Gli Scritti di Maria Valtorta

255. Mauvaise humeur des apôtres.

255. Malumori degli apostoli.

255.1

Ils sont de nouveau sur la route, en direction de l’est, vers la campagne.

Les apôtres et les deux disciples sont maintenant avec Marie, femme de Cléophas, et Suzanne, à quelques mètres de Jésus qui marche avec sa Mère et les deux sœurs de Lazare. Jésus parle sans arrêt. Les apôtres, eux, se taisent. Ils semblent fatigués ou découragés. Ils ne sont même pas attirés par la beauté de la campagne qui est vraiment splendide : ses légères ondulations sont jetées sur la plaine comme autant de coussins verts sous les pieds d’un roi géant, ses collines s’élèvent de quelques mètres, çà et là, en guise de prélude aux chaînes du Carmel et de Samarie. Tant dans la plaine, qui domine en ces parages, que sur les petites collines et les ondulations, il y a toute une floraison de plantes et une odeur de fruits qui arrivent à maturité. Ce doit être un endroit bien irrigué malgré sa situation et la saison, car il y a trop de fleurs pour qu’il n’y ait pas beaucoup d’eau. Je comprends maintenant pourquoi la plaine de Saron est tant de fois nommée avec enthousiasme dans l’Ecriture sainte. Mais les apôtres ne partagent pas du tout cet enthousiasme. Ils marchent, un peu maussades, seuls à être de mauvaise humeur en cette journée sereine et dans cette contrée riante.

La route consulaire, en très bon état, coupe de son ruban blanc cette campagne très fertile. A cette heure encore matinale, on rencontre fréquemment des paysans avec des chargements de denrées, ou des voyageurs qui se dirigent vers Césarée. L’un d’eux, avec une file d’ânes chargés de sacs, rejoint les apôtres et les force à s’écarter pour laisser place à sa caravane. Il demande avec arrogance :

« Kison, c’est ici ?

– Plus en arrière » répond sèchement Thomas ; et il bougonne entre ses dents : « Espèce de rustre !

– C’est un samaritain, c’est tout dire ! » répond Philippe.

255.2

Ils retombent dans le silence. Après quelques mètres, Pierre dit, comme s’il terminait un discours intérieur :

« Pour ce que cela a servi ! C’était bien la peine de faire tant de chemin !

– Mais, oui ! Pourquoi sommes-nous allés ensuite à Césarée, puisqu’il n’y a pas dit le moindre mot ? Je croyais qu’il voulait faire quelque miracle étonnant pour convaincre les romains. Au contraire… dit Jacques, fils de Zébédée.

– Il nous a fait tourner en dérision et c’est tout », ajoute Thomas.

Et Judas renchérit :

« Il nous a fait souffrir. Les offenses lui plaisent, à lui, et il croit qu’elles nous plaisent, à nous aussi.

– En réalité, celle qui a souffert en cette circonstance, c’est Marie, fille de Théophile », intervient paisiblement Simon le Zélote.

Judas s’emporte :

« Marie ! Marie ! Est-elle devenue le centre de l’univers ? Il n’y a qu’elle qui souffre, il n’y a qu’elle d’héroïque, il n’y a qu’elle qu’il faut former ! C’est à désirer être voleur et homicide pour devenir ensuite l’objet de tant d’égards !

– A vrai dire, la dernière fois que nous sommes venus à Césarée, et qu’il a fait un miracle et évangélisé, nous l’avons affligé par notre mécontentement parce qu’il l’avait fait » confesse le cousin du Seigneur.

Jean intervient sérieusement :

« Nous ne savons pas ce que nous voulons… S’il agit d’une façon, nous bougonnons, s’il fait le contraire, nous bougonnons aussi. Nous sommes pleins de défauts.

– Ah ! Voilà l’autre sage qui parle ! Il est certain qu’on ne fait rien de bon depuis longtemps.

– Rien, Judas ? Mais cette grecque, et Hermastée, Abel, Marie, ou encore…

– Ce n’est pas avec ces nullités qu’il fondera le Royaume, ré­plique Judas, obsédé par l’idée d’un triomphe terrestre.

– Judas, je te prie de ne pas juger les œuvres de mon Frère. C’est une prétention ridicule : celle d’un enfant qui veut juger son maître, pour ne pas dire : une nullité qui veut tout dominer, dit Jude qui, s’il a le même nom[1], a pourtant une invincible antipathie pour son homonyme.

– Je te remercie de t’être borné à me traiter d’enfant. Vraiment, après avoir vécu si longtemps au Temple, je croyais qu’on m’accorderait au moins la majorité, répond Judas d’un ton sarcastique.

255.3

– Ah ! Que ces disputes sont désagréables ! Soupire André.

