Los Escritos de Maria Valtorta

322. Départ de Séleucie sur un char et arrivée à Antioche.

322. Partida de Seleucia en un carro

322.1

« Vous trouverez certainement un char sur la place du marché, mais si vous voulez le mien, je vous le prête en souvenir de Théophile. Si je suis un homme tranquille, c’est à lui que je le dois. Il m’a défendu parce qu’il était juste. Et certaines choses ne s’oublient pas, dit le vieil aubergiste, debout devant les apôtres dans le premier soleil du matin.

– Mais ton char, nous le garderons au loin des jours durant… Et puis qui va le conduire? Moi, j’y arrive avec l’âne… mais les chevaux…

– Mais c’est la même chose, homme ! Je ne vais pas te donner un poulain indompté, mais un prudent cheval de trait, doux comme un agneau. Vous aurez vite fait, et sans peine. A la neuvième heure, vous serez à Antioche, d’autant plus que le cheval connaît bien la route et y va tout seul. Tu me le rendras quand tu voudras, sans autre intérêt de ma part que celui de rendre service au fils de Théophile, à qui vous direz que je lui suis encore très redevable, que je pense à lui et que je me considère comme son serviteur.

– Que faisons-nous ? demande Pierre à ses compagnons.

– Ce que tu crois être le mieux. Tu décides, et nous obéissons…

– Nous essayons le cheval ? C’est à cause de Jean que je dis cela… et aussi pour faire vite… Il me semble conduire quelqu’un à la mort, et j’ai hâte que tout soit fini…

– Tu as raison, disent-ils tous.

– Alors, homme, j’accepte.

– Et moi, je vous le confie avec joie. Je vais préparer le véhicule. »

322.2

L’aubergiste s’éloigne. Pierre exprime entièrement sa pensée :

« J’ai usé la moitié de ma vie en ces quelques jours. Quelle peine ! Quelle peine ! J’aurais voulu avoir le char[1] d’Elie, le manteau emprunté à Elisée, tout ce qui est rapide pour faire vite… Et surtout j’aurais voulu, quitte à en mourir, donner quelque chose pour consoler ces deux malheureux, leur faire oublier, leur… Je ne sais pas, voilà ! Quelque chose qui ne les fasse pas autant souffrir… Mais si j’arrive à savoir celui qui est la cause principale de cette douleur, je ne suis plus Simon, fils de Jonas, si je ne le tords pas comme un linge ! Je ne parle pas de le tuer, oh, non ! Mais le briser comme il a brisé la joie et la vie des deux pauvres disciples…

– Tu as raison, c’est une grande peine. Mais Jésus dit que l’on doit pardonner les offenses…, dit Jacques, fils d’Alphée.

– Si c’était à moi qu’elles étaient faites, je devrais les pardonner. Et je le pourrais. Je suis en bonne santé et fort et, si quelqu’un m’offense, j’ai la force de réagir aussi à la douleur. Mais ce pauvre Jean ! Non, je ne peux pardonner l’offense faite à celui que le Seigneur a racheté, à quelqu’un qui meurt dans cette affliction…

– Moi, je pense au moment où nous les quitterons tout à fait, soupire André.

– Moi aussi. C’est une pensée fixe et qui s’accroît à mesure que le moment approche, murmure Matthieu.

– Agissons vite, par pitié, dit Pierre.

– Non, Simon. Pardonne-moi si je te fais remarquer que tu as tort de vouloir cela. Ton amour du prochain est en train de devenir un amour dévié, et en toi, qui es toujours droit, cela ne doit pas arriver, intervient paisiblement Simon le Zélote en posant la main sur l’épaule de Pierre.

– Pourquoi, Simon ? Tu es cultivé et bon. Montre-moi mon tort, et si je le reconnais, je dirai : tu as raison.

– Ton amour est en train de devenir malsain parce qu’il se change peu à peu en égoïsme.

– Comment ? Je m’afflige pour eux et je suis égoïste ?

