The Writings of Maria Valtorta

207. A Bethléem, Marie évoque la naissance de Jésus.

207. In Bethlehem the Mother recalls the birth of Jesus.

207.1

Après avoir quitté Béthanie au premier sourire de l’aurore, Jésus prend la route de Bethléem avec sa Mère, Marie, femme d’Alphée, et Marie Salomé, suivi des apôtres et précédé de l’enfant qui trouve un motif de joie dans tout ce qu’il voit : les papillons qui s’éveillent, les oiseaux qui chantent ou becquettent sur le sentier, les fleurs que font resplendir les diamants de la rosée, l’apparition d’un troupeau avec quantité d’agnelets bêlants. Après avoir passé le torrent qui coule au sud de Béthanie, tout écumeux et riant au milieu des roches, la troupe se dirige vers Bethléem entre deux rangées de collines, toutes vertes d’oliviers et de vignes, avec de petits champs que dorent les moissons arrivées à maturation. La vallée est fraîche, et la route assez praticable.

Simon-Pierre s’avance pour rejoindre le groupe de Jésus et demande :

« Allons-nous d’ici à Bethléem ? Jean dit que, la dernière fois, vous aviez pris un autre chemin.

– C’est vrai, répond Jésus. Mais c’était parce que nous venions de Jérusalem. D’ici, c’est plus court. Au tombeau de Rachel, que les femmes veulent voir, nous nous séparerons comme vous l’avez décidé il y a un moment. Nous nous retrouverons ensuite à Bet-çur où ma Mère désire faire halte.

– Oui, c’est ce que nous avons dit… mais ce serait si beau d’y être tous… Ta Mère spécialement… car, enfin, la reine de Bethléem et de la grotte, c’est elle, et elle sait tout parfaitement… Entendu de sa bouche… ce serait différent, voilà. »

Jésus sourit en regardant Simon qui insinue doucement son désir.

« Quelle grotte, père ? demande Marziam.

– La grotte où est né Jésus.

– Oh ! C’est beau ! J’y vais moi aussi !

– Ce serait vraiment beau ! Interviennent Marie, femme d’Alphée, et Salomé.

– Très beau !… Ce serait revenir en arrière… à l’époque où le monde t’ignorait, c’est vrai, mais ne te haïssait pas encore… Ce serait retrouver l’amour des simples qui ne surent que croire et aimer, avec humilité et foi… Ce serait déposer ce fardeau d’amertume qui me pèse sur le cœur depuis que je te sais ainsi haï, le déposer là dans ta crèche… Elle doit avoir encore gardé la douceur de ton regard, de ta respiration, de ton sourire incertain… et tout cela me caresserait le cœur… Il est rempli d’une telle amertume ! »

Marie parle doucement, d’une voix empreinte de désir et de tristesse.

« Dans ce cas, nous y allons, Maman. A toi de nous conduire. Aujourd’hui tu es la Maîtresse et moi l’enfant qui apprend.

– Oh, mon Fils ! Non ! Tu es toujours le Maître…

– Non, Maman. Simon-Pierre a raison : sur la terre de Bethléem, c’est toi qui es la Reine. Ce fut ton premier château. Marie, descendante de David, conduis ce petit peuple à ta demeure. »

Judas allait parler, mais il préfère se taire. Jésus, qui re­marque son attitude et l’interprète, dit :

« Si l’un d’entre vous, à cause de la fatigue ou pour quelque autre raison, ne veut pas venir, qu’il poursuive librement sa route vers Bet-çur. »

Mais tous gardent le silence.

207.2

Ils continuent leur route par la fraîche vallée orientée d’est en ouest, puis ils tournent légèrement vers le nord, longent une colline qui se dresse là et rejoignent ainsi la route qui mène de Jérusalem à Bethléem, justement à côté du cube que surmonte le dôme arrondi du tombeau de Rachel. Tous s’approchent pour prier avec respect.

« Nous nous sommes arrêtés ici, Joseph et moi. Tout est comme à l’époque. Il n’y a que la saison qui diffère : c’était alors une froide journée de Casleu[1]. Il avait plu et les routes étaient devenues boueuses, puis il s’était levé un vent glacial et peut-être avait-il gelé pendant la nuit. Les chemins s’étaient durcis mais, sillonnés par des chars et par la foule, ils ressemblaient tous à une mer couverte de trous, si bien que mon petit âne se fatiguait beaucoup…

– Pas toi, Mère ?

– Oh moi, je t’avais, toi !… »

Son regard exprime un tel bonheur que c’en est émouvant. Puis elle reprend la parole :

« La nuit tombait et Joseph était très soucieux… Un vent cinglant se levait et ne cessait de se renforcer… Les gens se hâtaient vers Bethléem, on se heurtait, et plusieurs prenaient à partie mon petit âne qui avançait bien lentement, cherchant où il devait mettre les sabots… Il semblait savoir que tu étais là… et que tu sommeillais pour la dernière fois dans le berceau de mon sein. Il faisait froid… mais moi, je brûlais. Je te sentais arriver… Arriver ? Tu pourrais dire : “ Cela fait neuf mois que j’étais là, Maman. ” Certes, mais à ce moment-là, c’était comme si tu descendais des Cieux. Les Cieux s’abaissaient jusqu’à moi et j’en voyais les splendeurs… Je voyais la Divinité brûler de la joie de ta naissance toute proche, et ces feux me pénétraient, m’incendiaient, m’abstrayaient… de tout… Froid… vent… foule… tout cela n’était rien ! Je voyais Dieu… De temps à autre, avec effort, je réussissais à ramener mon esprit sur la terre et je souriais à Joseph qui craignait pour moi le froid et la fatigue ; il guidait le petit âne de peur d’un faux pas et m’enveloppait dans une couverture pour que je ne prenne pas froid… Mais il ne pouvait rien arriver. Je ne sentais pas les secousses. J’avais l’impression d’avancer sur un chemin d’é­toiles, au milieu de nuées éclatantes que soutenaient les anges… Et je souriais… D’abord à toi… A travers les barrières de la chair, je te regardais dormir, tes petits poings serrés dans ton petit lit de roses vivantes, mon bouton de lys… Puis je souriais à mon époux si affligé, si affligé, pour l’encourager… et aussi aux gens qui ne savaient pas que déjà ils respiraient dans l’aura du Sauveur…

Nous nous sommes arrêtés près du tombeau de Rachel pour que le petit âne se repose un moment et pour manger un peu de pain et d’olives, nos provisions de pauvres. Mais je n’avais pas faim. Je ne pouvais pas avoir faim… Ma joie me nourrissait…