– En effet ! » observe Matthieu. « Au lieu de nous unir, plus nous vivons ensemble, plus nous nous séparons. Et dire qu’à Sycaminon il a déclaré qu’il nous faut être unis au troupeau ! Comment le serons-nous, si entre pasteurs nous ne le sommes pas ?

– Alors, on ne doit pas parler ? On ne doit jamais dire sa pensée ? Nous ne sommes pas des esclaves, je crois.

– Non, Judas » réplique calmement Simon le Zélote. « Nous ne sommes pas esclaves, mais nous sommes indignes de le suivre parce que nous ne le comprenons pas.

– Moi, je le comprends très bien.

– Non, tu ne le comprends pas. Et, comme toi, tous ceux qui le critiquent ne le comprennent pas, plus ou moins. Comprendre, c’est obéir sans discuter parce que l’on est persuadé de la sainteté de celui qui guide, ajoute Simon le Zélote.

– Ah ! Mais tu fais allusion à l’intelligence de sa sainteté ! Moi, je parlais de ses paroles. Sa sainteté est indiscutée et indiscu­table, se hâte de dire Judas.

– peux-tu séparer l’une de l’autre ? Un saint possédera toujours la sagesse, et ses paroles seront sages.

– C’est vrai. Mais il fait des actes nuisibles. Certainement par excès de sainteté, je l’accorde. Mais le monde n’est pas saint, et Jésus se crée des ennuis.

255.4

Par exemple ce philistin et cette grecque, crois-tu qu’ils nous soient utiles ?

– Eh bien, si je dois nuire, je me retire. J’étais venu avec l’idée de l’honorer et de faire quelque chose de juste, dit Hermastée, blessé.

– Tu le peinerais de partir pour cette raison, lui répond Jacques, fils d’Alphée.

– Je lui laisserai croire que j’ai changé d’idée. Puis je le saluerai et… je m’en irai. »

Pierre s’emporte :

« Non, vraiment ! Toi, tu ne t’en vas pas ! Il n’est pas juste qu’à cause de la nervosité d’un autre, le Maître perde un bon disciple.

– Mais s’il veut s’en aller pour si peu, c’est le signe qu’il n’est pas sûr de sa volonté. Laisse-le donc partir » répond Judas.

Pierre perd patience :

« Quand il m’a donné Marziam, je lui ai promis de devenir paternel avec tout le monde, et ça me déplaît de manquer à ma promesse. Mais tu m’y obliges. Hermastée est ici, et il y restera. Tu sais ce que je dois te dire ? C’est toi qui troubles la volonté des autres et les rends indécis, tu es une cause de mésentente et de désordre. Voilà ce que tu es ! Et tu peux en avoir honte !

– Pour qui te prends-tu ? Pour le protecteur des…

– Parfaitement ! Tu as raison. Je sais ce que tu veux dire. Protecteur de la femme voilée, protecteur de Jean d’En-Dor, protecteur d’Hermastée, protecteur de cette esclave, protecteur de tous les autres que Jésus a trouvés et qui ne sont pas de magnifiques exemplaires des paons du Temple, ceux qui sont fabriqués avec le mortier sacré et les toiles d’araignées du Temple, les mèches malodorantes des lumières du Temple, ceux qui sont comme toi, en somme, pour rendre plus claire la parabole. Car si le Temple est beaucoup, le Maître – à moins que je ne sois devenu un imbécile – est plus grand que le Temple, et c’est à lui que tu manques… »

255.5

Il crie si fort que le Maître s’arrête, se retourne et s’apprête à quitter les femmes pour revenir en arrière.

« Il a entendu ! Il va avoir de la peine ! S’exclame l’apôtre Jean.

– Non, Maître. Ne viens pas. Nous discutions… pour tromper l’ennui de la route » se hâte de dire Thomas.

Mais Jésus reste arrêté de façon qu’ils le rejoignent.

« De quoi discutiez-vous donc ? Encore une fois dois-je vous dire que les femmes vous sont supérieures ? »

Ce doux reproche touche tous les cœurs. Ils baissent la tête et se taisent.

« mes amis, mes amis ! Ne soyez pas un objet de scandale pour ceux qui naissent seulement maintenant à la lumière ! Ne savez-vous pas qu’une imperfection en vous nuit davantage à la rédemption d’un païen ou d’un pécheur que toutes les erreurs du paganisme ? »

Personne ne répond, car ils ne savent que dire pour se justifier ou pour ne pas accuser.

