Gli Scritti di Maria Valtorta

631. Les apôtres envoyés au Golgotha,

631. Gli apostoli mandati sul Golgota

631.1

Jérusalem brûle déjà sous le soleil de midi. L’ombre d’une archivolte vient parfois reposer le regard ébloui par le soleil qui frappe les murs blancs des maisons et rend brûlant le sol des chemins. La blancheur incandescente des murs et l’obscurité des arcades font de Jérusalem une étrange peinture en blanc et noir, une alternance de lumière violente et de pénombre — qui, par contraste avec la lumière violente, paraît ténèbre —, alternance qui tourmente comme une obsession, car elle enlève la faculté de voir, soit par excès de lumière soit par excès d’ombre. On marche les yeux plissés, en cherchant à courir dans les zones de lumière et de chaleur, et en ralentissant sous les archivoltes. Impossible de faire autrement, car le contraste entre lumière et ténèbre est tel que, même les yeux ouverts, on ne voit rien.

C’est ainsi qu’avancent les apôtres dans une ville que l’heure de midi rend déserte. Ils transpirent abondamment, s’essuient le visage et le cou avec leur couvre-chef, et halètent…

Mais quand ils doivent sortir de la ville, le soulagement intermittent des arcades cesse. La route, qui rase les murs et qui se perd vers le nord et vers le sud comme un ruban éblouissant de poussière incandescente, donne l’impression d’un sol de fournaise. Il s’en élève une chaleur de four, une chaleur qui dessèche les poumons. Le petit torrent, qui coule au-delà des murs, n’est plus qu’un filet d’eau au milieu d’une grève de cailloux que le soleil blanchit comme autant de crânes calcinés. Les apôtres se précipitent sur ce filet d’eau et y boivent. Ils y plongent leur couvre-chef, et se les mettent trempés sur la tête après s’être lavé le visage. Ils pataugent dans ce filet d’eau les pieds nus. Mais oui ! C’est un bien piètre rafraîchissement. L’eau est chaude comme si on l’avait versée d’un chaudron suspendu au-dessus d’une flamme. Ils s’en font la remarque :

« Elle est chaude et peu abondante. Elle a un goût de boue et de borith. Quand il y en a si peu, elle garde le goût des lessives faites à l’aube. »

631.2

Ils entreprennent alors la montée du Golgotha, un Golgotha brûlé sur lequel le soleil a séché le peu d’herbe qui paraissait être un duvet rare sur la montagne jaunâtre une quinzaine de jours auparavant. Maintenant, seules quelques rigides touffes de plantes épineuses, tout en piquants et sans feuilles, dressent çà et là des tiges de squelettes déterrés, d’un vert jauni par la poussière de la colline. Oui, on dirait réellement des bouquets d’ossements calcinés plantés dans le sol. L’un d’eux présente, au-dessus d’une tige droite de deux palmes, un coude imprévu qui se termine en cinq doigts après une sorte de palette : on pourrait le prendre pour une main squelettique qui se tend pour saisir le passant et le retenir dans ce lieu de cauchemar.

« Voulez-vous prendre le chemin long ou le court ? demande Jean, le seul à avoir déjà gravi cette colline.

– Le plus court ! Le plus court ! Faisons vite ! On meurt de chaleur, ici ! s’écrient-ils en chœur, à l’exception de Simon le Zélote et de Jacques, fils d’Alphée.

– Allons ! »

Les pierres du chemin pavé sont brûlantes comme des plaques tirées du feu.

« Mais c’est impossible de marcher ici ! s’exclament-ils après quelques mètres.

– Le Seigneur est pourtant monté jusqu’à l’endroit où se trouvent ces ronces, or il était déjà blessé et portait la croix, fait remarquer Jean, qui pleure depuis qu’il est sur le Calvaire.

Ils reprennent leur chemin, mais se jettent bientôt à terre, épuisés, haletants. Les couvre-chefs trempés dans le ruisseau sont déjà séchés par le soleil ; en revanche, les vêtements sont tachetés par la sueur.

« Cette montée est trop raide et trop brûlante ! souffle Barthélemy.

– Oui, beaucoup trop ! approuve Matthieu, qui est congestionné.

– En ce qui concerne le soleil, c’est tout pareil. Mais pour monter, prenons cette route. Elle est plus longue, mais moins fatigante. Longinus lui-même l’a prise pour permettre au Seigneur de monter. Voyez-vous cet endroit où se trouve cette pierre un peu sombre ? C’est là qu’est tombé le Seigneur. Nous l’avons cru mort, nous qui regardions de là-haut, au nord : vous voyez ? là où se trouve ce creux avant que la côte ne s’élève rapidement. Il ne bougeait plus. Quel cri Marie a poussé ! Je l’entends encore ! Je n’oublierai jamais ce cri ! Je n’oublierai pas un seul de ses gémissements… Il y a des choses qui vous vieillissent en une heure, et donnent la mesure de la douleur du monde… Allons, venez ! Notre Seigneur martyr s’est arrêté moins que vous ! » dit Jean.

631.3

Abasourdis, ils se lèvent et le suivent jusqu’à l’intersection du chemin pavé et du sentier à lacets, et ils tournent par celui-ci. Oui ! c’est moins raide… mais quant au soleil ! La chaleur y est encore plus forte étant donné que la côte, que longe ce sentier, réverbère ses feux sur les voyageurs déjà brûlés par le soleil.

« Mais pourquoi nous faire monter ici à cette heure-ci ? Ne pouvait-il pas nous faire venir à l’aube, au point du jour, pour que nous puissions voir où nous posons les pieds ? D’autant plus que nous étions hors des murs, et que nous pouvions venir sans attendre l’ouverture des portes. »

Ils se lamentent et grommellent.

Ils sont hommes, encore et toujours hommes, maintenant, après la tragédie du vendredi saint, qui est la tragédie de leur humanité orgueilleuse et lâche plus encore que la tragédie du Christ, car il était, lui, toujours héros et victorieux même en mourant. Ils sont hommes comme auparavant, quand ils s’enivraient des hosannas de la foule et jubilaient en pensant aux fêtes et aux banquets somptueux chez Lazare… Ils sont sourds, aveugles, fermés à tous les signes et avertissements de la tempête prochaine.

Jacques, fils d’Alphée et Simon le Zélote pleurent en silence. André aussi ne se lamente plus après les derniers mots de Jean. Or Jean reprend la parole pour partager ses souvenirs, et ce rappel est un avertissement fraternel, une exhortation à ne pas se plaindre :

« C’est l’heure à laquelle le Seigneur est monté ici. Or il marchait déjà depuis longtemps. Je pourrais même dire que, depuis l’instant où il est sorti du Cénacle, il n’a plus eu un moment de repos ! Et il faisait bien chaud, ce jour-là ! C’était la chaleur étouffante de l’orage proche… Il brûlait de fièvre. Nikê raconte qu’elle a eu l’impression de toucher du feu quand elle a posé le linge sur son visage.

Ce doit être ici l’endroit où il a rencontré les femmes… Nous étions du côté opposé, de sorte que nous n’avons pas vu la rencontre, mais aux dires de Nikê et des autres… Allons, avançons ! Pensez que les Romaines, habituées à la litière, ont parcouru à pied ce chemin en restant au soleil dès le matin, dès l’heure de tierce, quand il fut condamné. Elles ont précédé tout le monde, elles, les païennes, en envoyant des esclaves avertir les autres qui s’étaient absentées pour quelque motif… »

631.4

Ils avancent… Ce chemin est un martyre de feu ! Ils chancellent, même. Pierre lance :

« S’il n’opère pas un miracle, nous tomberons à cause d’un coup de soleil.

– Oui. Mon cœur éclate dans ma gorge » confirme Matthieu.

Barthélemy ne parle plus. Il paraît ivre. Jean le prend par le coude et le soutient comme il le faisait avec Marie, ce vendredi sanglant. Il le réconforte :

« Il y aura bientôt un peu d’ombre. J’y ai conduit la Mère. Nous nous reposerons là. »

Ils progressent de plus en plus lentement… Les voilà contre le rocher où se tenait Marie, et Jean le dit. Il y a en effet un peu d’ombre, mais l’air est immobile, brûlant.

« S’il y avait au moins une tige d’anis, une feuille de menthe, un brin d’herbe ! J’ai la bouche semblable à du parchemin mis près d’une flamme. Mais rien ! Rien ! gémit Thomas, qui a les veines gonflées au cou et au front.

– Je donnerais ce qui me reste de vie pour avoir une goutte d’eau, ajoute Jacques, fils de Zébédée.

Jude éclate en sanglots :

« Mon pauvre Frère, combien tu as souffert ! Il a dit… il a dit, vous le rappelez-vous ? qu’il mourait de soif ! Ah ! Maintenant je comprends ! Je n’avais pas saisi la portée de ces paroles ! Il mourait de soif ! Et il n’y eut personne pour lui donner une gorgée d’eau pendant qu’il pouvait boire encore ! Qui plus est, au soleil s’ajoutait sa fièvre !

– Jeanne lui avait apporté de quoi se désaltérer… intervient André.

– Mais il ne pouvait déjà plus boire, désormais ! Il ne pouvait plus parler… Quand il a rencontré sa Mère, là, à dix pas de nous, il a seulement pu dire : “ Maman ! ” mais pas lui donner un baiser, même de loin, bien que Simon de Cyrène l’ait délivré de la croix. Il avait les lèvres durcies par les blessures, brûlées… Oh ! je le voyais bien, par delà la rangée de légionnaires ! Car je ne suis pas passé ici. J’aurais pris sa croix, s’ils m’avaient laissé passer ! Mais ils craignaient pour moi… et à cause de la foule qui voulait nous lapider… Il ne pouvait pas parler… pas boire… pas donner un baiser… Il ne pouvait presque plus y voir, tant les croûtes formées par le sang qui descendait de son front couvraient ses yeux… Son vêtement était déchiré au genou qu’on voyait ouvert, sanglant… Il avait les mains enflées et blessées… Il avait une blessure au menton et à une joue… La croix avait formé une plaie à son épaule déjà ouverte par les coups de fouets… Sa ceinture était blessée par les cordes… Ses cheveux étaient couverts du sang qui coulait des épines… Il avait…

– Tais-toi ! Tais-toi ! Impossible de t’entendre davantage ! Tais-toi ! Je t’en prie et te l’ordonne ! crie Pierre, qui semble à la torture.

