qu’ils se moquent de toi pour avoir pris pour apôtre un imbécile. »

Jésus étincelle de joie devant l’humilité et l’amour de Pierre. Mais il demande seulement :

« Et les autres ?

– Simon le Zélote aussi a bien parlé, mais lui… on le sait. Mais c’est celui-ci qui a été une surprise ! Depuis que nous avons été en oraison, ce garçon semble avoir constamment l’âme au Ciel.

– C’est vrai ! C’est vrai ! »

Tous confirment les paroles de Pierre. Puis les récits reprennent.

« Tu sais ? Parmi les disciples, il y en a maintenant deux qui, aux dires de Judas, sont très importants. Judas s’affaire beaucoup. Eh, c’est vrai ! Lui, il connaît bien ces gens-là… de la haute société, et il sait comment leur parler. D’ailleurs, il aime parler… Il parle bien. Mais les gens préfèrent entendre Simon, tes frères, et surtout ce garçon. Hier, un homme m’a dit : “ Ce jeune parle bien – c’était de Judas qu’il parlait – mais je te préfère à lui. ” Oh, mon pauvre ! Me préférer, moi qui ne sais pas dire trois mots de suite !… Mais pourquoi es-tu venu ici ? Le rendez-vous était sur la route et c’est là que nous nous trouvions.

– Parce que je savais que je vous trouverais ici.

169.3

Maintenant écoutez. Descendez et dites aux autres de venir, aux disciples connus aussi. Que les gens ne viennent pas aujourd’hui. Je veux m’adresser à vous seuls.

– dans ce cas, mieux vaut attendre le soir. Au coucher, les gens s’éparpillent dans les bourgades voisines et reviennent le matin t’attendre. Sinon… qui les retiendra ?

– D’accord. Faites ainsi. Je vous attends là-haut, au sommet. En ce moment, la nuit est tiède. Nous pouvons même dormir à la belle étoile.

– Où tu veux, Maître. Il suffit que tu sois avec nous. »

Les disciples s’en vont et Jésus reprend son ascension jusqu’au sommet. C’est celui que j’ai déjà vu dans la vision de l’an passé[2] qui portait sur la fin du discours sur la montagne et sur la première rencontre de Jésus avec Marie-Madeleine. Le panorama qui s’éclaire en ce début de crépuscule est encore plus étendu.

Jésus s’assied sur un rocher et se recueille pour méditer. Et il reste ainsi jusqu’à ce que le bruit des pas sur le sentier l’avertisse que les apôtres sont de retour. Le soir approche. Mais, à cette altitude, le soleil continue de faire exhaler les senteurs des plantes et des fleurs. Des muguets sauvages dégagent un fort parfum et les grandes tiges des narcisses secouent leurs étoiles et leurs boutons comme pour appeler la rosée.

Jésus se lève et salue en disant :

« Que la paix soit avec vous. »

Nombreux sont les disciples qui montent avec les apôtres. Isaac les conduit avec son sourire d’ascète sur son fin visage. Tous se groupent autour de Jésus, qui salue en particulier Judas et Simon le Zélote.

« J’ai voulu vous avoir tous avec moi pour rester quelques heures avec vous seuls et vous parler à vous seuls. J’ai quelque chose à vous dire pour vous préparer toujours plus à la mission. Prenons notre repas puis nous parlerons et, pendant que nous dormirons, l’âme continuera à savourer la doctrine. »

Ils prennent un dîner frugal puis se pressent en cercle autour de Jésus, assis sur un rocher. Entre disciples et apôtres, ils sont une centaine environ, peut-être plus. Ils forment une couronne de visages attentifs que la flamme de deux feux éclaire d’une façon bizarre.

169.4

Jésus parle doucement, avec des gestes paisibles. Son visage paraît plus blanc, se détachant sur son habit bleu foncé, éclairé par un rayon de la nouvelle lune qui tombe juste à son niveau, une petite virgule dans le ciel, une lame de lumière qui caresse le Maître du ciel et de la terre.