255.6

le char des sœurs de Lazare est arrêté près d’un pont, sur un torrent à sec… sans doute depuis peu. Les deux chevaux paissent l’herbe drue des rives du torrent, couvertes encore d’un épais tapis vert. Le serviteur de Marthe et un autre, peut-être le conducteur, sont sur la grève alors que les femmes sont enfermées dans le char couvert d’une lourde capote faite de peaux tannées qui descendent comme d’épais rideaux jusqu’au plancher du char. Les femmes disciples se hâtent vers lui et le serviteur qui les voit le premier avertit la nourrice, pendant que le cocher se dépêche d’atteler les chevaux.

Entre-temps, le serviteur court vers ses maîtresses et s’incline jusqu’à terre. La vieille nourrice, une belle femme au teint olivâtre mais agréable, descend lestement et se dirige vers ses maîtresses. Mais Marie de Magdala lui dit quelque chose et elle s’avance tout de suite vers la Vierge en disant :

« Pardonne-moi… Mais la joie de la rencontrer est si grande que je ne vois qu’elle. Viens, femme bénie, le soleil est brûlant, et dans le char on est à l’ombre. »

Elles y montent toutes en attendant les hommes, restés très en arrière. Pendant qu’elles attendent et pendant que Syntica, revêtue de l’habit que Marie-Madeleine portait la veille, baise les pieds de ses maîtresses – comme elle s’obstine à les appeler, bien qu’à leur avis, disent-elles, elle ne soit ni servante ni esclave mais seulement une invitée reçue au nom de Jésus –, la Vierge montre le précieux paquet de pourpre, et demande comment on peut filer cette masse soyeuse qui refuse l’humidité et le tordage.

« Ce n’est pas ainsi qu’on l’emploie, Femme. Il faut la réduire en poudre, et on l’utilise comme n’importe quelle autre teinture. C’est la bave d’un coquillage, ce n’est pas un cheveu ni un poil. Vois-tu comme elle est friable maintenant qu’elle est sèche ? Tu la réduis en fine poudre, tu la tamises pour qu’il ne reste pas de longs filaments qui tacheraient le fil ou l’étoffe. Le fil se teint mieux en écheveau. Quand tu es sûre que tout est réduit en poudre, comme on fait avec la cochenille, le safran ou la poudre d’indigo, ou d’autres écorces, racines ou fruits, on peut s’en servir. On fixe la teinte avec du vinaigre fort au dernier rinçage.

– Merci, Noémi. Je ferai comme tu me l’indiques. J’ai déjà brodé avec des fils couleur de pourpre, mais on me les avait donnés déjà prêts à l’usage…

255.7

Voici Jésus qui arrive. C’est le moment de nous saluer, mes filles. Je vous bénis toutes au nom du Seigneur. Allez en paix, et apportez paix et joie à Lazare. Adieu, Marie. Souviens-toi que c’est sur ma poitrine que tu as versé tes premières larmes de bonheur. Je suis donc pour toi une mère, parce qu’un enfant verse ses premières larmes sur la poitrine de sa maman. Je suis pour toi une mère, et je le resterai toujours. Ce qu’il peut te coûter de dire à la plus douce des sœurs, à la plus aimante des nourrices, viens me le dire, à moi. Je te comprendrai toujours. Ce que tu n’oserais dire à mon Jésus, sous prétexte que c’est trop pétri d’une humanité qu’il ne veut pas en toi, viens me le dire, à moi. Je serai toujours indulgente envers toi. Et si, ensuite, tu veux aussi me faire part de tes triomphes – mais ceux-ci, je préfère que tu les lui présentes à lui, comme des fleurs parfumées, parce que c’est lui, ton Sauveur, et pas moi –, je me réjouirai avec toi.

Adieu, Marthe. Tu repars heureuse désormais, et tu resteras dans ce bonheur surnaturel. Tu n’as donc besoin que de progresser dans la justice au milieu de la paix que plus rien ne trouble en toi. Fais-le pour l’amour de Jésus qui t’a aimée au point d’aimer celle que tu aimes complètement.

Adieu, Noémi. Pars avec ton trésor retrouvé. Comme tu la nourrissais de ton lait, nourris-toi maintenant des paroles que Marthe et elle te diront, et arrive à voir en mon Fils beaucoup plus que l’exorciste qui délivre les cœurs du Mal.

Adieu, Syntica, fleur de la Grèce, qui as su voir par toi seule qu’il y a quelque chose de plus que la chair. Maintenant fleuris en Dieu, et sois la première des fleurs nouvelles de la Grèce du Christ.

Je suis très heureuse de vous laisser ainsi unies. Je vous bénis avec amour. »

Le bruit de pas est désormais tout proche. Elles lèvent la capote et voient que Jésus est à deux mètres à peine du char. Elles descendent sous le soleil brûlant qui embrase la route.

