The Writings of Maria Valtorta

515. Les raisons de la souffrance salvifique de Jésus.

515. The causes for the salvific suffering of Jesus.

515.1

Jésus ne peut rester longtemps plongé dans ses pensées. Jean et son cousin Jacques, puis Pierre avec Simon le Zélote le rejoignent pour attirer son attention sur le panorama que l’on découvre du haut de la colline. Et peut-être dans l’intention de le distraire, car il est visiblement très triste, ils rappellent les événements survenus dans les régions qui se présentent sous leurs yeux : le voyage vers Ascalon… la maison des paysans de la plaine de Saron où Jésus rendit la vue au vieux père de Gamla et Jacob… la retraite au mont Carmel de Jésus et de Jacques… Césarée maritime et la jeune Auréa Galla… la rencontre avec Syntica… les païens de Joppé… les voleurs près de Modin… le miracle des moissons dans la maison de Joseph d’Arimathie… la vieille femme glaneuse…

Oui, toutes choses qui voudraient réjouir… mais auxquelles, pour tous ou pour lui seul, se mêlent des larmes et un souvenir de douleur. Les apôtres eux-mêmes s’en aperçoivent et murmurent :

« Vraiment, en toute chose sur cette terre, il se trouve une part de souffrance. C’est un lieu d’expiation… »

Mais justement André, qui s’est joint au groupe avec Jacques, fils de Zébédée, observe lui aussi :

« C’est une loi juste pour nous, qui sommes pécheurs. Mais pour lui, pourquoi tant de souffrance ? »

Il s’élève une discussion paisible — et qui le reste, même quand, attirés par les voix des premiers, tous les autres s’unissent au groupe —. Judas est le seul à ne pas s’y joindre : il s’affaire au milieu des humbles, qu’il instruit en imitant la voix, les gestes, la pensée du Maître ; mais c’est une imitation théâtrale, pompeuse, à laquelle il manque la chaleur de la conviction, et ses auditeurs le lui disent sans périphrases. Cela énerve Judas, qui leur reproche d’être bouchés et de ne rien comprendre. Et il leur déclare qu’il les quitte, car “ ce n’est pas la peine de jeter aux pourceaux les perles de la sagesse ”. Il s’arrête cependant, car les humbles gens, vexés, le prient d’être compatissant en s’avouant “ inférieurs à lui comme un animal est inférieur à un homme. ”…

Jésus est distrait de ce que disent autour de lui les Onze, car il écoute Judas, et ce qu’il entend ne le réjouit certainement pas… Mais il soupire et se tait

515.2

jusqu’au moment où Barthélemy l’intéresse directement à la discussion en lui soumettant les divers points de vue sur la raison pour laquelle lui, qui est indemne du péché, doit souffrir.

Barthélemy dit :

« Je soutiens que cela arrive parce que l’homme déteste celui qui est bon. Je parle de l’homme coupable, c’est-à-dire de la majorité. Cette majorité se rend compte que, par comparaison avec celui qui est sans péché, sa culpabilité ressort davantage, avec ses vices, et, par dépit, il se venge en faisant souffrir le bon.

– Pour ma part, je suis sûr que tu souffres du contraste entre ta perfection et notre misère. Même si personne ne te méprisait d’aucune façon, tu souffrirais pareillement, car ta perfection doit éprouver un dégoût douloureux pour les péchés des hommes, intervient Jude.

– Moi, au contraire, je pense que, n’étant pas exempt de l’humanité, tu souffres de l’effort de devoir retenir, par ta partie surnaturelle, les révoltes de ton humanité contre tes ennemis, estime Matthieu.

– Et moi, je vais sûrement me tromper, car je suis un sot, je dis que tu souffres au contraire de voir ton amour repoussé. Tu ne souffres pas de ne pas pouvoir punir comme le côté humain peut le désirer, mais tu souffres de ne pouvoir faire du bien comme tu le voudrais, expose André.