– Impossible de m’entendre ! Vous ne pouvez m’entendre ! Mais moi, j’ai dû le voir et entendre ses spasmes de douleur ! Et sa Mère ? Et sa Mère, alors ? »

Ils baissent la tête en sanglotant et recommencent à marcher, à marcher… Ce n’est plus sur eux qu’ils se lamentent, tous pleurent désormais sur les douleurs du Christ.

631.5

Les voici au sommet, à la première petite plateforme : c’est une vraie plaque de feu. La réverbération est telle que la terre semble trembler par suite de ce phénomène que produit le soleil sur les sables enflammés des déserts.

« Venez. Montons de ce côté. C’est ici que le centurion nous a fait passer. Moi aussi : ils m’ont pris pour un fils de Marie. Les femmes se tenaient à cet endroit, ici les bergers et là les Juifs… » Jean indique les lieux et termine : « Mais la foule était en bas, elle couvrait la pente jusqu’à la vallée, jusqu’à la route. Elle était sur les murs, et même sur les terrasses près des murs. Elle s’étendait à perte de vue. Je m’en suis rendu compte quand le soleil a commencé à se voiler. Auparavant, c’était comme à présent, et je ne pouvais voir… »

En effet, Jérusalem fait penser à un mirage qui tremble au loin. L’excès de lumière la voile à qui veut la voir, et Jean reprend :

« A d’autres heures, Marie-Madeleine l’a dit, mais je ne savais ni quand ni pourquoi elle y était venue, on voit les restes noirs des maisons incendiées par la foudre. Les maisons des plus coupables… d’un grand nombre, du moins parmi eux… Voici ! (Jean compte ses pas, reconstitue la scène : là se tenait Longinus, et ici Marie et moi. La croix du larron repenti se dressait à cet endroit, et l’autre ici. C’est là que les vêtements du Seigneur furent tirés au sort, là aussi que la Mère est tombée à la mort de Jésus… et c’est d’ici que je l’ai vu frappé au cœur (Jean devient pâle comme un mort), car sa croix était ici. »

Et il s’agenouille pour adorer, le visage dans la terre visiblement creusée à l’emplacement sanglant, le long de l’ombre du bras transversal de la croix et autour de son tronc vertical.

Marie-Madeleine doit avoir peiné pour creuser ainsi tant de terre et sur une profondeur d’au moins un bon palme, dans une terre si dure, mêlée à des pierres et des débris qui en font une sorte de croûte compacte ! Ils se jettent tous à terre pour baiser cette poussière que baignent leurs larmes…

631.6

Jean est le premier à se relever et, affectueusement impitoyable, il évoque tous les épisodes… Il ne sent plus le soleil… Personne ne le sent plus… Il parle du moment où Jésus a repoussé le vin à la myrrhe… du moment où il s’est dévêtu et ceint du voile de sa Mère… du moment où il est apparu si durement flagellé et blessé… du moment où il s’est étendu sur la croix et a crié au premier clou, puis s’est interrompu pour que sa Mère ne souffre pas trop… du moment où ils lui déchirèrent le poignet et déboîtèrent le bras pour l’étirer jusqu’au trou préparé à l’avance… enfin du moment où, tandis qu’il était entièrement cloué, la croix fut retournée pour river les clous. C’est alors qu’elle pesa de tout son poids sur le Martyr, dont on entendit le halètement. Jean raconte comment la croix fut retournée puis relevée pour être traînée jusqu’au trou où on la fit tomber et où elle fut calée. Il explique comment, dans sa chute, le corps de Jésus déchira ses mains et le déplacement de la couronne griffa sa tête. Jean rapporte aussi les paroles de Jésus adressées au Père des Cieux, sa demande de miséricorde pour ceux qui le crucifiaient, son pardon au larron repenti, ses mots à sa Mère et à Jean. Il décrit l’arrivée de Joseph et de Nicodème, qui osèrent héroïquement défier tout un monde, ainsi que le courage de Marie de Magdala, le cri d’angoisse de Jésus au Père qui l’avait abandonné, et sa soif, le vinaigre avec le fiel, ses derniers instants d’agonie, puis son faible appel à sa Mère et les paroles de celle-ci, dont l’âme, sous cette torture, était à la mort… enfin la résignation et l’abandon de Jésus à Dieu et, horribles, sa dernière convulsion, le cri qui fit trembler le monde, et le cri de Marie quand elle le vit mort…

« Tais-toi ! Tais-toi ! Tais-toi ! » crie Pierre.

Il semble, lui, transpercé par la lance. Les autres aussi le supplient :

« Tais-toi ! Tais-toi !…

631.7

– Je n’ai rien à ajouter. Le sacrifice était fini. Quant à la sépulture… elle fut notre déchirement et non le sien. Seule la douleur de la Mère a de la valeur. Notre déchirement mérite-t-il de la compassion ? Remettons-le-lui, au lieu de demander pitié pour nous. Nous avons toujours fui la souffrance, la fatigue, les abandons, en lui laissant tout cela à lui seul. En vérité, nous avons été des disciples indignes qui l’avons aimé pour la joie d’être aimés, pour l’orgueil d’être des grands dans son royaume, mais nous n’avons pas su l’aimer dans la douleur… Il en est de même actuellement.

Nous devons jurer ici, en face du Ciel et de la terre, or c’est ici un autel, haut placé, qu’il n’en sera plus ainsi. Le temps de la joie est venu pour le Seigneur, et pour nous la croix. Jurons-le. C’est ainsi seulement que nous donnerons la paix à nos âmes. Ici est mort Jésus de Nazareth, le Messie, le Seigneur, pour être le Sauveur et le Rédempteur. Qu’ici meure l’homme que nous sommes, et que ressuscite le vrai disciple. Levez-vous ! Jurons sur le saint nom de Jésus Christ que nous voulons embrasser sa doctrine jusqu’à savoir mourir pour la rédemption du monde. »

Jean a l’air d’un séraphin. Ses gestes ont fait tomber son couvre-chef, et sa tête blonde brille au soleil. Il est monté sur des débris jetés de côté, peut-être les étais des croix des larrons, et a pris involontairement l’attitude à bras ouverts qu’a souvent Jésus quand il enseigne, en particulier la position qu’il avait sur la croix.

Les autres l’admirent, lui qui est si beau, si enflammé, si jeune, le plus jeune de tous, et si mûr spirituellement. Le Calvaire l’a fait parvenir à l’âge parfait… Ils le regardent et s’écrient :

« Nous le jurons !

– Alors prions pour que le Père fortifie notre serment : “ Notre Père qui es aux Cieux… ” »

Le chœur des onze voix prend peu à peu de l’assurance. Pierre se frappe la poitrine quand il dit : “ Remets-nous nos dettes ”, et tous s’agenouillent au moment de supplier : “ Délivre-nous du mal. ” Ils restent ainsi penchés jusqu’au sol, en méditant…

631.8

Jésus est parmi eux. Je n’ai pas vu quand ni d’où il est apparu. On dirait que c’est du côté du mont qui est inaccessible. Il resplendit d’amour dans la grande lumière de midi et il déclare :

« Celui qui demeure en moi ne subira aucun méfait de la part du Malin. En vérité, je vous dis que ceux qui seront unis à moi pour servir le Très-Haut, dont le désir est le salut de tous les hommes, pourront chasser les démons, rendre inoffensifs reptiles et venins, passer au milieu des fauves et des flammes sans subir de dommage, tant que Dieu voudra qu’ils restent sur la terre pour le servir.

– A quel moment es-tu arrivé, Seigneur ? demandent-ils en s’inclinant, mais en restant à genoux.

– C’est votre serment qui m’a appelé. Et maintenant que les pieds de mes apôtres ont foulé cette terre, descendez rapidement en ville, au Cénacle. Ce soir, les femmes de Galilée vont partir avec ma Mère. Jean et toi, vous les accompagnerez. Nous nous retrouverons tous unis en Galilée sur le mont Thabor, dit-il à Simon le Zélote et à Jean.

– Quand, Seigneur ?

– Jean sera prévenu et il vous le transmettra.

– Tu nous quittes, Seigneur ? Tu ne nous bénis pas ? Nous avons tant besoin de ta bénédiction.

– Je vous la donnerai ici et au Cénacle. Prosternez-vous ! »

Il les bénit, puis l’éclat du soleil l’enveloppe comme à la Transfiguration, à cette différence près que, ici, il le cache. Jésus n’est plus là.

Ils relèvent la tête et ne voient plus rien que le soleil et la terre brûlée…

« Mettons-nous en route ! Il est parti ! constatent-ils avec tristesse.

– Ses séjours parmi nous se font toujours plus brefs…

– Mais aujourd’hui, il semblait plus content qu’hier soir. Tu n’as pas eu cette impression, mon frère ? demande Jude à Jacques.

– C’est notre serment qui l’a réjoui. Sois béni, Jean, de nous l’avoir fait faire ! s’exclame Pierre en l’embrassant.

– Moi, j’espérais qu’il nous parlerait de sa Passion ! Pourquoi nous a-t-il fait venir ici si c’est pour ne rien nous partager ? s’interroge Thomas.

– Nous le lui demanderons ce soir, suggère André.

– Oui. Mais allons-y ! La route est longue, et nous souhaitons rester un peu avec Marie avant son départ, dit Jacques, fils d’Alphée.

– Une autre douceur qui finit ! soupire Jude.

– Nous restons orphelins ! Comment ferons-nous ? »

Ils se tournent vers Jean et Simon le Zélote et ajoutent, avec une pointe d’envie dans la voix :

« Vous, au moins, vous accompagnez la Mère ! Et vous restez avec elle, toujours. »

Jean fait un geste qui signifie : “ C’est comme ça… ” Mais eux, qui les envient sans malice, reprennent aussitôt :

« En tout cas, c’est juste. Car tu étais ici avec elle, et tu as renoncé à y rester par obéissance. Nous… »

631.9

Ils commencent à descendre. Mais à peine ont-ils posé le pied sur la seconde plate-forme, la plus basse, qu’ils voient une femme y arriver sous le soleil par le chemin le plus raide. Elle les dévisage sans mot dire, et se dirige avec assurance vers la plate-forme supérieure.

