Los Escritos de Maria Valtorta

455. L’Eglise confiée à la maternité de Marie.

455. La Iglesia es confiada a la maternidad de María.

455.1

L’aube se lève tout juste lorsque Jésus s’éveille et se dresse pour s’asseoir sur son lit rudimentaire, fait de terre et d’herbe. Puis il se lève, prend ses sandales et son manteau qu’il avait étendu sur lui pour se protéger de la rosée et de la fraîcheur de la nuit et, avec précaution, il passe dans l’enchevêtrement de jambes, de bras, de torses et de têtes des apôtres endormis autour de lui. Il s’éloigne de quelques mètres en regardant attentivement où il pose les pieds, dans la vague lueur de l’aube qui, sous le feuillage des arbres, ne donne qu’un semblant de lumière. Il rejoint un pré découvert. Par une éclaircie entre les arbres et les roches, on aperçoit un coin du lac qui s’éveille, ainsi qu’une large partie du ciel qui s’éclaircit, passant de ce gris-bleu particulier du firmament au sortir de la nuit, au bleu clair. A l’orient, il s’estompe déjà en une teinte jaune clair qui, de plus en plus soutenue, devient rosée, puis prend une pâle couleur de corail, extrêmement gracieuse.

L’aube annonce une belle journée, malgré une très légère brume qui n’en finit pas de céder à la lumière le champ du ciel là-bas à l’orient ; elle se présente en voiles si légers que l’azur du ciel n’en souffre pas ; au contraire, il s’en pare comme si c’était une mousseline très blanche frangée d’or et de corail, toujours changeante, toujours plus belle, comme si elle s’efforçait d’atteindre la perfection de son éphémère beauté avant que le jour ne la détruise par le triomphe du soleil. A l’occident, au contraire, quelques astres résistent encore, bien qu’ayant perdu déjà leur éclat nocturne, à la lumière qui croît, et la lune, tout près de disparaître derrière la crête des monts, parcourt le ciel, pâle, sans éclat, comme une planète mourante.

455.2

Jésus, debout, les pieds nus dans l’herbe humide de rosée, les bras croisés sur la poitrine, la tête levée pour regarder le jour qui se lève, réfléchit… ou parle avec le Père en quelque colloque spirituel. Le silence est absolu, au point que l’on entend tomber par terre les gouttelettes de la rosée, très abondante.

Jésus baisse la tête, en restant debout, les bras croisés, et il se plonge dans une méditation encore plus intense. Il est totalement concentré en lui-même. Ses magnifiques yeux bien ouverts fixent le sol comme pour arracher à l’herbe une réponse. Mais je crois qu’ils ne voient même pas le lent mouvement des herbes qui, sous le vent frais de l’aube, ont une sorte de frémissement, un frisson pareil à celui d’un dormeur qui sort du sommeil et s’étire, se retourne, se secoue pour se réveiller tout à fait et retrouver des nerfs et des muscles agiles. Il regarde, sans voir, ce réveil de l’herbe et des fleurs sauvages en rameaux, à feuilles, aux corolles en ombelles ou en grappes, en épis, ou en touffes. Certaines fleurs sont isolées en calices, d’autres disposées en éventails ou ont la forme de gueule-de-loup, ou de corne d’abondance, de plumet, de baie. Certaines sont droites sur leurs tiges, d’autres, molles, pendent d’une tige qui n’est pas la leur, mais autour de laquelle elles se sont enroulées, d’autres encore sont abandonnées et rampent sur le sol ; certaines sont regroupées par familles de nombreuses plantes petites et humbles, d’autres sont solitaires, larges, d’une couleur violentes et d’un port altier. Toutes sont occupées à secouer de leurs pétales les gouttes de rosée, désireuses maintenant non plus de rosée mais de soleil, selon des désirs aussi capricieux que leurs dispositions…

En cela, elles sont très semblables aux hommes, qui ne sont jamais satisfaits de ce qu’ils ont.

Jésus semble écouter. Mais il n’entend certainement pas le bruissement du vent qui augmente et s’amuse à faire tomber la rosée en secouant les branches, ni les pépiements de plus en plus forts des oiseaux qui s’éveillent : peut-être se racontent-ils leurs rêves de la nuit, ou échangent-ils leurs impressions sur le nid douillet et creux où, dans les brins de laine et de foin, les oisillons, hier encore nus, mettent leurs premières plumes ou ouvrent démesurément le bec en montrant leurs gosiers rouges et avides, et manifestent bruyamment leur première exigence de nourriture. Jésus semble écouter. Et il n’entend certainement pas le premier appel moqueur du merle, ni le doux chant de la fauvette à tête noire, ni les trilles d’or de l’alouette qui monte joyeusement à la rencontre du soleil levant, ni le trissement qui déchire l’air tranquille des bandes d’hirondelles, qui ont quitté les rochers où elles ont fait leurs nids et commencent à tisser leur toile de vols infatigables entre terre et ciel. Et il n’entend pas non plus le jacassement d’une pie qui se penche d’une branche du rouvre auprès duquel se trouve Jésus et semble lui demander : “ Qui es-tu ? Que penses-tu ? ” et se moque de lui. Cela non plus n’interrompt pas sa méditation.

Mais qui ignore que les pies sont taquines ? Celle-ci, lasse de voir un intrus dans le petit pré qui est peut-être son refuge préféré, arrache au rouvre deux beaux glands jumelés et, avec la précision d’un champion de tir, les fait tomber sur la tête de Jésus. Ce n’est pas un lourd projectile, capable de blesser, mais de la hauteur d’où il vient, il acquiert assez de force pour attirer l’attention du Méditatif qui lève la tête et voit l’oiseau qui, les ailes ouvertes, avec des courbettes moqueuses, se réjouit de son coup. Jésus a un léger sourire, secoue la tête, soupire comme pour conclure ses méditations et se déplace en marchant ici et là. La pie, avec un babil et un “ gué-gué ” moqueurs, descend pour jacasser, fouiller, creuser l’herbe libérée de l’Intrus.

455.3

Jésus cherche de l’eau, mais n’en voit pas. Il se résigne à retourner vers les apôtres, mais les oiseaux lui montrent où en trouver. Par bandes, ils descendent vers des fleurs au calice évasé, qui sont autant de petites coupes contenant de l’eau, ou bien ils se posent sur de très larges feuilles peluchées dont chaque poil retient une goutte de rosée, et ils s’y désaltèrent ou font leurs ablutions. Jésus les imite. Il recueille dans le creux de la main l’eau des calices et s’en rafraîchit le visage, il cueille les épaisses feuilles de velours et s’en sert pour nettoyer la poussière de ses pieds nus, puis ses sandales, qu’il lace. Avec d’autres, il se lave les mains jusqu’à ce qu’il les voie propres, et sourit en murmurant :

« Les divines perfections du Créateur ! »

Le voilà maintenant rafraîchi, en ordre depuis qu’il a coiffé ses cheveux et sa barbe de sa main humide et, pendant que le premier rayon de soleil fait du pré un tapis de diamants, il va réveiller les apôtres et les femmes.

455.4

Fatigués comme ils le sont, les uns et les autres ont du mal à sortir du sommeil. Marie est éveillée, mais reste immobile à cause de l’enfant qui dort, recroquevillé sur son sein, sa petite tête sous le menton de Marie. La Mère, voyant apparaître sur le seuil de la caverne son Jésus, lui sourit de ses doux yeux bleu clair. La joie de le voir colore ses joues de rosé. Elle se dégage de l’enfant, qui pleurniche un peu d’être remué, elle se lève et s’avance vers Jésus de son pas silencieux légèrement ondoyant de colombe pudique.

« Que Dieu te bénisse, mon Fils, en ce jour.

– Que Dieu soit avec toi, Maman. La nuit a-t-elle été dure pour toi ?

– Pas du tout. Bienheureuse, au contraire. Il me semblait t’avoir tout petit dans mes bras… Et j’ai rêvé qu’il te sortait de la bouche une sorte de fleuve d’or, résonnant avec une douceur inexprimable, et une voix qui disait… Ah ! quelle voix !… “ C’est la Parole qui enrichit le monde et rend bienheureux celui qui l’écoute et lui obéit. Sans limite dans sa puissance, dans le temps, dans l’espace, elle sauvera. ” Oh ! mon Fils ! cette Parole, c’est toi, mon Fils ! Comment pourrais-je vivre et agir assez pour remercier l’Eternel d’avoir fait de moi ta Mère ?

– Ne te mets pas en peine, Maman ! Chaque battement de ton cœur est pour Dieu une récompense. Tu es et resteras pour Dieu une vivante louange, Maman. Tu le remercies depuis que tu existes…

– Il ne me semble pas le faire suffisamment, Jésus. C’est si grand, si grand ce que Dieu a fait pour moi ! Qu’est-ce que je fais, moi, de plus que toutes ces femmes bonnes, qui sont tes disciples comme moi ? Mon Fils, demande toi-même à notre Père de me permettre de le remercier comme ce don le mérite.