– Moi, enfin, dit Simon le Zélote, je pense que tu souffres, parce que tu dois subir toute douleur pour racheter toute douleur. Il n’y a pas en toi l’une des deux natures qui prédomine, mais toutes deux sont pareillement en toi, unies en un parfait équilibre, pour former la Victime parfaite, tellement surnaturelle qu’elle peut avoir la force d’apaiser l’offense faite à la Divinité, tellement humaine qu’elle peut représenter l’humanité et la ramener à l’état immaculé du premier Adam pour effacer le passé et engendrer une humanité nouvelle, recréer une humanité nouvelle conforme à la pensée de Dieu, c’est-à-dire une humanité où existe réellement l’image de Dieu et sa ressemblance avec lui, ainsi que la destinée de l’homme : la possession, le pouvoir d’aspirer à la possession de Dieu, dans son Royaume. Tu dois souffrir surnaturellement, et tu souffres, de tout ce que tu vois faire et de ce qui t’entoure, pourrais-je dire, dans une perpétuelle offense à Dieu. Tu dois souffrir humainement, et tu souffres, pour arracher la luxure de notre chair empoisonnée par Satan. C’est par la souffrance complète des deux natures parfaites que tu annuleras complètement l’offense faite à Dieu, la faute de l’homme. »

Les autres se taisent. Jésus les interroge :

« Et vous, vous ne dites rien ? Quelle est d’après vous la plus juste définition ? »

Les uns se prononcent pour l’une, les autres pour une autre. Seul Jacques, fils d’Alphée, se tait avec Jean.

« Et vous deux, vous n’en approuvez aucune ? dit Jésus pour piquer leur intérêt.

– Non, nous trouvons en toutes une part de vérité, parfois beaucoup. Mais nous sentons aussi qu’il manque ce qu’il y a de plus vrai.

– Et vous ne savez pas le trouver ?

– Nous l’aurions peut-être trouvé, mais il nous paraît presque blasphémer de le dire, car… Nous sommes de bons Israélites, et nous craignons Dieu, presque au point de ne pouvoir prononcer son nom. Et de penser que, si l’homme du peuple élu, l’homme fils de Dieu ne peut pour ainsi dire prononcer le nom béni et crée des termes de remplacement pour nommer son Dieu, il nous paraît blasphématoire de penser que Satan puisse oser nuire à Dieu. Et pourtant, nous nous rendons compte que la douleur ne cesse d’agir envers toi parce que tu es Dieu et que Satan te hait. Il te hait comme nul autre. Tu trouves la haine, mon Frère, parce que tu es Dieu, explique Jacques.

– Oui, approuve Jean. Tu trouves la haine parce que tu es l’Amour. Ce ne sont pas les pharisiens ou les rabbins qui se dressent pour te faire souffrir, ce n’est pas celui-ci ou celui-là, ni pour telle ou telle raison. C’est la Haine qui pénètre les hommes et les dresse contre toi, blêmes de haine, parce que par ton amour, tu arraches trop de proies à la Haine.

– Il manque encore quelque chose à ces nombreuses définitions. Cherchez la raison la plus vraie. Celle pour laquelle j’existe… » dit Jésus pour les encourager.

Mais personne ne trouve. Ils réfléchissent longuement, puis renoncent :

« Nous ne trouvons pas…

– Elle est si simple… Elle est toujours devant vous. Elle résonne dans les paroles de nos livres, dans les figures de notre histoire… Allons, cherchez ! Dans toutes vos définitions, il y a du vrai, mais il manque la raison première. Cherchez-la, non pas dans le présent, mais dans le passé le plus lointain, au-delà des prophètes, au-delà des patriarches, au-delà de la création de l’Univers… »

Les apôtres réfléchissent… mais en vain. Jésus sourit. Puis il reprend :

« Et pourtant, si vous vous rappeliez mes paroles, vous trouveriez la raison. Mais vous ne pouvez encore tout vous rappeler. Un jour, vous vous souviendrez.

515.3

Ecoutez : remontons ensemble le cours des siècles, jusqu’aux limites du temps. Vous savez qui a corrompu l’esprit de l’homme. C’est Satan, le Serpent, l’Adversaire, l’Ennemi, la Haine. Appelez-le comme vous voulez. Mais pourquoi l’a-t-il corrompu ? Parce qu’il était très envieux, en voyant l’homme destiné au Ciel d’où lui-même avait été chassé. Il a voulu que l’homme subisse l’exil que lui-même connaît. Pourquoi avait-il été chassé ? Parce qu’il s’est révolté contre Dieu, vous le savez. Mais en quoi ? Cela concernait l’obéissance. Au commencement de la douleur, il y a une désobéissance. Dans ce cas, n’est-il pas nécessairement logique que pour rétablir l’ordre, qui est toujours joie, il doit y avoir une obéissance parfaite ? Obéir est difficile, surtout si c’est en matière grave. Ce qui est difficile fait souffrir celui qui l’accomplit. Réfléchissez donc : moi, à qui l’Amour a demandé si je voulais ramener la joie aux enfants de Dieu, je dois souffrir infiniment pour accomplir l’obéissance à la Pensée de Dieu. Je dois donc souffrir pour vaincre, pour effacer non pas un ou mille péchés, mais le Péché lui-même par excellence, qui dans l’esprit angélique de Lucifer ou dans celui qui animait Adam, a été et sera toujours, jusqu’au dernier homme, un péché de désobéissance à Dieu.

