The Writings of Maria Valtorta

463. A Tarichée, discours sur la nature

463. In Tarichea, a lecture on the nature

463.1

La petite péninsule de Tarichée s’avance dans le lac en formant une anse profonde au sud-ouest. Il n’est pas faux de dire que, plutôt qu’une péninsule, c’est un isthme entouré d’eau sur presque tout son pourtour, et réuni à la terre par une sorte de langue de terre. Il en était du moins ainsi au temps de Jésus, à l’époque où je la vois. J’ignore si par la suite, au cours de vingt siècles, les sables et les graviers charriés par un petit torrent, qui débouche juste au sud-ouest de l’anse, ont pu modifier l’aspect de l’endroit en ensablant la petite baie et en élargissant par conséquent la langue de terre de l’isthme.

La baie est paisible, couleur azur, avec des bandes de jade là où se reflètent les feuillages verts des arbres qui s’avancent de la côte vers le lac. Des barques nombreuses se balancent légèrement sur les eaux presque calmes.

Ce qui me frappe, c’est une digue bizarre : avec ses arches qui reposent sur les graviers de la rive, elle forme une sorte de promenade, un môle, que sais-je, tourné vers l’ouest. Je ne comprends pas si on l’a édifiée pour orner, ou dans quelque but utile qui m’échappe. Ce passage, digue ou môle, est recouvert d’une épaisse couche de terre où sont plantés des arbres très rapprochés, assez petits, qui forment une galerie verte au-dessus de la route. Beaucoup de gens passent le temps sous cette galerie bruissante à laquelle la brise, les eaux et les frondaisons apportent l’agrément appréciable de la fraîcheur.

On voit nettement la sortie du Jourdain et l’irruption des eaux du lac dans le lit du fleuve qui fait quelques tourbillons, quelques engorgements près des soubassements d’un pont, que je crois romain à cause de son architecture : il repose sur des piles robustes, construites en brise-lames (je ne sais si je m’explique bien, je veux dire comme ceci :) contre les arêtes desquelles le courant vient se disperser. Cela suscite tout un jeu nacré de lumières, sous le soleil qui les frappe à l’endroit où les eaux se brisent et débordent pour s’écouler dans la gorge encaissée du fleuve, après s’être étendues à leur aise dans le lac. Non loin du pont, sur l’autre rive, s’étend une petite ville toute blanche, dont les maisons sont éparses dans la verdure d’une campagne fertile. Plus haut vers le nord, mais sur la côte orientale du lac, se trouve le bourg qui précède Hippos et les forêts qui s’élèvent sur la falaise, au-delà desquels se trouve Gamla, bien visible au sommet de sa colline.

Une foule nombreuse a suivi Jésus à partir d’Emmaüs et elle s’est augmentée de ceux qui déjà l’attendaient à Tarichée. Parmi eux se trouve Jeanne, venue en barque. Jésus se dirige justement vers la digue plantée d’arbres et il s’arrête au milieu, ayant à sa droite les eaux du lac, à sa gauche la plage. Les gens qui le peuvent se placent sur la route ombragée, les autres descendent sur la plage, encore un peu humide à cause de la forte marée nocturne ou pour quelque autre raison, et en partie protégée du soleil par les arbres de la digue. D’autres encore font accoster les barques et s’y installent place à l’ombre des voiles.

463.2

Jésus fait signe qu’il va parler, et tout le monde se tait.

« Il est dit[1] : “ Tu t’es mis en campagne pour sauver ton peuple, pour le sauver grâce à ton Christ. ” Il est dit : “ Et je me réjouirai dans le Seigneur et j’exulterai en Dieu, mon Sauveur. ”

Le peuple d’Israël a pris pour lui cette parole et lui a donné un sens national, personnel, égoïste, qui ne correspond pas à la vérité sur la personne du Messie. Il lui a donné un sens étroit qui abaisse la grandeur de l’idée messianique au niveau d’une manifestation de puissance humaine et d’un écrasement par le Christ des conquérants qui occupent Israël.

Mais la vérité est différente. Elle est grande, illimitée. Elle vient du Dieu vrai, du Créateur et Seigneur du ciel et de la terre, du Créateur de l’humanité, de celui qui a multiplié les astres dans le firmament, couvert la terre de plantes de toute espèce, et l’a peuplée d’animaux. Tout comme il a mis des poissons dans les eaux, et des oiseaux dans l’air, il a multiplié les enfants des hommes, de l’homme créé par lui, pour être le roi de la création et sa créature de prédilection.

Or comment le Seigneur, le Père du genre humain tout entier, pourrait-il se montrer injuste envers les descendants de ceux qui sont nés de l’homme et de la femme, formés par lui avec de la terre comme matière, et son divin souffle pour âme ? Et comment traiter les uns différemment des autres, comme s’ils ne venaient pas d’une même origine, comme si d’autres branches avaient été créées par quelque autre être surnaturel et antagoniste, dont les descendants seraient étrangers, bâtards, méprisables ?

Le vrai Dieu n’est pas un pauvre dieu de tel ou tel peuple, une idole, une figure irréelle. Il est la Réalité sublime, il est la Réalité universelle, il est l’Etre unique, suprême, créateur de tout ce qui existe, donc, de tous les hommes. Il est le Dieu de tous les hommes. Il les connaît, même si eux ne le connaissent pas. Il les aime, même si eux, faute de le connaître, ne l’aiment pas. Il les aime, même si, le connaissant mal, ils l’aiment mal, ou encore si, bien que le connaissant, ils ne savent pas l’aimer.

La paternité ne cesse pas quand un enfant est ignorant, sot ou mauvais. Le père s’efforce d’instruire son enfant, car c’est faire preuve d’amour. Il peine pour rendre plus capable son enfant déficient. Par ses larmes, par son indulgence, par des châtiments salutaires, par des pardons miséricordieux, il essaie de corriger son enfant mauvais et de le rendre bon. C’est ce que fait tout père humain. Alors le Dieu Père serait-il inférieur à un père humain ? Il aime tous les hommes et veut leur salut. Roi d’un Royaume infini, Roi éternel, il regarde son peuple, formé de tous les peuples répandus sur la terre, et il dit : “ Voilà le peuple de ceux que j’ai créés, le peuple qui doit être sauvé par mon Christ. Voilà le peuple pour lequel le Royaume des Cieux a été créé. Et voici l’heure de le sauver par le Rédempteur. ”

463.3

Qui est le Christ ? Qui est le Sauveur ? Qui est le Messie ? Nombreux sont les Grecs présents ici, et ceux, même s’ils ne sont pas grecs, qui savent ce que veut dire le mot “ Christ ”. Le Christ est le Consacré, celui qui a été oint de l’huile royale pour accomplir sa mission. Consacré pour quoi ? Serait-ce pour la pauvre gloire d’un trône ? Serait-ce pour celle, plus grande, d’un sacerdoce ? Non. Consacré pour réunir sous un sceptre unique, en un peuple unique, sous une doctrine unique, tous les hommes, pour qu’ils soient frères entre eux, et enfants d’un unique Père, des enfants qui connaissent le Père, et qui suivent sa Loi pour prendre part à son Royaume.