– Mère ! Crois-tu que le Père ait besoin que je lui demande cela pour toi ? Il t’a déjà préparé le sacrifice que tu devras consommer pour cette louange parfaite. Et tu seras parfaite quand tu l’auras accompli…

– Mon Jésus !… Je comprends ce que tu veux dire… Mais serai-je capable de penser à cette heure-là ?… Ta pauvre Maman…

– Maman, voici ce que tu es : la bienheureuse Epouse de l’Amour éternel ! Et l’Amour pensera en toi.

– Puisque tu le dis, mon Fils, je me repose sur ta Parole. Mais toi… prie pour moi, à cette heure qu’aucun de ceux-ci ne comprend… et qui est déjà imminente… N’est-ce pas vrai ? N’est-ce donc pas vrai ? »

Impossible de décrire l’expression du visage de Marie pendant ce dialogue. Aucun écrivain ne saurait la transcrire en langage humain sans l’abîmer par des mièvreries ou des nuances imprécises. Seul celui qui a le cœur bon, tout en étant viril, peut donner mentalement au visage de Marie l’expression réelle qu’il a en ce moment.

Jésus la regarde… Autre expression intraduisible en notre pauvre langage, et il lui répond :

« Et toi, prie pour moi à l’heure de la mort…

455.5

Oui. Aucun d’entre eux ne comprend… Ce n’est pas leur faute. C’est Satan qui crée des fumées pour qu’ils ne voient pas et qu’ils soient comme ivres et sourds, et donc non préparés… plus faciles à fléchir… Mais toi et moi, nous les sauverons malgré les embûches de Satan. Dès maintenant je te les confie, Mère. Souviens-toi de ces mots : je te les confie. Je te donne mon héritage. Je n’ai rien d’autre sur terre qu’une Mère : elle, je l’offre à Dieu, Hostie avec l’Hostie ; et mon Eglise : et elle je la confie à toi. Sois pour elle une Nourrice. Il y a peu de temps, je pensais aux nombreux hommes en qui, au cours des siècles, revivrait l’homme de Kérioth avec toutes ses tares. Et je pensais que quelqu’un qui ne serait pas Jésus repousserait cet être taré. Mais moi, je ne le repousserai pas. Je suis Jésus. Toi, pendant le temps que tu resteras sur la terre, sois soumise à Pierre pour ce qui tient à la hiérarchie ecclésiastique[1], lui comme Chef et toi comme fidèle, mais la première avant tous comme Mère de l’Eglise puisque tu m’as enfanté, moi, le Chef de ce Corps mystique ; toi, ne repousse pas les nombreux Judas. Mais secours-les et apprends à Pierre, à mes frères, à Jean, Jacques, Simon, Philippe, Barthélemy, André, Thomas et Matthieu à ne pas repousser, mais à secourir. Défends-moi dans ceux qui me suivent, et défends-moi contre ceux qui voudront disperser et démembrer l’Eglise naissante. Et au cours des siècles, Mère, sois toujours celle qui intercède et protège, défend, aide mon Eglise, mes prêtres et mes fidèles, contre le Mal, contre le châtiment, contre eux-mêmes… Que de Judas, Mère, au cours des siècles ! Et combien qui ressemblent à des déficients incapables de comprendre, à des aveugles qui ne savent pas voir, à des sourds qui ne savent pas entendre, ou à des estropiés et des paralytiques qui ne savent pas marcher… Mère, prends-les tous sous ton manteau ! Toi seule peux et pourras changer les décrets de châtiment de l’Eternel pour un ou pour plusieurs. Car la Trinité ne pourra jamais rien refuser à sa Fleur.

– J’agirai ainsi, mon Fils. Pour ce qui dépend de moi, va en paix vers ton but. Ta Mère est ici pour te défendre dans ton Eglise, toujours.

– Que Dieu te bénisse, Maman…

455.6

Viens ! Je vais te cueillir des calices de fleur pleins d’une rosée parfumée, et tu t’en rafraîchiras le visage comme je l’ai fait. Ils nous ont été préparés par notre Père très saint, et les oiseaux me les ont indiqués. Regarde comme tout sert dans la Création ordonnée de Dieu ! Ce plateau surélevé et près du lac, si fertile grâce aux brumes qui montent de la mer de Galilée et aux grands arbres qui attirent la rosée, permettant cette luxuriance d’herbes et de fleurs, même pendant la sécheresse de l’été. Cette pluie abondante de rosée pour emplir ces calices pour que ses enfants bien-aimés puissent se laver le visage… Voilà ce que le Père a préparé pour ceux qui l’aiment. Tiens : l’eau de Dieu dans le calice de Dieu pour rafraîchir l’Eve du nouveau Paradis. »

Et Jésus cueille ces fleurs très larges, dont je ne sais le nom, et il verse dans les mains de Marie l’eau qui s’est amassée au fond…

455.7

Les autres, pendant ce temps, ont fait leur toilette et viennent chercher Jésus, qui s’est éloigné de quelques mètres de l’endroit de la halte.

« Nous sommes prêts, Maître.

– C’est bien. Allons de ce côté.

– Mais est-ce le bon chemin ? La forêt se termine là, or nous étions dans le sous-bois la dernière fois… objecte Jacques, fils de Zébédée.

– Parce que nous montions du lac. Mais, maintenant, nous pouvons prendre le chemin direct. Vous voyez ? Gamla est ici, entre l’orient et le midi, et il n’y a pas d’autre route : les trois autres côtés sont impraticables, à moins d’être une chèvre sauvage.

– Tu as raison. Nous éviterons la vallée aride d’où nous avons vu arriver les possédés » dit Philippe.

Ils marchent rapidement, délaissant bientôt le bois sous lequel ils ont dormi, pour un chemin caillouteux situé au-delà d’un vallon qui prend du relief au fur et à mesure qu’il se rapproche du mont bizarre sur lequel est perchée Gamla. De trois côtés, à l’est, au nord et à l’ouest, on ne voit que des pentes raides. La ville est reliée au reste de la région par une route directe unique allant du sud au nord, tracée entre deux vallées rocheuses et sauvages qui la séparent des campagnes de l’orient et des bois de chênes de l’occident.

455.8

Beaucoup de gardiens de porcs déambulent au milieu de leurs troupeaux qui se nourissent dans les bois de chênes. Des chars qui transportent des pierres équarries circulent en grinçant, tirés par des attelages de bœufs à la démarche lente. Quelques cavaliers passent au trot, en soulevant des nuages de poussière. Des équipes de terrassiers, hâves et déguenillés — sans doutes des esclaves ou des forçats purgeant quelque peine — se hâtent vers leurs travaux sous la dure surveillance de leurs gardes-chiourme.

A mesure que Gamla se rapproche et que la route monte, on voit des fossés fortifiés qui entourent le mont comme autant d’anneaux qui protègent ses flancs. Il ne doit pas être facile de creuser ces fossés, surtout à certains endroits presque en surplomb. Et pourtant des hommes nombreux travaillent à remettre en état des fortifications déjà existantes ou à en préparer d’autres, et portent sur leurs épaules nues des cubes de pierre qui font se courber les malheureux et laissent sur leurs dos des traces sanglantes.

« Mais que font-ils ? Serions-nous en temps de guerre pour qu’on les fasse travailler ainsi ? Ils sont fous ! » se disent les disciples.

Les femmes, elles, plaignent ces malheureux à demi nus, mal nourris, obligés de subir des corvées et des sévices qui dépassent leurs forces.

« Mais qui les fait travailler ? Le Tétrarque ou les Romains ? » demandent encore les apôtres.

Ils discutent entre eux, car il semble que Gamla est, dirai-je, indépendante de la Tétrarchie de Philippe et de celle d’Hérode. D’ailleurs, il paraît impossible à plusieurs apôtres que les Romains s’occupent de faire construire chez les autres des fortifications qui, demain, pourraient servir contre eux. Et l’éternelle idée, l’idée fixe comme celle d’un maniaque, du royaume temporel du Messie s’agite comme l’emblème d’une victoire déjà assurée, comme de la gloire et de l’indépendance nationales.

455.9

Ils crient si fort que des surveillants s’approchent et écoutent. Ce sont des hommes rudes, d’une race qui visiblement n’est pas hébraïque. Plusieurs sont âgés, certains ont des cicatrices sur le corps. Mais c’est la sortie méprisante de l’un d’eux qui révèle le mieux qui ils sont :

« “ Notre royaume ” ! Tu as entendu ça, Titus ? O gros nez ! Votre royaume est déjà écrasé sous ces pierres. Celui qui se sert de l’ennemi pour construire contre l’ennemi sert l’ennemi. Paroles de Publius Corfinius. Et si vous ne comprenez pas, allez ! les pierres vous expliqueront l’énigme. »

Et il rit en levant son fouet parce qu’il voit un travailleur épuisé vaciller et s’asseoir ; il le frapperait si Jésus ne l’arrêtait pas en s’avançant et en lui disant :

« Cela ne t’est pas permis. C’est un homme, ton égal.

– Qui es-tu pour te mêler de ça et défendre un esclave ?

– Je suis la Miséricorde. Mon nom d’homme ne t’apprendrait rien. Mais mon attribut te rappelle d’être miséricordieux. Tu as dit : “ Celui qui se sert de l’ennemi pour construire contre l’ennemi sert l’ennemi. ” C’est une vérité douloureuse. Mais moi, je t’en annonce une lumineuse : “ Celui qui ne fait pas preuve de miséricorde ne trouvera pas miséricorde.