Pour vous, les hommes, votre obéissance doit se limiter à ce peu — qui vous paraît si grand, mais qui est si peu — que Dieu vous demande. Dans sa justice, il n’exige rien de vous que vous ne puissiez donner. Vous ne connaissez des volontés de Dieu que ce que vous pouvez accomplir.

Mais moi, je connais sa Pensée tout entière, au sujet de tous événements, les grands et les plus petits. Pour moi, il n’est pas de limites à la connaissance et à l’exécution. L’amoureux Sacrificateur, l’Abraham divin, n’épargne pas la Victime et son Fils. C’est l’Amour inassouvi et offensé qui exige réparation et offrande. Et même si je vivais des milliers d’années, ce ne serait rien si je ne consumais pas l’Homme jusqu’à sa dernière fibre, de même que rien n’aurait existé si de toute éternité je n’avais pas dit “ oui ” à mon Père, en me disposant à obéir, et comme Dieu Fils et comme Homme, au moment que mon Père trouverait juste.

L’obéissance est souffrance et elle est gloire. L’obéissance, comme l’âme, ne meurt jamais. En vérité, je vous dis que les vrais obéissants deviendront des dieux, mais après une lutte continuelle contre eux-mêmes, contre le monde, contre Satan. L’obéissance est lumière : plus on obéit, plus on est éclairé et mieux on voit. L’obéissance est patience : plus on obéit, mieux on supporte les fardeaux et les personnes. L’obéissance est humilité, et plus on la pratique, plus on est humble avec le prochain. L’obéissance est charité, car elle est un acte d’amour, et plus on s’y soumet, plus nos faits et gestes sont nombreux et parfaits. L’obéissance est héroïsme. Et un héros dans l’ordre spirituel, c’est un saint, le citoyen des Cieux, l’homme divinisé. Si la charité est la vertu où l’on retrouve le Dieu un et trine, l’obéissance est la vertu où l’on me trouve, moi, votre Maître. Faites en sorte que le monde vous reconnaisse pour mes disciples par une obéissance absolue à tout ce qui est saint.

515.4

Appelez Judas. J’ai quelque chose à dire, à lui aussi… »

Judas accourt. Jésus montre le panorama qui se rétrécit au fur et à mesure de la descente :

« Une petite parabole pour vous, futurs maîtres des âmes. Vous y verrez d’autant plus clair que vous gravirez davantage le chemin de la perfection, qui est ardu et pénible. Tout d’abord, nous admirions les deux plaines des Philistins et de Saron avec de nombreux villages, des champs et des vergers et jusqu’à un azur lointain qui était la grande mer, et le mont Carmel tout vert là-bas, au fond. Maintenant, nous ne voyons plus que peu de choses. L’horizon s’est rétréci et il ne cessera de se rétrécir jusqu’à disparaître au fond de la vallée. C’est exactement ce qui arrive à celui dont l’âme descend au lieu de s’élever : sa vertu et sa sagesse se font toujours plus limitées, son jugement toujours plus borné jusqu’à s’anéantir. Alors un maître spirituel est mort pour sa mission. Il ne discerne plus et ne peut plus conduire. C’est un cadavre, et il peut corrompre comme il s’est corrompu. La descente l’entraîne parfois — presque toujours —, parce qu’il trouve en bas des satisfactions sensuelles. Nous aussi, nous descendons dans la vallée pour trouver repos et nourriture, mais si cela est nécessaire à notre corps, il n’est pas nécessaire de satisfaire l’appétit sensuel et la paresse de l’âme, en descendant dans les vallées de la sensualité morale et spirituelle. Il n’y a qu’une seule vallée à laquelle il soit permis d’accéder, c’est celle de l’humilité, parce que Dieu lui-même y descend afin de saisir l’âme humble pour l’élever vers lui. Celui qui s’humilie sera exalté. Toute autre vallée est mortelle, car elle éloigne du Ciel.