Roi au nom du Père qui l’a envoyé, le Christ règne comme il convient à sa nature, c’est-à-dire divinement, parce qu’il vient de Dieu. Dieu a disposé toute chose pour servir de marchepied à son Christ, non pas pour accabler, mais pour sauver tous les hommes. En effet, son nom est Jésus, ce qui, en langue hébraïque signifie Sauveur. Quand il aura sauvé des embûches et de la blessure la plus cruelle, il aura sous ses pieds une montagne, et une multitude de toutes races la couvrira, pour symboliser qu’il règne et s’élève au-dessus de la terre entière et au-dessus de tous les peuples.

Mais le Roi sera nu, sans autre richesse que son Sacrifice, pour symboliser qu’il ne tend qu’aux choses de l’esprit et que ces dernières se conquièrent et se rachètent par les valeurs spirituelles et l’héroïsme du sacrifice, et non par l’or ou la violence. Il le sera pour répondre aux hommes qui le craignent, comme à ceux qui, par un amour faux, l’exaltent ou le rabaissent en voulant faire de lui un roi selon le monde, ou encore à ceux qui le haïssent sans autre raison que la crainte d’être dépouillés de ce qui leur est cher. Il le montrera ainsi qu’il est un Roi spirituel — et cela seulement —, envoyé pour enseigner aux âmes le moyen de conquérir le Royaume, l’unique Royaume que je suis venu fonder.

Moi, je n’apporte pas de lois nouvelles. Pour les juifs, je confirme la Loi du Sinaï. Je dis aux païens : la loi pour posséder le Royaume n’est pas autre chose que la loi de la vertu que toute créature morale s’impose en s’élevant par elle-même. Grâce à la foi au Dieu vrai, cette loi morale, cette loi de vertu humaine, devient une loi de morale surnaturelle.

463.4

Vous, les païens, vous avez l’habitude de proclamer dieux les grands hommes de vos nations et vous les rangez parmi les troupes des dieux nombreux et irréels dont vous peuplez l’Olympe. Vous vous êtes créés tous ces dieux pour avoir quelque chose à quoi vous puissiez croire, car une religion est nécessaire à l’homme, comme est nécessaire une foi, la foi étant l’état permanent de l’homme, et l’incrédulité un accident anormal.

Or ces hommes élevés au rang de dieux n’ont même pas toujours de valeur simplement humaine, car leur grandeur vient soit de la force brutale, soit d’astuces ingénieuses, soit encore d’une puissance acquise d’une façon quelconque. De sorte qu’ils traînent avec eux, comme qualités surnaturelles, des misères que l’homme sage voit pour ce qu’elles sont : des pourritures de passions déchaînées.

Pour preuve que je dis la vérité, méditez ceci : dans votre Olympe chimérique, vous n’avez pas su mettre un seul de ces grands esprits qui ont réussi à avoir l’intuition de l’Etre suprême et ont été des intermédiaires actifs entre l’homme animal et la Divinité, dont ils ont pressenti instinctivement l’existence grâce à leur sens de la méditation et de la vertu. De l’esprit du philosophe — du vrai grand philosophe — qui raisonne, à l’esprit du vrai croyant qui adore le vrai Dieu, il n’y a qu’un pas ; en revanche, de l’esprit de ce croyant au moi de l’astucieux, du tyran ou de celui dont les exploits ne sont que terre à terre, il y a un abîme.

Et pourtant, vous n’avez pas placé dans votre Olympe les hommes qui, par la vertu de leur vie, se sont tellement élevés au-dessus de la masse humaine qu’ils se sont approchés des royaumes de l’esprit. En revanche, vous y avez mis ceux que vous avez craints comme des maîtres cruels, ou que vous avez adulés avec une servilité d’esclaves, ou bien que vous avez admirés comme des modèles vivants de cette liberté des instincts animaux qui, pour vos appétits anormaux, paraissent être le summum et le but de la vie. Et vous avez envié les hommes qui ont été admis parmi les dieux, laissant de côté ceux qui se sont approchés davantage de la divinité par la pratique et la doctrine enseignée et vécue d’une vie vertueuse.

En vérité, je vous donne maintenant le moyen de devenir des dieux[2]. Celui qui fait ce que je dis, et croit ce que j’enseigne, montera vers l’Olympe véritable et sera dieu, fils de Dieu dans un Ciel où il n’y a pas de corruption d’aucune sorte et où l’Amour est l’unique loi ; dans un Ciel où l’on s’aime spirituellement, sans que la pesanteur et les pièges des sens opposent les habitants, ainsi qu’il arrive dans vos religions.

Je ne viens pas vous demander des actes d’héroïsme extraordinaires. Je viens vous dire : vivez comme des créatures douées d’une âme et de la raison, et non comme des bêtes. Vivez de manière à mériter de vivre, de vivre réellement, par la partie immortelle qui est en vous, dans le Royaume de Celui qui vous a créés.

463.5

Moi, je suis la Vie. Je viens vous enseigner la route qui y mène. Je viens vous donner la vie à tous, pour vous ressusciter de votre mort, de votre tombeau de péché et d’idolâtrie. Je suis la Miséricorde. Je viens vous appeler, vous réunir tous. Je suis le Christ Sauveur. Mon Royaume n’est pas de ce monde. Et pourtant, pour celui qui croit en moi et en ma parole, un royaume naît dans son cœur, dès les jours de ce monde : c’est le Royaume de Dieu, le Royaume de Dieu en vous.