– Tu es un rhéteur ?

– Je suis la Miséricorde. Je te l’ai dit. »

Des habitants de Gamla — ou des gens qui s’y rendent — s’exclament :

« C’est le Rabbi de Galilée, celui qui commande aux maladies, aux vents, aux eaux et aux démons. Il change les pierres en pain, et rien ne lui résiste ! Allons vite avertir la ville ! Que les malades viennent ! Qu’on ait sa Parole ! Nous sommes d’Israël, nous aussi ! »

Et pendant que certains partent en courant, les autres se pressent autour du Maître.

Le surveillant de tout à l’heure dit :

« Est-ce vrai, ce que ces gens disent de toi ?

– C’est vrai.

– Fais un miracle et je croirai.

– On ne demande pas des miracles pour croire. On demande la foi pour croire, et obtenir ainsi le miracle. La foi et la pitié pour le prochain.

– Je suis païen, moi…

– Ce n’est pas une raison valable. Tu vis en Israël qui te paie…

– Parce que je travaille.

– Non. Parce que tu fais travailler.

– Moi, je sais faire travailler.

– Oui, sans pitié. Mais n’as-tu jamais pensé que si, au lieu d’être romain, tu avais appartenu à Israël, tu aurais pu être à la place de l’un d’eux ?

– Hé !… Certainement… Mais je ne le suis pas, grâce à la protection des dieux.

– Tes vaines idoles ne pourraient te défendre, si le vrai Dieu voulait te frapper. Tu n’es pas mort encore. Sois donc miséricordieux pour obtenir miséricorde… »

L’homme a envie de répliquer, de discuter, mais il hausse les épaules d’un air méprisant, tourne le dos et va fouetter quelqu’un qui a cessé de travailler au pic un filon tenace de roche.

Jésus tourne les yeux vers le malheureux endolori et vers celui qui l’a frappé : ce sont deux regards d’une même mais différente pitié, et d’une tristesse si profonde qu’elle me rappelle certains regards du Christ pendant la Passion. Mais que peut-il faire ? Impuissant à intervenir, il reprend son chemin, avec le poids des malheurs qu’il a vus pour lui alourdir le cœur.

455.10

Mais des gens de Gamla descendent en hâte, des notables certainement, et ils rejoignent Jésus, qu’ils saluent profondément en l’invitant à entrer dans leur ville pour parler aux habitants qui sont en train d’arriver par bandes.

« Vous, vous pouvez aller où vous voulez. Eux (et il indique les travailleurs) ne le peuvent. L’heure est encore fraîche et l’endroit nous garantit du soleil. Approchons de ces malheureux, pour qu’eux aussi aient la Parole de vie » répond Jésus.

Il est le premier à faire demi-tour pour s’y rendre, puis il prend un sentier accidenté qui va exactement en dessous de la montagne, là où le travail est le plus pénible. Il se tourne alors vers les personnalités et leur dit :

« S’il est en votre pouvoir de le faire, ordonnez que le travail soit suspendu.

– Bien sûr, nous le pouvons! C’est nous qui rétribuons et, si nous payons des heures creuses, personne ne pourra se plaindre » répondent les notables de Gamla.

Sur ce, ils vont parlementer avec ceux qui dirigent les travaux. Je vois ces derniers qui après un moment haussent les épaules comme pour dire : “ Si cela vous plaît, ça nous est égal. ”

Puis ils sifflent pour les équipes un signal de repos.

Jésus, pendant ce temps, a parlé avec d’autres habitants de Gamla. Je les vois faire un signe d’assentiment et retourner rapidement vers la ville.

Craintifs, les travailleurs accourent autour des surveillants.

« Cessez le travail. Le bruit gêne le philosophe » ordonne l’un d’eux, peut-être leur chef.

Les travailleurs regardent de leurs yeux las celui qu’on nomme le “ philosophe ” et qui leur fait cadeau d’un arrêt de travail. Et ce “ philosophe ”, en les regardant avec pitié, répond à leurs regards et aux paroles du surveillant :

« Le bruit ne me dérange pas, mais je souffre de leur misère. Venez, mes fils. Reposez vos membres et surtout votre cœur auprès du Christ de Dieu. »

Peuple, esclaves, condamnés, apôtres, disciples se pressent dans l’espace libre entre le mont et les tranchées, et ceux qui ne trouvent pas de place grimpent en haut des plus hautes tranchées ou s’installent sur des rochers renversés sur le sol ; les moins chanceux se résignent à aller sur la route, où déjà parviennent les rayons du soleil. Il arrive toujours plus de monde de Gamla, et d’autres voyageurs, venus d’ailleurs, se joignent aux premiers arrivants.

Dans cette grande foule, ceux qui étaient partis un peu auparavant se fraient un chemin jusqu’à Jésus, qui a ordonné aux apôtres de faire passer les travailleurs au premier rang. Ils apportent des paniers, de lourds récipients et des amphores qu’ils déposent aux pieds de Jésus.

« Donnez-leur les offrandes de la charité, enjoint Jésus.

– Il ont déjà eu leur repas, il reste encore du pain et de l’eau vinaigrée. S’ils mangent trop, ils sont alourdis pour le travail » crie un surveillant.

Jésus le regarde et répète l’ordre :

« Donnez-leur une nourriture digne d’un homme, et apportez-moi la leur. »

Les apôtres, aidés de volontaires, s’exécutent.

En guise de repas, ils ont reçu une espèce de croûte noire, dure, dont les animaux ne voudraient pas et un peu d’eau vinaigrée. Voilà ce que mangent ces forçats ! Jésus regarde cette misérable pitance et la fait mettre de côté contre la montagne. Il examine ceux qui devaient la consommer : des corps sous-alimentés, dans lesquels seuls les muscles, surdéveloppés par des efforts supérieurs à la normale, résistent avec leurs faisceaux de fibres en saillie sur la peau flasque, les yeux fébriles et apeurés, les bouches avides jusqu’à montrer un appétit animal quand ils mordent dans cette bonne nourriture, abondante, inattendue, quand ils boivent du vin, du vrai vin, fortifiant, frais…

Jésus attend patiemment qu’ils finissent leur repas. Ce n’est d’ailleurs pas bien long, car leur voracité est telle que tout est bientôt englouti.

455.11

Jésus ouvre les bras, de son geste habituel annonçant qu’il va parler, pour attirer l’attention et imposer le silence :

« A cet endroit, qu’admirent les yeux de l’homme ? Des vallées creusées plus profondément que la nature ne les avait faites, des collines élevées à partir de massifs et de terre-pleins fabriqués par l’homme, des routes sinueuses qui pénètrent dans la montagne comme des tanières d’animaux. Et tout cela pourquoi ? Pour arrêter un danger dont on ne sait d’où il peut venir, mais que l’on sent menaçant comme un nuage de grêle dans un ciel orageux.

Ici, en vérité, on s’apprête humainement, par des forces humaines et des moyens humains, et même inhumains, à se défendre et à se préparer à l’attaque, oublieux des paroles[2] du prophète qui enseigne à son peuple comment se défendre des malheurs humains par des moyens spirituels, les plus efficaces. Il crie : “ Consolez-vous… consolez Jérusalem : son esclavage est fini, son iniquité est expiée, car elle a reçu de la main du Seigneur double punition pour tous ses péchés. ” Et après la promesse, il précise comment faire pour la traduire dans la réalité : “ Préparez les chemins du Seigneur, redressez dans la solitude les sentiers de Dieu. Toute vallée sera comblée, toute montagne abaissée, les voies tortueuses seront redressées, les escarpées deviendront planes. Alors apparaîtra la gloire du Seigneur, et tous les hommes, sans exception, la verront, car la bouche du Seigneur a parlé. ” Ces mots furent repris par l’homme de Dieu, Jean-Baptiste, et seule la mort les a éteints sur ses lèvres.

Voilà la véritable défense contre les malheurs de l’homme. Elle ne consiste pas à lever les armes contre les armes, ce n’est pas non plus la défense contre l’attaque, ni l’orgueil, ni la férocité. Ce sont les armes surnaturelles, les vertus conquises dans la solitude, c’est-à-dire à l’intérieur de l’individu seul avec lui-même, qui s’efforce de se sanctifier en élevant des montagnes de charité, en abaissant des sommets d’orgueil, en redressant les chemins tortueux des désirs impurs, en enlevant de la route l’obstacle de la sensualité. Alors apparaîtra la gloire du Seigneur, et l’homme sera défendu par Dieu contre les embûches des ennemis spirituels et matériels. A quoi voulez-vous que servent quelques tranchées, quelques talus, quelques fortifications, contre le châtiment de Dieu irrité par le péché, ou même seulement par la tiédeur de l’homme ? Contre ces châtiments qui s’appelleront : Romains, comme ils se sont appelés autrefois Babyloniens, Philistins ou Egyptiens, mais qui en réalité sont une punition divine, et cela seulement, attirée par un excès d’orgueil, de jouissance, de cupidité, de mensonges, d’égoïsmes, de désobéissances à la Loi sainte du Décalogue. L’homme, même le plus fort, peut être tué par une mouche, la ville, même la mieux fortifiée, peut être prise quand l’un ou l’autre n’est plus protégé par Dieu, quand son assistance fait défaut, chassée, à cause des péchés de l’homme ou de la ville.