– C’est pour cela que tu m’as appelé, Maître ?

– En effet. Tu as beaucoup parlé avec ceux qui te questionnaient.

– Oui, et ce n’était pas la peine. Ils ont l’intelligence plus dure que celle des mulets.

– Mais moi, j’ai voulu déposer une pensée là où tout est sorti. Pour que tu puisses nourrir ton âme. »

Judas le regarde, interdit. Il ne sait si c’est un don ou un reproche. Les autres qui n’avaient pas remarqué l’entretien de Judas avec ceux qui les suivaient, ne comprennent pas que Jésus reproche à Judas son orgueil.

515.5

Judas préfère amener prudemment la conversation dans une autre direction :

« Maître, qu’en penses-tu ? Ces Romains, comme l’homme de Pétra, pourront-ils arriver un jour à ta doctrine, eux qui ont eu un contact si limité avec toi ? Et cet Alexandre ? Il est parti… Nous ne le verrons plus, tout comme ces derniers, d’ailleurs. Il semble y avoir en eux une recherche instinctive de la vérité, mais ils sont plongés jusqu’au cou dans le paganisme. Réussiront-ils jamais à conclure quelque chose de bon ?

– Tu veux dire à trouver la Vérité ?

– Oui, Maître.

– Et pourquoi ne devraient-ils pas y parvenir ?

– Parce que ce sont des pécheurs.

– N’y a-t-il qu’eux de pécheurs ? N’y en a-t-il pas parmi nous ?

– Beaucoup, je l’admets. Mais justement, je me dis que si nous, qui sommes déjà nourris de sagesse et de vérité depuis des siècles, nous restons pécheurs et n’arrivons pas à devenir justes et à suivre la Vérité que, toi, tu représentes, comment pourront-ils le faire, eux, saturés d’impuretés comme ils le sont ?

– Tout homme peut arriver à atteindre et à posséder la Vérité, c’est-à-dire Dieu, quel que soit son point de départ. Quand il n’y a pas d’orgueil de l’esprit et de dépravation de la chair, mais sincère recherche de la Vérité et de la Lumière, pureté d’intention et désir de Dieu, une créature est sûrement sur le chemin de Dieu.

– Orgueil de l’esprit… et dépravation de la chair… Maître… alors…

– Développe ta pensée, elle est bonne. »

Judas tergiverse, puis il dit :

« Alors ils ne peuvent atteindre Dieu, car ce sont des dépravés.

– Ce n’est pas cela que tu voulais dire, Judas. Pourquoi as-tu bâillonné ta pensée et ta conscience ? Ah ! Comme il est difficile à l’homme de s’élever vers Dieu ! Et le plus grand obstacle se trouve en lui-même, qui ne veut pas réfléchir sur lui-même et reconnaître ses défauts. Vraiment, on calomnie bien souvent Satan, en lui attribuant toute cause de ruine spirituelle. Et l’on calomnie encore davantage Dieu en lui attribuant tous les événements. Dieu ne viole pas la liberté de l’homme. Satan ne peut l’emporter sur une volonté affermie dans le bien. En vérité, je vous dis que soixante-dix fois sur cent, l’homme pèche par sa propre volonté. Et — on ne le pense pas, mais il en est ainsi — il ne se relève pas de son péché parce qu’il se refuse à s’examiner, et même si sa conscience, par un mouvement imprévu, se dresse en lui et crie la vérité qu’il n’a pas voulu méditer, l’homme étouffe ce cri, anéantit cette représentation qui se dresse devant son intelligence sévère et affligée, s’efforce d’altérer sa pensée suggestionnée par la voix accusatrice, et se refuse à dire par exemple : “ Mais alors nous, moi, nous ne pouvons atteindre la Vérité parce que nous avons l’orgueil de l’esprit et la corruption de la chair. ” Oui, en vérité, si l’on n’avance pas vers la voie de Dieu, c’est que, parmi nous il y a l’orgueil de l’esprit et la corruption de la chair : un orgueil vraiment émule de celui de Satan, au point de juger ou d’entraver les actions de Dieu quand elles sont contraires aux intérêts des hommes ou des partis. Et ce péché fera, de nombreux Israélites, des damnés éternels.

– Nous ne sommes pas tous comme ça, pourtant.