« On vient déjà ici, et ce n’est pas seulement Marie ! Mais que fait-elle ? Elle pleure en cherchant par terre. C’est peut-être une femme qui a perdu quelque chose ce jour-là ? » se demandent-ils.

Ce serait possible en effet, car on ne voit pas de qui il s’agit. Le visage de la femme est complètement voilé.

Thomas hausse sa robuste voix :

« Femme, qu’as-tu perdu ?

– Rien. Je cherche l’emplacement de la croix du Seigneur. J’ai un frère mourant et le bon Maître n’est plus sur la terre… » Elle pleure sous son voile. « Les hommes l’ont chassé !

– Il est ressuscité, femme. Il est vivant pour toujours.

– Je sais qu’il l’est pour toujours, car il est Dieu, et Dieu ne meurt pas. Mais il n’est plus parmi nous. Le monde n’a pas voulu de lui, et il est parti. Le monde l’a renié, ses disciples eux-mêmes l’ont abandonné comme si c’était un criminel, de sorte qu’il a abandonné le monde. Moi, je viens chercher un peu de son sang. J’ai foi que ce sang guérira mon frère, davantage que l’imposition des mains de ses disciples, car je ne crois plus qu’ils puissent faire des prodiges après avoir été infidèles.

– Le Seigneur était ici tout à l’heure, femme. Il est ressuscité avec son âme et son corps, et il est encore parmi nous. Le parfum de sa bénédiction est encore sur nous. Regarde : c’est ici qu’il a posé les pieds, il y a quelques instants, lui dit Jean.

– Non. Je cherche une goutte de son sang. Je n’étais pas ici et je ne connais pas l’endroit… »

Toute penchée, elle cherche par terre.

Jean le lui indique :

« Voilà l’endroit de sa croix. Moi, j’étais présent.

– Tu étais présent ? Comme ami, ou pour le crucifier ? On dit qu’un seul de ses apôtres bien-aimés se tenait sous la croix et quelques autres disciples fidèles avec lui, non loin d’ici. Mais je ne voudrais pas parler avec quelqu’un qui l’a crucifié.

– Je ne le suis pas, femme. Regarde : c’est là que se trouvait la croix, et la terre est encore rouge de sang, bien qu’on ait creusé. Il y avait tant de sang qu’il a pénétré profondément. Tiens, et que ta foi obtienne sa récompense. »

Jean a creusé de ses doigts le trou de la croix et il en a extrait un terreau rougeâtre que la femme ramasse dans un petit linge. Elle remercie et s’en va rapidement avec son trésor.

« Tu as bien fait de ne pas révéler qui nous sommes.

– Pourquoi n’as-tu pas dit qui tu étais ? » demandent les apôtres.

Comme toujours les pensées humaines s’opposent.

Jean les regarde sans rien dire. Il descend le premier par la rapide route pavée.

631.10

S’il est plus facile de descendre que de monter, le soleil est encore féroce, et à l’arrivée, au pied du Golgotha, ils sont morts de soif. Mais il y a des brebis dans le ruisseau et des bergers avec elles, sortis certainement de quelque étable voisine pour mener paître les brebis avant le soir. L’eau est trouble, imbuvable.

Leur soif est telle que Barthélemy s’adresse à un berger :

« Aurais-tu une gorgée d’eau dans ta gourde ? »

L’homme les regarde d’un air sévère et se tait.

« Un peu de lait, alors. Les mamelles de tes bêtes sont gonflées. Nous paierons. Nous aurions voulu du liquide frais, mais il nous suffit de boire.

– Je n’ai ni eau ni lait pour ceux qui ont abandonné leur Maître. Je vous reconnais, savez-vous ? Je vous ai vus et écoutés à Bet-çur, un jour. Toi, justement toi, qui demandes… Mais je ne vous ai pas vus lorsqu’on a descendu l’Homme tué. Il n’y avait que celui-là. Il n’y a pas eu d’eau pour le Seigneur, m’ont dit ceux qui étaient sur la colline. Et pour vous non plus, il n’y aura pas. »

Il siffle son chien, rassemble les brebis et s’éloigne vers le nord, où commencent des collines herbeuses et couvertes d’oliviers.

Les apôtres, accablés, franchissent le pont et entrent en ville.

631.11

Ils marchent en rasant les murs, un peu courbés, le couvre-chef très bas sur les yeux. Car maintenant les rues se raniment après la grande chaleur des premières heures de l’après-midi.

Mais il faut traverser toute la ville avant d’arriver à la maison du Cénacle, et il y a trop de gens qui connaissent les apôtres pour que leur passage puisse se faire sans incident. Et bientôt un éclat de rire cinglant les atteint pendant qu’un scribe (je croyais vraiment que je n’en verrais plus et j’en étais heureuse) crie aux gens, qui sont nombreux dans cet étroit carrefour où clapotent les eaux d’une fontaine :

« Les voici ! Regardez-les ! Voilà les restes de l’armée du grand roi ! Les preux lâches, les disciples du séducteur. Ils ne méritent que mépris et dérision, ainsi que la compassion qu’on éprouve pour les fous ! »

C’est le commencement d’une rafale de moqueries.

Certains crient :

« Où étiez-vous pendant que Lui souffrait ? »

D’autres :

« Sont-ils maintenant convaincus que c’était un faux prophète ? »

Ou encore :

« C’est en vain que vous l’avez enlevé et caché ! L’idée est passée, le Nazaréen est mort. Le Galiléen a été foudroyé par Yahvé, et vous avec lui. »

Quelqu’un intervient avec une fausse pitié :

« Mais laissez-les tranquilles ! Ils s’en sont aperçus et s’en sont repentis, trop tard, mais toujours à temps pour fuir au bon moment ! »

D’autres haranguent le petit peuple, essentiellement composé de femmes portées à prendre parti pour les apôtres :

« Vous qui doutez encore de notre justice, que la conduite des plus fidèles partisans du Nazaréen vous éclaire. S’il avait été Dieu, il les aurait fortifiés. Si eux l’avaient reconnu pour le vrai Messie, ils ne se seraient pas enfuis en pensant qu’une force humaine ne pouvait triompher du Christ. Au contraire, il est mort en présence du peuple, et c’est en vain qu’ils ont enlevé son cadavre après avoir assailli les gardes, qui s’étaient endormis. Demandez donc aux gardes si cela ne s’est pas passé ainsi. Il est mort, ses disciples sont dispersés, et celui qui libère Jérusalem des derniers vestiges du Nazaréen est grand aux yeux du Très-Haut. Anathème sur ses partisans ! Va chercher des pierres, ô peuple saint, et lapide ces hommes hors des murs. »

C’en est trop pour le courage encore mal affermi des apôtres ! Ils se sont déjà un peu retirés du côté des murs pour ne pas susciter le soulèvement par quelque défi imprudent aux accusateurs. Mais maintenant, plus que la prudence, c’est la peur qui prend le dessus. Et ils tournent le dos, en se sauvant en direction de la Porte. Les deux Jacques ainsi que Jean, Pierre et Simon le Zélote, plus calmes et plus maîtres d’eux-mêmes que les autres, suivent leurs compagnons sans courir, et quelques pierres les atteignent avant qu’ils ne passent la Porte, ainsi que beaucoup d’ordures.

631.12

Les gardes qui sortent de leur poste empêchent qu’on les poursuive au-delà des murs, mais les apôtres courent à toutes jambes se réfugier dans la pommeraie de Joseph, là où était le tombeau.

L’endroit est tranquille, silencieux, la lumière est douce sous les arbres où a poussé, ces derniers jours, un feuillage encore rare, mais dont la couleur émeraude forme un voile de couleur agréable sous les troncs robustes. Ils se jettent à terre pour apaiser leur cœur qui bat la chamade. Au fond du jardin, un homme pioche et butte des légumes, aidé par un jeune garçon, sans s’apercevoir de la présence des apôtres qui se sont cachés derrière une haie. Ce n’est qu’après avoir scruté le ciel et dit à haute voix : “ Viens, Joseph, et amène l’âne pour l’atteler à la charrette ” qu’il se dirige vers eux, là où se trouve un puits rustique caché par des touffes de ronces qui lui donnent de l’ombre.

« Que faites-vous ? Qui êtes-vous ? Que cherchez-vous dans le jardin de Joseph d’Arimathie ? Et toi, sot, pourquoi laisses-tu ouverte la grille que Joseph veut fermer maintenant qu’il en a posé une ? Ne sais-tu pas qu’il veut que personne ne vienne à l’endroit où fut déposé le Seigneur ? »

Je dis la vérité en affirmant que, toute à ma peine d’assister à la déposition de Jésus et dans la stupeur de la Résurrection, je n’avais jamais examiné si le jardin, au-delà d’une muraille verte de buis et de ronces, avait ou non une grille, mais je pense en effet qu’elle a été mise depuis peu, car elle est toute neuve, et elle est soutenue par deux pylônes carrés dont l’enduit ne semble pas vieux. Joseph, comme Lazare, a posé des clôtures aux endroits sanctifiés par Jésus.

Jean se lève de terre en même temps que Simon le Zélote et que Jacques, fils d’Alphée. Il dit sans peur :

« Nous sommes les apôtres du Seigneur. Je suis Jean, voici Simon, un ami de Joseph, voilà Jacques, frère du Seigneur. Le Seigneur nous avait appelés au Golgotha et nous y sommes allés. Il nous a donné l’ordre de nous rendre à la maison où se trouve sa Mère, mais la foule nous a poursuivis. Nous sommes entrés ici, en attendant le soir…

631.13

– Mais tu es blessé ? Et toi aussi ! et puis toi ! Venez, que je vous soigne. Vous avez soif ? Vous êtes essoufflés. »

Puis il se tourne vers le jeune garçon :

« Dépêche-toi de puiser. La première eau est pure, mais ensuite les seaux la rendent boueuse. Donne-leur à boire, puis lave ces laitues fraîches et verse sur elles de l’huile que nous avons pour enduire les greffes. Je n’ai pas autre chose à vous donner. Je n’ai pas de maison ici. Mais si vous attendez, je vous emmènerai avec moi…

– Non, non. Nous devons aller trouver le Seigneur. Que Dieu te récompense. »

Ils boivent et se laissent soigner. Ils sont tous blessés à la tête. Les Juifs visent bien !