« J’ai voulu vous avoir ici, en particulier, parce que vous êtes mes amis. Je vous ai appelés après la première épreuve à laquelle les douze ont été soumis, pour élargir le cercle de mes disciples à l’œuvre et pour entendre de vous les premières réactions sur ceux qui vous dirigent et que je vous donne comme mes continuateurs. Je sais que tout s’est bien passé. Je soutenais de ma prière les âmes des apôtres qui, après l’oraison, découvraient une force nouvelle dans l’âme et dans le cœur, une force qui ne vient pas de l’étude, mais d’un complet abandon à Dieu.

169.5

Ceux qui ont le plus donné, sont ceux qui se sont le plus oubliés. S’oublier soi-même est chose ardue. L’homme est fait de souvenirs, et ceux qui lui parlent le plus fort sont les souvenirs de son propre moi. Il faut distinguer entre les différents moi. Il y a le moi spirituel venu de l’âme qui se souvient de Dieu et de son origine divine. Il y a le moi inférieur de la chair, concentré sur ses mille exigences et ses passions. Il en sort une foule de voix qui font un chœur, dominant – si l’esprit n’est pas très robuste –, la voix solitaire de l’âme qui se souvient de sa noblesse d’enfant de Dieu. Mis à part ce souvenir saint qu’il faudrait toujours plus aiguiser, raviver et fortifier, il faudrait, pour être de parfaits disciples, savoir s’oublier soi-même, avec tous les souvenirs, les exigences et les réflexions craintives du moi humain.

Dans cette première épreuve de mes douze, ceux qui ont le plus donné sont ceux qui se sont le plus oubliés. Ils ont oublié non seulement leur passé, mais aussi leur personnalité limitée. Ce sont ceux qui ne se sont plus souvenus de ce qu’ils étaient, mais se sont tellement fondus en Dieu qu’ils n’ont plus eu peur de rien.

Pourquoi les réserves de certains ? Parce qu’ils ont gardé en mémoire leurs scrupules habituels, leurs habituelles considérations, leurs habituelles préventions. Pourquoi le laconisme d’autres ? Parce qu’ils se sont souvenus de leur incapacité doctrinale et parce qu’ils ont craint de faire – ou de me faire – faire piètre figure. Pourquoi les exhibitions trop visibles d’autres encore ? Parce qu’ils se sont souvenus de leur orgueil habituel, de leurs désirs de se mettre en vedette, d’être applaudis, de sortir du commun, d’être “ quelqu’un ”. Enfin, pourquoi la révélation imprévue d’autres dans un discours magistral, assuré, persuasif, triomphal ? Parce qu’eux seuls ont su se souvenir de Dieu. Il en a été de même de ceux qui étaient humbles et cherchaient à passer inaperçus et qui, au bon moment, ont su assumer d’un coup la primauté qu’on leur conférait et qu’ils ne voulaient pas exercer par crainte d’être présomptueux. Les trois premières catégories se sont souvenues de leur être inférieur. La quatrième de leur être supérieur et ils n’ont pas eu peur. Oh ! Sainte hardiesse qui vient de l’union à Dieu !

169.6

Or écoutez, vous tous, apôtres comme disciples. Vous, les apôtres, vous avez déjà entendu ces idées. Mais vous les comprendrez plus profondément désormais. Vous, les disciples, vous ne les avez pas entendues, ou d’une manière fragmentaire. Il faut les graver dans vos cœurs, car je vais me servir toujours plus de vous puisque le troupeau du Christ ne cesse d’augmenter ; le monde vous assaillira toujours plus, le nombre des loups allant croissant contre moi, le Pasteur, et contre mon troupeau. Je veux vous mettre entre les mains les armes nécessaires pour défendre la Doctrine et mon troupeau. Ce qui suffit au troupeau ne vous suffit pas à vous, petits bergers. S’il est permis aux brebis de faire des erreurs en broutant des herbes qui rendent le sang amer et exaspèrent les désirs, il ne vous est pas permis, à vous, de commettre les mêmes erreurs en amenant un troupeau nombreux à sa ruine. Réfléchissez que, là où se trouve un berger idolâtre, les brebis périssent empoisonnées ou assaillies par les loups.