207.3

Nous reprîmes notre route… Venez, que je vous montre où nous avons rencontré le berger… Ne craignez pas que je me trompe. Je revis cette heure et je retrouve chaque endroit car je vois tout à travers une grande lumière angélique. Peut-être les multitudes des anges sont-elles de nouveau ici, dans leur lumineuse pureté, invisibles pour les corps mais bien visibles pour les âmes. Tout se découvre et tout est indiqué. Eux, ils ne peuvent se tromper, et ils me conduisent… pour ma joie et la vôtre. Voici : c’est de ce champ-ci à celui-là que vint Elie avec ses brebis, et Joseph lui demanda du lait pour moi. Et c’est ici, dans ce pré, que nous nous sommes arrêtés pendant qu’il trayait le lait chaud et nourrissant et qu’il donnait ses conseils à Joseph. Venez, venez… Voici le sentier du dernier vallon avant Bethléem. Nous l’avons pris parce que la route principale aux abords de Bethléem était encombrée de gens et de montures…

207.4

Voici Bethléem. Oh ! Chère, très chère terre de mes pères qui m’as donné le premier baiser de mon Fils ! Tu es ouverte, bonne et odorante comme le pain dont tu portes le nom[2], pour donner le vrai Pain au monde qui meurt de faim ! Tu m’as embrassée, toi en qui demeure l’amour maternel de Rachel, comme une mère, terre sainte de la Bethléem de David, premier temple élevé au Sauveur, à l’Etoile du matin née de Jacob pour indiquer la route des Cieux à toute l’humanité ! Regardez comme la ville est belle en ce printemps ! Mais autrefois aussi, malgré la nudité des champs et des vignes, elle était belle ! Un léger voile de givre faisait resplendir les branches nues et elles se couvraient d’une poussière de diamants comme si elles étaient enveloppés dans un impalpable voile de paradis. La cheminée de chaque maison fumait pour le repas tout proche et la fumée, s’élevant par degrés jusqu’à ce sommet, montrait la ville elle-même toute voilée…

Tout était chaste, recueilli, en attente… de toi, de toi, mon Fils ! La terre te sentait venir… Et les habitants de Bethléem t’ont peut-être senti eux aussi, car ils ne sont pas méchants, malgré ce que vous pensez. Ils ne pouvaient pas nous abriter… Dans les maisons honnêtes et bonnes de Bethléem s’entassaient, arrogants comme toujours, sourds et orgueilleux, ceux qui maintenant le sont restés ; eux, ils ne pouvaient te sentir… Combien de pharisiens, de sadducéens, d’hérodiens, de scribes, d’esséniens il y avait ! Si leur cœur est aujourd’hui fermé, cela vient encore de leur dureté de cœur d’alors. Ce soir-là, ils ont fermé leur cœur à l’amour envers leur pauvre sœur… Ils sont restés dans les ténèbres, et y demeurent encore. Ils ont repoussé Dieu dès cet instant, en repoussant loin d’eux l’amour du prochain.

207.5

Venez. Allons à la grotte. Il est inutile d’entrer dans la ville. Les plus grands amis de mon Enfant n’y sont plus. La nature, cette amie, nous suffit, avec ses pierres, sa petite rivière, son bois pour faire du feu… la nature qui a senti venir son Seigneur… Voilà, venez en sûreté. On tourne ici… Voici les ruines de la tour de David. Ah ! Elles me sont plus chères qu’un palais de roi ! Ruines bénies ! Ruisseau béni ! Arbre béni que, comme par miracle, le vent a dépouillé de branches en grand nombre pour que nous trouvions du bois et puissions faire du feu ! »

Marie descend rapidement vers la grotte, franchit le ruisseau sur une planche qui sert de pont, court à l’emplacement qui se trouve devant les ruines et tombe à genoux sur le seuil de la grotte. Elle se penche et en baise le sol. Tous les autres la suivent. Ils sont émus… L’enfant, qui ne la quitte pas un instant, semble écouter une merveilleuse histoire et ses yeux noirs boivent les paroles et les gestes de Marie sans en perdre un seul.

Marie se relève et entre en disant :

« Tout est resté comme autrefois ! Mais il faisait nuit, à cette époque… Joseph fit de la lumière à mon entrée. C’est alors seulement, en descendant de l’âne, que je sentis à quel point j’étais fatiguée et gelée… Un bœuf nous salua, j’allai à lui pour sentir un peu de chaleur, pour m’appuyer contre le foin… Là où je suis, Joseph étendit du foin pour me faire un lit et le sécha pour moi comme pour toi, mon Fils, à la flamme allumée dans ce coin… car, par amour, cet ange qu’était mon époux était bon comme un père… Et nous tenant par la main, comme deux frères perdus dans l’obscurité de la nuit, nous avons mangé du pain et du fromage, puis il alla là-bas alimenter le feu, et ôta son manteau pour boucher l’ouverture… En réalité, il fit tomber un voile devant la gloire de Dieu qui descendait des Cieux, toi, mon Jésus… et je restai sur le foin, dans la tiédeur des deux animaux, enveloppée dans mon manteau et dans la couverture de laine… Mon cher époux… En cette heure d’anxiété où j’étais seule devant le mystère de ma première maternité, toujours pleine d’inconnu pour une femme et, pour moi, dans mon unique maternité, remplie aussi du mystère qu’allait être la vision du Fils de Dieu émergeant d’une chair mortelle, lui, Joseph, fut pour moi une mère, il fut un ange… mon réconfort… à cette époque comme toujours…

207.6

Le silence et le sommeil enveloppèrent ensuite le Juste… pour qu’il ne voie pas ce qui était pour moi le baiser quotidien de Dieu… Alors, après cet intermède des nécessités humaines, survinrent pour moi les flots sans mesure de l’extase arrivant de la mer paradisiaque, qui me soulevaient de nouveau sur des crêtes lumineuses toujours plus élevées, et m’emportèrent avec eux, tout en haut, dans un océan de lumière, de lumière, de joie, de paix, d’amour jusqu’à ce que je me trouve perdue dans la mer de Dieu, du sein de Dieu… J’entendis encore une voix de la terre : “ Tu dors, Marie ? ”, mais si lointaine… Un écho, un souvenir de la terre… si faible que l’âme n’en est pas touchée… je ne sais quelle réponse j’y fis pendant que je ne cessais de m’élever dans cet abîme de feu, de béatitude infinie, d’avant-goût de Dieu… jusqu’à lui, jusqu’à lui… Oh ! Mais est-ce toi qui es né, ou est-ce moi qui suis née de la splendeur trinitaire, cette nuit-là ? Est-ce moi qui t’ai donné, ou toi qui m’as aspirée pour me donner ? Je ne sais pas…

