Los Escritos de Maria Valtorta

549. Séance du Sanhédrin, et audience de Pilate.

549. Sesión del Sanedrín

549.1

Si la nouvelle de la mort de Lazare avait provoqué de l’agitation dans Jérusalem et une bonne partie de la Judée, celle de sa résurrection finit de remuer et de pénétrer même là où elle avait laissé indifférent.

Sans doute, les quelques pharisiens et scribes, c’est-à-dire les membres du Sanhédrin présents à la résurrection, ne l’avaient pas annoncée au peuple. Mais les juifs en ont parlé, et la rumeur s’est répandue comme un éclair : d’une maison à l’autre, d’une terrasse à l’autre, des voix de femmes se la répètent, tandis qu’en bas le petit peuple la propage en se réjouissant grandement du triomphe de Jésus et du miracle pour Lazare. Les gens remplissent les rues en courant çà et là, croyant toujours arriver les premiers pour apporter cette information, mais ils sont déçus, car on la connaît à Ophel comme à Bézéta, dans Sion comme à l’Acra. On est au courant dans les synagogues comme dans les magasins, au Temple et dans le palais d’Hérode.

On connaît la nouvelle à l’Antonia, et de l’Antonia elle se répand dans les postes de garde aux portes ou vice versa. Elle emplit les palais comme les taudis : « Le Rabbi de Nazareth a ressuscité Lazare de Béthanie, qui est mort la veille du vendredi ; il a été mis au tombeau avant le début du sabbat et est ressuscité à l’heure de sexte d’aujourd’hui. »

Les acclamations hébraïques au Christ et au Très-Haut se mêlent à celles, plus variées, des Romains : « Par Jupiter ! Par Pollux ! Par Libitina ! », etc.

549.2

Les seuls que je ne vois pas dans cette foule bruyante, ce sont les membres du Sanhédrin. Je n’en vois pas un seul. En revanche, je remarque que Kouza et Manahen sortent d’un splendide palais, et j’entends Kouza dire :

« J’ai aussitôt fait informer Jeanne. Il est réellement Dieu ! »

Et Manahen répond :

« Hérode, venu de Jéricho pour présenter ses hommages… à son maître Ponce Pilate, semble fou dans son palais, tandis qu’Hérodiade est furieuse et le pousse à donner des ordres pour arrêter le Christ. Elle tremble pour sa puissance, lui à cause de ses remords. Il claque des dents en intimant aux plus fidèles de le défendre… des fantômes. Il s’est enivré pour se donner du courage, mais le vin lui tourne la tête et lui fait voir des spectres. Il hurle que le Christ a aussi ressuscité Jean, qui lui crie maintenant aux oreilles les malédictions de Dieu. Je me suis enfui de cette Géhenne. Je me suis contenté de lui dire : “ Lazare a été ressuscité par Jésus de Nazareth. Garde-toi de toucher à lui, car il est Dieu. ” Je le maintiens dans cette peur pour qu’il ne cède pas à la volonté homicide de sa femme.

– Moi, je devrais y aller, au contraire… Je dois y aller. Mais j’ai d’abord voulu passer chez Eliel et Elqana. Ils vivent à part, mais leur parole compte toujours en Israël ! Jeanne est contente que je les honore. Et moi…

– C’est une bonne protection pour toi, c’est vrai. Mais elle n’égalera jamais l’amour du Maître. C’est l’unique protection qui ait de la valeur… »

Kouza ne réplique rien. Il réfléchit… Je les perds de vue.

549.3

De Bézéta arrive en toute hâte Joseph d’Arimathie. On l’arrête. C’est un groupe d’habitants incrédules qui se demandent s’il faut croire la nouvelle, et ils l’interrogent.

« C’est vrai ! C’est vrai ! Lazare est ressuscité, et il est guéri aussi. Je l’ai vu de mes propres yeux.

– Mais alors… Jésus est vraiment le Messie !

– Ses œuvres sont celles du Messie. Sa vie est parfaite. Nous vivons à l’époque prophétisée. Satan le combat. Que chacun conclue dans son cœur qui est le Nazaréen » dit Joseph prudemment, mais aussi avec exactitude.

Il salue et s’éloigne, les laissant débattre et finir par reconnaître :

« C’est vraiment le Messie. »

549.4

Un légionnaire parle dans un groupe :

« Si je le peux, j’irai demain à Béthanie. Par Vénus et Mars, mes dieux préférés ! Je pourrai faire le tour du monde, des déserts brûlants aux terres glacées germaniques, mais me trouver là où ressuscite un homme mort depuis des jours, cela ne m’arrivera plus. Je veux voir à quoi ressemble quelqu’un qui revient de la mort. Il sera noirci par l’eau des fleuves d’outre-tombe…

– S’il était vertueux, il sera blême après avoir bu l’eau couleur d’azur des Champs Elysées. Il n’y a pas que le Styx, là-bas…

– Il nous dira comment sont les prairies d’asphodèles de l’Hadès… Je t’accompagne.

– Si Ponce l’accepte…

– Bien sûr qu’il accepte ! Il a aussitôt expédié un courrier à Claudia pour qu’elle vienne. Claudia aime ce genre de débats. Je l’ai entendue plus d’une fois discuter de l’âme et de l’immortalité avec les autres et avec ses affranchis grecs.

– Claudia croit au Nazaréen. Pour elle, il est plus grand que tout autre homme.

– Oui. Mais pour Valéria, il est plus qu’un homme, c’est Dieu : une espèce de Jupiter et d’Apollon pour ce qui est de la puissance et de la beauté, disent-elles, et il est plus sage que Minerve. L’avez-vous vu ? Moi, je suis venu ici pour la première fois avec Ponce et je ne sais pas…

– Je crois que tu es arrivé à temps pour voir beaucoup de choses. Tout à l’heure, Ponce criait d’une voix de stentor : “ Ici, tout doit changer. Ils doivent comprendre que c’est Rome qui commande, et que, tous, ils sont asservis. Et plus ils sont grands, plus ils sont asservis, parce que plus dangereux. ” Je crois que c’est à cause de cette tablette qui lui avait été apportée par le serviteur d’Hanne…

– Bien sûr, il ne veut pas les écouter… Et il nous change tous régulièrement, car… il ne veut pas que des amitiés se créent entre eux et nous.

– Entre eux et nous ? Ha ! Ha ! Ha ! Avec ces hommes au gros nez qui sentent mauvais ? Ponce digère mal la trop grande quantité de porc qu’il mange. A moins… qu’il ne s’agisse de l’amitié avec quelque femme qui ne dédaigne pas d’embrasser des bouches rasées…, dit un soldat en riant malicieusement.

– C’est un fait que, depuis les troubles de la fête des Tentes, il a demandé et obtenu le changement de toutes les troupes, et qu’il nous faut partir…

– C’est vrai. On a déjà signalé à Césarée l’arrivée de la galère qui transporte Longinus et sa centurie. De nouveaux gradés, de nouvelles troupes… et tout cela à cause de ces crocodiles du Temple. J’étais bien ici, moi…

– Moi, j’étais mieux à Brindisi… Mais je m’habituerai », dit celui qui vient d’arriver en Palestine.

Ils s’éloignent eux aussi.

549.5

Des gardes du Temple passent avec des tablettes de cire. Les gens les observent et s’étonnent :

« Le Sanhédrin se réunit d’urgence. Que veulent-ils faire ? »

Quelqu’un répond :

« Montons au Temple, et voyons… »

Ils se dirigent vers la rue qui mène au mont Moriah.

Le soleil disparaît derrière les maisons de Sion et les monts de l’occident. Le soir tombe et va bientôt débarrasser les rues des curieux. Ceux qui sont montés au Temple en redescendent, contrariés parce qu’on les a chassés même des portes où ils s’étaient attardés pour voir passer les membres du Sanhédrin.

549.6

L’intérieur du Temple, vide, désert, enveloppé par la lumière de la lune, paraît immense. Les membres du Sanhédrin se rassemblent lentement dans la salle. Ils sont tous présents, comme lors de la condamnation de Jésus, à l’exception de ceux qui y faisaient office de greffiers[1]. Ils se tiennent en partie à leurs places, en partie en groupes près des portes.

Caïphe entre, avec son air mauvais et son corps de crapaud obèse, et il va à sa place.

Ils commencent immédiatement à débattre sur les faits survenus, et ils y mettent une telle passion que la séance devient vite très animée. Ils quittent leurs places, descendent dans l’espace vide en gesticulant et en parlant à haute voix.

Quelques-uns leur conseillent de garder leur calme et de bien réfléchir avant de prendre des décisions.

D’autres répliquent :

« Mais n’avez-vous pas entendu ceux qui sont venus ici après none ? Si nous perdons les juifs les plus influents, à quoi sert-il d’accumuler les accusations ? Plus il vit, et moins on nous croira si nous l’accusons.