169.7

Vous êtes le sel de la terre et la lumière du monde. Mais si vous manquez à votre mission, vous deviendrez un sel insipide et inutile. Rien ne pourra plus vous rendre cette saveur. Car, après avoir reçu ce don de Dieu, vous l’avez perdu en le diluant dans les eaux fades et souillées de l’humanité, en l’affadissant par la douceur corrompue des sens, en mêlant au sel pur de Dieu des monceaux de déchets d’orgueil, d’avarice, de gourmandise, de luxure, de colère, de paresse, de sorte que l’on a un grain de sel pour sept fois sept grains de chaque vice. Votre sel n’est alors qu’un mélange de pierraille dans laquelle le pauvre grain de sel est perdu, de pierraille qui crisse sous les dents, qui laisse dans la bouche un goût de terre et rend la nourriture désagréable, répugnante. Il n’est même plus bon pour des usages inférieurs car un savoir pétri des sept vices nuirait même aux missions humaines. Alors le sel n’est bon qu’à être jeté et foulé aux pieds insouciants des hommes. Que de monde, que de monde pourra ainsi piétiner les hommes de Dieu ! Car ces appelés auront permis au peuple insouciant de les écraser, puisqu’ils ne sont plus la substance vers laquelle on accourt pour trouver la saveur de choses nobles, célestes : ils seront uniquement des rebuts.

Vous êtes la lumière du monde. Vous êtes comme ce sommet qui a été le dernier d’où le soleil ait disparu et le premier à recevoir la lumière argentée de la lune. Celui qui se trouve en haut brille, et on le voit car même l’œil le plus distrait se pose parfois sur les hauteurs. Je dirais que l’œil matériel, dont on dit qu’il est le miroir de l’âme, reflète le désir de l’âme, le désir souvent inaperçu, mais toujours vivant tant que l’homme n’est pas un démon, le désir des hauteurs, des hauteurs où la raison place instinctivement le Très-Haut. Et en cherchant les cieux, il lève les yeux vers les hauteurs, du moins quelquefois au cours de sa vie.

Je vous prie de vous rappeler ce que tous nous faisons, depuis notre plus tendre enfance, en entrant à Jérusalem. Où se précipitent nos regards ? Vers le mont Moriah que couronne le triomphe de marbre et d’or du Temple. Et quand nous sommes dans son enceinte ? Nous regardons les dômes précieux qui resplendissent au soleil. Que de beautés à l’intérieur de l’enceinte sacrée, dans ses atriums, dans ses portiques et dans ses cours ! Mais l’œil s’élance vers le haut. Je vous prie encore de vous souvenir de nos voyages. Où se dirige notre regard, comme pour oublier la longueur du chemin, la monotonie, la fatigue, la chaleur ou la boue ? Vers les cimes, même si elles sont peu élevées, même si elles sont lointaines. Et comme nous sommes soulagés de les voir apparaître, lorsque nous traversons une plaine uniformément plate ! Y a-t-il de la boue en bas ? Là-haut, tout est pur. Fait-il une chaleur étouffante en bas ? Là-haut, il fait frais. L’horizon est-il limité en bas ? Là-haut, il s’étend sans limites. Et, rien qu’à voir ces sommets, on a l’impression que le jour est moins chaud, la boue moins visqueuse, la marche moins triste. Qui plus est, si une ville brille au sommet d’une montagne, il n’est pas d’yeux qui ne l’admirent. On dirait même qu’une localité sans importance s’embellit si on la place, de façon presque aérienne, au sommet d’une montagne. Et c’est pour cela que, dans la vraie religion comme dans les fausses, toutes les fois qu’on l’a pu, on a construit les temples sur un lieu élevé ; s’il n’y avait pas de colline ou de montagne, on leur a édifié un piédestal de pierre en construisant à force de bras la plate-forme sur laquelle on allait bâtir le temple. Pourquoi agit-on ainsi ? Parce qu’on veut que sa seule vue tourne nos pensées vers Dieu.

J’ai dit également que vous étiez une lumière. Quand, le soir, on allume une lampe dans la maison, où la met-on ? Dans un trou, sous le four ? Dans la grotte qui sert de cave ? Ou renfermée dans un coffre ? Ou tout simplement la cache-t-on sous le boisseau ? Non, parce qu’il serait alors inutile de l’allumer. Mais on pose la lampe sur une console ou bien on l’accroche à un support élevé pour que, de là-haut, elle éclaire toute la pièce et tous ceux qui s’y trouvent. Mais puisque la lampe que l’on place en hauteur est chargée de rappeler Dieu et de donner de la lumière, elle doit être à la hauteur de son devoir.