Marie de Magdala s’agenouille aux pieds de Jésus en disant :

« Je te remercie, de tout. Et aussi beaucoup de m’avoir fait faire ce voyage. Toi seule as la sagesse. Maintenant, je pars dépouillée des restes de la Marie d’autrefois. Bénis-moi, Seigneur, pour me fortifier toujours plus.

– Oui, je te bénis. Profite de la présence des frères et avec eux forme-toi toujours plus en moi. Adieu, Marie. Adieu, Marthe. Tu diras à Lazare que je le bénis. Je vous confie cette femme. Je ne vous la donne pas. Elle est ma disciple, mais je veux que vous lui donniez un minimum de possibilités de comprendre ma doctrine. Puis je viendrai. Noémi, je te bénis, et vous deux aussi. »

Marthe et Marie ont les larmes aux yeux. Simon le Zélote les salue en particulier, et leur remet un mot pour son serviteur. Les autres les saluent ensemble. Puis le char se met en mouvement.

255.8

« Et maintenant allons chercher de l’ombre. Que Dieu les accompagne… Tu regrettes tant leur départ, Marie ? demande-t-il à Marie, femme d’Alphée, qui pleure silencieusement.

– Oui. Elles étaient très bonnes…

– Nous les retrouverons bientôt, et plus nombreuses. Tu auras beaucoup de sœurs… ou de filles, si tu préfères. C’est tout de l’amour, tant le maternel que le fraternel », lui dit Jésus pour la réconforter.

– Pourvu que cela ne lui crée pas d’ennuis… dit Judas.

– Des ennuis, de s’aimer ?

– Non. Des ennuis d’avoir des personnes d’autres races et d’autres provenances.

– Tu veux parler de Syntica ?

– Oui, Maître. En fin de compte, c’était la propriété du romain et c’est mal de se l’approprier. Cela le disposera mal à notre égard et nous nous mettrons à dos Ponce Pilate et ses rigueurs.

– Mais que veux-tu que cela lui fasse, à Pilate, que quelqu’un qui dépend de lui perde une esclave ? » dit Pierre. « Il sait ce que vaut celui-là ! Et s’il est tant soit peu honnête – comme on dit qu’il l’est, en famille du moins –, il reconnaîtra que cette femme a bien fait de s’enfuir. D’ailleurs, s’il est malhonnête, il dira : “ C’est bien fait ! Comme cela, c’est peut-être moi qui vais la trouver ! ” Les gens malhonnêtes ne sont pas sensibles aux douleurs d’autrui. Et puis… Ah, pauvre Ponce ! Avec tous les ennuis que nous lui causons, il a bien autre chose à faire que de perdre du temps en raison des plaintes d’un individu qui laisse échapper une esclave ! ».

Plusieurs lui donnent raison en se moquant du romain lu­brique.

255.9

Mais Jésus porte la question sur un plan plus élevé :

« Judas, tu connais le Deutéronome ?

– Bien sûr, Maître. Et je n’hésite pas à dire : comme il y en a peu.

– Comment le considères-tu ?

– Comme le porte-parole de Dieu.

– Porte-parole : donc qui répète la parole de Dieu ?

– Exactement.

– Tu as bien jugé. Mais alors pourquoi ne juges-tu pas bien de faire ce qu’il commande ?

– Je n’ai jamais dit cela. Au contraire ! Je trouve que c’est justement nous qui le négligeons trop en suivant la nouvelle Loi.

– La nouvelle Loi est le fruit de l’ancienne, ou plutôt c’est la perfection atteinte par l’arbre de la foi. Mais aucun de nous ne la néglige, pour autant que je sache, car je suis, moi, le premier à la respecter et à empêcher que les autres la négligent. »

Jésus dit cela sur un ton très tranchant.

Il reprend :

« Le Deutéronome est intouchable. Même quand mon Royaume triomphera, et, avec mon Royaume, la nouvelle Loi avec ses nouveaux codes et paragraphes, il sera toujours appliqué aux nouveaux préceptes, tout comme les pierres de taille des anciennes constructions servent aux nouvelles parce que ce sont des pierres parfaites qui font de solides murailles. Mais mon Royaume n’est pas encore là et, en fidèle israélite, je n’offense pas ni ne néglige le livre mosaïque. C’est la base de ma façon d’agir et de mon enseignement. C’est sur la base de l’Homme et du Maître que le Fils du Père fait reposer la céleste construction de sa Nature et de sa Sagesse.