– Or cet événement est indéniable. On ne peut dire à la foule qui y a assisté : “ Vous avez mal vu. C’est une illusion. Vous étiez ivres. ” Le mort était bien mort, putréfié, décomposé. Il avait été déposé dans un tombeau fermé, bien muré. Le mort était couvert de bandelettes et de baumes depuis plusieurs jours. Il était lié. Et pourtant, il est sorti de sa place, il est venu tout seul, sans marcher, jusqu’à l’ouverture. Et une fois libéré, il n’était plus mort. Il respirait. Il n’y avait plus de corruption, alors qu’auparavant, quand il vivait, il était couvert de plaies et, dès sa mort, il était tout décomposé.

– Vous avez entendu les juifs les plus influents, ceux que nous avions poussés là pour les conquérir complètement à notre cause ? Ils sont venus nous dire : “ Pour nous, il est le Messie. ” Presque tous sont venus ! Même le peuple !

– Et ces maudits Romains pleins de fables ! Qu’en faites-vous ? Pour eux, il est Jupiter Maximus. Alors s’ils se mettent cette idée en tête… Ils nous ont fait connaître leurs histoires, et cela a été une malédiction. Anathème sur ceux qui ont voulu nous imposer l’hellénisme[2], et qui, par flagornerie, nous ont profanés par des coutumes qui ne sont pas les nôtres ! Pourtant cela sert aussi à notre information, et nous savons que le Romain a vite fait d’abattre et d’élever par des conjurations et des coups d’état. Or si certains de ces fous s’enthousiasment pour le Nazaréen et le proclament César — et par conséquent divin —, qui pourra le toucher ?

– Mais non ! Qui veux-tu qui fasse cela ? Ils se gaussent de lui et de nous. Ses actes ont beau être grands, pour eux il reste “ un juif ”, et donc un misérable. La peur te rend stupide, ô fils d’Hanne !

– La peur ? As-tu entendu comment Ponce Pilate a répondu à l’invitation de mon père ? Il est bouleversé, te dis-je, il est bouleversé par l’événement, et il redoute le Nazaréen. Malheureux que nous sommes ! Cet homme est venu pour notre ruine !

549.7

– Si au moins nous n’y étions pas allés et si nous n’avions pas presque ordonné aux plus puissants des juifs d’y aller ! Si Lazare était ressuscité sans témoins…

– Eh bien ? Qu’est-ce que cela aurait changé ? Nous ne pouvions sûrement pas le faire disparaître pour laisser croire qu’il était toujours mort !

– Non, certes. Mais nous pouvions prétendre qu’il s’était agi d’une fausse mort. Des témoins payés pour mentir, on en trouve toujours.

– Mais pourquoi une telle agitation ? Je n’en vois pas la raison ! Aurait-il donc provoqué le Sanhédrin et le Pontificat ? Non. Il s’est borné à accomplir un miracle.

– Il s’est borné ? ! Mais tu es sot ou vendu à lui, Eléazar ? N’a-t-il pas provoqué le Sanhédrin et le Pontificat ? Et que veux-tu de plus ? Les gens…

– Les gens peuvent dire ce qu’ils veulent, mais je suis du même avis qu’Eléazar : le Nazaréen n’a fait qu’un miracle.

– Voilà l’autre qui le défend ! Tu n’es plus un juste, Nicodème ! Tu n’es plus un juste ! Tu agis contre nous, contre nous, comprends-tu ? Plus rien ne convaincra la foule. Ah ! malheureux que nous sommes ! Moi, aujourd’hui, j’ai été bafoué par certains juifs. Moi, bafoué ! Moi !

– Tais-toi, Doras ! Tu n’es qu’un homme, mais c’est l’idée qui est frappée ! Nos lois, nos prérogatives !

– Tu parles bien, Simon, et il faut les défendre.

– Mais comment ?

– En attaquant, en détruisant les siennes !

– C’est vite dit, Sadoq. Mais comment les détruirais-tu, si de toi-même tu ne sais pas rendre la vie à un moucheron ? Il nous faudrait accomplir un miracle plus grand que le sien, mais aucun de nous ne peut le faire parce que… »

L’orateur ne sait pas expliquer pourquoi, et c’est Joseph d’Arimathie qui achève :

« Parce que nous sommes des hommes, seulement des hommes. »

Ils se jettent sur lui en demandant :

« Et lui, qui est-il alors ? »

Joseph répond avec assurance :

« Il est Dieu. Si j’avais encore des doutes…

– Mais tu n’en avais pas. Nous le savons, Joseph. Nous le savons. Reconnais donc ouvertement que tu l’aimes !

549.8

– Joseph ne fait rien de mal en l’aimant. Moi-même, je le reconnais pour le plus grand Rabbi d’Israël.

– C’est toi, Gamaliel, qui dis cela ?

– Oui, je l’affirme. Et je m’honore d’être… détrôné par lui. Jusqu’à présent, j’avais conservé la tradition des grands rabbis, dont le dernier était Hillel, mais après moi je n’aurais pas su qui pouvait recueillir la sagesse des siècles. Maintenant, je partirai satisfait, parce que je sais qu’au lieu de s’éteindre, elle deviendra plus grande, accrue qu’elle sera de la sienne, à laquelle l’Esprit de Dieu est certainement présent.

– Mais que nous racontes-tu là, Gamaliel ?

– La vérité. Ce n’est pas en se fermant les yeux que l’on peut ignorer ce que nous sommes. Nous ne sommes plus sages, car le principe de la sagesse est la crainte de Dieu, or nous sommes des pécheurs dépourvus de la crainte de Dieu. Si nous en avions tant soit peu, nous ne piétinerions pas le juste et nous n’aurions pas la sotte avidité des richesses du monde. Dieu donne et Dieu enlève, selon les mérites et les démérites. Et si, maintenant, Dieu nous enlève ce qu’il nous avait confié, pour le donner à d’autres, qu’il soit béni, car saint est le Seigneur, et saintes sont toutes ses actions.

– Mais nous parlions de miracle, et nous voulions dire qu’aucun de nous ne peut en accomplir parce que Satan n’est pas avec nous.

– Je rectifie : parce que Dieu n’est pas avec nous. Moïse sépara les eaux et ouvrit le rocher, Josué arrêta le soleil, Elie ressuscita l’enfant et fit tomber la pluie, mais Dieu était avec eux. Je vous rappelle[3] qu’il y a six choses que Dieu hait, et qu’il exècre la septième : les yeux orgueilleux, la langue menteuse, les mains qui répandent le sang innocent, le cœur qui médite des desseins mauvais, les pieds qui courent rapidement vers le mal, le faux témoin qui profère des mensonges, et l’homme qui crée la discorde parmi ses frères. Tout cela, nous le faisons. Je dis “ nous ”, mais c’est vous seuls qui les faites, car moi je m’abstiens de crier “ Hosanna ” comme de crier “ Anathème ”.

549.9

J’attends.

– Le signe ! Naturellement, tu attends le signe ! Mais quel signe attends-tu d’un pauvre fou, si vraiment nous voulons tout lui pardonner ? »

Gamaliel lève les mains et, les bras en avant, les yeux fermés, la tête légèrement inclinée, l’air d’autant plus hiératique qu’il s’exprime lentement et d’une voix lointaine, il répond :

« J’ai interrogé anxieusement le Seigneur pour qu’il m’indique la vérité, et il a éclairé pour moi ces paroles[4] de Jésus ben Sirac : “ Le Créateur de l’univers m’a donné un ordre, Celui qui m’a créée m’a fait dresser ma tente. Il m’a dit : ‘Installe-toi en Jacob, entre dans l’héritage d’Israël, plonge tes racines parmi mes élus ”… Il m’a également éclairé celles-ci, que j’ai reconnues : “ Venez à moi, vous tous qui me désirez et rassasiez-vous de mes fruits, car mon esprit est plus doux que le miel et mon héritage plus doux qu’un rayon de miel. Mon souvenir durera dans les générations des siècles. Ceux qui me mangent auront encore faim, ceux qui me boivent auront encore soif. Celui qui m’obéit n’aura pas à en rougir, ceux qui font mes œuvres ne pécheront pas, et ceux qui me mettent en lumière possèderont la vie éternelle. ” Et la lumière de Dieu s’accrut dans mon esprit tandis que mes yeux lisaient ces paroles : “ Tout cela n’est autre que le livre de la vie, l’alliance du Très-Haut, la doctrine de la vérité… Dieu a promis à David de faire naître de lui le Roi très puissant qui doit rester assis éternellement sur le trône de la gloire. Il fait abonder la sagesse comme les eaux du Phisôn, comme le Tigre à la saison des fruits ; il fait déborder l’intelligence comme l’Euphrate, comme le Jourdain au temps de la moisson. Il répand la sagesse comme la lumière… Lui, le premier, l’a parfaitement connue. ” Voilà les lumières que Dieu m’a données ! Mais, hélas ! que dis-je, la Sagesse qui est parmi nous est trop grande pour que nous la comprenions et que nous accueillions une pensée plus vaste que la mer et un conseil plus profond que le grand abîme. Et nous l’entendons crier : “ Comme un canal d’eaux immenses, j’ai jailli du Paradis et j’ai dit : ‘Je vais arroser mon jardin.’ Et voici que mon canal est devenu fleuve, et que le fleuve est devenu mer. Comme l’aurore, j’infuse à tous ma doctrine et je la ferai connaître à ceux qui sont le plus loin. Je pénétrerai dans les lieux les plus bas, je jetterai mon regard sur ceux qui dorment, je porterai ma lumière à ceux qui espèrent dans le Seigneur. Je répandrai ma doctrine comme une prophétie, je la transmettrai à ceux qui cherchent la sagesse, je ne cesserai pas de l’annoncer jusqu’au siècle saint. Ce n’est pas pour moi que je travaille, mais pour tous ceux qui cherchent la vérité. ” Voilà ce que m’a fait lire Yahvé, le Très-Haut. »