Puis vint la descente, de chœur en chœur, d’astre en astre, de nuage en nuage, douce, lente, bienheureuse, tranquille comme celle d’une fleur qu’un aigle a emmenée dans les hauteurs et qu’il a laissée tomber, et qui redescend lentement sur les ailes de l’air, embellie par une pluie de pierres précieuses, par une parcelle d’arc-en-ciel dérobée au ciel, et qui se retrouve sur sa terre natale… Mon diadème, c’est toi ! Toi, sur mon cœur…

M’étant assise ici, après t’avoir adoré à genoux, je t’ai aimé. Enfin, j’ai pu t’aimer sans la barrière de la chair ; je me suis levée pour te porter à l’amour de celui qui, comme moi, était digne de t’aimer dans les premiers. Et ici, entre ces deux rustiques colonnes, je t’ai offert au Père. Et, ici, tu as reposé pour la première fois sur le cœur de Joseph… Je t’ai ensuite emmailloté et, ensemble, nous t’avons déposé ici… Je te berçais pendant que Joseph séchait le foin à la flamme et le tenait au chaud en le mettant sur sa poitrine. A cet endroit, nous t’adorions tous deux, penchés sur toi comme moi maintenant, pour boire ta respiration, pour voir à quel anéantissement peut conduire l’amour, pour verser les larmes que l’on verse sûrement au Ciel sous l’effet de la joie inépuisable de voir Dieu. »

207.7

Marie est allée et venue pendant cette évocation, indiquant les endroits, haletante d’amour, une larme scintillant dans ses yeux bleus et un sourire de joie sur les lèvres ; elle se penche réellement sur son Jésus qui s’est assis sur une grosse pierre pendant cette évocation, et elle embrasse ses cheveux en pleurant et adorant comme alors…

« Et puis les bergers… à l’intérieur, ici, pour adorer de toute leur âme pleine de bonté, accompagnés du grand soupir de la terre qui entrait avec eux et de leur odeur d’hommes, de troupeaux, de foin ; et au-dehors, partout, il y avait des anges pour t’adorer par leur amour, par leurs chants qu’aucune créature humaine ne saurait répéter, et par l’amour des Cieux, par l’atmosphère des Cieux qui entrait avec eux, et qu’ils apportaient avec leur éclat… Ta naissance, béni !… »

Marie s’est agenouillée auprès de son Fils ; elle pleure d’émotion, la tête appuyée sur ses genoux. Pendant quelques instants, personne n’ose parler. Plus ou moins émues, les personnes présentes regardent autour d’elles comme si, au milieu des araignées et des cailloux rugueux, elles espéraient voir le spectacle de la scène décrite…

Marie se ressaisit et dit :

« Voilà, je vous ai raconté la naissance de mon Fils dans son infinie simplicité et son infinie grandeur, avec mon cœur de femme, pas avec la sagesse d’un maître. Il n’y a rien d’autre, car ce fut la chose la plus grande de la terre, cachée sous les apparences les plus communes.

207.8

– Mais le lendemain ? Et ensuite ? demandent plusieurs d’entre eux, dont les deux Marie.

– Le lendemain ? C’est très simple : j’étais la mère qui allaite son bébé, le lave et l’emmaillote comme le font toutes les mères. Je chauffais l’eau puisée au ruisseau sur le feu allumé au-dehors, là, pour que la fumée ne fasse pas pleurer ses deux yeux bleus ; puis, dans le coin le plus abrité, dans un vieux baquet, je lavais mon enfant et je lui mettais des langes frais. J’allais à la rivière laver ses langes et je les étendais au soleil… et puis, joie entre les joies, je lui donnais le sein, et il tétait, prenait des couleurs, était heureux… Le premier jour, à l’heure la plus chaude, je suis allée m’asseoir là-dehors pour bien le voir. Ici, le jour filtre sans entrer, et la lumière et la flamme donnaient un aspect étrange aux choses. Je suis sortie, au soleil… et j’ai regardé le Verbe incarné. La Mère a alors connu son Fils et la servante de Dieu son Seigneur. Et je fus femme et adoratrice… Puis la maison d’Anne… les journées passées auprès du berceau, ses premiers pas, ses premiers mots… Mais cela vint plus tard, en son temps… Et rien, rien ne fut semblable à l’heure de ta naissance… Ce n’est qu’en revenant à Dieu que je retrouverai cette plénitude…

– pourtant… partir ainsi, au dernier moment ! Quelle imprudence ! Pourquoi ne pas avoir attendu ? Le décret prévoyait un délai pour des cas exceptionnels comme une naissance ou une maladie. C’est ce qu’Alphée a dit, intervient Marie, femme d’Alphée.

– Attendre ? Oh, non ! Ce soir-là, quand Joseph m’apporta la nouvelle, toi et moi, mon Fils, nous avons tressailli de joie. C’était l’appel… Car c’était ici, et ici seulement, que tu devais naître, comme les prophètes l’avaient annoncé. Et ce décret imprévu fut comme un acte de pitié du Ciel pour effacer chez Joseph jusqu’au souvenir de son soupçon. C’était celui que j’attendais, pour toi, pour lui, pour le monde juif comme pour le monde à venir, jusqu’à la fin des siècles. C’était annoncé. Et cela se produisit conformément à ce qui était annoncé[3]. Attendre ! Est-ce que l’épouse peut retarder son rêve nuptial ? Pourquoi attendre ?

– Mais… à cause de tout ce qui pouvait arriver…, répond Marie, femme d’Alphée.

– Je n’avais aucune crainte. Je me reposais sur Dieu.

– Mais savais-tu que tout allait se passer ainsi ?

– Personne ne me l’avait dit, et moi, je n’y pensais pas du tout, au point que, pour rassurer Joseph, je l’ai laissé penser – et vous aussi – qu’il y avait encore du temps avant la naissance. Mais moi, je savais que ce serait pendant la fête des Lumières que la Lumière du monde naîtrait.

– Et toi, mère, pourquoi n’as-tu pas plutôt accompagné Marie ? Et pourquoi mon père n’y a-t-il pas pensé ? Vous auriez dû venir ici, vous aussi. Pourquoi ne sommes-nous pas tous venus ? demande sévèrement Jude.

– Ton père avait décidé de venir après les Encénies, et il l’a dit à son frère, mais Joseph n’a pas voulu attendre.

– Mais toi, du moins… insiste Jude.

– Ne lui fais pas de reproches. C’est d’un commun accord que nous avons trouvé juste de laisser tomber un voile sur le mystère de cette naissance.

– Mais, avec ces signes, Joseph savait-il qu’elle allait survenir ? Si, toi, tu l’ignorais, pouvait-il le savoir, lui ?

– Nous ne savions rien, sauf qu’il devait naître.

– Et alors ?

– Alors, ce fut la Sagesse divine qui nous conduisit ainsi, comme c’était juste. La naissance de Jésus, sa présence dans le monde, devait apparaître privée de tout aspect étonnant, qui aurait excité Satan… Et vous voyez que l’animosité actuelle de Bethléem à l’égard du Messie est une conséquence de la première manifestation du Christ. La haine du démon utilisa cette révélation pour faire répandre le sang et, par le sang répandu, répandre la haine.