« Toi, va sur la route, et regarde, sans attirer l’attention, s’il n’y a pas quelque espion, ordonne le jardinier au garçon.

– Personne, père. La route est déserte, dit-il en revenant.

– Va jeter un coup d’œil vers la porte et reviens vite. »

Il cueille des tiges d’anis et les offre en s’excusant de n’avoir que des légumes, de la salade et un peu d’anis, car les pommiers viennent à peine de perdre leurs fleurs.

Le garçon revient :

« Personne, père. Au-delà de la porte, la route est déserte.

– Partons donc. Attelle l’âne à la charrette et jette dessus les herbes qu’on a coupées. Nous aurons l’air d’hommes qui reviennent des champs. Venez avec moi. La route sera plus longue… mais cela vaut mieux que de se faire lapider !

– Nous devrons toujours entrer en ville…

– Oui, mais nous passerons par un autre côté, par des ruelles sombres. Venez sans crainte. »

Il ferme avec une grande clef le robuste portail, fait monter les plus âgés sur le char, donne aux autres des pioches et des râteaux, charge Thomas d’un fagot de branches coupées et Jean d’une botte d’herbes, et s’en va tranquillement en longeant les murs vers le sud.

« Mais ta maison… Ici, c’est désert !

– Ma maison est de l’autre côté, mais elle ne va pas s’en aller. Ma femme attendra. Je sers d’abord les serviteurs du Seigneur. »

Il les regarde…

« Tout le monde peut se tromper ! J’ai eu peur, moi aussi ! Et nous sommes tous détestés à cause de son nom, même Joseph. Mais qu’est-ce que cela fait ? Dieu est avec nous. Les gens !… Ils haïssent et ils aiment. Ils aiment et ils haïssent… D’ailleurs, ils oublient aussitôt ce qu’ils ont fait la veille. Bien sûr… s’il n’y avait pas les hyènes ! Mais ce sont elles qui excitent les gens. Ils sont furieux parce qu’il est ressuscité. Ah ! S’il se manifestait sur un pinacle du Temple, pour apporter au peuple la certitude de sa résurrection… Pourquoi ne le fait-il pas ? Moi, je crois, mais tous n’y arrivent pas. Et eux remettent une forte somme à ceux qui assurent au peuple que vous l’avez enlevé déjà décomposé, et que vous l’avez enseveli ou brûlé dans une grotte de Josaphat. »

Ils sont maintenant du côté sud de la ville, dans la vallée d’Hénnom.

« Voilà la Porte de Sion. Connaissez-vous le chemin ? La maison est à deux pas.

– Que Dieu soit avec toi pour ta bonté.

– Pour moi, vous êtes toujours les saints du Maître. Vous êtes des hommes et je suis un homme. Lui seul est plus qu’un homme et peut ne pas trembler. Je sais comprendre et compatir, et je vous affirme que vous avez beau être faibles aujourd’hui, vous serez forts demain. Paix à vous. »

Il les débarrasse des herbes et des outils agricoles et s’éloigne pendant qu’eux, rapides comme des lièvres, s’esquivent par des ruelles périphériques vers la maison du Cénacle.

631.14

Mais les adversités de ce jour ne sont pas encore finies. Un groupe de légionnaires, qui se dirigent vers la taverne voisine, les croise, et l’un d’eux les observe et les montre aux autres. Tous se mettent à rire. Et quand ces pauvres disciples maltraités sont obligés à passer devant eux, l’un des soldats adossés à la porte les apostrophe :

« Alors ! Le Calvaire ne vous a pas lapidés et les hommes vous ont frappés ? Par Jupiter ! Je vous croyais plus courageux ! Je pensais que vous ne craigniez rien puisque vous avez eu le courage de monter là-haut. Les pierres de la colline ne vous ont-elles pas reproché d’être lâches ? Et vous avez trouvé le courage d’y monter ? J’ai toujours vu les coupables fuir les endroits qui leur rappellent leur faute. Némésis les poursuit, mais peut-être vous a-t-elle traînés là-haut pour vous faire trembler d’horreur, aujourd’hui, puisque, à ce moment-là, vous n’avez pas tremblé de pitié. »

Une femme, peut-être la maîtresse de la taverne, vient à la porte et rit. Elle a une figure de ribaude à faire peur, et elle crie à haute voix :

« Femmes hébraïques, regardez ce que produisent vos ventres ! De lâches parjures qui sortent de leurs tanières une fois le danger passé. Le ventre romain, lui, ne conçoit que des héros. Venez, vous, boire à la grandeur de Rome. Vin de choix et belles filles… »

Suivie des soldats, elle s’éloigne dans son antre obscur.

631.15

Quelques femmes marchent avec des amphores sur la route où l’on entend déjà le murmure de la fontaine, près de la maison du Cénacle. L’une d’elle regarde avec pitié. C’est une femme âgée. Elle dit à ses compagnes :

« Ils se sont trompés, oui… mais c’est tout un peuple qui s’est trompé… »

Elle va trouver les apôtres et les salue :

« Paix à vous. Nous n’oublions pas… Dites-nous seulement : le Maître est-il vraiment ressuscité ?

– Il est ressuscité. Nous le jurons.

– Dans ce cas, ne craignez rien. Il est Dieu et Dieu vaincra. Paix à vous, mes frères. Et demandez au Seigneur de pardonner à ce peuple.

– Et vous, priez pour que le peuple nous pardonne et oublie le scandale que nous avons causé. Femmes, moi, Simon-Pierre, je vous demande pardon. »

Pierre pleure…

« Nous sommes mères, sœurs et épouses, homme. Et ton péché est celui de nos fils, frères et époux. Qu’envers tous le Seigneur fasse preuve de pitié. »

Ces femmes pieuses les ont accompagnés à la maison, et frappent elles-mêmes à la porte verrouillée. Jésus ouvre la porte, emplissant l’entrée obscure de sa personne glorifiée. Il leur dit :

« Paix à vous pour votre pitié. »

Les femmes sont pétrifiées de stupeur. Elles restent ainsi jusqu’à ce que la porte se referme sur les apôtres et sur le Seigneur. Alors seulement, elles reviennent à elles.

« Tu l’as vu ? C’était lui. Comme il était beau! Encore plus qu’avant. Et vivant ! Ce n’est pas un fantôme ! C’est un homme véritable. Sa voix ! Son sourire ! Il remuait ses mains. Tu as vu comme elles étaient rouges, ses blessures ? Non, je regardais sa poitrine qui respirait vraiment comme chez un vivant. Ah ! Qu’on ne vienne pas nous dire que ce n’est pas vrai ! Allons ! Allons le dire dans les maisons ! Non. Frappons ici pour le voir encore. Que dis-tu donc ? C’est le Fils de Dieu, ressuscité. C’est déjà bien qu’il se soit montré à nous, pauvres femmes ! Il est avec sa Mère, les femmes disciples et les apôtres. Non. Oui… »

Celles qui sont prudentes l’emportent. Le groupe s’éloigne.

631.16

Jésus, pendant ce temps, est entré au Cénacle avec les apôtres. Il les observe, leur sourit. Ils ont enlevé leur couvre-chef, mis comme des bandes, avant d’entrer dans la maison et les ont remis comme l’usage l’impose. Les blessures ne sont donc pas visibles. Ils s’asseyent, las et silencieux, plus affligés que las.

« Vous avez tardé » leur dit doucement Jésus.

Silence.

« Vous ne me dites rien ? Parlez ! Je suis toujours Jésus. Votre courage d’aujourd’hui est-il déjà retombé ?

– Oh ! Maître ! Seigneur ! » s’écrie Pierre en tombant à genoux aux pieds de Jésus. « Notre courage n’est pas retombé, mais nous sommes anéantis en constatant le tort que nous avons fait à la foi en toi. Nous sommes écrasés !

– L’orgueil meurt, l’humilité naît. La connaissance s’accroît, l’amour augmente. N’ayez pas peur. C’est maintenant que vous devenez des apôtres. C’est cela que je voulais.

– Mais nous ne pourrons plus rien faire ! Le peuple, et il a raison, nous tourne en dérision ! Nous avons détruit ton œuvre, détruit ton Eglise ! »

Tous sont angoissés. Ils crient, font de grands gestes…

Jésus est d’un calme solennel. Il reprend, en appuyant ses paroles par le geste :

« Paix ! Paix ! L’enfer lui-même ne détruira pas mon Eglise. Ce n’est pas parce qu’une pierre encore mal fixée vacillera, que l’édifice s’écroulera. Paix ! Paix ! Vous travaillerez. Et vous le ferez bien, maintenant que vous vous connaissez humblement pour ce que vous êtes. Vous avez acquis une grande sagesse : celle qui consiste à savoir que tout acte a des répercussions très étendues, parfois ineffaçables, et que celui qui est haut placé a plus qu’un autre le devoir d’être parfait. Rappelez-vous ce que j’ai dit[1] de la lumière : il faut la mettre à un endroit élevé pour être bien visible, mais c’est justement parce que tout le monde la voit qu’elle doit avoir une flamme pure. Vous voyez, mes fils ? L’erreur d’un fidèle peut ne pas être remarquée ou sembler excusable, mais elle ne passe pas inaperçue si c’est le fait d’un prêtre. Or le jugement du peuple est sévère. Mais votre avenir effacera votre passé. Je ne vous ai pas parlé au Golgotha, mais j’ai laissé parler le monde. Je vous réconforte. Allons, ne pleurez pas.

631.17

Restaurez-vous maintenant, et laissez-moi vous guérir. »

Il effleure légèrement les têtes blessées avant d’ajouter :

« Néanmoins, il vaut mieux que vous vous éloigniez d’ici. C’est pour cela que j’ai dit : “ Allez au Thabor pour prier. ” Vous pourrez rester dans les villages voisins et monter à chaque aurore m’attendre.