Il est dit[3] de moi que je suis celui qui apportera la justice parmi les nations. C’est vrai. Car si les citoyens de toutes les nations suivaient mon enseignement, les haines, les guerres, les abus de pouvoir prendraient fin. Il est écrit à mon sujet que je n’élèverai pas la voix pour maudire les pécheurs, ni la main pour détruire ceux qui ressemblent à des roseaux broyés et à des mèches fumantes à cause de leur manière inconvenante de vivre. C’est vrai. Je suis le Sauveur, et je viens fortifier les hommes qui chancellent, donner de l’huile à ceux dont la mèche est fumeuse faute de combustible.

Il est dit de moi que je suis celui qui ouvre les yeux des aveugles, qui tire les prisonniers de leur geôle, et qui amène à la lumière ceux qui étaient dans les ténèbres de la prison. C’est vrai. Les plus aveugles sont ceux qui, même avec la vue de l’âme, ne voient pas la Lumière, c’est-à-dire le vrai Dieu. Moi qui suis la Lumière du monde, je viens pour qu’ils voient. Les plus captifs sont ceux qui ont pour prisons leurs passions mauvaises. Toute autre chaîne disparaît avec la mort, mais les chaînes des vices durent et lient même après la mort de la chair. Moi, je viens les dénouer. Je viens faire sortir des ténèbres de cette prison souterraine qu’est l’ignorance de Dieu, tous ceux que le paganisme étouffe sous l’amas de ses idolâtries.

463.6

Venez à la Lumière et au Salut. Venez à moi, car mon Royaume est le vrai Royaume et ma Loi est bonne. Elle ne vous demande que d’aimer le Dieu unique et votre prochain, et par conséquent de répudier les idoles et les passions qui vous rendent durs de cœur, arides, sensuels, voleurs ou homicides.

Le monde dit[4] : “ Accablons le pauvre, le faible, l’homme seul.

Que la force soit notre droit, la dureté le fond de notre être, et que l’intransigeance, la haine, la férocité soient nos armes. Puisqu’il ne réagit pas, que le juste soit foulé aux pieds ; opprimons la veuve et l’orphelin dont la voix est faible. ”

Moi, je dis : soyez pleins de douceur et de bonté, pardonnez à vos ennemis, secourez les faibles ; dans les ventes et les achats, soyez justes ; soyez magnanimes même quand vous avez le droit de votre côté. Ne profitez pas de votre puissance pour accabler ceux qui ont déjà de la peine. Ne vous vengez pas. Laissez à Dieu le soin de votre sauvegarde. Soyez modérés en tous vos désirs, car la tempérance est la preuve de la force morale, alors que la concupiscence est la preuve de la faiblesse. Soyez des hommes et non des brutes, et ne craignez pas d’être descendus trop bas et de ne pouvoir vous relever.

En vérité, je vous l’affirme : une eau bourbeuse peut redevenir une eau limpide en s’évaporant au soleil ; elle se purifie en se laissant chauffer et élever vers le ciel pour retomber en une pluie pure et une rosée salutaire, pourvu qu’elle sache se laisser frapper par le soleil. De la même façon, les âmes qui s’approcheront de la grande Lumière qu’est Dieu, et qui crieront vers lui : “ J’ai péché, je suis fange, mais j’aspire à toi, la Lumière ”, deviendront des âmes purifiées qui monteront vers leur Créateur. Enlevez à la mort son horreur en faisant de votre vie une monnaie pour acquérir la Vie. Dépouillez-vous du passé comme d’un vêtement souillé et revêtez-vous de vertu.

Je suis la Parole de Dieu, et je vous dis en son nom que celui qui fera preuve de foi et de bonne volonté, qui aura le regret du passé et une droite intention pour l’avenir, qu’il soit juif ou païen, deviendra enfant de Dieu et possèdera le Royaume des Cieux.

Je vous ai demandé au commencement : “ Qui est le Messie ? ” Je vous réponds maintenant : c’est moi qui vous parle, et mon Royaume est dans votre cœur si vous l’accueillez. Puis il sera au Ciel, que je vous ouvrirai si vous savez persévérer dans ma Doctrine. Le Messie, c’est cela, et rien de plus. C’est le Roi d’un royaume spirituel dont, par son sacrifice, il ouvrira les portes à tous les hommes de bonne volonté. »

463.7

A la fin de son discours, Jésus va s’éloigner en prenant un petit escalier qui mène de la digue à la rive. Peut-être veut-il rejoindre la barque de Pierre qui tangue près d’un quai rudimentaire. Mais il se retourne tout à coup, parcourt la foule des yeux et s’écrie :

« Qui m’a appelé pour son âme et sa chair ? »

Personne ne répond.

Il réitère sa question et tourne ses yeux lumineux sur la foule qui l’entoure par derrière, non seulement sur la route, mais aussi en bas sur la grève. Encore le silence.

Matthieu remarque :

« Maître, qui sait combien, en ce moment, ont soupiré vers toi sous l’émotion de tes paroles…

– Non. Une âme a crié : “ Pitié ”, et je l’ai entendue. Et pour vous dire que c’est vrai, je lui réponds : “ Qu’il te soit fait selon ta demande, car le mouvement de ton cœur est juste. ”»

Grand, magnifique, il tend impérieusement la main vers le rivage.

Il essaie encore de se diriger vers le petit escalier, mais il trouve en face de lui Kouza, descendu — on le comprend — de quelque barque, et qui le salue profondément.

« Je suis à ta recherche depuis plusieurs jours. J’ai fait le tour du lac, toujours à ta poursuite, Maître. Il est urgent que je te parle. Sois mon hôte. J’ai beaucoup d’amis avec moi.

– Hier, j’étais à Tibériade.

– On me l’a dit, mais je ne suis pas seul. Vois ces barques qui voguent vers l’autre rive : il y a là plusieurs personnes qui veulent te voir, dont certains de tes disciples. Viens chez moi, je t’en prie, de l’autre côté du Jourdain.

– C’est inutile, Kouza. Je sais ce que tu veux me dire.

– Viens, Seigneur !

– Des malades et des pécheurs m’attendent. Laisse-moi…

– Nous aussi, nous t’attendons, malades d’angoisse à ton sujet. Et il y a aussi des gens qui souffrent dans leur chair…

– Tu as entendu ce que j’ai dit ? Pourquoi donc insistes-tu ?

– Seigneur, ne nous repousse pas, nous… »

463.8

Une femme s’est frayé un passage dans la foule. Je suis désormais suffisamment au courant des vêtements des Hébreux pour comprendre qu’elle n’est pas juive, et qu’elle n’est pas habillée comme une femme honnête. Mais pour voiler ses traits et ses grâces, peut-être trop aguichantes, elle a mis un long voile qui l’enveloppe tout entière, bleu clair comme son vêtement, ample et pourtant provocant à cause de sa forme qui laisse découverts de très beaux bras. Elle se jette à terre et rampe dans la poussière jusqu’à ce qu’elle arrive à toucher le vêtement de Jésus, qu’elle prend entre ses doigts et dont elle baise la frange. Elle est secouée de sanglots.