207.9

Es-tu content, Simon-Pierre ? Tu ne dis rien et c’est à peine si tu respires…

– Tellement content… à tel point qu’il me semble être hors du monde, dans un lieu encore plus saint que si j’étais au-delà du velarium du Temple… Tellement content que… que, maintenant que je t’ai vue à cet endroit, et avec la lumière d’alors, je crains de t’avoir traitée, avec respect, certes, comme une grande femme, mais toujours comme une femme. Désormais… désormais je n’oserai plus te dire comme avant : “ Marie. ” Tu étais auparavant pour moi la Mère de mon Maître. Maintenant, maintenant je t’ai vue au sommet de ces flots célestes, je t’ai vue comme une Reine et moi, misérable, voici ce que je fais de cet esclave que je suis. »

Et il se jette à terre, en baisant les pieds de Marie.

C’est maintenant Jésus qui parle :

« Simon, relève-toi, et viens ici, tout près de moi. »

Pierre va à gauche de Jésus car Marie est à sa droite.

« Que sommes-nous, maintenant ? demande Jésus.

– Nous ? Mais nous sommes Jésus, Marie et Simon.

– C’est bien, mais combien sommes-nous ?

– Trois, Maître.

– Une trinité, donc. Un jour[4], au Ciel, il vint une pensée à la divine Trinité : “ Il est temps que le Verbe aille sur la terre ”, et, dans un frémissement d’amour, le Verbe vint sur la terre. Il se sépara donc du Père et de l’Esprit Saint. Il vint œuvrer sur la terre. Au Ciel, les deux Personnes divines qui étaient restées contemplèrent les œuvres du Verbe et restaient plus unies que jamais pour répandre la Pensée et l’Amour afin d’aider la Parole qui œuvrait sur la terre. Un jour viendra où cet ordre arrivera du Ciel : “ C’est le moment de revenir, car tout est accompli ” ; alors le Verbe retournera au Ciel, ainsi… (Jésus fait un pas en arrière en laissant Marie et Pierre à leur place) et, du haut des Cieux, il contemplera les œuvres des deux restés sur la terre. Ceux-ci, en un mouvement saint, s’uniront plus que jamais pour associer le pouvoir à l’amour et en faire le moyen d’accomplir le désir du Verbe : la rédemption du monde par l’enseignement continu de son Eglise. Et le Père, le Fils et l’Esprit Saint feront de leur rayonnement une chaîne pour resserrer toujours plus les deux qui seront restés sur terre : ma Mère, l’amour ; toi, le pouvoir. Tu devras donc bien traiter Marie en reine, oui, mais sans être un esclave. Es-tu d’accord ?

– Je suis d’accord avec tout ce que tu veux. Je suis anéanti ! Moi, le pouvoir ? Ah, si je dois être le pouvoir, alors oui, je dois m’appuyer sur elle ! Oh, Mère de mon Seigneur ! Ne m’abandonne jamais, jamais, jamais…

– N’aie pas peur. Je te tiendrai toujours par la main, comme cela, comme je le faisais avec mon Bébé jusqu’à ce qu’il soit capable de marcher tout seul.

– Et après ?

– Après, je te soutiendrai par la prière. Allons, Simon, ne doute jamais de la puissance de Dieu. Je n’en ai pas douté, moi, ni Joseph. Toi non plus, tu ne dois pas douter. Dieu nous donne son secours, heure après heure, si nous restons humbles et fidèles…

207.10

Maintenant, venez au-dehors, près du ruisseau, à l’ombre de ce bon arbre. Si l’été était plus avancé, il vous donnerait ses pommes en plus de son ombre. Venez. Nous allons manger avant de partir… pour aller où, mon Fils ?

– A Jala. C’est tout près. Et demain nous irons à Bet-çur. »

Ils s’asseyent à l’ombre du pommier et Marie s’appuie contre son tronc robuste.

Barthélemy la regarde fixement — elle qui est si jeune et encore animée d’une manière céleste par tout ce qu’elle vient d’évoquer —, recevoir de son Fils la nourriture qu’il a bénite et lui sourire d’un regard plein d’amour, et il murmure :

« “ A son ombre je me suis assise et son fruit est doux à mon palais. ” »

Jude lui répond :

« C’est vrai. Elle meurt d’amour, mais on ne peut certainement pas dire que “ c’est sous un pommier qu’elle a été réveillée. ”

– Et pourquoi pas, mon frère ? Que savons-nous des secrets du Roi ? » répond Jacques, fils d’Alphée.

Jésus intervient en souriant :

« La nouvelle Eve a été conçue par la Pensée au pied du pommier du paradis pour que son sourire et ses larmes mettent en fuite le serpent et désintoxiquent le fruit empoisonné. Elle est devenue l’arbre du fruit rédempteur. Venez, mes amis, et mangez-en, car se nourrir de sa douceur, c’est se nourrir du miel de Dieu.

– Maître, réponds à un désir de savoir que j’ai depuis longtemps. Le Cantique que nous citons[5] annonce-t-il Marie ? demande doucement Barthélemy pendant que Marie s’occupe de l’enfant et parle avec ces compagnes.

Jésus se tourne vers les femmes.

– on parle d’elle dès le commencement du Livre, et on en parlera dans les livres à venir jusqu’à ce que la parole de l’homme devienne l’éternel hosanna de l’éternelle Cité de Dieu. »

« On voit bien qu’il descend de David ! Quelle sagesse, quelle poésie ! » dit Simon le Zélote à ses compagnons.

207.11

Judas qui, encore sous l’impression de la veille, parle peu tout en cherchant à retrouver la liberté qu’il avait auparavant, l’interrompt :

« Voilà : je voudrais comprendre pourquoi l’Incarnation devait absolument avoir lieu. Dieu seul peut parler de façon à vaincre Satan. Dieu seul peut avoir le pouvoir de racheter et je n’en doute pas. Cependant, voilà, il me semble que le Verbe pouvait s’humilier moins qu’il ne l’a fait en naissant comme tous les hommes, en s’assujettissant aux misères de l’enfance et au reste. N’aurait-il pas pu apparaître sous une forme humaine, déjà adulte, sous les apparences d’un adulte ? Ou, s’il voulait vraiment avoir une mère, en choisir une, mais adoptive comme il l’a fait pour son père ? Il me semble qu’une fois, je le lui ai demandé, mais il ne m’a pas répondu longuement, ou bien je ne m’en souviens pas.

– Demande-le-lui ! Puisque nous sommes dans le sujet…, dit Thomas.

– Pas moi. Je l’ai fâché et je ne me sens pas encore pardonné. Demandez-le-lui pour moi.