– Oui, mon frère, parce que, par excès d’amour – tout excès est désordre et pour cette raison conduit au péché – tu deviens lâche. Toi, tu ne veux pas souffrir de voir souffrir. C’est de l’égoïsme, mon frère dans le nom du Seigneur.

– C’est vrai ! Tu as raison. Et je te remercie de m’avoir averti. C’est ce qu’il faut faire entre bons compagnons. C’est bien. Alors je ne serai plus pressé… Pourtant, dites la vérité, n’est-ce pas un déchirement ?

– Si ! Si ! Répondent-ils tous.

322.3

– Comment allons nous faire pour les quitter ?

– Je dirais de le faire quand Philippe les aura reçus, en restant peut-être cachés à Antioche quelque temps, en allant nous informer auprès de Philippe comment ils s’habituent, suggère André.

– Non. Ce serait trop les faire souffrir par une séparation aussi brutale, dit Jacques, fils d’Alphée.

– Alors, voilà, suivons à moitié le conseil d’André. Restons à Antioche, mais pas dans la maison de Philippe. Et pendant quelques jours on ira les voir, puis toujours moins, jusqu’à ce que… on n’y aille plus, propose l’autre Jacques.

– Douleur toujours renouvelée et cruelle déception. Non. Non, il ne faut pas faire ça, dit Jude.

– Qu’allons-nous faire, Simon ?

– Ah ! Pour ma part, je préférerais être à leur place plutôt que de devoir leur dire : “ Adieu ”, dit Pierre d’un air découragé.

– Moi, j’ai une proposition » dit Simon le Zélote. « Allons avec eux chez Philippe, et restons-y. Puis, toujours ensemble, nous allons à Antigonée. C’est un endroit charmant… Et nous y restons. Une fois qu’ils se seront habitués, nous nous retirerons douloureusement, mais virilement. Voilà ce que je dirais, à moins que Simon-Pierre n’ait des ordres différents du Maître.

– Moi ? Non. Il m’a dit: “ Fais tout comme il faut, avec amour, sans paresse et sans hâte, et de la façon que tu juges la meil­leure. ” Jusqu’à présent, il me semble avoir agi ainsi, excepté quand je me sui déclaré pêcheur !… Mais si je ne l’avais pas dit, Nicomède ne me laissait pas rester sur le pont.

– Ne te fais pas de scrupules sans fondements, Simon. Ce sont des pièges du démon pour te troubler, dit Jude pour le réconforter.

– Oh, oui ! C’est tout à fait cela. Je crois qu’il rôde autour de nous plus que jamais, nous créant des obstacles et des frayeurs pour nous amener à être lâches » dit l’apôtre Jean.

Puis il achève tout bas :

« Je crois qu’il voulait amener nos deux compagnons à désespérer en les gardant en Palestine… et maintenant qu’ils fuient ses embûches, il se venge sur nous… Je le sens autour de moi, comme un serpent caché dans l’herbe… Et cela fait des mois que j’ai cette impression… Mais voici l’aubergiste d’un côté, et Jean avec Syntica de l’autre. Je vous dirai le reste quand nous serons seuls, si cela vous intéresse. »

En effet, d’un côté de la cour arrive le char robuste auquel est attelé un solide cheval conduit par l’aubergiste, tandis que de l’autre côté les deux disciples viennent vers eux.

« Est-ce l’heure de partir ? demande Syntica.

– Oui, c’est l’heure. Es-tu bien couvert, Jean ? Tes douleurs vont-elles mieux ?

– Oui, je suis enveloppé dans la laine, et l’onction m’a fait du bien.

– Alors, monte, nous venons nous aussi. »

322.4

… Une fois le chargement effectué et tout le monde installé, ils sortent par la large porte cochère après que l’aubergiste a renouvelé ses assurances sur la docilité du cheval. Ils traversent une place qu’on leur a indiquée et prennent une route près des murs jusqu’à ce qu’ils sortent par une porte, en longeant d’abord un canal profond, puis le fleuve lui-même.