169.8

Vous qui devez rappeler le vrai Dieu, faites en sorte de ne pas avoir en vous le paganisme aux sept éléments. Autrement, vous deviendriez des hauts lieux profanes avec des bois sacrés, dédiés à tel ou tel dieu et vous entraîneriez dans votre paganisme ceux qui voient en vous des temples de Dieu. Vous devez porter la lumière de Dieu. Une lampe sale, une lampe qui n’est pas garnie d’huile, fume et ne donne pas de lumière, elle sent mauvais et n’éclaire pas. Une lampe cachée derrière un tube de quartz sale ne crée pas l’éclat gracieux, le jeu brillant de la lumière sur le minéral propre, mais elle reste faible derrière le voile de fumée noire qui rend opaque son abri cristallin.

La lumière de Dieu resplendit là où se trouve une volonté diligente pour enlever chaque jour les scories que produit le travail, avec les contacts, les réactions, les déceptions. La lumière de Dieu resplendit quand la lampe est garnie d’un liquide abondant d’oraison et de charité. La lumière de Dieu se multiplie en d’infinies splendeurs quand s’y trouvent les perfections de Dieu dont chacune suscite chez le saint une vertu qui s’exerce de façon héroïque si le serviteur de Dieu tient le quartz inattaquable de son âme à l’abri de la fumée noire de toutes les mauvaises passions. Un quartz inattaquable. Inattaquable ! (A cette conclusion, la voix de Jésus se fait tonitruante, et elle résonne dans l’amphithéâtre naturel.)

Dieu seul a le droit et le pouvoir de rayer ce cristal, d’y graver son Nom très saint avec le diamant de sa volonté. Alors ce Nom devient un ornement qui multiplie les facettes de beauté surnaturelle sur le quartz très pur. Mais si un indigne serviteur du Seigneur perd le contrôle de lui-même et la vue de sa mission – qui est entièrement et uniquement surnaturelle – et laisse apposer sur ce cristal de faux ornements, des égratignures et non des gravures, des chiffres mystérieux et sataniques tracés par la griffe de feu de Satan, alors la lampe admirable perd sa splendide et toujours intacte beauté : elle se lézarde et se dégrade, étouffant la flamme sous les débris du verre éclaté ou, si elle ne se lézarde pas, elle produit un amas de signes d’une nature non équivoque sur lesquels sa suie se dépose, s’insinue et corrompt.

169.9

Malheur ! Trois fois malheur aux pasteurs qui perdent la charité, qui se refusent à s’élever jour après jour pour faire monter le troupeau qui attend leur vertu pour les immiter. Je les frapperai en les faisant tomber de leur place et en éteignant toute leur fumée.

Malheur ! Trois fois malheur aux maîtres qui repoussent la Sagesse pour se saturer d’une science souvent contraire, toujours orgueilleuse, parfois satanique parce qu’elle les réduit à leur humanité. En effet – écoutez bien mes paroles et retenez-les –, alors que le destin de tout homme est de devenir semblable à Dieu par la sanctification qui fait de l’homme un fils de Dieu, le maître, le prêtre, devrait dès cette terre en posséder déjà l’aspect, le seul, celui de fils de Dieu. Il devrait avoir l’aspect d’une créature qui soit tout entière âme et perfection, pour pouvoir « aspirer » vers Dieu ses disciples. Anathème aux maîtres chargés d’assurer l’enseignement surnaturel qui deviennent des idoles de connaissances humaines.

Malheur ! Sept fois malheur à mes prêtres spirituellement mort, qui sont devenus insipides, dont la chair souffre d’une tiédeur maladive, dont le sommeil est rempli d’apparitions hallucinantes de tout ce qui existe hormis le Dieu un et trine, et plein de toutes sortes de calculs, excepté le désir surnaturel d’augmenter les richesses des cœurs et de Dieu. Ils vivent, ensevelis dans leur humanité, mesquins, engourdis, et entraînent dans leurs eaux mortes ceux qui les suivent en croyant qu’il sont la “ vie ”.