Dans le Deutéronome, il est dit[2] : “ Tu ne remettras pas à son maître un esclave qui s’est réfugié auprès de toi. Il demeurera avec toi à l’endroit qu’il jugera bon, il sera en paix dans une de tes cités et tu ne l’affligeras pas. ” Cela s’applique au cas où quelqu’un est contraint de fuir un esclavage inhumain. Dans mon cas, dans celui de Syntica, il s’agit d’une fuite, non pas vers une liberté limitée, mais vers la liberté illimitée du Fils de Dieu. Et tu veux que sur cette alouette, qui a échappé au filet des chasseurs, je jette de nouveau le filet pour la rendre à sa prison, pour lui enlever jusqu’à l’espoir après la liberté ? Non, jamais ! Je bénis Dieu de ce que, tout comme notre voyage à En-Dor a amené ce fils au Père, le voyage à Césarée m’ait amené cette jeune fille pour que je la conduise au Père. A Sycaminon, je vous ai parlé de la puissance de la foi. Aujourd’hui, je vous parlerai de la lumière de l’espérance. Mais pour l’instant, arrêtons-nous dans ce verger touffu pour manger et nous reposer, car le soleil est brûlant comme si l’enfer était ouvert. »

255.1

E di nuovo in cammino, piegando a oriente, diretti verso la campagna.

Ora gli apostoli e i due discepoli sono con Maria Cleofe e Susanna dietro di qualche metro a Gesù, che è con sua Madre e le due sorelle di Lazzaro. Gesù parla fitto fitto. Gli apostoli invece non parlano. Sembrano stanchi o sconfortati. Non li attira neppure la bellezza della campagna che è veramente splendida, nelle sue lievi ondulazioni gettate sulla pianura come tanti cuscini verdi sotto i piedi di un re gigante, coi suoi colli di pochi metri messi qua e là a preludere le catene del Carmelo e della Samaria. Sia nel piano, che è il sovrano del luogo, sia sulle decorazioni di questi piccoli colli e onde di terra, è tutto un fiorire di erbe e un maturare di frutta. Deve essere un luogo irriguo nonostante la regione e la stagione, perché è troppo florido per essere senza dovizia d’acque. Comprendo adesso perché la pianura di Saron sia tante volte nominata con entusiasmo nella sacra Scrittura. Ma questo entusiasmo non è per nulla condiviso dagli apostoli, che procedono come un poco imbronciati, unici che abbiano dei bronci in questa giornata serena e in questa plaga ridente.

La strada consolare, molto ben tenuta, taglia col suo nastro bianco questa campagna fertilissima e, data l’ora mattutina, ancora è facile incontrare contadini carichi di derrate, oppure viaggiatori diretti a Cesarea. Uno, che raggiunge con una fila di asini carichi di sacchi gli apostoli e li costringe a scansarsi per fare posto alla carovana asinina, chiede con arroganza: «Il Kison è qui?».

«Più indietro», risponde secco Tommaso e brontola fra i denti: «Pezzo di tanghero!».

«È un samaritano, e basta questo a dire tutto!», risponde Filippo.

255.2

Ricadono nel silenzio. Dopo qualche metro, così, come terminando un interno discorso, Pietro dice: «Per quello che è giovato! Valeva la pena di fare tanta strada?».

«Ma già! Perché poi siamo andati a Cesarea se non ha detto una parola? Io credevo volesse fare qualche stupefacente miracolo per persuadere i romani. Invece…», dice Giacomo di Zebedeo.

«Ci ha portati alla berlina e basta», commenta Tommaso.

E l’Iscariota rincara: «E ci ha fatto soffrire. Ma a Lui piacciono le offese e crede che piacciano a noi pure».

«Veramente chi ha sofferto in questo caso è Maria di Teofilo», osserva pacato lo Zelote.

«Maria! Maria! È diventata il centro dell’universo Maria?

Non soffre che lei, non è eroica che lei, non è da formarsi che lei. Se sapevo, divenivo ladrone e omicida per essere poi oggetto di tante premure», scatta l’Iscariota.

«Veramente, l’altra volta che venimmo a Cesarea e Lui fece miracolo ed evangelizzò, noi lo affliggemmo dei nostri malcontenti per averlo fatto», osserva il cugino del Signore.

«È che noi non sappiamo ciò che vogliamo… Fa così e brontoliamo, fa l’opposto e brontoliamo. Siamo difettosi», dice serio Giovanni.

«Oh! ecco l’altro sapiente che parla! Certo è che non si fa nulla di buono da tempo».

«Nulla, Giuda? Ma quella greca, ma Ermasteo, ma Abele, ma Maria, ma…».

«Non è con queste nullità che Egli fonderà il Regno», ribatte l’Iscariota, ossessionato dall’idea di un trionfo terreno.