C’est une belle route bien entretenue, qui se dirige vers le nord-est, mais en suivant les méandres du fleuve. De l’autre côté, il y a des monts très verts sur leurs pentes, dans leurs failles et leurs ravins, et déjà l’on voit, aux endroits les plus ensoleillés, se gonfler les bourgeons de milliers d’arbustes sur les buissons du sous-bois.

« Que de myrtes ! S’écrie Syntica.

– Et de lauriers ! Ajoute Matthieu.

– Près d’Antioche, il y a un endroit consacré à Apollon, dit Jean d’En-Dor.

– Peut-être les vents ont-ils apporté des graines jusqu’ici…

– Probablement, mais c’est un lieu rempli de belles plantes, dit Simon le Zélote.

– Toi qui y es déjà allé, crois-tu que nous allons passer près de Daphné ?

– Forcément. Vous allez voir l’une des plus belles vallées du monde. A part le culte obscène qui a dégénéré en orgies toujours plus dégoûtantes, c’est une vallée du paradis terrestre et, si la foi y pénètre, elle deviendra un vrai paradis. Ah ! Que de bien vous pourrez faire ici ! Je vous souhaite des cœurs aussi fertiles que l’est le sol » dit Simon le Zélote pour faire naître des pensées consolantes chez les deux disciples.

Mais Jean baisse la tête et Syntica soupire.

322.5

Le cheval trotte en cadence et Pierre garde le silence, tout occupé à la conduite, bien que l’animal marche avec assurance sans qu’il soit besoin de le guider et de le stimuler. Aussi le chemin se fait-il assez rapidement jusqu’à ce qu’ils s’arrêtent près d’un pont pour manger et faire reposer le cheval. Le soleil est au midi et la beauté d’une splendide nature se manifeste à leurs yeux.

« Je préfère être ici que sur la mer ! S’exclame Pierre, en regardant autour de lui.

– Quelle tempête !

– Le Seigneur a prié pour nous. Je l’ai senti tout proche quand nous priions sur le pont. Proche comme s’il avait été parmi nous…, susurre Jean en souriant.

– Où peut-il donc être ? Je ne suis pas tranquille à l’idée qu’il est sans vêtement de rechange… S’il est trempé ? Et que va-t-il manger ? Il est capable de jeûner…

– Tu peux être certain qu’il le fait pour nous aider, dit Jacques, fils d’Alphée, avec assurance.

– Et pour autre chose encore. Notre frère est très affligé depuis quelque temps. Je crois qu’il se mortifie continuellement pour vaincre le monde, intervient Jude.

– Tu veux dire le démon qui est dans le monde, précise Jacques, fils de Zébédée.

– C’est la même chose.

– Mais il n’y parviendra pas. Moi, j’ai le cœur serré par mille peurs…, soupire André.

– Oh ! Maintenant que nous sommes loin, tout ira mieux ! Assure Jean d’En-Dor avec un peu d’amertume.

– Ne crois pas cela. Syntica et toi, vous n’étiez rien en comparaison “ des grands torts ” du Messie selon les grands d’Israël, fait remarquer Jude d’un ton tranchant.

– En es-tu sûr ? Moi, dans ma souffrance, j’ai aussi cette épine dans le cœur : d’avoir été une cause de mal pour Jésus par ma venue. Si j’étais sûr que ce n’est pas le cas, je souffrirais moins, dit Jean d’En-Dor.

– Me crois-tu sincère, Jean ? demande Jude.

– Bien sûr, je le crois !

– Eh bien ! Au nom de Dieu et au mien, je t’assure que tu n’as causé qu’une seule peine à Jésus : celle de devoir t’envoyer ici en mission. Tu n’es pour rien dans toutes ses autres peines passées, présentes et futures. »

Le premier sourire, après tant de tristes jours de noire mélancolie, éclaire le visage amaigri de Jean d’En-Dor. Il confesse :

« Quel soulagement tu m’apportes ! Le jour me paraît plus lumineux, mon mal plus léger, mon cœur plus consolé. Merci, Jude ! Merci ! »

322.6

Ils remontent sur le char, franchissent le pont pour suivre l’autre rive du fleuve, une autre route qui va directement vers Antioche, à travers une région très fertile.

