462.1
Le lac n’est qu’une énorme sardoine insérée dans le chaton des collines qu’éclairent très faiblement les étoiles, car la lune est déjà couchée. Jésus est seul dans le pavillon vert, la tête appuyée sur ses avant-bras, posés sur la table près de la lampe dont la lueur agonise. Mais il ne dort pas. De temps à autre, il lève la tête, regarde encore, sur la table, les feuilles dépliées que recouvre la lampe et, de nouveau, il incline la tête sur ses avant-bas.
Le silence est absolu. Le lac lui-même semble dormir dans le calme accablant de la nuit. Puis voilà, en même temps, un bruissement du vent dans les feuillages, le claquement solitaire d’une vague sur la rive, un changement dans la nature, comme un réveil des éléments. La pâle clarté de l’aube qui pointe à peine est déjà une lueur, bien que l’œil ne s’en aperçoive pas encore quand il regarde le jardin désert. C’est le miroir du lac qui donne un reflet de ce retour de la lumière, parce que sa teinte foncée se fait plus claire, et lentement, par le reflet du ciel où l’aurore s’annonce, il passe de la couleur du plomb au gris-ardoise, puis au gris-fer pour prendre une nuance d’opale ; et enfin le voilà qui reflète le ciel dans ses eaux d’un bleu paradisiaque.