«Giuda, ti prego di non giudicare le opere di mio Fratello. È una pretesa ridicola. Un bambino che vuole giudicare il maestro, per non dire: una nullità che vuole mettersi in alto», dice il Taddeo che, se ha in comune il nome, ha però una invincibile antipatia per il suo omonimo.

«Ti ringrazio di esserti limitato a dirmi bambino. Veramente, dopo avere tanto vissuto nel Tempio, credevo di essere giudicato almeno maggiorenne», risponde sarcastico l’Iscariota.

255.3

«Oh! come sono pesanti queste dispute!», sospira Andrea.

«Davvero! Invece di fonderci, più si vive insieme, ci si separa. E pensare che a Sicaminom Egli ha detto che noi bisogna essere uniti al gregge. Come lo saremo, se fra pastori non lo siamo?», osserva Matteo.

«Non si deve allora parlare? Mai dire il nostro pensiero?

Non siamo schiavi, credo».

«No, Giuda. Non siamo schiavi. Ma siamo degli indegni di seguirlo perché non lo comprendiamo», dice calmo lo Zelote.

«Io lo comprendo benissimo».

«No. Non lo comprendi, e con te non lo comprendono, più o meno, tutti quelli che lo criticano. Comprendere è ubbidire senza discutere perché si è persuasi della santità di chi guida», dice ancora lo Zelote.

«Ah! ma tu alludi a comprendere la sua santità! Io dicevo le sue parole. La santità è indiscussa e indiscutibile», si affretta a dire l’Iscariota.

«E puoi scindere questa da quelle? Un santo avrà sempre a possesso la Sapienza, e le sue parole saranno sapienti».

«È vero. Ma fa degli atti nocivi. Certo per troppa santità. Lo concedo. Ma il mondo non è santo, e Lui si crea delle noie.

255.4

Ora, per esempio, questo filisteo e questa greca credi tu che ci giovino?».

«Ma se io devo nuocere mi ritiro», dice mortificato Ermasteo. «Io ero venuto con l’idea di dargli onore e di fare cosa giusta».

«Gli daresti un dolore andandotene per questo motivo», gli risponde Giacomo d’Alfeo.

«Lascerò credere che ho cambiato idea. Ora lo saluterò e… me ne andrò».

«No davvero! Tu non te ne vai. Non è giusto che per i nervosismi altrui il Maestro perda un discepolo buono», scatta Pietro.

«Ma se se ne vuole andare così per poco, è segno che non è sicuro della sua volontà. Lascialo perciò andare», risponde l’Iscariota.

Pietro perde la pazienza: «Ho promesso a Lui, quando mi ha dato Marziam, di diventare paterno con tutti, e mi dispiace di mancare alla promessa. Ma tu mi ci porti. Ermasteo è qui e qui resta. Sai cosa ti devo dire? Che sei tu quello che turbi le volontà degli altri e le fai incerte. Sei uno che separa e disordina. Ecco quello che sei. E vergognatene».

«Cosa sei? Il protettore dei…».

«Sissignore. Hai detto bene. So ciò che vuoi dire. Protettore della Velata, protettore di Giovanni di Endor, protettore di Ermasteo, protettore di quella schiava, protettore di quanti altri sono trovati da Gesù e non sono gli splendidi esemplari pavoneschi del Tempio, i fabbricati con la sacra calcina e le ragnatele del Tempio, gli stoppini fragranti di morchia dei lumi del Tempio, i come te, insomma, per rendere più chiara la parabola, perché se il Tempio è molto, a men che io non sia divenuto scemo, il Maestro è da più del Tempio e tu gli manchi…».

255.5

Urla tanto che Gesù si ferma e si volta e accenna a tornare indietro, lasciando le donne.

«Ha sentito! Ora sarà afflitto!», dice l’apostolo Giovanni.

«No, Maestro. Non venire. Discutevamo… per ingannare la noia del cammino», dice pronto Tommaso.

Ma Gesù sta fermo in modo da essere raggiunto.

«Che discutevate? Ancora una volta devo dirvi che le donne vi superano?».

Il dolce rimprovero tocca il cuore di tutti. Tacciono abbassando il capo.

«Amici, amici! Non siate oggetto di scandalo a coloro che solo ora nascono alla Luce! Non sapete che nuoce più un’imperfezione in voi che tutti gli errori che sono nel paganesimo, alla redenzione di un pagano o di un peccatore?».

Nessuno risponde perché non sanno cosa dire per giustificarsi o per non accusare.

255.6

Presso un ponte su un torrente secco è fermo il carro delle sorelle di Lazzaro. I due cavalli pasturano coll’erba folta delle rive del torrente, forse secco da poco e perciò con sponde ben nutrite di erba. Il servo di Marta e uno, forse il conducente, sono pure sul greto, mentre le donne sono chiuse nel carro, che è tutto coperto da una pesante coperta fatta di pelli conciate che scendono a modo di cortine pesanti fino sul piano del carro.