Malédiction de Dieu sur ceux qui corrompent mon petit troupeau, mon troupeau bien-aimé. Ce n’est pas à ceux qui périssent par suite de votre indolence, ô serviteurs défaillants du Seigneur, mais à vous-mêmes que je demanderai des comptes et que j’imposerai une punition, pour toute heure et pour tout moment gâché, pour tout le mal qui a pu survenir ou en résulter.

Souvenez-vous de ces paroles. Et maintenant, allez. Moi, je monte au sommet. Mais vous, dormez. Demain, le Pasteur ouvrira les pâturages de la Vérité au troupeau. »

169.1

Jesus is walking fast along a main road. He is alone. He is going towards a mountain.

This mount, which rises near a main road running eastwards from the lake, and it begins to rise with a low mild elevation, which extends for a good distance, forming a tableland from which one can see all the lake and the town of Tiberias towards the south, as well as other towns, not quite so beautiful, stretching towards the north. There is then a crag and the mountain rises rather steeply up to a peak, and then slopes down and rises once again up to another peak, similar to the previous one, thus forming a kind of strange saddle.

Jesus begins climbing towards the tableland along a mule-track, which is still quite comfortable and reaches a small village, the inhabitants of which work the tableland, where the corn is beginning to come to ear. He goes through the village and proceeds through the fields and meadows all strewn with flowers and rustling with crops. The clear day displays all the beauty of the surrounding nature.

Besides the lonely little mountain, towards which Jesus is going, to the north lies the imposing peak of Mount Hermon, the top of which looks like a huge pearl laid on a base of emeralds, so white is the peak covered with snow, whereas the woody slope is green. Beyond the lake, which is between the lake and Mount Hermon, the plain is green. Lake Merom is there, but cannot be seen from here. There are more mountains towards the lake of Tiberias on the north-west side and beyond the lake there is a lovely flat country and other mountains, the contours of which are softened by the distance. To the south, on the other side of the main road, I can see the hills, which I think conceal Nazareth. The more one climbs, the wider the view. I cannot see what lies to the west, because the mountain acts as a wall.

169.2

Jesus first meets the apostle Philip, who seems to have been posted there as sentinel. «What, Master? You are here? We were expecting to meet You on the main road. I am waiting here for my companions who have gone to get some milk from the shepherds who pasture their flocks on these mountains. Down, on the road, there is Simon with Judas of Simon and Isaac, and… Oh! here… Come! Come! The Master is here!»

The apostles, who are coming down with flasks and containers, begin to run and the younger ones, of course, arrive first. The welcome they give the Master is really touching. At last they are all together and while Jesus smiles, they all want to speak and tell Him…

«But we were waiting for You on the road!»

«We were just thinking that You were not coming even today.»

«You know, there are many people.»

«Oh! We were embarrassed, there are some scribes and even some of Gamaliel’s disciples…»

«That’s right, my Lord! You left us just at the right moment! I have never been so afraid as I was just then. Don’t play such a trick on me again!»

Peter complains and Jesus smiles and asks: «Did anything wrong happen to you?»

«Oh! no! On the contrary… Oh! Master! Don’t You know that John gave a sermon?.. It sounded as if You were speaking through him. I… we were all dumbfounded… That boy who only a year ago was able only to cast a net… oh!» Peter is still amazed and he shakes John who smiles but is silent. «Do you believe that it is possible that this boy spoke those words with these smiling lips? He sounded like Solomon.»

«Also Simon spoke very well, my Lord. He was really “the chief”» says John.

«No wonder! He took me and pushed me there! Who knows!…They say that I gave a good sermon. Perhaps I did. I don’t know… because what with the surprise at John’s words, what with the fear of speaking to so many people and causing You to cut a poor figure, I was bewildered…»

«Causing Me to cut a poor figure? But you were speaking and you would have cut a poor figure, Simon» teases Jesus.

«Oh! As far as I am concerned… I was not worried about myself. I did not want them to sneer at You and consider You a fool for choosing a blockhead as your apostle.»

Jesus sparkles with joy because of Peter’s humility and love. But He only asks: «And what about the others?»

