587.1
Jésus est à Béthanie. C’est le soir, un paisible soir d’avril. Par les larges fenêtres de la salle du banquet, on voit le jardin de Lazare tout en fleurs et, au-delà, le verger, qui ressemble à une nuée de légers pétales. La brise du soir fait onduler doucement les rideaux tendus sur les portes et trembler les lumières du lampadaire du milieu de la pièce. Avec elle pénètre une senteur composée de verdure nouvelle, du doux-amer des fleurs des arbres fruitiers, de roses et d’autres fleurs, qui se mêle au vif parfum de tubéreuse, de muguet, de jasmin, mélangés en une essence rare, qui reste encore du baume dont Marie de Magdala a oint son Jésus, dont les cheveux sont restés plus sombres.
Dans la salle se trouvent encore Simon, Pierre, Matthieu et Barthélemy. Les autres sont absents, comme s’ils étaient déjà sortis pour vaquer à leurs occupations.
Jésus s’est levé de table et observe un rouleau de parchemin que Lazare lui a montré. Marie de Magdala va et vient dans la salle… On dirait un papillon attiré par la lumière. Elle ne sait que tourner autour de son Jésus. Marthe surveille les serviteurs qui enlèvent les splendides nappes précieuses étendues sur la table.
Jésus pose le rouleau sur une haute crédence à incrustations d’ivoire qui contrastent avec un bois noir et brillant, et il dit :
« Lazare, viens dehors. J’ai besoin de te parler !
– Tout de suite, Seigneur ! »
Lazare se lève de son siège près de la fenêtre et suit Jésus dans le jardin, où la dernière lueur du jour se mêle aux premiers rayons d’un splendide clair de lune.