– Non. Il y a encore des âmes bonnes, dans toutes les classes sociales. Elles sont plus nombreuses chez les humbles gens du peuple, que parmi les savants et les riches. On en trouve, certes, mais combien ? Combien, par rapport à ce peuple de Palestine que, depuis presque trois années, j’évangélise et comble de bienfaits, et pour lequel je m’épuise ? Il y a, en Israël, plus d’étoiles dans une nuit assombrie par les nuages que d’âmes résolues à entrer dans mon Royaume.

– Et les païens, ces païens-là, y entreront ?

– Pas tous, mais beaucoup. Et aussi parmi mes disciples eux-mêmes, tous ne persévéreront pas jusqu’à la fin. Mais ne nous préoccupons pas des fruits pourris qui tombent de la branche ! Cherchons, tant que c’est possible, à les empêcher de pourrir au moyen de la douceur, de la fermeté, des reproches et du pardon, de la patience et de la charité. Puis, quand ils disent “ non ” à Dieu et aux frères qui veulent les sauver, et quand ils se jettent dans les bras de la Mort, de Satan, en mourant impénitents, baissons la tête et offrons à Dieu notre souffrance de n’avoir pu donner la joie du salut de cette âme. Tout maître connaît de telles défaites. D’ailleurs, elles servent à abaisser l’orgueil des maîtres spirituels et à éprouver leur constance dans le ministère. La défaite ne doit pas lasser la volonté de l’éducateur spirituel, mais au contraire le pousser à faire davantage et mieux à l’avenir.

515.6

– Pourquoi as-tu dit au décurion que tu le reverrais sur un mont ? Comment fais-tu pour savoir cela ? »

Jésus porte sur Judas un long regard étrange, dans lequel la tristesse se mêle au sourire, avant de répondre :

« Parce qu’il sera l’un de ceux qui seront présents à mon élévation, et il dira au grand docteur d’Israël une sévère parole de vérité. Et à partir de ce moment-là, il commencera sa marche assurée vers la lumière. Mais nous voici à Gabaon. Que Pierre aille avec sept autres annoncer ma présence. Je parlerai sur-le-champ pour congédier les habitants des villages voisins qui me suivent. Les autres resteront avec moi jusqu’après le sabbat. Quant à toi, Judas, reste avec Matthieu, Simon et Barthélemy. »

(Je n’ai pas reconnu dans le décurion[1] l’un des soldats présents à la crucifixion. Mais je dois reconnaître que, absorbée comme je l’étais par l’observation attentive de mon Jésus, je ne les ai pas beaucoup examinés. Pour moi, c’était un groupe de soldats préposés au service, rien de plus. En outre, au moment où j’aurais mieux pu les regarder parce que “ tout était accompli ”, il y avait une lumière si faible que je n’aurais pu reconnaître que les visages que je vois souvent. Je pense pourtant, d’après les paroles de Jésus, que c’est le soldat qui a dit à Gamaliel des mots dont je ne me souviens pas, et que je ne puis contrôler parce que je suis seule ; et je n’ai personne pour me donner le cahier de la Passion.)

515.1

But Jesus is not allowed to be engrossed in his thoughts for a long time. John and his cousin James, then Peter and Simon Zealot approach Him drawing his attention to the view that they can see from the hilltop. And perhaps in their intent to distract Him, because He is clearly very sad, they recall episodes that took place in the district which their eyes are surveying. The trip towards Ashkelon… the house of the peasants in the Sharon plain where Jesus made the old father of Gamala and Jacob see again… the retreat of Jesus and James on Mount Carmel… Caesarea on Sea and the little girl Aurea Galla… the meeting with Syntyche… the Gentiles at Joppa… the highwaymen near Modin, the miracle of the crops in the house of Joseph of Arimathea the poor old woman gleaner… Recollections which should cheer one up… but in which, for everybody or for Him alone, there is the remembrance of tears and sorrow. Also the apostles become aware of that and they whisper: «Truly there is sorrow in everything on the Earth. It is a place of expiation…»

But Andrew, who has joined the group with James of Zebedee, remarks quite rightly: «A just law for us sinners. But why so much grief for Him?»