455.12

Le prophète dit encore : “ Tout homme est comme l’herbe et toute sa gloire comme la fleur des champs. L’herbe sèche, la fleur tombe dès que la touche le souffle du Seigneur. ”

Je veux que vous regardiez aujourd’hui avec pitié ces hommes que, jusqu’à hier, vous aviez considérés comme des machines astreintes au travail par vous. Aujourd’hui que je les ai placés, frères parmi les frères, pauvres au milieu de vous qui êtes riches et heureux, vous les voyez pour ce qu’ils sont : des hommes. Le mépris et l’indifférence ont disparu de beaucoup de cœurs et la pitié y est entrée. Mais allez plus au fond, au-delà de leur chair accablée. Ils ont une âme, une pensée, des sentiments, tout comme vous. Autrefois, ils ont été comme vous : en bonne santé, libres, heureux. Puis ce n’a plus été le cas, car si la vie de l’homme est comme l’herbe qui sèche, son bien-être est encore plus fragile. Ceux qui aujourd’hui sont en bonne santé peuvent demain être malades ; ceux qui aujourd’hui sont libres peuvent demain être esclaves ; ceux qui aujourd’hui sont heureux peuvent demain être malheureux.

Parmi eux, il y a certainement des coupables. Mais ne jugez pas leur faute et ne vous réjouissez pas de leur peine. Un jour, pour de multiples causes, vous pourriez vous aussi être coupables et astreints à une dure expiation. Soyez donc miséricordieux, car vous ne connaissez pas votre avenir, qui pourrait nécessiter toute la miséricorde divine et humaine, tant il pourrait être différent du jour présent. Soyez portés à l’amour et au pardon. Il n’est pas d’homme sur la terre qui n’ait besoin du pardon de Dieu et de l’un de ses semblables. Pardonnez donc pour que l’on vous pardonne.

455.13

Le prophète dit encore : “ L’herbe sèche, la fleur se fane, mais la parole du Seigneur demeure éternellement. ”

Voici l’arme et la défense : la Parole éternelle devenue la loi de chacun de vos actes.

Elevez ce rempart véritable contre le danger qui vous menace et vous serez sauvés. Accueillez par conséquent la Parole, Celui qui vous parle, mais ne l’accueillez pas matériellement pour une heure dans les murs de la ville, mais bien dans votre cœur, pour toujours : car je suis celui qui sait et qui agit, et dirige puissamment. Et je suis le bon Berger qui fait paître le troupeau qui se fie à lui, et ne néglige personne, qu’il soit petit, las, blessé ou frappé par le sort, qu’il pleure sur ses erreurs, ni celui qui, riche et heureux, néglige tout pour la vraie richesse et le vrai bonheur : celui de servir Dieu jusqu’à la mort.

L’Esprit du Seigneur est sur moi, car le Seigneur m’a envoyé guérir les cœurs brisés, annoncer la Bonne Nouvelle aux doux, prêcher la liberté aux esclaves, la libération aux prisonniers. Et on ne peut dire de moi que je suis un fauteur de troubles, car je n’incite pas à la révolte et je ne conseille pas de s’évader aux esclaves et aux prisonniers. Mais à l’homme enchaîné, à l’homme asservi, j’enseigne la vraie liberté, la vraie libération, celle que personne ne peut lui enlever ni même limiter, celle qui grandit d’autant plus qu’on s’y abandonne davantage : la liberté spirituelle, la libération du péché, la douceur dans la souffrance, la grâce reconnaître Dieu au-delà des hommes qui enchaînent, la certitude que Dieu aime celui qui l’aime et pardonne là où l’homme ne pardonne pas, la joie d’espérer en un lieu éternel de récompense pour celui qui sait être bon dans son malheur, repenti de ses péchés, fidèle au Seigneur.

Ne pleurez pas, vous à qui je m’adresse particulièrement. Je suis venu pour consoler, recueillir ceux qui sont rejetés, apporter la lumière dans leurs ténèbres, la paix à leurs âmes, pour promettre une demeure de joie à celui qui se repent comme à celui qui n’est pas coupable. Et il n’est pas de passé qui empêche ce Présent qui attend au Ciel ceux qui savent servir le Seigneur dans la situation où ils se trouvent.

455.14

Il n’est pas difficile, mes pauvres enfants, de servir le Seigneur. Il vous a donné une manière facile de le servir, car il veut que vous soyez heureux au Ciel avec lui. Servir le Seigneur, c’est aimer : aimer la volonté de Dieu parce que vous aimez Dieu. La volonté de Dieu se cache même sous les apparences les plus humaines. Car — je m’adresse à vous qui avez peut-être versé le sang de vos frères —, car si ce n’était certainement pas la volonté de Dieu que vous soyez violents, c’est maintenant sa volonté que, par l’expiation, vous vous acquittiez de vos dettes envers l’Amour. Si ce n’était pas la volonté de Dieu que vous vous révoltiez contre vos ennemis, c’est maintenant sa volonté que vous soyez humbles, comme autrefois vous avez été orgueilleux pour votre malheur. Si ce n’était pas la volonté de Dieu que vous vous soyez approprié frauduleusement ce qui ne vous appartenait pas — quel qu’en soit le prix —, c’est maintenant la volonté de Dieu que vous soyez punis pour ne pas arriver à Dieu avec votre péché sur le cœur.

Ils ne doivent pas l’oublier, ceux qui sont heureux maintenant, ceux qui se croient en sécurité, ceux qui, à cause de cette sotte assurance, ne préparent pas en eux le Royaume de Dieu, et seront à l’heure de l’épreuve comme des enfants éloignés de la maison du Père, à la merci de la tempête, sous le fouet de la douleur.

455.15

Agissez tous avec justice et levez les yeux vers la Demeure du Père, vers le Royaume des Cieux : quand ses portes auront été grandes ouvertes par Celui qui est venu pour cela, il ne refusera pas d’accueillir quiconque aura atteint la justice.

Mutilés, estropiés, eunuques physiquement, ou mutilés, estropiés, eunuques dans l’ordre spirituel, exclus en Israël[3], ne craignez pas de ne pas avoir de place dans le Royaume des Cieux. Les mutilations, les déformations, les infirmités de la chair cessent avec la chair. Ce qui atteint le moral, comme la prison et l’esclavage, cesse aussi un jour ; ce qui atteint l’esprit, le fruit des fautes passées, se répare par la bonne volonté. Les mutilations matérielles ne comptent pas aux yeux de Dieu, les spirituelles s’effacent à ses yeux quand elles sont couvertes par un repentir plein d’amour.

Le fait d’être étranger au Peuple saint n’est plus un obstacle pour servir le Seigneur, car le temps est venu où les frontières de la terre disparaissent devant l’unique Roi, le Roi de tous les rois et peuples, qui réunit tous les peuples en un seul pour en faire son nouveau Peuple : celui d’où ne seront exclus que ceux qui cherchent à tromper le Seigneur par une obéissance mensongère à son Décalogue, car tous les hommes de bonne volonté peuvent le suivre, qu’ils soient juifs, païens ou idolâtres. Car là où il y a bonne volonté, il y a tendance naturelle à la justice ; or celui qui tend à la justice ne trouve pas de difficulté à adorer le Dieu vrai, quand il arrive à le connaître, à respecter son nom, à sanctifier ses fêtes, à honorer ses parents, à ne pas tuer, à ne pas voler, à ne pas faire de faux témoignages, à n’être pas adultère ou fornicateur, à ne pas désirer ce qui ne lui appartient pas. Et si, jusqu’à présent, il ne l’a pas fait, que désormais il le fasse pour sauver son âme et conquérir sa place au Ciel. Il est dit : “ Je leur donnerai une place dans ma Maison s’ils respectent mon Alliance, et je les rendrai heureux. ” Et cela s’adresse à tous les hommes de volonté sainte, car le Saint des Saints est le Père commun de tous les hommes.

455.16

J’ai terminé mon discours. Je n’ai pas d’argent pour eux et il ne leur serait pas utile. Mais je vous recommande, habitants de Gamla qui avez tant progressé sur les voies du Seigneur depuis la première fois que nous nous sommes rencontrés, d’élever la défense la plus valable pour votre ville : celle de l’amour entre vous, et pour eux, en les secourant en mon Nom, pendant qu’ils peinent pour vous. Le ferez-vous ?

– Oui, Seigneur, crie la foule.

– Eh bien, allons. Je ne serais pas entré dans vos murs si la dureté de vos cœurs avait répondu “ non ” à ma prière. Vous qui restez, soyez bénis… Allons…»

Il revient sur la route, maintenant tout ensoleillée, et monte vers la ville, construite pour ainsi dire en pleine roche comme une cité troglodyte, pourvue pourtant de maisons bien tenues et dotée d’un panorama splendide et varié suivant la direction où l’on regarde, vers les monts de l’Auranitide, ou vers la mer de Galilée, ou au loin vers le grand Hermon, ou du côté de la verte vallée du Jourdain. Telle qu’elle est construite, en altitude, et avec des rues abritées du grand soleil, la ville est fraîche. Elle ressemble davantage à un immense château-fort, une suite de forteresses, tant les maisons à demi-murées, à demi-creusées dans la montagne, présentent cet aspect.