« La voilà! C’est dans cette vallée poétique que se trouve Daphné avec son temple et ses bosquets. Et là-bas, dans cette plaine, voici Antioche avec ses tours sur les remparts. Nous allons entrer par la porte qui se trouve près du fleuve. La maison de Lazare n’est pas très loin des murs. Les plus belles maisons ont été vendues. Il reste celle-là, autrefois lieu de séjour des serviteurs et des clients de Théophile, avec beaucoup d’écuries et de greniers. C’est maintenant Philippe qui vit là : un bon vieillard, un fidèle de Lazare. Vous y serez bien. Et ensemble, nous irons à Antigonée où se trouvait la maison habitée par Euchérie et ses enfants, alors tout petits…

– Cette ville est très fortifiée, hein? demande Pierre, qui respire de nouveau, maintenant qu’il voit que son premier essai de cocher a bien réussi.

– Très fortifiée. Des murs d’une hauteur et d’une largeur grandioses, en plus des cent tours qui, vous le voyez, ont l’air de géants dressés sur les murs, et des fossés infranchissables à leurs pieds. Même le mont Silpius a mis ses sommets au service de la défense, et comme contreforts des murs dans les endroits les plus délicats… Voici la porte. Il vaut mieux que tu t’arrêtes et que tu entres en tenant le cheval par la bride. Je vais te conduire, car je connais le chemin… »

Ils passent la porte gardée par les Romains. L’apôtre Jean dit :

« Qui sait si le soldat de la Porte des Poissons est ici… Jésus serait heureux de le savoir…

– Nous le chercherons, mais, pour l’instant, avance vite » dit Pierre, troublé à l’idée d’aller dans une maison inconnue.

Jean obéit sans mot dire, mais il dévisage chaque soldat qu’il voit.

322.7

Un bref parcours, puis une maison solide et simple, c’est-à-dire un haut mur sans fenêtres. Une porte cochère seulement au milieu du mur.

« C’est là ! Arrête ! Dit Simon le Zélote.

– Oh, Simon ! Sois gentil ! Parle, toi, maintenant.

– Mais oui, si cela doit te faire plaisir, je vais parler. »

Et Simon le Zélote frappe au lourd portail. Il se fait reconnaître comme étant un envoyé de Lazare. Il entre seul. Il sort avec un vieillard grand et digne qui fait mille courbettes et qui ordonne à un serviteur d’ouvrir le portail pour laisser entrer le char ; et il s’excuse de les faire tous passer par là au lieu de leur ouvrir la porte de la maison.

Le char s’arrête dans une vaste cour aux nombreux portiques, bien tenue, avec quatre gros platanes aux quatre angles et deux au milieu pour ombrager un puits et un bassin qui sert pour abreuver les chevaux.

« Occupe-toi du cheval » ordonne l’intendant au serviteur.

Et à ses hôtes :

« Je vous en prie, venez et que soit béni le Seigneur qui m’envoie ses serviteurs et les amis de mon maître. Ordonnez : votre serviteur vous écoute. »

Pierre rougit parce que c’est à lui spécialement que s’adressent ces paroles et ces courbettes, et il ne sait que dire… Simon le Zélote vient à son secours :

« Les disciples du Messie d’Israël, dont te parle Lazare, fils de Théophile, qui désormais habiteront ta maison pour servir le Seigneur, n’ont besoin que de repos. Veux-tu leur montrer où ils peuvent habiter ?

– Oh ! Il y a toujours des pièces préparées pour les voyageurs comme c’était l’habitude avec ma maîtresse. Venez, venez… »

Et, suivi de tous, il prend un couloir, puis traverse une petite cour au fond de laquelle se trouve la véritable demeure. Il ouvre la porte, franchit un vestibule et tourne à droite. Voilà un escalier. Ils montent. Un nouveau couloir avec des pièces des deux côtés.

« Voici, et que la demeure vous soit agréable. Je vais immédiatement commander de l’eau et du linge. Que Dieu soit avec vous » dit le vieillard ; et il s’en va.