«Also the Zealot spoke very well. But he… we all know. But this boy was the great surprise! Of course, since we retired to pray, the boy’s soul seems to be in Heaven all the time.»

«That is true, very true.» They all confirm Peter’s words. And they continue telling Jesus…

«You know? Among the disciples now there are two who, according to Judas of Simon, are very important. Judas is very active. Of course! He knows many of those… high up and knows how to deal with them. And he likes to speak… He speaks very well. But the people prefer to hear Simon, Your cousins and above all this boy Yesterday a man said to me: “That young man speaks very well – he was referring to Judas – but I prefer you”. Oh! poor fellow! He prefers me and I can hardly put a few words together!… But why did You come here? The meeting place was the road, and we have been there.»

«Because I knew I was going to find you here.

169.3

Now listen. Go down and tell the others to come up, also the known disciples. The people are not to come today. I want to speak to you alone.»

«In that case it is better to wait until evening. When the sun is about to set, the people spread among the nearby villages and they come back the following morning waiting for You. Otherwise… who will hold them back?»

«Alright. Do that. I will wait for you up there, at the top. The nights are mild now and we can sleep in the open.»

«Wherever You wish, Master. Providing You are with us.»

The disciples go away and Jesus resumes climbing up to the top, which is the same one as I already saw last year in the vision[1] for the end of the sermon of the Mount and the first meeting with Mary Magdalene. The view is now wider and is becoming brighter in the sunset.

Jesus sits on a rock and is recollected in meditation. And He remains in this way until the shuffling of feet on the path warns Him that the apostles are back. It is getting dark, but the sun still shines on the mountain top, drawing scents from every herb and flower… There is a strong smell of wild lilies of the valley while the tall stems of narcissi shake their stars and buds as if they were asking for dew.

Jesus gets up and greets them: «Peace be with you.»

There are many disciples who come up with the apostles. Isaac leads them smiling. His smiling face is the thin face of an ascetic. They all gather around Jesus Who is greeting Judas Iscariot and Simon Zealot particularly.

«I wanted you all here with Me, to be for a few hours with you alone and speak only to you. I have something to tell you to prepare you for your mission. Let us take our food and then we shall speak, and while you are sleeping your souls will continue to relish the doctrine.»

They have their frugal meal and then form a circle around Jesus Who is sitting on a large stone. They are about one hundred, perhaps more, between disciples and apostles: a circle of attentive faces, which the flames of two fires light up oddly.

169.4

Jesus speaks slowly, gesticulating quietly. His face looks paler, as it emerges from His dark blue tunic and also because it is lit up by the rays of the new moon, which illuminates the spot where He is, a small spot of a moon in the sky, a ray of light that caresses the Master of Heaven and earth.

«I wanted you here, aside, because you are My friends. I called you together after the first test of the Twelve, to widen the circle of My active disciples, and to hear from you your first reactions to being guided by those whom I am giving to you to continue My work. I know that everything went well. I supported with My prayer the souls of the apostles, who had come out of a praying retreat with a new strength in their minds and in their hearts. A strength that does not come from human effort, but from complete reliance in God.

169.5

The ones that have given the most are the ones that have forgotten the most about themselves.

To forget onself is a difficult task. Man is made of recollections and the ones that raise their voice most are the memories of one’s ego. You must distinguish between ego and ego. There is the spiritual ego of the soul that remembers God and its origin from God, and there is the inferior ego of the flesh that remembers its passions and the numerous demands concerning its whole being. They are so many voices as to form a choir, and unless the spirit is quite strong, they overcome the solitary voice of the spirit that remembers its nobility as a child of God. It is therefore necessary — with the exception of this holy memory that should always be stimulated and kept green and bright — it is necessary to learn how to forget yourselves, in all the memories, the needs, the timid reflections of the human ego, in order to be perfect disciples.