A polite discussion arises and remains such also when all the others, attracted by the voices of the first ones, join the group. The only exception is Judas Iscariot who takes pains in the middle of the humble people whom he instructs imitating the Master’s voice, gestures and expressions; but it is a bombastic theatrical imita­tion, lacking the warmth of persuasion and his listeners tell him quite openly, which makes Judas irritable and he throws back in their faces that they are dull-minded and thus they understand nothing. And he states that he is going to leave them because «it is not worth the trouble to throw the pearls of wisdom to pigs.» But he remains because the humble people are mortified and they beg him to bear with them admitting that «they are as inferior to him as an animal is to man.»…

Jesus, in order to listen to what Judas is saying, does not pay at­tention to what the Eleven are saying around Him, and what He hears does not certainly cheer Him up… But He sighs and is silent,

515.2

until Bartholomew interests Him directly by submitting to Him the different points of view concerning the reason why He, who is innocent and free from sin, must suffer.

Bartholomew says: «I maintain that it happens because man hates he who is good. I am referring to a guilty man, that is, to the majority of men. That majority realise that their guilt and vices show up even more when they are compared with those who are innocent, and out of spite they revenge themselves by making good people suffer.»

«I instead maintain that You suffer because of the contrast be­tween Your perfection and our misery. Even if no one despised You in any way, You would suffer just the same because Your perfection must be sorrowfully disgusted at the sins of men» says Judas Thaddeus.

«On the contrary, I sustain that You, as You are not exempt from humanity, suffer through the effort of having to control, by means of Your supernatural part, the rebellion of Your humanity against Your enemies» says Matthew.

«And I, I am sure I must be wrong because I am silly, I say that You suffer because Your love is rejected. You do not suffer because You cannot punish as Your human side might wish, but You suffer because You cannot do good to people as You would like» says Andrew.

«Finally, I maintain that You suffer because You must suffer all sorrows, in order to redeem all sorrows, as neither of Your Natures prevails in You, but they are both blended in perfect harmony, to form the perfect Victim. So supernatural as to be able to appease the offence given to God, so human as to be able to represent Mankind and lead it back to the immaculacy of the first Adam to cancel the past and generate a new humanity. To re-create a new humanity, according to the thought of God, that is, a humanity in which there is really the image and likeness of God and the destiny of Man: the possession, the ability to aspire to the possession of God, in His Kingdom. You must suffer supernaturally, and You do suffer, for what You see being done and for what surrounds You I could say, with perpetual offence to God. You must suffer human­ly, and You do suffer, to cut off the lewdness of our flesh poisoned by Satan. With the complete suffering of the two perfect Natures You will completely cancel the Offence to God, the sin of man» says the Zealot.

The others are silent. Jesus asks: «Are you not saying anything? Which according to you is the just definition?»

Some say this, some that. Only James of Alphaeus and John are silent.

«And what about you two? Do you not approve of any of them?» says Jesus teasingly.

«No. We feel there is something true, something very true in each of them. But we also feel that the utter truth is missing.»

«And can you not find it?»

«Perhaps John and I have found it. But it seems almost blasphemy to us to tell You, because… We are good Israelites and we fear God so much that we can hardly mention his Name. And it seems a blasphemous thought to us that while for a man of the chosen people, for a man son of God it is almost impossible to pro­nounce the blessed Name and he has to create substitutes to men­tion the name of his God, Satan may dare to harm God. And we feel that sorrow is always active against You, because You are God and Satan hates You. He hates You more than anybody else. You find hatred, Brother, because You are God» says James.

«Yes. You find hatred because You are Love. It is not the Pharisees, or the rabbis, or this man or that one, or for this or that reason, that rise to grieve You. It is Hatred that pervades men and directs them, livid with hatred, against You, because with Your love You snatch too many preys from Hatred» says John.

«There is still one thing missing in the many definitions. Look for the reason which is the really true one. The one by which I am…» says Jesus encouraging them.

But no one finds it. They think and think. They give up saying: «We cannot find it…»

«It is so simple. It is always in front of you. It resounds in our books, in the great figures of our history… Come on, look for it! In all your definitions there is some truth, but the first reason is miss­ing. Do not look for it in the present times, but in the most remote past, beyond the prophets, beyond the patriarchs, beyond the crea­tion of the Universe…»

The apostles are pensive… but they do not find it.

Jesus smiles and then says: «And yet, if you remembered my words, you would find the reason. But you cannot remember everything as yet. But one day you will remember.