Ils ouvrent les volets des chambres qu’ils choisissent. Les murs et les forts d’Antioche sont en face d’un côté ; de l’autre côté, la cour tranquille ornée de rosiers grimpants qui manquent de charme en ce moment à cause de la saison.

Et après un si long voyage, voici enfin une maison, une chambre, un lit… Un séjour pour certains, le but pour les autres…

322.1

«En los mercados encontraréis seguro un carro. Pero, si queréis el mío, os lo dejo, en recuerdo de Teófilo. Si vivo tranquilo, se lo debo a él. Me defendió, porque era justo. Ciertas cosas no se olvidan» dice el anciano posadero, erguido enfrente de los apóstoles bajo el primer sol de la mañana.

«Es que tú estarías sin tu carro varios días… Y, además, ¿quién lo guía? Yo con un burro… todavía… ¡pero con un caballo!…».

«¡Es igual! No te voy a dar un potro indómito. Te doy un prudente caballo de tiro, bueno como un cordero. Llegaréis pronto y sin fatigaros. Para la hora novena estaréis en Antioquía; mucho más considerando que el caballo conoce muy bien el camino y va solo. Me lo devolverás cuando quieras, sin interés por mi parte, si no es el de hacer una cosa grata al hijo de Teófilo. Decidle que todavía le debo muchas cosas, y que le recuerdo y me siento siervo suyo».

«¿Qué hacemos?» pregunta Pedro a sus compañeros.

«Lo que te parezca mejor. Tú juzga y nosotros obedecemos…».

«¿Probamos con el caballo? Por Juan lo digo… y también para abreviar… Me siento como si estuviera llevando a uno a la muerte y estoy deseando acabar todo esto lo antes posible…».

«Tienes razón» dicen todos.

«Entonces, hombre, acepto».

«Y yo ofrezco con alegría. Voy a aparejar el vehículo».

322.2

El hospedero se marcha. Pedro da rienda suelta a su pensamiento: «He consumido en estos pocos días la mitad del tiempo de vida que tenía. ¡Una pena!… ¡Una pena!… Habría querido tener el carro de Elías, el manto que cogió Eliseo[1], cualquier cosa rápida para abreviar el tiempo… Pero, sobre todo, habría deseado, a costa de morir, dar a esos pobres algo que los consolase, que les hiciera olvidar, que les… ¡¡No sé!! Algo, en definitiva, que no les hiciera sufrir tanto… Pero, si logro saber quién es la causa principal de este dolor, dejo de ser Simón de Jonás si no le retuerzo como a un paño empapado. No digo matarle, ¡no!, pero sí exprimirle, como él ha exprimido la alegría y la vida a esos dos pobrecillos…».

«Tienes razón. Es una gran pena. Pero Jesús dice que se debe perdonar las ofensas…» dice Santiago de Alfeo.

«Si me las hubieran hecho a mí, debería perdonar. Y podría. Estoy sano y fuerte, y si alguien me ofende tengo fuerza para reaccionar incluso contra el dolor. ¡Pero, el pobre Juan! No, no puedo perdonar la ofensa contra el redimido del Señor, contra uno que muere afligido de esta forma…».

«Yo pienso en el momento en que le dejemos del todo…» suspira Andrés.

«Yo también. Es un pensamiento fijo y que aumenta a medida que se acerca el momento…» susurra Mateo.

«Hagámoslo pronto, por piedad» dice Pedro.

«No, Simón. Perdona si te observo que te equivocas deseando eso. Tu amor al prójimo se está transformando en un amor desviado, y esto no debe suceder en ti, que siempre has sido recto» dice sereno el Zelote, poniendo una mano en el hombro de Pedro.

«¿Por qué, Simón? Eres culto y bueno. Muéstrame mi error, y yo, si así lo veo, te diré: tienes razón».

«Tu amor se está haciendo malsano, porque está para transformarse en egoísmo».

«¿Cómo? ¿Me aflijo por ellos y soy egoísta?».