Il baisse les bras et relève la tête.

« Mais alors, à tes yeux c’est le Messie ? ! Dis-le !

– Ce n’est pas le Messie.

– Non ? Dans ce cas, qu’est-il pour toi ? Un démon, non. Un ange, non. Le Messie, non…

– Il est celui qui est.

– Tu délires ! Il est Dieu ? Pour toi, ce fou est Dieu ?

– Il est Celui qui est. Dieu sait qui il est. Nous, nous voyons ses œuvres, or Dieu voit aussi ses pensées. Mais il n’est pas le Messie car, pour nous, Messie veut dire Roi. Lui n’est pas, ne sera pas roi. Mais il est saint, et ses œuvres sont celles d’un saint. Quant à nous, nous ne pouvons pas lever la main sur l’innocent sans commettre un péché. Moi, je ne souscrirai pas au péché.

– Mais par ces mots tu l’as presque appelé l’Attendu !

– C’est ce que j’ai dit. Tant qu’a duré la lumière du Très-Haut, je l’ai vu tel. Puis… quand la main du Seigneur, qui me tenait élevé dans sa lumière, m’a abandonné, je suis redevenu homme, l’homme d’Israël… alors toutes ces paroles n’ont plus été que des paroles auxquelles l’homme d’Israël, moi, vous, ceux d’avant nous et — que Dieu ne le permette pas — ceux d’après nous, donnent le sens de leur, de notre pensée, et non le sens qu’elles ont dans la Pensée éternelle qui les a dictées à son serviteur.

549.10

– Mais nous ergotons, nous divaguons, nous perdons du temps et, pendant ce temps, le peuple s’agite, intervient Chanania de sa voix rauque.

– C’est juste ! Il faut décider et agir, pour nous sauver et triompher.

– Vous dites que Pilate n’a pas voulu nous écouter quand nous lui avons demandé son aide contre le Nazaréen. Mais si nous lui faisions savoir… Vous avez assuré que, si les troupes s’exaltent, elles peuvent le proclamer César… Hé ! Hé ! c’est une bonne idée ! Allons exposer au Proconsul ce danger. Nous serons honorés comme de fidèles serviteurs de Rome et… si, lui, il intervient, nous serons débarrassés du Rabbi. Allons, allons ! Toi, Eléazar, fils d’Hanne, qui es plus que tous son ami, sois notre chef » dit en riant Elchias de sa voix de serpent.

Il y a un peu d’hésitation, puis un groupe des plus fanatiques sort pour se rendre à l’Antonia. Caïphe reste avec les autres.

« A cette heure-ci ! Ils ne seront pas reçus, objecte quelqu’un.

– Non, au contraire ! C’est la meilleure. Pilate est toujours de bonne humeur quand il a bu et mangé comme boit et mange un païen… »

549.11

Je les laisse là à discourir, et la scène de l’Antonia s’éclaire à mes yeux.

Le trajet est vite parcouru, et sans difficulté tant est limpide la clarté de la lune, qui contraste fortement avec la lumière rouge des lampes allumées dans le vestibule du palais prétorien.

Eléazar réussit à se faire annoncer à Pilate, et on les fait passer dans une grande salle vide, complètement vide. Il n’y a qu’un siège massif, avec un dossier bas, couvert d’un drap pourpre qui ressort vivement dans la blancheur absolue de la pièce. Ils se tiennent en groupe, un peu craintifs, transis de froid, debout sur le marbre blanc du pavé. Personne ne vient. On n’entend rien. Pourtant, par intervalles, une musique lointaine rompt ce silence.

« Pilate est à table, certainement avec des amis. Cette musique vient du triclinium. Il y aura sûrement des danses en l’honneur des hôtes, pronostique Eléazar.

– Corrompus ! Demain, je me purifierai. La luxure transpire de ces murs, lance avec dégoût Elchias.

– Pourquoi es-tu venu, alors ? C’est toi qui l’as proposé, réplique Eléazar.

– Pour l’honneur de Dieu et le bien de notre patrie, je peux faire n’importe quel sacrifice. Et c’en est un grand ! Je m’étais purifié après m’être approché de Lazare… et maintenant !… Quelle terrible journée ! »

Pilate ne vient pas. Le temps passe. Eléazar, en habitué de l’endroit, essaie les portes. Elles sont toutes fermées. La crainte s’empare de tous. Des histoires effrayantes reviennent à l’esprit. Ils regrettent d’être venus. Ils se sentent déjà perdus.

549.12

Enfin, du côté qui leur est opposé — ils se tiennent près de la porte par laquelle ils sont entrés, et par conséquent près de l’unique siège de la pièce —, voilà que s’ouvre une porte et qu’entre Pilate. Il porte un vêtement tout blanc, comme la salle. Il marche en devisant avec des invités. Tout en riant, il se tourne pour commander à un esclave, qui soulève un rideau de l’autre côté du seuil de la salle, de jeter des essences dans un brasier et d’apporter des parfums et de l’eau pour les mains, puis il ordonne qu’un serviteur vienne avec un miroir et des peignes. Il ne s’occupe pas des Hébreux, c’est comme s’ils n’existaient pas. Ceux-ci ruminent leur colère, mais n’osent pas bouger…

Pendant ce temps, on apporte des brasiers, on répand des résines sur le feu, on verse de l’eau parfumée sur les mains des Romains. Le serviteur, par des mouvements adroits, peigne les cheveux selon la mode des riches Romains de l’époque. Les Hébreux sont exaspérés.

Les Romains rient entre eux et plaisantent, en lançant de temps à autre un coup d’œil sur le groupe qui attend tout au fond. L’un d’eux murmure quelque chose à Pilate, qui ne s’est jamais retourné pour regarder ; mais celui-ci hausse les épaules avec un geste d’ennui et bat des mains pour appeler un esclave, auquel il ordonne à haute voix d’apporter des friandises et de faire entrer les danseuses. Les Hébreux, scandalisés, frémissent de colère. Pensez à un Elchias obligé de voir des danseuses ! Son visage est un poème de souffrance et de haine.

Les esclaves arrivent avec toutes sortes de douceurs dans des coupes précieuses, suivis de danseuses couronnées de fleurs et à peine couvertes de voiles si aériens qu’elles semblent être dénudées. Leur corps très blanc transparaît à travers les vêtements vaporeux, teintés de rosé et de bleu clair, quand elles passent devant les brasiers allumés et les nombreuses lampes posées au fond. Les Romains admirent la grâce des corps et des mouvements, et Pilate redemande un pas de danse qui lui a particulièrement plu. Indigné, Elchias, imité par ses compagnons, se tourne vers le mur pour ne pas voir les danseuses voleter comme des papillons dans un balancement de parures inconvenantes.

Une fois finie cette courte danse, Pilate les congédie en mettant dans la main de chacune une coupe remplie de friandises où il jette nonchalamment un bracelet.

549.13

Finalement, il daigne se tourner pour regarder les Hébreux et dit à ses amis d’un air ennuyé :

« Et maintenant… je vais devoir passer du rêve à la réalité… de la poésie à… l’hypocrisie… de la grâce aux ordures de la vie. Quelle misère d’être Proconsul !… Salut, mes amis, et ayez pitié de moi. »

Resté seul, il s’approche à pas lents des Hébreux. Il s’assied, examine ses mains bien soignées, et découvre sous un ongle quelque chose qui ne va pas. Il s’en occupe longuement, en tirant de son vêtement une fine baguette d’or avec laquelle il remédie au grand dommage d’un ongle imparfait…

Enfin, il fait la grâce de tourner lentement la tête. Il ricane à la vue des juifs encore inclinés servilement, et leur lance :

« Vous, approchez ! Et soyez brefs : je n’ai pas de temps à perdre avec des futilités. »

Les Hébreux s’avancent dans une attitude toujours servile, jusqu’à ce qu’un : « Assez ! Pas trop près ! » les cloue au sol.