In this first test of My Twelve, those who have given most are the ones who forgot themselves most. They forgot not only their past, but also their limited personality. They are the ones who no longer remembered what they were, and were so united to God as to be afraid of nothing. Why were some standoffish? Because they remembered their habitual scruples, their usual considerations and prejudice. Why were others laconic? Because they remembered their doctrinal inability and they were afraid of cutting a bad figure or causing Me to cut one. Why the showy ostentation of others? Because they remembered their usual pride, their desire to show off, to be applauded, to rise above the others, to be “someone”. Finally, why the sudden revelation of a triumphal, rabbinic, persuasive, firm eloquence in others? Because they, and they alone did remember God. Like those who so far have been humble and have endeavoured to pass unnoticed and at the right moment were able, all of a sudden, to assume the pre-eminent lest conferred to them, and which they never wanted to exert lest they should presume too much. The first three groups rememered their inferior ego. The other group, the fourth, remembered their superior ego and were not afraid. They felt God with themselves and in themselves and were not afraid. Oh! holy boldness which comes from being with God!

169.6

Therefore now listen, both you apostles and you disciples. You apostles have already heard these concepts. But now you will understand them in greater depth. You disciples have never heard of them or you have only heard fragments of them. And you must engrave them on your hearts. Because I will make greater and greater use of you, as Christ’s flock is becoming more and more numerous. Because the world will attack you more and more violently, and its wolves will increase in number against Me, the Shepherd and against the flock and I want to put in your hands the weapons to defend both the Doctrine and My flock. What is sufficient for the herd is not sufficient for you, little shepherds. If the sheep are allowed to make mistakes, browsing in herbs which make blood bitter or desires crazy, you are not allowed to make the same mistakes, leading a large herd to ruin. Because you must realise that where there is an idolatrous shepherd the sheep either die of poison or are devoured by wolves.

169.7

You are the salt of the earth and the light of the world. But should you fail in your mission you would become a tasteless and useless salt. Nothing could give you flavour again, since God could not give it to you, considering that it was given to you as a gift, and you have desalted it, by washing it in the insipid dirty water of mankind, by sweetening it by means of the corrupt sweetness of sensuality, thus mixing the corruption of pride, avarice, gluttony, lust, wrath, sloth with the pure salt of God so that there is a grain of salt to seven times seven grains of each vice. Your salt, therefore, is but a mixture of stones in which the poor grain of lost salt cannot be found, a mixture of stones screeching under your teeth and leaving in your mouths the flavour of earth, that makes food horrible and disgusting. It is not even useful for inferior use, as the flavour of the seven vices would harm every human employment as well. The salt then can only be spread and trodden on by the careless feet of the people. How many people will therefore be able to tread heavily on the men of God! Because those chosen men will allow the careless people to trample on them, as they no longer are a substance employed to give the flavour of noble heavenly things, as they are nothing but corruption.

You are the light of the world. You are like this mountain top which was the last to be kissed by the sun and the first to be silvered by the moon. He who is in a high place shines and can be seen because even the most dreamy eye looks now and again at high spots. I would say that the physical eye, which is said to be the mirror of the soul, reflects the yearning of the soul, a yearning often unnoticed but always alive as long as a man is not a demon, a yearning after heights where by instinct reason places the Most High. And searching for Heaven, at least some times in life the eye looks at heights.

I beg you to remember what we all have done, since our childhood, entering Jerusalem. Where do our eyes turn? To Mount Moriah, triumphantly crowned with the marbles and gold of the Temple. And where do we turn our eyes when we are in the enclosure of the Temple? We look at the precious domes shining in the sun. How much beauty there is in the sacred enclosure, spread in its halls, porches and yards! But what is up there strikes our eyes. I also beg you to remember what happens when we are on the way to some place. Where do we turn our eyes, almost to forget the length of the journey, the boredom, the tiredness, the heat, the dust of the road? They turn to the mountain tops, even if they are not very high, even if they are far away. And what a relief it is to see them appear if we are walking in a flat unvarying plain! Is there mud on the road? There is neatness up there. Is it sultry on the plain? It is cool up there. Is the view limited down here? It is wide up there. And only by looking at the mountain tops we feel less the heat of the day, the mud is not so slippery, and walking is not so painful. If there is a town shining on the mountain top, no eye will refrain from admiring it. We could say that even a modest place becomes beautiful if placed, almost like an airy place, on a mountain top. That is why in the true and false religions, the temples were placed, whenever possible, on high spots, and if there was no hill or mountain, they built a stone pedestal, thus building with human labour the elevation on which to lay the temple. Why is that done? Because men want the temple to be seen so that its sight will remind mankind of God.