«Sí, hermano, porque tú, por exceso de amor — todo exceso es desorden y, por tanto, induce al pecado — te envileces. Quieres no sufrir tú de ver sufrir. Eso es egoísmo, hermano en el nombre del Señor».

«¡Es verdad! Tienes razón. Y te agradezco esta advertencia. Así se debe hacer entre buenos compañeros. Bien. Entonces ya no tendré prisa… Pero, decid la verdad, ¿no es un acto de piedad?».

«Lo es, lo es…» dicen todos.

322.3

«¿De qué forma los vamos a dejar?».

«Propondría hacerlo cuando nos haya recibido Felipe, pero quedándonos quizás ocultos un tiempo en Antioquía y preguntándole a Felipe cómo se van adaptando…» sugiere Andrés.

«No. Sería hacerles sufrir demasiado con una separación tan brusca» dice Santiago de Alfeo.

«Entonces… sigamos a medias el consejo de Andrés. Quedémonos en Antioquía, pero no en casa de Felipe, y durante unos días vamos a verlos, cada vez menos, cada vez menos, hasta que… no volvemos» dice el otro Santiago.

«Dolor renovado una y otra vez, y cruel desilusión. No. No se debe hacer» dice Judas Tadeo.

«¿Qué hacemos, Simón?».

«¡Ah!, por lo que a mí respecta, quisiera estar en su lugar más bien que tener que decir: “Me despido de vosotros”» dice Pedro abatido.

«Propongo una cosa. Vamos con ellos a casa de Felipe. Nos quedamos allí. Luego, siguiendo todavía juntos, vamos a Antigonio. Es un lugar ameno… Y allí también estamos un tiempo. Una vez que ellos se hayan aclimatado, nos retiramos, con dolor pero con virilidad. Yo diría esto. A menos que Simón-Pedro tenga órdenes distintas del Maestro» dice Simón Zelote.

«¿Yo? No. Me dijo: “Haz todo, bien, con amor, sin pereza y sin prisa, y de la forma que juzgues mejor”. Hasta ahora creo que lo he hecho. ¡Está eso de que dije que era pescador!… Pero, si no lo hubiera dicho no me habría dejado estar en el puente».

«No te crees escrúpulos tontos, Simón. Son puntadas del demonio para turbarte» conforta Judas Tadeo.

«¡Verdaderamente es así! Creo que está alrededor de nosotros como no lo ha estado jamás, poniéndonos obstáculos y creándonos miedos para movernos a actos viles» dice Juan apóstol, y concluye en voz baja: «Creo que quería inducir a la desesperación a ellos dos reteniéndolos en Palestina… y ahora que se escapan de su asechanza se venga en nosotros… Me lo siento alrededor como una serpiente escondida entre la hierba… Y ya hace meses que me lo siento alrededor así… Mirad, ahí vienen el hospedero por un lado y Juan y Síntica por el otro. Os diré el resto cuando estemos solos, si os interesa».

En efecto, por un lado del patio viene el carro, un carro sólido al que está unido un robusto caballo guiado por el hospedero; por el otro, vienen hacia ellos los dos discípulos.

«¿Es hora de marcharnos?» pregunta Síntica.

«Sí. Es la hora. ¿Estás cubierto bien, Juan? ¿Van mejor tus dolores?».

«Sí. Estoy envuelto en lana y la unción con el ungüento me ha hecho bien».

«Entonces sube, que ahora subimos también nosotros».

322.4

…Y, ultimada la carga, todos ya en el carro, salen por la amplia puerta, después de repetidos aseguramientos del hospedero de que el caballo es dócil. Cruzan una plaza que les ha sido indicada y entran por una calle que bordea los muros de la ciudad, hasta que salen por una puerta; después siguen el curso de un profundo canal y luego el propio río. Es un camino bonito y bien mantenido, que va en dirección Norte-Este, pero siguiendo los meandros del río. Por el otro lado hay montes muy verdes, con sus pendientes, sus concavidades, sus barrancos; y ya se ven en los matorrales del monte bajo, en los lugares más expuestos al sol, llenarse las gemas de mil arbustos.