515.3

Listen. Let us go back up the course of ages together, farther back than the limits of time. You know who spoiled the spirit of man. It was Satan, the Snake, the Antagonist, the Enemy, the Hatred. Call him what you like. But why did he spoil man? Because he was eaten up with en­vy: he saw man destined to Heaven, from which he had been driven out. He wanted for man the exile that he had received. Why had he been driven out? Because he rebelled against God. You know that. But in what? In obedience. Disobedience is at the origin of sorrow. Then, is it not also necessarily logical that to restore Order, which is always a Joy, there should be a perfect obe­dience? It is difficult to obey, particularly in serious matters. What is difficult causes sorrow to those who accomplish it. Consider therefore whether I, Who was asked by the Love whether I would take back joy to the children of God, should not suffer infinitely, to obey the Thought of God. I must, therefore, suffer to win, to cancel not one or a thousand sins, but the very preeminent Sin that, in the angelical spirit of Lucifer or in that animating Adam, was and will always be, until the last man, a sin of disobedience to God. Your obedience, men, is to be limited to the little – it seems so much to you but it is so little – that God asks of you. In his justice He only asks of you what you can give. Of the will of God, you know only what you can understand. But I know all his Thought, concerning great and small events. No limit has been im­posed to Me concerning knowledge and execution. The loving Sacrificer, the divine Abraham, does not spare the Victim and his Son. It is the unsatisfied and offended Love that demands repara­tion and offerings. And if I should live for thousands of years, it would be of no avail, if I did not consume Man to his last fibre, as nothing would have happened if ab aeterno I had not said: “Yes” to My Father, preparing to obey as God Son and as Man, Whom the Father had then found just. Obedience is sorrow and glory. Obe­dience, like the spirit, never dies. I solemnly tell you that those who are truly obedient will become like gods, after a continuous struggle against themselves, the world, Satan. Obedience is light. The more one is obedient, the more one is luminous and sees. Obedience is patient, and the more one is obedient, the more one bears things and people. Obedience is humble and the more one is obe­dient the more one is humble with his neighbour. Obedience is charitable because it is an act of love and the more one is obedient the more numerous and perfect are the acts. Obedience is heroic. And the hero of the spirit is the saint, the citizen of Heaven, the deified man. If charity is the virtue in which one finds God One and Trine, obedience is the virtue in which one finds Me, your Master. Ensure that the world knows you as My disciples, through absolute obedience to everything that is holy.

515.4

Call Judas. I have something to tell him as well…»

Judas arrives. Jesus points at the view which becomes narrower as they descend and He says: «A short parable for you, future masters of the spirit. The more you climb the way to perfection which is hard and painful, the more you will see. Before we could see two plains, the Philistine and the Sharon plains, with many villages, fields and orchards, and even a remote blue expanse, that is, the great sea, and the green Carmel over there at the end. Now we can see only little. The panorama has narrowed and will nar­row even more until it will disappear at the bottom of the valley. The same happens to those who descend spiritually instead of ascending. One’s virtue and wisdom become more and more limited and one’s judgement narrower and narrower until it vanishes completely. A master of the spirit is then dead to his mis­sion. He can no longer discern or guide. He is a corpse and can cor­rupt as he is corrupt. At times it is alluring to descend, it is almost always tempting, because at the bottom there are sensual satisfac­tions. We also are going down to the valley to find rest and food. But if that is necessary to our bodies, it is not necessary to satisfy sensual lust and spiritual laziness by descending into the valleys of moral and spiritual sensualism. You are allowed to reach one valley only: the valley of humbleness. Because God Himself descends into it to abduct humble spirits and raise them to Himself. He who humbles himself will be exalted. Any other valley is lethal because it removes one from Heaven.»

«Is that why You sent for me, Master?»

«Yes, for that. You had a long conversation with those who were questioning you.»

«Yes, but it is not worth it. They are more dull-minded than mules.»

«And I wanted to leave a thought where everything has vanished. That you may nourish your spirit.»

Judas looks at Him with a perplexed countenance. He does not know whether he is being rewarded or reproached. The others, who are unaware of Judas’ conversation with the followers, do not realise that Jesus is reproaching Judas for his pride.

515.5

And Judas wisely prefers to change the subject and he asks: «Master, what do You think? Those Romans, and the man from Petra, will they ever be able to accept Your Doctrine, since they have had such a limited contact with You? And that Alexander? He has gone away… We shall never see him again. And these peo­ple, too. One might say that they instinctively search for the truth, but they are up to their necks in heathenism. Will they ever suc­ceed in doing anything good?»

«You mean in finding the Truth?»

«Yes, Master.»

«Why should they not succeed?»

«Because they are sinners.»

«Are they the only sinners? Are there none among us?»