Jésus, qui était sur le point de répondre à Kouza : « Vous êtes dans l’erreur et… », baisse les yeux et dit :

« Etait-ce toi qui m’appelais ?

– Oui… et je ne suis pas digne de la grâce que tu m’as faite. Je n’aurais pas dû t’implorer, même en esprit. Mais ta parole… Seigneur… je suis une pécheresse. Si je découvrais mon visage, plusieurs te révéleraient mon nom. Je suis… une courtisane… et une infanticide… Le vice m’avait rendue malade… J’étais à Emmaüs, je t’ai donné un bijou… Tu me l’as rendu… Mais un de tes regards… m’est descendu au plus profond du cœur… Je t’ai suivi… Tu as parlé. J’ai me suis répété tes mots : “ Je suis fange, mais j’aspire vers toi, qui es lumière. ” J’ai dit : “ Guéris mon âme et après, si tu le veux, ma chair. ” Seigneur, mon corps est guéri… et mon âme ?

– Ton âme est guérie grâce à ton repentir. Va et ne pèche jamais plus. Tes péchés te sont remis. »

La femme baise de nouveau le bord du vêtement et elle se relève. Dans son geste, son voile glisse.

« La Galazia ! La Galazia ! » hurlent quelques uns.

Aussitôt, ils l’injurient, ramassent du gravier et du sable et en jettent sur la femme qui se recroqueville, apeurée.

463.9

Jésus, le regard sévère, lève la main. Il impose le silence.

« Pourquoi l’insultez-vous ? Vous ne le faisiez pas quand elle était pécheresse. Pourquoi, maintenant qu’elle se rachète ?

– Elle le fait parce qu’elle est vieille et malade » s’écrient plusieurs avec mépris.

En réalité, la femme, bien qu’elle ne soit plus très jeune, est encore bien loin d’être vieillie et laide comme ils le prétendent. Mais la foule est ainsi faite…

« Passe devant moi, et descend dans cette barque. Je t’accompagnerai chez toi par une autre route » ordonne Jésus.

Puis il dit aux disciples :

« Mettez-la au milieu de vous et conduisez-la. »

Alors la colère de la foule, excitée par quelques juifs intransigeants, se retourne tout entière contre Jésus et ils crient :

« Anathème ! Faux Christ ! Protecteur des prostituées ! Qui les protège les approuve. Bien plus, il les approuve parce qu’il en profite », et d’autres phrases du même genre que les gens hurlent, ou plutôt aboient.

Elles proviennent surtout d’un petit groupe d’énergumènes juifs — je ne sais de quelle caste —, et tout en criant ils lancent des poignées de sable humide qui atteignent le visage de Jésus avec violence.

Il lève le bras et s’essuie la joue sans protester. Qui plus est, il arrête d’un geste Kouza et quelques autres qui voudraient prendre sa défense, et dit :

« Laissez-les faire. Pour sauver une âme, je souffrirais bien davantage ! Je pardonne ! »

Zénon — l’homme d’Antioche — qui ne s’était jamais éloigné du Maître, s’écrie :

« Maintenant, vraiment, je sais qui tu es ! Un vrai Dieu et non pas un faux rhéteur ! La Grecque a dit la vérité ! Tes paroles aux Thermes m’avaient déçu. Celles-ci m’ont ébranlé. Les miracles m’ont stupéfié. Ton pardon des offenses m’a conquis. Adieu, Seigneur ! Je penserai à toi et je réfléchirai à tes paroles.

– Adieu, homme. Que la lumière éclaire ton cœur. »

463.10

Kouza insiste une fois encore pendant qu’ils marchent vers le quai et que sur la digue se produit une bagarre entre Romains et Grecs d’un côté et Israélites de l’autre.

« Viens, pour quelques heures seulement. C’est nécessaire. Je te reconduirai moi-même. Tu es bienveillant pour les prostituées, et tu veux être inexorable envers nous ?

– C’est bien. Je viendrai. Effectivement, c’est nécessaire… »

Il se retourne vers les apôtres, qui sont déjà dans les barques :

« Allez de l’avant, je vous rejoindrai…

– Tu pars seul ? » demande Pierre.

On voit qu’il n’est pas très content.

« Je suis avec Kouza…

– Ouais ! Et nous, nous ne pouvons pas t’accompagner ? Pourquoi veut-il t’avoir avec ses amis ? Pourquoi n’est-il pas venu à Capharnaüm ?

– Nous y sommes venus. Vous n’y étiez pas, rétorque Kouza.

– Vous n’aviez qu’à nous attendre, voilà tout !

– Au contraire, nous vous avons suivis.

– Venez maintenant à Capharnaüm. Est-ce au Maître d’aller chez vous ?

– Simon a raison, approuvent les autres apôtres.

– Mais pourquoi refusez-vous qu’il m’accompagne ? Serait-ce peut-être la première fois qu’il vient chez moi ? Ne me connaissez-vous donc pas ?

– Bien sûr que nous te connaissons. Mais nous ne connaissons pas les autres, voilà.

– Et que craignez-vous ? Que je sois l’ami des ennemis du Maître ?

– Je n’en sais rien, moi ! Je me souviens de la fin du prophète Jean, moi !

– Simon, tu m’offenses ! Je suis un homme d’honneur. Je te jure que je me ferais transpercer avant qu’on n’arrache un cheveu au Maître. Tu dois me croire ! Mon épée est à son service…

– Hé !… Qu’ils te transpercent, toi… A quoi cela servirait-il ? Après… Oui, je le crois, je te crois… Mais une fois que tu serais mort, ce serait son tour. Je préfère ma rame à ton épée, ma pauvre barque, et surtout nos simples cœurs à son service.