« Parlez ! Et redressez-vous. Il ne convient qu’à des animaux de rester courbés vers le sol. »

Et il rit. Les Hébreux se redressent sous le mépris et se tiennent en bombant le torse.

« Alors ? Parlez ! Vous avez absolument voulu venir. Maintenant que vous êtes ici, exprimez-vous.

– Nous voulions te dire… Pour autant que nous sachions… Nous sommes des serviteurs fidèles de Rome…

– Ha ! Ha ! Ha ! Des serviteurs fidèles de Rome ! Je le ferai savoir au divin César, il s’en réjouira ! Il en sera heureux ! Parlez, farceurs ! Et faites vite ! »

Les membres du Sanhédrin encaissent, mais ne bronchent pas.

549.14

Elchias prend la parole au nom de tous :

« Tu dois savoir, ô Ponce, qu’aujourd’hui à Béthanie un homme a été ressuscité…

– Je le sais. C’est pour me dire cela que vous êtes venus ? Je le savais depuis plusieurs heures. Il a de la chance de savoir ce que c’est que mourir et ce qu’est l’autre monde ! Mais que puis-je y faire si Lazare, fils de Théophile, est revenu à la vie ? M’aurait-il apporté un message de l’Hadès ? »

Il ironise.

« Non. Mais sa résurrection est un danger…

– Pour lui ? Certainement ! Le danger de devoir mourir de nouveau. Opération peu agréable. Eh bien ! Que puis-je y faire ? Suis-je Jupiter, moi ?

– Un danger, non pour Lazare, mais pour César.

– Pour ?… Par tous les dieux ! Ai-je trop bu ? Vous avez dit : pour César ? Et en quoi Lazare peut-il nuire à César ? Vous craignez peut-être que la puanteur de son tombeau puisse corrompre l’air que respire l’Empereur ? Rassurez-vous ! Il est trop loin !

– Il ne s’agit pas de cela. Mais Lazare, en ressuscitant, peut faire détrôner l’Empereur.

– Détrôner ? Ha ! Ha ! Ha ! Quelle plaisanterie ! Ce n’est pas moi qui suis ivre, mais vous. Peut-être l’épouvante vous a-t-elle fait tourner la tête. Voir ressusciter… je suppose que cela peut troubler. Allez, allez au lit prendre un bon temps de repos. Et un bain chaud, bien chaud, salutaire contre les délires.

– Nous ne délirons pas, Ponce : nous te disons que, si tu n’y mets pas bon ordre, tu connaîtras des moments difficiles. Tu seras certainement puni, si même tu n’es pas tué par l’usurpateur. D’ici peu, le Nazaréen sera proclamé roi, roi du monde, comprends-tu ? Les légionnaires eux-mêmes le feront. Ils sont séduits par le Nazaréen et l’événement d’aujourd’hui les a exaltés. Quel serviteur de Rome es-tu, si tu ne te préoccupes pas de sa paix ? Veux-tu donc voir l’Empire bouleversé et divisé à cause de ton inertie ? Veux-tu voir Rome vaincue, et les enseignes abattues, l’Empereur tué, tout détruit…

– Silence ! C’est moi qui parle, et je vous dis : vous êtes des fous ! Mieux : vous êtes des menteurs, vous êtes des malandrins. Vous mériteriez la mort. Sortez d’ici, hideux serviteurs de vos intérêts, de votre haine, de votre bassesse. Vous êtes esclaves, pas moi. Je suis citoyen romain, et les citoyens romains ne sont assujettis à personne. Je suis le fonctionnaire impérial et je travaille pour les intérêts de la patrie. Vous… vous en êtes les sujets. Vous êtes sous notre domination. Vous êtes les galériens attachés aux bancs, et vous frémissez inutilement. Le fouet du chef est sur vous. Le Nazaréen !… Vous voudriez que je tue le Nazaréen ? Vous voudriez que je l’emprisonne ? Par Jupiter ! Si, pour le salut de Rome et du divin Empereur, je devais emprisonner les sujets dangereux ou les tuer, ici où je gouverne, c’est le Nazaréen et ses partisans, eux seuls, que je devrais laisser libres et vivants. Allez ! Dégagez et ne revenez plus jamais devant moi. Excités ! Fauteurs de troubles ! Rapaces et complices de rapaces ! Aucune de vos manigances ne m’est inconnue, sachez-le. Apprenez aussi que des armes toutes neuves et de nouveaux légionnaires ont servi à découvrir vos pièges et vos espions. Vous criez à cause des impôts romains, mais que vous ont coûté Melchias de Galaad, Jonas de Scythopolis, Philippe de Soco, Jean de Beth-Aven, Joseph de Ramaoth, et tous les autres qui vont bientôt être pris ? Et ne vous approchez pas des grottes de la vallée, car il s’y trouve plus de légionnaires que de pierres, or les lois et la galère sont les mêmes pour tous. Pour tous ! Vous comprenez ? Pour tous. J’espère vivre assez longtemps pour vous voir tous enchaînés, esclaves parmi les esclaves sous le talon de Rome. Sortez ! Allez rapporter ma réponse, même toi, Eléazar, fils d’Hanne, que je ne veux plus voir chez moi : le temps de la clémence est fini, car c’est moi le Proconsul et vous les sujets. Les sujets. C’est moi qui commande, au nom de Rome. Sortez, serpents de nuit ! Vampires ! Et le Nazaréen veut vous racheter ? S’il était Dieu, il devrait vous foudroyer ! Le monde serait nettoyé de sa tache la plus répugnante. Dehors ! Et n’osez pas faire de conjurations, ou vous connaîtrez le fouet et le glaive. »

Il se lève et sort en claquant la porte devant les membres du Sanhédrin, interdits, qui n’ont pas le temps de se remettre, car un détachement en armes les chasse de la pièce et du palais comme des chiens.

549.15

De retour dans la salle du Sanhédrin, ils racontent tout. L’agitation est à son comble. La nouvelle de l’arrestation de plusieurs voleurs et des battues dans les grottes pour prendre les autres, trouble fortement tous ceux qui sont restés, car plusieurs, lassés d’attendre, sont partis.

« Et pourtant nous ne pouvons pas le laisser faire, crient des prêtres.

– Nous ne pouvons pas le laisser vivre. Lui, il agit. Nous, nous ne tentons rien et, jour après jour, nous perdons du terrain. Si nous le laissons libre, il continuera à accomplir des miracles, et tous croiront en lui. Les Romains finiront par être contre nous, et ils nous détruiront complètement. Pilate parle ainsi, mais si la foule proclamait Jésus roi, alors il aurait le devoir de nous punir, tous. Nous ne devons pas le permettre, s’écrie Sadoq.

– D’accord, mais comment ? La voie… légale romaine a échoué. Pilate est sûr du Nazaréen. Notre voie… légale est rendue impossible. Jésus ne pèche pas…, objecte quelqu’un.

– S’il n’y a pas de faute, il faut en inventer une, insinue Caïphe.

– Mais ce serait un péché! Jurer ce qui est faux ! Faire condamner un innocent ! C’est… trop !… se récrient la plupart avec horreur. C’est un crime, car cela signifiera la mort pour lui.

– Eh bien ? Cela vous effraie ? Vous êtes stupides, et vous n’y comprenez rien. Après ce qui est arrivé, Jésus doit mourir. Vous ne réfléchissez pas qu’il vaut mieux qu’un seul homme meure plutôt qu’un grand nombre ? Par conséquent, que lui meure pour sauver son peuple, et éviter à toute la nation de périr. Du reste… Il prétend être le Sauveur. Qu’il se sacrifie donc pour sauver le peuple, expose Caïphe, que sa haine froide et rusée rend particulièrement odieux.

– Mais, Caïphe ! Réfléchis ! Lui…

– J’ai parlé. L’Esprit du Seigneur est sur moi, le grand-prêtre. Malheur à qui ne respecte pas le Pontife d’Israël. Les foudres de Dieu soient sur lui ! Nous avons assez attendu, assez discuté ! J’ordonne et décrète que quiconque sait où se trouve le Nazaréen vienne dénoncer l’endroit, et anathème sur qui n’obéira pas à ma parole.

– Mais Hanne… objectent certains.