Sur la plus grande place, la plus élevée de toutes, le point culminant de la ville — où l’œil jouit d’un vaste horizon de montagnes, de forêts, de lacs, de fleuves —, se trouvent les malades de Gamla. Et Jésus passe en les guérissant…

455.1

Cuando rompe el alba Jesús se despierta y se incorpora en su tosco lecho hecho de tierra y yerba. Luego se pone en pie, coge sus sandalias y el manto que se había echado encima para defenderse del aguazo y del fresco nocturno, y, cautelosamente, pasa por entre la maraña de piernas, brazos, torsos y cabezas de los apóstoles, que dormían alrededor de Él. Se aleja algunos metros, aguzando la vista para ver —con la cintilación insegura del alba, que bajo los árboles frondosos apenas si es un atisbo de luz— en dónde pone los pies, y llega a un prado descubierto, el cual por un trozo entre árboles y rocas muestra un pequeño recorte del lago, que se despierta, y un amplio recorte del cielo, que se hace claro, pasando del pardo cerúleo, propio del firmamento al salir de la noche, al celeste, mientras que a oriente ya se difumina con una pincelada amarillosa, cada vez más afianzada y cargada, hasta pasar del amarillo pálido al amarillo rosado y luego a un pálido coral hermosísimo.

El alba promete un hermoso día, a pesar de una levísima niebla que se resiste a ceder a la luz el campo del cielo, allá abajo, a oriente, y se disgrega en velos de nubes: tan ligeras, que el azul del cielo no se resiente, es más, se adorna como con muselina blanquísima orillada de oro y corales, una muselina que va cambiando sin cesar, que se hace cada vez más bella, como esforzándose en alcanzar la perfección de su efímera belleza antes de que el día la destruya con el triunfo del Sol. A occidente, por el contrario, resiste algún astro aún a la luz creciente, aunque carente ya del resplandor nocturno. La Luna, próxima ya a desaparecer por detrás de las crestas de los montes, navega pálida, sin brillo, como un planeta moribundo.

455.2

Jesús, erguido, desnudos los pies sobre la hierba cargada de rocío, cruzado de brazos, la cabeza alta mirando al día que surge, piensa… o habla con el Padre en un coloquio de espíritus. El silencio es absoluto; tal, que se oyen caer al suelo las gotazas del abundantísimo aguazo.

Jesús, todavía de pie y con los brazos cruzados, baja la cara, y se abisma aún más en una meditación intensa. Está concentrado totalmente en sí mismo. Sus magníficos ojos bien abiertos miran fijamente al suelo, como para arrancar a las hierbas una respuesta. Pero estoy segura de que no ven ni siquiera el lento movimiento de los tallitos, los cuales es como si se estremecieran con el viento fresco del alba (un estremezón semejante al de uno que sale de un sueño y se despereza y se da la vuelta y se despeja para volver a estar bien despierto, ágil en todos sus nervios y músculos). Mira, pero no ve este despertar de las hierbas y flores silvestres, en las ramitas, en las hojas, en las corolas que forman umbelas o racimos o espigas o ramilletes… Unas flores aisladas en los cálices; otras, que forman nimbos radiados, bocas de dragón, cornucopias, penachos, bayas; algunas, enhiestas sobre sus tallos; otras, sin tersura y colgadas de un tallo no suyo al que se han enroscado; otras, en el suelo, fláccidas, reptantes; unas, reunidas en familias de muchas plantitas bajas y humildes; otras, solitarias, anchas, de color y aspecto violentos… Todas, tratando de sacudirse de los pétalos las gotas de rocío, deseosas ahora ya no de aguazo sino de sol… caprichosas tanto en los deseos como en sus composturas… Muy semejantes en esto a los hombres, que nunca están satisfechos de lo que tienen.

Jesús parece estar escuchando. Pero ciertamente no oye ni el frufrú del viento que va aumentando y se divierte en sacudir las gotas de rocío y hacerlas caer, ni el bisbiseo cada vez mayor de los pajarillos que se despiertan y se cuentan los sueños de la noche, o intercambian sus consideraciones sobre la cuna tibia y cóncava donde, en medio de pelusa y blando heno, los que ayer implumes hoy ya echan las primeras plumas, y abren desmesuradamente los desmedidos picos mostrando, ávidos, las gargantas rojas y chillando con su primera, exigente petición de alimento. Parece estar escuchando. Ciertamente no oye el primer reclamo burlón del mirlo, el primer canto dulce del curruco, ni de la alondra la nota de oro trinada alzándose festiva al encuentro de los primeros rayos del Sol, ni de las numerosas golondrinas —que dejan las peñas donde han hecho el nido y empiezan a tejer su tela de vuelos incansables de la tierra al cielo— el chillar que rasga el aire quieto. Y tampoco oye el grito roto de una urraca que se columpia en la rama del roble junto al que está Jesús y que parece preguntarle: «¿Quién eres? ¿En qué estás pensando?» y burlarse de Él. Tampoco esto interrumpe su meditación.

Pero ¿quién no sabe que las urracas hacen desaires? Ésta, cansada de ver a un intruso en su pradito, que quizás es su lugar de placer, arranca del roble dos hermosas bellotas unidas en un solo pecíolo y, con precisión de campeón de tiro, las deja caer sobre la cabeza de Jesús. No es un proyectil pesado, que pueda herir, pero, por la altura desde la que viene, adquiere en todo caso la consistencia suficiente como para hacer reaccionar al Meditabundo, que mira hacia arriba y ve al ave que con las alas abiertas y jocosas inclinaciones de cabeza se complace del tiro llevado a cabo. Jesús sonríe levemente, menea la cabeza, suspira como para coronar sus meditaciones y empieza a andar arriba y abajo. La urraca, con sonora risa y un gué-gué de mofa, baja a aletear, buscar, escarbar en la hierba liberada del Intruso.

455.3

Jesús busca agua. Pero no la encuentra. Se resigna a volver donde los apóstoles. Pero los pájaros le enseñan dónde hallarla. A manadas bajan hacia unas flores anchísimas en forma de cáliz, cada una de ellas una pequeña copa con agua; o se posan en unas hojas anchas, peludas, que en cada uno de esos pelos tienen retenida una gota de rocío, y ahí beben o hacen sus abluciones. Jesús los imita. Recoge en el cuenco de las manos el agua de los cálices y se refresca la cara, toma las anchas hojas peludas y con ellas se quita el polvo de los pies descalzos… se limpia las sandalias, se las ata… con otras se lava las manos, hasta que las ve limpias; y sonríe mientras susurra: «¡Las divinas perfecciones del Creador!».

Ahora está refrescado, aseado —con la mano húmeda se ha ordenado también los cabellos y la barba—, y, mientras el primer rayo de sol hace del prado una alfombra sembrada de diamantes, va a despertar a los apóstoles y a las mujeres.

455.4

Las unas y los otros se muestran tardos en despertarse porque están cansados. Pero María está despierta, inmovilizada por el niño, que duerme abrazado a su pecho, con la cabecita debajo de su mentón. Y la Madre, viendo aparecer a su Jesús por la entrada de la gruta, le sonríe con sus dulces ojos celestes, colorándose de rosa por la alegría de verle. Y se libera del niño, el cual gimotea un poco al sentir que le mueven; y se pone de pie y va donde Jesús con su silencioso paso levemente ondeante, de paloma pudorosa.

«Dios te bendiga, Hijo mío, en este día».

«Dios sea contigo, Mamá. ¿Has pasado una noche incómoda?».

«No, no. Es más, bien feliz. Me parecía tenerte a Ti, cuando eras pequeñito, entre mis brazos… Y he soñado que de tu boca manaba un río de oro, emitiendo un sonido de inefable dulzura, y como si una voz dijera, …¡oh, qué voz!: “Ésta es la Palabra que enriquece al mundo y da beatitud a quien la escucha y obedece. Salvará sin límites de poder ni de tiempo ni de espacio”. ¡Oh, Hijo mío! ¡Y esta Palabra eres Tú, mi Hijo! ¿Cómo podría vivir tanto y hacer tanto como para poder agradecer al Eterno el haberme hecho Madre tuya?».

«Que no te preocupe eso, Mamá. Cada uno de los latidos de tu corazón contenta a Dios. Tú eres la viviente alabanza a Dios, y lo serás siempre, Mamá. Tú le das gracias desde que existes…».

«No creo hacerlo suficientemente, Jesús. ¡Es tan grande, tan grande lo que Dios me ha hecho! Y, a fin de cuentas, ¿qué hago yo de más respecto a lo que hacen todas las mujeres buenas que son, como yo, tus discípulas? Hijo mío, dile a nuestro Padre, díselo Tú, que me dé la forma de darle gracias como el don merece».

«Madre mía, ¿tú crees que el Padre necesita que pida esto para ti? Ya te ha preparado el sacrificio que habrás de consumar para esta alabanza perfecta. Y perfecta serás cuando lo hayas cumplido…».