– Mais j’ai avec moi Manahen. As-tu confiance en Manahen ? Et le pharisien Eléazar, que tu connais, et le chef de synagogue Timon, et Nathanaël ben Fada. Lui, tu ne le connais pas. Mais c’est un chef important, et il veut parler avec le Maître. Et il y a aussi Jean, surnommé l’Antipas d’Antipatride, favori d’Hérode le Grand, maintenant âgé et puissant, propriétaire de toute la vallée de Gahas, et…

– Assez ! Assez ! Tu me cites de grands noms, mais qui ne me disent rien, sauf deux… et moi, je vais venir aussi…

– Non, c’est avec le Maître qu’ils veulent parler…

– Ils veulent ! Mais qui sont-ils ? Ils veulent ! Eh bien, moi, je ne veux pas. Embarque ici, Maître, et partons. Moi, je ne veux entendre parler de personne, je ne me fie qu’à moi-même. Allons, Maître ! Quant à toi, va en paix dire à ces gens que nous ne sommes pas des vagabonds, et qu’ils savent où nous trouver. »

A ces mots, il pousse Jésus avec peu d’égards, tandis que Kouza proteste haut et fort.

463.11

Jésus tranche définitivement :

« Ne crains rien, Simon. Il ne m’arrivera aucun mal. Je le sais, et il est bien que j’y aille. C’est bon pour moi. Comprends-moi… » Et il le fixe de ses yeux splendides comme pour lui dire : « N’insiste pas, comprends-moi. Il y a de bonnes raisons qui me poussent à y aller. »

Simon cède à contrecœur, mais il cède, comme subjugué… Malgré tout, il grommelle entre ses dents, mécontent.

« Pars tranquille, Simon. Je ramènerai moi-même mon Seigneur et le tien, promet Kouza.

– Quand ?

– Demain.

– Demain ? Il faut tellement de temps pour dire deux mots ? Nous sommes entre tierce et sexte… Avant ce soir, s’il n’est pas avec nous, nous venons chez toi, ne l’oublie pas. Et pas seuls… »

Il dit cela sur un ton qui ne laisse aucun doute sur ses intentions.

Jésus pose la main sur l’épaule de Pierre.

« Je t’assure, Simon, qu’ils ne me feront pas de mal. Montre que tu crois en ma vraie nature. C’est moi qui te le dis. Je le sais, ils ne me feront rien. Ils veulent seulement s’expliquer avec moi… Va… Conduis la femme à Tibériade, arrête-toi aussi chez Jeanne. Tu pourras voir qu’ils ne m’enlèvent pas avec des barques et des soldats…

– Bon, mais sa maison (et il montre Kouza), je la connais. Je sais que, derrière, il y a la terre, ce n’est pas une île. Plus loin, il y a Galgala et Gamla, Aéra, Arbel, Gerasa, Bozra, Pella et Ramot, et combien d’autres villes !…

– Mais, ne crains rien, te dis-je ! Obéis. Donne-moi un baiser, Simon. Va ! Et vous aussi. »

Il les embrasse et les bénit. Quand il voit la barque s’éloigner, il leur crie :

« Ce n’est pas mon heure. Et tant qu’elle n’est pas venue, rien ni personne ne pourra lever la main sur moi. Adieu, mes amis. »

Puis il se tourne vers Jeanne, qui paraît visiblement troublée et pensive, et lui dit :

« N’aie pas peur. Il est bon que cela arrive. Va en paix. »

Et à Kouza :

« Allons-y. Pour te montrer que je ne crains rien, et pour te guérir…

– Je ne suis pas malade, Seigneur…

– Tu l’es, je te l’affirme, et plusieurs avec toi. Allons. »

Il monte dans la barque légère et luxueuse et s’y assied. Les rameurs commencent le trajet sur les eaux tranquilles en faisant un détour pour échapper au courant qui est sensible là, au bout du lac, à l’endroit où ses eaux se déversent dans le Jourdain.

463.1

The little peninsula of Tarichea stretches out on the lake forming a deep creek south-westwards, so that it is correct to say that, rather than a peninsula, it is an isthmus almost completely surrounded by water, only a small strip being joined to the mainland. At least it was so in Jesus’ days, in which I see it. I do not know whether later, in the course of twenty centuries, sand and pebbles carried by a little torrent which flows just into the south-western inlet may have altered the appearance of the place, silting up the little bay and widening the strip of land of the isthmus. The bay is calm, clear blue with jade streaks where it reflects the green trees leaning from the coast towards the lake. Many boats undulate gently on the almost calm water.

What surprises me is a strange dam which, with its arches based on the gravel of the shore, forms a kind of promenade, a pier, I would say, extending westwards. I do not understand whether it is an ornament or whether it was built for some useful purpose of which I am unaware. The promenade, or dam or pier, is covered with a thick layer of earth in which trees have been planted so thickly that, although they are not large ones, they form a green gallery above the road. Many people wander idly under the rustling gallery, which is pleasantly cooled by the breeze, the water and the leafy branches.

One can clearly see the mouth of the Jordan and the water of the lake flowing into the river-bed, forming whirlpools and obstructions near the piers of a bridge, which I would say is a Roman one, judging by its architecture with robust pillars, placed like break-waters, against the corners of which the current breaks up with a pearly play of light of the spray in the sunshine, while the water forces its way into the deeply embanked gorge of the river after having so much space in the lake. Almost at the end of the bridge, on the opposite shore, is a little white town spread out in the green fertile country. And farther up, to the north, on the eastern coast of the lake, is the village preceding Hippo and woods high above the cliff, beyond which is Gamala clearly visible on top of the hill.

Jesus, with a train of people who have followed Him from Emmaus and who have increased in numbers with those already waiting for Him at Tarichea – among whom is Johanna who came by boat – moves towards the dam planted with trees. And He stops in the middle of it, with the lake on His right hand side and the shore on His left. Those who can find room on the shady road stop there, otherwise they go down to the shore, which is still somewhat damp after the high tide of the previous night or for other reasons, and is partly shaded by the leafy branches of the trees on the dam. Other people ask the boatmen to come close to the shore and they sit in the shade of the sails.

463.2

Jesus raises His hand indicating that He wants to speak and everybody falls silent.

«It is written[1]: “You marched to save Your people, to save them through Your Christ”. It is written: “And I will rejoice in the Lord and I will exult in God my Jesus”. The people of Israel have taken these words for themselves and have given them a national, personal selfish meaning, which does not correspond to the truth concerning the person of the Messiah. They have given those words a restricted meaning which degrades the greatness of the Messianic idea to a common display of human power and of overwhelming victory over the rulers found by the Christ in Israel.