– Hanne m’a dit : “ Tout ce que tu feras sera saint. ” Levons la séance. Vendredi, entre tierce et sexte, soyons tous ici pour délibérer. J’ai dit tous, faites-le savoir aux absents. Et que soient convoqués tous les chefs de familles et de classes, toute l’élite d’Israël. Le Sanhédrin a parlé. Allez. »

Il se retire le premier, tandis que les autres prennent différentes directions et, en parlant à voix basse, sortent du Temple pour rentrer chez eux.

549.1

Si la noticia de la muerte de Lázaro había impresionado y agitado a Jerusalén y a buena parte de Judea, la noticia de su resurrección termina de producir impresión y penetrar en los lugares en que no había producido agitación la noticia de su muerte.

Quizás los pocos fariseos y escribas —o sea, los miembros del Sanedrín— presentes en la resurrección no hayan hablado de ella a la gente. Pero lo que es cierto es que los judíos sí lo han hecho, y la noticia se ha extendido en un abrir y cerrar de ojos; y, de casa a casa, de terraza a terraza, voces de mujeres la transmiten, mientras que, en la calle, el vulgo la difunde con un gran júbilo por el triunfo de Jesús y por Lázaro. La gente puebla de nuevo las calles, presurosa, de un lado para otro, creyendo llegar siempre antes a dar la noticia, pero quedando desilusionada, porque la noticia se sabe en Ofel y en Beceta y en Sión y en el Sixto; se sabe en las sinagogas, en los bazares, en el Templo y en el palacio de Herodes; se sabe en la Antonia, y desde la Antonia se difunde —o viceversa— hacia los puestos de guardia situados en las puertas; llena tanto los palacios como los tugurios: «El Rabí de Nazaret ha resucitado a Lázaro de Betania, que había muerto el día antes del viernes y que había sido sepultado antes del comienzo del sábado, y ha resucitado a la hora sexta de hoy». Las aclamaciones judías al Cristo y al Altísimo se entremezclan con los diferentes «¡Por Júpiter! ¡Por Pólux! ¡Por Libitina!» etc., etc. de los romanos.

549.2

A los únicos que no veo entre la gente que habla por las calles es a los del Sanedrín. No veo ni a uno de ellos, mientras que sí veo a Cusa, a Manahén salir de un espléndido palacio; y oigo que Cusa dice: «¡Grande! ¡Grande! He enviado inmediatamente la noticia a Juana. ¡Él el realmente Dios!»; y Manahén le responde: «Herodes, que ha venido de Jericó a presentar sus obsequios… a su amo, a Poncio Pilato, parece enloquecido en su palacio; Herodías, por su parte, está rabiosa y le insta para que ordene el arresto del Cristo. Ella tiembla por su poder; él, por los remordimientos. A Herodes le castañean los dientes mientras dice a los más fieles que le defiendan… de los espectros. Se ha embriagado para infundirse valor, y el vino le da vueltas en la cabeza presentándole fantasmas. Grita, diciendo que el Cristo ha resucitado también a Juan, el cual le grita de cerca las maldiciones de Dios. Yo he huido de esa Gehena. Me ha sido suficiente decirle: “Lázaro ha resucitado por obra de Jesús Nazareno. Ojo con tocarle, porque es Dios”. Mantengo en él ese miedo para que no ceda a los deseos homicidas de ella».

«Yo, sin embargo, tendré que ir allá… Debo ir. Pero he querido antes pasar a ver a Eliel y a Elcaná. Viven su propia vida, ¡pero siguen siendo voces influyentes en Israel! Y Juana está contenta de que los honre. Y yo…».

«Una buena protección para ti. Es verdad. Pero nunca como el amor del Maestro. Ese amor es la única protección que tiene va­lor…».

Cusa no replica. Piensa… Yo los pierdo de vista.

549.3

De Beceta viene presuroso José de Arimatea. Le paran. Se trata de un grupo de vecinos de la ciudad que no están seguros todavía de que se deba creer la noticia. Y se lo preguntan a él.

«Verdadera. Verdadera. Lázaro ha resucitado, e incluso está curado. Lo he visto con mis propios ojos».

«Pero entonces… ¡realmente es el Mesías!».

«Ésas son sus obras. Su vida es perfecta. Los tiempos son éstos. Satanás combate contra Él. Que cada uno concluya en su corazón lo que es el Nazareno» dice, con prudencia y al mismo tiempo con justicia, José. Saluda y se marcha.

Ellos intercambian sus opiniones y terminan por concluir: «Realmente es el Mesías».

549.4

Un grupo de legionarios habla. Dicen: «Si mañana puedo, voy a Betania. ¡Por Venus y Marte, mis dioses preferidos! Podré dar la vuelta al mundo, desde los desiertos ardientes hasta las heladas tierras germánicas, pero encontrarme donde resucite uno que ha muerto días antes no me sucederá nunca más. Quiero ver cómo es uno que vuelve de la muerte. Estará negro por las aguas de los ríos de ultratumba…».

«Si era virtuoso estará lívido, porque habrá bebido de las aguas cerúleas de los Campos Elíseos. Allí no está sólo el Estigio…».

«Nos dirá cómo son los prados de asfódelo del Hades… Voy yo también…».

«Si Poncio quiere…».

«¡Claro que quiere! Ha mandado inmediatamente un correo a Claudia para llamarla. A Claudia le gustan estas cosas. La he oído más de una vez conversar, con las otras y con sus libertos griegos, de alma y de inmortalidad».

«Claudia cree en el Nazareno. Para ella es mayor que ningún otro hombre».

«Sí. Pero para Valeria es más que hombre. Es Dios. Una especie de Júpiter y de Apolo, por poder y hermosura, dicen, y más sabio que Minerva. ¿Vosotros le habéis visto? Yo he venido con Poncio por primera vez aquí y no sé…».

«Creo que has llegado a tiempo para ver muchas cosas. Hace poco, Poncio gritaba como Estentor, diciendo: “Aquí hay que cambiar todo. Tienen que comprender que Roma manda y que ellos, todos, son siervos. Y cuanto más grandes sean, más siervos, porque son más peligrosos”. Creo que era por esa tablilla que le había llevado el criado de Anás…».

«Sí, claro, no quiere escucharlos… Y nos cambia a todos porque… no quiere amistades entre nosotros y ellos».

«¿Entre nosotros y ellos? ¡Ja! ¡Ja! ¡Ja! ¿Con esos narigudos que saben sólo de boquilla? Poncio digiere mal el demasiado cerdo que come. Todo lo más… la amistad es con alguna mujer que no desprecia el beso de bocas sin barba…», ríe uno maliciosamente.

«El hecho es que después de la agitación de los Tabernáculos ha pedido y obtenido el cambio de todos los soldados, y que nosotros tenemos que irnos…».

«Eso es verdad. Ya estaba anunciada en Cesarea la llegada de la galera que trae a Longinos y a su centuria. Suboficiales nuevos, soldados nuevos… y todo por esos cocodrilos del Templo. Yo estaba bien aquí».

«Mejor estaba yo en Brindis… Pero me acostumbraré» dice el que ha llegado hace poco a Palestina.

Se alejan también ellos.

549.5

Pasan miembros de la guardia del Templo, con tablillas enceradas. La gente los ve y dice: «El Sanedrín se reúne con carácter de urgencia. ¿Qué querrán hacer?».

Uno responde: «Vamos a subir al Templo y lo vemos…».

Se encaminan hacia la calle que va al Moria.

El Sol desaparece tras las casas de Sión y tras los montes occidentales. Se viene la noche, que pronto desaloja de curiosos las calles. Los que han subido al Templo bajan inquietos, porque habían sido alejados incluso de las puertas, donde se habían detenido para ver pasar a los miembros del Sanedrín.

549.6

El interior del Templo, vacío, desierto, envuelto en la luz de la Luna, parece inmenso. Los Ancianos se reúnen lentamente en la Sala del Sanedrín. Están todos, como para la condena de Jesús, pero no están los que entonces[1] hacían de escribanos. Sólo están los miembros del Sanedrín, parte en sus respectivos sitios, parte formando grupos junto a las puertas.

Entra Caifás con su cara y su cuerpo de sapo obeso y malo, y va a su sitio.

Empiezan inmediatamente a discutir sobre los hechos ocurridos, y tanto les apasiona la cosa, que pronto la sesión se anima mucho: dejan los sitiales y bajan al espacio vacío, y gesticulan y hablan alto.

Hay quien aconseja la calma, y que se ponderen bien las cosas antes de tomar decisiones.

Otros rebaten esa postura: «¿Pero no habéis oído a los que han venido aquí después de la hora nona? Si perdemos a los judíos más importantes, ¿de qué nos servirá acumular acusaciones? Cuanto más viva, menos seremos creídos si le acusamos».