«¡Cuántos arrayanes!» exclama Síntica.

«¡Y laurel!» añade Mateo.

«Cerca de Antioquía hay un lugar sacrado dedicado a Apolo» dice Juan de Endor.

«Quizás el viento ha traído las semillas hasta aquí…».

«Quizás. Pero éste es un lugar todo lleno de plantas hermosas» dice el Zelote.

«Tú, que has estado aquí, ¿crees que pasaremos por Dafne?».

«Por fuerza. Veréis uno de los valles más bonitos del mundo. Aparte del culto obsceno y degenerado en orgías que cada vez son más asquerosas, es un valle de paraíso terrenal, y si en él entra la Fe se transformará en un paraíso verdadero. ¡Cuánto bien podréis hacer aquí! Os deseo corazones fértiles como fértil es el suelo…» dice el Zelote para suscitar en los dos discípulos pensamientos consoladores.

Pero Juan agacha la cabeza y Síntica suspira.

322.5

El caballo trota cadencioso. Pedro, estando todo centrado en el esfuerzo de guiar, aunque el animal va seguro sin necesidad de guía o estímulo, no habla. Así que el camino discurre bastante rápidamente. Llegan a un puente y se detienen para comer y para que el caballo descanse. El Sol está en su culmen; vese toda la hermosura de la bellísima naturaleza.

«De todas formas… prefiero estar aquí antes que en el mar…» dice Pedro observando en derredor.

«¡Pero qué tempestad!».

«El Señor ha orado por nosotros. Le he sentido cerca cuando orábamos en el puente de la nave. Cerca como si estuviera en medio de nosotros…» dice sonriendo Juan.

«¿Y dónde estará? No estoy tranquilo pensando que no tiene ropa… ¿Y si se moja? ¿Y qué come? Es capaz de hacer ayuno…».

«Puedes estar convencido de que lo hace, para ayudarnos a nosotros» dice con seguridad Santiago de Alfeo.

«Y también por otros motivos. Nuestro hermano está muy afligido desde hace un tiempo. Creo que se mortifica continuamente para vencer al mundo» dice Judas Tadeo.

«Querrás decir: al demonio que hay en el mundo» dice Santiago de Zebedeo.

«Es lo mismo».

«No lo va a conseguir. Tengo el corazón oprimido por mil miedos…» suspira Andrés.

«¡Ahora que nosotros estamos lejos, todo irá mejor!» dice, no sin aflicción, Juan de Endor.

«No pienses eso. Tú y ella no erais nada respecto a las “grandes culpas” del Mesías según los grandes de Israel» dice resueltamente Judas Tadeo.

«¿Estás seguro? Yo, dentro de mi sufrimiento, tengo en el corazón también la espina de haber sido con mi llegada causa de mal para Jesús. Si estuviera seguro de que no es así, sufriría menos» dice Juan de Endor.

«¿Me crees veraz, Juan?» pregunta Judas Tadeo.

«¡Sí que lo creo!».

«Pues bien, entonces, en nombre de Dios y mío, te aseguro que tú has dado sólo una pena a Jesús: la de tener que mandarte aquí en misión. En todas las otras penas suyas, pasadas, presentes y futuras, tú no estás implicado».

La primera sonrisa, después de tantos días de lóbrega melancolía, ilumina el rostro asendereado de Juan de Endor, que dice: «¡Qué alivio me das! El día me parece más luminoso, más ligero mi mal, más consolado el corazón. ¡Gracias, Judas de Alfeo! ¡Gracias!».

322.6

Vuelven a subir al carro, y, pasando por el puente, toman la otra orilla del río, el otro camino, que va derecho hacia Antioquía, a través de una zona fertilísima.

«¡Allí está! En aquel valle poético está Dafne, con su templo y sus bosquecillos. Y allá, en aquella llanura, se ve Antioquía, y sus torres que se alzan sobre las murallas. Entraremos por la puerta que hay al lado del río. La casa de Lázaro no está muy lejos de las murallas. Las casas más bonitas han sido vendidas. Queda ésta, que fue lugar de parada tanto para el personal de Teófilo como para sus clientes, con muchas caballerizas y graneros. Ahora vive en ella Felipe. Un buen viejo. Un fiel de Lázaro. Os encontraréis bien. Y, juntos, iremos a Antigonio, donde estaba la casa en que vivían Euqueria y sus hijos, que entonces eran niños…».