But the truth is different. It is great, unlimited. It comes from the true God, from the Creator and Lord of Heaven and Earth, from the Creator of Mankind, from He Who multiplied the stars in the vault of heaven and covered the Earth with all kinds of plants, and peopled it with animals and placed fish in the waters and birds in the air, and likewise He multiplied the children of Man created by Him to be the king of Creation and His favourite creature. Now, how could the Lord, the Father of all mankind, be unfair to the children of the children of the children born of the Man and the Woman, formed by Him with matter: the earth, and with soul: His divine breath? And how could He treat these differently from those, as if they did not come from one only source, as if other branches had been created by some other supernatural antagonist, not by Him, and were consequently strangers, illegitimate, contemptible?

The true God is not a poor god of this or of that people, an idol, an unreal figure. He is the supreme Reality, the universal Reality, the Only Supreme Being, the Creator of all things and of all men. He is therefore the God of all men. He knows them even if they do not know Him. He loves them: even if they, not knowing Him, do not love Him, or if they do not know Him well and they do not love Him well, or even if they know Him, they do not know how to love Him. Paternity does not cease when a son is ignorant, silly or wicked. A father strives to teach his son, because it is love to instruct him. A father works hard to make a mentally deficient son less silly. A father tries to correct a wicked son and make him good with tears, being indulgent, with beneficial punishments and forgiving him mercifully. That is what a man-father does. And will the God-Father be perhaps inferior to the man-father? So the God-Father loves all men and wants their salvation. He, the King of an infinite Kingdom, the eternal King, looks at His people, which comprises all the peoples spread all over the Earth, and He says: “This is the people of those I created, the people to be saved through My Christ. This is the people for whom the Kingdom of Heaven was created. It is now time to save them by means of the Saviour”.

463.3

Who is the Christ? Who is the Saviour? Who is the Messiah? There are many Greeks here, and many, even if they are not Greeks, know what the word Christ means. Christ is therefore the consecrated person, the person anointed with regal oil to fulfil His mission. Consecrated to what? Perhaps to the fleeting glory of a throne? Perhaps to the greater glory of priesthood? No. He is consecrated to gather under one only sceptre, into one only people, in on only doctrine, all men, so that they may be brothers to one another and children of one only Father, children who know their Father and comply with His Law to take part in His Kingdom.

Christ, a king in the name of the Father Who sent Him, reigns as it becomes His Nature, that is, divinely, as God. God has placed the world as the foot-stool of His Christ, not because He should oppress, but that He may save. His name is in fact Jesus, which in Hebrew means Saviour. When the Saviour saves His people from the fiercest snare and wound, a mountain will be under His feet and a multitude of people of every race will cover the mountain to symbolise that He reigns and rises above the whole Earth and above all peoples. But the King will be bare without any riches, except His Sacrifice, to symbolise that He tends only to spiritual things, and that spiritual things are conquered and redeemed with spiritual bravery and heroical sacrifice, not with violence and gold. He will be like that to reply to those who fear Him and also to those who through false love exalt and degrade Him while wishing Him to be king according to the world. He will be like that to those as well who hate Him solely for fear of being deprived of what is dear to them. For His response is that He is a spiritual King and nothing else, sent to teach spirits how to conquer the Kingdom, the only Kingdom that I have come to establish.

I will not give you new laws. I confirm the Law of Sinai for Israelites; to Gentiles I say: the law to possess the Kingdom is nothing but the law of virtue which every man of noble morals imposes on himself and which, through faith in the true God, from moral law and human virtue becomes a superhuman moral law.

463.4

O Gentiles! It is your custom to proclaim gods the great men of your countries, and you place them among the many unreal gods with whom you people Olympus, created by you to have something in which to believe, because religion is a necessity for man, exactly as faith is a necessity, because faith is the permanent state of man and incredulity is the accidental abnormality. And those men raised to the rank of gods are not always worthy even as men, as at times they are great because of their brutal strength, at times through powerful cunning, at times also because of the power which they somehow achieved. So they carry with themselves, as qualifications of supermen, certain miseries which a wise man recognizes for what they are: the rottenness of unrestrained passions. That I am speaking the truth is proved by the fact that in your chimerical Olympus you have not put a single one of those great spirits who sensed by intuition the supreme Being and were the intermediate agents between man and Divinity, which was instinctively perceived by them through their contemplative virtuous spirit. Between the reasoning spirit of a philosopher, of a true great philosopher, and the spirit of a true believer who worships the true God, the gap is small, whereas between the spirit of the believer and the ego of a cunning or overwhelming man, or of a man who is a hero only in a material way, there is an abyss. And yet you have not placed in your Olympus those who had been elevated by their virtuous lives so much above the human mass that they approached the kingdoms of the spirit, whereas you have put those whom you feared as cruel masters, or whom you adulated as servile slaves, or you admired as living examples of those free animal instincts which your abnormal appetites consider as the aim and purpose of life. And you have envied those who have been numbered among the gods, neglecting those who were closer to divinity because of their honest practices and of the doctrine, which they taught and according to which they lived virtuously.

I now solemnly tell you that I will give you the means to become gods. He who does what I say and believes in what I teach, will climb the true Olympus and will be god, god son of God, in a Heaven where there is no corruption whatsoever and where Love is the only law. In a Heaven where we love one another spiritually, without the dullness and snares of senses making its inhabitants hostile to one another, as it happens in your religions. I have not come to request deeds which are noisely heroical. I have come to say to you: live as becomes creatures gifted with soul and reason, not as brutes. Live in such a way as to deserve to live, to really live, with your immortal part, in the Kingdom of He Who created you.

463.5

I am the Life. I have come to teach you the Way to go to Life. I have come to give Life to you all, and I give it to you that you may rise from death, from your sepulchres of sin and idolatry. I am Mercy. I have come to call you and gather you all together. I am the Christ Saviour. My Kingdom does not belong to this world. And yet a kingdom is established in the hearts of those who believe in Me and in My word, even from the present days, and it is the Kingdom of God, the Kingdom of God within you.

It is written[2] of Me that I am He Who will bring justice among nations. It is true. Because if the citizens of each nation did what I teach, hatred, wars, overbearing actions would come to an end. It is written of Me that I would not raise My voice to curse sinners or My hand to destroy those who are like cracked canes and smoky wicks because of their unbecoming way of living. It is true. I am the Saviour and I have come to strengthen those who are weak, to give humour to those whose light is smoky through lack of the necessary essence. It is written of Me that I am He Who opens the eyes of blind people, and frees prisoners from jail and takes light to those who were in the darkness of prison. It is true. The blindest of blind people are those who cannot see the Light, that is, the true God, even with the sight of their souls. I, the Light of the world, have come that they may see. The most imprisoned prisoners are those whose chains are their wicked passions. Every other chain vanishes with the death of the prisoner. But the chains of vice last and enchain even after the death of the body. I have come to loosen them. I have come to relieve from the darkness of the dungeons of ignorance of God all those whom paganism smothers under the mass of its idolatries.