Le donne discepole si affrettano ad esso e il servo che le vede per primo dà l’allarme alla nutrice, mentre l’altro si affretta a condurre i cavalli alle stanghe. Il servo intanto corre dalle padrone inchinandosi fino a terra.

La anziana nutrice, una bella donna di colorito olivastro, ma piacente, scende lesta e va dalle sue padrone. Ma Maria di Magdala le dice qualche cosa e lei si dirige subito alla Vergine dicendo: «Perdona… Ma è tanta la gioia di vederla che non vedo che lei. Vieni, benedetta. Il sole brucia. Sul carro è ombra».

E salgono tutte in attesa degli uomini rimasti molto indietro. Mentre attendono e mentre Sintica, rivestita della veste che ieri aveva la Maddalena, bacia i piedi delle sue padrone — come si ostina a dirle lei, nonostante che esse le dicano che non è per loro né serva né schiava, ma solo ospite in nome di Gesù — la Vergine mostra il prezioso fagottello della porpora, chiedendo come si può filare quella cortissima barbetta il cui stame rifiuta umidore e torcitura.

«Non si usa così, Donna. Va ridotta in polvere e usata come qualunque altra tintura. Questa è la bava della conchiglia, non è un capello né un pelo. Vedi come è friabile ora che è secca? Tu la riduci in polvere fina, la setacci perché non rimanga nessun pezzo lungo che macchierebbe il filato o la stoffa. Meglio se tingi il filato in matasse. Quando sei sicura che è tutta in polvere, la sciogli come si fa con la cocciniglia, o lo zafferano, o la polvere dell’indaco, o altre di altre cortecce, o radici, o frutti, e la usi. Ferma la tinta con dell’aceto forte per ultima sciacquatura».

«Grazie, Noemi. Farò come tu insegni. Ho ricamato con fili porporini, ma me li avevano dati già pronti all’uso…

255.7

Ecco Gesù ormai vicino. È ora di salutarci, figlie. Vi benedico tutte nel nome del Signore. Andate in pace portando pace e gioia a Lazzaro. Addio, Maria. Ricordati che hai pianto sul mio petto il tuo primo felice pianto. Perciò ti sono madre, perché una creatura piange il suo primo pianto sul petto della sua mamma. Ti sono madre e tale ti sarò sempre. Quello che ti può pesare di dire anche alla più dolce delle sorelle, alla più amorosa delle nutrici, vieni a dirlo a me. Ti comprenderò sempre. Quello che non oseresti dire al mio Gesù perché ancora intriso di una umanità che Egli in te non vuole, vieni a dirlo a me. Ti compatirò sempre. E se poi vorrai dirmi anche i tuoi trionfi — ma questi preferisco tu li dia a Lui, come fragranti fiori, perché Lui e non io è il tuo Salvatore — io giubilerò con te. Addio, Marta. Ora tu te ne vai felice, e in questa felicità soprannaturale perdurerai. Non hai dunque altro bisogno fuor di quello di progredire nella giustizia fra mezzo alla pace che nulla più turba in te. Fàllo per amor di Gesù, che ti ha amata tanto da amare questa che tu ami completamente. Addio, Noemi. Va’ col tuo tesoro ritrovato. Come per il latte con cui la sfamavi, ora sfamati tu alle parole che essa e Marta ti diranno, e giungi a vedere nel Figlio mio molto più dell’esorcista che libera i cuori dal Male. Addio, Sintica, fiore di Grecia, che hai saputo sentire da te sola che c’è qualcosa più della carne. Ora fiorisci in Dio e sii la prima dei nuovi fiori della Grecia di Cristo. Io sono molto contenta di lasciarvi unite così. Vi benedico con amore».

Lo scalpiccio dei passi è ormai vicino. Alzano la tenda pesante e vedono che Gesù è a un due metri dal carro. Scendono sotto al sole cocente che invade la via.

Maria di Magdala si inginocchia ai piedi di Gesù dicendo:

«Io ti ringrazio, di tutto. E anche molto di avermi fatto fare questo pellegrinaggio. Tu solo hai sapienza. Ora parto spogliata dei resti della Maria di un tempo. Benedicimi, Signore, per fortificarmi sempre più».

«Sì. Ti benedico. Godi dei fratelli, e coi fratelli sempre più fórmati in Me. Addio, Maria. Addio, Marta. Dirai a Lazzaro che Io lo benedico. Vi affido questa donna. Non ve la dono. È mia discepola. Ma voglio che voi le diate un minimo di capacità di intendere la mia dottrina. Poi verrò Io. Noemi, ti benedico, e anche voi due».