– Pardon ! Nous acceptons tout sans tant d’explications, et ce serait à nous de poser des questions ? Ce n’est pas pensable ! Riposte Jacques, fils de Zébédée.

– Qu’est-ce qui n’est pas pensable ? » demande Jésus.

Après un moment de silence, Simon le Zélote se fait l’interprète de tous et répète les questions de Judas et les réponses des autres.

« Moi, je ne garde pas rancune. C’est la première chose que je dois dire. Je fais les observations que je dois faire, je souffre et je pardonne. Ceci dit pour celui qui a peur ; d’ailleurs, cette peur est encore le fruit de son trouble. En ce qui concerne mon Incarnation réelle, je réponds : il est juste qu’il en ait été ainsi. A l’avenir, beaucoup tomberont dans toutes sortes d’erreurs au sujet de mon Incarnation. Ils me prêteront précisément les formes que Judas aurait voulu que je prenne : un homme dont le corps est en apparence formé de matière, mais en réalité fluide, comme un jeu de lumière, grâce auquel je serais et ne serais pas une chair. Et la maternité de Marie existerait sans vraiment exister. En vérité, je suis une chair, et Marie est la Mère du Verbe fait chair. Si l’heure de ma naissance ne fut qu’extase, c’est parce qu’elle est la nouvelle Eve qui ne porte pas le poids de la faute ni l’héritage du châtiment. Mais cela n’a pas été pour moi une dégradation de reposer en elle. Est-ce que par hasard la manne était avilie du fait qu’elle était dans le Tabernacle ? Non, elle était au contraire honorée de se trouver en ce lieu.

D’autres affirmeront que, n’étant pas une chair réelle, je n’ai pas enduré la souffrance ni la mort durant mon séjour sur la terre. Oui, comme on ne pourra nier mon existence, on niera la réalité de mon Incarnation ou la vérité de ma divinité. Non, en vérité, je suis éternellement Un avec le Père et je suis uni à Dieu en tant que Chair car l’Amour peut avoir rejoint ce qui ne peut être rejoint dans sa Perfection en se revêtant de chair pour sauver la chair. C’est ma vie entière qui répond à toutes ces erreurs, elle qui donne son sang depuis ma naissance jusqu’à ma mort et qui s’est assujettie à tout ce qu’elle partage avec l’homme, à l’exception du péché. Oui, je suis né de Marie, et cela pour votre bien. Vous ne savez pas à quel point la Justice s’adoucit à partir du moment où elle a la Femme comme collaboratrice. Es-tu satisfait, Judas ?

– Oui, Maître.

– Fais-en sorte que, toi aussi, tu me satisfasses. »

Judas baisse la tête de confusion ; peut-être est-il réellement touché par tant de bonté.

La halte se prolonge sous l’ombre fraîche du pommier. Certains dorment, d’autres somnolent. Mais Marie se lève et retourne dans la grotte, et Jésus la suit…

207.1

Dawn has just begun to smile when Jesus leaves Bethany and turns His steps towards Bethlehem with His Mother, Mary of Alphaeus, Mary Salome, followed by the apostles and preceded by the boy, who finds reason to rejoice in everything he sees: the butterflies that awake, little birds that sing or peck on the path, flowers sparkling with dewy diamonds, a flock that comes into sight and in which there are many little bleating lambs. After crossing the torrent, which foams merrily amongst stones, south of Bethany, the group turns towards Bethlehem, along a road running between two ranges of hills, completely covered with green olive-trees and vineyards, and a few small fields in which the golden corn is almost ready for reaping. The valley is cool and the road quite comfortable.

Simon of Jonah comes forward, he reaches Jesus’ group and asks: «Is this the road to Bethlehem? John says that the last time You took another road.»

«That is true» replies Jesus. «But that was because we were coming from Jerusalem. This one is shorter. At Rachel’s sepulchre, which the women wish to see, we will part, as you decided some time ago. We will meet later at Bethzur, where My Mother wishes to stop.»

«Yes, we said so… But it would be so lovely if we were all there… particularly Your Mother… because, after all, She is the Queen of Bethlehem and of the Grotto, and She knows everything so well… If we heard the story from Her… it would be quite different, that’s what I mean…»

Jesus smiles looking at Simon, who has kindly expressed his desire.

«Which grotto, father?» asks Marjiam.

«The Grotto where Jesus was born.»

«Oh! Lovely! I will come, too!…»

«It would be lovely indeed!» say Mary of Alphaeus and Salome.

«It would be beautiful!… It would mean going back to the time… when the world did not know You, that is true, but did not hate You yet… It would mean finding once again, the love of simple people who could but love and believe, with humility and faith…. And I would be able to lay aside this burden of bitterness which has been lying heavily on My heart since I learned that You are so hated, and I would lay it in Your manger… The kindness of Your eyes, of Your breath, of Your childish smile must still be there… and they would caress My heart… It is so grieved!…» Mary is speaking slowly, in a low voice expressing desire and sadness.

«Then, we shall go there, Mother. You will lead us. You are the Teacher today and I am the Little Boy Who is learning.»

«Oh! Son! No! You are always the Master…»

«No, Mother. Simon of Jonah is quite right. In the land of Bethlehem You are the Queen. It is Your first castle. Mary, of the house of David, lead this little group to Your abode.»

The Iscariot is on the point of speaking, but he remains silent. Jesus, Who has noticed and understands, says: «If anyone does not wish to come, because he is tired or for any other reason, he is free to proceed to Bethzur.» But no one replies.

207.2

They proceed westwards, along the cool valley. The road then bends lightly to the north along a protruding hill and they thus reach the road which takes from Jerusalem to Bethlehem, near a cube-shaped building surmounted with a small dome, which is Rachel’s tomb. They all go near it and pray reverently.

«Joseph and I stopped here… Everything is exactly the same as then. Only the season is different. It was a cold day in the month of Chislev. It had rained and the roads were muddy, then an ice-cold wind began to blow and perhaps during the night there was frost. The roads had hardened, but furrowed by cart-wheels and crowded with people, they were like a sea crowded with boats and My little donkey had difficulty in proceeding…»

«And did You not, Mother?»