«Este hecho no se puede negar. No se les puede decir a los muchos que estaban allí: “Habéis visto mal. Es una ficción. Estabais borrachos”. El muerto estaba muerto. Descompuesto. Deshecho. El muerto estaba colocado en el sepulcro cerrado. El sepulcro estaba bien tapiado. El muerto estaba desde días antes vendado y con los ungüentos. El muerto estaba atado. Y, a pesar de todo, ha salido de su sitio, ha venido él solo sin andar hasta la entrada. Y, una vez liberado, en su cuerpo no había muerte. Respiraba. No estaba descompuesto. Mientras que antes, cuando vivía, estaba llagado, y, ya muerto, estaba todo descompuesto».

«¿Habéis oído a los más influyentes judíos, a los que habíamos llevado allí para conquistárnoslos del todo para nosotros? Han venido a decirnos: “Para nosotros, es el Mesías”. ¡Casi todos han venido! ¡Y… bueno, el pueblo…!».

«¿Y a estos malditos romanos llenos de fantasías no los tenéis en cuenta? Para ellos es Júpiter Máximo. ¡Y si les da por esa idea…! Nos han dado a conocer sus historias y ha sido causa de maldición. ¡Maldición sobre quienes quisieron el helenismo en nosotros y por adulación nos profanaron con costumbres no nuestras! De todas formas, eso también enseña. Y hemos aprendido que enseguida el romano derriba y eleva con conjuras y golpes de estado. Pero, si alguno de estos locos se entusiasma con el Nazareno y le proclama César, y, por tanto, divino, ¿quién le toca un pelo después?».

«¡No, hombre! ¿Quién va a hacer eso, según tú? Ellos se burlan de Él y de nosotros. Por muy grande que sea lo que hace, para ellos sigue y seguirá siendo “un hebreo”, por tanto, un miserable. El miedo te hace desvariar, hijo de Anás».

«¿El miedo? ¿Has oído cómo ha respondido Poncio a la invitación de mi padre? Te digo que está alterado. Está alterado por este último hecho, y teme al Nazareno. ¡Pobres de nosotros! ¡Ese hombre ha venido para nuestra ruina!».

549.7

«¡Si al menos no hubiéramos ido allí y no hubiéramos ordenado casi que fueran los judíos más influyentes! Si Lázaro hubiera resucitado sin testigos…».

«¿Y en qué hubiera cambiado la cosa! ¡No hubiéramos podido hacerle desaparecer, ¿no?, para que la gente creyera que seguía muerto!».

«Eso no. Pero hubiéramos podido decir que había sido una falsa muerte; gente pagada para falsos testimonios siempre se encuentra».

«Pero ¿por qué tan nerviosos? ¡No veo el motivo! ¿Acaso ha hecho algo que incite contra el Sanedrín y el Pontificado? No. Se ha limitado a hacer un milagro».

«¡¿Se ha limitado?! Pero ¿desvarías o estás vendido a Él, Eleazar? ¿No ha incitado contra el Sanedrín y el Pontificado? ¿Y qué más querías que hiciera? La gente…».

«La gente puede decir lo que quiera, pero las cosas son como dice Eleazar. El Nazareno lo único que ha hecho ha sido un milagro».

«¡Ahí tenemos al otro que le defiende! ¡Ya no eres un justo, Nicodemo! ¡Ya no eres un justo! Esto es un acto contra nosotros. Contra nosotros, ¿comprendes? Ya nada convencerá a la masa. ¡Pobres de nosotros! Hoy algunos judíos se burlaban de mí. ¡Burlarse de mí! ¡De mí!».

«¡Calla, Doras! Tú eres sólo un hombre. ¡Es la idea la que sufre el daño! Nuestras leyes. ¡Nuestras prerrogativas!».

«Bien dices, Simón. Y hay que defenderlas».

«Sí, pero cómo?».

«¡Atacando, destruyendo las suyas!».

«Se dice pronto, Sadoq. ¿Cómo las destruyes, si tú no sabes por ti mismo hacer que reviva un mosquito? Aquí lo que se requeriría sería un milagro más grande que el suyo. Pero ninguno de nosotros puede hacerlo, porque…». El que está hablando no sabe el porqué.

José de Arimatea termina la frase: «Porque nosotros somos hombres, sólo hombres».

Se le echan encima preguntándole: «¿Y Él, entonces, quién es?».

El de Arimatea responde seguro: «Él es Dios. Si todavía lo hubiera dudado…».

«Pero no lo dudabas. Lo sabemos, José. Lo sabemos. ¡Dilo, hombre, di abiertamente que le estimas!».

549.8

«¿Qué hay de malo en que José le estime? Yo mismo le reconozco como el mayor Rabí de Israel».

«¡Tú! ¿Tú, Gamaliel, dices eso?».

«Lo digo. Y me honro de que Él… me destrone. Porque hasta ahora yo había conservado la tradición de los grandes rabíes, el último de los cuales fue Hil.lel, pero no sabía quién hubiera podido después de mí recoger la sabiduría de los siglos. Ahora me marcho contento, porque sé que la sabiduría no morirá, sino que, al contrario, se hará mayor, porque estará aumentada por la suya, en la que, sin duda, está presente el Espíritu de Dios».

«¿Pero qué estás diciendo, Gamaliel?».

«La verdad. No es tapándonos los ojos como podemos ignorar lo que somos. No somos más sabios porque el principio de la sabiduría es el temor de Dios, y nosotros somos pecadores sin temor de Dios. Si tuviéramos este temor, no oprimiríamos al justo, ni tendríamos la necia avidez de las riquezas de este mundo. Dios da y Dios quita; según los méritos y los deméritos. Y si Dios ahora nos quita lo que nos había dado, para dárselo a otros, bendito sea, porque santo es el Señor y santas son todas sus acciones».

«Pero estábamos hablando de milagros, y queríamos decir que ninguno de nosotros los puede hacer porque Satanás no está con nosotros».

«No. Porque Dios no está con nosotros. Moisés separó las aguas y abrió la roca. Josué detuvo el Sol. Elías resucitó al niño e hizo caer la lluvia. Pero con ellos estaba Dios. Os recuerdo[2] que seis son las cosas que Dios odia, y execra la séptima: los ojos soberbios, la lengua mentirosa, las manos que derraman sangre inocente, el corazón que trama planes malvados, los pies que corren rápidos hacia el mal, el falso testimonio que dice mentiras, y a aquel que introduce discordias entre los hermanos. Nosotros hacemos todas estas cosas. Digo “nosotros”, pero las hacéis sólo vosotros, porque yo me abstengo de gritar “hosanna” y de gritar “anatema”.

549.9

Yo espero».

«¡La señal! ¡Sí, tú esperas la señal! ¿Pero qué señal esperas de un pobre… desquiciado, si es que queremos ser máximamente indulgentes con Él?».

Gamaliel alza las manos y, con los brazos extendidos hacia delante, los ojos cerrados, la cabeza levemente inclinada, más hierático que nunca, dice lentamente y con voz lejana: «He invocado ansiosamente al Señor para que me indicara la verdad, y Él me ha iluminado las palabras de Jesús, hijo de Sirá. Éstas:[3] “El Creador de todas las cosas me habló y me dio sus órdenes, y Aquel que me creó descansó en mi Tabernáculo y me dijo: ‘Habita en Jacob, esté tu herencia en Israel, echa tus raíces entre mis elegidos’”… Y también me iluminó éstas, y las reconocí: “Venid a mí, vosotros, todos los que me anheláis, y saciaos con mis frutos, porque mi espíritu es más dulce que la miel y mi herencia lo es más que el panal. El recuerdo de mí perdurará en las generaciones a través de los siglos. Quienes me coman tendrán hambre de mí, quienes me beban tendrán sed de mí, quienes me escuchen no deberán avergonzarse, quienes trabajen para mí no pecarán, quienes me expliquen tendrán la vida eterna”. Y la luz de Dios aumentó en mi espíritu mientras mis ojos leían estas palabras: “Todas estas cosas contiene el libro de la Vida, el testamento del Altísimo, la doctrina de la Verdad… Dios prometió a David que haría nacer de él al Rey potentísimo, que ha de estar sentado eternamente en el trono de la gloria. Rebosa de sabiduría como el Pisón y el Tigris en el tiempo de los nuevos frutos; como el Éufrates rebosa de inteligencia y crece como el Jordán en el tiempo de la cosecha. Irradia la sabiduría como la luz… Él ha sido el primero en conocerla perfectamente”. ¡Esto es lo que me ha hecho ver Dios! Pero, ¿qué digo? No, la Sabiduría que está entre nosotros es demasiado grande para que nosotros la comprendamos y acojamos un pensamiento mayor que los mares, un consejo más profundo que el gran abismo. Y le oímos gritar: “Yo, como canal de aguas inmensas broté del Paraíso y dije: ‘Regaré mi jardín’, y mi canal se hizo río; y el río, mar. Cual aurora, irradio a todos mi doctrina, y la daré a conocer a los más lejanos. Entraré en los lugares más bajos, dirigiré mi mirada a los que duermen, iluminaré a los que esperan en el Señor. Y seguiré difundiendo mi doctrina como profecía y la dejaré a aquellos que buscan la sabiduría; no dejaré de anunciarla hasta el siglo santo. No he trabajado para mí sólo, sino para todos aquellos que buscan la verdad”. Esto me hizo leer Yeohveh, el Altísimo», y baja los brazos y alza la cabeza.