«¡Jesús mío!… Comprendo lo que quieres decir… ¿Pero seré capaz de pensar en esa hora?… Tu pobre Mamá…».

«¡La beata Esposa del Amor eterno! Esto eres, Mamá. Y el Amor pensará en ti».

«Lo dices Tú, Hijo, y yo descanso en tu Palabra. Pero Tú… ora por mí, en aquella hora incomprendida por todos éstos… y que es ya inminente… ¿No es verdad? ¿No es, acaso, verdad?».

Describir la expresión del rostro de María mientras mantiene este diálogo es imposible. No existe escritor que pueda traducirla en palabra sin deteriorarla con melosidades o colores inciertos. Sólo quien tiene corazón, y corazón bueno, aun siendo corazón viril, puede dar mentalmente al rostro de María la expresión real que tiene en este momento.

Jesús la mira… Otra expresión intraducible en pobre palabra. Y le responde: «Y tú ora por mí en la hora de la muerte…

455.5

Sí. Ninguno de éstos comprende… No es por su culpa. Es Satanás quien crea los vapores para que no vean, y estén como ebrios y no comprendan, y no estén preparados por consiguiente… y sean más fáciles de doblegar… Pero Yo y tú los salvaremos, a pesar de la asechanza de Satanás. Desde ahora te los confío, Madre mía. Recuerda estas palabras mías: te los confío. Te doy mi herencia. No tengo nada en la Tierra sino una Madre, que ofrezco a Dios: Hostia con la Hostia; y mi Iglesia, que te confío a ti. Sé Nutriz para ella. Hace poco pensaba en todos aquellos en quienes, a lo largo de los siglos, revivirá el hombre de Keriot con todas sus taras. Y pensaba que uno que no fuera Jesús rechazaría a este ser tarado. Pero Yo no le rechazaré. Soy Jesús. Tú, en el tiempo que permanezcas en la Tierra, segunda respecto a Pedro como jerarquía eclesiástica[1] (él cabeza, tú fiel), primera respecto a todos como Madre de la Iglesia, habiéndome dado a luz a mí, Cabeza de este Cuerpo místico, tú no rechaces a los muchos Judas, sino socorre y enseña a Pedro, a los hermanos, a Juan, Santiago, Simón, Felipe, Bartolomé, Andrés, Tomás y Mateo, a no rechazar, sino a socorrer. Defiéndeme en mis seguidores, y defiéndeme contra aquellos que quieran dispersar y desmembrar a la naciente Iglesia. Y a lo largo de los siglos, oh Madre, siempre tú sé la Mujer que intercede y protege, defiende, ayuda a mi Iglesia, a mis Sacerdotes, a mis fieles, contra el Mal y el Castigo, contra sí mismos… ¡Cuántos Judas, oh Madre, a lo largo de los siglos! Y cuántos semejantes a limitados mentales que no saben entender, o a ciegos y sordos que no saben ver y oír, o a tullidos y paralíticos que no son capaces de venir… ¡Madre, todos bajo tu manto! Eres la única que puede y podrá cambiar los decretos de castigo del Eterno para uno o para muchos, porque nada podrá negar nunca la Tríada a su Flor».

«Así lo haré, Hijo. Por lo que depende de mí, ve en paz a tu meta. Tu Mamá está aquí para defenderte en tu Iglesia, siempre».

«Dios te bendiga, Mamá…

455.6

¡Ven! Voy a recoger para ti unos cálices de flor llenos de rocío perfumado, así te refrescas la cara como he hecho Yo. Nos los ha preparado el Padre nuestro Stmo. y los pájaros me los han señalado. ¡Mira como todo sirve en la ordenada Creación de Dios! Este rellano elevado y cercano al lago, muy fértil por las nieblas que suben del mar galileo y por los árboles altos que atraen el rocío, permitiendo esta exuberancia de hierbas y flores incluso en medio de la quemazón estiva; esta abundante lluvia de gotas de rocío para llenar estos cálices y que sus amados hijos puedan lavarse el rostro… Ve lo que el Padre ha preparado para quien le ama. Ten. Agua de Dios, en cálices de Dios, para refrescar a la Eva del nuevo Paraíso».

Y Jesús coge estas anchísimas flores —no sé cómo se llaman— y vierte en las manos de María el agua recogida en el fondo…

455.7

Los otros, entretanto, se han arreglado y vienen buscando a Jesús, que se ha alejado algunos metros del lugar de descanso.

«Estamos ya listos, Maestro».

«Bien. Vamos por esta parte».

«¿Pero es buen camino? Aquí terminan los bosques; y la otra vez estábamos en los bosques…» objeta Santiago de Zebedeo.

«Porque subíamos del lago, pero ahora podemos tomar el camino bueno. ¿Veis? Gamala está allí, entre oriente y mediodía, y el único camino es éste. Porque los otros tres lados son impracticables para quien no es una cabra agreste».

«Tienes razón. Evitaremos la hoz árida de la que vimos venir a los endemoniados» dice Felipe.

Caminan a buen paso y pronto dejan atrás el bosque en el que han dormido. Van por un camino pedregoso allende una pequeña hoz que se va acentuando a medida que se acerca al caprichoso monte al que está aferrada Gamala, escarpado por tres partes, o sea, al Este, Norte y Oeste, y unido al resto de la comarca por este único camino que sigue la dirección Sur-Norte; camino alto, entre dos pedregosos y agrestes valles que lo separan de las campiñas de oriente y de los bosques de encinas de occidente.

455.8

Muchos cuidadores de cerdos pasan en medio de su hozadora manada, en dirección a los encinares. Carros cargados de piedras labradas pasan chirriando, tirados por lentos bueyes enyugados. Algún que otro caballero pasa al trote levantando nubes de polvo. Equipos de cavadores —creo que la mayor parte son esclavos o condenados a trabajos por algún motivo— pasan andrajosos y consumidos, hacia los trabajos, bajo la vigilancia dura de los sobrestantes.

A medida que el monte se acerca y ya el camino sube, se ven cárcavas fortificadas que cortan el monte como anillos que ciñen sus laderas. Cavar esas cárcavas allí no debe ser fácil, especialmente en ciertos lugares casi cortados a pico. Y, a pesar de todo, muchos hombres trabajan arreglando fortificaciones ya existentes, preparando otras, llevando sobre sus desnudas espaldas cubos de piedra (que hacen plegarse a estos infelices y dejan surcos sangrantes en sus desnudas espaldas).

«¿Pero qué hacen los de esta ciudad? ¿Estamos, acaso, en tiempo de guerra para trabajar de ese modo? ¡Están locos!» comentan entre sí los apóstoles, mientras las mujeres muestran su compasión por los infelices semidesnudos, mal nutridos, obligados a fatigas superiores a sus fuerzas.

«¿Pero quién los hace trabajar? ¿El Tetrarca o los romanos?» preguntan los apóstoles y arguyen entre sí, porque parece que Gamala es —así diría yo— independiente de la Tetrarquía de Filipo y de la Tetrarquía de Herodes, y porque les parece imposible a muchos de los apóstoles que los romanos se preocupen de construir en casa ajena fortificaciones que mañana podrían ser usadas contra ellos. Y la eterna idea, fija como una idea maniática, del reino temporal del Mesías, se esgrime como enseña de una victoria ya segura y de gloria e independencia nacionales.

455.9

Gritan tanto, que algunos sobrestantes se acercan y escuchan. Son hombres rudos, de raza visiblemente no hebrea, bastantes ya camino de la vejez. Bastantes de ellos tienen cicatrices en el cuerpo. Pero lo que son lo dice la salida despreciativa de uno de ellos: «¡“Nuestro reino”! ¿Has oído, Tito? ¡Narigudos! Vuestro reino está ya aplastado debajo de estas piedras. Quien se sirve del enemigo para construir contra el enemigo sirve al enemigo. Palabras de Publio Corfinio. Y, si no comprendéis, pues vivid, que las piedras os explicarán el enigma» y se ríe mientras alza el azote, porque ve que uno de los trabajadores, agotado, vacila y se sienta, y le golpearía si Jesús no le detuviera, adelantándose y diciendo: «No te es lícito. Es hombre como tú».

«¿Quién eres, que te entrometes y defiendes a un esclavo?».

«Yo soy la Misericordia. Mi nombre de hombre no te diría nada. Pero este atributo mío te recuerda que seas misericordioso. Has dicho: “Quien se sirve del enemigo para construir contra el enemigo sirve al enemigo”. Has dicho una dolorosa verdad. Pero Yo te digo otra, luminosa: “Quien no emplea misericordia no hallará misericordia”».

«¿Eres un orador?».

«Soy la Misericordia, ya te lo he dicho».

Algunos, de Gamala o que se dirigen a esta ciudad, dicen: «Es el Rabí de Galilea. El que manda a las enfermedades, a los vientos, a las aguas y a los demonios, y convierte las piedras en pan y nada se le resiste. Vamos corriendo a la ciudad a decirlo. ¡Que vengan los enfermos! Que escuchemos su palabra. ¡También nosotros somos de Israel!», y una parte de ellos se marchan rápidamente, mientras otra parte se queda en torno al Maestro.

El sobrestante de antes dice: «¿Es verdad lo que éstos dicen de ti?».