Marta e Maria hanno le lacrime agli occhi. Lo Zelote le saluta in particolare dando loro uno scritto per il suo servo. Gli altri hanno un saluto comulativo. Poi il carro si mette in moto.

255.8

«E ora andiamo in cerca di ombra. Dio le accompagni…

Tanto ti spiace, Maria, che esse se ne siano andate?», chiede a Maria d’Alfeo che piange zitta zitta.

«Sì. Erano molto buone…».

«Le ritroveremo presto. E accresciute di numero. Avrai molte sorelle… o figlie, se più ti piace. È tutto amore, sia il materno che il fraterno», la conforta Gesù.

«Purché ciò non crei delle noie…», mormora l’Iscariota.

«Noie l’amarsi?».

«No. Noie avere persone di altra razza e di altra appartenenza».

«Sintica, vuoi dire?».

«Sì, Maestro. Infine essa era oggetto del romano e appropiarsene è male. Lo inquieterà verso di noi e ci attireremo addosso Ponzio Pilato coi suoi rigori».

«Ma cosa vuoi che gli prema a Pilato se un suo dipendente perde una schiava? Lo conoscerà quello che vale! E se è un poco onesto, come si dice lo sia, in famiglia almeno, dirà che quella donna ha fatto bene a fuggire. Se poi è un disonesto dirà: “Ti sta bene. Così forse la trovo io”. I disonesti non sono sensibili ai dolori altrui. E poi! Oh! povero Ponzio! Con tutti i fastidi che gli diamo, ha ben altro che perder tempo per le querimonie di uno che si fa scappare una schiava!», dice Pietro. E gli dànno ragione in molti, deridendo le rabbie del lubrico romano.

255.9

Ma Gesù porta la questione su un piano più alto. «Giuda, lo conosci il Deuteronomio?».

«Certamente, Maestro. E, non esito a dirlo, come pochi lo sanno».

«Come lo giudichi?».

«Come portavoce di Dio».

«Portavoce. Dunque ripetente la parola di Dio?».

«Proprio così».

«Hai ben giudicato. Ma allora perché non giudichi che è bene fare ciò che esso ordina?».

«Io non l’ho mai detto questo. Anzi! Io trovo che proprio noi lo trascuriamo troppo seguendo la nuova Legge».

«La nuova Legge è il frutto dell’antica, ossia è la perfezione raggiunta dall’albero della Fede. Ma nessuno fra noi lo trascura, per quanto mi risulta, perché sono Io il primo a rispettarlo e a impedire che altri lo trascurino». Gesù è molto incisivo nel dire queste parole.

Riprende: «Il Deuteronomio è intoccabile. Anche quando trionferà il mio Regno, e col mio Regno la nuova Legge coi suoi nuovi codici e paragrafi, esso sarà sempre applicato ai nuovi dettami, così come le pietre squadrate di antiche costruzioni vengono usate per le nuove perché sono pietre perfette che dànno robuste muraglie. Ma ora non c’è ancora il mio Regno, ed Io, da fedele israelita, non faccio offesa né trascuranza al libro mosaico. Esso è base del mio modo di agire e del mio insegnamento. Sopra la base dell’Uomo e del Maestro, il Figlio del Padre mette la celeste costruzione della sua Natura e Sapienza. Nel Deuteronomio è detto[1]: “Non consegnerai al padrone lo schiavo che si è rifugiato presso di te. Egli abiterà con te nel luogo che gli parrà, starà tranquillo in una delle tue città e tu non lo contristerai”. Questo nel caso che uno sia costretto a fuggire da una schiavitù inumana. Nel mio caso, in quello di Sintica, vi è la fuga non verso una libertà limitata, ma verso la libertà illimitata del Figlio di Dio. E vuoi tu che Io, a questa allodola fuggita al laccio dei cacciatori, metta di nuovo il filetto, e la renda alla sua prigione per levarle anche la speranza dopo la libertà? No, mai! Benedico Iddio che, come l’andata ad Endor ha portato questo figlio al Padre, l’andata a Cesarea ha portato questa creatura a Me perché Io la porti al Padre. A Sicaminon vi ho parlato della potenza della Fede. Oggi vi parlerò della luce della Speranza. Ma ora, in questo folto frutteto, sostiamo a mangiare e a riposare. Perché il sole arde come se l’inferno fosse aperto».


Notes

  1. s’il a le même nom : la langue française distingue les prénoms de ces deux apôtres, mais il s’agit à l’origine du même prénom, et l’italien ne fait pas la différence.
  2. il est dit : en Dt 23, 16-17.

Note

  1. è detto, in: Deuteronomio 23, 16-17.