«¡¿Pero entonces para ti es el Mesías?! ¡Dilo!».

«No es el Mesías».

«¿No es? ¿Y entonces qué es para ti? Demonio, no; ángel, no; Mesías, no…».

«Es el que es».

«¡Tú deliras! ¿Es Dios? ¿Es Dios para ti ese demente?».

«Es el que es. Dios sabe lo que Él es. Nosotros vemos sus obras. Dios ve también sus pensamientos. Pero no es el Mesías, porque para nosotros Mesías quiere decir Rey. Él no es, no será rey. Pero es santo. Y sus obras son obras de santo. No podemos alzar la mano contra el inocente, si no es cometiendo pecado. Yo no doy mi consentimiento al pecado».

«¡Pero con esas palabras casi le declaras el Esperado!».

«Así le consideré; mientras duró la luz del Altísimo, le vi como tal. Luego… no manteniéndome ya la mano del Señor sobreelevado en su luz, me encontré siendo de nuevo… hombre, hombre de Israel, y las palabras ya no eran más que palabras a las que el hombre de Israel, yo, vosotros, los de antes de nosotros y —que Dios no lo permita— los que vendrán después de nosotros, dan el significado de su, de nuestro, pensamiento, no el significado que tienen en el Pensamiento eterno que las dictara a su siervo».

549.10

«Estamos hablando, divagando, perdiendo el tiempo. Mientras tanto, el pueblo se agita» dice Cananías con una voz que es un graznido.

«¡Así es! Lo que hay que hacer es decidir y actuar, para salvarnos y triunfar».

«Decís que Pilato no nos quiso auxiliar cuando le pedimos su ayuda contra el Nazareno. Pero si le informáramos… Habéis dicho antes que, si los soldados se exaltan, pueden proclamarle César… ¡Je! ¡Je! Buena idea. Vamos a exponer al Procónsul este peligro. Recibiremos honores como los reciben los fieles servidores de Roma, y… si interviene, nos veremos libres del Rabí. ¡Vamos! ¡Vamos! Tú, Eleazar de Anás, que tienes más amistad con él que los demás, sé nuestro guía» dice Elquías, riéndose con aspecto viperino.

Hay un poco de indecisión, pero luego un grupo de los más fanáticos sale para dirigirse hacia la Antonia. Se queda Caifás junto con los otros».

«¡A esta hora! No los recibirá» objeta uno.

«No, no, al contrario; es la mejor. Poncio está siempre de buen humor cuando ha comido y bebido como bebe y come un pagano…».

549.11

Los dejo allí discutiendo y se me representa la escena de la Antonia.

Pronto y sin dificultad se recorre el breve trayecto. Hay una luna tan límpida, que crea un fuerte contraste con la luz roja de las antorchas encendidas en el vestíbulo del palacio pretorial.

Eleazar logra que anuncien su llegada a Pilato. Los pasan a una sala grande y vacía, completamente vacía; hay sólo una pesada silla, de respaldo bajo, cubierta con un paño purpúreo, que resalta vivamente en la blancura completa de la sala. Están en grupo, un poco amedrentados, con frío, en pie sobre el mármol blanco del suelo. No viene nadie. El silencio es absoluto. Pero, de cuando en cuando, una música lejana rompe este silencio.

«Pilato está sentado a la mesa. Sin duda, con los amigos. Esta música la están tocando en el triclinio. Habrá danzas en honor de los invitados» dice Eleazar de Anás.

«¡Degenerados! Mañana me purificaré. Estas paredes rezuman lujuria» dice Elquías con expresión de repulsa.

«¿Por qué has venido, entonces? Tú mismo lo has propuesto» le replica Eleazar.

«Por el honor de Dios y el bien de la Patria sé hacer cualquier sacrificio. ¡Y éste es grande! Me había purificado por haberme acercado a Lázaro… y ahora… ¡Qué día más terrible hoy!…».

Pilato no viene. El tiempo pasa. Eleazar, que conoce este lugar, ve si puede abrir alguna puerta, pero están todas cerradas. El miedo se apodera de ellos. Reafloran historias terribles. Se arrepienten de haber ido allí. Se sienten ya perdidos.

549.12

Por fin, por el lado opuesto a aquel en que están ellos (están junto a la puerta por la que han entrado), o sea, cerca de la única silla de la sala, se abre una puerta y entra Pilato, vestido con cándidas vestiduras, cándido como la sala cándida. Entra hablando con unos convidados. Ríe. Se vuelve para ordenarle a un esclavo que tiene alzada la cortina que hay al otro lado de la puerta que eche esencias en un brasero y que traiga perfumes y aguas para las manos; y para ordenar que un esclavo lleve espejo y peines. De los hebreos ni se ocupa; es como si no estuvieran. Ellos rabian, pero no se atreven a hacer ningún gesto…

Entretanto, están bajando braseros, y esparcen las resinas encima de los fuegos y echan aguas perfumadas en las manos de los romanos. Un esclavo, con diestros movimientos, peina según la moda de los ricos romanos de la época. Y los hebreos rabian.

Los romanos se ríen y bromean unos con otros, mirando de vez en cuando al grupo que espera en el fondo de la sala. Uno de ellos dice algo a Pilato, que ni una vez se ha vuelto para mirar. Pero Pilato se encoge de hombros en señal de fastidio y da unas palmadas para llamar a un esclavo, al cual le ordena, en voz alta, que lleve dulces y haga pasar a las bailarinas. Los hebreos rabian de ira y de sentimiento de escándalo. ¡Pensar en un Elquías obligado a ver a las bailarinas! Su cara es todo un poema de sufrimiento y odio.

Llegan los esclavos con los dulces en preciosas copas. Detrás de ellos, las bailarinas, coronadas con flores y apenas cubiertas por unas telas tan ligeras que parecen velos. Sus carnes blanquísimas se transparentan tras los ligeros vestidos de color rosa y azul, cuando pasan por delante de los braseros encendidos y de las muchas antorchas puestas en el fondo de la sala. Los romanos admiran la gracia de los cuerpos y movimientos, y Pilato pide que se repita un paso de baile que le ha gustado más. Elquías —y sus compinches hacen lo mismo— se vuelve indignado hacia la pared para no ver a las bailarinas trasvolar como mariposas entre un ondeo descompuesto de vestidos.

Terminada la breve danza, Pilato pone en la mano de cada una de ellas una copa colmada de dulces y en cada copa echa con expresión de desinterés una pulsera, y les da el permiso de marcharse.

549.13

Por fin, se digna volverse para mirar a los hebreos, y dice a los amigos con voz cansina: «Y ahora… tengo que pasar del sueño a la realidad… de la poesía a la… hipocresía… de la gracia a las repelentes cosas de la vida. ¡Miserias de ser Procónsul!… ¡Adiós, amigos, y tened compasión de mí!».

Ya está solo. Se acerca lentamente a los hebreos. Se sienta. Se observa las bien cuidadas manos, y descubre alguna deficiencia bajo una uña. Se ocupa y se preocupa de ello sacando de entre sus vestiduras una fina y áurea barrita y poniendo remedio al gran daño de una uña imperfecta…

Luego —bondad suya— vuelve lentamente la cabeza. Sonríe burlón al ver a los hebreos todavía servilmente inclinados, y dice: «¡Eh, vosotros! ¡Aquí! Y sed breves. No tengo tiempo que perder en cosas sin valor».

Los hebreos, conservando su gesto servil, se acercan, hasta que un: «¡Basta! No demasiado cerca» los clava en el suelo. «¡Hablad! Y enderezaos, que estar inclinados hacia el suelo es sólo propio de animales», y se ríe. Los hebreos, al recibir la burla, se enderezan engallados.

«¿Entonces? ¡Hablad! Os habéis empeñado en venir… bueno, pues hablad ahora que estáis aquí».

«Queremos decirte… Nos consta… Nosotros somos siervos fieles de Roma…».

«¡Ja! ¡Ja! ¡Ja! ¡Siervos fieles de Roma! Me encargaré de que lo sepa el divino César. Se pondrá contento. Sí, se pondrá contento. ¡Hablad payasos! ¡Y rápidamente!».

Los miembros del Sanedrín están que rabian, pero no reaccionan.

549.14

Elquías toma la palabra por todos: «Debes saber, oh Poncio, que hoy en Betania ha sido resucitado un hombre…».