– Seigneur, le monde ne croit pas que tu es ressuscité, souffle Jude.

– Je persuaderai le monde. Je vous aiderai à vaincre le monde. Vous, soyez-moi fidèles. Je n’en demande pas davantage. Et bénissez ceux qui vous humilient, car ils vous sanctifient. »

Il rompt le pain, l’offre et le distribue :

« Voici mon viatique pour vous qui partez. J’ai déjà préparé ici la nourriture pour mes pèlerins. Faites de même, à l’avenir, pour ceux qui partiront. Montrez-vous paternels envers tous les fidèles. Tout ce que je fais ou vous fais faire, imitez-le. A l’avenir, montez aussi au Calvaire, en méditant et en faisant méditer sur le chemin de la croix. Contemplez ! Contemplez ma douleur, car c’est par elle, et non par la gloire présente, que je vous ai sauvés. A côté se trouve Lazare avec ses sœurs. Ils sont venus saluer ma Mère. Allez-y vous aussi, car elle part sous peu avec le char de Lazare. Paix à vous. »

Il se lève et sort rapidement.

631.18

« Seigneur ! Seigneur ! s’écrie André.

– Que veux-tu, mon frère ? lui demande Pierre.

– Je voulais lui demander tant de choses ! Lui parler de ceux qui demandent des guérisons… Je ne sais ! Quand il est parmi nous, nous ne savons plus rien dire ! »

Et il court chercher le Seigneur.

« C’est vrai ! C’est comme si nous avions perdu la mémoire, conviennent-ils tous.

– Pourtant, il est tellement bon avec nous. Il nous a appelés “ mes fils ” avec une telle douceur qu’elle m’a ouvert le cœur ! s’écrie Jacques, fils d’Alphée.

– Mais il est tellement Dieu maintenant ! Je tremble quand il est près de moi, comme si j’étais près du Saint des Saints » dit Jude.

André revient :

« Il n’est plus là. L’espace, le temps et les murs lui sont assujettis.

– Il est Dieu ! Il est Dieu ! » s’exclament-ils tous, pleins de vénération…

631.1

Gerusalemme già arde nel sole meridiano. Un archivolto ombroso è refrigerio alla vista, abbacinata dal sole che percuote i muri bianchi delle case e arroventa il suolo delle strade. E il bianco incandescente dei muri e lo scuro degli archivolti fanno di Gerusalemme una bizzarra pittura in bianco e nero, una vicenda di luci violente e di penombre — che, a contrasto dalla luce violenta, sembrano tenebra — vicenda tormentosa come un’ossessione, perché leva la facoltà di vedere o per troppa luce o per troppa penombra. Si procede a occhi semichiusi, cercando di correre nelle zone di luce e calore, rallentando sotto gli archivolti, dove è necessario andare lenti perché il contrasto fra le luci e le tenebre fa sì che anche ad occhi aperti nulla si veda.

Così procedono gli apostoli in una città che l’ora meridiana fa deserta. E sudano e si asciugano il volto e il collo col copricapo, e sbuffano…

Ma, quando devono uscire dalla città, cessa per loro il ristoro degli archivolti. La strada, che rasenta le mura e che si perde verso nord e verso sud come un nastro abbacinante di polvere incandescente, dà l’impressione di un terreno di fornace. Se ne alza un calore di forno, un calore che asciuga i polmoni. Il torrentello che è oltre le mura ha un filo d’acqua al centro di un greto di sassi, che il sole fa bianchi come tanti teschi calcinati. Gli apostoli si precipitano a quel filo d’acqua e ne bevono. Vi immergono il copricapo, se lo mettono gocciante in testa dopo essersi lavato il volto. Vi sguazzano dentro, in quel filo d’acqua, coi piedi che si sono scalzati. Ma sì! È un refrigerio molto meschino. L’acqua è calda come fosse versata da un paiolo appeso su una fiamma. Ed essi lo dicono: «È calda e poca. Sa di fango e di borit. Quando è così poca, trattiene il sapore dei bucati fatti all’alba».

631.2

Intraprendono la salita del Golgota. Dell’arso Golgota sul quale il sole ardente ha seccato quel poco d’erba che pareva una peluria rara sul monte giallastro un quindici giorni prima. Ora solo i rigidi e rarissimi ciuffetti di piante spinose, tutte aculei e niente foglie, drizzano qua e là le loro dita da scheletri dissotterrati, di un verde che è giallo per la polvere del monte, proprio simili ad ossa appena tratte da terra. Sì. Sembrano proprio mazzetti di ossa calcinate piantati nel suolo. Ve ne è uno che, dopo un due palmi di bastone diritto, ha un gomito improvviso che termina in cinque stecchi dopo una specie di paletta. Sembra proprio una mano scheletrita, tesa ad afferrare chi passa e a trattenerlo in quel luogo d’incubo.

«Volete fare la via lunga o la corta?», chiede Giovanni che è l’unico che abbia già asceso quel monte.

«La più corta! La più corta! Facciamo presto! Qui si muore di calore!», dicono tutti meno lo Zelote e Giacomo d’Alfeo.

«Andiamo!».

Le pietre della strada selciata sono roventi come piastre tratte da un fuoco.

«Ma non si può andare avanti qui! Non si può!», dicono dopo pochi metri.

«Eppure il Signore è salito sin là, dove è quel cespuglio di pruni, ed era già ferito e aveva la croce addosso», fa osservare Giovanni, che piange da quando è sul Calvario.

Proseguono. Ma poi si buttano a terra sfiniti, boccheggianti. I copricapi, bagnati nel rio, sono già asciugati dal sole; in cambio le vesti si chiazzano di sudore.

«Troppo ripida e troppo ardente!», soffia Bartolomeo.

«Sì. Troppo!», conferma Matteo che è congestionato.

«Per il sole è tutto uguale. Ma per la salita prendiamo quella via. È più lunga ma meno faticosa. Anche Longino la prese per poter fare che il Signore salisse. Vedete lì, lì dove è quella pietra un po’ scura? Lì è caduto il Signore e lo credemmo morto, noi che guardavamo da là, a settentrione, là, vedete?, dove è quell’incavo prima che la costa si alzi ripida. Non si muoveva più. Oh! il grido della Madre! Mi risuona qui! Non lo dimenticherò mai quel grido! Non ne dimenticherò uno dei suoi gemiti… Ah! vi sono cose che fanno vegliardi in un’ora e dànno la misura del dolore del mondo… Su, venite! Meno di voi ha sostato il nostro Martire Signore!», incita Giovanni.

631.3

Si alzano sbalorditi e lo seguono sino all’intersecazione della via selciata col sentiero a spirale, e piegano per questo. Sì. È meno ripido. Ma quanto al sole! E ancor più forte ne è il calore, dato che la costa, che esso sentiero costeggia, riverbera i suoi fuochi sui viandanti già bruciati dal sole.

«Ma perché farci salire qui a quest’ora?! Non poteva farci venire all’alba, appena c’era luce, per vedere dove si posavano i piedi? Tanto! Eravamo fuor dalle mura e potevamo venire senza attendere l’apertura delle porte». Si lamentano e brontolano fra loro.

Uomini, ancora e sempre uomini, adesso, dopo la tragedia del Venerdì Santo, che è tragedia della loro umanità orgogliosa e vile, più ancora di tragedia del Cristo, sempre eroe e vittorioso anche nel morire; uomini come prima, quando si inebbriavano dei gridi di osanna delle folle e gongolavano pensando alle feste e ai banchetti sontuosi in casa di Lazzaro… Sordi, ciechi, ottusi a tutti i segni e avvertimenti di prossima tempesta.

Giacomo d’Alfeo e lo Zelote tacciono piangendo. Anche Andrea non si lamenta più dopo le ultime parole di Giovanni. E anche ora parla Giovanni, ricordando, e nel ricordare è un ammonire fraterno, un esortare a non lagnarsi…

Dice: «È l’ora in cui Egli è salito qui. E camminava già da molto. Oh! potrei dire che, da quando uscì dal Cenacolo, non ebbe più attimo di riposo! Ed era ben caldo quel giorno! C’era l’afa del prossimo temporale… Ed Egli ardeva di febbre. Niche dice che ebbe l’impressione di toccare un fuoco quando gli posò sul volto il lino. Deve essere per qui il luogo dove Egli incontrò le donne… Noi, dal lato opposto, non vedemmo l’incontro. Ma, da come mi dissero Niche e le altre… Su. Andiamo! Pensate che le romane, use alla lettiga, percorsero a piedi questa via stando al sole dal mattino, dall’ora di terza, quando fu condannato. Oh! precedettero tutti, esse, le pagane, mandando schiavi ad avvertire le altre che si erano assentate per qualche motivo…».

631.4

Procedono… Un martirio di fuoco quella via! Barcollano persino.

Pietro dice: «Se Egli non opera miracolo, cadremo per colpo di sole».

«Sì. Ho il cuore che mi scoppia nella gola», conferma Matteo.

Bartolomeo non parla più. Pare ubriaco. Giovanni lo prende per un gomito e lo sorregge come faceva con la Madre nel Venerdì cruento. E conforta: «Fra poco è un poco d’ombra. Là dove condussi la Madre. Riposeremo là».

Vanno. Sempre più lenti…

Eccoli contro il masso dove era Maria. E Giovanni lo dice. Infatti vi è un poco d’ombra. Ma l’aria è immota e rovente.

«Ci fosse almeno un gambo d’anaci, una foglia di menta, un filo d’erba! Ho la bocca simile a pergamena messa presso una fiamma. Ma nulla! Nulla!», geme Tommaso che ha persino le vene turgide al collo e alla fronte.

«Darei quanto mi resta di vita per una stilla d’acqua», dice Giacomo di Zebedeo.

Giuda Taddeo ha un alto scoppio di pianto e grida: «Povero fratello mio, quanto soffristi! Ha detto… ha detto, lo ricordate?, che moriva di sete! Oh! ora comprendo! Non avevo compreso l’estensione di quelle parole! Moriva di sete! E non ci fu chi gli dette, mentre poteva bere ancora, un sorso d’acqua! E aveva la febbre, Egli, oltre il sole!».