463.6

Come to Light and to Salvation. Come to Me because My Kingdom is the true one and My Law is good. All I ask of you is to love the Only God and your neighbour, and consequently to repudiate the idols and passions which harden your hearts and make you arid, sensual, thieves, homicides. The world says[3]: “Let us oppress the poor, the weak, the lonely. Let force be our right, harshness our habit, intolerance, hatred, ferocity, our weapons. Let us crush the just man, since he does not react, let us oppress the widow and the orphan whose voices are weak”. I say: be kind and meek, forgive your enemies, assist the weak, be honest in selling and purchasing, be generous also when asserting your rights, without taking advantage of your possibility to crush those who are oppressed. Do not avenge yourselves. Leave to God the care of protecting you. Be sober in all your dispositions, because moderation is proof of moral strength, whilst lust is proof of weakness. Be men and not brutes, and never fear of having fallen so low that you cannot rise again.

I solemnly tell you that as muddy water can become pure again evaporating in the sun, which purifies it by heating it, so that it may rise to the sky and fall as beneficial rain or dew, free from defilement, providing it is exposed to the sun, so the spirits which approach the great Light which is God and shout to Him: “I have sinned, I am filth, but I yearn for You, O Light” will become purified spirits which ascend to their Creator. Remove horror from death converting your lives into money to purchase the Life. Divest yourselves of your past as if it were a dirty garment and clothe yourselves with virtue. I am the Word of God and in His Name I tell you that those who have faith in Him and goodwill, those who repent of their past and make righteous resolutions for the future, whether they are Hebrews or Gentiles, will become the children of God and will possess the Kingdom of Heaven.

At the beginning of My speech I asked you: “Who is the Messiah?”. I now say to you: It is I Who am speaking to you and My Kingdom is Your hearts if you are willing to receive it, and then it will be in Heaven, which I will open to you, if you persevere in My Doctrine. That is the Messiah and nothing else. He is the King of a spiritual kingdom, the gates of which He will open to all men of goodwill through His Sacrifice.»

463.7

Jesus has finished speaking and is about to go towards a short flight of stairs which takes one from the dam to the shore. Perhaps He wants to go to Peter’s boat which is pitching near a rough landing-place. But he suddenly turns around, looks at the crowds and shouts: «Who has invoked Me for the spirit and body?»

Nobody replies. He repeats the question and casts His beautiful eyes around at the crowds who have crowded around His back, not only on the road, but also down on the shore. Still no reply.

Matthew remarks: «Master, who knows how many have sighed for You under the emotion of Your words…»

«No. A soul has cried: “Mercy” and I heard it. And to tell you that it is true I reply: “Let it be done to you as you have asked because the motion of your heart is fair”.» And tall as He is, He looks wonderful as He stretches His hand imperiously towards the shore.

He tries once again to set out towards the short flight of steps, but Chuza, who has obviously come off a boat, stands in front of Him and greets Him bowing low. «I have been looking for You for many days. I have made the tour of the lake following You all the time, Master. I must speak to You urgently. Be my guest. I have many friends with me.»

«I was at Tiberias yesterday.»

«They told me. But I am not alone. See those boats sailing towards the other shore? There are many in them who want You, including some of Your disciples. Please, come to my house, beyond the Jordan.»

«It is useless, Chuza. I know what you want to tell Me.»

«Come, Lord.»

«Sick people and sinners are waiting for Me; leave Me…»

«We also are waiting for You and we are sick with anxiety for Your welfare. And there are some people who are physically sick, also…»

«Have you heard My words? So why do you insist?»

«Lord, do not reject us, we…»

463.8

A woman has elbowed her way through the crowd. I am by now sufficiently familiar with Jewish garments to realize that she is not a Jewess, and I know enough of… decent dresses to understand that she is indecent. But to cover her features and her charms, I perhaps too immodest, she has wrapped herself in a veil, which is sky-blue like her wide dress, but still provoking because of its shape which leaves her beautiful arms uncovered. She throws herself on the ground, creeping on the dust until she reaches Jesus’ mantle, which she clasps with her fingers, kissing its hem and weeps, sobbing convulsively.

Jesus, Who was about to reply to Chuza saying: «You are wrong and…» casts down His eyes and says: «Was it you who invoked Me?»

«Yes… but I am not worthy of the grace which You granted me. I should not have called You even with my soul. But Your word… Lord… I am a sinner. If I uncovered my face, many people would tell You my name. I am… a courtesan… an infanticide… and because of my vice I became diseased… I was at Emmaus, I gave You a jewel… You gave it back to me… and Your glance… pierced my heart… I have followed You… You have spoken. I repeated t myself Your words: “I am filth, but I yearn after You, the Light”. I said: “Cure my soul, and then, if You wish so, my body”. Lord, my body has been cured… and what about my soul?…»

«Your soul has been cured by your repentance. Go and sin no more. Your sins have been remitted.»

The woman kisses the hem of Jesus’ mantle once again and stands up. In doing so her veil slips off her face.

«Galatia! Galatia!» shout many and cast contumelies on her, they pick up pebbles and sand and throw them at the woman who stoops frightened.

463.9

Jesus raises a hand severely and imposes silence. «Why are you insulting her? You did not do so when she was a sinner. Why do it now when she is redeeming herself?»

«She is doing that because she is old and ill» shout many sneeringly.

Actually, although the woman is no longer very young, she is far from being old and ugly, as they say. But crowds are like that.

«Go ahead of Me and get into that boat. I will take you home along a different way» orders Jesus and He says to His apostles: «Keep her in the middle of you and accompany her.»

The anger of the crowd, instigated by some intolerant Israelites, explodes against Jesus and amidst shouts of: «Anathema! False Christ! Protector of prostitutes! Who protects them, approves of them! Worse! He approves of them because He enjoys them» and similar phrases shouted or rather howled particularly by a small group of Hebrew madmen, I do not know of which caste, amidst such howling, they throw handfuls of damp sand which strikes Jesus on the face soiling it.

He lifts His arms and cleans His cheek without any protest. Not only, but with a gesture He stops Chuza and some other people who would like to react defending Him and He says: «Leave them. I would stand much more for the salvation of a soul! I forgive them!»