«¡Muy fortificada esta ciudad, ¿eh?!» observa Pedro, que respira tranquilo ahora que ve que su primer intento como auriga ha ido bien.

«Mucho. Murallas de altura y anchura grandiosas. Más de cien torres, que, como veis, parecen gigantes enhiestos encima de las murallas, y fosos infranqueables al pie de ellas. El Silpio también contribuye con sus cimas a la defensa, y hace de contrafuerte de las murallas en la parte más débil… Ahí está la puerta. Es mejor que pares y entres sujetando el bocado. Yo te guío porque sé el camino»…

Pasan la puerta, vigilada por romanos.

Juan apóstol dice: «Quién sabe si está aquí ese soldado de la Puerta de los Peces… Jesús se alegraría de saberlo…».

«Le buscaremos. Pero ahora camina raudo» ordena Pedro, turbado por la idea de ir a una casa desconocida.

Juan obedece sin decir nada; se limita a mirar atentamente a todos los soldados que ve.

322.7

Un camino corto, luego una casa sólida y sencilla, o sea, un alto muro sin ventanas. Solamente un portal en el centro del muro.

«Aquí es. Para» dice el Zelote.

«¡Anda, Simón, habla tú ahora!».

«¡Sí, hombre, si ello te agrada, hablo yo!» y el Zelote llama al recio portalón.

Simón se presenta como un enviado de Lázaro. Entra solo. Sale con un anciano alto y de noble porte, que se prodiga en profundas reverencias y da a uno del servicio la orden de abrir el portón para permitir entrar al carro; luego se disculpa por hacerles pasar a todos por esa puerta, en vez de por la puerta de casa.

El carro se para en un vasto patio con pórticos, bien cuidado, con cuatro recios plátanos en los cuatro ángulos y otros dos en el centro que amparan un pozo y un pilón para abrevar a los caballos.

«Preocúpate del caballo» ordena el administrador a su subordinado. Y dice a los que recibe como huéspedes: «Por favor, venid. Bendito sea el Señor, que me manda siervos suyos y amigos de mi jefe. Ordenad, que vuestro siervo escucha».

Pedro se pone colorado, porque especialmente a él van esas palabras y esas reverencias, y no sabe qué decir…

Le ayuda el Zelote. «Los discípulos del Mesías de Israel, de que te habla Lázaro de Teófilo, que a partir de ahora vivirán en tu casa para servir al Señor, no necesitan sino descansar. ¿Nos enseñas dónde pueden habitar?».

«¡Siempre tenemos preparadas habitaciones para peregrinos, como era costumbre de mi ama. Venid, venid…».

Y, seguido por todos, entra en un pasillo y luego en un pequeño patio. Al final de este patio está la verdadera casa. Abre la puerta. Va por un vestíbulo. Tuerce a la derecha. Una escalera. Suben. Otro pasillo con habitaciones a los lados.

«Aquí tenéis. Que sea agradable vuestra permanencia. Voy a decir que traigan agua y ropa. Dios sea con vosotros» dice el anciano, y se marcha.

Abren las contraventanas de las habitaciones que eligen. Las murallas y fuertes de Antioquía están frente a las ventanas de un lado; el tranquilo patio ornado de rosales trepadores, por ahora pobres a causa del período del año en que están, se ve por las del otro lado.

Y, después de tanto caminar, por fin una casa, una habitación, un lecho… Para algunos, sólo una etapa; para otros, meta…


Notes

  1. le char, comme en 2 R 2, 11 ; le manteau, comme en 2 R 2, 14.

Notas

  1. el carro de Elías, el manto que cogió Eliseo son particularidades del episodio bíblico del rapto de Elías, y se encuentran en: 2 R 2, 11 y 14.