«Giovanna gli aveva portato un ristoro…», dice Andrea.

«Non poteva più bere, ormai! Non poteva più parlare… Quando si incontrò con la Madre, là, a dieci passi da noi, non poté che dire: “Mamma!” e non poté darle un bacio, neppur da lontano, nonostante che Simone di Cirene lo liberasse dalla croce. Aveva le labbra dure dalle ferite, arse… Oh! io vedevo bene, da oltre la fila dei legionari! Perché io non passai qui. Avrei preso io la sua croce, se mi avessero lasciato passare! Ma temevano di me… e della folla che ci voleva lapidare… Non poteva parlare… non bere… non baciare… Non poteva quasi più guardare coi suoi occhi dolorosi fra le croste del sangue che scendeva dalla fronte!… Aveva una lacerazione nella veste, al ginocchio, e si vedeva il ginocchio aperto, sanguinante… Aveva le mani gonfie e ferite… Aveva ferito il mento e una guancia… La croce aveva fatto una piaga sulla spalla già aperta dalle battiture… Aveva ferita la cintura dalle funi… Aveva i capelli goccianti del sangue tratto dalle spine… Aveva…».

«Taci! Taci! Non ti si può udire! Taci! Te ne prego e te ne comando!», urla Pietro che pare alla tortura.

«Non mi si può udire! Non mi potete udire! Ma io l’ho dovuto vedere e sentire nei suoi spasimi! E la Madre? E la Madre, allora?».

Curvano il capo singhiozzando e riprendono ad andare, ad andare… Per loro non si lamentano più. Ma piangono ormai tutti sui dolori di Cristo.

631.5

Eccoli in cima. Alla prima piazzuola: una lastra di fuoco. Il riverbero è tale che pare che la terra tremoli, per quel fenomeno del sole sulle sabbie accese dei deserti.

«Venite. Saliamo di qua. Qui ci fece passare il centurione. Anche io. Mi credette figlio di Maria. Le donne erano là. E lì i pastori. E lì i giudei…». Giovanni indica i luoghi e termina: «Ma la folla era giù, giù, copriva la china sino a valle, sino alla strada. Era sulle mura. Era sulle terrazze presso le mura. Era fin al limite del vedere. Ho visto ciò quando il sole cominciò a velarsi. Prima era come ora, e non potevo vedere…».

Infatti Gerusalemme pare un miraggio tremolante là in basso. L’eccesso di luce le fa da velo a chi la vuol vedere. E Giovanni dice: «In altre ore — Maria di Lazzaro lo ha detto, ma non sapevo quando e perché c’era venuta — si vedono i resti neri delle case incenerite dai fulmini. Le case dei più colpevoli… di molti, almeno fra essi… Ecco! Qui (Giovanni misura i passi, ricostruisce la scena) qui era Longino e qui Maria e io. E qui era la croce del ladrone pentito e là l’altra. E qui furono giuocate le vesti. E lì la Madre cadde quando Egli fu morto… e da qui lo vidi colpire al Cuore (Giovanni diventa pallido come un morto) perché qui era la sua Croce», e si inginocchia al suolo, adorando col volto fra la terra visibilmente scavata per un tratto fatto così:

ossia per quanto era di sanguinoso lungo l’ombra del braccio trasverso della croce e intorno al tronco verticale della stessa. Deve aver fatto un duro lavoro la Maddalena a scavare così tanta terra e per una profondità di almeno un buon palmo, in un terra così dura, mista a sassi e detriti, che ne fanno come una crosta compatta!

Sono tutti gettati al suolo a baciare quella polvere, che ora si bagna di lacrime…

631.6

Ma Giovanni si alza per il primo e, amorosamente spietato, rievoca ogni episodio… Non sente più il sole… Nessuno lo sente più… Parla, e di quando Gesù respinse il vino mirrato, e di quando si denudò e cinse il velo materno, e di quando apparve così duramente flagellato e ferito, e di quando si stese sulla croce e urlò per il primo chiodo, e poi più, perché non soffrisse troppo la Madre, e quando gli lacerarono il polso e slogarono il braccio per tirarlo sino al punto giusto, e poi quando, tutto inchiodato, venne rivoltata la croce per ribadire i chiodi e il peso di essa gravò sul Martire di cui si sentì l’ansito, e poi la croce tornata a rivoltare e innalzata mentre la strascinano, e piombata giù nel buco e rincalzata, e il Corpo che cade giù, lacerando le mani, e la corona che si sposta e lacera il capo, e le parole al Padre dei Cieli, le parole che chiedono perdono per i crocifissori, e che danno perdono al ladrone pentito, e le parole alla Madre e a Giovanni, e la venuta di Giuseppe e Nicodemo, così apertamente eroi nello sfidare tutto un mondo, e il coraggio di Maria di Magdala, e il grido d’angoscia al Padre che lo abbandona, e la sete, e l’aceto col fiele, e l’estrema agonia e il fievole invocare la Mamma, e le parole di Lei, con l’anima già sulle soglie della vita per lo strazio, lo strazio… e la rassegnazione e l’abbandono a Dio, e, orrenda, l’ultima convulsione e il grido che fece tremare il mondo, e il grido di Maria quando lo vide morto…

«Taci! Taci! Taci!», urla Pietro e pare trapassato lui dalla lancia. Anche gli altri pregano: «Taci! Taci!…».

631.7

«Non ho più nulla da dire. Il sacrificio era finito. La sepoltura… strazio nostro e non suo. Non ha valore in essa altro che il dolore della Madre. Il nostro strazio! Merita forse compassione? Diamola a Lui, in luogo di chiedere pietà per noi. Troppo e sempre noi fuggimmo il dolore, le fatiche, gli abbandoni, lasciando tutto ciò a Lui, a Lui solo. In verità fummo discepoli indegni, che lo amammo per la gioia di essere amati, per l’orgoglio di essere grandi nel suo regno, ma che non lo sapemmo amare nel dolore… Ora non più. Qui. Qui dobbiamo giurare, è un altare questo, ed è alto, in faccia al Cielo e alla Terra, che non sarà più così. Ora a Lui la gioia, a noi la croce. Giuriamolo. Solo così daremo pace alle anime nostre. Qui è morto Gesù di Nazaret, il Messia, il Signore, per essere Salvatore e Redentore. Qui muoia l’uomo che noi siamo e risorga il discepolo vero. Sorgete! Giuriamo nel Nome santo di Gesù Cristo di voler abbracciare la sua dottrina sino al saper morire per la redenzione del mondo».

Giovanni pare un serafino. Nel gestire gli è caduto il copricapo, e il capo biondo splende al sole. È salito su dei detriti gettati da un lato, forse i puntelli delle croci dei ladroni, e ha involontariamente preso la posa a braccia aperte che ha sovente Gesù nel suo ammaestrare, e specie la posa che aveva sulla croce. Gli altri lo guardano, così bello, così ardente, così giovane, il più giovane di tutti, e così maturo spiritualmente. Il Calvario lo ha fatto di età perfetta… Lo guardano e gridano: «Lo giuriamo!». «Preghiamo, allora, perché il Padre convalidi il nostro giuramento: “Padre nostro che sei nei Cieli…”». Il coro delle undici voci si fa sicuro, sempre più sicuro man mano che procede. E Pietro si batte il petto mentre dice: «rimetti a noi i nostri debiti», e tutti si inginocchiano quando dicono l’ultima supplica: «liberaci dal male». Restano così curvi al suolo, meditando…

631.8

Gesù è fra loro. Non ho visto quando e da dove è apparso. Si direbbe dalla parte del monte che è inaccessibile. Splende d’amo­re nella gran luce meridiana e dice: «Chi permane in Me non avrà danno dal Maligno. In verità vi dico che coloro che saranno uniti a Me nel servire l’Altissimo Creatore, il cui desiderio è la salvezza di ogni uomo, potranno scacciare i demoni, rendere innocui rettili e veleni, passare fra le fiere e le fiamme senza averne danno, sinché Dio vuole che restino sulla Terra a servirlo». «Quando sei venuto, Signore?», dicono chinando il capo ma rimanendo in ginocchio.

«Mi ha chiamato il vostro giuramento. E ora, ora che i piedi dei miei apostoli hanno calcato queste zolle, scendete rapidi alla città, al Cenacolo. A sera partiranno le donne di Galilea con mia Madre. Tu e Giovanni andrete con esse. Ci ritroveremo tutti uniti, in Galilea, sul Tabor», dice allo Zelote e a Giovanni.

«Quando, Signore?».

«Giovanni lo saprà e ve lo dirà».

«Ci lasci, Signore? Non ci benedici? Abbiamo tanto bisogno della tua benedizione».

«Qui e al Cenacolo ve la darò. Prostratevi!».

Li benedice e il fulgore del sole lo avvolge come nella Trasfigurazione, solo che qui lo nasconde. Gesù non c’è più.

Essi alzano il capo. Più nulla: sole e terra arsa… «Alziamoci e andiamo! Se ne è andato!», dicono con tristezza.

«Sempre più breve il suo stare fra noi!».

«Ma oggi pareva più contento di ieri sera. Non ti è parso, fratello?», chiede il Taddeo a Giacomo d’Alfeo.

«Lo ha fatto contento il nostro giuramento. Benedetto te, Giovanni, che ce lo hai fatto fare!», dice Pietro abbracciando Giovanni.

«Io speravo che Egli parlasse della sua Passione! Perché ci ha fatti venire qui per non dire nulla, poi?», dice Tommaso.

«Lo chiederemo a Lui questa sera», dice Andrea.

«Sì. Ma ora andiamo. Lunga è la via e vogliamo stare un poco con Maria prima che Ella se ne vada», dice Giacomo d’Alfeo.

«Un’altra dolcezza che finisce!», sospira il Taddeo.

«Orfani rimaniamo! Come faremo?».

Si volgono a Giovanni e allo Zelote e, con una punta di invidia nella voce, dicono: «Voi, almeno, andate con la Madre! E restate con Lei, sempre».