Zeno, the man from Antioch, who had never moved away from the Master, exclaims: «Now I really know who You are! A true god and not a false rhetor! The Greek woman told me the truth! Your words at the thermal baths had disappointed Me, but the present ones have conquered me. The miracle amazed me, Your forgiving the offenders has conquered me. Goodbye, Lord. I will think of You and of Your words.»

«Goodbye, man. May the Light enlighten your heart.»

463.10

Chuza insists once again while they are going towards the landing-place, and while there is a violent quarrel on the dam between Romans and Greeks on one side and Israelites on the other.

«Come! Only for a few hours. It is necessary. I will bring You back myself. You are kind to prostitutes and do You want to be inflexible with us?»

«All right. I will come. It is in fact necessary…» He addresses the apostles who are already in the boats: «You can go now. I will join you…»

«Are You going alone?» asks Peter who is not very happy.

«I am with Chuza…»

«H’m! And can we not come? Why does he want You with his friends? Why did he not come to Capernaum?»

«We did come. You were not there.»

«You could have waited for us. That’s all!»

«Instead we decided to follow your tracks.»

«Come to Capernaum now. Why must the Master come to you?»

«Simon is right» say the other apostles.

«But why do you not want Him to come with me? Is it perhaps the first time that He comes to my house? Do you perhaps not know me?»

«Yes, we know you. But we do not know the others.»

«And of what are you afraid? That I am a friend of the Master’s enemies?»

«I know nothing! But I remember the end of John, the prophet!»

«Simon! You are offending me. I am a man of honour. I swear to you that I would let them pierce me through before they dare touch a hair of the Master’s head. You must believe me! My sword is at His service…»

«Eh!… If they pierced you… What purpose would it serve? Afterwards… Yes, I believe that, I believe you… But once you are dead, it would be His turn. I prefer my oar, my poor boat to your sword, and above all our simple hearts at His service.»

«But there is Manaen with me. Do you trust Manaen? And there is also Eleazar, the Pharisee, the one you know, and Timoneus, the head of the synagogue, and Nathanael ben Fada. You do not know him, but he is an important leader and he wants to speak to the Master. And there is John, named Antipas from Antipatris, a favourite of Herod the Great, now old and powerful, the owner of the whole valley of Gaash, and…»

«That’s enough! You are mentioning great names, but they mean nothing to me, with the exception of two… and I will come as well…»

«No. They want to speak to the Master…»

«They want! And who are they? They want?! And I don’t want. Get in the boat, Master, and let us go. I will not hear of any­body, I won’t, I trust no one but myself. Come on, Master. And you can go in peace and tell those people that we are not vagabonds. They know where they can find us» and he pushes Jesus rather coarsely while Chuza protests in a loud voice.

463.11

Jesus settles the matter once and for all by saying: «Be not afraid, Simon. No harm will happen to Me. I know. And it is better that I should go. For My own sake. Try to understand Me…» and He stares at him as if He wanted to say: «Do not insist. Understand Me. Ther are reasons which advise Me to go.»

Simon yields unwillingly. But he gives in, as if he were subdued … Nevertheless he grumbles between his teeth with a dissatisfied expression.

«Go without worrying, Simon. I will personally bring you back your Lord and mine» promises Chuza.

«When?»

«Tomorrow.»

«Tomorrow?! Does it take so long to exchange a few words? We are now between the third and the sixth hour… If He is not with us before evening, we will come to you, bear that in mind. And we will not be alone…» and he says so in a tone of voice which leaves no doubt about his intentions.

Jesus lays a hand on Peter’s shoulder. «I am telling you, Simon, that they will do Me no harm. Bear evidence that you believe in My true nature. I am telling you. I know. They will do Me no harm. They only want to explain things to Me… Go… Take the woman to Tiberias, you may stop at Johanna’s, you will thus be able to see that they are not abducting Me with boats and armed men…»

«Right, but I know his house (and he points at Chuza). I know that there is land behind it, it is not an island, there is Galgala and Gamala, Aera, Arbela, Gerasa, Bozrah, Pella and Ramoth and many more towns!…»

«But do not be afraid, I tell you! Be obedient. Give Me a kiss, Simon. Go! And you, too» and He kisses and blesses them. When He sees the boat depart He shouts to them: «It is not My hour. And until that moment, nothing and no one will be able to raise a hand against Me. Goodbye, friends.»

He turns towards Johanna who clearly looks upset and worried and He says to her: «Be not afraid. It is a good thing that this should happen. Go in peace.» And He says to Chuza: «Let us go. To show you that I am not afraid. And to cure you…»

«I am not ill, Lord…»

«You are. I tell you. And many with you. Let us go.»

He gets into the fast rich boat and sits down. The oarsmen begin to row on the calm waters making a detour to avoid the strong current at the end of the lake, where the water flows into the riverbed.


Notes

  1. Il est dit, en Ha 3, 13.18. Les mots ton Christ (au v.13) et mon Jésus (au v.18), présents dans la Vulgate, sont devenus ton consacré (ou ton Oint, ton Messie), et mon Sauveur dans la Néo-Vulgate.
  2. devenir des dieux et, deux lignes plus bas, sera dieu (à laquelle suit la précision dieu fils de Dieu) sont des expressions semblables à celle du Ps 82, 6, rappelée en Jn 10, 34. D’ailleurs, l’usage de la minuscule au début du mot “ dieu ” et le contexte tout entier (en particulier là où il dit “ au Royaume de Celui qui vous a créés ”) font exclure qu’on puisse attribuer à l’homme la nature divine. Maria Valtorta l’explique dans les notes que nous mettons en 170.4, 365.16, et 537.11 ; et le texte de l’œuvre lui-même le met en évidence, comme en 58.5 (où les fidèles sont qualifiés de dieux mineurs), en 470.4 (où Adam, en état de grâce, est dit de peu inférieur à Dieu son Créateur), en 506.2 (où on parle de l’homme qui devient dieu par participation et par grâce). C’est ainsi qu’il faut interpréter d’autres affirmations analogues, comme celles de 515.3 (les vrais hommes obéissants deviendront dieux), 516.5, 524.7, 600.36 et 606.14.
  3. Il est dit, en Is 42, 1-9.
  4. dit, comme en Sg 2, 10-12.

Notes

  1. It is written, in: Habakkuk 3,13.18.
  2. It is written, in: Isaiah 42,1-9.
  3. says, as in: Wisdom 2,10-12.