«There are many, I agree. That is exactly why I say that if we, who have been nourished for ages with wisdom and truth, are sin­ners and we are not successful in becoming just and followers of the Truth that You represent, how will they be able to do it, sated with filth as they are?»

«Every man can succeed in reaching and possessing the Truth, that is, God, wherever he may start from to reach it. When there is no mental pride and fleshly perversion, but sincere research for the Truth and Light, purity of intent and yearning for God, a creature is surely on the way to God.»

«Mental pride… fleshly perversion… Master… then…»

«Continue with your thought, which is a good one.»

Judas hesitates, then he says: «Then they cannot reach God because they are perverted.»

«That is not what you wanted to say, Judas. Why have you gagged your thought and your conscience? Oh! how difficult it is for man to rise to God! And the main obstacle is in man himself, as he will not admit and meditate on himself and his faults. Really even Satan is very often slandered, by ascribing every cause of spiritual ruin to him. And God is even more calumniated, as all events are ascribed to Him. God does not infringe man’s freedom. Satan cannot prevail over a will firm in Good: I solemnly tell you that seven­ty times out of one hundred man sins of his own will. And – one does not consider it but it is so – and he does not rise from sin ­because he avoids examining his own conscience, and even if his conscience with unexpected motion reacts in him and shouts the truth on which he did not want to meditate, man stifles that cry, he destroys the figure which appears severe and sorrowful to his in­tellect he twists with an effort his thought influenced by the ac­cusing voice, and he refuses to say, for instance: “Then we, I, can­not reach the Truth because our minds are proud and our flesh corrupt”. Yes, truly, we do not proceed towards the ways of God because among us there is pride of minds and corruption of the flesh. A pride which really vies with the satanic one, so much so that God’s actions are judged and hampered, when they are con­trary to the interests of men and parties. And because of that so many Israelites will be damned forever.»

«But we are not all like that.»

«No. There are still good spirits, in every class of people. They are more numerous among the humble people than among the learned and rich. But they exist. But how many are they? How many with regards to this Palestinian people, whom I have been evangelizing and assisting for almost three years, and for whom I am wasting away? There are more stars shining in a cloudy night than spirits in Israel willing to come to My Kingdom.»

«And the Gentiles, those Gentiles, will they come?»

«Not all of them, but many. Not even all My disciples will persevere until the end. But do not let us worry about the fruit that falls from the tree because it is rotten! Let us try, as much as possible, through kindness and firmness, through reproaches and forgiveness, through patience and love, to prevent them from becoming rotten. Then, when they say “no” to God and to their brothers who want to save them, and they throw themselves into the arms of Death, of Satan, dying unrepentant, let us lower our heads and offer God our sorrow for not making Him happy with that soul by saving it. Every master meets with such defeats. And they are useful, too. They humble the pride of the master of souls and test his constancy in his ministry. A defeat must not weary the will of the teacher of spirits. On the contrary it must spur him to do more and better in future.»

515.6

«Why did You tell the decurion that You will see him on a moun­tain? How do You know?»

Jesus looks at Judas: a long strange look in which sadness mingles with a smile, and He says: «Because he is one of the people who will be present at My assumption and he will tell the great doctor of Israel a severe word of truth. And from that moment he will begin his safe journey towards the Light. But here we are at Gibeon. Let Peter go with other seven to announce Me. I will speak at once in order to dismiss those who have followed Me from the nearby villages. The others will stay with Me until after the Sabbath. You, Judas, stay with Matthew, Simon and Bartholomew.»

(I did not recognise in the decurion[1] any of the soldiers who were present at the Crucifixion. But I must say that, engaged as I was in watching my Jesus, I did not pay much attention to them. As far as I was concerned, it was a group of soldiers on duty. Nothing else. Further, when I could have watched them more carefully, because «everything was accomplished», there was such a faint light that only well-known faces could be recognised. But taking into ac­count Jesus’ words, I think that it was the soldier who said some words to Gamaliel, words that I do not remember and that I cannot check, because I am all alone in the house and I cannot get anybody to give me the notebook of the Passion.)


Notes

  1. le décurion est le chef d’une manipule romaine, ou gradé, rencontré en 514.7/9 ; absorbée comme je l’étais par l’observation attentive de mon Jésus : il s’agit de la scène de la crucifixion, écrite auparavant (le 27 mars 1945) mais placée plus loin, au chapitre 609.

Notes

  1. decurion is the head of the Roman maniple, or officer, met in 514.7/9.