Giovanni fa un atto come per dire: «Così è».

Ma essi, che non hanno invidia malevola ma buona, confessano subito: «È giusto, però. Perché tu eri qui con Lei e tu hai rinunciato ad esservi per ubbidienza. Noi…».

631.9

Incominciano a scendere. Ma, messo piede sulla seconda piazzuola, la più bassa, vedono una donna che vi accede sotto al sole dalla via ripida e che li squadra senza parlare, dirigendosi sicura alla piazzuola più alta.

«Già qualcuno viene qui! Non è Maria soltanto che viene. Ma che fa? Piange, cercando al suolo. Che sia una che ha perduto qualcosa, quel giorno?», si chiedono. Potrebbe essere, infatti, perché non si vede chi è. Il volto della donna è velatissimo.

Tommaso alza il suo robusto vocione: «Donna! Che hai perduto?».

«Nulla. Cerco il posto della croce del Signore. Ho un fratello morente e non c’è più il Maestro buono sulla Terra…», piange nel suo velo. «Gli uomini lo hanno scacciato!».

«È risorto, donna. C’è per sempre».

«Lo so che c’è per sempre. Perché è Dio, e Dio non perisce. Ma non è più fra noi. Un mondo non lo ha voluto ed Egli se ne è andato. Un mondo lo ha rinnegato, persino i suoi discepoli lo hanno abbandonato come fosse un ladrone, ed Egli ha abbandonato il mondo. E io vengo a cercare un poco del suo Sangue. Io ho fede che questo lo guarirà il mio fratello. Più dell’imposizione delle mani dei suoi discepoli, perché non credo più che essi possano fare prodigi dopo che furono infedeli».

«Il Signore fu qui poco fa, donna. Egli è risorto in anima e corpo ed è ancora fra noi. Il profumo della sua benedizione è ancora su noi. Guarda, qui Egli posava i suoi piedi or è poco», dice Giovanni.

«No. Io cerco una stilla del suo Sangue. Io non ero qui e non so il luogo…», curva, cerca al suolo.

Giovanni le dice: «Questo era il punto della sua croce. Io c’ero».

«C’eri? Come amico o come crocifissore? Si dice che uno solo dei suoi discepoli prediletti fosse sotto la sua croce e pochi altri discepoli fedeli con lui, qui presso. Ma non vorrei parlare con un suo crocifissore».

«Non lo sono, donna. Guarda, qui dove era la croce è ancor terra rossa di sangue, nonostante l’abbiano scavata. Tanto era il sangue che perse che penetrò fondo. Tieni. E la tua fede abbia premio». Giovanni ha scavato con le dita nel foro dove era la croce e ne ha estratto del terriccio rossastro, che la donna raccoglie in un piccolo lino, ringraziando e andandosene lesta col suo tesoro.

«Hai fatto bene a non rivelare chi siamo».

«Perché non hai detto chi eri?», dicono gli apostoli. Come sempre, il pensiero umano è contrastante.

Giovanni li guarda e non parla. Si avvia per primo giù per la ripida strada selciata.

631.10

Se più facile è scendere che salire, feroce è ancora il sole e, quando sono giù, ai piedi del Golgota, sono proprio assetati. Ma delle pecore sono nel rio e dei pastori con esse, usciti certo da qualche stabbio vicino per il pascolo avanti sera. L’acqua è torbida, impossibile a bersi.

La sete è tale che Bartolomeo si rivolge a un pastore dicendo: «Hai un sorso d’acqua nella tua fiasca?».

L’uomo li guarda. Severo. E tace.

«Un poco di latte, allora. Le mammelle delle tue bestie sono turgide. Lo pagheremo. Avremmo voluto liquido gelato, ma basta bere».

«Non ho acqua né latte per quelli che hanno abbandonato il loro Maestro. Vi riconosco, sapete? Vi ho visti e ascoltati a Betsur un giorno. Tu, proprio tu, che chiedi… Ma non vi vidi quando incontrai quelli che portarono giù l’Ucciso. Questo solo c’era. Non ci fu acqua per Lui, mi dissero quelli che furono sul monte. Neppure per voi c’è acqua». Fischia al suo cane, raduna le pecore e va verso nord, dove hanno inizio delle elevazioni coperte di ulivi e sparse d’erba.

Gli apostoli, accasciati, valicano il ponte ed entrano in città.

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Camminano rasente ai muri, il copricapo molto sugli occhi, un poco curvi. Perché ora le vie si tornano a rianimare di pedoni, essendo passato il gran caldo delle prime ore del pomeriggio.

Ma tutta la città è da traversare, prima di arrivare alla casa del Cenacolo, e troppi sono quelli che conoscono gli apostoli perché il loro passare possa avvenire senza incidenti. E presto avviene che una risata sferzante li raggiunga mentre uno scriba (credevo proprio di non averne più a vedere, e ne ero felice) grida alla gente, che è numerosa in quello stretto crocicchio dove chioccola una fonte: «Eccoli! Guardate! Ecco i resti dell’esercito del gran re! I prodi imbelli. I discepoli del seduttore. Sprezzo e derisione su loro. E la compassione che si ha per i folli!».

È l’inizio di una ridda di scherni. Chi grida: «Dove eravate mentre Egli aveva la sua pena?»; e chi: «Persuasi ora che Egli era un falso profeta?»; e chi: «Invano lo avete trafugato e nascosto! Spenta è l’idea. Il Nazareno è morto. Il Galileo è stato fulminato da Jeové. E voi con Lui»; e chi con falsa pietà: «Ma lasciateli stare. Essi se ne sono avveduti e pentiti, troppo tardi, ma sempre in tempo per fuggire all’ora buona!»; e chi arringa il popolo minuto, per lo più composto di donne che paiono propense a parteggiare per gli apostoli, dicendo: «Voi, che dubitate ancora della giustizia nostra, vi serva di luce l’atto dei più fidi seguaci del Nazareno. Se Egli fosse stato Dio, li avrebbe fortificati. Se essi lo avessero conosciuto per il vero Messia, non sarebbero fuggiti, pensando che forza umana non poteva trionfare sul Cristo. Invece Egli è morto al cospetto del popolo. E invano è stato trafugato il cadavere dopo aver assalito le guardie che si erano addormentate. Chiedetelo alle guardie, se così non fu. Egli è morto, e dispersa è la sua gente, e grande è agli occhi dell’Altissimo colui che libera il suolo santo di Gerusalemme dalle ultime vestigie di Lui. Anatema sui seguaci del Nazareno! Mano alle pietre, o popolo santo, e si lapidino costoro fuor dalle mura».

È troppo per l’ancor troppo malfermo coraggio degli apostoli! Si sono già alquanto arretrati verso le mura per non fomentare la sommossa con una imprudente sfida agli accusatori. Ma ora, più che prudenza, è paura che vince. E volgono le spalle, salvandosi con la fuga in direzione della porta. Giacomo d’Alfeo e Giacomo di Zebedeo, con Giovanni, Pietro e lo Zelote, sono quelli che, più calmi e padroni di se stessi, seguono i compagni senza correre. E qualche pietra li raggiunge prima che escano dalla porta, e soprattutto li colpiscono molte lordure.

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Le guardie, che escono dal loro posto, fanno sì che oltre le mura non siano inseguiti. Ma essi corrono, corrono e si rifugiano nel pometo di Giuseppe, là dove era il Sepolcro.

Il posto è quieto, silenzioso, dolce è la luce sotto le piante, che in quei giorni hanno messo foglia ancor rada, ma così smeraldina da fare un velo di color soave sotto i fusti robusti. Si gettano a terra per farsi passare il gran batticuore.

In fondo all’ortaglia un uomo zappa e rincalza delle verdure, aiutato da un giovinetto, e non si accorge di loro, che si sono nascosti dietro una siepe, altro che quando, dopo aver scrutato il cielo e aver detto forte: «Vieni, Giuseppe, e porta l’asino per attaccarlo al bindolo», si dirige verso di loro, là dove, nascosto in un ciuffo di rovi che l’ombreggiano, è un rustico pozzo. «Che fate? Chi siete? Che volete nell’orto di Giuseppe d’Arimatea? E tu, stolto, perché lasci aperto il cancello che Giuseppe vuol chiuso, ora che ce lo ha messo? Non sai che non vuole nessuno qui, dove fu deposto il Signore?».

Dico il vero dicendo che, nella pena di assistere alla deposizione di Gesù e nello stupore della Risurrezione, non avevo mai notato se l’orto oltre alla cinta di una muraglia verde di bossi e rovi avesse o meno un cancello, ma infatti penso sia messo da poco, perché è tutt’affatto nuovo e sostenuto da due piloni quadri dall’intonaco senza segno di vecchiaia. Anche Giuseppe, come Lazzaro, ha messo serrame ai luoghi santificati da Gesù.

Giovanni si alza da terra, insieme allo Zelote e a Giacomo d’Alfeo, e dice senza paura: «Siamo gli apostoli del Signore. Io Giovanni, questo Simone amico di Giuseppe, e questo Giacomo, fratello del Signore. Il Signore ci aveva chiamati al Golgota e siamo andati. Ci ha dato ordine di andare alla casa dove è la Madre, e la folla ci ha inseguiti. Siamo entrati qui, attendendo la sera…».

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«Ma tu sei ferito? E anche tu! e tu! Venite, ché vi soccorra. Avete sete? Siete affannati. Tu, presto, attingi. La prima acqua è pura, mentre poi i secchi la fanno melmosa. E da’ da bere, e poi lava di quelle lattughe fresche e ungile con l’olio che abbiamo per fasciare gli innesti. Non ho altro da darvi. Non ho casa qui. Ma, se attendete, vi condurrò con me…».

«No. No. Dobbiamo andare dal Signore. Dio ti compensi».

Bevono e si lasciano medicare. Sono tutti feriti al capo. Mirano bene i giudei!

«Va’ sulla via tu e guarda, senza parere, se c’è qualche spia», ordina l’ortolano al ragazzo.

«Alcuno, padre. La via è nuda», dice questo tornando.

«Va’ a sbirciare verso la porta e torna svelto».