«Es verdad».

«Haz un milagro y creeré».

«No se piden milagros para creer. Se pide fe para creer, y obtener así el milagro. Fe y piedad hacia el prójimo».

«Soy pagano yo…».

«No es razón válida. Vives en Israel, que te da dinero…».

«Porque trabajo».

«No. Porque haces trabajar».

«Yo sé hacer trabajar».

«Sí, sin piedad. ¿No has pensado nunca que si en vez de ser romano hubieras sido de Israel habrías podido estar en el lugar de uno de éstos?».

«¡Hombre, claro!… Pero no lo soy, por protección de los dioses».

«No podrían defenderte tus ídolos vanos, si el verdadero Dios quisiera castigarte. Todavía no has muerto. Sé, pues, misericordioso para obtener misericordia…».

El hombre quisiera rebatir, discutir, pero luego se encoge de hombros despreciativamente y, volviendo las espaldas, se marcha a pegar a uno que ha parado de trabajar con el pico en una veta tenaz de roca.

Jesús mira al infeliz que recibe los golpes y mira al que golpea: dos miradas de igual, y al mismo tiempo distinta, piedad; y de una tristeza tan profunda, que me recuerda ciertas miradas de Cristo durante la Pasión. ¿Pero qué puede hacer? Impotente para intervenir, reanuda su camino, con el peso de las desventuras que ha visto y que le cargan el corazón.

455.10

Mas bajan apresuradamente algunos habitantes de Gamala, personas importantes ciertamente, y llegan donde Jesús, a quien saludan con gran veneración, invitándole a que entre en la ciudad para hablar a los habitantes, los cuales, por su cuenta, están viniendo en nutridos grupos.

«Vosotros podéis ir a donde queráis. Ellos —y señala a los trabajadores— no pueden. La hora es aún fresca y la posición nos resguarda del sol. Vamos cerca de aquellos desdichados, para que también tengan ellos la palabra de Vida» responde Jesús. Y es el primero en encaminarse, volviendo sobre sus pasos y tomando luego un sendero accidentado que lleva monte abajo al lugar en que el trabajo es más penoso. Se vuelve entonces hacia las personalidades de la ciudad y dice: «Si tenéis facultad para hacerlo, ordenad que sea suspendido el trabajo».

«¡Claro que podemos hacerlo! Pagamos nosotros. Si pagamos horas vacías, nadie podrá quejarse» dicen los de Gamala, y van a hablar con los sobrestantes. Pasados unos momentos, veo que éstos se encogen de hombros como diciendo: «Si estáis contentos vosotros, ¿a nosotros qué nos importa?». Y luego silban a los equipos una señal ciertamente de descanso.

Jesús, entretanto, ha hablado con otros de Gamala. Veo que éstos hacen gestos de asentimiento y que se marchan a paso rápido, de nuevo hacia la ciudad.

Los laborantes, temerosos, acuden donde los sobrestantes y se ponen en torno a ellos. «Cesad el trabajo. El estrépito molesta al filósofo» ordena uno de éstos, quizás el jefe de todos. Los laborantes miran con ojos cansados a aquel que ha sido indicado como “filósofo” y que les concede el don de un alto en el trabajo.

Y este “filósofo”, mirándolos con piedad, responde a su mirada y a las palabras del sobrestante diciendo: «No me molesta el estrépito, sino que me da pena su miseria». Y añade: «Venid, hijos. Dad descanso a vuestros miembros, y más al corazón, junto al Cristo de Dios».

Pueblo, esclavos, condenados, apóstoles, discípulos se apiñan en el espacio libre que hay entre el monte y las trincheras, y quien allí no halla sitio trepa al anillo de trincheras más altas, o se coloca en los bloques que han sido volcados al suelo, y los menos afortunados se resignan a ir al camino, adonde ya llegan los rayos del sol. Y va viniendo continuamente gente nueva, de Gamala; o se detienen los que, procedentes de otros lugares, se dirigían a ella.

Mucha gente. Y entre ella se abren paso los que poco antes se habían marchado. Traen cestos y recipientes pesados. Se abren paso hasta Jesús, que ha ordenado a los apóstoles que lleven a la primera fila a los laborantes. Ponen cestos y ánforas a los pies de Jesús.

«Dad a éstos las ofrendas de la caridad» ordena Jesús.

«Ya han recibido su comida y allí hay todavía posca y pan. Si comen demasiado, están pesados en el trabajo» grita un sobrestante.

Jesús le mira y repite la orden: «Dad a éstos comida de hombres, y traedme a mí su comida».

Los apóstoles, ayudados de gente solícita, lo llevan a cabo.

¡Su comida! Una especie de costra obscura, dura, indigna de ser dada a los animales, poca agua mezclada con vinagre: ¡éste es el alimento de estos forzados! Jesús mira y manda que apoyen en el monte esta miserable comida. Y mira a los que debían consumirlo, cuerpos desnutridos en los que sólo resisten los músculos, excesivamente desarrollados debido a los esfuerzos superiores a lo común, y haces de fibras que sobresalen bajo la piel fláccida; ojos febriles y atemorizados, bocas ávidas, animalescas incluso, en el acto de morder el alimento bueno, abundante, inesperado, y de beber el vino, el verdadero vino fortalecedor, fresco…

Jesús espera, paciente, a que terminen la comida. Y no tiene que esperar mucho, porque la avidez es tal, que pronto todo está terminado.

455.11

Jesús abre los brazos con el gesto habitual de cuando está para hablar, para atraer la atención e imponer silencio. Dice:

«En este lugar, ¿qué observan los ojos del hombre? Valles excavados más profundamente de cuanto lo fueran por la naturaleza que los creó, colinas formadas con masas de rocas y taludes fabricados por el hombre, caminos sinuosos que penetran en el monte como guaridas de animales. ¿Y todo esto para qué? Para detener un peligro que no se sabe de dónde viene, pero que se presiente amenazador como granizada de un cielo borrascoso.

En verdad, aquí se ha actuado humanamente, con fuerzas humanas y medios humanos, y también inhumanos, para defenderse y preparar medios de ofensiva, olvidando las palabras del Profeta[2], que enseña a su pueblo cómo se puede defender de las desventuras humanas con medios sobrehumanos, los más válidos: “Consolaos… confortad a Jerusalén, porque su esclavitud ha terminado, su iniquidad está expiada, pues ha recibido de la mano del Señor el doble de sus pecados”. Y después de la promesa explica la forma que debe seguirse para traducirla en realidad: “Preparad los caminos del Señor, enderezad en la soledumbre los senderos de Dios. Todo valle será colmado; toda montaña, rebajada; los caminos tortuosos se harán derechos, los escabrosos se harán lisos. Entonces aparecerá la gloria del Señor y todos los hombres, sin excepción, la verán, porque la boca del Señor ha hablado”. Palabras pronunciadas de nuevo por el hombre de Dios, Juan el Bautista, y apagadas en sus labios sólo con la muerte.

Ésta es, oh hombres, la verdadera defensa contra las desventuras del hombre. No armas contra armas, defensa contra ofensa, no orgullos, no la crueldad; sino armas sobrenaturales, virtudes conquistadas en la soledumbre, o sea, en el interior del individuo, solo consigo mismo, que trabaja en santificarse elevando montes de caridad, rebajando cimas de soberbia, enderezando caminos tortuosos de concupiscencia, apartando de su camino obstáculos de sensualidad. Entonces aparecerá la gloria del Señor, y el hombre gozará de la defensa de Dios contra las asechanzas de los enemigos espirituales y materiales. ¿Pero qué creéis que son unas pocas trincheras, unas pocas escarpas, unos pocos fortines contra el castigo de Dios provocado por las iniquidades o incluso sólo por las tibiezas del hombre? Contra estos castigos, que tendrán un nombre (romanos, como en otros tiempos tuvieron el de babilonios o filisteos o egipcios), pero que en realidad son castigo divino, nada más que castigo, y un castigo provocado por los demasiados orgullos, sensualidades, codicias, mentiras, egoísmos, desobediencias a la Ley santa del Decálogo. El hombre, aun el más fuerte, puede morir por una mosca, y la ciudad mejor pertrechada puede ser expugnada: cuando el uno o la otra no gozan ya de la protección de Dios, protección desvanecida, rechazada, por causa de los pecados del hombre o de la ciudad.

455.12

Sigue diciendo el Profeta: “Todo hombre es como la hierba, y toda su gloria como la flor del campo: se seca la hierba, cae la flor en cuanto las toca el soplo del Señor”.