«Oh! I had You!…» and She looks at Him with a tender blissful face. She then resumes speaking: «It was getting dark and Joseph was very worried… a biting cold wind was blowing stronger and stronger… People were rushing towards Bethlehem, pushing one another and many took to abusing My little donkey because it was going so slowly in an effort to find suitable places for its hooves… It seemed to be aware that You were there… and that You were sleeping for the last time in the cradle of My bosom. It was cold… But I was warm. I could feel You coming… Coming? You could say: “Mother, I had been there nine months”. Yes. But now it was as if You were coming from Heaven. Heaven was bending down over Me and I could see its brightness… I could see God inflamed with joy for Your oncoming birth and those flames pierced Me, burned Me, abstracted Me from everything… Cold… wind… crowds… it was all… nothing! I saw God… Now and again, with an effort, I would succeed in bringing My spirit back to the earth and I would smile at Joseph, who was afraid I might be cold and tired, and he led the little donkey lest it should stumble and he wrapped Me in a blanket lest I should get cold… But nothing could have happened to Me. I felt no jolts. I seemed to be moving along a starry path, among snow-white clouds, supported by angels… And I smiled… First at You… I looked at You, through the barrier of the flesh, while You were sleeping, with Your little fists closed, in Your cradle of living roses, My lily-bud… Then I smiled at My spouse, who was so distressed, to encourage him… And then at the people who were not aware that they were already breathing the air of the Saviour…

We stopped near Rachel’s tomb to let the donkey rest for a moment and to eat a little bread and some olives, the provisions of poor people. But I was not hungry. I could not be hungry… I was nourished with My joy…

207.3

We took to the road again… Come. I will show you where we met the shepherd… Do not worry, I cannot go wrong. I am living that hour again and I can find every place because I see everything through a bright angelical light. Perhaps the angelical group is here once again, invisible to our bodies, but visible to our souls with its brightness, and everything is revealed and clear. They cannot be mistaken, and they are leading Me… for My joy and yours. Here: Elias came from that field into this one with his sheep, and Joseph asked him for some milk for Me. And we stopped over there, in that field, while he was drawing the warm nourishing milk and giving some advice to Joseph.

Come, come… Here is the path of the last little valley before Bethlehem. We took it because the main road was a confusion of people and horses, close to the town…

207.4

There is Bethlehem! Oh! Dear land of My fathers, you gave Me the first kiss of My Son! You opened your door, as good and fragrant as the bread of which you bear the name[1], to give the True Bread to the world dying of starvation! Like a mother, in whom there is still Rachel’s maternal love, you embraced Me, o holy land of David’s Bethlehem, first temple of the Saviour, of the morning Star born of Jacob to show Mankind the road to Heaven! Look how beautiful she is now in springtime! But she was also beautiful then, although fields and vineyards were bare! A thin veil of frost was sparkling on the bare branches, which looked as if they were covered with diamond dust, wrapped in a heavenly impalpable veil. The chimney of every house was smoking while supper was being prepared and the smoke, rising from terrace to terrace up to this brow, made the town look veiled as well… Everything was chaste, intimate, waiting… For You, Son! The earth perceived Your arrival… And also the people of Bethlehem would have perceived You, because they are not bad, even if you do not believe so. They could not give us hospitality… The good honest homes in Bethlehem were crowded with insensitive proud people, who are always arrogant, and are so nowadays as well, and they could not perceive You… How many Pharisees, Sadducees, Herodians, scribes, Essenes there were! Oh! Their being dull at present is a consequence of their being hard-hearted then. They closed their hearts to love for their poor sister that night… and they remained and still are in darkness. They rejected God then, by rejecting love for their neighbour.

207.5

Come. Let us go to the Grotto. It is useless to enter the town. The best friends of My Child are no longer there. Friendly Nature is quite sufficient to make a fire, with its stones, its stream, its wood. Nature perceived the coming of its Lord… There… come without hesitating… We go round here… There, over there are the ruins of David’s Tower. Oh! it is dearer to Me than a royal palace! Blessed ruins! Blessed stream! Blessed tree because, as if by miracle, you allowed the wind to pull down so many of your branches so that we might find firewood and light a fire!»

Mary descends quickly towards the Grotto, She crosses the little stream on a board acting as a bridge, She runs in the open space before the ruins and falls on Her knees at the entrance of the Grotto, She bends and kisses the ground. All the others follow Her. They are touched… The boy, who has not left Her one moment, seems to be listening to a wonderful story and his little dark eyes drink in Mary’s words and gestures without missing a single one.

Mary stands up and goes in saying: «Everything is exactly as then!… But then it was night… Joseph lit a lamp when I entered. Only then, dismounting from the little donkey I realised how tired and cold I was… An ox greeted us, I went near it, to feel its warmth and lean against the hay… Joseph laid the hay out here, where I am, to make a bed for Me, and he dried the hay for Me and for You, Son, at the fire he had lit in that corner… because he was as good as a father in his love of an angelical spouse… And holding each other’s hand, like brother and sister lost in the darkness of night, we ate our bread and cheese, then he went over there to kindle the fire and he took off his mantle to close the entrance… In actual fact he put a veil before the glory of God descending from Heaven. You, My Jesus… and I lay on the hay, in the warmth of the two animals, wrapped in My mantle and covered with a woollen blanket… My dear spouse!… In that hour of anxiety when I was all alone before the mystery of My first maternity, an hour full of uncertainty for every woman, and in My case, in My only maternity, it was also full of the mystery of what it would be to see the Son of God emerge from mortal flesh, he, Joseph, was like a mother, an angel to Me… he was My comfort then and always afterwards…

207.6

Then silence and sleep wrapped the Just man… so that he might not see what for Me was God’s daily kiss…

And with regards to Me, after the interval of human necessities, there came immeasurable waves of ecstasy from a heavenly sea and they raised Me higher and higher on their bright crests carrying Me up with them into an ocean of light, of joy, of peace, of love, until I was lost in the sea of God, of God’s bosom… A voice from the earth whispered: “Are You sleeping, Mary?”. Oh! it was so far away!… An echo, a remembrance of the earth!… And so faint it was that My soul did not stir, and I do not know how I replied, while I rose, I rose even higher into the depth of fire, of infinite beatitude of foreknowledge of God… up to Him… Oh! were You born of Me that night, or was I born of the Triune brightness? Did I give You or did You absorb Me to generate Me? I do not know… And then the descent, from choir to choir, from star to star, from cloud to cloud, a sweet, slow, blissful, placid descent, like a flower carried high in the sky by an eagle and then dropped, descending slowly, on the wings of the air, made more beautiful by a drop of rain, by a tiny piece of rainbow stolen in the sky… alights on its native soil… My diadem: You! You on My heart…

Sitting here, after adoring You on My knees, I loved You. At last I could love You without the barrier of the flesh, and I moved from here to take You to the love of him, who, like Me, was worthy of being one of the first to love You. And here, between these two rustic columns, I offered You to the Father. And here You rested for the first time on Joseph’s heart… Then I swaddled You and together we laid You here… And I lulled You while Joseph was drying hay at the fire and when it was warm he placed it on Your chest and then we both adored You, bending over You, as I am doing now, to inhale Your breath, contemplating the humiliation to which love can lead and shedding tears which are certainly shed also in Heaven for the unexhausted joy of seeing God.»