Coglie degli steli d’anaci e li offre, scusandosi di non aver che legumi, insalata e quegli anaci, posto che i pomi appena han perduto il fiore.

Torna il ragazzo. «Nessuno, padre. La via oltre la porta è vuo­ta».

«Andiamo, allora. Attacca il ciuco al carretto e gettavi sopra le erbe della rimonditura. Sembreremo uomini di ritorno dai campi. Venite con me. Allungherete la strada… Ma è meglio delle sassate».

«In città dovremo entrare sempre…».

«Sì. Ma entreremo da un’altra parte, per vicoli scuri. Venite sicuri».

Chiude con la grande chiave il robusto cancello, fa montare i più vecchi sul carro, dà zappe e rastrelli agli altri, carica di un fascio di potature Tommaso e di una balla di erba Giovanni, e va sicuro, costeggiando le mura verso sud.

«Ma la tua casa… Qui è deserto».

«La casa è di là, dall’altro lato, e non fugge. La donna aspetterà. Prima servo i servi del Signore». Li guarda… «Eh! Tutti si falla! Ho avuto paura anche io! E tutti siamo odiati per il Nome di Lui. Anche Giuseppe. Ma che fa? Dio è con noi. La gente!… Odia e ama. Ama e odia. E poi! Ciò che fa oggi dimentica domani. Già… Se non ci fossero le iene! Ma sono esse che eccitano la gente. Sono pieni di furore perché è risorto. Oh! se si facesse vedere su un pinnacolo del Tempio, per fare il popolo sicuro che è risorto. Perché non lo fa? Io credo. Ma non tutti sanno credere. Ed essi pagano forte chi dice al popolo che Egli è stato trafugato da voi, già corrotto, e seppellito o arso in una grotta di Giosafat».

Sono ormai al lato sud della città, nella valle di Innon.

«Ecco. Là è la porta di Sion. Sapete da lì andare alla casa? È un passo».

«Sappiamo. Dio sia teco per la tua bontà».

«Per me siete sempre i santi del Maestro. Uomini siete e uomo sono. Egli solo è più che Uomo e poté non tremare. So capire e compatire. E dico che voi, deboli oggi, sarete forti domani. La pace a voi».

Li sbarazza delle erbe e degli arnesi agricoli e torna indietro, mentre essi entrano in città svelti come lepri e sgattaiolano per delle viette periferiche verso la casa del Cenacolo.

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Ma le traversie di quel giorno non sono ancora finite. Un gruppo di legionari, diretti alla taverna vicina, li incrocia, e uno li osserva e indica agli altri. E ridono tutti. E, quando quei poveri malmenati discepoli sono costretti a passare loro davanti, uno dei militi addossati alla porta li apostrofa: «Euèh! Non vi ha lapidati il Calvario e gli uomini vi hanno colpiti? Per Giove! Io credevo voi più coraggiosi! E che non temeste nulla, posto che avevate avuto coraggio di salire lassù. Non vi hanno rimproverato le pietre del monte di esser vili? E tanto ardire aveste di salirvi? Sempre ho visto i colpevoli fuggire dai luoghi che ricordano la colpa. La Nemesi li insegue. Ma forse voi vi ha trascinati lassù per farvi tremare d’orrore, oggi, poiché non voleste tremare di pietà, allora».

Una donna, forse la padrona della taverna, si fa sulla porta e ride. Ha una faccia da ribalda che fa paura, e stride forte: «Donne ebree, guardate ciò che spremono i vostri grembi! Dei vili spergiuri, che escon dalle tane quando è finito il pericolo. Ventre romano non concepisce che eroi. Venite, voi, a bere alla grandezza di Roma. Vino eletto e belle fanciulle…», si allontana seguita dai soldati nel suo antro scuro.

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Una ebrea guarda — qualche donna è con le anfore sulla via, dove si sente già il mormorio della fonte presso la casa del Cenacolo — e ha compassione. È una donna anziana. Dice alle compagne: «Hanno sbagliato… Ma tutto un popolo sbagliò». Va dagli apostoli e li saluta: «La pace a voi. Noi non dimentichiamo… Diteci soltanto. È proprio risorto il Maestro?».

«È risorto. Lo giuriamo».

«E allora non temete. Egli è Dio, e Dio vincerà. Pace a voi, fratelli. E dite al Signore che perdoni a questo popolo».

«E voi pregate perché il popolo a noi perdoni e dimentichi lo scandalo che abbiamo dato. Donne, a voi, io Simon Pietro chiedo perdono». Pietro piange…

«Siamo madri e sorelle e spose, uomo. E il tuo peccato è quello dei nostri figli, fratelli e sposi. A tutti usi pietà il Signore».

Li hanno accompagnati alla casa, queste pietose, e bussano esse stesse alla porta serrata. E Gesù apre la porta, empiendo il vano oscuro della sua glorificata persona, e dice: «La pace a voi per la vostra pietà». Le donne sono impietrite dallo stupore. Restano così sinché la porta si rinchiude sugli apostoli e sul Signore. Allora rinvengono.

«Lo hai visto? Era Lui. Bello! Più di prima. E vivo! Non già un fantasma! Un vero uomo. La voce! Il sorriso! Muoveva le mani. Hai visto come erano rosse le ferite? No, gli guardavo il petto respirare proprio come a un vivo. Oh! non ci vengano a dire che non è vero! Andiamo! Andiamo a dirlo alle case! No. Bussiamo qui per vederlo ancora. Che dici mai? È il Figlio di Dio, risorto. Già molto è che a noi, povere donne, si sia mostrato! È con la Madre sua e le discepole e gli apostoli. No. Sì…».

Vincono quelle che sono prudenti. Il gruppo si allontana.

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Gesù intanto è entrato coi suoi apostoli nel Cenacolo. Li osserva. Sorride. Essi si sono levati i copricapi, messi come bende, prima di entrare in casa, e li hanno rimessi come il loro uso impone. Le lividure non si vedono perciò. Si siedono stanchi e silenziosi, più addolorati che stanchi.

«Avete tardato», dice Gesù con dolcezza.

Silenzio.

«Non mi dite nulla? Parlate! Sono sempre Gesù. Già è caduto il vostro ardire di oggi?».

«Oh! Maestro! Signore!», grida Pietro cadendo a ginocchi ai piedi di Gesù. «Non è caduto l’ardire. Ma ci annichila il constatare il danno che abbiamo fatto alla tua Fede. Stritolati siamo!».

«Muore l’orgoglio, nasce l’umiltà. Sorge il conoscimento, cresce l’amore. Non temete. Voi state diventando apostoli ora. Questo Io volevo».

«Ma noi non potremo più fare nulla! Il popolo, e ha ragione, ci deride! Noi abbiamo distrutto la tua opera. Distrutto la tua Chiesa!». Sono tutti angosciati. Gridano, gesticolano…

Gesù è di una calma solenne. Dice, aiutando le parole col gesto: «Pace! Pace! Neppur l’inferno distruggerà la mia Chiesa. Non sarà il vacillar di una pietra, non ancora bene saldata, quella che farà perire l’edificio. Pace! Pace! Voi farete. E bene farete, poiché ora vi conoscete umilmente per quel che siete, poiché ora siete sapienti di una grande sapienza: quella di sapere che ogni atto ha ripercussioni ben vaste, talora incancellabili, e che chi è in alto — ricordate ciò che ho detto[1] del lume che va posto in alto perché sia visto, ma appunto perché da tutti è visto deve aver fiamma pura — e che chi è in alto ha il dovere, più di chi non è in alto, di essere perfetto. Vedete, figli miei? Ciò che passa inosservato o scusabile, se fatto da un fedele, non passa inosservato, e severo è il giudizio del popolo, se fatto da un sacerdote. Ma il vostro futuro cancellerà il vostro passato. Io non vi ho detto parola al Golgota, ma ho lasciato che il mondo parlasse. Io vi conforto. Su, non piangete.

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Rifocillatevi, ora, e lasciate che Io vi guarisca. Così». Sfiora lievemente le teste ferite. Poi dice: «Però è bene che voi vi allontaniate di qua. Per questo ho detto: “Andate al Tabor, in preghiera”. Potrete stare nei paesi vicini e salire ogni aurora in mia attesa».

«Signore, il mondo non crede che Tu sia risorto», dice sottovoce il Taddeo.

«Persuaderò il mondo. Vi aiuterò a vincere il mondo. Voi siatemi fedeli. Non chiedo di più. E benedite chi vi umilia, perché vi santifica».

Spezza il pane, fa le parti, offre e distribuisce: «Ecco il mio viatico a voi che andate. Là ho già preparato il cibo per i miei pellegrini. Fate anche questo, in futuro, con quelli fra voi che partiranno. Siate paterni a tutti i fedeli. Tutto ciò che Io faccio, o vi faccio fare, fatelo voi pure. Anche il viaggio al Calvario, meditando e facendo meditare sulla via dolorosa, fatelo in futuro. Contemplate! Contemplate il mio dolore. Perché è per quello, non per la presente gloria, che vi ho salvati. Di là è Lazzaro con le sorelle. Sono venute a salutare la Madre. Andate voi pure, perché mia Madre parte fra poco col carro di Lazzaro. La pace a voi». Si alza ed esce rapidamente.

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«Signore! Signore!», grida Andrea.

«Che vuoi, fratello?», lo interroga Pietro.

«Volevo chiedergli tante cose. Dirgli di chi chiede guarigioni… Non so! Quando è fra noi non sappiamo dire più nulla!», e corre via a cercare il Signore.

«È vero! Siamo come smemorati!», convengono tutti.

«Eppure è tanto buono con noi. Ci ha detto “figli” con una dolcezza tale che mi ha aperto il cuore!», esclama Giacomo d’Alfeo.

«Ma è così Dio, ora! Tremo quando m’è vicino come fossi presso il Santo dei santi», dice il Taddeo.

Torna Andrea: «Non c’è più. Lo spazio, il tempo e le mura gli sono soggetti».

«È Dio! È Dio!», dicono tutti restando venerabondi…


Notes

  1. ce que j’ai dit en 169.7.

Note

  1. ciò che ho detto, in 169.7.