Vosotros, por deseo mío, miráis hoy con piedad a estos a los que hasta ayer habíais mirado como a máquinas obligadas a trabajar para vosotros. Hoy, porque os los he puesto como a hermanos entre hermanos, pobres hermanos en medio de vosotros, ricos y felices, hoy los veis como lo que son: hombres. El desprecio o la indiferencia han caído de muchos corazones para dejar lugar a la piedad. Pero consideradlos más íntimamente, más allá de la carne avasallada. Dentro de ésta, dentro de ellos, hay un alma, un pensamiento, sentimientos como en vosotros. Un día eran como vosotros: estaban sanos, eran libres, vivían felices. Luego dejaron de serlo. Porque, si la vida del hombre es como hierba que se seca, aún más frágil es su bienestar. Los que hoy están sanos mañana pueden estar enfermos, los que hoy son libres mañana pueden ser esclavos, los que hoy viven felices mañana pueden vivir infelices. Entre éstos hay quienes ciertamente son culpables. Mas no juzguéis su culpa ni gocéis de su expiación. Mañana, por muchos motivos, podríais ser culpables también vosotros y veros obligados a duras expiaciones. Sed, pues, misericordiosos, porque no conocéis vuestro mañana, que podría verse necesitado de toda la misericordia divina y humana: efectivamente, muy distinto del hoy podría ser. Sed propensos al amor y al perdón. No hay hombre sobre la Tierra que no necesite de perdón por parte de Dios y por parte de alguno de sus semejantes. Perdonad, pues, para ser perdonados.

455.13

Sigue diciendo el Profeta: “La hierba se seca, la flor cae; mas la palabra del Señor permanece eterna”.

Ésta es el arma y la defensa: la Palabra eterna, hecha ley de todas vuestras acciones. Levantad este verdadero baluarte contra el peligro que amenaza, y seréis salvos. Acoged, pues, a la Palabra, Aquel que os habla, mas no la acojáis materialmente, durante una hora en el recinto de la ciudad; antes bien, en vuestro corazón y para siempre. Porque Yo soy Aquel que sabe y que obra y gobierna con poder. Y soy el Pastor bueno que apacienta el rebaño que a Él se confía; y no desatiendo a ninguno: ni al pequeño ni al cansado ni al herido o maltratado por la suerte ni al que llora por sus errores ni al que, rico y dichoso, margina todo en aras de la verdadera riqueza y dicha: la de servir a Dios hasta la muerte.

El Espíritu del Señor está sobre mí, porque el Señor me ha enviado a anunciar la Buena Nueva a los mansos, a vendar los corazones de aquellos que lo tienen roto, a predicar la libertad a los esclavos, la liberación a los prisioneros. Y no se me puede llamar agitador, porque no incito a la insurrección, ni aconsejo la evasión a los esclavos y prisioneros; sino que, al hombre encadenado, al hombre que padece esclavitud enseño la verdadera libertad, la verdadera liberación, la que no puede ser arrebatada y tampoco limitada, la que, en la medida en que más se abandona a ella el hombre, más crece: la libertad espiritual, la liberación del pecado, la mansedumbre en el dolor, el saber ver a Dios más allá de los hombres que encadenan, el saber creer que Dios ama a quien le ama, y perdona donde el hombre no perdona, saber tener esperanza en un lugar eterno, de premio, para quien sabe ser bueno en la desventura, para quien sabe arrepentirse de sus pecados, ser fiel al Señor.

No lloréis, vosotros para quienes hablo especialmente. He venido a consolar, a recoger a los desechados, a poner luz en sus tinieblas, paz en sus almas, a prometer una morada de gozo, tanto a quien se arrepiente como al no culpable. Y no hay pasado que impida este Presente que espera en el Cielo a los que saben servir al Señor en la condición en que se encuentran.

455.14

No es difícil, pobres hijos, servir al Señor. Él os ha dado un modo fácil de servirle, porque os quiere felices en el Cielo. Servir al Señor es amar. Amar la voluntad de Dios porque amáis a Dios. La voluntad de Dios se cela incluso en las cosas más aparentemente humanas. Porque —os hablo a vosotros, que quizás habéis derramado sangre de hermanos—, porque, si es cierto que no era voluntad de Dios que fuerais violentos, ahora es voluntad suya que en la expiación canceléis vuestras deudas para con el Amor. Porque, si no era voluntad de Dios que os rebelarais contra vuestros enemigos, es ahora voluntad el que os hagáis humildes, como entonces fuisteis soberbios para perjuicio vuestro. Porque, si no era voluntad de Dios que con robo, grande o pequeño, os apropiarais de lo que no era vuestro, ahora es voluntad de Dios que recibáis la pena para no llegar a Dios con vuestro pecado en el corazón.

Y esto no deben olvidarlo los que ahora viven dichosos, los que se creen seguros, los que, por esta torpe seguridad, no preparan en sí el Reino de Dios, y serán en la hora de la prueba como hijos lejanos de la casa del Padre, a merced de la tempestad, bajo el flagelo del dolor.

455.15

Obrad todos con justicia, y alzad los ojos a la Casa paterna, al Reino de los Cielos que, cuando tenga abiertas de par en par sus puertas por mano de Aquel que ha venido a abrirlas, no se negará a recibir a ninguno que haya alcanzado la justicia. Mutilados en las carnes, tullecidos, eunucos; o mutilados en el espíritu, tullecidos, eunucos en las potencias del espíritu, excluidos en Israel, no temáis no tener sitio en el Reino de los Cielos. Las mutilaciones, tullimientos, minoraciones de la carne cesan con la carne. Las morales, como la prisión y la esclavitud, cesan también un día; las del espíritu, o sea, los frutos de las culpas pasadas, se reparan con la buena voluntad. Y las mutilaciones materiales no cuentan a los ojos de Dios, y las espirituales se anulan ante sus ojos cuando el arrepentimiento amoroso las cubre.

Y el ser extranjeros del Pueblo santo ya no es impedimento para servir al Señor. Porque ha llegado el tiempo en que las fronteras de la Tierra cesan ante el único Rey, el Rey de todos los reyes y pueblos, que congrega a todos los pueblos en uno solo para hacer de ellos su pueblo nuevo. Ese pueblo del que serán excluidos sólo los que traten de engañar al Señor con una falaz obediencia a su Decálogo, a ese Decálogo que todos los hombres de buena voluntad pueden seguir, sean hebreos o gentiles o idólatras. Porque donde hay buena voluntad hay tendencia natural a la justicia, y quien tiende a la justicia no halla dificultad en adorar al Dios verdadero, cuando llega a conocerle, a respetar su Nombre, a santificar sus fiestas, a honrar a los padres, a no matar, robar, testificar con falsedad, a no ser adultero y fornicador, a no codiciar lo que no es suyo. Y si hasta ahora no lo ha hecho, hágalo de ahora en adelante, para que se salve su alma y para conquistar su puesto en el Cielo. Está escrito: “Les daré un lugar en mi Casa, si mantienen mi pacto, y los alegraré”. Y esto se dice para todos los hombres de santa voluntad, siendo el Santo de los santos el Padre común de todos los hombres.

455.16

He dicho. No tengo dinero para éstos. Y tampoco les sería útil. Pero os digo a vosotros de Gamala, que tanto habéis progresado en el camino del Señor desde la primera vez que nos encontramos, que levantéis la mejor defensa para vuestra ciudad, la del amor entre vosotros y hacia éstos, socorriéndolos en mi Nombre mientras trabajan para vosotros. ¿Lo haréis?».

«Sí, Señor» grita la multitud.

«Entonces vamos. No habría entrado en vuestro recinto, si la dureza de los corazones hubiera respondido “no” a mi petición. Y bendición para vosotros que os quedáis… Vamos…».

Regresa al camino, ya todo lleno de sol. Sube a la ciudad, construida casi en roca como una ciudad troglodita, pero dotada de casas bien cuidadas y de un panorama bellísimo y variado (según desde el punto desde el que se mire, da a los montes de la Auranítida o al Mar galileo, o al lejano Gran Hermón o al verde valle del Jordán). La ciudad es fresca por cómo está construida: en alto y con calles protectoras del sol intenso. Parece más un enorme castillo que una ciudad. Las casas, mitad muro mitad montaña excavada, tienen tal aspecto de fortines, que Gamala parece una sucesión de fortalezas.

En la plaza mayor, la más alta de todas, el punto más alto de la ciudad —de modo que los ojos se deleitan en el vasto horizonte de los montes, bosques, lagos, ríos que tienen bajo su mirada— están los enfermos de Gamala. Y Jesús pasa curando…


Notes

  1. sois soumise à Pierre pour ce qui tient à la hiérarchie ecclésiastique, de laquelle Marie reste excluse : lui comme Chef et toi comme fidèle. Jésus prédit, en 199.6, que l’Eglise naissante sera confiée comme un enfant à l’autorité paternelle de Pierre et à l’amour maternel de Marie.
  2. paroles qui se trouvent dans le chapitre 40 du livre d’Isaïe, selon la note indiquée par Maria Valtorta sur le manuscrit original. Les citations du discours de Jésus sont tirées de : Is 40, 1-8 ; 56, 4-7 ; 61, 1.
  3. exclus en Israël, qui précisément excluait les personnes difformes ou eunuques du service de l’autel (comme on le voit déjà en 96.6 et en 419.7) et des assemblées de culte (comme en 211.7).

Notas

  1. segunda respecto a Pedro como jerarquía eclesiástica debe entenderse: subordinada a Pedro en lo que se refiere a la jerarquía eclesiástica (de la cual María queda automáticamente excluida: él cabeza, tú fiel.
  2. palabras del Profeta, en Isaías, parte II, cap. 40°, como dice la reseña de MV del manuscrito original. Las citas del discurso de Jesús son de: Isaías 40, 1-8; 56, 4-7; 61, 1.