207.7

Mary, Who has been pacing to and fro while recalling the past, pointing out the places, panting with love, with bright tears shining in Her blue eyes and a smile of joy on Her lips, bends over Her Jesus, Who is sitting on a huge stone listening to Her recollection, and kisses His head, weeping, adoring as She did then…

«And then the shepherds… they were in here, adoring with their good souls and with the deep sigh of the earth which entered with them, with their scent of humanity, of herds and hay; and outside there were the angels, everywhere, who adored with their love, with their songs which no human creature can repeat, and with the love of Heaven, with the air of Heaven which came in with them, which they brought in, in all their brightness… Your birth, Blessed Son!…»

Mary has knelt down beside Her Son and weeps emotionally with Her head resting on His knees. No one dare speak for some time. More or less moved they all look around as if they expected to see the scene painted among the cobwebs and rough stones…

Mary collects Herself and says: «Now, I told you of the infinitely simple and infinitely great birth of My Son. With My woman’s heart, not with the wisdom of a master. There is nothing else, because it was the greatest thing on the earth, concealed under very ordinary appearances.»

207.8

«But the day after? And then later?» many ask, amongst them the two Maries.

«The following day? Oh! very simple! I was the mother who nurses her baby, washes him and swaddles him, as every mother does. I used to warm the water of the stream on a fire lit out there, so that the smoke would not hurt His little blue eyes, and then in the most sheltered corner in an old tub I washed My Child and put fresh swaddling clothes on Him. I washed His napkins in the stream and hung them out in the sun… and then — and it was My greatest joy — I suckled Him and He sucked and became rosier and happier… On the first day, at the warmest hour of the day, I sat out there to see Him properly. The light glimmers in here, it does not come in direct and the lamp and the flame of the fire made things look strange. I went out there, in the sun… and I looked at the Incarnate Word. The Mother then became acquainted with Her Son and the handmaid of God with Her Lord. And I was a woman and a worshipper… Then Anna’s house… the days near Your cradle, Your first steps, Your first word… But that happened later, in due course… And nothing, nothing was equal to the hour of Your birth… Only when I return to God I will find that fullness once again…»

«But… why set out at the last moment! How unwary of You! Why not wait? The decree provided for an extension for special cases such as birth or disease. Alphaeus said so…» says Mary of Alphaeus.

«Wait? Oh! no! That evening, when Joseph brought the news, You and I, Son, leapt for joy. It was the call… because You were to be born here, and nowhere else, as the Prophets had foretold[2], and that sudden decree was as if merciful Heaven wanted Joseph to erase even the memory of his suspicion. It was what I was waiting for, for You, for him, for the Judaic world and for the future world, forever and ever. We decided. And we acted accordingly. Wait! Can the bride delay her nuptial dream? Why wait?»

«Well… anything might have happened…» says Mary of Alphaeus once again.

«I was not afraid of anything. I rested in God.»

«But did You know that everything would happen thus?»

«Nobody told Me. And I never thought of it, so much so that to encourage Joseph, I let him and you doubt that there was still time for the birth. But I knew, I really knew that the Light of the World was to be born during the feast of the Dedication.»

«And you, mother, why did you not go with Mary? And why did father not think of it? After all you were both going to come here! Did we not all come?» asks Judas Thaddeus sternly.

«Your father had decided to come after the Dedication and he told his brother. But Joseph would not wait.»

«But at least you…» insists Thaddeus.

«Do not reproach her, Judas. By mutual consent we decided it was just to lay a veil on the mystery of this birth.»

«Did Joseph know that it was to take place with those signs? If You did not know, how could he have known?»

«We knew nothing, except that He was to be born.»

«So?»

«So divine Wisdom guided us, as it was right that it should. Jesus’ birth and His presence in the world were to appear devoid of uncommon features, which might arouse Satan… And you are aware that the present bitter hatred of Bethlehem people towards the Messiah is a consequence of Christ’s first epiphany. Demoniacal hatred made use of the revelation to cause bloodshed, and thereby intensify hatred.

207.9

Are you satisfied, Simon of Jonah, who are speechless and almost breathless?»

«Yes, so much… so much that I seem to be out of this world, in a holier place than if I were beyond the Velarium of the Temple… So much… that now that I have seen You in this place and in the light of that night, I am afraid that I did not behave with respect towards You, as if You were a great woman, but just a woman. Now… now I will not dare to call You: “Mary”, as I did before. Before You were the Mother of My Master. Now I have seen You on the crests of those heavenly waves, I have seen You as a Queen, and I, a poor wretch, prostrate myself, because I am a slave» and he throws himself on the ground kissing Mary’s feet.

Jesus speaks now: «Simon, stand up. Come here, close to Me» Peter goes to the left hand side of Jesus because Mary is on His right. «What are we now?» asks Jesus.

«We? Well, we are Jesus, Mary and Simon.»

«Very well. But how many are we?»

«Three, Master.»

«So we are a trinity. One day, in Heaven, the Divine Trinity had a thought: “It is now time that the Word should go to the world”. And in a throb of love the Word came upon the earth. He parted therefore from the Father and the Holy Spirit. He came to work on the earth. The Two Who had remained in Heaven contemplated the deeds of the Word, remaining more united than ever to blend Thought and Love to assist the Word working on the earth. The day will come when an order will be issued from Heaven: “It is time for You to come back because everything has been accomplished”, and then the Word will go back to Heaven, thus… (Jesus takes a step backwards leaving Mary and Peter where they were) and from the heights of Heaven, He will contemplate the deeds of the two who remained on the earth, who, by holy inspiration, will join together more than ever, to blend power and love to obtain the means of fulfilling the desire of the Word: “The redemption of the world through the perennial teaching of His Church”. And the Father, the Son and the Holy Spirit will form a chain with Their beams to tie the two left on the earth more and more closely: My Mother, love; you, power. You will certainly have to treat Mary as a queen, but not as if you were a slave. Do you not think so?»

«I think everything You wish. I am overwhelmed! I… the power? Oh! If I am to be the power I must definitely lean on Her! Oh! Mother of my Lord, never abandon me, never, never…»

«Do not be afraid. I will always hold you by the hand, as I used to do with My Child until He could walk by Himself.»

«And after that?»

«And after I will support you with My prayers. Cheer up, Simon. Never doubt God’s power. I did not doubt it, neither did Joseph. You must not doubt it either. God gives us His help hour by hour, if we remain humble and faithful…

207.10

Come out here, now, near the stream, in the shade of the good tree, which, if it were later in summer, would give you its apples in addition to its shade; come. We shall eat before going… Where, Son?»

«To Jala. It is near. And tomorrow we shall go to Bethzur.»

They sit in the shade of the apple-tree and Mary leans against its robust trunk.