Likewise I said that you are lights. When in the evening you light a lamp in the house, where do you put it? In a hole under the oven? In the cave used as a cellar? Or do you close it in a chest? Or do you hide it under a bushel? No, you do not. Otherwise it would be useless lighting it. The light instead is placed on top of a shelf, or it is put on a lamp-stand, so that being high up, it may brighten up the whole room and illuminate the people living in it. And precisely because what is placed on a high place is to remind men of God and illuminate, it must be able to fulfill its task.

169.8

You must remember the True God. Thus you must ensure that you do not have within yourselves the sevenfold paganism. Otherwise you would become profane high places with thickets sacred to this or to that god, and you would drag into your paganism those who look at you as the temples of God. You must bear the light of God. A dirty wick, a wick not nourished with oil, smokes and gives no light, it has a horrible smell and does not illuminate. A lamp hidden behind a dirty quartz-crystal does not create the splendid gracefulness or the dazzling effects of light on the bright mineral. But it fades behind the veil of black smoke that makes the crystal cover dull.

The light of God shines where wills are zealous in removing every day the scum produced by work itself, with its contacts, reactions and disappointments. The light of God shines where the wick is immersed into plenty of liquid full of prayer and charity. The light of God multiplies into infinite splendid reflections, as many as the perfections of God, each of which excites in the saint a virtue practised heroically, if the servant of God keeps the unattackable quartz of his soul clear from the smoke of every soiling passion. The unattackable quartz. Unattackable! (Jesus thunders out in this conclusion and His voice resounds in the natural amphitheatre).

Only God has the right and the power to scratch that crystal, to write His Most Holy Name on it with the diamond of His will. That Name then becomes the ornament that emphasizes the brighter facets of supernatural beauty on the most pure quartz. But if the foolish servant of the Lord, losing control of himself and the sight of his mission, a completely and solely supernatural one, allows false ornaments and scratches, instead of engravings to be cut on his quartz, that is, mysterious and satanic figures made by the hot claw of Satan, then the wonderful lamp no longer retains its intact beauty, but it cracks and breaks and the fragments of the splintered crystal suffocate the flame, and even if it does not break, a tangle of marks of unmistakable nature forms on its surface and soot penetrates into them spoiling it.

169.9

Woe, three times woe, to the shepherds who lose charity, who refuse to climb day by day to take upwards their flocks that expect their ascent in order to ascend themselves. I will strike them down and remove them from their positions and I will put out their smoke altogether.

Woe, three times woe, to the masters who reject Wisdom to become saturated with a science, which is often opposed and always proud, sometimes satanic, because it makes them men, whereas – listen and remember – if every man is destined to become like God, through the sanctification that makes man a son of God, a master, a priest should already have in this world the aspect of a son of God, and only such aspect. He should have the aspect of a creature entirely devoted to souls and to perfection. He should have such aspect to lead his disciples to God. Anathema to the masters of a supernatural doctrine, who become human knowledge.

Woe, seven times woe, to those among My priests who are dead to the spirit, who with their lack of savour and ill-living flesh live as miserable sluggish human beings. Their sleep is full of hallucinated apparitions of everything, except God One and Triune and is also full of all sorts of calculations, except the superhuman desire to increase the wealth of hearts and of God. They live a material, miserable dull life, dragging into their dead water those who follow them, believing that they are “Life”. The curse of God on those who corrupt My little beloved flock. I will not punish those who perish through your laziness, o negligent servants of the Lord, but I will ask you to account for every hour and all the time lost and all evil consequences and I will punish you.

Remember those words. And now go. I am climbing to the top You may sleep. Tomorrow the Shepherd will open the pastures of Truth to His flock.»


Notes

  1. dessin sur lequel on peut lire, en plus des quatre points cardinaux, village sur la première élévation du mont, et grand-route au pied du mont. Les mentions lac de Génésareth et Tibériade sur la rive du lac, au début de la grand-route, sont peu lisibles. Le signe en forme de croix, au nord-est, pourrait indiquer la position du mont Hermon.
  2. vision de l’an passé que l’on pourra lire en 174.11/14.

Notes

  1. the vision to be found in 174.11/14.