558.1
Jésus est en train de marcher sur une route isolée. Entouré des habitants de Sichem, il suit les oncles des enfants. Ils traversent une région déserte : on ne voit aucune ville. Les garçons ont été mis en selle sur des ânes, et un parent tient la bride tout en les surveillant. Les autres ânes qui n’ont pas de cavaliers — les habitants de Sichem ont préféré marcher pour rester près de Jésus — précèdent le groupe des hommes ; trottant en bande, ils braient de temps à autre, heureux de rentrer à l’écurie sans être chargés, par une splendide journée, entre des talus bordés d’herbe nouvelle où ils plongent de temps en temps le museau pour en goûter une bouchée, puis, en un pas amusant, caracolent pour rejoindre leurs compagnons montés. Cela fait rire les enfants.
Jésus parle avec les Sichémites ou écoute leurs conversations. Il est visible que les Samaritains sont fiers d’avoir le Maître parmi eux, et rêvent plus qu’il ne convient. Ils vont jusqu’à dire à Jésus, en montrant les hautes montagnes à la gauche des voyageurs — qui font route vers le nord :
« Tu vois ? Les monts Ebal et Garizim[1] ont une mauvaise renommée, mais pour toi, au moins, ils sont bien meilleurs que Sion, et ils le seraient totalement si tu le voulais, et si tu choisissais d’y demeurer. Sion est toujours un repaire de Jébuséens, et ceux de maintenant te sont encore plus hostiles que les anciens pour David[2]. Lui a pris la citadelle par violence, mais toi qui n’agis pas ainsi, tu n’y régneras pas. Jamais. Reste parmi nous, Seigneur, et nous t’honorerons.»
Jésus répond :
« Dites-moi : m’auriez-vous aimé si j’avais voulu vous conquérir par la violence ?
– Sincèrement… non. Nous t’aimons justement parce que tu es tout amour.
– C’est donc à cause de l’amour, que je règne dans vos cœurs ?
– Oui, Maître. Mais c’est parce que nous avons accueilli ton amour. Eux, ceux de Jérusalem, ne t’aiment pas.
– C’est vrai, ils ne m’aiment pas.