Bartholomew watches Her, so young and still heavenly moved by the recollection She made, while She accepts from Her Son the food He has blessed and She smiles at Him with loving eyes, and he whispers: « “In His shade I am seated and His food is sweet to My taste”.»

Judas Thaddeus replies to him: «It is true. She is sick with love. But we cannot say that She was awakened under an apple-tree.»

«Why not, brother? What do we know about the secrets of the King?» replies James of Alphaeus.

And Jesus smiling says: «The new Eve was conceived of the Thought at the foot of the paradisiacal apple-tree in order to put to flight the serpent and detoxicate the poisoned fruit by means of Her smile and Her tears. She became the tree of the redeeming fruit. Come, friends, and eat of it. Because to be nourished by its sweetness is to be nourished by the honey of God.»

«Master, please satisfy an old desire of mine for some clarification. Does the Song which we are reciting[3] foresee Her?» asks Bartholomew in a low voice while Mary is looking after the boy and speaking to the women.

«The Book speaks of her from its beginning and future books will speak of Her until the word of man changes into the everlasting hosanna of God’s eternal City» and Jesus turns towards the women.

«You can hear that He descends from David! What wisdom, what poetry!» says the Zealot speaking to his companions.

207.11

«Listen» the Iscariot who is still in the mood of the previous day and speaks very little, although he endeavours to emulate the freedom he had before, joins in the conversation «listen, I would like to understand why the Incarnation had to take place. Only God can speak in such a way as to defeat Satan. Only God can have the power of redeeming. And I do not doubt it. But I think that the Word might have lowered Himself less than He did by being born like every other man, submitting Himself to the miseries of childhood and so on. Could He not have appeared in human form already adult, in the appearance of an adult? And if He really wanted a mother, could He not have chosen one, an adoptive one as He did for a father? I think I asked Him once, but He did not reply at length, or I do not remember.»

«Ask Him! Since we are on the subject…» says Thomas.

«I won’t. I upset Him and I feel as if I have not been forgiven yet. Ask Him on my behalf.»

«I beg your pardon! We accept everything without so many clarifications and you expect us to ask questions? It is not fair!» retorts James of Zebedee.

«What is not fair?» asks Jesus.

There is silence, then the Zealot speaks on behalf of everybody repeating Judas Iscariot’s questions and the replies of the others.

«I do not bear a grudge. That is the first thing. I make the comments that I must make, I suffer and I forgive. That applies to him who is afraid, which is still the consequence of his perturbation. With regards to My real Incarnation I say: “It is just that it took place”. In future many people will make mistakes concerning My Incarnation, ascribing to Me the erroneous forms that Judas would like Me to have taken. A man seemingly solid in body, but in reality fluent like a lighting effect, so that I would and would not be flesh. And Mary’s maternity would and would not be a real maternity. I am really flesh and Mary is really the Mother of the Word Incarnate. If the hour of My birth was but an ecstasy, that is because She is the new Eve without the burden of sin and without the heritage of punishment. But I did not lower Myself by resting in Her. Was the manna enclosed in the Tabernacle perhaps humiliated? No, on the contrary it was honoured by being in that abode. Others will say that I, since I was not real flesh, did not suffer and did not die during My stay on the earth. Of course, since they cannot deny that I was here, they will deny My real Incarnation or My true Divinity. No, I am really One with the Father forever, and I am united to God as Flesh, because as a matter of fact it is possible that Love reached what is unreachable because of His Perfection, by becoming Flesh to save flesh. A reply to all these errors is given by My whole life which shed blood from birth to death and was submitted to everything that is common to man, except sin. Yes, I was born of Her. For your welfare. You do not know how much Justice has been mitigated since the Woman has become its collaborator. Have I satisfied you, Judas?»

«Yes, Master.»

«Do likewise with Me.»

The Iscariot bends his head, is abashed and perhaps he is really touched by so much kindness.

The rest is protracted in the cool shade of the apple-tree. Some fall asleep, some doze. But Mary gets up and goes back into the Grotto and Jesus follows Her…


Notes

  1. Casleu correspond à novembre/décembre.
  2. comme le pain dont tu portes le nom, parce que Bethléem signifie “ la maison du pain ”.
  3. ce qui était annoncé en : Mi 5, 1-2 ; le décret était l’ordre de recensement, comme on l’a vu en 27.2.
  4. Un jour : afin d’établir un parallèle entre Trinité céleste (Père, Fils et Esprit Saint) et trinité terrestre (Jésus, Marie et Pierre), l’explication doit recourir à l’expédient d’attribuer à Dieu des pensées et des comportements humains, en établissant des séparations et des réunions entre Personnes divines. Il n’est pas question pour autant, note Maria Valtorta sur une copie dactylographiée, de nier l’union hypostatique par laquelle le Verbe, étant réellement dans la chair du Fils de Dieu et de Marie, n’a pas cessé de faire un avec le père et donc avec l’Amour ; il n’a pas cessé d’être le Saint des saints, car il l’était par sa nature divine, et il l’était dans sa nature humaine, par grâce et par volonté très parfaites. La présente note, accompagnée des textes de 207.11, 324.3, 567.17, 630.21 et 634.11 ainsi que des notes de 54.5, 68.1, 342.5 et 346.5, peut aussi servir à interpréter correctement les expressions que l’on trouve en : 62.2 (pour m’unir au Père), 62.4 (j’étais dans le Père), 123.5 (j’ai quitté le Ciel), 126.1 (non pas à moi, mais à Celui qui m’a envoyé), 126.10, 128.2 (pas moi. Dieu), 129.3 (Dieu est au Ciel. Lui, il adore et va vers Lui), 249.4, 254.3 (Il faudrait le demander à celui qui les a faits), 272.2, 287.6 (A Dieu, pas à son Serviteur), 298.6 (Non pas de moi, mais du Père), 317.5, 371.6, 399.4 (Il a quitté le Père), 452.11, 479.2 (Il retourne vers le Père), 487.9, 517.2 (Une part de l’union que j’ai laissée), 534.8 (La Sagesse a quitté les Cieux), 600.21 (J’ai quitté le Père), 618.5 (je ne suis plus séparé du Père), 632.34 (Il a quitté le Ciel), 637.6 (J’ai quitté le Ciel), 642.9, etc. Il faut enfin relever le concept exprimé par l’écrivain dans le texte de 474.2/3 : la divinité, toujours unie hypostatiquement à Jésus Homme, n’était pas à tout instant sensible à l’Homme Rédempteur, qui devait aller jusqu’à faire l’expérience de cette douleur.
  5. nous citons : Ct 2, 3-5 ; 8-5.

Notes

  1. the bread of which you bear the name, as Bethlehem means the house of bread.
  2. foretold in Micah 5:1-2; the decree was the edict of the census, as seen in 27.2.
  3. we are reciting from Song of Songs 2:3-5; 8:5.