«Ya lo sé. ¿Para decirme esto habéis venido? Lo sé desde hace muchas horas. ¡Dichoso él, que ya sabe lo que es morir y lo que es el otro mundo! ¿Y qué puedo hacer yo, si Lázaro de Teófilo ha resucitado? ¿Me ha traído, acaso, un mensaje del Hades?». Se muestra irónico.

«No. Pero su resurrección es un peligro…».

«¿Para él? ¡Claro! Peligro de tener que morir otra vez. Operación poco agradable. ¿Y bien? ¿Qué puedo hacer yo? ¿Soy Júpiter, aca­so?».

«Peligro no para Lázaro, sino para César».

«¿Para?… ¡Dómine! ¡Quizás es que he bebido! ¿Habéis dicho: para César? ¿Y en qué puede perjudicar Lázaro a César? ¿Acaso teméis que el hedor de su sepulcro pueda corromper el aire que respira el Emperador? ¡Tranquilizaos! ¡Demasiada distancia!».

«No es eso. Es que Lázaro con su resurrección puede causar la caída del Emperador».

«¿La caída del Emperador? ¡Ja! ¡Ja! ¡Ja! Esta estupidez si que es grande, ¡más grande que el mundo! Pero entonces el borracho no soy yo, sino vosotros. Quizás el susto os ha trastornado la mente. Ver resucitar… Creo, creo que puede trastornar. Marchaos, marchaos a dormir. Un buen descanso. Y un baño caliente, muy caliente. Saludable contra los delirios».

«No estamos delirando, Poncio. Te decimos que, si no tomas las medidas oportunas, pasarás horas tristes. El usurpador, ciertamente, arremeterá contra ti, si es que no te mata incluso. Dentro de poco, el Nazareno será proclamado rey, rey del mundo, ¿comprendes? Tus propios legionarios lo harán. Ellos están seducidos por el Nazareno, y el hecho de hoy los ha exaltado. ¿Qué siervo eres de Roma, si no te preocupas de su paz? ¿Es que quieres ver al Imperio agitado y dividido por causa de tu pasivismo? ¿Quieres ver vencida a Roma y abatidas las enseñas, asesinado el Emperador, todo destruido…?».

«¡Silencio! Hablo yo. Y os digo: ¡sois unos dementes! Más aún. Sois unos embusteros, unos sinvergüenzas. Mereceríais la muerte. Salid de aquí, ruines siervos de vuestro interés, de vuestro odio, de vuestra bajeza.. Los siervos sois vosotros, no yo. Yo soy ciudadano romano, y los ciudadanos romanos no son siervos de nadie. Yo soy el funcionario imperial y trabajo para los bienes patrios. Vosotros… sois los que estáis subyugados. Vosotros… vosotros sois los dominados. Vosotros… vosotros sois los galeotes amarrados a los bancos y rabiáis inútilmente. El látigo del patrón está sobre vosotros. ¡El Nazareno!… ¿Querríais que matara al Nazareno? ¿Querríais que le recluyera? ¡Por Júpiter! Si por salvar a Roma y al divino Emperador tuviera que apresar a los sujetos peligrosos, o matarlos aquí donde gobierno, al Nazareno y a sus seguidores debería dejarlos libres y vivos, sólo a ellos. Marchaos. Desalojad y no volváis nunca más a mi presencia. ¡Turbulentos! ¡Instigadores de rebelión! ¡Ladrones y favorecedores de ladrones! No ignoro ninguno de vuestros manejos. Sabedlo. Y sabed también que armas nuevas y nuevos legionarios han servido para descubrir vuestras trampas y vuestros instrumentos. Gritáis por los impuestos romanos. Pero, ¿cuánto os han costado Melquías de Galaad, Jonás de Escitópolis, Felipe de Soko, Juan de Betavén, José de Ramaot, y todos los demás que pronto serán apresados? Y no vayáis hacia las grutas del valle, porque allí hay más legionarios que piedras, y la ley y la galera son iguales para todos. ¡Para todos! ¿Comprendéis? Para todos. Y espero vivir lo suficiente como para veros a todos encadenados, esclavos entre los esclavos bajo el talón de Roma. ¡Salid! Id —tú también, Eleazar de Anás, a quien no deseo volver a ver en mi casa— y referid que el tiempo de la clemencia ha terminado, y que yo soy el Procónsul y vosotros los súbditos. Los súbditos. Y yo mando. En nombre de Roma. ¡Salid! ¡Serpientes nocturnas! ¡Vampiros! ¿Y el Nazareno os quiere redimir? ¡Si Él fuera Dios, debería fulminaros! Y desaparecería del mundo la mancha más asquerosa. ¡Fuera! Y no os atreváis a tramar conjuras, o conoceréis la espada y el flagelo».

Se levanta y se va dando un portazo delante de los palidecidos y amedrentados miembros del Sanedrín, que no tienen tiempo de reaccionar, porque entra un grupo armado que los echa fuera de la sala y del palacio como si fueran perros.

549.15

Regresan al aula del Sanedrín. Refieren lo sucedido. La agitación es máxima. La noticia del arresto de muchos bandidos y de las batidas en las grutas para atrapar a los otros turba fuertemente a todos los que están todavía allí (porque muchos, cansados de esperar, se han marchado).

«Pues, a pesar de todo, no podemos dejar que viva» gritan unos sacerdotes.

«No podemos dejar que actúe. Él actúa; nosotros, no. Y día tras día perdemos terreno. Si le dejamos libre todavía, seguirá haciendo milagros y todos creerán en Él. Y los romanos terminarán por arremeter contra nosotros y destruirnos completamente. Poncio se expresa de esta forma, pero si la muchedumbre le aclamara rey, ¡ah!, entonces Poncio tendría el deber de castigarnos a todos. No debemos permitirlo» grita Sadoq.

«De acuerdo. Pero ¿cómo? La vía… legal romana ha fracasado. Poncio no abriga dudas respecto al Nazareno. La vía… legal nuestra es impracticable. No peca…» objeta uno.

«Se inventa la culpa, si no la hay» insinúa Caifás.

«¡Pero es pecado hacer esto! ¡Jurar lo falso! ¡Hacer condenar a un inocente! ¡Es… demasiado!…» dice con horror la mayoría. «Es un delito, porque significará la muerte para Él».

«¿Y bien? ¿Eso os asusta? Sois unos necios y no sabéis de nada. Después de lo que ha sucedido, Jesús debe morir. ¿No os dais cuenta todos vosotros que es mejor para nosotros que muera un hombre en vez de que mueran muchos? Muera Él, pues, para salvar a su pueblo, para que no perezca toda nuestra nación. Además… Él mismo dice que es el Salvador. Por tanto, que se sacrifique por salvar a todos» dice Caifás, con un odio frío y astuto que causa repugnancia.

«¡Pero Caifás! ¡Reflexiona! Él…».

«He dicho. El Espíritu del Señor está sobre mí, Sumo Sacerdote. ¡Ay de aquel que no respete al Pontífice de Israel! ¡Los rayos de Dios se abatirán sobre él! ¡Basta ya de espera! ¡Basta ya de angustias! Ordeno y decreto que quien sepa —quienquiera que sea— dónde se encuentra el Nazareno, venga y denuncie su paradero, y maldición sobre el que no obedezca a mis palabras».

«Pero Anás…» objetan algunos.

«Anás me ha dicho: “Todo lo que hagas será santo”. Levantamos la sesión. El viernes, entre las horas tercera y sexta, todos aquí para deliberar. Todos, he dicho. Comunicádselo a los ausentes. Y que sean convocados todos los jefes de las familias y de las clases, todo lo mejor de Israel. El Sanedrín ha hablado. Marchaos».

Y él es el primero en retirarse por donde ha venido, mientras que los otros se marchan por otras partes y, hablando en tono moderado, salen del Templo en dirección a sus casas.


Notes

  1. y faisaient office de greffiers : Maria Valtorta avait déjà écrit, en mars 1945, l’épisode de la condamnation du Christ, que l’on trouvera au chapitre 604.
  2. nous imposer l’hellénisme, comme le relatent 1 M 1, 10-15 ; 2 M 4, 7-20 ; 6, 1-11. Il est encore fait mention de l’hellénisme en 84.6 – 132.2 – 272.3 – 283.6 – 356.4 – 596.14.
  3. Je vous rappelle ce qui est dit en Pr 6, 16-19.
  4. ces paroles se trouvent en Si 24, 8.18-26.28-32.

Notas

  1. entonces, porque MV había escrito ya el episodio de la condena, que será recogido después.
  2. Os recuerdo, como está escrito en Proverbios 6, 16-19.
  3. Éstas, es decir, las palabras que se leen en Eclesiástico 24, 8.18-26.28-32.